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Full text of "La franc-maçonnerie en France : des origines à 1815 : tome premier, Les ouvriers de l'idée révolutionnaire (1688-1771)"

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L,  A 


FRANC-MAÇONNERIE 

EN   FRANCE 


FRANC-MAÇONNERIE.    —    T.    I. 


BIBLIOTHÈQUE  D'HISTOIRE  NATIONALE 
Période  révolutionnaire 


GUSTAVE  BORD 


LA 


FRANC-MAÇONNERIE 

EN    FRANCE 

DES    ORIGINES    A   1815 


TOME  PREMIER 

LES  OUVRIERS  DE  L'IDÉE  RÉVOLUTIONNAIRE 

(1688-1771) 


*ff- 


NOUVELLE 
LIBRAIRIE    NATIONALE 

85,    RUE    DE    RENNES,    85 

PARIS 


^ 


Il  a  été  tiré  de  cet  ouvrage  vingt  exemplaires  sur  papier  de 
Hollande  numérotés  de  1  à  20. 


HS 

éô3 


Tous  droits  de  traduction  et  de  reproduction  réservés 
pour  tous  pays. 


A  MADEMOISELLE  LOUISE  SAZERAT 

En  te  dédiant  mon  œuvre,  ma  chère  tante,  il  m* est 
doux  de  me  souvenir  de  la  tendresse  discrète  et  profonde 
dont  tu  as  entouré  mon  heureuse  enfance  et  du  dévoue- 
ment admirable  avec  lequel  tu  mas  consolé  et  soutenu 
dans  les  jours  de  malheur. 

Gustave  BORD. 

Paris,  ce  14  octobre  1908. 


PRÉFACE 


Depuis  plus  d'un  siècle  les  historiens  et  les  écono- 
mistes se  demandent  comment  un  pays,  foncièrement 
monarchique  et  catholique  comme  la  France,  a  pu 
brusquement  changer  d'idéal  et  de  foi.  Suivant  leurs 
passions  politiques  ou  religieuses,  ils  ont  donné  à  ce 
phénomène  social  les  causes  les  plus  diverses. 

Il  est  hors  de  toute  discussion  que  la  société  fran- 
çaise était  gravement  malade  à  la  fin  du  xvnie  siècle, 
puisque  de  son  sein  sont  sortis  les  doctrines  et  les  ac- 
teurs de  la  Révolution.  Ce  qu'il  nous  paraît  important 
de  savoir,  ce  n'est  donc  pas  si  le  corps  social  était  con- 
taminé, mais  de  quel  mal  il  était  atteint.  Se  mourait-il 
de  vieillesse,  avait-il  une  maladie  organique,  ou  était-il 
en  proie  à  une  maladie  infectieuse  résultat  d'une 
inoculation  morbide?  Le  mal  était-il  guérissable  ou 
mortel  ? 

Aucun  historien  de  bonne  foi  n'a  mis  en  doute  que 
l'âme  du  pays  ne  fût  royaliste  et  croyante.  L'Etat  ne 
succombait  pas  faute  de  l'aliment  nécessaire  à  son  fonc- 
tionnement régulier;  le  déficit  financier  n'eut  de  gra- 
vité que  parce  que  les  adversaires  de  la  monarchie 
s'en  firent  une  arme.  En  réalité  le  mal,  superficiel  et 
passager,  n'atteignait  pas  le    gouvernement  dans    son 


VIII  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

essence  même  ;  à  l'extérieur,  la  France  était  puissante 
et  respectée. 

Aucun  pays  ne  jouissait  alors  de  plus  de  libertés, 
d'esprit  de  tolérance,  que  la  France.  Son  gouverne- 
ment paternel  était  d'une  douceur  extrême,  souvent 
même  débonnaire  ;  si  on  le  compare  au  gouverne- 
ment anglais  qu'on  lui  oppose  sans  cesse,  il  faudra 
constater  que  quarante  ans  s'étaient  à  peine  écoulés 
depuis  la  répression  féroce  de  Cumberland  en  Ecosse 
et  des  ministres  en  Irlande.  A  la  veille  de  notre  Révo- 
lution, les  catholiques,  exclus  de  toutes  les  fonctions 
publiques,  étaient  traqués  dans  les  rues  de  Londres 
par  le  sémeutiers  dirigés  par  le  maçon  Gordon.  Le 
moindre  attorney  distribuait,  sous  des  noms  différents, 
des  lettres  de  cachet  dont  les  rois  de  France  se  ser- 
vaient de  moins  en  moins.  Le  régime  barbare  des 
prisons  anglaises,  comparé  au  régime  de  la  Bastille  (1), 
est  tout  à  l'avantage  de  la  forteresse  royale. 

La  jurisprudence  anglaise  avait,  plus  que  la  nôtre, 
envahi  et  déformé  l'esprit  des  lois.  C'est  sur  ce  dernier 
point  cependant  que  le  gouvernement  de  la  France 
était  le  plus  attaquable  ;  mais  les  parlements  étaient 
plus  responsables  que  le  roi  et  son  conseil  de  cet  en- 
combrement judiciaire. 

Dans  la  Grande  Chambre  siégeaient  officiellement 
les  adversaires  les  plus  déclarés  du  pouvoir  royal. 
Néanmoins,  sans  la  faiblesse  incompréhensible  du 
souverain,  la  monarchie  française,  qui  avait  en  maintes 
circonstances    prouvé    sa   souplesse    et    son   énergie, 

(1)  Voir  à  ce  sujet  la  réponse  du  solliciter  Thomas  Evans  au 
pamphlet  de  Linguet  :  Réfutation  des  Mémoires-..,  p.  36,  39  et  54. 


PREFACE  IX 

aurait  dominé  l'esprit  public,  mis  à  la  raison  les 
parlements  révoltés  et  vaincu  l'inertie  de  leur  résis- 
tance. 

Il  faut  donc  qu'un  mal  plus  terrible  ait  envahi  ce 
qu'on  appelait  alors  l'opinion  publique  ;  le  but  de  cette 
étude  est  de  prouver  que  le  mal,  qui  devait  contaminer 
le  monde  entier,  n'était  pas  seulement  la  franc-maçon- 
nerie, mais    surtout  l'esprit  maçonnique. 

C'est  bien  là  qu'il  faut  chercher  les  véritables  causes 
et  l'explication  logique  de  la  Révolution  :  identité  des 
formules  et  des  dogmes  de  la  maçonnerie  avec  les 
principes  de  1789;  les  maçons  et  les  jacobins  emploient 
les  mêmes  manœuvres  et  livrent  les  mêmes  combats. 

L'esprit  maçonnique  enfanta  l'esprit  révolutionnaire, 
voilà  ce  que  nous  voulons  démontrer. 


Je  ne  puis  me  dissimuler  la  difficulté  de  la  tâche  que 
j'ai  entreprise  :  écrire,  au  milieu  de  notre  époque  de 
luttes  ardentes  et  de  haines  féroces,  une  histoire  im- 
partiale de  la  franc-maçonnerie  en  France,  en  un  mot 
faire  œuvre  d'historien  et  non  de  polémiste,  semble 
presque  impossible. 

Cependant  j'ai  voulu,  avec  intensité,  être  juste  envers 
ceux  qui  ne  pensent  pas  comme  moi  ;  par  réaction, 
j'ai  peut-être  été  dur  envers  mes  amis.  Je  m'en  excuse, 
mais  je  ne  le  regrette  pas. 

L'étude  de  la  franc-maçonnerie  a  été  l'objet  de 
nombreux  travaux  depuis  une  cinquantaine  d'années. 

Presque  tous  sont  l'œuvre  d'adversaires  déclarés  de 
l'Ordre  ;  la  plupart  des  auteurs  sont  plus  que  des  ad- 


X  LA  FRANC- MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

versaires,  ils  sont  des  ennemis  acharnés  d'une  institu- 
tion qui  les  irrite,  les  trouble  et  les  déconcerte  d'autant 
plus  que  ceux  qu'ils  attaquent  ne  répondent  jamais, 
laissent  le  débat  sommeiller,  empêchant  ainsi  la 
discussion  sinon  de  naître,  au  moins  de  prendre 
corps. 

Les  francs-maçons,  de  leur  côté,  ont  publié  divers 
ouvrages  sur  l'histoire  de  leur  Ordre  ;  quelques-uns  sont 
bien  faits,  mais  leurs  auteurs  ne  disent  que  ce  qu'ils 
savent  ou  peuvent  dire  :  tels  ceux  de  Ragon,  Rebold. 
Jouaust,  Amiable,  Daruty,  Findel,  Gould,  etc.  La  plu- 
part de  ces  ouvrages  paraissent  même  être  des  œuvres 
de  bonne  foi.  En  dehors  des  documents  manuscrits, 
pour  établir  ma  conviction,  j'ai  eu  souvent  recours  à 
leurs  aveux  et  jamais  aux  accusations  de  leurs  contra- 
dicteurs, lorsque  celles-ci  n'étaient  pas  justifiées  par  des 
preuves  indiscutables. 

Malgré  tous  ces  travaux,  par  suite  de  la  passion  des 
adversaires,  plus  on  a  écrit  sur  la  matière,  plus  on 
semble  avoir  fait  l'obscurité  sur  le  sujet  traité. 

A  quelles  causes  peut-on  attribuer  de  semblables 
résultats  ? 

Est-ce  à  dire,  d'après  l'exposé  ci-dessus,  que  la  franc- 
maçonnerie  soit  injustement  attaquée  ? 

Après  avoir  étudié  la  franc-maçonnerie,  adversaire 
sincère  et  convaincu  de  l'idée  maçonnique,  j'ose  le 
dire,  sans  parti  pris,  je  crois  que  les  causes  de  l'im- 
broglio dans  lequel  les  partis  se  débattent  tiennent  aux 
raisons  suivantes  : 

Les  anti-maçons  déterminés  cherchent  d'une  pari 
ce  qui   n'existe    pas  :  l'origine  juive    de   l'Ordre,    ou 


PRÉFACE  XI 

une  direction  occulte  exclusivement  dans  les  mains  de 
l'Angleterre. 

Les  francs-maçons,  de  leur  côté,  se  taisent  sur  ces 
questions,  parce  qu'ils  n'en  savent  pas  plus  long  sur 
leur  Ordre  que  leurs  adversaires  ;  beaucoup  parmi 
eux  croient  même,  comme  de  simples  profanes,  aux 
fameux  secrets  qu'ils  espèrent  connaître  quand  ils 
seront  plus  avancés  dans  les  hauts  grades.  D'autre 
part,  les  attaques  dirigées  contre  eux  ne  sont  pas 
faites  pour  leur  déplaire  ;  elles  leur  donnent  un 
prestige  mystérieux  dont  ils  profitent  ;  le  silence  des 
frères  apparaît  sousforme  de  prudence  et  de  discrétion, 
alors  qu'il  a  son  origine  uniquement  dans  leur  igno- 
rance qui  devient  ainsi  de  l'habileté. 

Quelle  définition  peut-on  donner  de  la  franc-maçon- 
nerie ? 

La  franc-maçonnerie  est  une  secte  religieuse,  qui,  après 
quelques  tâtonnements,  s'organisa  surtout  en  Europe, 
vers  1725,  professa  une  doctrine  humanitaire  inter- 
nationale et  se  superposa  aux  autres   religions. 

Son  but  avoué  était  de  faire  arriver  les  hommes  à  un 
état  de  perfection  basé  sur  leur  égalité  sous  toutes  les 
formes  ;  indifférente  à  toutes  les  religions,  elle  devait 
conduire  ses  adeptes  à  ne  croire  à  aucune.  La  générali- 
sation de  l'idée  égalitaire  devait  l'amener  rapidement  à 
combattre  même  l'hypothèse  d'une  supériorité  divine  et 
à  nier  l'existence  d'un  être  supérieur,  créateur  du  monde. 
Sa  définition  d'un  Dieu  simplement  architecte  de  l'uni- 
vers supprime,  en  effet,  le  Dieu  créateur,  base  de  toutes 
les  religions  révélées.  Le  Dieu  des  francs-maçons  est 
simplement  la  force  qui  régit  la  matière,  la  loi  de  l'uni- 


XII  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

vers  dont  les  hommes  ne  peuvent  percevoir  que  les  ma- 
nifestations sensibles  à  leurs  sens  limités  ;  un  Dieu 
inconscient  du  bien  et  du  mal,  qui  conduit  ses  adeptes  à 
admettre  qu'il  n'y  a  ni  bien  ni  mal  absolus  en  dehors 
des  nécessités  de  leur  propre  conservation.  Pour  la 
secte,  toute  autorité  est  un  mal  provisoirement  néces- 
saire, qu'on  doit  tendre  à  supprimer  pour  arriver  à  l'état 
de  perfection.  Les  prêtres  de  cette  religion  d'incroyants 
sont  les  initiés  actifs  ;  les  fidèles,  conscients  ou  incons- 
cients, sont  tous  les  profanes  incroyants  et  tous  ceux 
imbus  des  idées  égalitaires,  car  les  uns  et  les  autres 
collaborent  au  succès  du  Grand  Œuvre  :  maçons  par- 
faits, initiés  incomplets  ou  profanes  latomisés  (1). 

La  franc-maçonnerie  ne  tend  donc  pas  à  un  perfec- 
tionnement des  sociétés  existantes  en  tenant  compte  de 
leurs  origines,  de  leur  tempérament,  de  leur  situation, 
mais  à  un  retour  à  l'état  de  nature,  à  une  agglomération 
d'êtres  humains,  satisfaits  d'une  vie  végétative,  pourvu 
que  ses  avantages  matériels  soient  également  répartis 
entre  tous  les  citoyens. 

La  maçonnerie  spéculative,  celle  qui  fera  l'objet  de 
cette  étude,  a  emprunté  ses  idées  et  ses  formules  à  la 
maçonnerie  professionnelle. 

Cette  première  forme  de  la  maçonnerie  corporative, 
assurément  fort  ancienne,  correspondait  à  une  société 
restreinte,  à  une  sélection  hiérarchisée  dans  laquelle 
on  pouvait  appliquer  utilement  les  doctrines  d'égalité. 
Lorsque  la  maçonnerie  s'est  développée,  lorsqu'elle  a 
frappé  aux  portes  de  tous  les  métiers,    de   toutes  les 

(1)  Par  latomisé  nous  désignons  toutes  les  personnes,  initiées 
ou  profanes,   imprégnées  de  la  doctrine  maçonnique. 


PRÉFACE  XIII 

professions,  elle  est  devenue  nécessairement  destruc- 
tive de   tout  ordre  social. 

Sur  elle  sont  venus  se  greffer  tous  les  esprits  curieux 
chimériques.  Cette  lutte  contre  tout  principe  d'autorité 
n'était  certes  pas  nouvelle  ;  au  moyen  âge,  les  pas- 
sionnés de  religion  naturelle  avaient  déjà  pris  toutes 
les  formes  :  métaphysiciens,  ils  s'étaient  jetés  dans 
la  kabbale;  savants,  dans  l'alchimie;  médecins,  dans 
l'empirisme  ;  astronomes,  dans  l'astrologie... 

Plus  tard,  ces  assoiffés  de  liberté  absolue,  d'égalité 
chimérique,  de  libre  examen,  ont  fait  la  Réforme,  le 
jansénisme,  l'encyclopédisme,  la  maçonnerie  et  le 
jacobinisme. 

Si  les  jacobins  ont  été  les  triomphateurs  éphémères 
de  l'entité  égalitaire,  les  francs-maçons  en  ont  été  les 
protagonistes  ;  ce  sont  eux  qui  ont  mis  les  combattants 
en  présence,  après  avoir  préparé  le  terrain  de  telle  façon, 
que   l'ancienne  France  devait  fatalement  succomber. 


La  franc-maçonnerie  n'est  pas  née  spontanément, 
elle  n'est  pas  non  plus  une  société  secrète  antique, 
ayant  traversé  et  dirigé  l'humanité  depuis  des  siècles, 
et  qui  ne  s'est  trahie  que  lorsque  son  succès  s'est  mani- 
festé d'une  manière  indiscutable.  Elle  est  née  lente- 
ment, poursuivant  tour  à  tour  des  buts  différents.  L'or- 
ganisation matérielle  qui  avait  présidé  à  sa  constitu- 
tion prit,  à  la  longue,  la  forme  d'un  dogme,  puis  celle 
d'une  idée  sociale  transformatrice,  lorsque  les  francs- 
maçons  imaginèrent  de  réglementer  l'humanité  sur  le 
modèle  de  leur  Ordre.  C'est  à  partir  de  ce  moment  que 


XIV  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

naquit  vraiment  la  franc-maçonnerie  telle  qu'elle 
existe  encore  de  nos  jours. 

La  franc-maçonnerie  est,  depuis  près  de  deux  siècles, 
une  société  secrète  dans  le  sens  strict  du  mot.  En  effet, 
quel  que  soit  le  but  qu'elle  poursuit,  en  admettant  que 
ce  but  soit  celui  qu'elle  proclame,  elle  fait  tous  ses 
efforts  pour  tenir  cachées  aux  profanes  ses  délibérations 
et  ses  décisions.  Si  toutes  les  fantasmagories  initia- 
tiques qu'elle  pratique  ont  un  caractère  mystérieux 
d'apparence  puérile,  le  serment  du  silence  a  des  consé- 
quences beaucoup  plus  graves,  bien  que  ce  serment  ait 
une  tare  initiale  qui  ne  devrait  pas  affecter  la  cons- 
cience de  ceux  qui  l'ont  prêté,  puisqu'on  le  leur  a  fait 
faire  au  sujet  d'engagements  imprécis,  et  même  non 
révélés. 

Le  caractère  secret  de  la  société  maçonnique  a  en- 
traîné ses  adversaires  dans  une  série  de  fausses  déduc- 
tions. Ils  ont  défini  la  franc-maçonnerie,  sous  prétexte 
qu'elle  cachait  ses  délibérations  :  société  qui  détient  un 
secret  religieux,  social  et  politique,  ayant  un  but  caché 
criminel,  et  ils  se  sont  mis  à  la  recherche  de  ce 
secret. 

«  Faire  croire  qu'on  dispose  d'une  puissance  occulte, 
c'est  presque  la  posséder  »,  est  un  axiome  maçon- 
nique. La  F.-.,  M.*.,  en  effet,  a  intérêt  à  laisser  croire 
qu'elle  a  eu  et  qu'elle  a  encore  une  influence  occulte  lui 
permettant  d'intervenir  dans  l'histoire  des  peuples 
chaque  fois  qu'elle  le  croit  nécessaire.  L'affirmation 
est  facile  à  faire  et  impossible  à  contrôler  ;  le  maçon 
mis  en  mesure  de  faire  la  preuve  de  ses  assertions  se 
retranche  toujours  derrière    son  fameux  secret.    Ceux 


PREFACE  XV 

qui  l'attaquent  sur  ce  terrain  ou  sont  ses  complices, 
ou  font  naïvement  son  jeu  (1). 

Lorsque  le  dogme  maçonnique  naquit,  ses  protago- 
nistes entrevirent-ils  les  résultats  sociaux  que  devait 
produire  son  application?  Assurément  non.  Aucun 
esprit  n'était  assez  profond  et  assez  avisé  pour  prévoir 
le  cataclysme  qu'il  devait  enfanter.  On  peut  même  dire 
que  ceux  qui  soulevèrent  la  tempête  étaient  à  ce  point 
aveugles  qu'ils  furent  les  premières  victimes  de  la  tour- 
mente. Cela  était  logique  ;  cela  était  juste.  N'est-ce  pas 
ainsi  que  la  Providence,  l'Etre  suprême  comme  di- 
saient les  jacobins,  intervient  dans  les  actes  collectifs 
des  hommes  et  fait  marcher  l'histoire  des  peuples  ? 

Nous  aurons  donc  à  prouver,  au  cours  de  cet  ouvrage, 
que,  pendant  tout  le  xvme  siècle,  la  propagation  de 
l'idée  maçonnique  fut  funeste  à  la  société,  et  que  cette 
idée,  néfaste  par  essence,  entraîna,  sans  qu'ils  s'en 
soient  doutés,  la  plupart  des  francs-maçons  beaucoup 
plus  loin  qu'ils  ne  l'avaient  prévu. 

Mais  encore  faut-il  distinguer  les  maçons  conscients 
isolés  dans  une  vingtaine  de  loges,  des  maçons  incons- 
cients qui  furent  le  plus  grand  nombre  :  dans  les 
tableaux  des  loges,  nous  voyons  figurer  des  représen- 
tants de  toutes  les  branches  de  la  société  française  ; 
le  bataillon  serré  s'avance,  maillets  battants,  à  la  con- 

(1)  Un  f.'.-m.*.  me  disait  textuellement  il  y  a  quelques  jours  : 
«  Une  puissance  inconnue  du  vulgaire  mène  le  monde  depuis  sa  créa- 
tion ;  elle  intervient  dans  l'histoire  des  peuples  chaque  fois  que 
cela  est  utile  ;  cette  force  qui  provient  de  Dieu  ou  du  Diable, 
appelez-la  comme  vous  voudrez,  moi  je  l'appelle  la  f.\-m.\  » 
Phénomène  curieux  produit  par  la  latomisation  ;  mon  interlocu- 
teur était  sincère. 


XVI  LA    FRANC-MACONNERIE   EN    FRANCE 

quête  de  l'autorité  pour  la  supprimer.  Côte  à  côte 
défilent  la  noblesse  authentifiée  par  d'Hozier  et  la 
noblesse  née  d'hier,  incertaine  ou  usurpée  ;  le  clergé 
janséniste  et  l'armée  ;  la  magistrature  et  le  barreau  ;  la 
finance  et  l'administration  ;  la  grande  et  la  petite  bour- 
geoisie ;  l'industrie  et  le  commerce... 

Et  lorsqu'on  commence  à  entrevoir  quelle  sera 
l'issue  du  combat,  la  plupart  des  metteurs  en  œuvre  se 
retirent  et  regrettent  l'ouvrage  accompli.  Parmi  les 
maçons,  il  faut  le  reconnaître,  parce  que  c'est  la  vérité 
et  la  justice,  il  y  eut  plus  de  victimes  que  de  bourreaux. 
Si  nous  en  rencontrons  dans  les  assemblées  électorales 
de  1789,  à  la  Bastille  le  14  Juillet  et  à  Versailles  les 
5  et  6  Octobre,  nous  en  trouvons  au  Dix  Août,  aux 
Tuileries;  en  Septembre, ils  sont  foule  dans  les  prisons, 
et  on  en  rencontre  à  Coblentz,  à  Bruxelles  et  à  Londres 
aussi  bien  qu'à  la  Force  ou  à  la  Conciergerie... 


Le  dogme  nouveau,  déformation  d'une  vérité  chré- 
tienne, pouvait,  il  est  vrai,  séduire  des  esprits  généreux 
mais  superficiels.  Mais  aussi  il  développa  outre  mesure 
la  juste  fierté  humaine  et  la  transforma  en  orgueil 
dégradant  et  haineux  ;  transportée  du  cercle  limité 
d'une  loge  à  l'humanité  entière,  l'évolution  de  ce 
dogme  devait  conduire  les  peuples  à  la  haine  de  toutes 
les  supériorités  sur  la  terre  et  à  la  destruction  de  toute 
croyance  en   un  Dieu  créateur  et  maître  du  monde. 

Lorsque  le  Christ  a  enseigné  l'égalité  et  l'humilité, 
il  a  dit  aux  despotes  qui  gouvernaient  le  monde  : 
Devant   mon  Père,  vous  n'êtes  pas  plus  que  ceux  que 


PREFACE  XVII 

vous  dominez  sur  cette  terre.  Cette  idée  sublime  de 
V humble  égalité  qui  régénéra  l'humanité,  se  trans- 
forma, sous  l'impulsion  de  la  franc-maçonnerie, 
en  une  idée  abominable,  parce  que  ceux  qui  la  pilotè- 
rent, enseignèrent  Yégalité  orgueilleuse  et  qu'ils  dirent 
aussi  bien  à  la  brute  qu'à  1  infortuné  :  Vous  êtes  les 
égaux  des  plus  hautes  intelligences,  des  puissants  et 
des  riches  et  vous  êtes  le  nombre. 

C'est  ce  dogme,  chrétien  en  apparence,  que  la  franc- 
maçonnerie  répandit.  A  défaut  d'initiés  proprement 
dits,  la  propagande  égalitaire  fît  des  latomisés  dont  le 
rôle  fut  très  important  :  Diderot,  d'Alembert,  Rousseau, 
la  Baumelle,  Maupertuis,  n'étaient  probablement  pas 
maçons  ;  Voltaire  ne  fut  initié  que  quelques  mois 
avant  sa  mort,  alors  que  son  œuvre  destructrice 
était  faite  depuis  longtemps. 

Le  latomisé  fut,  à  la  vérité,  un  perturbateur  tout 
aussi  terrible  que  l'initié,  car  sa  mentalité  était  la 
cause  fatale  de  l'ambiance  créée  par  le  dogme  égali- 
taire. La  mentalité  maçonnique  agissait  en  effet  autant 
sur  le  latomisé  que  sur  l'initié,  et  la  plupart  d'entre 
eux  ne  voyaient  pas  exactement  la  transformation 
que  la  maçonnerie  avait  produite  sur  leur  intelli- 
gence, sur  leur  volonté  et  sur  leur  conscience.  Voilà 
précisément  où  se  trouve  la  force  de  la  franc-maçonne- 
rie. Là  aussi  est  le  danger  qu'elle  présente. 

Le  premier  effet  de  l'initiation  est  de  purifier  l'ap- 
prenti de  toute  mentalité  chrétienne,  s'il  en  a  une  ; 
puis,  le  compagnon  revenu  à  l'état  dénature,  sans  pré- 
jugés religieux  et  sociaux,  sera  capable,  en  devenant 
maître,  d'avoir  une  mentalité  nouvelle. 

LA    FRANOMACONNERJE.    —    T.    I.  b 


XVIII  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

L'enfant  élevé  dans  la  religion  chrétienne  voit,  juge 
et  agit  chrétiennement  ;  le  maçon  né  à  la  lumière  du 
temple  verra,  jugera  et  agira  maçonniquement. 

Point  n'est  besoin  de  lui  suggérer  ses  actes.  Le  Maître 
Parfait,  en  présence  d'un  jugement  à  porter,  d'une  déci- 
sion à  prendre,  jugera  et  agira  d'instinct,  suivant  les 
préceptes  de  la  maçonnerie,  pour  le  bien  de  l'Ordre;  à 
la  discipline  chrétienne  aura  été  substitué  l'esclavage 
maçonnique,  esclavage  inconscient  et  par  cela  même 
plus  complet,  plus  dangereux.  L'initié  n'a  plus  le  libre 
arbitre  du  chrétien,  il  est  revenu  à  la  fatalité  antique. 
Il  ne  doit  plus  compte  de  ses  actes  à  un  Dieu  omni- 
scient qui  récompense  ou  punit  dans  ce  monde  ou  dans 
l'autre,  mais  à  lui-même,  et  seulement  sur  cette  terre, 
avant  de  s'abîmer  dans  le  néant  d'une  mort  définitive 
et  complète. 

La  brute  et  l'homme  de  génie,  le  bon  et  le  coupable, 
mélangeront  leurs  poussières  semblables  pour  retourner 
à  la  matière  ;  sorti  du  protoplasme,  l'homme  retournera 
à  la  vibration  cosmique.  L'âme,  simple  ferment,  s'a- 
néantira pour  l'éternité.  Rien  avant,  rien  après.  Dans 
un  temps  indéfini,  la  terre  elle-même  retournera  au 
chaos,  roulant  d'un  même  rythme  dans  l'espace,  avec 
la  matière  diffuse,  ce  qui  fut  lame  humaine. 

Tous  les  initiés  ne  peuvent  aller  jusqu  à  ces  dernières 
conséquences  ;  combien  s'arrêtent  en  chemin,  doutant 
aussi  bien  du  néant  que  de  la  vie  éternelle,  indécis,  sans 
croyances  quelconques,  désespérés!  Ceux-là  ne  sont 
plus  des  chrétiens,  mais  ils  ne  sont  pas  des  maçons 
parfaits.  Néanmoins  ils  feront  œuvre  de  maçons,  agi- 
ront en  maçons. 


ii  m-:  face  xix 


Je  n'ignore  pas  qu'en  attaquant  le  dogme  de  l'égalité 
je  prête  le  flanc  à  des  accusations  de  tous  genres  et 
que  les  moindres  sont  de  me  faire  dire,  sous  une  forme 
plus  ou  moins  dédaigneuse,  plus  ou  moins  courtoise, 
que  je  suis  né  trop  tard  dans  un  monde  trop  jeune  ; 
que  je  ne  suis  pas  un  homme  de  progrès;  que  je  suis 
paradoxal  et  peut-être  encore  plus  ou  moins  que  tout 
cela,  selon  qu'on  voudra  l'entendre  moins  ou  plus. 

A  ces  objections  je  répondrai  par  avance,  qu'il  me 
paraît,  au  contraire,  que  je  suis  venu  trop  tôt  dans  un 
monde  déjà  vieux  ;  que  je  ne  crois  pas  à  la  pérennité  de 
ce  qu'on  appelle  l'esprit  nouveau  ;  que  tout  dogme  social 
qui  a  pour  base  la  haine  et  l'orgueil  ne  peut  avoir 
qu'une  existence  momentanée,  que  les  grandes  œuvres 
ne  peuvent  être  faites  que  par  des  hommes  isolés  et 
non  par  des  collectivités,  et  que  les  deux  grandes  forces 
qui  doivent  conduire  les  hommes  de  demain  sont  la 
bonté  et  l'énergie. 

Or,  depuis  que  la  franc-maçonnerie  a  été  introduite 
en  France,  on  n'a  pas  cessé,  sous  prétexte  d'égalité,  de 
conduire  le  grand  troupeau  des  violents  à  l'assaut  de 
toutes  les  supériorités,  sous  prétexte  qu'elles  ne  repré- 
sentaient pas  le  plus  grand  nombre. 


Après  m'être  lu  et  relu,  dans  le  calme  de  ma 
conscience,  je  n'ai  rien  trouvé  à  changer  à  mes  conclu- 
sions, résultat  d'un  labeur  considérable  dont  le  lecteur 
pourra  apprécier  l'étendue. 

Mon  opinion  a  été  formée  et  mon  jugement  rendu  en 
toute  indépendance  de  conscience  ;  pour  être  sincère,  je 


XX  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

dois  reconnaître  cependant  que  ce  n'est  ni  en  spectateur 
indifférent,  ni  en  citoyen  du  monde  que  j'ai  vu  les 
choses  et  les  gens,  mais  en  amant  passionné  de  celle 
qui  est  toujours  pour  moi  la  douce  France,  que  j'aime 
avec  ardeur,  de  cette  généreuse  France  dont  le  grand 
passé  me  fait  espérer  dans  son  avenir,  malgré  toutes 
les  tristesses  de  l'heure  présente. 

Les  épreuves  de  la  vie  et  les  ans  aiguisent  ou  adou- 
cissent les  angles  ;  le  temps  nous  rend  impitoyable  ou 
indulgent.  J'ai  pensé  qu'il  était  plus  habile  et  plus 
particulier  d'essayer  d'être  très  indulgent,  et  je  crois 
l'avoir  été. 

Dans  mon  étude  du  grand  conflit  du  xvine  siècle 
entre  la  maçonnerie  et  le  reste  de  la  France,  je  n'ai 
pas  perdu  de  vue  un  instant  que,  quoi  qu'ils  puissent 
dire  ou  faire,  les  maçons,  vienne  le  temps  de  l'épreuve, 
sentiront  malgré  eux  le  vieux  sang  des  aïeux  circuler 
avec  intensité  et  annihiler  l'éducation  artificielle  et 
provisoire  de  leur  cerveau.  Beaucoup,  parmi  les  adver- 
saires actuels  de  l'Ordre,  ne  sont-ils  pas  les  descen- 
dants des  initiés  du  xvme  siècle? 

Mon  travail  veut  donc  être  une  œuvre  d'apaisement  et, 
quelque  paradoxale  que  ma  prétention  puisse  paraître 
dans  les  circonstances  actuelles,  je  persiste  à  croire 
que  l'on  peut  tenter  encore  de  réconcilier  l'ancienne 
France  avec  la  France  moderne  ;  non  pas  que  je  veuille 
faire  renaître  le  passé  de  toutes  pièces  :  le  passé  est 
mort  ;  mais  la  vie  d'aujourd  hui  n'est-elle  pas  fille  des 
morts  d'hier,  des  morts  d'il  y  a  des  siècles?  Les  fleurs 
poussent  sur  les  tombes. 

Si  je  veux  emprunter  au  passé  les  grandes  lignes  de  sa 


PREFACE  XXI 

tradition  pour  la  direction  à  imprimer  à  nos  destinées 
politiques,  à  l'intérieur  comme  à  l'extérieur,  je  n'imagine 
pas  un  instant  qu'on  puisse  prétendre  à  rétablir  notre 
ancien  état  social.  Par  contre,  je  ne  conçois  pas  non 
plus  qu'on  puisse  ériger  en  axiome  et  encore  moins  en 
dogme ,  que  notre  état  social  actuel  est  une  arche 
sacrée,  renfermant  la  nouvelle  Bible  de  l'humanité 
future. 

Si,  pour  rendre  mon  récit  vivant  et  sincère,  je  me 
suis  attardé  dans  de  menus  détails,  je  n'ai  retenu  dans 
mes  conclusions  que  les  grandes  lignes  de  l'ensemble  ; 
si  j'ai  décrit  des  usages  et  des  fêtes  ridicules,  j'ai  aussi 
indiqué  certaines  solennités  maçonniques  qui  n'étaient 
pas  sans  grandeur. 

Je  considère  qu'il  faut  élever  la  discussion  au-dessus 
de  ces  misères  et  de  ces  actes  louables,  dégager  la 
thèse  maçonnique  et  montrer  résolument,  nettement, 
son  opposition  avec  la  croyance  nécessaire  à  toute 
société. 

La  franc-maçonnerie  s'est  posée,  à  ses  débuts,  en 
défenseur  de  la  religion  naturelle  :  croyance  à  l'au- 
delà,  à  l'existence  de  Dieu  et  à  l'immortalité  de  l'âme, 
basée  sur  les  seules  données  de  la  raison  ;  mais,  peu 
à  peu,  cette  religion  naturelle  s'est  transformée  en 
simple  morale  sociale,  basée  sur  l'éternité  de  la  ma- 
tière, et  après  avoir  passé  par  le  panthéisme,  elle  a 
abouti  à  la  négation  de  la  Divinité. 

Ses  adversaires  croient,  au  contraire,  que  la  religion 
naturelle  n'est  que  l'étape  nécessaire  pour  arriver  à  la 
religion  révélée  et  à  toutes  ses  conséquences  :  croyance 
en  l'au-delà,  basée  sur  les  lumières  surnaturelles  de  la 


XXII  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

S 

raison,  grâce  à  une  intervention  directe  de  la  Divinité, 
apportant  la  vérité  aux  hommes. 

Au  fond,  toute  la  lutte  religieuse  est  circonscrite  à 
l'opposition  de  cette  thèse  à  cette  croyance. 

Au  point  de  vue  social,  l'antagonisme  est  tout  aussi 
tranché. 

En  étudiant  le  développement  des  loges  et  les  trans- 
formations de  leurs  doctrines,  nous  verrons  la  lutte 
s'engager  et  les  résultats  sociaux  obtenus  par  le  triomphe 
des  ateliers  de  la  maçonnerie. 

Sans  prétention  électorale,  je  puis  oser  dire  ce  que 
de  nombreux  esprits,  cultivés  et  sincères,  n'osent  mur- 
murer et  encore  moins  écrire. 

La  doctrine  de  l'égalité  me  révolte,  parce  qu'elle 
conduit  infailliblement  à  la  négation  de  toute  hiérarchie 
indispensable,  parce  qu'elle  nous  ramène  forcément  au 
socialisme  d'Etat,  première  forme  de  toute  société  qui 
sort  des  limbes  de  la  barbarie,  dernier  spasme  de  toute 
société  qui  meurt  ;  parce  qu'elle  détruit  inévitablement 
la  famille  et  l'individualité  ;  parce  qu'elle  a  pour  consé- 
quence inéluctable  la  négation  de  la  supériorité  divine 
qu'elle  remplace  par  la  loi  du  nombre. 


Pour  lutter  contre  de  semblables  doctrines,  le  pouvoir 
seul  peut  intervenir  utilement.  En  France,  moins 
qu'en  tout  autre  pays,  il  ne  peut  se  former  de  sociétés 
pour  défendre  purement  et  simplement  le  gouverne- 
ment constitué.  Si,  par  hasard,  des  essais  sont  tentés, 
ils  aboutiront  à  un  but  opposé  à  celui  qu'on  voudra 
poursuivre.  Les    défenseurs   du  pouvoir  ne  seront  pas 


PREFACE  XXIII 

désintéressés.  Ils  voudront  protéger  et  réclameront  des 
privilèges  ;  en  cas  de  refus,  ils  crieront  à  l'injustice,  à 
l'ingratitude  et  concluront  à  l'inutilité  du  dévouement. 
Les  défenseurs  du  pouvoir  deviendront  ses  pires 
ennemis. 

La  Révolution  accomplie,  au  nom  du  dogme  maçon- 
nique, les  loges  elles-mêmes  n'échapperont  pas  à  cette 
loi  fatale  ;  le  gouvernement  qu'elles  auront  créé,  au 
nom  même  du  dogme  de  l'égalité,  se  refusera  à  leur 
reconnaître  des  privilèges  de  fondateurs  ;  la  Révolution 
se  retournera  contre  eux.  En  ne  tenant  pas  compte  de 
ces  lois  sociales,  l'historien  est  désorienté,  il  ne  com- 
prend pas,  il  trouve  illogiques  toutes  les  hypothèses 
qu'il  peut  imaginer.  Comment  expliquer  autrement, 
en  effet,  que  l'on  retrouve  presque  tous  les  maçons  de 
1788  et  1789,  soit  hors  de  France,  soit  sous  le  couteau 
de  la  guillotine  ? 

Il  faut  reconnaître  aussi  que  la  royauté  fut  cou- 
pable :  non  seulement  le  gouvernement  royal  ne  sup- 
prima pas  la  maçonnerie,  mais  encore  il  l'encouragea. 
Louis  XVI  et  ses  frères  étaient  maçons-protecteurs. 
Depuis  longtemps  les  princes  du  sang  et  la  noblesse 
de  cour  faisaient  partie  de  l'Ordre.  Les  premiers,  et 
avec  eux  les  légitimés,  affectaient  une  soumission 
chagrine  à  la  personne  du  roi.  Au  pied  du  trône,  au 
nom  de  l'égalité,  ils  regrettaient  de  n'être  pas  assis  à 
côté  ou  même  à  la  place  du  roi.  De  leur  côté,  les  repré- 
sentants des  anciennes  grandes  familles,  quasi  royales, 
n'avaient  pas  oublié  qu'il  avait  été  un  temps  où  elles 
marchaient  de  pair  avec  la  maison  de  Bourbon  et  que, 
pour  les  dompter,  il  avait  fallu  Louis  XI,  Richelieu  et 


XXIV  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Louis  XIV.  Combien  souffraient  de  ne  plus  être 
appelés  qu'à  faire  partie  de  la  haute  domesticité  de  la 
couronne  !  Les  intrigues  de  cour  ressemblaient  à  de 
véritables  complots.  On  frondait  le  pouvoir  royal  à 
Chantilly,  à  Berny  et  à  Sceaux,  comme  à  Brunoy,  à 
Bagatelle  et  à  Villers-Cotterets.  Toutes  ces  familles  prin- 
cières  furent  représentées  dans  la  franc-maçonnerie, 
sinon  par  leur  chef,  tout  au  moins  par  ceux  qui  lui 
tenaient  de  près.  L'exemple  fut  suivi  :  Versailles  devint 
une  vaste  loge;  on  coudoyait  le  maçon  aussi  bien  dans 
l'Œil  de-Bœuf  qu'à  l'office  et  au  corps  de  garde.  Hauts 
dignitaires  de  l'armée  et  de  la  magistrature,  maison 
du  roi  et  des  princes,  maison  de  la  reine,  gardes  du 
corps,  chambre  du  roi... 

Tout  ce  monde,  pensionné  de  la  liste  civile,  grouil- 
lant, intriguant,  quémandant,  avait  prêté  serment  tout  à 
la  fois  entre  les  mains  du  vénérable  de  sa  L.\  et  à  la 
personne  du  roi. 

Combien  ne  retrouveront  leur  foi  royaliste  qu'en 
présence  du  malheur  frappant  à  leur  porte  !  Avec  eux 
ils  auront  entraîné  dans  l'abîme  la  monarchie  et  le 
pays  tout  entier  :  le  roi,  l'admirable  noblesse  de  pro- 
vince, la  bourgeoisie  et  le  peuple. 


La  F.*.  M.*,  aurait  été  impuissante  à  produire  ce 
cataclysme,  si  elle  n'avait  été  conduite  et  dominée  par 
son  dogme  égalitaire. 

Dans  notre  premier  volume,  nous  verrons  manœu- 
vrer les  ouvriers  de  l'idée,  ceux  qui  préparèrent  le 
terrain. 


PRÉFACE  XXV 

Dans  le  second,  les  ouvriers  du  fait  bouleverseront 
de  fond  en  comble  le  sol  de  notre  pays  et  seront  englou- 
tis par  l'abîme  qu'ils  auront  creusé. 

Dans  le  troisième  enfin,  nous  verrons  les  ouvriers 
qui  auront  survécu  diriger  encore  la  France  vers 
le  chemin  qu'ils  lui  avaient  tracé  et  continuer  en 
temps  de  paix  violente  la  construction  du  Grand 
Œuvre. 

Avec  la  franc-maçonnerie  nous  aurons  vu  passer 
devant  nos  yeux  l'image  de  tous  les  vices,  et  aussi,  il 
faut  le  reconnaître,  celle  de  beaucoup  de  vertus.  Son 
recrutement  avait  été  multiple  et  varié,  car  elle  avait 
frappé  aussi  bien  aux  portes  des  sociétés  de  plaisirs 
vulgaires  qu'à  celles  qui  avaient  des  aspirations  élevées, 
attirant  à  elle  tout  ce  qui  était  groupement  :  telle 
société  inavouable  est  venue  se  fondre  avec  telle  autre 
société  dont  le  but  était  admirable. 

Dans  quelle  mesure  faut-il  la  blâmer  et  la  louer  ? 
La  maçonnerie  a  été  imprégnée  de  toutes  les  vertus  et 
de  tous  les  vices  de  son  temps,  et,  il  faut  l'avouer,  ceux- 
ci  étaient  les  plus  nombreux. 

Après  avoir  déroulé  devant  les  yeux  du  lecteur  le 
tableau  de  toutes  ces  turpitudes,  que  faudra-t-il  con- 
clure ? 

Que  l'humanité  est  passée  une  fois  de  plus  avec 
toutes  ses  hontes  et  toutes  ses  beautés. 

L'humanité  est  passée,  et  comme  elle  a  souffert,  le 
regard  de  Dieu  lui  a  donné  une  vie  nouvelle. 

L'homme,  pour  être  vraiment  digne  de  ce  nom,  a  plus 
besoin  d'idéal  que  de  pain,  et  c'est  l'idéal  commun  qui 
agrège  les  nations  vivaces  et  généreuses.  Cet  idéal,  il 


XXVI        LA  FRANC-MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

faut  que  nous  le  retrouvions  et  qu'il  prenne  la  place  de 
la  haine  qui  frappe  tout  effort  de  stérilité. 

L'ancienne  France  avait  comme  idéal  la  religion 
catholique  et  la  royauté  traditionnelle.  C'est  delunion 
de  ces  deux  croyances  qu'est  née  la  Patrie  française; 
des  doctrines  maçonniques  ont  pu  nous  la  faire  ou- 
blier momentanément,  mais  je  reste  convaincu  que  la 
France  de  demain  reprendra  ses  anciennes  traditions  ; 
que  celles-ci  seront  d'accord  avec  les  nécessités  du 
inonde  moderne  et  que  notre  pays  redeviendra  la 
nation  énergique  et  généreuse  qu'elle  fut  sous  ses 
rois. 

Gustave  Bord. 

Paris,  le  25  août  1903. 


AVERTISSEMENT 


Les  documents  auxquels  nous  avons  emprunté  les  listes 
de  francs-maçons  citées  dans  cet  ouvrage  sont  trop  nom- 
breux et  trop  divers  pour  que  nous  en  ayons  fait  mention 
dans  des  séries  de  noies  qui  eussent  encombré  inutilement 
presque  chaque  page. 

Pour  remédier  à  cette  omission  volontaire,  nous  nous 
tenons  à  la  disposition  de  tout  représentant  d'un  des 
noms  cités  pour  lui  indiquer  les  sources  auxquelles  nous 
avons  puisé  nos  renseignements. 

Nous  tenons  à  remercier  tout  particulièrement 
MM.  de  Bessonies,  Bon,  Paul  Fesch  et  Augustin  Cochin 
des  nombreux  documents  quils  ont  bien  voulu  nous 
communiquer. 

G.  B. 


LA     FRANC-MAÇONNERIE 

EN    FRANCE 


CHAPITRE    PREMIER 
LES    PRÉCURSEURS 

Le  problème. —  Les  sources  des  doctrines  maçonniques. —  Les  pen- 
seurs :  les  alchimistes.  —  La  pierre  philosophale.  —  L'Alcaest, 
la  Palingénésie  et  l'Homunculus.  —  Les  principaux  alchimistes  ; 
leurs  protecteurs  et  leurs  adversaires .  —  Les  kabbalistes  :  Ray- 
mond Lulle  ;  Thomas  Morus  ;  Paracelse  ;  les  Socins  ;  Andréa  ; 
Robert  Fludd  ;  le  chancelier  Bacon  ;  Pierre  Bayle  ;  Sweden- 
borg ;  Willermoz. 

Qu'est-ce  que  la  franc-maçonnerie  ?  —  Ce  problème 
a  été  souvent  posé  ;  presque  toujours  on  y  a  répondu 
de  façons  différentes,  et  la  multiplicité  des  solutions  a 
fait  la  confusion  et  le  mystère,  au  profit  des  maçons 
et  au  plus  grand  dommage  de  ceux  qui  les  attaquent. 

On  a  voulu  personnifier  la  maçonnerie  dans  une 
succession  de  grands  maîtres  inconnus,  connaissant 
seuls  le  secret  de  l'Ordre  et  seuls  le  dirigeant.  Cette 
société,  d'après  les  uns,  aurait  eu  le  même  but  caché 
et  la  même  organisation  mystérieuse  depuis  son  ori- 
gine; d'après  les  autres,  1  Ordre  n'est  qu'une  société  de 
secours  mutuels  et  de  bienfaisance. 

LA   FRANC-MAÇONNERIE.  —  T.    I.  1 


À  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Les  deux  affirmations  sont  également  fausses  lors- 
qu'on les  rapporte  à  toutes  les  époques  de  la  maçon- 
nerie ;  elles  sont  la  source  de  multiples  erreurs. 

Pour  trouver  la  solution  du  problème,  essayons 
d'abord  de  le  poser. 

N'y  eut-il  qu'une  espèce  de  franc-maçonnerie  ?  Son 
but  fut-il  toujours  le  même  ?  A-t-elle  eu  successive- 
ment un  ou  quelques  chefs  connaissant  seuls  le  secret 
du  but  de  la  société  ? 

Nous  démontrerons  que  d.cvr:  maçonneries  se  succé- 
dèrent :  l'une,  la  plus  ancienne,  composée  de  gens  de 
métier,  de  constructeurs,  et  que  nous  appellerons  cor- 
porative ;  l'autre,  celle  qui  la  remplaça,  composée 
d'amateurs  de  philosophie  et  de  sciences,  que  nous 
appellerons    spéculative  (1). 

La  substitution  ne  se  fît  pas  brusquement  de  la  pre- 
mière à  la  seconde  forme  :  pendant  plusieurs  années 
des  hommes  influents  s'introduisirent  dans  la  première 
pour  s'y  livrer  avec  sécurité  à  leurs  études  souvent  enta- 
chées d'hérésies  ;  d'autres  voulurent  la  dominer  pour  en 
faire  profiter  leur  parti  politique,  qui  fut  pendant  les 
premiers  temps  celui  des  Stuarts.  Ces  maçons,  connus 
sous  le  nom  de  maçons  acceptés,  lorsque  la  substitution 
de  l'ordre  à  la  corporation  aura  lieu,  donneront  nais- 
sance à  deux  courants  différents  :  la  maçonnerie  jacobite 
et  la  maçonnerie  anglaise.  Ces  deux  sœurs  ennemies, 
qui  auraient  dû  représenter  des  adversaires  irréconci- 
liables, après  avoir  poursuivi  des  buts  opposés,  se 
trouveront  confondues,  plus  tard,  par  la  puissance 
du  dogme  fondamental  de  la  Maçonnerie  qui  aura  sub- 
sisté malgré  eux,  parce  qu'une  idée  est  plus  forte  que 

(1)  Les  Anglais  appellent  la  première  opérative.  Nous  avons 
adopté  le  mot  corporative,  qui  nous  paraît  plus  complet,  car  il 
suffit  à  exprimer  que  ces  travailleurs   opéraient  en  corporation. 


LES   PRÉCURSEURS  .) 

les  hommes  et  les  conduit  fatalement  lorsque  cette  idée 
est  vraiment  puissante.  Or,  on  ne  pourra  pas  nier  que, 
si  l'idée  maçonnique  de  l'Egalité  des  hommes  est  socia- 
lement détestable,  elle  n'en  est  pas  moins  forte  et  que  le 
maçon  lui-même  n'a  souvent  qu'un  abri  bien  précaire 
lorsqu'il  a  déchaîné  l'orgueil  de  l'homme  sous  pré- 
texte d'égalité  et  que  le  cyclone  passe  sur  l'humanité 
terrifiée. 

Aussi  bien,  à  celui  qui  les  attaque,  comme  au 
maçon  dont  sa  propre  lumière  a  brouillé  les  yeux,  je 
puis  dire,  après  avoir  étudié  le  problème  sans  haine 
pour  les  hommes  :  le  dogme  maçonnique  est  une  chose 
grave,  une  pensée  dangereuse,  qui  conduit  les  sociétés 
aux  pires  cataclysmes  ;  ne  cherchez  pas  dans  le  maçon, 
tantôt  un  ennemi  de  caste  ou  de  nationalité,  tantôt 
un  ennemi  politique  ou  religieux,  car  il  renferme  en 
même  temps  tous  ces  dangers.  La  f.\-m.\  n'est  pas 
représentée  par  un  homme,  ni  une  classe  d'hommes, 
mais  par  une  idée  néfaste,  la  plus  terrible  qu'on  puisse 
imaginer  :  l'idée  de  l'égalité.  Tuez  l'idée  ;  tuez-la 
d'abord  en  vous  où  elle  a  pénétré,  et  vous  serez  surpris 
de  voir  le  lendemain  que  la  f.\-m.\  n'existe  plus. 

Les  maçons  furent  au  xvme  siècle  les  prêtres  et  les 
soldats  du  dogme  égalitaire.  Sous  le  souffle  de  cette 
idée  ils  ont  exercé  leur  sacerdoce  et  livré  leurs  com- 
bats, pour  la  plupart  inconsciemment.  L'idée  impla- 
cable les  a  entraînés  jusqu'au  bord  de  l'abîme  où  doivent 
succomber  les  sociétés  modernes,  car  le  dogme  de 
l'égalité  est  par  essence  destructeur  de  toute  idée  so- 
ciale. Leurs  adversaires,  envahis  eux-mêmes  par  cette 
idée,  n'ont  pas  osé  jusqu'ici  les  attaquer  sur  ce  terrain, 
qui  est  le  véritable  terrain  de  lutte.  Il  faut  le  recon- 
naître nettement,  franchement,  il  n'y  a  plus' aujourd'hui 
que  deux   adversaires   en  présence   :   les   anarchistes 


4  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

égalitaires  et  ceux  qui  veulent  vivre  en  société  avec  les 
hiérarchies  nécessaires.  Envisagée  sous  ce  point  de  vue, 
l'idée  égalitaire  domine  donc  l'histoire  de  la  f.\-m.\ 
comme  elle  domine  les  destinées  des  nations  modernes. 


La  f.*.-m.\,  telle  qu'elle  fonctionna  pendant  les  pre- 
mières années  du  xvine  siècle,  peut  être  considérée 
comme  un  équipage  de  savants,  vrais  ou  faux,  d'ab- 
stracteurs  de  quintessence,  de  kabbalistes  et  de 
spirites,  qui,  s'étant  réfugiés  sur  un  navire  dont  l'équi- 
page ancien  ne  trouvait  plus  à  s'occuper,  se  firent  ac- 
cepter par  le  capitaine,  peu  à  peu  s'emparèrent  de  la 
manœuvre  et  se  substituèrent  à  l'ancien  équipage.  Si  les 
hommes  disparurent,  leurs  usages  persistèrent,  le  nom 
du  navire  ne  fut  pas  changé,  et  de  la  sorte  une  f.\-m.\ 
de  penseurs  se  substitua  à  une  franc-maçonnerie  de 
constructeurs  maçons. 

Au  moment  du  renouvellement  de  l'équipage,  les 
nouveaux  venus  étaient  les  représentants  des  libres 
penseurs  de  l'époque,  des  empiriques,  précurseurs  des 
hommes  de  science  et  des  kabbalistes  précurseurs 
des  philosophes.  Cette  catégorie  de  curieux  avait 
existé  de  tous  temps,  car  à  toutes  les  époques  il  y  eut 
des  hommes  qui  cherchèrent  à  expliquer  les  phéno- 
mènes de  la  nature  et  à  deviner  le  secret  de  Dieu. 
L'homme,  dès  son  berceau,  voulut  connaître  les  causes 
de  son  origine,  le  but  de  son  existence  et  sa  destinée 
après  sa  mort.  Il  voulut  goûter  au  fruit  de  l'arbre  de  la 
science  du  bien  et  du  mal,  entrer  en  lutte  avec  la 
Divinité,  et  résoudre  un  problème  dont  il  ne  pouvait 
poser  l'équation.  Si  les  sciences  firent  chaque  jour  des 
progrès,  et  si  l'on  parvint  peu  à  peu  à  déchirer  le  voile 


LES    PRÉCURSEURS  .) 

mystérieux  qui  entourait  certains  phénomènes  naturels, 
tels  que  nous  les  voyons,  on  peut  dire  que  les  mystères 
(lui  enveloppent  le  berceau  et  la  tombe  de  l'homme, 
sont  encore  aujourd'hui  aussi  cachés  qu'à  l'aurore  de 
l'humanité. 

Des  hommes  luttèrent  désespérément,  à  la  recher- 
che de  la  vérité  intangible,  s'exaspérèrent,  blasphémè- 
rent et  se  révoltèrent  contre  le  Grand  Inconnu,  contre 
Celui  qui  est.  Dans  tous  les  temps  il  y  eut  des  sectes 
secrètes,  qui  prétendirent  comprendre  les  lois  qui  régis- 
sent l'univers  ;  les  uns  croyaient  véritablement  possé- 
der le  secret  ineffable;  les  autres,  les  habiles,  faisaient 
de  leurs  mystères  un  appât  pour  la  foule,  prétendant 
ainsi  la  dominer  et  la  conduire  ;  tout  au  moins  avaient- 
ils  trouvé  le  moyen  de  l'utiliser  à  leur  profit. 

Cette  lutte  est,  comme  nous  l'avons  dit,  vieille 
comme  le  monde  ;  à  travers  le  temps  et  à  travers  les 
peuples,  elle  exista  sans  discontinuité  ;  pour  nous  en 
tenir  aux  temps  modernes,  au  xvie  siècle  les  lutteurs 
s'appelèrent  les  réformés,  fils  des  omniscients  du  moyen 
âge.  A  ce  titre  ils  furent  les  précurseurs  de  la  f.*.-m.\ 
On  peut  donc  dire  que  la  secte  des  francs-maçons 
incarne  depuis  le  xvme  siècle  les  sectes  recherchant 
le  secret  éternel  de  l'humanité,  de  ces  gens  qui,  ne 
pouvant  comprendre  et  définir  Dieu,  las  de  le  chercher 
en  vain,  trouvèrent  plus  commode  de  magnifier  la 
matière  et  de  déifier  l'homme. 

Envisagée  sous  ce  point  de  vue,  la  f.\-m.\  est  une 
secte  fort  ancienne,  la  plus  ancienne  même  qui  fût  sur 
la  terre  ;  sectaires  en  lutte  acharnée  avec  l'homme 
résigné  qui  se  contente  du  travail,  de  l'amour,  de  la 
foi  et  de  la  prière,  les  francs-maçons  représentent,  au 
point  de  vue  chrétien,  l'orgueil  de  l'homme,  l'esprit  du 
mal,  la  révolte  contre  Dieu. 


6  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Un  f.'.-m.*.  homme  d'esprit,  de  scienceet  de  bonne  foi, 
car  je  prétends  qu'il  en  existe,  avec  lequel  je  discutais 
ces  problèmes  décevants,  en  matière  de  conclusions, 
me  tint  le  discours  suivant  : 

—  Je  ne  discute  ni  ne   critique  vos   dogmes  et  vos 
croyances  de  catholique  ;  ils  me  sont  indifférents.  Que 
ceux  qui  y  croient  les  pratiquent,  c'est  ce  qu'ils  ont  de 
mieux  à  faire  ;  ils  ne  viendront  jamais  parmi  nous  ;  ils 
s'imaginent  être  avec  les  bons  anges,  soumis  à  la  grande 
force  de  l'Architecte  de  l'Univers  que  vous  appelez  Dieu  ; 
ils  sont  convaincus  que  nous  sommes  les  adeptes  des 
démons,  Lucifer,  Asmodée  ou  Belphégor  ;  soit,  je  l'ad- 
mets et  je  prendrai  les  arguments  qui  vont  suivre  dans 
vos    propres    croyances,    dans    vos    livres    saints.    Or 
qu'enseignez-vous  ?    que   les    démons  sont   des   anges 
déchus  et  qu'au  jugement  dernier   ils  seront  vaincus 
par  les  bons  anges,  milice  de  votre  divinité.  Ce  jour- 
là,  ils  redeviendront  de  bons  anges  et  votre  Dieu,  que 
vous  dites  magnifique  et  plein  de  miséricorde,  leur  par- 
donnera leurs  méfaits  passés  ;  il  pardonnera  également, 
sans  cela  il  serait  injuste,  à  tous  ceux  qui  auront  été 
entraînés   par   les   démons  ;    donc  le   résultat  sera  le 
même  pour  nous  que  pour  vous  ;  nous  jouirons  de  la 
gloire  éternelle  et  de  la  contemplation  de  Dieu  !  Seule- 
ment vous  aurez  joué    un   métier  de  dupes,   et   nous 
aurons  été  des  gens  avisés. 

Alors  que  vos  bons  anges  vous  enseignent  la  rési- 
gnation et  l'humilité,  la  sanctification  de  la  bonne 
souffrance  pour  mériter  de  franchir  la  porte  de  votre 
Paradis  des  petits  et  des  humbles,  nos  démons  nous 
conduisent  au  même  séjour  de  délice,  par  des  chemins 
jonchés  de  roses  sans  épines,  la  tête  haute  ;  c'est  après 
une  lutte  d'égal  à  égal  que  nous  prenons  d'assaut  votre 
Paradis.  Tout  au   plus  serons-nous  obligés  d'attendre 


LES    PRECURSEURS  7 

pour  y  entrer  le  jour  du  grand  jugement;  mais  d'ici  là, 

il  est  à  croire  que  le  démon  qui  nous  aura  conduits 
dans  ce  monde  nous  protégera  dans  l'autre.  Et,  si  la 
mort  terrestre  est  l'anéantissement  de  l'être  humain, 
comme  beaucoup  le  croient,  nous  aurons  été  plus 
habiles  que  vous  en  évitant  des  souffrances  inutiles. 

Aussi,  ne  cherchons-nous  pas  à  recruter  parmi  vous 
des  adeptes  ;  impassibles,  nous  attendons  que  ceux  qui 
n'ont  pas  trouvé  dans  la  pratique  de  vos  croyances  le 
bonheur,  la  consolation,  la  paix  ou  la  satisfaction, 
viennent  à  nous.  Ceux-là,  laissez-les-nous  ;  ils  nous 
appartiennent  ;  nous  n'en  ferons  pas  des  humbles,  mais 
des  hommes  libres, heureux  à  notre  façon  qui  deviendra 
la  leur.  Quel  droit  oserez- vous  invoquer  pour  y  mettre 
obstacle  ? 

—  Je  conviens,  lui  répondis-je,  que  le  problème  ainsi 
posé  peut  convaincre  ceux  qui  ne  croient  pas  et  les 
entraîner  dans  votre  sillage  ;  mais  pour  cela  il  faudrait 
nous  entendre  sur  ce  que  nous  appelons  Dieu  ;  pour 
vous,  c'est  un  simple  Architecte  de  l'Univers  ;  pour  moi, 
c'est  le  Créateur  de  toute  chose.  Votre  Dieu,  par  défi- 
nition, est  la  négation  du  mien.  La  puissance  du  vôtre 
est  limitée  puisqu'il  se  borne  à  utiliser  la  matière  qu'il 
n'a  pas  créée,  qu'il  est  même  impuissant  à  créer.  Enfin, 
puisque  vous  invoquez  les  textes  des  livres  saints,  ou 
avez-vous  lu  que,  après  avoir  été  terrassé,  le  démon 
deviendra  un  bon  ange  ?  Vous  le  déduisez  par  un  rai- 
sonnement spécieux,  en  invoquant  l'esprit  de  miséri- 
corde d'un  Dieu  auquel  vous  ne  croyez  pas,  oubliant 
ainsi  qu'il  est  aussi  un  Dieu  de  justice.  Je  préfère 
demeurer  avec  le  poète,  ce  devin  de  l'au-delà,  qui  fait 
gémir  sa  lyre  en  nous  enseignant  qu'on  n'est  un  homme 
que  lorsqu'on  a  souffert  et  lorsqu'on  a  pleuré.  Pour 
concevoir  le  bonheur  il  faut  pouvoir  le  comparer  à  ce 


8  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

qui  n'est  pas  le  bonheur,  et  ne  le  supprimerait-on  pas 
en  supprimant  la  souffrance  ?  Enfin,  il  resterait  à  prou- 
ver qu'il  suffît  d'être  initié  pour  ne  connaître  ni  les 
peines  ni  les  larmes. 

Voilà  ce  que  pensent  encore  de  nos  jours  les  f.\-m.\ 
qui  ont  gardé  les  traditions  du  passé  de  leur  ordre.  Je 
conviens  que  le  plus  grand  nombre  ne  soulève  plus  le 
problème  de  l'humanité  primitive  et  des  destinées 
d'outre-tombe,  que  ses  soucis  se  bornent  à  assurer  le 
présent  et,  en  agissant  ainsi,  il  croit  faire  preuve  de  la 
sagesse  d'un  homme  raisonnable  et  pratique.  La  plu- 
part voient  dans  la  maçonnerie  une  société  d'admira- 
tion mutuelle,  susceptible  de  favoriser  avec  sécurité 
l'épanouissement  de  leurs  ambitions  politiques,  litté- 
raires ou  commerciales.  En  cela  ils  sont  différents  de 
leurs  ancêtres,  qui,  eux,  avaient  souvent  pour  excuse 
la  sincérité  et  le  désintéressement  de  leurs  convictions. 


C'est  la  mentalité  de  ces  derniers  que  je  me  bornerai 
à  étudier,  et  l'on  pourra  comprendre,  je  l'espère,  et 
excuser  dans  une  certaine  mesure, les  hommes  de  bonne 
foi  et  d'intelligence  plus  qu'ordinaire  qui  se  passion- 
nèrent pour  l'Art  Royal.  En  dehors  des  dupes,  il  y  eut 
des  coupables,  et  souvent  même  en  faveur  de  ces  der- 
niers on  peut  invoquer  les  circonstances  atténuantes. 

Pour  comprendre  clairement  ce  qu'était  la  secte  philo- 
sophique des  f.\-m.\  à  son  origine,  il  nous  faudra 
remonter  quelque  peu  en  arrière,  et  étudier  les  divers 
savants  empiriques  qui  eurent  la  faveur  des  premiers 
maçons  non  constructeurs. 

Si  l'on  examine  les  discours,  les  formules,  les  ada- 
ges  et  les   doctrines    des    initiés   du  xvmc  siècle,  on 


LES   PRÉCURSEURS  9 

arrive  à  déterminer  assez  facilement  à  quelles  écoles  Us 
ont  façonné  leurs  mentalités,  car,  tout  au  moins  au 
début,  tous  n'eurent  pas  les  mômes  convictions,  très 
peu  poursuivant  le  même  but. 

Suivant  leur  tournure  d'esprit,  leurs  aptitudes  et  leurs 
aspirations,  les  uns  furent  des  penseurs,  kabbalistes  ou 
théosophes,  les  autres  des  savants,  alcbimistes  ou 
astrologues  ;  ceux-ci  furent  des  artistes,  ceux-là  des 
politiciens. 

En  analysant  les  correspondances  maçonniques  et 
les  travaux  de  loge,  voici  quels  sont  les  principaux 
ancêtres  qu'on  peut  leur  attribuer. 

Les  précurseurs  intellectuels  directs  de  la  f.*.-m.\ 
furent  les  alcbimistes  et  les  kabbalistes,  en  donnant  à 
ce  premier  mot  son  sens  le  plus  complet.  Pendant  le 
xvme  siècle,  en  effet,  le  maçon  cherche,  comme  l'alchi- 
miste, la  pierre  philosophaie,  la  panacée  universelle, 
et  l'arbre  de  la  science  du  bien  et  du  mal  révélant  le 
mystère  de  la  création  :  c'est  à  eux  aussi  bien  qu'à  Bacon 
qu'il  emprunte  la  légende  symbolique  du  Temple  de 
Salomon  et  celle  d'Hiram;  les  allures  des  plus  fameux 
d'entre  eux,  Saint-Germain  et  Cagliostro,  ressemblent 
singulièrement  à  celles  du  Cosmopolite,  du  Philalèthe 
et  de  Lascaris. 

L'alchimie  était,  suivant  l'alchimiste,  une  science, 
un  art  ou  une  supercherie.  Son  objet  était  d'o- 
pérer la  transmutation  des  métaux  vils  en  métaux 
nobles.  Lorsque  cette  science  prit  naissance,  vers  le 
ive  siècle,  à  Byzance,  l'état  des  connaissances  chi- 
miques pouvait  permettre  de  poursuivre  de  sem- 
blables recherches.  L'alchimiste  supposait  que  les 
métaux  étaient  formés  des  mêmes  éléments,  étaient, 
comme  aurait  dit  un  chimiste  du  xixe  siècle,  des  corps 


10  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

isomères  et  que,  par  conséquent,  des  manipulations 
physiques  pouvaient  changer  leur  état  chimique.  La 
grande  erreur  des  alchimistes  fut  d'affirmer  que  la 
chose  était  possible  parce  qu'il  n'était  pas  déraisonnable 
d'admettre  qu'elle  pouvait  être.  C'est  ainsi  qu'ils  empri- 
sonnèrent leur  science  et  qu'après  avoir  donné  à  la 
chimie  un  essor  incontestable,  ils  la  paralysèrent  en  la 
spécialisant.  Si,  en  cherchant  une  chose,  ils  en  trou- 
vèrent une  autre  et  firent  en  quelque  sorte  malgré  eux 
et  au  hasard  progresser  la  chimie,  il  n'en  est  pas  moins 
vrai  qu'ils  furent  un  obstacle  sérieux  au  développe- 
ment rapide  et  méthodique  de  cette  branche  des 
sciences. 

Vers  le  vu9  siècle,  de  Grèce  l'alchimie  fit  des  adeptes 
en  Egypte  et,  de  là,  les  Arabes  la  transportèrent  en 
Espagne,  où  elle  fut  longtemps  en  honneur.  Peu  à  peu 
cette  science  avait  envahi  l'Occident,  et  au  xve  siècle 
elle  était  cultivée  dans  toute  la  chrétienté.  Au  xvie  et 
au  xvne,  c'était  une  véritable  folie;  il  y  avait  des 
souffleurs  dans  toutes  les  classes  de  la  société,  et  la 
légende  de  la  fortune  fantastique  de  Nicolas  Flamel 
avait  bouleversé  toutes  les  cervelles. 

Aux  recherches  matérielles  on  avait  joint  bientôt  des 
combinaisons  métaphysiques,  et  alors  un  philosophe  était 
aussi  bien  celui  qui  recherchait  la  pierre  philosophale 
que  celui  qui  étudiait  l'âme  humaine.  Le  langage  de 
ces  fous  qui,  par  hasard,  trouvaient  des  choses  raison- 
nables, était  composé  d'allégories  et  de  paraboles  ne 
voulant  rien  dire  ou  simplement  ineptes,  ou  de  logo- 
griphes  qui  ne  cachaient  pas  de  mots. 

Cependant  les  plus  remarquables  d'entre  les  abstrac- 
teurs  de  quintessence  s'expriment  plus  clairement,  tels 
Salmon  et  Philalèthe. 

De  leurs  théories   il  ressort  qu'ils  considéraient  les 


LES   PRÉCURSEURS  11 

métaux  comme  des  corps  composés  des  mêmes  élé- 
ments, dans  des  proportions  et  des  conditions  de  for- 
mation différentes.  Ils  naissent,  disent-ils,  comme  des 
êtres  organisés,  par  la  conjonction  des  semences 
mâles  et  femelles.  L'or  pur  absolu  est  la  semence  mâle; 
le  mercure  des  philosophes  est  la  semence  femelle.  L'al- 
chimiste réunit  ses  produits  dans  un  récipient  nommé 
Athanor,  maison  du  poulet  des  sages  ou  œuf  philoso- 
phique, et  au  bout  de  six  mois  de  chauffage  intense  il 
obtient  la  poudre  noire  qu'il  nomme  Saturne,  tête  de 
corbeau,  ténèbres  cimmériennes...  En  continuant  à 
souffler,  la  poudre  devient  blanche;  c'est  avec  celle-ci, 
qu'on  appelle  petite  pierre  philosophale,  petit  magistère 
ou  teinture  blanche,  qu'on  obtient  l'argent.  En  chauffant 
encore,  la  matière  devient  verte  et  enfin  rouge  ;  c'est  la 
véritable  pierre  philosophale,  grand  magistère  ou  grand 
élixir,  transformant  immédiatement  en  or  pur,  quelque 
faible  que  soit  la  dose  employée,  des  volumes  considé- 
rables de  tout  vil  métal  en  fusion  sur  lequel  on  la 
projette. 

Et  il  ne  faut  pas  se  tromper  sur  la  signification  des 
mots,  sous  peine  de  rencontrer  des  contradictions  inad- 
missibles. Ainsi,  ces  mêmes  alchimistes  qui  donnent  la 
recette  que  nous  venons  de  décrire  pour  faire  de  l'or, 
prétendent  d'autre  part  que  tous  les  métaux  sont  un 
composé  de  mercure  et  de  soufre,  ce  qui  ne  concorde 
pas  en  apparence  avec  les  recettes  qu'ils  donnent  ;  il 
faut  ajouter  que  le  soufre  et  le  mercure  des  alchimistes 
n'ont  aucun  rapport  avec  ces  corps  tels  qu'on  les  définit 
vulgairement.  Le  mercure  est  la  métalléité,  l'éclat,  la 
ductilité  des  métaux,  et  le  soufre  leur  élément  combus- 
tible. 

Plus  tard  les  astrologues  introduisent  leur  science 
dans  l'alchimie,  et  les  principaux  métaux  se  sont  trou- 


12  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

vés  sous  des  influences  planétaires.  Les  médecins  se 
mettent  aussi  de  la  partie  et  la  pierre  philosophale  trans- 
mute les  métaux,  dirige  les  destinées,  guérit  les  mala- 
dies et  prolonge  la  vie. 

Pour  que  rien  n'y  manquât,  les  alchimistes  firent 
intervenir  la  magie  blanche  ou  la  magie  noire  dans 
leurs  opérations  :  Dieu  ou  le  Diable. 

Pour  l'alchimiste  cherchant  la  transmutation  des 
métaux,  la  difficulté  est  de  se  procurer  le  mercure  des 
philosophes,  qu'on  ne  peut  avoir  que  par  révélation 
divine  ;  ils  l'appellent  :  mercure  double,  lion  vert,  ser- 
pent, eau  politique,  lait  de  vierge,  etc. 

Aussi  ne  l'ont-ils  jamais  trouvé,  et  cependant  ils 
l'ont  cherché  partout  : 

Dans  les  métaux  :  arsenic,  étain,  antimoine,  mercure 
vulgaire,  etc. 

Arnauld  de  Villeneuve  recommande  de  triturer  trois 
parties  de  limaille  de  fer  avec  une  partie  de  mercure  et 
d'y  ajouter  du  vinaigre  et  du  sel. 

Trismosin  conseille  de  sublimer  du  mercure  avec  de 
l'alun  et  du  salpêtre,  puis  de  distiller  le  mélange  avec  de 
l'esprit  de  vin  «  en  mangeant  des  tartines  de  beurre 
très  épaisses  ». 

L'un  et  l'autre  ne  parvinrent  qu'à  fabriquer  du  su- 
blimé corrosif  et  à  calmer  leur  appétit. 

Puis,  sous  prétexte  que  saint  Luc  avait  dit  que  le  sel 
était  une  bonne  chose,  on  abandonna  les  métaux  poul- 
ies sels  :  le  sel  marin,  le  salpêtre  et  surtout  le  vitriol, 
vitriolum,  dont  les  propriétés  étaient  établies  par  la 
phrase  suivante  : 

<isitando 
i— interiora 
Herrir, 
î3Cectificandoqiie, 


LES    PRÉCURSEURS  13 

i-Hnvenies 

Occultum 

t^apidem, 

Cjeram 

^edicinam. 

Plus  tard  on  essaya  des  substances  végétales  :  suc  de 
cliélidoine,   primevère,  rhubarbe,  lunaria. 

Distillations  de  vers  de  fumier,  de  crapauds,  de 
lézards,  de  serpents.  Produits  du  corps  humain  :  sang, 
salive,  poils,  semence,  menstrues,  matières  fécales, 
organes    génitaux. 

Terre  vierge,  vitraux  rouges  des  anciennes  églises 
et  enfin  l'esprit  du  monde,  spiritus  mundi,  matière 
qui  se  rencontrait  dans  l'air,  l'eau  de  pluie,  la  neige, 
et  surtout  dans  la  rosée  du  mois  de  mai. 

Trois  choses  sont  ainsi  recherchées  par  les  alchi- 
mistes :  l'Alcaest,  la  Palingénésie  et  l'Homunculus. 

L'Alcaest,  Esprit  universel  (ail  Geist),  dissolvant  de 
tous  les  corps,  est  l'idéal  des  menstrues.  On  le  cherche 
dans  le  tartre,  l'alcali  (alcali  est),  la  potasse,  l'acide 
mur  ia  tique. 

Kunckel  ayant  fait  remarquer  que  s'il  dissolvait 
toutes  choses,  il  devait  dissoudre  le  vase  dans  lequel  on 
le  renfermait,  il  n'en  fallut  pas  plus  pour  discréditer 
l'Alcaest. 

La  Palingénésie  était  l'art  de  faire  renaître  les  plantes 
de  leurs  cendres. 

L'Homunculus  était  un  homme  en  miniature  fabriqué 
par  des  procédés  hermétiques.  Il  se  formait  dans 
l'urine  des  enfants.  D'abord  invisible,  il  fallait  le 
nourrir  avec  du  vin  et  de  l'eau  de  rose. 

En  dehors  de  toutes  ces  folies,  certains  se  livrèrent  à 
des  recherches  plus  sérieuses,  et  nombre  d'alchimistes 
ne  furent  ni  des  sots,  ni  des  ignorants,  ni  des  hommes 


14  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

de  mauvaise  foi.  Vu  l'état  de  la  science,  on  ne  peut 
s'étonner  que  les  décompositions  chimiques  aient  été 
prises  pour  des  transmutations. 

«  Si  vous  projetez  sur  du  cuivre  de  l'arsenic  blanc 
sublimé,  dit  saint  Thomas  d'Aquin,  vous  verrez  le 
cuivre  blanchir  ;  si  vous  ajoutez  alors  moitié  argent 
pur,  vous  transformerez  tout  le  cuivre  en  véritable 
argent  » 

Plus  tard,  par  l'expérience,  on  reconnut  que  ce  chan- 
gement de  couleur  n'était  pas  une  transmutation,  mais 
une  simple  superposition. 

Comme  on  ignorait  également  que  les  sels  liquides 
pouvaient  contenir  des  métaux,  les  précipitations 
étaient  prises  aussi  pour  des  transmutations. 

D'autre  part,  on  avait  des  moyens  imparfaits  pour 
contrôler  la  présence  de  l'argent  dans  un  alliage  de  ce 
métal  avec  l'or  (cément  royal,  sulfure  d'antimoine, 
eau  forte).  La  chimie  analytique  n  existait  pas,  on 
ne  faisait  pas  d'expériences  de  densité  précises  (1). 
Mais  à  toutes  ces  recherches,  la  véritable  science 
trouvait  parfois  son  compte.  Si  les  explications  étaient 
erronées,  les  faits  étaient  réels. 

A  côté  des  prestidigitateurs  pipant  le  creuset  (2),  il  y 
avait  les  gens  de  bonne  foi  introduisant  dans  les  expé- 
riences des  éléments  aurifères  ignorés,  tels  que  le 
chlorure  d'or. 

(1)  Voy.  Berthelot  :  Les  Origines  de  V Alchimie. 

(2)  Dans  un  remarquable  mémoire  lu  à  l'Académie  des  sciences 
de  Paris  le  15  avril  1722,  Geoffroy  l'aîné  dévoile  les  supercheries 
les  plus  usitées  : 

Creusets  doublés,  garnis  dans  le  fond  de  chaux  gommée,  d'or 
et  d'argent  qui  sous  l'influence  de  la  chaleur  se  désagrégeaient  et 
séparaient  leurs  éléments  ; 

Parcelles  d'or  ou  d'argent  introduites  dans  des  charbons  creux  ; 

Baguettes  de  bois  creusées   contenant   à  leur  extrémité  le   métal 


LES    PRÉCURSEURS  1  5 

Malgré  toutes  leurs  erreurs  leurs  insanités  ou  leurs 
duperies,  les  alchimistes  n'en  ont  pas  moins  préparé 
la  méthode  expérimentale  :  l'observation  et  l'induction, 
que  Galilée,  François  Bacon  et  Descartes  ont  codifiées. 
Il  faut  reconnaître  que  si  les  alchimistes  n'avaient  pas 
amoncelé  de  nombreuses  expériences,  les  créateurs 
de  la  science  moderne  n'auraient  pas  pu  avoir  même 
l'idée  de  chercher  règles,  formules  et  lois. 


Si  les  alchimistes  furent  interdits  au  xive  et  au 
commencement  du  xve  siècle  par  le  pape  Jean  XXII  à 
Avignon,  Charles  V  en  France,  Henri  IV  en  Angleterre 
et  le  conseil  de  Venise,  du  xvie  au  xvnr2  siècle  ils 
étaient  protégés  dans  l'Europe  entière  par  les  empereurs 
Rodolphe  II,  Ferdinand  III  et  Léopold  Ier,  par  Fré- 
déric Ier  et  Frédéric  II  de  Prusse,  par  l'électeur  Auguste 
de  Saxe,  par  Charles  IX  et  Marie  de  Médicis  en  France, 
par  Edouard  III,  Henri  VI  et  Elisabeth  en  Angleterre, 
par  Christian  IV  et  Frédéric  III  en  Danemark  et  Char- 
les XII  en  Suède. 

Si  quelques-uns  d'entre  eux  sont  pendus  de  temps  en 
temps  par  des  princes  allemands,  c'est  comme  impos- 
teurs, ou  parce  qu'ils  ne  veulent  pas  livrer  les  secrets 
dont  on  les  croit  détenteurs. 

La  liste  des  alchimistes  contient,   il    faut    le  recon- 

précieux  qu'on  déposait  dans  le  creuset  en  agitant  le  métal  en 
fusion  ; 

Petites  quantités  de  métal  précieux  mêlé  au  métal  vif  qu'on 
travaillait  ; 

L'or  coloré  par  le   mercure,   mêlé   aux  métaux  blancs  ; 

Liquides  comme  le  chlorure  d'or  et  l'azotate  d'argent  contenant 
des  métaux  en  dissolution  ; 

Métaux  précieux  dissimulés  dans  une  gangue  de  métaux  vils. 


16  LA    FRANOMAÇONNERIE    EN    FRANCE 

naître,  des  noms  illustres  et  vénérés  à    côté  de  faux  sa- 
vants et  de  filous  : 

S.  Thomas,  Arnauld  de  Villeneuve,  Albert  le  Grand, 
Alain  de  Lisle,  Raymond  Lulle,  Paracelse,  Nicolas 
Flamel,  Talbot,  Van  Helmont  dont  le  fils  convertit 
Leibnitz  à  l'alchimie,  Sweitzer  (Helvetius)  qui  compta 
Spinosa  parmi  ses  adeptes,  le  Cosmopolite,  le  Phila- 
lèthe,  Lascaris,  Botticher,  Braun,  Martin,  Schmolz  de 
Dierbach,  Delisle,  Gaetano  comte  de  Ruggiero,  Saint- 
Germain,  Cagliostro,  James  Price  qui  en  1783,  à  Londres, 
acculé  à  une  expérience  de  transmutation,  s'empoisonna. 
Guyton  de  Morveau  qui,  en  1786,  confirmant  l'assertion 
d'un  médecin  de  Cassel,  annonça  que  l'argent  fondu 
avec  l'arsenic  se  changeait  en  or. 

Voyons  maintenant  les  kabbalistes,  qui  sont  tous 
quelque  peu  alchimistes  : 

Parmi  les  meilleurs,  les  plus  sincères,  il  faut  nous 
arrêter  à  Raymond  L«//e(l),  à  cet  homme  singulier  qui 
fut  canonisé  par  l'Eglise  alors  que  ses  adeptes  étaient 
déclarés  hérétiques.  Le  maçon  lulliste,  ainsi  que  son 
chef  d'école  dans  son  Grand  Art,  joue  à  la  roulette  avec 
les  facultés  de  l'entendement  humain  ;  comme  lui,  en 
faisant  tourner  trois  roues  concentriques,  il  pose  des 
problèmes  et  les  résoud.  Et  cependant  Raymond 
Lulle  ne  manqua  parfois  ni  d'originalité,  ni  même  de 
grandeur  dans  ses  combinaisons  naïves  et  bizarres, 
habilement  appropriées  aux  habitudes  ergoteuses  de  la 
scolastique.  Au  xviie  siècle,  le  jésuite  Kircher  le  préco- 
nisait encore  et  Leibnitz  en  fit  l'éloge. 

Il  est  un  autre  écrivain  auquel  il  est  étonnant  que 

(1)  Né  à  Palma  de  Majorque  en  1235,  il  fut  martyrisé  à  Bougie 
en  1315. 


LES   PRÉCURSEURS  17 

personne  n*ait  encore  songé,  c'est  Thomas  Morus  (1 186- 
1535).  Dans  son  fameux  ouvrage  :  Utopia,  sive  de 
optimo  reipublicœ  statu  (Î5J8),  on  a  voulu  bien  à  tort  ne 
voir  qu'un  badinage,  qui  aurait  servi  seulement  à  créer 
le  mot  utopie.  Bien  peu,  il  faut  le  reconnaître, ont  entre- 
pris de  le  lire,  car  après  l'avoir  étudié,  on  ne  pourrait 
plus  donnerai!  mot  utopie  le  sens  de  rêve  irréalisable. 
En  effet,  de  nos  jours,  ce  rêve  a  été  réalisé  presque 
complètement.  Pour  le  reste,  on  le  trouve  dans  les  pro- 
grammes des  partis  politiques  de  l'extrême  avant-garde 
socialiste  et  collectiviste. 

Thomas  Morus,  dès  le  début,  se  pose  en  réformateur, 
voulant,  sauf  une  exception  que  nous  signalerons  plus 
loin,  supprimer  la  peine  de  mort  et  abolir  la  propriété 
pour  constituer  le  bonheur  de  l'humanité. 

Il  expose  son  programme  et  le  met  en  pratique  dans 
l'île  imaginaire  d'Utopie,  dans  laquelle  les  habitants 
vivent  sou  sune  forme  sociale  nouvelle. 

Là,  le  premier  souci  du  gouvernement  est  de  fournir 
aux  besoins  matériels  de  la  consommation  publique  et 
individuelle  ;  tous  les  citoyens  ont  droit  au  gîte,  à  la 
nourriture  et  aux  vêtements.  On  laisse  à  chacun  le  plus 
de  temps  possible  pour  s'affranchir  de  la  servitude  du 
corps,  cultiver  librement  son  esprit  et  développer  ses 
facultés  intellectuelles  par  l'étude  des  sciences  et  des 
lettres,  qui  constitue  le  vrai  bonheur  des  Utopiens. 

Tout  vient  du  peuple,  tout  y  remonte  :  les  magistrats 
comme  les  prêtres  sont  élus  au  scrutin  secret. 

L'organisation  civile  est  républicaine. 

Les  fonctions  sont  annuelles,  excepté  celle  du  chef 
de  la  nation  qui  est  nommé  à  vie. 

Tout,  sauf  les  femmes,  appartient  à  tous!  Le  mariage 
ne  peut  se  contracter  que  lorsque  les  fiancés  se  sont  vus 
sans  aucun  voile  ;  par  contre,  il  peut  être  dissous  por 

LA    FRAXC-MACONNERIE.  —    T.   I.  2 


18  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

simple  consentement  mutuel  ;  aussi  l'adultère  est-il 
puni  de  mort. 

On  tolère  toutes  les  religions. 

Chacun  est  tenu  de  connaître  l'agriculture  et  un 
autre  métier,  mais  il  n'est  pas  obligé  de  travailler  plus 
de  6  heures  par  jour. 

On  mange  en  commun  dans  des  salles  parfumées,  au 
son  de  la  musique. 

Il  est  un  point  cependant  en  désaccord,  tout  au  moins 
apparent,  avec  les  programmes  modernes  :  dans  la 
république  d'Utopie,  il  y  a  des  esclaves  ! 


Un  grand  nombre  de  f.\-m.\  se  sont  aussi  inspirés 
de  la  philosophie  de  Philippe-Aurèle  Bombast  de 
Hohenheim,  connu  sous  le  nom  de  Théophraste  Para- 
celse  (1493-1541),  dont  la  doctrine  était  puisée  à  la 
kabbale,  à  la  philosophie  hermétique  et  à  l'alchimie. 
Paracelse  a  la  «  prétention  de  connaître  et  d'exposer 
tout  le  système  des  forces  mystérieuses  qui  agissent, 
soit  dans  la  nature,  soit  dans  l'homme,  et  qui  échap- 
pent à  la  timidité  de  la  philosophie  et  aux  lenteurs  de 
la  science  ». 

Entre  Dieu,  la  nature  et  l'homme,  il  y  a  des  forces 
opératives  qui  produisent  les  phénomènes  que  nous 
percevons.  Il  s'agit  pour  l'homme  de  s'unir  aux  forces 
qui  conviennent  pour  produire,  soit  des  phénomènes 
physiques,  soit  des  phénomènes  intellectuels. 

Paracelse  admet  implicitement  l'existence  de  Dieu, 
l'immortalité  de  l'âme  et  les  principes  de  la  morale 
dont  il  est  impie  de  vouloir  faire  la  preuve. 

La  création  est  divisée  en  macrocosme  (l'univers)  et 
en    microcosme  (l'homme)  qui  sont  semblables  ;  au- 


LES   PRÉCURSEURS  1(.) 

dessus    trône  Dieu,  centre    et  circonférence   de    tout. 

Les  germes  de  toutes  choses  possèdent  en  eux  une 
force  qui  les  rend  capables  d'agir  et  de  se  mouvoir, 
secondés  par  les  influences  d'agents  extérieurs  : 
lumière,  chaleur,  air,  etc..  Ces  germes,  il  les  appelle 
astres,  aussi  bien  dans  les  parties  de  l'être  humain  que 
dans  l'univers,  où  le  vulgaire  leur  donne  le  même  nom. 
Les  astres  de  l'univers  sont  en  rapport  avec  les  astres 
de  l'homme  et  ont  une  influence  sur  les  cerveaux  de  ces 
derniers,  sans  toutefois  paralyser  leur  volonté.  Au  con- 
traire, l'homme,  par  l'énergie  de  son  imagination,  peut 
s'identifier  les  propriétés  des  astres. 

C'est  la  puissance  magique. 

Paracelse  développe  la  théorie  des  quatre  éléments 
de  la  philosophie  grecque  :  le  feu,  l'air,  l'eau  et  la 
terre,  qu'il  réduit  ensuite  à  trois,  attendu  que  le  feu 
est  un  agent  donnant  naissance  aux  astres  avec  sa 
propre  substance. 

C'est,  en  résumé,  la  théorie  d'Empédocle  dont 
l'alchimie  s'était  servie  depuis  longtemps  en  substi- 
tuant aux  éléments  le  sel,  le  soufre  et  le  mercure  ; 

Le  sel  étant  le  fondement  de  la  substance  des  corps  ; 

Le  soufre  celui  de  leur  croissance  et  de  leur  combus- 
tion ; 

Le  mercure,  leur  liquidité  etl'évaporation. 

Mais  il  ne  faut  prendre  ces  corps  que  comme  des 
symboles,  avec  leurs  propriétés  astrales  et  non  avec 
leurs  propriétés  terrestres. 

Le  feu  est  la  source  de  la  sagesse  et  de  la  sensibilité 
des  pensées  ;  c'est  à  lui  que  l'homme  doit  le  dévelop- 
pement de  son  intelligence. 

Paracelse,  malgré  tout,  est  spiritualiste  et  il  admet 
le  principe  de  l'antériorité  du  principe  spirituel  sur  le 
principe    matériel  ;   il  est    même  chrétien    :     «    Il    y 


20  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

a,  dit-il,  trinité  et  unité  dans  l'homme  ainsi  que  dans 
Dieu  ;  l'homme  est  un  en  personne,  il  est  triple  en 
essence  :  il  a  le  souffle  de  Dieu  ou  lame,  l'esprit  sidéré 
et  le  corps.  » 

Quelque  invraisemblable  que  cela  puisse  paraître,  ces 
questions  sont  encore  agitées,  discutées,  appréciées  et 
préconisées  par  des  f.\-m.\  contemporains  (1)  dans 
des  formes  analogues. 


Si  Lulle  est  catholique  jusqu'à  souffrir  le  martyre  ; 
si,  avant  de  mourir  pour  avoir  résisté  à  Henri  VIII, 
Thomas  Morus,  dans  Utopia,  est  indifférent  en  matière 
de  religion  ;  si  Paracelse  est  vaguement  chrétien,  avec 
Socinus  nous  voyons  apparaître  le  philosophe  athée 
dont  le  rôle  a  une  importance  capitale,  attendu  que 
les  f.\-m.\  le  reconnaissent  comme  leur  grand  ancêtre, 

Adriano  Lemmi,  l'avant-dernier  grand  maître  du 
Grand-Orient  d'Italie,  n'a-t-il  pas  affirmé,  il  y  a  quelques 
années,  que  «  le  gouverneur  suprême  de  l'art  »  d'un 
bout  du  monde  à  l'autre  était  Lelio  Sozzini,  connu  en 
France  sous  le  nom  de  Socinus.  En  effet,  le  lendemain 
de  son  élection,  le  29  septembre  1893,  dans  une  lettre 
encyclique,  il  déclare  :  «  Nous  ne  pouvons  pas  oublier 
que  l'Italie  a  été  le  véritable  berceau  de  la  f.\-m.\  et 
que  Sozzini  fut  son  véritable  père  ;  c'est  pour  cela  que 
dans  la  direction  des  combats  décisifs,  par  lesquels 
nous  allons  assurer  notre  victoire,  il  faut  rester  jus- 
qu'à la  fin  en  Italie  »  (2). 

Lelio  Sozzini  naquit  à  Sienne  en  1525  et  mourut  à 


(1)  Oswald  Wirth,  la  Médecine  philosophale. 

(2)  Cowan,  The  X  Ray  s. 


LES   PRÉCURSEURS  21 

Zurich  le  1G  mai  1502  ;  il  était  fils  d'un  habile  juris- 
consulte. Mariano  Sozzini,  dit  le  jeune.  Dès  1545,  Lelio 
fonda  à  Vicence  une  société  qui  avait  pour  objet  la 
destruction  du  christianisme,  qu'il  voulait  remplacer 
par  le  rationalisme  pur.  Cette  société  recruta  des  adhé- 
rents surtout  parmi  les  partisans  de  l'hérésie 
arienne.  En  1547  fut  tenue,  également  à  Vicence,  une 
conférence  à  laquelle  assistèrent  des  délégués  venus 
de  tous  les  points  de  l'Europe  ;  si  tous  les  assistants 
n'avaient  pas  les  mêmes  croyances,  ils  étaient  tous  unis 
par  leur  haine  commune  du  catholicisme  et  même  du 
christianisme,  car  Lelio  s'attira  la  haine  des  réformés 
aussi  bien  que  celle  des  catholiques.  Sa  doctrine  re- 
pousse, en  effet,  les  dogmes  de  la  Trinité  (1),  de  la  con- 
substantialité  du  Verbe,  de  la  divinité  de  Jésus,  de  la 
satisfaction  et  de  l'expiation,  qu'il  attribue  à  l'influence 
de  la  philosophie  païenne  sur  l'Eglise  chrétienne. 

Après  sa  mort,  il  trouva  un  continuateur  zélé  dans 
son  neveu  Fausto  Sozzini  (1539-1604).  Gomme  son 
oncle,  Fausto  reniait  la  divinité  de  Jésus-Christ,  la 
rédemption,  le  péché  originel  et  la  doctrine  de  la 
grâce.  Son  catéchisme,  connu  sous  le  nom  de  caté- 
chisme de  Racow,  rejette  également  la  résurrection 
universelle  ;  le  bon  seulement  doit  revivre,  pendant 
que  le  méchant  met  fin  à  son  existence. 

Il  ne  croyait  donc  ni  au  châtiment  universel,  ni  à 
l'Enfer. 

Sur  sa  tombe,  à  Luctavie,  on  grava  ces  deux  vers  : 

Tota  licet  Babylon  destmxit  tecîa  Luiherus, 
Muros,  Calvinus  ;  sed  fundamenta  Socinus. 

L'ambition   de   Sozzini  était  de   construire   sur   les 

(1)  Il  reconnaissait  seulement  Dieu  le  père  ;  le  Fils  était  sim- 
plement un  homme  cloué  particulièrement  ;  dans  le  Saint-Esprit,  il 
ne  voyait  qu'une  force  de  la  divinité. 


22  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ruines  de  l'Eglise  un  temple  qui  aurait  renfermé  l'exer- 
cice de  toutes  les  croyances,  depuis  la  libre  pensée 
sans  dogmes  jusqu'au  culte  de  Lucifer. 


Tous  les  précurseurs  de  la  f.\-m.\  n'avaient  cepen- 
dant pas  des  théories  philosophiques  aussi  perverses 
que  celle  de  Socinus. 

Si,  dans  une  certaine  mesure,  on  peut  considérer 
Paracelse  comme  le  successeur  de  Lulle,  Jacob  Bœhm 
fut  Fhéritier  de  Paracelse. 

Son  influence  fut  considérable  en  Allemagne,  qu'il 
imprégna  pendant  le  xvme  siècle  et  une  grande  partie 
du  xixe.  Le  personnage  est  du  reste  intéressant.  Né  près 
de  Gorlitz  en  1575,  il  était  fils  de  pauvres  paysans  ; 
pendant  sa  jeunesse  il  était  d'une  dévotion  exaltée. 
Sans  instruction  générale,  il  exerça  le  métier  de  cor- 
donnier pendant  toute  sa  vie. 

Connu  sous  le  nom  de  Philosophe  Teutonique,  c'était, 
au  résumé,  un  mystique,  un  théosophe  et  un  halluciné. 
Il  se  voyait,  par  un  effet  de  la  grâce,  au  comble  de 
toutes  les  grandeurs.  Ce  fut  sous  l'influence  de  la  philo- 
sophie de  Paracelse  qu'il  fut  entraîné  au  mysticisme.  Il 
croyait  sincèrement  avoir  reçu  de  Dieu  la  mission  de 
dévoiler  les  mystères  inconnus  av  ant  lu  i .  Il  eut  à  diverses 
époques  trois  extases  qu'il  a  racontées.  Il  se  sentait  ravi 
dans  le  centre  de  la  nature  invisible,  ayant  une  vue 
intérieure  qui  lui  permettait  de  lire  dans  le  cœur  de 
chaque  créature.  Il  était  convaincu  qu'il  tenait  de 
Dieu,  par  grâce  spéciale,  la  science  universelle  et 
absolue,  et  cette  science,  il  la  communiquait  à  ses  lec- 
teurs, sans  ordre  et  sans  preuves,  dans  un  langage 
emprunté  à  l'Apocalypse  et  à  l'alchimie. 


LES    PRÉCURSEURS  23 

Après  avoir  déblayé  tout  ce  mysticisme  de  ses  exa- 
gérations, on  trouve  dans  Bœhm  un  vaste  système  de 
métaphysique  dont  un  panthéisme  effréné  fait  le  fond. 

Dieu  est  le  principe,  la  substance  et  la  fin  de  toutes 
choses,  et  voici  comment  il  explique  le  mystère  de  la 
Trinité  : 

1°  Dieu  considéré  en  lui-même  ne  peut  être  défini  ; 
il  n'est  ni  bon  ni  méchant  ;  n'a  ni  volonté,  ni  amour,  ni 
haine.  Son  sein  renferme  le  mal  et  le  bien  ;  il  est  tout 
et  rien.  C'est  Dieu  le  Père. 

2°  Dieu,  tel  qu'il  se  manifeste  et  tel  qu'on  peut  le 
comprendre,  est  la  lumière  dans  les  ténèbres  ;  il  a  une 
volonté  :  c'est  Dieu  le  Fils. 

3°  L'expansion  de  la  lumière,  l'expression  de  la 
sagesse  par  la  volonté,  l'exercice  des  facultés  divines, 
c'est  le  Saint-Esprit. 

Bœhm  prend  l'âme  humaine  pour  exemple  de  sa 
théorie  : 

1°  L'esprit  par  où  tu  penses,  cela  signifie  Dieu  le 
Père. 

2°  La  lumière  qui  brille  dans  ton  âme  afin  que  tu 
puisses  connaître  ta  puissance  et  te  conduire,  cela 
signifie  Dieu  le  Fils. 

3°  La  base  affective  qui  est  la  puissance  de  la  lumière, 
l'expansion  de  cette  lumière  par  laquelle  tu  régis  ton 
corps,  c'est  Dieul'Esprit-Saint. 

Il  y  a  deux  natures  sorties  de  la  même  source  :  lune 
éternelle,    invisible,    directement    émanée    de    Dieu 
l'autre,  la  nature  visible  et  créée,  l'univers  proprement 
dit. 

L'homme  contient  en  lui  une  image  et  un  résumé  de 
toutes  choses  ;  il  tient  à  Dieu  par  son  âme,  dont  le  prin- 
cipe se  confond  avec  l'essence  divine.  Par  l'essence  de 
son  corps,  il  tient  à  la  nature  éternelle,  cause  et  siège  de 


24  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

toutes  les  essences  ;  par  son  corps  proprement  dit,  il 
appartient  à  la  nature  visible. 

Avec  une  semblable  philosophie,  toute  morale  est 
forcément  un  non-sens  :  le  but  de  la  vie  est  de  ne  s'atta- 
cher à  rien  dans  ce  monde,  de  dépouiller  sa  volonté, 
s'efforcer  de  ne  pas  être  et  de  hâter  par  la  prière  con- 
templative l'instant  où  l'âme  doit  se  réunir  à  Dieu. 

Parmi  les  membres  de  la  Stricte  Observance  tem- 
plière  d'Allemagne,  nous  trouverons  de  nombreux  dis- 
ciples de  la  philosophie  de  Boehm  ;  par  Strasbourg  et 
Lyon  elle   eut  aussi   de  nombreux  adeptes  en  France. 


Un  autre  écrivain,  qu'on  ne  peut  à  proprement  dire 
être  un  véritable  philosophe,  eut  une  influence  égale- 
ment considérable  surlaf.\m.\  C'est  en  effet  sur  ses 
indications  que  se  formèrent  des  groupements  de  pen- 
seurs qui  plus  tard  s'introduiront  dans  la  f.\  m.\  et 
se  substitueront  à  l'organisation  corporative. 

JeanValentin  Andréa  (1),  abbé  d'Adelsberg,  fut,  sans 
le  vouloir,  le  fondateur  de  l'ordre  des  Rose-Croix. 

En  1610,  Andréa  publiait  une  œuvre  toute  d'imagina- 
tion, ayant  pour  titre  :  Fama  fraternitatis,  ou  décou- 
verte de  l'ordre  honorable  des  Rose- Croix  Dans  celte 
fiction,  il  racontait  l'histoire  fabuleuse  d'un  certain 
Christian  Rose-Croix  qui  aurait  trouvé  un  secret,  enfoui 
depuis  des  siècles,  pouvant  faire  le  bonheur  de  l'huma- 
nité. Pour  assurer  le  succès  de  sa  propagande,  il  aurait 
fondé  un  collège  secret  (loge)  ayant  pour  but  la  bien- 
faisance, l'internationalisme,  l'avancement   de  la  vraie 


(1)  Né  à  Herremberg  ( Wurtemberg)  le  17    août    1580,    mort    le 
27  juin  1G54. 


LES   PRÉCURSEURS  25 

morale  et  de  la  vraie  religion.  Les  membres  de  celle 
société  devaient  s'engager  à  la  plus  sévère  discré- 
tion. 

Le  livre  eut  un  grand  succès  et,  en  Angleterre  en  par- 
ticulier, on  crut  à  l'existence  réelle  de  l'ordre  des 
Rose-Croix. 

Andréa  donna  des  suites  à  son  premier  roman.  En 
1G14,  il  publiait  la  Réformation  universelle  du  monde 
entier  avec  la  Fama  fraternitatis  de  l'ordre  respectable 
de  la  Rose-Croix  ;  en  1616  paraissait  la  Noce  chimique 
de  Christian  Rose-Croix  ;  en  1617,  Rosa  florescens, 
contra  Menapii  cahimnias,  dans  laquelle  il  l'ait  l'apo- 
logie des  Rose  Croix,  sous  la  signature  de  Florentinus 
de  Valentia. 

Le  clergé  catholique  aussi  bien  que  le  clergé  pro- 
testant s'émurent  du  succès  de  ces  ouvrages,  qui  pou- 
vaient entraîner  les  gens  de  bonne  foi,  firent  avertir 
Andréa  d'avoir  à  cesser  ses  publications  et  à  les 
désavouer. 

Andréa  se  retira  à  Strasbourg  où  il  fit  imprimer  en 
1619  :  Turris  Babel,  judiciorum  de  fraternitate  Roseae 
Crucis  chaos.  Dans  cet  ouvrage  Andréa  proteste  contre 
l'existence  de  la  société  des  Rose-Croix,  qui  s'était  réelle- 
ment formée  pour  mettre  sa  fiction  en  pratique,  déclare 
qu'il  n'avait  écrit  qu'une  série  de  romans  dans  ses 
œuvres  précédentes  et  qu'il  avait  choisi  le  nom  de 
Rose-Croix  en  s'inspirant  du  cachet  de  sa  famille  :  une 
croix  de  saint  André  avec  une  rose  entre  chaque 
branche  ;  il  se  moquait  des  gens  qui  avaient  cru  à  la 
réalité  de  son  conte,  qui  avait  assez  duré,  puisqu'il 
était  parvenu  à  mystifier  ses  lecteurs. 

Andréa  eut  beau  protester;  on  ne  voulut  pas  croire 
ses  affirmations,  et  des  sociétés  inspirées  de  ses  ouvrages 
se  formèrent  en  Allemagne.  Cependant  les  R.\-C.\  ne 


26  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

devaient  être  ni  très  nombreux  ni  très  connus,  car 
Descartes  les  chercha  dans  toute  l'Allemagne  sans 
pouvoir  les  rencontrer. 

La  France  aurait  eu  aussi  sa  société  de  R.'.-C*. 
sous  Louis  XIII. 

On  ne  sait  s'il  faut  prendre  au  sérieux  les  affiches  que 
desR.*.  G.',  ou  des  mystificateurs  firent  placarder,  en 
1622,  dans  les  rues  de  Paris  : 

«  Nous,  députés  du  collège  principal  des  frères  de 
la  Rose-Croix,  faisons  séjour  visible  et  invisible  en  cette 
ville,  par  la  grâce  du  Très  Haut,  vers  lequel  se  tourne 
le  cœur  des  justes.  Nous  montrons  et  enseignons,  sans 
livres  ni  marques,  à  parler  toutes  sortes  de  langues  des 
pays  où  nous  voulons  être,  pour  tirer  les  hommes,  nos 
semblables,  d'erreur  et  de  mort.  » 

Après  leur  échec,  la  même  année,  ils  auraient  fait 
placarder  de  nouvelles  convocations  : 

«  S'il  prend  envie  à  quelqu'un  de  nous  voir,  par 
curiosité  seulement,  il  ne  communiquera  jamais  avec 
nous  ;  mais  si  la  volonté  le  porte  réellement  et  de  fait 
à  s'inscrire  sur  le  registre  de  notre  confraternité,  nous 
qui  jugeons  des  pensées,  lui  ferons  voir  la  vérité  de  nos 
promesses  ;  tellement  que  nous  ne  mettons  point  le 
lieu  de  notre  demeure,  puisque  les  pensées,  jointes  à 
la  volonté  réelle  du  lecteur,  seront  capables  de  nous 
faire  connaître  à  lui  et  lui  à   nous.  » 


En  Angleterre,  Robert  Flndd  (1)  se  posa  en   défen- 
seur de  l'ordre  des  Rose-Croix,  en  le  regardant  comme 


(1)  Né  à  Milgate  (Kent)  en  1574,  mort  à  Londres  le  8  septembre 
1637.  v 


LES    PRÉCURSEURS  27 

l'antique  symbole  de  la  croix  teinte  du  sang  de  Jésus- 
Christ.  En  1617,  sous  le  pseudonyme  de  Robertus  de 
Fluctibus,  il  publie  successivement  à  Leyde  :  Apologia 
compendiaria,  fralernitatem  de  Rosea  Cvnce,  suspicionis 
et  infanwe  maculis  aspersam  ablucns  et  Tractatus  apo- 
logeticus  integritatem  societatis  de  Rosea  Cruce  défendais 
contra  Libaniiun  et  alios.  Ces  ouvrages  eurent  un 
succès  considérable  ;  des  sociétés  de  Rose-Croix  se 
formèrent  à  Londres,  sous  l'influence  de  Fludd,  dont 
elles  adoptèrent  les  doctrines  philosophiques.  L'on 
peut  même  dire  que  ce  furent  aussi  bien  les  théories  de 
Fludd  qui  furent  adoptées  par  les  maçons  philosophes, 
lors  de  la  réformation  de  1717,  que  la  méthode  de 
Bacon. 

Fludd  vaut  du  reste  la  peine  qu'on  étudie  sa  per- 
sonne et  ses  écrits,  fort  peu  connus  en  France. 

D'abord  militaire,  il  abandonna  bientôt  le  métier 
des  armes  pour  les  sciences,  les  lettres,  l'alchimie  et  la 
théosophie.  Après  avoir  visité  l'Allemagne,  la  France 
et  l'Italie,  il  revint  en  Angleterre  et  se  fit  recevoir  mé- 
decin. 

Comme  celle  de  Bœhm,  sa  philosophie  est  inspirée  de 
celle  de  Paracelse  et  de  Cornélius  Agrippa  de  Nettes- 
heim  ;  c'est  un  mélange  des  chimères  de  l'alchimie, 
des  idées  kabbalistiques  et  des  traditions  néo-platoni- 
ciennes et  hébraïques  recueillies  dans  les  prétendus 
écrits  de  Mercure  Trismégiste,  mêlées  aux  ambitions  et 
aux  rêveries  des  Rose-Croix.  C'est  le  panthéisme  le 
moins  déguisé,  presque  le  matérialisme,  présenté  sous 
le  masque  du  mysticisme  et  avec  le  secours  de  l'inter- 
prétation allégorique  avec  laquelle  il  prétend  donner 
le  véritable  sens  de  la  révélation  chrétienne. 

Dieu  est  le  principe,  la  fin  et  la  somme  de  tout  ce 
qui  existe.    Tous  les  êtres    et  l'univers    lui-même  sont 


28  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

sortis  de  son  sein,  (ormes  de  sa  substance  et  retourne- 
ront en  lui,  quand  le  temps  et  le  but  de  leur  existence 
seront  accomplis.  A  proprement  parler,  la  création  n'a 
jamais  commencé.  C'est  l'Ensoph  de  la  kabbale,  l'unité 
ineffable  de  l'école  d'Alexandrie,  le  Père  inconnu  du 
gnosticisme. 

L'être  et  le  non-être,  la  lumière  et  les  ténèbres, 
l'activité  et  l'inertie,  la  contraction  et  l'expansion,  le 
bien  et  le  mal,  sont  effacés  et  anéantis  dans  la  plus 
parfaite  identité.  La  volonté  et  la  nolonté  par  leurs 
actions  simultanées  et  leur  combinaison  ont  créé  les 
éléments  et  les  qualités  dont  l'univers  se  compose. 

On  le  voit,  son  panthéisme  incline  bien  plus  vers  la 
matière  que  vers  l'esprit. 

Gomme  les  philosophes  de  l'antiquité,  il  adopte  la 
théorie  des  quatre  éléments,  dont  il  explique  la  forma- 
tion et  la  succession.  L'air  refroidi  est  devenu  l'eau  ; 
celle-ci,  condensée,  est  devenue  la  terre,  et  cette  der- 
nière, sous  l'influence  delà  lumière,  est  devenue  le  feu. 

C'est  à  la  kabbale  qu'il  emprunte  le  mode  de  for- 
mation des  êtres  et  ses  quatre  mondes  étroitement  unis 
et  subordonnés  l'un  à  l'autre  : 

1°  Le  monde  archélij pique,  où  Dieu  se  révèle  à  lui- 
même  et  qu'il  remplit  de  sa  substance  sous  la  forme  la 
plus  élevée  ; 

2°  Le  monde  angélique,  habité  par  les  anges  et  les 
purs  esprits,  agents  immédiats  de  sa  volonté  divine. 

3*  Le  monde  stellaire  formé  par  les  étoiles,  par  les 
planètes  et  par  tous  les  grands  corps  dont  l'ensemble 
est  nommé  le  ciel  ; 

4°  Le  monde  sublunaire,  c'est-à-dire  la  terre  et  les 
créations  dont  elle  est  peuplée. 

En  fait,  il  réduit  ses  quatre  mondes  à  trois  :  Dieu, 
la  nature,  l'homme. 


LES    PRÉCURSEURS  2\) 

Il  adopte  la  doctrine  de  la  Trinité  ;  mais  il  l'explique 
à  sa  manière. 

D'abord  Dieu  n'existe  qu'en  puissance  dans  l'infini 
ineffable;  c'est  la  première  personne  de  la  Trinité  ou 
Dieu  le  Père. 

Puis  il  se  révèle  à  lui-même  et  se  crée  tout  un  monde 
intelligible  ;  il  apparaît  comme  la  pensée,  la  raison 
universelle.  C'est  le  Fils. 

Enfin  il  agit  et  produit  ;  sa  volonté  s'exerce  et  sa 
pensée  se  réalise  hors  de  lui.  C'est  l'Esprit. 

Dieu,  passant  éternellement  par  certains  états,  nous 
offre  ainsi  l'image  d'un  cercle  dont  le  centre  est  partout 
et  la  circonférence  nulle  part. 

Ce  système,  d'après  Fludd  lui-même,  est  aussi 
ancien  que  le  monde.  Miraculeusement  enseigné  au 
premier  homme,  il  s'est  transmis  par  la  tradition  aux 
patriarches,  à  Moïse,  à  tous  les  âges  de  l'ancien  Tes- 
tament jusqu'au  temps  où  le  Christ  jugea  nécessaire 
de  le  révéler  une  seconde  fois. 

Pythagore,  Platon  et  Mercure  Trismégiste  sont  les 
seuls  philosophes  de  l'antiquité  dont  il  fait  cas. 

Fludd  eut  une  influence  déterminante  sur  un  des 
principaux  organisateurs  de  la  f.\  m.*,  de  1717,  le 
pasteur  Désaguliers,  sur  lequel  nous  reviendrons  plus 
loin. 


Un  autre  philosophe  anglais  contribua  également  à 
la  formation  de  l'esprit  maçonnique  :  le  chancelier 
François  Bacon  (1560-1626). 

Dans  un  ouvrage,  fort  intéressant  à  beaucoup  de 
points  de  vue,  M.  MaxDoumic(Le  secret  de  la  F.\  M.'.) 
a  cru    devoir  donner  au  chancelier  de  Jacques  Ier  non 


30  LA  FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

seulement  un  rôle  prépondérant,  mais  encore  un  rôle 
exclusif  dans  l'organisation  de  la  f.\-m.\  Dans  la 
maison  de  Salomon  de  l'île  de  Bensalem  décrite  par 
Bacon  dans  la  Nouvelle  Atlantide,  M.  Max  Doumic 
croit  voir  la  première  forme  de  la  société  maçonnique  ; 
il  serait  plus  juste  de  dire  qu'il  est  possible  que,  dans 
une  certaine  mesure,  Bacon  s'est  probablement  inspiré, 
pour  cette  conception  romantique,  des  œuvres  de  Tho- 
mas Morus,  de  celles  d'Andréa  et  de  Robert  Fludd, 
et  qu'il  a  fait  mouvoir  ses  personnages  dans  une 
société  formée  à  l'instar  de  l'organisation  de  la  corpora- 
tion des  maçons  travailleurs,  très  connue  et  très  carac- 
téristique. 

Le  reproche  que  l'on  peut  faire  à  M.  Max  Doumic  est 
d'avoir  posé  une  thèse  a  priori  pour  établir  que  la 
f.*. -m.*,  est  un  outil  exclusivement  anglais  et  d'avoir 
cherché  tous  les  documents  pouvant  confirmer  son 
hypothèse,  alors  qu'il  eût  été  préférable  de  dégager  sa 
thèse  d'un  ensemble  de  faits  déterminants,  d'une  authen- 
ticité indiscutable. 

Je  suis  néanmoins  en  partie  de  l'avis  de  M.  Doumic 
en  ce  qui  concerne  l'influence  de  Bacon  sur  la  mentalité 
maçonnique  du  xvme  siècle  ;  il  ne  faut  cependant  pas 
faire  de  Bacon  le  précurseur,  mais  un  des  précurseurs. 

La  personnalité  de  Bacon  est  trop  connue  pour  s'y 
arrêter  longuement. 

Chancelier  de  Jacques  Ier,  baron  de  Vérulam  et 
vicomte  de  Saint-Alban,  accusé  en  1618,  devant  la 
chambre  des  Lords,  de  concussion  et  de  vénalité, 
il  dut  humblement  s'avouer  coupable.  Le  3  mai  1621 
il  fut  condamné  à  se  démettre  de  ses  fonctions,  à  payer 
une  amende  de  un  million  de  livres  et  à  être  enfermé  à 
la  Tour  de  Londres. 

C'est  vraisemblablement   entre  1622    et   1626  qu'il 


LES   PRÉCURSEURS  3J 

composa  la  Nouvelle  Atlantide,  publiée  seulement  après 
sa  mort.  Lorsqu'il  travailla  à  cette  œuvre  d'imagi- 
nation, il  connaissait  certainement  les  ouvrages 
d'Andréa  et  ceux  de  Robert  Fludd,  qui  avaient  eu  un 
grand  retentissement  ;  quant  à  YUtopia  de  Morus, 
c'était  un  ouvrage  en  quelque  sorte  classique. 

Gomme  dans  l'île  d'Utopia,  dans  l'île  de  Bensalem  le 
peuple  a  adopté  la  forme  républicaine  ;  mais  au  lieu  de 
s'occuper,  comme  Morus,  de  la  vie  sociale  des  habi- 
tants de  son  île  imaginaire,  Bacon  s'occupe  exclusive- 
ment de  leur  vie  intellectuelle,  littéraire  et  scientifique. 
Comme  Andréa,  il  met  à  la  tête  une  société  secrète,  un 
vaste  institut  qu'il  appelle  non  pas  le  Temple,  mais  la 
Maison  ou  la  Société  de  Salomon.  Cette  société  est 
spécialement  destinée  à  l'étude  et  à  la  contemplation 
des  œuvres  de  la  Divinité  et  de  toute  la  création. 

Les  affiliés,  qui  entre  eux  s'appellent  frères,  comme 
les  membres  d'une  communauté  religieuse  et  comme 
les  maçons  constructeurs,  étudient  les  sciences  en 
secret  et  s'engagent  sous  serment  à  ne  rien  révéler. 
Pour  assurer  les  destinées  de  la  société,  on  a  installé 
un  collège  pour  les  novices,  nommé  collège  des  six 
jours  de  la  création,  qui  ne  doit  être  connu  que  des 
initiés. 

Au  lieu  de  la  salle  à  manger  parfumée  et  égayée  par 
la  musique,  dont  parle  Morus,  il  y  a  dans  le  collège  une 
salle  des  prodiges,  flanquée  de  hautes  tours  et  de 
grottes  profondes  destinées  à  observer  les  phénomènes 
de  la  nature,  des  eaux  minérales,  des  appareils  de 
féeries  imitant  les  météores,  le  vent,  la  pluie,  le 
tonnerre  ;  autour  du  collège,  des  jardins  botaniques 
et  des  parcs  remplis  d'animaux,  afin  d'observer  leurs 
mœurs. 

Comment  fonctionne  la  société  ?  —  En  dehors   des 


32  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

novices,  elle  se  compose  de  neuf  groupes  de  trois 
membres.  Les  quatre  premiers  groupes  sont  destinés  à 
voyager  à  l'étranger,  en  cachant  leurs  personnalités.  Ils 
ont  à  leur  disposition  des  sommes  considérables,  pour 
acheter  les  secrets,  corrompre  les  gens  et  fonder  des 
succursales. 

Voyons  si  les  fonctions  attribuées  à  chacun  des 
neuf  groupes  ont  quelque  rapport  avec  les  grades  ma- 
çonniques : 

1°  Les  commerçants  de  lumière  doivent  rapporter  des 
machines  et  des  échantillons  de  toute  espèce  ; 

2°  Les  plagiaires  doivent  recueillir  dans  les  livres  et 
les  manuscrits  les  expériences  utiles  ; 

3°  Les  collecteurs  rassemblent  tout  ce  qui  a  rapport 
aux  arts  mécaniques  ; 

4°  Les  pionniers  ou  mineurs  choisissent,  dans  les  ex- 
périences qu'on  a  pu  leur  indiquer,  celles  qui  leur  ont 
paru  les  plus  intéressantes  et  en  rapportent  la  descrip- 
tion ; 

5°  Les  compilateurs  ou  rédacteurs  rangent  toutes  ces 
notes  dans  des  tables  méthodiques  ; 

6°  Les  éver  g  êtes  ou  bienfaiteurs  examinent  les  dossiers 
rapportés,  les  comparent  et  cherchent  à  les  utiliser. 

Après  plusieurs  assemblées  générales  où  on  discute 
en  commun  le  résultat  de  ces  enquêtes  : 

7°  Les  lampes  (et  non  pas  les  lumières)  tentent  des 
expériences  plus  lumineuses  ; 

8°  Les  greffiers  rédigent  les  mémoires,  analysent  les 
expériences  *, 

{)°  Les  interprètes  de  la  nature  les  étudient  et  tachent 
d'en  tirer  des  conséquences  générales  (1). 

(1)  La  Nouvelle  Atlantide  a  été  traduite  en  français  en  1702  par 
l'abbé  Gilles-Bernard  Raquet  (1668-1748)  et  publiée  en  un  vol.  in-12 
à  Paris,  chez  J.  Musier 


LES    PRECURSEURS 


33 


Il  ne  me  paraît  pas  que  celte  organisation  ait  un  rap- 
port quelconque  avec  celle  de  la  maçonnerie,  à  laquelle 
elle  ressemble  beaucoup  moins  dans  son  but  que  celle 
de  l'île  d'Utopie  de  Thomas  Morus. 

C'est  bien  plus  aux  doctrines  philosophiques  de 
Bacon  qu'à  celle  des  sociétaires  de  l'île  de  Bensalem 
qu'il  faut  rattacher  la  f.\-m.\ 

Dans  la  Nouvelle  Atlantide,  il  nous  semble  que  Ba- 
con a  voulu  vulgariser  son  Instauratio  magna,  donner 
une  forme  palpable  de  la  méthode  expérimentale,  et 
montrer  l'application  pratique  des  sciences.  Peut-être 
aussi  dans  l'œuvre  de  ses  dernières  années  a-t-il  voulu 
faire  une  moins  large  part  à  la  méthode  d'induction, 
qu'il  avait  trop  exclusivement  préconisée  dans  ses 
œuvres  antérieures. 

Sa  philosophie,  comme  nous  l'avons  dit,  était  au 
contraire  faite  pour  plaire  aux  f.\-m.\  penseurs,  en  ce 
qu'elle  contenait  en  germe  les  bases  des  écoles  sensua- 
listes  et  matérialistes  modernes.  En  condamnant  les 
causes  finales,  il  avait  affaibli  les  preuves  de  l'existence 
de  Dieu  créateur,  ce  qui  pouvait  être  considéré  par  les 
f.\-m.\  comme  une  théorie  utile  au  développement  du 
dogme  égalitaire. 


De  tous  les  écrivains,  Pierre  Bayle  fut  assurément 
celui  qui  eut  le  plus  d'influence  sur  les  maçons  français 
(1647-1706)  ;  calviniste,  après  une  courte  excursion 
dans  le  catholicisme,  Bayle  était  revenu  à  la  religion  de 
ses  pères.  Nature  sceptique,  paradoxale  et  hypocrite,  il 
n'attaque  pas  directement  ses  adversaires  ;  il  procède 
par  insinuation,  expose  avec  un  respect  apparent  les 
dogmes  qu'il  veut  combattre  et  conclut  en  renvoyant  le 

LA    FRANC -MAÇONNERIE.    —    T.  I.  3 


34  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

lecteur  à  des  ouvrages  où  ils  sont  attaqués  avec  vio- 
lence. 

«  Mon  talent  est  formé  de  doutes,  disait-il  ;  mais  ce 
ne  sont  que  des  doutes.  »  Avec  ses  procédés  ambigus, 
son  esprit  terre  à  terre,  il  y  avait  cependant  une  chose 
dont  il  ne  doutait  pas,  c'est  que  ses  doctrines  devaient 
accumuler  la  tempête  sur  les  sociétés  existantes  ;  aussi 
se  comparait-il  volontiers  au  Jupiter  assemble-nuages 
d'Homère. 

Ses  doctrines,  en  effet,  conduisaient  immanquable- 
ment au  matérialisme  et  à  l'athéisme,  par  le  chemin  du 
doute,  si  facile  à  rendre  agréable  à  l'aide  de  paradoxes 
aisément  spirituels.  Trop  prudent  pour  entrer  en  lutte 
directe  avec  les  autorités  civiles  et  religieuses,  Bayle 
ne  nie  pas  l'existence  de  Dieu,  mais  il  déclare  qu'elle 
ne  lui  paraît  pas  d'une  évidence  incontestable  et  il 
ajoute  qu'il  ne  voit  aucune  contradiction  à  ce  que  la 
matière  puisse  penser. 

Il  ne  glorifie  pas  les  athées,  mais  il  prétend  que  sou- 
vent un  athée  portera  plus  loin  qu'un  croyant  la  notion 
et  la  pratique  du  bien,  et  que,  sous  ce  rapport,  l'a- 
théisme lui  semble  infiniment  préférable  à  la  supersti- 
tion et  à  l'idolâtrie. 

Pour  vulgariser  ses  doctrines,  Bayle  fonda  un  jour- 
nal qui  eut  un  grand  nombre  de  lecteurs  :  les  Nouvelles 
de  la  République  des  lettres  (1).  Mais  son  œuvre  de 
propagande  la  plus  considérable  fut  son  Dictionnaire 
historique  et  critique  (2),  dont  le  succès  fut  immense 
dès  son  apparition.  La  première  édition  est   de  1697. 


(1)  Ce  journal  parut  de  1684  à  1718,  mais  Bayle  l'abandonna 
pour  cause  de  santé  en  1687  et  le  confia  à  des  continuateurs  zélés  : 
La  Roque,  Barrin,  Jacques  Bernard  et  Jean    Leclerc 

(2)  La  seconde  édition  est  de  1702.  Eu  1740  il  y  avait  déjà 
huit  éditions,  dont  une  anglaise  (1735-1741). 


LES    PRÉCURSEURS  35 

Ce  recueil  fut,  pendant  tout  le  xvme  siècle,  la  véritable 
Bible  du  f.\-m.\  français,  et  l'on  peut  dire  qu'il  fut 
aussi  la  première  édition  de  Y  Encyclopédie  y  dont  il  a 
les  tendances  philosophiques  et  la  forme  matérielle.  Il 
suffira  de  lire  les  articles  :  David,  Pyrrhonisme  et  Ma- 
nichéens, pour  se  convaincre  de  la  similitude  de  ses  doc- 
trines avec  celles  de  la  f.\-m.\  C'est  de  Bayle  que 
s'inspireront  Fontenelle,  d'Holbach,  LaBaumelle,  Mau- 
pertuis  aussi  bien  que  les  collaborateurs  de  YEncijclo- 
pèdic,  ce  grand  bazar  de  la  demi-science. 


Il  est  encore  un  auteur  dont  nous  devons  exposer  les 
théories  philosophiques,  tant  fut  grande  son  influence 
sur  toute  une  catégorie  de  maçons  :  les  Martinistes 
et  les  Balsamistes.  Bien  que  l'ensemble  de  ses 
œuvres  théosophiques  soit  postérieure  à  l'intro- 
duction de  la  f. '.-m.*,  en  France,  nous  devons  nous 
arrêter  à  Emmanuel  Svedbord,  anobli  sous  le  nom 
d'Emmanuel  de  Swedenborg  (1688-1772),  qui  fut  le 
dernier  théosophe  célèbre. 

La  vie  de  Swedenborg  se  divise  nettement  en  deux 
parties  dissemblables.  Dans  la  première,  sa  philosophie 
a  pour  but  la  connaissance  de  notre  monde  mécanique, 
et  il  a  trois  moyens  pour  y  parvenir  :  l'expérience  de 
Bacon,  la  géométrie  de  Descartes  et  le  raisonnement  de 
Bayle.  D'après  lui,  si  Ton  doit  renoncer  à  comprendre 
l'infini  et  l'essence  de  Dieu,  on  peut  expliquer  ses  rap- 
ports avec  le  monde.  Dieu  n'a  pas  créé  l'univers  tel 
qu'il  est,  mais  il  en  a  créé  les  causes  qui  le  produisent 
géométriquement.  Lame  est  la  cause  finale  de  la  créa- 
tion sur  la  terre,  c'est  le  terme  suprême  du  mouve- 
ment ;  elle  obéit  à  des  lois  géométriques  et  mécaniques  ; 


36  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

elle  n'est  que  la  partie  la  plus  subtile  de  notre  corps  ; 
elle  est  donc  matérielle  :  c'est  une  membrane,  un  ap- 
pareil vibratoire. 

Cette  philosophie  toute  naturaliste  est,  on  le  voit,  très 
éloignée  de  tout  mysticisme.  En  dehors  de  ses  études 
métaphysiques,  Swedenborg  s'occupait  surtout  de 
sciences  pratiques  :  histoire  naturelle,  exploitations  de 
mines,  artillerie,  etc. 

En  avril  1745,  pendant  un  séjour  qu'il  fait  à  Londres, 
Swedenborg  est  brusquement  transformé  :  il  passe 
sans  transition  du  naturalisme  à  la  théurgie  ;  voici 
dans  quelles  circonstances  : 

Il  était  à  table  et  achevait  son  repas,  quand  tout  à 
coup  il  voit  autour  de  lui  d'affreux  reptiles  rampant 
dans  l'obscurité  ;  puis  apparaît  un  homme  radieux  qui 
lui  dit  :  Ne  mange  pas  tant.  Le  lendemain,  nouvelle 
apparition  du  même  homme  qui  lui  annonce  :  «  Je  suis 
Dieu,  le  Seigneur,  le  Créateur  et  le  Rédempteur  ;  je  t'ai 
élu  pour  interpréter  aux  hommes  le  sens  des  saintes 
Écritures.  Je  te  dicterai  ce  que  tu  devras  écrire  1  » 

A  partir  de  ces  apparitions,  Swedenborg,  ainsi  que 
Boehm,  prend  ses  hallucinations  pour  des  réalités  et  il 
se  consacre  exclusivement  aux  fonctions  de  secrétaire  de 
la  Divinité.  Ce  n'est  pas  ses  œuvres  qu'il  publie,  mais 
les  révélations  divines  qu'il  transcrit.  C'est  sous  la  dic- 
tée du  Seigneur  qu'il  définit  et  explique  le  mystère  de 
la  Trinité  : 

Dieu  a  une  âme  qui  est  le  Père  ; 

Un  corps  divin-humain  qui  est  le  Eils  ; 

Une  force  qui  opère,  réchauffe  et  éclaire,  qui  est  le 
Saint-Esprit. 

Il  divise  le  monde  spirituel,  ou  Jérusalem  céleste,  en 
trois  cieux  : 

Le  ciel  inférieur,  dans  lequel  les  habitants   reçoivent 


LES   PRÉCURSEURS  37 

médiatement  l'influence  divine  des  deux  autres  cieux. 
Ses  attributs  sont  :  l'amour  et  l'intelligence  ; 

Le  ciel  spirituel,  habité  par  des  anges  qui  reçoivent 
médiatement  du  troisième  ciel  l'influence  divine.  Ils 
voient  Dieu,  mais  pas  dans  toute  sa  splendeur.  Son 
emblème  est  la  lune,  astre  sans  rayons  ; 

Le  ciel  supérieur,  habité  par  les  plus  parfaits  des 
anges,  qui  reçoivent  directement  l'influence  de  Dieu, 
qu'ils  voient  face  à  face.  Son  emblème  est  celui  de  Dieu, 
soleil  d'un  monde  invisible  ;  il  se  manifeste  par  l'a- 
mour et  la  vérité  représentés  symboliquement  par  la 
chaleur  et  la  lumière. 

Dans  ces  trois  royaumes  célestes  circulent  des  socié- 
tés innombrables  d'hommes  et  de  femmes,  unis  par  des 
mariages  éternels  ;  chaque  couple  habite  un  palais 
splendide  entouré  de  jardins  merveilleux. 

Au-dessous  des  régions  célestes,  il  place  le  royaume 
des  esprits,  où  se  rendent  les  hommes  après  leur  mort. 
Là,  ils  subissent  une  transformation  angélique,  et,  sui- 
vant leurs  mérites,  ils  vont  au  paradis  ou  en  enfer. 

Les  maçonneries  allemandes,  danoises,  suédoises 
et  russes,  furent  les  premières  impressionnées  par  les 
théories  swedenborgiennes,  qui  eurent  également  un 
grand  succès  dans  l'est  de  la  France.  Ces  doctrines  ne 
semblent  avoir  eu  d'influence  à  Paris  et  à  Londres 
qu'après  la  mort  de  Swedenborg.  La  même  année,  en 
1783,  se  formèrent  dans  ces  deux  villes  des  loges  dans 
lesquelles  on  pratiqua  le  système  du  théosophe  suédois. 


Parmi  les  maçons  du  xvnr9  siècle,  un  des  plus  éclai- 
rés en  science  maçonnique  est  certainement  Willermoz 
(1730-1824)  ;  il  fut  affilié  à  presque  tous  les  régimes, 


38  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

les  connut  dans  leurs  grades  avancés,  et  tout  en  re- 
connaissant les  divergences  d'opinions  religieuses  qui 
séparent  les  membres  influents  de  son  Ordre,  depuis  le 
matérialiste  jusqu'au  chrétien,  il  demeure  catholique, 
mais  à  sa  façon.  Il  croit  à  la  divinité  du  Christ  et  à  la 
rédemption,  mais  il  n'admet  pas  l'autorité  du  Pape  ; 
c'est  un  pseudo-janséniste,  mélangé  de  gallican  et  de 
martiniste.  Comme  Bœhm,  Swedenborg  et  Saint-Martin, 
il  a  des  hallucinations  pendant  une  certaine  période  de 
sa  vie.  C'est,  en  résumé,  un  brave  homme  naïf  dont 
l'esprit  avait  été  déréglé  par  des  recherches  folles  qui 
n'étaient  pas  à  la  portée  de  ses  connaissances  scienti- 
fiques ;  ses  études  philosophiques  ne  le  mettaient  pas 
à  même  d'étudier  sans  danger  un  problème  dont  la 
recherche  conduit  à  l'exaltation  ou  à  l'hébétement  lors- 
qu'on ne  sait  s'arrêter  à  temps. 

J'ai  choisi  Willermoz  parmi  les  nombreux  maçons 
qui  précédèrent  la  Révolution,  précisément  parce  qu'il 
fut  en  rapport  avec  des  membres  de  tous  les  rites  et  que 
ce  qu'il  dit  de  la  maçonnerie  est  d'un  ordre  plus  géné- 
ral que  ce  qu'en  pourrait  dire  un  chef  de  secte  comme 
Saint-Martin  (1).  Willermoz,  par  sa  correspondance  in- 
cessante, fut  en  rapport  avec  les  ducs  de  Brunswick  et  de 
Salni,  Charles  deHesse,  Hund,  Haugwitz,  St-Germain, 
Cagliostro,  Martines  Pasqually,  Saint-Martin,  les  ducs 
de  Luxembourg  et  d'Havre,  Bacon  de  la  Chevalerie, 
Savalète  de  Lange,  La  Peyrouse,  le  marquis  de  Chef- 
debien,  Naselli  à  Naples,  d'Albarey  à  Turin,  Wollner, 
Wechter,  les  maçons  suédois  et  russes  aussi  bien  que 
les  maçons  parisiens  avec  lesquels  il  échangeait  des 
vues  continuelles.    Par   lui  on  pourra  donc  constater, 


(1)    Du  reste,    Saint-Martin    fut  un    chef  de  secte   théorique  :  il 
n'organisa  pas  de  sociétés;  on  s'inspira  de  ses  œuvres. 


LES    PRÉCURSEURS  39 

mieux  que  par  tout  autre,  ce  que  pensaient  les  maçons 
et  ce  qu'ils  voulaient. 

Le  31  janvier  1782,  il  écrit  à  Wechter  pour  lui  parler 
de  l'avenir  de  la  maçonnerie,  lui  exposer  son  système 
aussi  bien  que  ceux  des  autres.  Dans  cette  lettre, 
destinée  au  plus  grand  secret,  il  met  à  nu  les  causes, 
les  moyens  et  le  but  de  la  maçonnerie  en  général. 

Il  ne  s'agit  pas,  dit-il,  de  créer  une  institution  maçon- 
nique qui  existe  et  qui  est  plus  répandue  que  jamais  ; 
mais  il  faut  satisfaire  le  vœu  général  en  la  réformant. 
Il  faut  refaire  un  centre  auquel  pourront  se  réunir  toutes 
les  parties  delà  société  générale  qui  le  voudront.  Le 
moment  est  bon,  la  société  est  dans  une  période  d'effer- 
vescence extraordinaire,  mais  elle  n'est  qu'un  squelette. 

Comment  reconnaît-il  le  vrai  but  fondamental  de  la 
maçonnerie  quand  les  institutions  sont  si  variées?  Par 
trois  moyens  : 

1°  La  tradition,  bien  qu'elle  soit  très  obscurcie  ; 

2°  L'étude  de  l'esprit  actif  ;  ce  qu'on  dit  et  ce  qu'on 
pense  de  la  maçonnerie  ; 

3°  L'emploi  des  connaissances  personnelles. 

Il  appelle  maçonnerie  la  science  quelconque  qui  est 
le  but  de  l'institution. 

Il  appelle  institution  maçonnique  l'école  dans  la- 
quelle on  apprend  à  connaître  et  à  pratiquer  cette 
science. 

Or,  la  science  maçonnique  faisant  partie  de  la  science 
universelle  est  aussi  ancienne  que  le  monde,  bien  que 
le  terme  maçonnerie  soit  récent  et  accidentel. 

L'institution  maçonnique  contient  diverses  écoles 
qui  se  nomment  :  Symboliques,  Théoriques  et  Prati- 
ques. 

Cette  institution  n'a  pu  être  établie  qu'après  la  con- 
naissance   des  principales  révélations  du    Temple  de 


40  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Jérusalem,  qui  est  le  type  fondamental  de  la  partie 
symbolique  préparant  aux  deux  autres  (1). 

La  classe  symbolique  a  voulu  expliquer  les  symboles 
au  gré  de  son  imagination  ;  d'où  une  foule  de  systèmes, 
plus  ou  moins  faux.  Entre  tous,  celui  de  Hund  (Stricte 
Observance  templière  réformée  d'Allemagne)  est  un 
des  moins  mauvais,  en  limitant  au  xive  siècle  l'origine 
de  l'institution. 

Mais  comme  la  maçonnerie  a  un  but  unique,  l'éclec- 
tisme des  Allemands  est  un  vice  fondamental,  car  ils 
amalgament  toutes  les  connaissances  secrètes  qui  sont 
à  leur  portée  pour  en  faire  un  tout. 

Dans  la  véritable  doctrine  maçonnique,  explique 
Willermoz  (2),  il  y  a  dans  l'homme  deux  extrémités 


(1)  Dans  une  lettre  du  20  janvier  1780,  Willermoz  écrit  au  duc 
de  Brunswick  :  «  La  f.'.-m.-.  fondamentale  n'a  pas  essentiellement 
d'autre  but  que  la  connaissance  de  l'homme  et  de  la  nature  ; 
étant  fondée  sur  le  Temple  de  Salomon,  elle  ne  peut  pas  être  étran- 
gère à  la  science  de  l'homme,  puisque  tous  les  sages  qui  ont  existé 
depuis  sa  fondation  ont  reconnu  que  ce  fameux  Temple  n'a  existé 
lui-même  dans  l'univers  que  pour  être  le  type  universel  de 
l'homme  général  dans  ses  états  passés,  présents  et  futurs,  et  le 
tableau  figuré  de  sa  propre  histoire.  »  Et,  le  30  mai  suivant,  au 
même  personnage  :  «  Nous  nous  fixons  sur  la  base  de  la  maçon- 
nerie qui  est  le  Temple  de  Jérusalem,  parce  que  ce  temple  fameux 
est  le  type  universel  de  la  vraie  science  de  l'homme,  substitué,  à 
cause  de  sa  perfection,  à  tous  les  types  ou  symboles  qui  l'avaient 
précédé  ..  Ce  temple  est  miraculeux.  » 

Le  Temple  de  Salomon  est  le  type  parfait  d'une  Loge  et  Hiram 
son  architecte  en  est  le  maître  par  excellence.  Ce  symbolisme  ma- 
çonnique est  emprunté  à  deux  livres  de  la  Bible  :  les  Rois  et  les 
Paralipomènes. 

(2)  Le  20  mai  1782,  Willermoz  écrit  à  Hangwitz  :  «  J'admets 
comme  vous  une  union  ternaire  dans  le  composé  de  l'homme 
actuel,  savoir  :  esprit,  âme  et  corps  matériel  terrestre,  ainsi  que  la 
grande  supériorité  du  premier  et  la  grande  infériorité  du  troi- 
sième... Vous  admettez  dans  la  deuxième  puissance  ou  âme  une 
grande  vertu  et  force  magique,  dont  je  ne  comprends  pas  la  va- 
leur ni  même  les  eflets.  » 


LES   PRÉCURSEURS  11 

opposées  de  son  individu  :  la  nature  spirituelle-intel- 
lectuelle (par  laquelle  il  est  image  divine)  ;  la  nature 
corporelle-élémentaire.  Il  a,  en  plus,  une  nature  mixte 
ternaire,  d'esprit,  d'âme  et  de  corps. 

Ces  trois  natures  ont  donné  naissance  à  trois  sciences 
maçonniques  successives,  qu'on  appelle  aussi  ordres 
et  genres. 

Ces  trois  sciences  réunies  forment  la  science  univer- 
selle de  l'homme-général,  que  seul  Jésus-Christ  a  eue. 

Ces  sciences  étant  essentiellement  vraies  ont  des  ré- 
sultats évidents,  chacune  dans  son  genre. 

Il  n'y  a  que  trois  systèmes  maçonniques  diffé- 
rents (1)  : 

1°  Le  matérialisme  pur,  qu'il  abhorre  ; 

2°  La  Stricte  Observance  fondée  par  F  apôtre  saint 
Jean  ; 

3°  Le  système  suédois  fondé  par  saint  Pierre. 

Quant  à  la  pratique  de  la  bienfaisance  que  la  ma- 
çonnerie prétend  avoir  pour  but  de  pratiquer,  Willer- 
moz  la  réduit  à  sa  juste  valeur  dans  une  lettre  du 
31  décembre  1785,  au  duc  d'Havre  :  «  Le  but  de  la 
bienfaisance,  dit-il,  tout  louable  qu'il  est,  n'exigeant  par 
lui-même  ni  mystères,  ni  serments,  et  n'expliquant  rien, 
ne  peut  être  le  vrai  but  de  l'initiative  maçonnique.  » 


C'est  avec  ces  multiples  données  métaphysiques  que 
se  forma  la  mentalité  des  f.\-m.\  du  xvme  siècle.  On 
peut  facilement  s'imaginer  le  pathos,  les  puérilités,  les 
rêves  antireligieux  et  antisociaux  qui  résultèrent  de  la 


(1)  Lettre  du  27    septembre   1780  de  Willermoz    à  Charles  de 
Hesse. 


42  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

mise  en  œuvre  de  ces  théories,  la  plupart  suran- 
nées et  obscures,  lorsqu'on  verra  le  travail  déloge  effec- 
tué par  des  gens  d'intelligence  souvent  ordinaire, 
d'une  instruction  insuffisante,  jouant  à  la  philosophie 
comme  au  pharaon,  à  la  bouillotte  ou  au  lansquenet. 
Combien  d'esprits  se  détraquèrent,  combien  de  braves 
gens  tournèrent  à  la  monomanie  maçonnique,  de  la 
meilleure  foi  du  monde,  tels  les  Martines  Pasqually, 
les  Bacon  de  la  Chevalerie,  les  Savalète  de  Lange, 
les  Luxembourg,  les  Willermoz,  aussi  bien  que  la 
duchesse  de  Brancas,  la  marquise  de  Lacroix,  Beau- 
chaine,  Rœttiers  de  Montaleau,  Alliette,  Stroganoff, 
Chambonas,  Moët,  le  marquis  de  Thomé,  Cagliostro 
et  la  foule  des  maçons  moins  célèbres  !  Pour  les  uns 
c'était  une  élégance,  pour  les  autres  une  religion. 

Comment  tous  ces  cerveaux  en  ébullition  furent-ils 
menés  vers  un  but  commun  ?  Dans  quelle  organisation 
matérielle  les  adeptes  furent-ils  enrégimentés  ?  Com- 
ment furent-ils  dirigés  ?  Par  un  homme,  par  un  groupe 
ou  par  une  idée  ? 

Y  eut-il  un  seul  initié  de  la  première  heure,  d'un 
esprit  assez  profond,  assez  perspicace,  pour  entrevoir, 
en  1721,  où  devait  conduire,  en  1773  et  en  1789,  la 
mise  en  pratique  des  dogmes  qu'il  pratiquait  dans  les 
loges  ? 

Quant  à  nou6,  nous  croyons  que  l'idée  fut  plus  forte 
que  les  hommes,  qu'elle  les  entraîna  pour  la  plupart 
malgré  eux  et  à  leur  insu.  Combien  peu  nombreux 
furent  ceux  qui  se  retirèrent  de  l'Ordre,  à  la  veille  du 
cataclysme  !  Parmi  ceux  qui  virent  clair,  combien  osè- 
rent protesteret  brûler  ce  qu'ils  avaient  adoré?  Com- 
bien comprirent  que  le  danger  était  moins  dans  ces 
doctrines,  surannées,  dont  l'interprétation  souvent  fan- 
taisiste ne  pouvait  laisser  de  longues  traces,  que  dans  la 


LES    PHÉCURSEUKS  43 

mise  en  pratique,  dans  l'ordre  social  et  politique,  d'un 
usage  qui  avait  eu  sa  raison  d'être  dans  une  corpora- 
tion professionnelle  :  l'égalité  pratiquée  en  loge,  expri- 
mée par  le  vote  égal  de  tous  les  membres  à  la  majorité 
des  voix  ?  Cette  coutume,  simple  acte  matériel  dans  une 
réunion  d'associés  discutant  des  choses  et  des  hommes 
de  leur  métier,  mise  en  pratique  par  des  penseurs 
qui  voulaient  réformer  le  ciel  et  la  terre,  devint 
une  idée  et  comme  le  dogme  essentiel  de  la  maçonne- 
rie. Après  avoir  dominé  et  poussé  l'institution  tout 
entière,  après  l'avoir  mise  en  opposition  avec  ceux  dont 
il  niait  la  supériorité,  ce  pseudo-dogme  la  fit  s'attaquer 
à  Dieu  même,  sous  prétexte  d'inégalité  à  supprimer  ; 
c'est  ainsi  que  la  f.\-m.\  fut  menée  aux  doctrines  pan- 
théistes, pour  aboutir  au  matérialisme  religieux  et  à 
l'anarchie  sociale. 


CHAPITRE  II 
LA  PÉRIODE  DE  TRANSITION 

La  f.'.-m.'.  corporative.  —  Les  maçons  anglais.  —  Les  statuts.  — 
Les  landmarks.  —  La  f.'.-m.".  jacobite.  —  Les  Rose-Croix. 
—  Ahsmole.  —  Wren.  —  Desaguliers.  —  Ramsay.  —  Les  hauts 
dignitaires  de  la  f.'.-m.\  jacobite. 

Si  par  franc-maçonnerie  on  entend  désigner  les  an- 
ciennes corporations  de  maçons  travailleurs,  on  peut 
la  faire  remonter  aux  époques  les  plus  reculées. 

Lorsque  les  hommes  cessèrent  la  vie  nomade,  il  se 
forma  des  associations  de  constructeurs  pour  édifier 
des  abris  durables  et  des  remparts  protecteurs.  L'ar- 
chitecture devint  un  art,  art  difficile,  demandant  des 
connaissances  spéciales  et  empiriques  avant  le  dévelop- 
pement des  sciences  exactes.  Les  constructeurs  créèrent, 
en  quelque  sorte,  une  première  aristocratie,  exclusive 
et  jalouse,  dont  les  services  étaient  indispensables  aux 
Etats  qui  s'aggloméraient  et  se  formaient  peu  à  peu. 
L'Association  s'imposa,  parce  qu'un  individu  isolé  ne 
pouvait  faire  seul  une  construction  importante  et  parce 
qu'il  fallait  des  connaissances  professionnelles.  En 
construisant  des  remparts,  on  formait  des  centres  de 
paix,  où  l'homme  pouvait  penser  avec  sécurité.  Il  est 
vraisemblable  qu'en  dehors  du  peuple  de  Dieu,  les 
premiers  constructeurs  eurent  une  religion  à  eux,  basée 
sur  Tart  de  bâtir,  comme  la  religion  des  peuples  no- 
mades était  inspirée  par  la  contemplation  des  astres. 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  1") 

Les  nomades  avaient  regardé  le  ciel,  les  maçons  regar- 
dèrent la  terre  (1). 

Pour  le  maçon  corporatif,  l'univers  était  un  immense 
chantier  de  construction.  Son  rêve  ou  mieux  son  idéal 
correspondait,  j'imagine,  à  un  travail  incessant  qui, 
n'ayant  jamais  commencé,  ne  devait  jamais  finir,  car 
la  notion  de  l'infini  est  instinctive  chez  l'homme  qui 
pense  ;  c'est  la  première  manifestation  de  l'idée  de  Dieu 
qui  germe  dans  son  cerveau  :  le  plus  grand  que  tout, 
le  plus  petitque  rien,  ont  toujours  hanté  l'âme  humaine. 
De  là  l'idée  d'un  Grand  Ouvre,  temple  idéal,  de  plus  en 
plus  parfait,  immense,  universel,  infini.  Sous  la  forme 
symbolique  nous  retrouverons  les  traces  de  ces  rêves 
antiques  dans  les  franc-maçonneries  qui  se  sont 
superposées  à  la  franc-maçonnerie  corporative. 

En  Egypte  et  en  Syrie,  les  associations  de  construc- 
teurs furent  sacerdotales  ; 

En  Grèce,  nous  trouvons  les  architectes  dyonisiens  ; 

A  Rome,  des  collèges  de  constructeurs. 

Lorsque  l'Occident  commencera  à  renaître,  après 
l'absorption  des  barbares  envahisseurs,  nous  constate- 
rons, en  Lombardie,  la  présence  de  sociétés  de  maçons 
dont  le  centre  fut  Corne,  d'où  le  nom  consacré,  au 
xve  siècle,  de  magistri  comacini. 

De  la  Lombardie  ils  essaimèrent  dans  toute  l'Eu- 
rope, où  ils  construisirent  cathédrales,  palais,  routes 
et  canaux.  Un  diplôme  du  pape  Nicolas  III  (1277)  con- 
firma leurs  privilèges,  qui  furent  renouvelés  en  1334 
par  Benoît  XII.  Ils  obtinrent  alors  des  franchises  delà 
papauté  :  exemptions  d'impôts  et  de  services  militaires; 
juridictions  spéciales,  etc.,  d'où  le  nom  de  maçons 
affranchis,  ou  francs-maçons. 

(1)  Voyez  sur  ce  sujet  Oswald  Wirth,  Manuel  de  l'apprenti. 


46  LA    FRANC-MAÇONNERIE  EN    FRANCE 

Que  des  novateurs  plus  ou  moins  sincères,  des  kab- 
balistes  à  la  recherche  des  mots  magiques  formés  par 
les  dernières  lettres  de  versets  de  la  Bible,  que  des 
alchimistes  à  la  recherche  de  la  pierre  philosophale, 
se  soient  abrités  dans  ces  corporations  comme  dans 
des  lieux  d'asile,  rien  de  plus  vraisemblable;  mais  la 
franc-maçonnerie  corporative  n'en  était  pas  moins 
exclusivement  une  société  de  constructeurs,  soumis 
aux  gouvernements  des  pays  dans  lesquels  ils  travail- 
laient, pratiquant  avec  zèle  leurs  devoirs  religieux. 

Pendant  le  xvie  siècle,  les  guerres  de  religion,  pen- 
dant la  première  moitié  du  xvne  siècle,  la  guerre  de 
Trente  ans  et  les  guerres  civiles  anglaises  ralentirent 
les  entreprises  de  grandes  constructions  ;  au  surplus, 
cathédrales  et  palais  étaient,  pour  la  plupart,  édifiés. 
Les  gildes,  sociétés  et  corporations  de  maçons  connu- 
rent une  période  de  marasme  et,  pour  ne  pas  mourir, 
elles  reçurent  parmi  leurs  membres  des  protecteurs 
insignes  sous  le  nom  de  maçons  acceptés. 

Il  n'y  a  aucun  intérêt,  dans  la  question  qui  nous 
occupe,  et  au  surplus  il  n'y  a  aucune  certitude,  à  vou- 
loir fixer  la  date  exacte  à  laquelle  les  f.-.-m.'.  corpo- 
ratifs s'organisèrent  en  Angleterre.  Il  serait  tout  aussi 
téméraire  de  vouloir  reproduire  les  statuts  des  corpo- 
rations du  moyen  âge,  dont  V authenticité  paraît  tout  au 
moins  douteuse,  comme  par  exemple  «  les  lois  et  obli- 
gations soumises  à  ses  frères  maçons  par  le  prince 
Edwin  »,  en  926.  Cela  du  reste  importe  peu  à  la  for- 
mation de  la  f.-.-m.*.  spéculative  de  1717. 


Ce  qui  paraît  sinon  certain,  tout  au  moins  vraisem- 
blable, c'est  qu'il  y  avait  à  la  fin  du  xvie  et  au  xvnc  siè- 


LA    PÉRIODE  DE    TRANSITION  47 

cle,  en  Angleterre  et  en  Ecosse,  des  corporations  de 
maçons  constructeurs,  sous  le  nom  de  frcemasons, 
et  que  ces  corporations,  comme  toutes  les  sociétés 
de  métiers,  avaient  des  statuts.  Il  est  admissible  et 
même  vraisemblable  que  ces  corporations  se  mirent 
volontiers  sous  la  protection  des  souverains  ou  des 
personnages  influents,  et  il  est  possible,  comme  le  dit 
Preston  (p.  136  et  137),  qu'en  1507,  après  la  démission 
de  sir  Tbomas  Sackville  de  sa  qualité  de  g.*,  m.*,  des 
maçons  d'York,  la  confraternité  se  soit  divisée  en  deux 
branches,  l'une  pour  le  nord  de  l'Angleterre,  avec  le 
comte  de  Bedford  comme  g.',  m.*.,  et  que  les  mêmes 
fonctions  aient  été  remplies  pour  le  sud  par  sir  Tho- 
mas Gresham.  Ce  qui  est  encore  possible,  c'est  que  les 
rois  Jacques  Ier  (1603),  Charles  Ier  (1625)  et  Charles  II 
(1660)  aient  figuré  parmi  les  successeurs  de  sir  Gres- 
ham ;  mais  il  me  paraît  certain  que  sir  Christophe 
Wren  était  bien  g.*,  m.',  de  la  corporation  en  1685. 

Je  ne  discuterai  pas  la  réalité  de  la  construction  de 
la  tour  et  de  l'abbaye  de  Kilwinning  en  Ecosse  par  les 
f.\-m.  *.  en  1140  ;  mais  j'admettrai  sans  hésiter  que, 
pendant  le  xvne  siècle,  Kilwinning  était  un  centre  impor- 
tant de  maçons  constructeurs  écossais  (1).  S'il  me  paraît 
douteux  que  Edouard  Ier  Plantagenet,  alors  qu'il  était 
prince  héritier,  ait  été  initié  par  Raymond  Lulle  à  la  fin 
du  xme  siècle,  j'admettrai  volontiers  qu'au  commence- 
ment du  xvme  siècle,  depuis  de  nombreuses  années, 
les  Saint-Clair  barons  de  Rosslyn,  comtes  de  Orkney 
et  de  Caithness,  étaient  juges  et  patrons  héréditaires 
des  maçons  écossais. 

Il  me  paraît  certain  également  que  Guillaume   III 


(1)  Dans  le  t.    II,    nous    reviendrons   longuement    sur  le    rite 
d'Hérodom  de  Kilwinning. 


48  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

i 

d'Orange  fut  initié  vers  1694,  ou  mieux  que  certaines 
loges  de  maçons  anglais  se  mirent  à  cette  époque  sous 
sa  protection,  et  qu'en  cette  qualité  il  présida  plusieurs 
fois  des  assemblées  à  Hampton  Court.  Je  tiens  aussi 
pour  authentiques  dans  leur  ensemble  «  les  anciens 
devoirs  et  statuts,  recueillis  par  ordre  de  ce  souverain 
en  l'année  1694  »,  publiés  par  Krauss  et  traduits  par 
Daruty  (1).  Comme  ils  me  paraissent  le  seul  document 
certain  relatant  l'organisation  de  la  corporation,  on 
doit  attacher  une  grande  importance  au  texte  de  ces 
statuts,  qui  sont  ceux  qui  furent  adoptés  en  1717  par 
la  franc-maçonnerie  spéculative,  modifiés  et  consi- 
dérablement augmentés  en  1721  par  Anderson  et 
Desaguliers.  Ils  sont  conçus  en  ces  termes  : 

I.  Votre  premier  devoir  est  d'être  fidèles  à  Dieu  et 
d'éviter  toutes  les  hérésies  qui  le  méconnaissent. 

IL  De  plus,  vous  devez  aussi  être  fidèles  sujets  de 
votre  roi  et  obéir  à  ceux  qu'il  a  investis  de  l'autorité. 
Vous  ne  devez  vous  associer  à  aucune  haute  trahison 
ou  perfidie,  mais  en  donner  avis  au  roi  ou  à  son  conseil. 

III.  De  plus,  vous  devez  être  sincères  vis-à-vis  de 
tous  les  hommes  et  particulièrement  à  l'égard  les  uns 
des  autres,  vous  instruire  et  vous  aider  mutuellement 
l'un  l'autre,  et  par-dessus  tout  faire  aux  autres  ce  que 
vous  voudriez  qu'ils  fissent  pour  vous. 

IV.  De  plus,  vous  devez  fréquenter  assidûment  les 
loges  afin  d'y  recevoir  constamment  l'instruction,  pré- 
server les  anciens  usages  et  garder  fidèlement  le  secret 
sur  tout  ce  que  vous  aurez  pu  apprendre  des  choses 
concernant  la  maçonnerie,  afin  que  les  étrangers  n'y 
soient  pas  initiés  d'une  façon  irrégulière. 


(1)  Voir   aux     appendices     un    texte     différent     reproduit     par 
M.  Teder  dans  journal  le  Hiram  (mai-juillet  1908). 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  19 

V.  Vous  devez  aussi  ue  pas  voler  ni  receler,  mais 
être  fidèles  au  propriétaire  qui  vous  paie  et  au  maître 
pour  qui  vous  travaillez  ;  veillez  aussi  aux  intérêts  du 
propriétaire  et  travaillez  à  son  avantage. 

VI.  De  plus,  vous  devez  aimer  tous  les  maçons,  les 
traiter  de  compagnons  ou  frères  et  ne  jamais  les  appeler 
par  d'autres  noms. 

VII.  De  plus,  vous  ne  devez  pas  séduire  la  femme 
de  votre  frère  pour  lui  faire  commettre  un  adultère,  ni 
violer  sa  fille  non  plus  que  sa  servante,  ni  lui  causer 
de  la  honte  d'aucune  façon,  ni  l'exposer  à  perdre  son 
travail. 

VIII.  De  plus,  vous  devez  payer  honnêtement  votre 
nourriture  et  votre  boisson,  là  où  vous  vous  arrêtez. 
Vous  ne  devez  commettre  aucun  crime  ni  faire  aucune 
vilenie  qui  puisse  jeter  la  déconsidération  sur  la  société 
des  maçons. 

Tels  sont  les  devoirs  généraux  auxquels  sont  assu- 
jettis tout  maître  maçon  et  ses  frères. 

Il  ressort  de  ce  document,  et  cela  est  d'une  impor- 
tance capitale,  qu'à  la  fin  du  xvne  siècle  il  y  avait  en 
Angleterre  : 

Une  corporation  de  francs-maçons  ; 

Qui  s'appelaient  entre  eux  :  frères  ; 

Qu'il  y  avait  des  maîtres,  des  compagnons  et  cer- 
tainement des  apprentis,  bien  qu'il  n'en  soit  pas  fait 
mention  ; 

Que  pour  entrer  dans  la  corporation  il  fallait  subir 
une  initiation  ; 

Qu'on  devait  fidèlement  garder  le  secret  sur  tout  ce 
qu'on  pouvait  apprendre  concernant  la  maçonnerie. 

On  sait,  de  plus,  que,  dans  les  loges  corporatives,  les 
maçons  anglais  votaient  par  tête  pour  tout  ce  qui  con  - 
cernait  leur  profession. 

LA    FRANC-MAÇONNERIE.  —  T.  I.  4 


50  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Tout  porte  à  croire  que  ces  anciens  devoirs  consti- 
tuent les  Landmarks  (1),  sur  le  texte  desquels  les 
maçons  ne  sont  pas  encore  d'accord  et  qui  sont  les 
articles  essentiels  de  la  constitution  de  leur  Ordre, 
ceux  auxquels  ils  se  sont  engagés,  lors  de  la  fondation, 
à  ne  jamais  rien  changer,  même  du  consentement  una- 
nime de  tous  les  maçons  de  toutes  les  loges  (2).  Aussi 
ces  Landmarks  ont  -ils  disparu,  et  les  écrivains  maçon- 
niques les  plus  érudits  ne  sont  d'accord  ni  sur  leurs 
termes  ni  sur  leur  nombre.  Alors  que  Paton  en  compte 
vingt-cinq,  Findel  n'en  admet  que  neuf  (3). 


Il  paraît  certain  qu'ainsi  qu'on  l'a  vu  pratiquer  en 
Allemagne,  lorsqu'il  s'est  agi  de  l'élection  des  empe- 
reurs, ou  de  prendre  un  parti  dans  les  guerres  de  reli- 
gion, aussi  bien  que  dans  les  Flandres  sous  Louis  XI, 
lorsqu'on  voulait  soulever  un  pays,  on  s'adressait  aux 
gildes  et  aux  corporations  qui  présentaient  des  grou- 
pements, riches,  puissants,  organisés  et  armés.  De 
même  en  Angleterre,  lorsque  la  lutte  s'engagea  entre  la 
royauté  des  Stuarts  et  le  Parlement,  et  plus  tard  entre 

(1)  Les  Landmarks  (bornes  des  propriétés). 

(2)  L'opinion  personnelle  de  Chabriaud  est  qu'on  peut  les  résumer 
en  trois  articles  : 

1°  Croyance  en  l'existence  de  Dieu  et  à  l'immortalité  de  l'âme  ; 

2°  Adoption  de  la  légende  d'Hiram  et  de  toutes  ses  conséquences 
relatives  aux  cérémonies  et  aux  détails  du  rituel  ; 

3°  Application  du  régime  démocratique  au  gouvernement  des 
simples  atel.V  et  des  GG.\  LL.\ 

(3)  D'après  le  Dr  Albert  Mackey,  G.'.  Secret.*,  du  Sup.\  Cons.'. 
de  Charleston,  25  ;  d'après  le  Dr  Olivier,  8  ;  d'après  John  W.  Si- 
mons,  15  ;  d'après  Robert  Morris,  17  ;  d'après  Lockwood,  19  ; 
d'après  la  Constitution  de  la  G.'.  L.\  de  New- York,  31.  (Chaîne 
d'union  III.  197.309.403.) 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  51 

les  Stuarts  et  la  maison  d'Orange  ou  celle  de  Hanovre, 
les  partis  politiques  durent  grouper  autour  d'eux  les 
corporations.  C'était  le  moyen  le  plus  pratiquera  solu- 
tion la  plus  élégante,  comme  nous  dirions  aujourd'hui. 
Les  actes  de  rébellion  ou  de  guerre  civile  prenaient 
ainsi  l'allure  de  mouvements  populaires,  de  manifes- 
tations nationales.  Il  est  certain  que  les  Stuarts,  depuis 
Jacques  Ier  jusqu'à  Charles  III,  usèrent  de  ces  moyens, 
tout  au  moins  à  l'égard  des  francs-maçons.  Il  est  cer- 
tain aussi  qu'ils  copièrent  l'organisation  maçonnique 
pour  l'introduire  dans  les  régiments  et  en  faire  des 
partis  politiques.  En  1689,  nous  verrons  les  régiments 
écossais  et  irlandais  débarquer  en  France,  avec  leurs 
cadres  militaires  et  leurs  cadres  maçonniques.  Les 
premiers  étaient  les  agents  exécutifs  et  les  seconds  le 
pouvoir  directeur. 

Mais  en  même  temps,  ou  à  peu  près,  s'était  introduit 
dans  la  f.\-m.\  corporative  un  élément  philosophique 
qui  plus  tard  devait  faire  naître  et  cimenter  la  fusion 
de  la  f.\-m.\  jacobite  avec  la  f.\-m.\  orangiste  sur  le 
terrain  égalitaire. 

Dans  les  loges  militaires,  en  effet,  comme  dans  les 
loges  civiles,  en  franchissant  la  porte  du  temple  le 
maçon  perdait  ses  grades  militaires  et  civils  pour  avoir 
des  droits  égaux  à  ceux  de  son  frère  et  n'obéissait  qu'à 
la  hiérarchie  maçonnique,  établie  par  le  vote  de  tous 
les  maçons.  En  loge,  le  colonel  apprenti  était  présidé 
par  le  capitaine  maître,  comme  le  rose-croix  non 
officier  de  loge  obéissait  au  vénérable  maître.  Sous  ce 
rapport  la  f.\-m.\  jacobite  était  donc  aussi  dangereuse 
que  la  f.\-m.\  spéculative. 

Lorsque  le  temps  consacra  le  loyalisme  des  parti- 
sans de  la  maison  de  Hanovre,  lorsque  les  Stuarts  per- 
dirent tout  crédit  et  ne  furent  plus  représentés  que  par 


52  LA    FRANC-MAÇONNERIE  EN    FRANCE 

des  collatéraux  éloignés,  les  régimes  séparés  eurent 
intérêt  l'un  et  l'autre  à  signer  une  trêve  et  à  vivre  paral- 
lèlement, d'accord  sur  la  doctrine  générale,  sinon  sur 
les  manifestations  extérieures  du  culte. 

Un  premier  rapprochement  sérieux  se  fit  après  la 
défaite  du  prétendant  à  Culloden,  sans  parler  des  dé- 
fections individuelles  qui  précédèrent  ce  combat  déci- 
sif. Après  des  luttes  temporaires,  provoquées  par  des 
questions  d'intérêt  matériel  ou  de  préséance  et  les  con- 
cordats provisoires,  en  1772,  1784,  1799,  1807  et  1821, 
il  s'établit  un  modus  vivendi  qui  dure  encore.  Les 
Écossais  ont  oublié  les  causes  premières  de  leur  fon- 
dation, comme  les  membres  du  Grand  Orient  ont 
oublié  leur  origine  au  point  d'ignorer  complètement  des 
faits  qui  leur  sont  devenus  indifférents. 


Un  groupement  spéculatif  s'était  introduit  dans  la 
f.\-m.\  en  même  temps  que  la  politique  jacobite  :  la 
société  des  Rose-Croix. 

Nous  avons  raconté,  au  chapitre  précédent,  comment, 
à  la  suite  d'une  équivoque,  créée  de  toutes  pièces  par 
l'imagination  d'Andréa,  des  sociétés  réelles  de  Rose- 
Croix  s'étaient  formées  en  Allemagne  et  en  Angleterre, 
sur  le  modèle  soi-disant  inventé  par  Christian  Rose- 
Croix. 

La  société,  d'abord  composée  de  quatre  membres, 
s'était  accrue  bientôt  de  quatre  membres  nouveaux,  et 
d'Allemagne  s'était  répandue  en  Europe. 

En  1623  il  fut  constaté  à  Paris  que  l'ordre  entier 
était  alors  composé  de  trente-six  membres  :  six  à 
Paris  ;  autant  en  Italie  et  en  Espagne  ;  douze  en  Alle- 
magne ;  quatre  en  Suède  et  deux  en  Suisse. 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  53 

Vers  1630,  elle  était  puissamment  organisée  à  Lon- 
dres. Un  des  membres  les  plus  actifs  de  celte  société, 
en  Angleterre,  fut  Elias  Àshmole  (né  à  Lilchfield  le 
23  mai  1617,  mort  a  Londres  le  18  mai  1692).  Il  était 
connu  sous  le  nom  de  Mercuriophile  anglais. 

Après  avoir  fait  de  bonnes  études,  grâce  à  la  protec- 
tion du  baron  Pagett,  Ashmole  avait  été  nommé  solli- 
citor  en  1638,  et  avait  épousé  la  même  année  Eleanor 
Mainwarieg  de  Smollwood  (Cheshire),  qui  mourut  en 
1641  (1). 

Ashmole,  qui  était  antiquaire,  se  retira  alors  dans  son 
pays  natal,  embrassa  avec  ardeur  le  parti  des  Stuarts 
et  en  1644  fut  nommé  commissaire  du  roi  à  Litchfield. 
A  ceux  qui  prétendent  que  Ashmole  était  israélite,  on 
peut  objecter  qu'en  octobre  1646,  il  était  un  des 
membres  les  plus  actifs  du  cercle  catholique  de  Londres 
avec  Lilly  et  Booker  et  qu'il  fut  enterré  dans  l'Eglise 
catholique  de  South  Lambeth. 

Ashmole  aurait  été  introduit  dans  la  société  des 
Rose-Croix  par  William  Backhouse,  puis,  le  16  octobre 
1646,  aurait  été  admis  comme  maçon  accepté  dans  la 
corporation  des  maçons  de  Warrington,  en  même  temps 
que  son  beau-frère  le  colonel  Henri  Mainwarieg  de 
Kerthingham,  sous  le  patronage  de  Richard  Penkett, 
Warden  des  Fellow-Crafts. 

Il  devait  se  retrouver  dans  la  maçonnerie  avec  les 
frères  Thomas  et  Georges  Warton,  le  mathématicien 
William  Oughteed,  les  docteurs  en  théologie  John 
Herwitt  et  John  Prarson  et  l'astrologue  William  Lilly. 

Avec  eux  il  fonda  une  société  qui  avait  pour  but  de 
bâtir  la  maison  de  Salomon,  temple  idéal  des  sciences, 


(1)  Le  ler  mars  1647,   Ashmole  épousa  une  femme  de  vingt  ans 
plus  âgée  que  lui,  veuve  pour  la  troisième  fois. 


54  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

imité  de  ceux  imaginés  par  Morus  dans  Utopia  et  par 
Bacon  dans  la  Nouvelle  Atlantide.  Il  obtint  des  maçons 
de  se  réunir  dans  leur  local  :  Masons'Hall,  in  Mason 
Alley,  Basing  Hall  street.  C'est  certainement  par  cette 
association  de  Rose-Croix  que  la  légende  symbolique 
du  Temple  de  Salomon  et  probablement  celle  d'Hiram, 
empruntées  aux  alchimistes,  furent  introduites  dans  la 
maçonnerie.  Certes  Ashmole  ne  se  doutait  guère  alors 
du  parti  que  la  maçonnerie  spéculative  tirerait,  soixante- 
dix  ans  plus  tard,  de  cette  légende  fantastique. 

La  société  formée  par  Ashmole,  comme  celles  de 
Morus  et  de  Bacon,  devait  rester  secrète  ;  on  devait 
s'y  occuper,  sous  formes  allégoriques,  des  sciences 
naturelles. 

Au  moment  de  l'entrée  d' Ashmole  dans  la  corporation 
des  maçons,  on  ne  procédait  à  aucune  cérémonie  pour 
la  réception  d'un  apprenti.  L'apprentissage  terminé, 
on  passait  compagnon,  sans  initiation,  et  lorsqu'on 
était  chargé  de  la  surveillance  des  travaux,  on  était  reçu 
maître,  après  avoir  présidé  une  loge  ;  ces  divers  grades 
étaient  conférés  à  la  suite  du  vote  des  membres  de  la- 
Loge. 

Les  secrets  du  métier,  sous  l'influence  de  la  société 
mystérieuse  d'Ashmole,  devinrent  l'origine  de  la  légende 
des  secrets  de  la  maçonnerie  spéculative  ;  c'est  vers 
la  même  époque  qu'on  inventa  les  cérémonies  initiati- 
ques, imitées  de  celles  de  l'antiquité  ou  imaginées  par 
des  cerveaux  enclins  au  mysticisme  (1).  Avec  les  mys- 
térieux et  obscurs  symboles  introduits  dans  les  rituels, 
suivant  les  besoins  de  la  cause,  le  grand  maître  ma- 
çon assassiné  peut  indifféremment  être  Hiram,  Jacques 

(1)    Le   grade  d'apprenti  aurait    été  inventé    en  1646,    celui    de 
compagnon  en  1648  et  celui  de  maître  en  1652. 


LA    PÉRIODE    1>K    TRANSITION  .>■> 

Molay  ou  Charles  Ier.  Le  temple  qu'on  veut  construire 
peut  être  celui  de  Salomon,  comme  la  restauration  des 
Stuarts.  Entré  dans  cette  voie  symbolique,  il  n'y  avait 
plus  de  raison  pour  s'arrêter,  et  chaque  année  on  inven- 
tait de  nouveaux  grades.  En  Angleterre,  le  Puissant 
Maître  Irlandais  succédait  au  Maître  Irlandais  et  au 
Parlait  Maître  Irlandais  ;  en  Ecosse,  le  Royal  Arch  se 
superposait  au  Chevalier  du  Temple,  au  Novice  et  au 
Maître  Ecossais.  C'est  certainement  le  grade  de  Cheva- 
lier du  Temple  (de  Salomon)  qui  donna  plus  tard  l'idée 
d'inventer  la  Légende  des  Templiers. 

C'est  ainsi  que  la  f.\-m.\,  pendant  le  xvne  siècle, 
devint  l'Art  Royal  auquel  on  pouvait  aussi  bien 
donner  la  signification  d'étude  suprême  de  la  nature, 
que  d'étude  des  moyens  à  employer  pour  rétablir  les 
Stuarts  sur  le  trône  d'Angleterre. 

Lorsque  Charles  II  monta  sur  le  trône,  la  f.\-m.\ 
perdait  sa  raison  d'être  politique.  Aussi,  comme  elle 
languissait,  les  maçons  acceptés  imaginèrent  de  greffer 
sur  leur  corporation  une  société  de  bienfaisance  et 
d'humanité  ;  sous  prétexte  de  rétablir  la  paix  entre  les 
catholiques,  les  épiscopaux  et  les  presbytériens,  ils 
déclarèrent  que  leurs  membres  pourraient  appartenir 
indifféremment  à  toutes  les  religions,  et  c'est  après  cette 
adjonction  à  leurs  statuts  que,  le  27  décembre  1663, 
Henry  Jermyn,  comte  de  Saint-Alban,  fut  nommé 
G.*.  M.',  dans  une  séance  présidée,  dit  la  légende,  par 
le  roi  Charles  IL 

La  f.'.-m.*.  sous  sa  nouvelle  forme  commence  alors 
à  prendre  corps.  D'après  Paton,  en  effet,  c'est  sous  la 
grande  maîtrise  du  comte  de  Saint-Alban  qu'on  adopta 
les  articles  suivants  des  ordonnances  (1)  : 

(1)  La  preuve  de  l'authenticité  de  ces  articles  reste  à  établir. 


56  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

I.  Nul,  quel  que  soit  son  rang,  ne  sera  reçu  free- 
mason,  si  ce  n'est  dans  une  loge  composée  d'au  moins 
cinq  freemasons. 

II.  Nul  ne  sera  reçu  s'il  n'est  sain  de  corps,  de  nais- 
sance honorable,  de  bonne  réputation  et  fidèle  observa- 
teur des  lois  du  pays. 

III.  Nul  freemason  ne  sera  admis  dans  une  loge 
s'il  n'est  muni  d'un  certificat  du  maître  de  la  loge  dans 
laquelle  il  a  été  reçu  ;  ce  certificat,  écrit  sur  parche- 
min, constatera  l'époque  et  le  lieu  de  la  réception... 

V.  A  l'avenir  la  Fraternité  sera  administrée  par  un 
G.*.  M.',  et  par  autant  de  surveillants  qu'il  sera 
nécessaire. 

VI.  Nul  ne  sera  reçu  freemason  avant  l'âge  de 
vingt  et  un  ans. 


Cependant  la  corporation  des  maçons  professionnels 
n'était  pas  encore  morte,  car  en  1666,  après  l'incendie 
considérable  qui  dévora  tout  un  quartier  de  Londres, 
la  corporation,  sous  les  ordres  de  l'architecte  Christophe 
Wren,  s'engagea  à  reconstruire  rapidement  le  quartier 
détruit.  Sept  ans  plus  tard,  sous  la  direction  du  même 
architecte,  elle  commença  la  construction  de  Saint- 
Paul,  dont  le   roi  Charles  II  posa  la  première  pierre. 

Le  comte  d'Arlington  était  alors  G.'.  M.'.  (1);  à  sa 
mort,  en  1685,  Wren  fut  nommé  à  sa  place. 

(1)  L'extrait  suivant  du  Journal  cTAshmole,  reproduit  par 
William  Preston,  The  origin  of  framasonry  (1871),  note  p.  139, 
établit  très  nettement  qu'il  y  avait  en  1682  de  nombreux  maçons 
acceptés  dans  les  loges  corporatives  : 

<(  Le  10  mars  1682,  vers  cinq  heures  de  l'après-midi,  je  reçus 
une  convocation  à  me  rendre  à  une  loge  qui  devait  se  tenir  le  len- 
demain 11    mars,   à  Londres,  à  Masons'Hall.  J 'y  fus,  et  vers   midi 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  57 

En  1688  Jacques  II  fut  détrôné.  Wren,  qui  était 
jacobite  ardent,  occupa  cependant  ses  fonctions  jus- 
qu'en 1005,  dale  à  laquelle  il  fut  remplacé  par  Charles 
Lennox,  duc  de  Richmond,  maître  de  la  loge  de  Chi- 
chester,  fils  naturel  de  Charles  II  et  de  Louise  de 
Keroual,  Dsse  de  Portsmouth.  La  f.\-m.\  reprenait 
donc  sa  tradition  jacobite.  En  1698,  Wren  était  de 
nouveau  nommé  G.*. -M.*,  et  occupa  ces  fonctions 
jusqu'en  1702.  A  l'avènement  de  la  reine  Anne,  il  fut 
destitué  de  ses  fonctions  d'architecte  de  Saint-Paul.  Il 
se  démit  alors  de  la  G.\  M.\se  ;  il  mourut  à  91  ans, 
dans  la  plus  profonde  retraite  (1). 

En  1702,  la  f.\-m.\  était  encore  à  ce  point  jacobite, 
que  les  maçons    refusèrent  de  continuer    les  travaux 


on  admit  dans  la  société  des  freemasons  sir  William  Wilson, 
chevalier  ;  le  capitaine  Richard  Barthwick  ;  William  Woodman  ; 
William  Gray  ;  Samuel  Taylor  et  William  Wyse.  Admis  depuis 
35  ans,  j'étais  le  plus  vieux  compagnon.  Avec  moi  il  y  avait  les 
compagnons  :  Thomas  Wyse,  maître  de  la  société  des  freema- 
sons pour  l'année  présente,  Thomas  Shorthose  et  sept  freema- 
sons plus  anciens  Tous  nous  prîmes  part,  à  Half  Moon  Tavern 
Cheapside,  à  un  dîner  remarquable,  donné  aux  frais  des  nouveaux 
maçons  acceptés.  » 

(1)  Christopher  Wren  était  né  à  East  Knoyle,  près  Tirbury 
(Wiltshire),  le  20  octobre  1632.  Il  était  fils  d'un  recteur  et  petit-fils 
de  François  Wren,  mercier  à  Londres.  Sa  mère  Mary,  fille  de 
Robert  Gox  de  Fontill  Abbay,  mourut  pendant  qu'il  était  encore 
enfant  et  il  fut  élevé  par  sa  sœur.  Il  avait  11  ans  quand  celle-ci 
épousa  le  mathématicien  William  Holder.  A  l'âge  de  25  ans,  Wren 
succéda  à  Lawrence  Rooke  dans  sa  chaire  d'astronomie  du  collège 
de  Gresham.  En  1660,  il  remplit  les  mêmes  fonctions  à  Oxford.  C'est 
en  1673  seulement  qu'il  abandonna  les  sciences  pour  s'occuper 
d'architecture.  A  la  fin  de  sa  vie,  il  habita  Hampton  Court  et 
Piccadilly,  Saint-James  Street.  Il  vivait  dans  l'intimité  de  Halley, 
Newton,  IsaacBarrowet  Flamstead.  Wren  épousa  en  premières  noces 
une  fille  de  sir  John  Coghill  et  en  secondes  noces  une  fille  de  lord 
Fitz  William.  Il  mourut  à  Londres  le  25  janvier  1723,  dans  son 
fauteuil,  après  dîner. 


58  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

de  la  cathédrale  sous  les  ordres  de  William  Benson, 
inspecteur  des  bâtiments  du  roi  Georges  Ier  (1) 

En  1703,  la  loge  Saint-Paul  prend  une  décision  qui 
montre  comment  la  f.\-m.\  se  transformait  peu  à  peu. 
«  Les  privilèges  de  la  maçonnerie,  dit  cette  décision, 
ne  seront  plus  désormais  réservés  seulement  aux 
ouvriers  constructeurs,  mais,  ainsi  que  cela  se  pra- 
tique déjà,  ils  seront  étendus  aux  personnes  de  tous  les 
états  qui  voudront  y  prendre  part,  pourvu  qu'elles 
soient  dûment  présentées,  que  leur  admission  soit 
autorisée  et  qu'elles  soient  initiées  d'une  manière  régu- 
lière. » 

Bien  que  Wren  n'ait  pas  été  remplacé  dans  ses  fonc- 
tions de  G.*.  M.'.,  les  maçons  n'avaient  pas  déserté  leurs 
loges  jusqu'à  l'achèvement  de  la  cathédrale.  Ce  travail 
terminé,  on  ne  peut  suivre  leurs  traces,  car  ils  n'ont 
plus  de  G.*.  M.*.  Cependant  quatre  loges  de  Londres  se 
réunirent  encore  dans  diverses  tavernes  dont  elles 
prirent  les  noms  :  «  L'Oie  et  le  Gril  o  ;  «  La  Cou- 
ronne »  ;  «  le  Pommier»  et  «  Le  Gobelet  et  les  Raisins  ». 


Les  Stuarts  ayant  été  défaits  en  1715,  d'une  façon 
qui  semblait  définitive,  malgré  l'impopularité  dont 
la  maison  de  Hanovre  était  entourée  dans  la  personne 
de  Georges  Ier,  qui  savait  à  peine  l'anglais  et  séjournait 
le  plus  longtemps  possible  sur  le  continent,  un  Français 
émigré  à  la  suite  de  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes, 
et  devenu  ennemi  féroce  de  son  ancienne  patrie,  le 
Dr  Désaguliers,   songea   à   utiliser   la    maçonnerie  en 


(1)  La  cathédrale  fut  achevée  en  1710,    sous  la    direction  de  son 
fils  et  de  Robert  Mylne. 


LA    PÉRIODE   DE   TRANSITION  59 

complète  décadence  pour  en  faire,  avec  l'approbation 
du  roi  Georges  II,  une  corporation  qui  échapperait  à 
t'influence  des  Stuarts. 

Jean-Théophile,  devenu  JohnTheophilusDcsaguliers, 
était  fils  de  Jean  Désaguliers,  pasteur  protestant  de 
la  congrégation  d'Aitré  ;  il  était  né  à  la  Rochelle,  le 
13  mars  1(583.  Après  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes, 
son  père  s'enfuit  sur  un  navire  et,  pour  soustraire  son 
fils  aux  recherches,  le  cacha  dans  un  tonneau.  Après 
un  court  séjour  à  Guernesey,  il  se  rendit  à  Londres,  où 
son  père  exerça  les  fonctions  de  ministre  de  la  chapelle 
française  protestante  de  Smallow  Street,  puis  établit 
une  école  à  Islington. 

Dès  l'âge  de  17  ans,  Theophilus  partagea  avec  son 
père  la  direction  de  cette  école.  A  la  mort  de  celui-ci 
il  abandonna  l'enseignement  et  entra  à  l'université, 
d'Oxford,  où  il  prit,  en  1709,  le  grade  de  bachelo.  En 
1710,  il  entra  dans  les  Deacons  Orders,  remplaça  le 
Dr  Keil  comme  professeur  de  philosophie  expérimen- 
tale à  Hart  Hall,  se  rendit  à  Londres  le  3  mars  1712, 
et,  en  juillet  1714,  fut  élu  membre  de  la  Royal  Society. 

Le  prince  de  Galles,  depuis  Georges  II,  et  sa  femme 
la  princesse  Caroline,  assistaient  régulièrement  à  ses 
cours.  Malgré  les  faveurs  dont  il  était  comblé,  Désagu- 
liers quitta  l'Angleterre  ;  il  parcourut  la  Hollande,  où  il 
fit  des  cours  qui  eurent  beaucoup  de  succès  ;  il  y  con- 
nut l'astronome  Huyghens;  l'anatomiste  Ruysch  et  le 
médecin  Roerhave  ;  il  comptait  le  philosophe  S'Grave- 
send  parmi  ses  auditeurs. 

De  retour  en  Angleterre,  il  seconda  Newton  devenu 
vieux  dans  ses  expériences  et  ses  démonstrations,  et 
vulgarisa  son  système  sur  les  mouvements  célestes. 

Au  milieu  de  ses  travaux  sérieux,  son  esprit  singu- 
lier l'entraîna  à  publier  un  ouvrage  sur  la  construction 


GO  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

des  cheminées  avec  le  moyen  de  les  empêcher  de  fumer 
(1716).  L'année  suivante  il  publia  :  A  System  of  expéri- 
mental philosophy  proved  by  mechanics,  as  shown  at  the 
public  lectures,  in  a  course  of  expérimentai  philosophy, 
et  en  1728  un  poème  sur  le  système  de  Newton. 

En  1742,  nous  le  trouvons  à  Bordeaux,  où  il  publie 
une  dissertation  sur  l'électricité  des  corps  et  fait  des 
prosélytes  à  la  franc-maçonnerie,  dans  cette  ville  où 
un  groupe  de  commerçants  anglais  avait  déjà  installé 
en  1732  la  loge  connue  plus  tard  sous  le  nom  de  An- 
glaise n°  204.  Desaguliers  mourut  le  29  février  1744. 
Son  fils  Thomas  (1725-1780),  officier  d'artillerie  dans 
l'armée  anglaise,  combattit  constamment  contre  la 
France.  Il  était  à  Fontenoy,  en  1745,  et  au  siège  de 
Belle-Isle  en  1761. 

Le  rôle  de  Desaguliers  dans  la  fondation  de  la  f.\  m.', 
spéculative  fut  considérable.  Il  s'entoura  des  maîtres 
et  surveillants  des  quatre  loges  de  Londres  :  Anthony 
Sayer,  Georges  Payne,  Jacob  Lamball,  maître  char- 
pentier, du  capitaine  Joseph  Elliott,  Goston,  Cordwell, 
Calvert,  Lumley,  Ware,  Madden,  King,  Joshua 
Timson  et  du  Dr  James  Anderson,  ministre  presby- 
térien. C'est  avec  le  concours  de  ces  maçons  profes- 
sionnels et  de  ces  maçons  acceptés,  qu'en  juin  1717 
il  fonda  les  premières  bases  de  la  maçonnerie  spécu- 
lative, sous  la  forme  qui  devait  triompher. 

Néanmoins  la  f.\-m.\  jacobite  n'était  pas  morte  ;  elle 
continuait  à  fonctionner  sur  le  continent,  et  particu- 
lièrement en  France,  où  les  Stuarts  avaient  trouvé  un 
refuge.  C'est  cette  maçonnerie  qui  constitua  presque 
toutes  les  loges  de  notre  pays  et  particulièrement  celles 
de  Paris.  Les  régiments  écossais  et  irlandais  furent  le 
germe  d'où  sortirent  toutes  les  loges  des  régiments  fran- 
çais, et  leur  nombre  fut  considérable.  Toutes  les  loges 


LA    PÉRIODE    DE   TRANSITION  (il 

d'origine  jacobite  furent,  par  suite  dune  confusion 
facilement  explicable,  étant  donnée  l'origine  des  Stuarts, 

qualifiées  d'écossaises,  alors  qu'elles  n'avaient  rien  de 
commun  avec  le  régime  écossais  tel  qu'on  l'entend  de 
nos  jours  ;  aussi  persisterons-nous  à  les  qualifier  de 
jacobites,  même  longtemps  après  la  disparition  des 
Stuarts,  parce  que  les  régimes  vraiment  écossais  ne  s'in- 
troduisirent que  fort  tard  en  France.  Ainsi,  c'est  en  1788 
seulement  que  la  G*.  L.\  d'Ecosse,  fondée  depuis  1736, 
constitua  sa  première  grande  loge  provinciale  :  l'Ardente 
amitié,  à  l'0.\  de  Rouen,  alors  qu'elle  en  avait  cons- 
titué dans  le  monde  entier.  C'est  en  1786  seulement  que 
le  G.".  Chap.*.  de  l'ordre  royal  d'Ecosse  fonda  des 
grandes  loges   provinciales  à  Rouen   et  à  Paris,  et  en 

1787  à  Strasbourg,  Laval,  Aix  et  Château-Thierry,  en 

1788  à  la  Martinique,  à  Saint-Domingue  et  à  Brest. 
Quant  aux  quatre  directoires  écossais  qui  furent  fondés 
à  Bordeaux,  Lyon,  Strasbourg  (1776)  et  Montpellier 
(1781),  ils  n'ont  aucun  rapport  avec  les  loges  d'Ecosse, 
attendu  qu'ils  furent  installés  par  la  Stricte  Observance 
templière  réformée  d'Allemagne,  qui  reconnaissait  dans 
Charles  III  Stuart  le  G.*.  M.',  secret  de  leur  Ordre  avant 
1771.  Quant  à  la  mère  loge  écossaise  de  Marseille  d'où 
sont  sorties  en  1766  la  grande  mère  loge  écossaise  du 
Comtat-Venaissin  et  en  17761a  grande  mère  loge  du  rite 
écossais  philosophique  du  Contrat  social,  elle  dérive  si 
peu  des  loges  d'Ecosse  qu'elle  fut  fondée  en  1751  par 
Georges  de  Walnon,  gentilhomme  écossais  rentré  en 
France  à  la  suite  de  Jacques  III. 

Avant  1771,  il  n'y  avait  donc  pas  de  loges  écossaises 
en  France,  mais  bien  des  loges  jacobites.  En  confon- 
dant des  origines  aussi  différentes,  tous  les  historiens, 
y  compris  Daruty,  ont  fait  une  erreur  telle  qu'ils  n'ont 
pu  comprendre  le    mouvement  maçonnique  dont  ils 


62  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

avaient  entrepris  de  raconter  l'histoire.  Nous  verrons, 
dans  un  prochain  chapitre,  comment  cette  maçonnerie 
jacobite  s'introduisit  en  France,  avec  Charles  Radclyffe. 


Un  autre  personnage,  d'esprit  plus  distingué  et  de 
science  plus  vaste,  Andrew  Michael  Ramsay,  fit  aussi 
tous  ses  efforts  pour  propager  la  maçonnerie  jacobite 
sur  le  continent  et  même  en  Angleterre  et  en  Ecosse. 
Fils  d'un  boulanger  d'Ayr,  il  naquit  dans  cette  ville  le 
9  juillet  1686.  Après  y  avoir  commencé  ses  études,  il  les 
termina  à  l'Université  d'Edimbourg,  puis  accepta  les 
fonctions  de  précepteur  des  fils  du  comte  de  Wemyss 
jusqu'en  1706.  Son  esprit  curieux  et  mystique  n'ayant 
pas  trouvé  une  satisfaction  suffisante  dans  la  pratique 
de  la  religion  anglicane,  il  se  jeta  dans  le  socinianisme, 
qui  le  dégoûta  promptement.  Après  une  période  d'in- 
différence complète,  Ramsay  adopta  les  doctrines  du 
pyrrhonisme  universel.  Dune  activité  dévorante  et 
d'une  bonne  foi  indiscutable,  il  s'adressait  à  tous  les 
docteurs  renommés  de  son  entourage  pour  se  faire 
éclairer.  Vers  1706,  il  passa  en  Hollande  où  il  vit 
beaucoup  Pierre  Poiret,  le  philosophe  mystique,  qui 
ne  parvint  pas  à  dissiper  ses  doutes  ;  ce  fut  Fénelon, 
qu'il  connut  en  1709  à  Cambrai,  qui  le  fixa  dans  une 
voie  qui  devait  être  définitive  :  Ramsay  se  fit  catho- 
lique, d'un  catholicisme  tendre  et  mièvre,  exagération 
de  la  foi  du  Cygne  de  Cambrai  ;  mis  en  rapport  avec 
le  duc  de  Rouillon,  il  fut  chargé  de  l'éducation  de 
ses  fils  ;  en  1724,  Jacques  III  l'appela  à  Rome  pour 
remplir  les  mêmes  fonctions  ;  l'éducation  d'enfants 
aussi  jeunes  ne  pouvait  lui  convenir  ;  malgré  la  grande 
affection  qu'il  avait  pour  les  Stuarts,   il  quitta  bientôt 


LA    PÉRIODE    DE   TRANSITION  63 

Rome  et,  ayant  obtenu  un  sauf-conduit  pour  se  rendre 
en  Ecosse,  il  résida  quelques  années  chez  le  duc  d'Ar- 
gyle.  Il  fut  reçu  docteur  à  l'Université  d'Oxford  en 
17IU),  malgré  sa  qualité  de  catholique.  Rentré  en 
France,  il  séjourna  tantôt  à  Paris,  tantôt  à  Navarre 
ou  à  Sedan  chez  son  ancien  élève,  le  prince  de 
Turenne,  devenu  duc  de  Bouillon.  Il  entretenait  des 
relations  constantes  avec  Jean-Baptiste  Rousseau  et 
Louis  Racine.  Ramsay  n'avait  pas  abandonné  le  parti 
des  Stuarts  et  il  travaillait  avec  ardeur  à  leur  restaura- 
tion. C'est  pour  servir  leur  cause  qu'il  s'occupa  de  franc- 
maçonnerie.  En  1728,  il  aurait,  paraît-il,  essayé  de 
pénétrer  dans  laG.'.L.'.  d'Angleterre  pour  y  introduire 
les  grades  écossais  (novice  et  chevalier  du  Temple), 
qui  se  pratiquaient  depuis  longtemps  dans  la  loge  de 
Saint- André  d'Ecosse.  Econduit  en  sa  qualité  de 
catholique  jacobite,  il  vint  à  Paris,  où  il  obtint  un 
grand  succès,  et  où  il  développa  le  système  des  hauts 
grades  qui,  avant  lui,  n'étaient  connus  en  France 
que  par  les  grades  irlandais. 

Suivant  Ramsay,  la  f.*.  m.*,  aurait  été  instituée  par 
Godefroy  de  Bouillon  à  l'époque  des  Croisades,  et  cet 
ordre  aurait  été  introduit  à  la  loge  Saint- André  d'Edim- 
bourg par  des  chevaliers  du  Temple  à  leur  retour  de  la 
Terre  Sainte. 

Il  est  possible,  comme  l'insinuent  Kloss  et  Findel, 
que  Ramsay  ait  été  sinon  le  fondateur,  peut-être  le 
propagateur  de  la  société  connue  sous  le  nom  de  Gor- 
mogones,  qui  se  forma  vers  1724,  [et  contre  laquelle  la 
G.'.  L.\  d'Angleterre  fulmina  des  décrets  Tannée  sui- 
vante. On  sait  du  reste  peu  de  chose  de  l'organisation 
des  Gormogones,  si  ce  n'est  que,  sur  leurs  tableaux,  leurs 
noms  et  demeures  étaient  inscrits  en  chiffres  ;  que 
l'ordre  avait  été  importé  de  Chine  par  un  mandarin  et 


64  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


qu'il  possédait,  comme  la  f.\-m.\  un  secret  d'une 
«  valeur  extraordinaire  ».  Il  était  interdit  aux  Gor- 
mogones  de  parler  de  la  politique  du  pays  où  ils 
résidaient  (1). 

Dans  le  mandarin  et  la  Chine,  les  ff.\  Kloss  et 
Findel  voient  un  jésuite  et  Rome.  Cette  société  fut 
dissoute  entre  1730  et  1738.  Elle  aurait  eu  un  chapitre 
à  Londres,  dans  Castle  Tavern,  sous  la  direction  du 
Subœcumenical  Volgi  de  Rome  ou  de  Paris.  Il  est 
certain  qu'en  1737  Ramsay  s'occupait  de  réglementer 
et  de  prendre  la  direction  de  la  maçonnerie.  Les 
Gormogones,  qui  n'en  sont  qu'une  variété,  ont  pu  fixer 
son  attention  ;  il  est  possible  que  ce  soit  à  cette 
maçonnerie  qu'il  fasse  allusion  dans  ses  lettres  au 
cardinal  de  Fleury,  datées  des  20  et  22  mars  1737  : 

«  Daignez,  Monseigneur,  soutenir  la  société  des 
Free-Masons  dans  les  grandes  vues  qu'ils  se  propo- 
sent et  V.  E.  rendra  son  nom  bien  plus  glorieux  par 
cette  protection  que  Richelieu  ne  fit  le  sien  par  la  fon- 
dation de  l'Académie  française. 

«  L'objet  de  l'un  est  bien  plus  vaste  que  celui  de  l'au- 
tre. Encourager  une  société  qui  ne  tend  qu'à  réunir 
toutes  les  nations  par  l'amour  de  la  vérité  et  des  beaux- 
arts  est  une  action  digne  d'un  grand  ministre,  d'un 
père  de  l'Eglise  et  d'un  saint  pontife.  Comme  je  dois 
lire  mon  discours  demain  dans  une  assemblée  géné- 
rale de  l'Ordre  et  le  donner  lundi  matin  aux  examina- 
teurs de  la  Chancellerie,  je  supplie  V.  E.  de  me  le 
renvoyer  demain  avant  midi  par  un  exprès.  » 

Le  cardinal  voyait  la  maçonnerie  d'un  mauvais  œil, 
et  dut  le  faire  savoir  à  Ramsay   qui  s'empressa  de  lui 


(1)  Sur   les  Gormogones,  voy.  Gould  :  Historg  of  free-masonry , 
III,  482. 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  ()5 

répondre  :  «  J'apprends  que  les  assemblées  de  frec- 
masons  déplaisent  à  V.  E.  Je  ne  les  al  jamais  fréquentées 
que  dans  la  vue  d'y  répandre  les  maximes  qui  auraient 
peu  à  peu  rendu  l'incrédulité  ridicule,  le  vice  odieux  et 
l'ignorance  honteuse.  Je  suis  persuadé  que  si  on  glissait 
à  la  tête  de  ces  assemblées  des  gens  sages  et  choisis 
par  V.  E.,  elles  pourraient  devenir  très  utiles  à  la  reli- 
gion, à  l'Etat  et  aux  lettres.  C'est  ce  dontje  crois  pouvoir 
convaincre  V.  E.,  si  elle  daigne  m'accorder  une  courte 
audience  à  Issy.  En  attendant  ce  moment  heureux,  je 
la  supplie  de  vouloir  bien  me  mander  si  je  dois  retour- 
ner à  ces  assemblées,  et  je  me  conformerai  aux  volon- 
tés de  V.  E.  avec  une  docilité  sans  bornes.  » 

Il  semble  ressortir  de  cette  lettre  que  Ramsay 
n'avait  pas  en  très  haute  estime  des  gens  auxquels  il 
reproche  «  une  incrédulité  ridicule,  un  vice  odieux 
et  une  ignorance  honteuse  (1)  ». 

Fleury  répondit  que  le  roi  ne  permettait  pas  les 
réunions. 

Tous  les  historiens  sont  d'accord  pour  attribuer  à 
Ramsay  l'introduction  des  hauts  grades  écossais  et  la 
légende  des  Templiers.  Nous  croyons  qu'il  faut  rectifier 
ces  affirmations  dans  une  certaine  mesure. 

Les  grades  irlandais  existaient  depuis  le  xvne  siècle, 
et  ce  sont  eux  que  pratiquaient  les  régiments  irlandais 
et  écossais  qui  vinrent  en  France  à  la  suite  de  Jac- 
ques II.  Ramsay  se  borna  à  modifier  leur  appellation 
en  remplaçant  partout  le  mot  irlandais  par  le  mot 
écossais,  pour  en  faire  une  institution  jacobite.  Quant 
à  la  création  de  l'ordre  des  Templiers,  nous  ne  croyons 


(1)  Ces  documents  intéressants  se  trouvaient  perdus  dans  l'His- 
toire de  la  Régence  et  de  la  minorité  de  Louis  XV  de  Lemontey. 
C'est  Daruty  qui  le  premier  les  a  exhumés. 

LA   FRANC-MAÇONNERIE.    —   T.    I.  5 


66  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

pas  qu'elle  soit  l'œuvre  de  Ramsay ,  qui,  ainsi 
que  celui  qui  forma  les  hauts  grades  irlandais,  ne 
parle  que  des  Chevaliers  du  Temple  (de  Salomon) 
et  non  des  Templiers  sur  lesquels,  d'après  Fin- 
del,  il  s'exprimait  souvent  d'une  façon  désavanta- 
geuse. 

D'après  une  conversation  que  Ramsay  aurait  eue 
avec  Gensau,  en  modifiant  les  hauts  grades  il  aurait 
eu  pour  but  de  rendre  les  admissions  plus  difficiles  et 
plus  éclairées  et  de  recueillir  des  fonds  pour  les 
Stuarts. 

Il  est  également  probable  que  ce  fut  Ramsay  qui  fit 
naître  le  conflit  qui  eut  lieu  entre  le  duc  de  Montagu  et 
le  duc  de  Wharton  en  1722,  lorsque  ce  dernier  sup- 
planta le  premier  dans  les  fonctions  de  G.'.  M.*,  de  la 
G.  • .  L.  • .  d'Angleterre,  le  duc  de  Wharton  ayant  des  sym- 
pathies pour  les  Stuarts.  En  1728,  Ramsay  lui  ménagea 
une  entrevue  à  Parme  avec  Jacques  III,  et  Wharton, 
qui  plus  tard  se  retira  de  la  f.\ -m.*,  pour  entrer  dans  un 
couvent  en  Espagne,  essaya,  de  concert  avec  le  roi,  de 
faire  pénétrer  la  maçonnerie  dans  les  loges  d'Ecosse  ; 
mais  il  ne  put  réussir,  Desaguliers  s'étant  emparé  de 
ces  loges  dès  1723.  C'est  probablement  à  la  suite  de 
l'échec  de  ces  projets  que  Ramsay  imagina  de  do- 
miner la  f.\-m.\  par  les  hauts  grades,  dans  lesquels 
il  n'aurait  admis  que  les  partisans  des  Stuarts.  Les 
hauts  grades  se  répandirent  rapidement  en  France  et 
passèrent  en  Allemagne  avec  de  Hund,  le  fondateur 
de  la  Stricte  Observance,  qui  était  venu  puiser  ses 
doctrines  maçonniques  dans  le  chapitre  de  Cler- 
mont,  qui  était  de  tendances  jacobites.  C'est  de 
Hund  qui  imagina  de  fondre  le  grade  de  Chevalier  du 
Temple  (de  Salomon)  avec  la  légende  des  chevaliers 
croisés  et  d'inventer  la  fable  des  Templiers,  grands  mai- 


LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION  67 

tre«  de  la  franc-maçonnerie  (1).  Cette  doctrine  avaitaussi 
une  application  pratique  :  elle  permettait  de  se  procurer 
des  fonds,  du  moins  de  Hund  l'espérait.  Si  lesff.'.mm.*., 
en  effet,  étaient  des  descendants  des  Templiers,  peut-être 
pourraient-ils  revendiquer  les  biens  qui  avaient  été 
confisqués  à  cet  ordre  sous  Philippe  le  Bel  ?  Les  Jaco- 
bites  adoptèrent  l'idée,  et  tentèrent  de  se  procurer  ainsi 
des  sommes  immenses  qui  leur  permettraient  de  réta- 
blir  les  Stuarts  sur  les  trônes  d'Angleterre,  d'Ecosse  et 
d'Irlande.  Malheureusement  pour  eux,  ce  grand  œuvre 
n'était  pas  plus  réalisable  que  la  fabrication  de  la  pierre 
philosophale,  ou  la  découverte  du  mystère  de  la  créa- 
tion. L'ordre  de  Malte,  qui  avait    en  partie  hérité  des 


(1)  Les  Templiers  passaient,  au  surplus,  pour  avoir  eu  des 
mœurs  inavouables,  et  Ion  disait  qu'à  la  fin  du  xvne  siècle  il  y 
avait  eu,  sous  la  grande  maîtrise  de  Jacques-Henri  de  Durfort,  duc 
de  Duras,  «  une  petite  résurrection  des  Templiers  ».  Il  convient 
d'ajouter  que  c'était  cette  mauvaise  langue  de  Bussy-Rabutin  qui 
avait  tenu  ces  vilains  propos  dans  Y  Histoire  amoureuse  des  Gaules. 
Il  se  serait  donc  formé,  en  16S2,  à  Versailles,  une  société  secrète 
dont  les  femmes  étaient  rigoureusement  exclues,  et  afin  que  les 
membres  de  la  confrérie  ne  fussent  pas  tentés  de  l'oublier,  ils 
portaient  sur  leur  chemise  une  décoration  en  forme  de  croix, 
imitée  de  la  croix  de  Saint-Michel,  représentant  un  homme  foulant 
une  femme  aux  pieds.  Beaucoup  de  personnages  de  la  cour 
auraient  fait  partie  de  la  corporation  :  Manicamp,  le  chevalier  de 
Tilladet,  le  duc  de  Grammont,  le  comte  de  Tallard,  le  marquis 
de  Biron,  etc.  ;  ce  dernier  fut  le  parrain  du  duc  de  Vermandois 
qui  aurait  subi  les  derniers  outrages  de  l'initiation.  Le  Dauphin 
aurait  été  admis,  mais  sans  épreuves.  Instruit  de  ces  infamies, 
Louis  XIV  fit  fustiger  le  duc  de  Vermandois  par  un  laquais,  et 
envoya  en  exil  les  membres  de  la  société  qui  se  seraient  cepen- 
dant réunis  de  nouveau,  en  1705,  sous  la  présidence  de  Philippe 
d'Orléans,  pour  former  une  société  politique  dont  le  but  semblait 
inconnu.  Sans  insister  sur  ces  médisances,  le  caractère  de  Ramsay 
doit  d'autant  moins  subir  de  semblables  promiscuités  que  la 
légende  de  la  maçonnerie  templière  est  l'œuvre  de  Hund  et  qu'elle 
ne  fut  acceptée  officiellement  que  le  25  décembre  1763  au  convent 
d'Iéna. 


68  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Templiers,  aurait  certes  mis  obstacle  à  la  réussite  de 
ce  projet  s'il  avait  été  réalisable. 

Dans  tous  les  cas,  ainsi  que  nous  le  verrons  dans 
l'historique  des  loges,  ce  fut  cette  maçonnerie  jacobite 
qui  essaima  par  toute  la  France,  formant  presque 
toutes  les  mères  loges,  à  Marseille,  Avignon,  Montpel- 
lier, Arras,  Strasbourg,  Lyon,  Toulouse,  Orléans, 
Paris,  etc.  (1). 

Ramsay,  qui  avait  hérité  des  papiers  de  Fénelon,  fut 
son  éditeur  après  sa  mort,  et  mourut  lui-même  en  bon 
catholique  à  Saint-Germain-en-Laye,  le  6  mai  1743  ; 
son  acte  de  décès  fut  signé  par  Charles  Radclyffe, 
lord  Darwentwater   et  par  lord  Eglentoun  (2). 

(1)  Avant  de  terminer  cette  biographie,  je  dois  mentionner 
l'opinion  de  M.  Teder  sur  le  rôle  de  Ramsay  ;  d'après  ce  savant 
historien  qui  a  compulsé  les  papiers  de  Charles-Edouard,  Ramsay, 
intime  ami  de  Desaguliers,  aurait  trahi  les  Stuarts  au  profit  de  la 
maison  de  Hanovre. 

(2)  «  Le  mardy  septième  may  mil  sept  cent  quarante  trois,  le 
corps  de  Messire  André  Michel  de  Ramsay,  chevalier  de  Saint- 
Lazare  et  chevalier  Baronet  d'Ecosse,  époux  de  Dame  Marie  de 
Nairne,  mort  le  jour  précédent,  âgé  d'environ  58  ans,  a  été  inhumé 
dans  l'église,  vespres  chantées,  en  présence  du  clergé  dont  les 
sieurs  Maurice  Morphy  et  Louis  Guillon,  prêtres,  qui  ont  signé 
avec  les  parents  et  amis  du  défunt.  » 


CHAPITRE  III 

L'ORGANISATION   PRIMITIVE  :    SON   ÉVOLUTION 

Les  obligations  d'un  f.\-m.'.  —  Les  ordonnances  de  1720.  — 
L'égalité  dans  les  loges.  —  L'égalité  philosophique  et  sociale.  — 
Le  vote.  —  La  définition  de  la  f.*.-m.*.  d'après  les  initiés  : 
Findel,  Ragon,  Jouaust,  Darut}',  Oswald    Wirth. 

Lorsque  la  f.\-m.\  spéculative  s'établit  en  Angle- 
terre, elle  a  eu  évidemment  le  souci  de  ne  pas  alarmer 
les  pouvoirs  publics  ;  elle  avait  intérêt  à  laisser  croire 
qu'elle  était  la  continuation  normale  d'une  associa- 
tion existant  depuis  un  temps  immémorial,  toujours 
protégée  par   les  chefs  d'Etats . 

C'est  pour  cela  qu'avec  un  soin  jaloux  elle  conserva 
tout  ce  qui  pouvait  avoir  rapport  à  l'ancienne  corpora- 
tion des  maçons  travailleurs. 

Elle  eut  l'habileté  de  tromper  les  autorités. 

En  réalité,  il  n'y  avait  pas  eu  continuation,  mais 
substitution. 

Le  procédé  employé  pour  se  faire  tolérer  et  recon- 
naître fut  ingénieux;  il  est  essentiellement  maçonnique. 

En  apparence,  les  devoirs  qui  furent  publiés  étaient 
ceux  d[une  corporation  de  maçons  travailleurs  ;  cer- 
tains mots  professionnels  avaient  été  laissés  à  dessein  ; 
tout  en  publiant  de  nouveaux  statuts,  ceux  qui  les  rédi- 
gèrent les  déclaraient  fort  anciens,  et  prétendaient  avoir 
simplement  réuni  et  condensé  de  vieux  textes,  alors 
qu'il  est   évident   que  les  statuts  dans  leur  ensemble 


70  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

visaient  bien  plus  la  f.\-m.*.  spéculative  que  la 
f.\-m.\  corporative. 

Cette  nécessité  de  la  première  heure  explique  pour- 
quoi la  f.'.-m.'.  spéculative  tint  tant  à  prouver  son 
antiquité  et  à  établir  qu'elle  n'était  que  la  continuation 
d'une  corporation  de  travailleurs. 

Cette  organisation  primitive  eut  une  telle  consé- 
quence sur  l'avenir  de  la  maçonnerie  que  nous  croyons 
devoir,  malgré  leur  longueur,  entrer  dans  tous  les  dé- 
tails, car  jusqu'ici,  ceux  qui  ont  étudié  les  origines 
de  la  f.'.-m. \  ont  négligé  de  compulser  et  de  tirer 
parti  des  règlements  qui  contribuèrent  à  sa  forma- 
tion. 

Nous  empruntons  le  texte  des  anciens  devoirs  à 
l'Histoire  de  la  f.'.-m.'.  de  la  Tierce,  qui,  en  1745,  en  a 
donné  une  traduction  (I,  177),  semblable,  à  part  quel- 
ques mots,  à  la  traduction  donnée  par  Daruty  (p.  36), 
d'après  le  texte  anglais  d'Anderson  (62). 

LES    ORL1GATIONS    d'un    F.'.-M.*. 

I.  —  Touchant  Dieu  et  la  religion. 

Un  maçon  est  obligé,  en  vertu  de  son  titre,  d'obéir  à  la 
loi  morale  ;  et  s'il  entend  bien  l'art,  il  ne  sera  jamais  un 
athée  stupide,  ni  un  libertin  sans  religion.  Dans  les  anciens 
temps,  les  maçons  étaient  obligés,  dans  chaque  pays,  de 
professer  la  religion  de  leur  patrie  ou  nation  quelle  qu'elle 
fût  ;  mais  aujourd'hui,  laissant  à  eux-mêmes  leurs  opinions 
particulières,  on  trouve  plus  à  propos  de  les  obliger  seule- 
ment à  suivre  la  religion  sur  laquelle  tous  les  hommes 
sont  d'accord.  Elle  consiste  à  être  bons,  sincères,  modestes 
et  gens  d'honneur,  par  quelque  dénomination  ou  croyance 
particulière  qu'on  puisse  être  distingué  :  d'où  il  suit  que 
la  maçonnerie  est  le  centre  de  l'union  et  le  moyen  de  con- 
cilier une  sincère  amitié  parmi  des  personnes  qui  n'auraient 
jamais  pu  sans  cela  se  rendre  familières  entre  elles. 


l'organisation  primitive  ;  SON   ÉVOLUTION       71 

II.  —  Touchant  le  magistral  civil,  suprême  ou  subordonné. 

Un  maçon  est  un  paisible  sujet  des  puissances  civiles, 
en  quelque  endroit  qu'il  réside  ou  travaille.  Il  ne  trempe 
jamais  dans  les  complots  et  conspirations  contraires  à  la 
paix  et  au  bien  d'une  nation.  Il  est  obéissant  aux  magistrats 
inférieurs.  Comme  la  guerre,  l'effusion  du  sang  et  la  con- 
fusion ont  toujours  fait  tort  à  la  maçonnerie,  les  anciens 
rois  et  princes  en  ont  été  d'autant  plus  disposés  à  encou- 
rager ceux  de  cette  profession,  à  cause  de  leur  humeur  pai- 
sible et  de  leur  fidélité.  C'est  ainsi  qu'ils  répondent  par 
leurs  actions  aux  pointillés  (sic)  de  leurs  adversaires,  et 
qu'ils  accroissent  chaque  jour  l'honneur  de  la  fraternité,  qui 
a  toujours  fleuri  pendant  la  paix. 

C'est  pourquoi,  s'il  arrivait  à  un  frère  d'être  rebelle  à 
l'Etat,  il  ne  devrait  pas  être  soutenu  dans  sa  rébellion. 
Cependant  on  pourrait  en  avoir  pitié,  comme  d'un  homme 
malheureux  ;  et  quoique  la  fidèle  fraternité  doive  désavouer 
sa  rébellion  et  ne  donner  pour  l'avenir  ni  ombrage  ni  le 
moindre  sujet  de  jalousie  politique  au  gouvernement,  néan- 
moins s'il  n'était  point  convaincu  d'aucun  autre  crime,  il  ne 
pourrait  point  être  exclu  de  la  loge  et  son  rapport  avec 
elle  ne  pourrait  être  annulé. 

III.  —  Touchant  les  loges. 

Une  loge  est  un  endroit  où  les  maçons  s'assemblent  et 
travaillent  ;  de  là  vient  qu'une  assemblée  ou  société  de 
maçons  dûment  organisée  est  appelée  loge.  Chaque  frère 
doit  absolument  dépendre  d'une  telle  loge,  et  être  sujet  à 
ses  propres  statuts  et  aux  règlements  généraux.  Elle  est, 
ou  particulière,  ou  générale,  ce  qui  se  comprendra  mieux 
en  la  fréquentant,  et  par  les  règlements  de  la  grande  loge 
ci-après  annexés.  Anciennement  aucun  maître  ou  compa- 
gnon ne  pouvait  s'absenter  de  sa  loge  particulière,  quand 
il  était  averti  d'y  comparaître,  sans  encourir  une  sévère 
censure,  à  moins  qu'il  ne  parût  au  maître  et  aux  surveil- 
lants qu'il  en  avait  été  empêché  par  la  pure  nécessité. 

Ceux  qui  sont  admis  à  être  membres  dune  loge  doivent 
être  des  gens  d'une  bonne  réputation,  pleins  d'honneur  et 
de   droiture,  nés  libres  et   d'un  âge  mûr  et  discret.  Ils   ne 


72  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

doivent  être  ni  esclaves,  ni   femmes,   ni  des  hommes  qui 
vivent  sans  morale,  ou  d'une  manière  scandaleuse. 

IV.  —  Touchant  les  maîtres,  surveillants,  compagnons 

et  apprentis. 

Toute  promotion  parmi  les  maçons  est  fondée  unique- 
ment sur  la  valeur  réelle  et  le  mérite  personnel,  afin  que 
les  seigneurs  puissent  être  bien  servis,  que  les  frères  ne 
soient  point  exposés  à  aucune  confusion  et  que  l'Art  royal 
ne  tombe  point  dans  le  mépris.  Il  est  impossible  de  pouvoir 
donner  par  écrit  une  description  de  ces  choses-là  ;  mais 
chaque  frère  doit  être  attentif  dans  sa  place,  et  les  appren- 
dre d'une  manière  qui  est  toute  particulière  à  cette  frater- 
nité. Les  candidats  peuvent  seulement  savoir  qu'aucun 
maître  ne  doit  prendre  un  apprenti,  à  moins  qu'il  n'ait 
suffisamment  de  quoi  l'employer  et  que  ce  ne  soit  véritable- 
ment un  jeune  garçon  n'ayant  ni  mutilation  ni  défaut  en  son 
corps  qui  puisse  le  rendre  incapable  d'apprendre  l'Art,  de 
servir  le  seigneur  de  son  maître,  d'être  fait  frère  et  ensuite 
compagnon,  quand  il  en  sera  temps,  c'est-à-dire  après 
avoir  servi  un  nombre  d'années  conforme  à  la  coutume  du 
pays.  Il  faut,  déplus,  qu'il  soit  descendu  d'honnêtes  parents, 
afin  que,  lorsqu'il  a  d'ailleurs  les  qualités  requises,  il  puisse 
parvenir  à  l'honneur  d'être  surveillant,  ensuite  maître  d  une 
loge,  grand  surveillant  et  enfin  grand  maître  de  toutes  les 
loges,  en  conséquence  de  son  mérite. 

Aucun  frère  ne  peut  être  surveillant  sans  avoir  passé 
par  le  degré  du  compagnon,  ni  maître  à  moins  qu  il  n'ait  été 
surveillant,  ni  grand  surveillant  à  moins  qu'il  n'ait  été 
maître  d'une  loge,  ni  grand  maître  à  moins  qu'il  n'ait  été 
compagnon  avant  son  élection,  qu'il  ne  soit  d'une  noble 
naissance,  ou  un  gentilhomme  de  la  meilleure  sorte,  ou 
quelque  savant  du  premier  ordre,  ou  quelque  fameux  archi- 
tecte, ou  quelque  autre  artiste,  descendu  d'honnêtes  parents 
et  qui,  selon  l'opinion  de  toutes  les  loges,  est  d'un  mérite 
particulier. 

Le  G.'.  M.*.,  pour  pouvoir  mieux  s'acquitter  de  son  office 
et  d'une  manière  plus  facile  et  plus  honorable,  a  le  pouvoir 
de  choisir  lui-même  son  député  G.*.  M.'.,  qui  doit  alors 
avoir  été  auparavant  le  maître  d'une  loge  particulière.  Il  a 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       73 

le  privilège  de  faire  tout  ce  que  le  G.*.  M.*,  son  Principal 
pourrait  faire  lui-même,  à  moins  que  ledit  Principal  ne  soit 
présent,  ou  qu'il  n'interpose  son  autorité  par  une  lettre. 

Les  conducteurs  ou  gouverneurs  suprêmes  et  subordon- 
nés de  l'ancienne  loge  doivent,  conformément  aux  ancien- 
nes obligations  et  règlements,  être  obéis  par  tous  les  frères 
dans  leurs  postes  respectifs  avec  toute  sorte  d'humilité,  de 
révérence,  d'amour  et  de  plaisir. 

V.  —  Touchant  la  conduite  de  Vart  en  travaillant. 

Tous  les  maçons  travailleront  honnêtement  les  jours 
ouvriers  (sic),  afin  qu'ils  puissent  vivre  honorablement  les 
dimanches  et  les  jours  de  fêtes,  et  on  observera  le  temps 
marqué  par  les  lois  du  pays  ou  confirmé  par  l'usage. 

Le  plus  expert  d'entre  les  compagnons  sera  choisi  et 
établi  maître  ou  inspecteur  des  travaux  du  seigneur,  et  il 
doit  être  appelé  maître  par  ceux  qui  travaillent  sous  lui.  Les 
compagnons  doivent  éviter  les  mauvais  discours  et  ne 
point  donner  les  uns  aux  autres  des  noms  désobligeants  ; 
ils  doivent  s'appeler  frère  ou  compagnon  et  se  conduire 
avec  politesse  dedans  et  hors  la  loge. 

Le  maître  se  sentant  lui-même  capable  et  adroit,  entre- 
prendra l'ouvrage  du  seigneur  aussi  raisonnablement  qu'il 
se  pourra  ;  il  emploiera  ses  biens  avec  autant  de  bonne  foi 
que  s'ils  étaient  les  siens  propres  et  il  ne  donnera  pas  à  un 
frère  ou  à  un  apprenti  plus  de  gages  qu'il  n'en  mérite 
réellement. 

Tant  le  maître  que  les  maçons  qui  reçoivent  leurs  gages 
avec  justice  seront  fidèles  au  seigneur  et  finiront  leur 
ouvrage  honnêtement,  soit  que  ce  soit  à  la  tâche  ou  à  la 
journée,  et  ils  ne  feront  point  à  la  tâche  l'ouvrage  qui  a  cou- 
tume d'être  fait  à  la  journée. 

Personne  ne  fera  paraître  de  l'envie  lorsqu'il  verra  pros- 
pérer un  frère  ;  il  ne  le  supplantera  point  et  il  ne  le  mettra 
pas  hors  de  son  ouvrage,  s'il  est  capable  de  le  finir  lui- 
même,  d'autant  plus  que  qui  que  ce  soit  ne  peut  finir  un 
ouvrage,  autant  au  profit  du  seigneur,  que  celui  qui  l'a 
d'abord  entrepris,  à  moins  qu'il  n'ait  une  parfaite  connais- 
sance du  dessein  et  du  plan  de  celui  qui  l'a  commencé. 

Quand  un   compagnon  sera  choisi  surveillant  du  travail 


74  LA   FRANC-MACONNERIE   EN    FRANCE 

i 

au-dessous  du  maître,  il  sera  fidèle  tant  au  maître  qu'aux 
compagnons,  il  visitera  soigneusement  l'ouvrage  pendant 
l'absence  du  maître  pour  le  profit  du  seigneur,  et  les  frères 
lui  obéiront. 

Tous  les  maçons  employés  recevront  toutes  les  semaines 
leurs  gages  sans  murmurer  et  sans  se  mutiner,  et  ils  ne 
quitteront  point  le  maître  jusqu'à  ce  que  l'ouvrage  soit 
fini. 

Un  nouveau  frère  sera  instruit  dans  la  manière  de  tra- 
vailler, afin  d'empêcher  qu'il  ne  perde  les  matériaux  par 
faute  de  jugement  et  pour  augmenter  et  continuer  l'amour 
fraternel. 

Tous  les  outils  dont  on  se  servira  pour  travailler  seront 
approuvés  parla  G.'.  L.'. 

Aucun  laboureur  ne  sera  employé  dans  ce  qui  concerne 
proprement  la  maçonnerie  et  les  F.'.-M.".  ne  travailleront 
point  avec  ceux  qui  ne  le  sont  pas  sans  une  pressante  néces- 
sité ;  de  plus,  ils  n'enseigneront  point  les  laboureurs  et  les 
maçons  qui  ne  sont  point  acceptés,  de  même  qu'un  frère 
ou  compagnon. 

VI.  —  Touchant  la  manière  de  se  conduire. 

1°  Dans  la  loge  pendant  qu'elle  est    constituée. 

Vous  ne  ferez  point  de  compagnies  particulières  ou  de 
conversations  séparées,  sans  la  permission  du  maître  ;  vous 
ne  parlerez  d'aucune  chose  impertinente  ou  indécente  ;  vous 
n'interromprez  ni  le  maître,  ni  les  surveillants,  ni  aucun 
frère,  pendant  qu'il  parle  au  maître.  Vous  ne  vous  com- 
porterez pas  d'une  manière  burlesque  ou  bouffonne  pendant 
que  la  loge  est  occupée  à  ce  qui  est  sérieux  ou  solennel  et 
vous  ne  vous  servirez  d'aucun  terme  malséant,  sous  quelque 
prétexte  que  ce  soit.  Au  contraire,  vous  aurez  pour  le 
maître,  les  surveillants  et  les  compagnons,  toute  la  révé- 
rence qui  leur  est  due  et  vous  les  comblerez  d'honneur. 

S'il  y  a  quelque  plainte  faite,  le  frère  trouvé  coupable 
s'en  tiendra  au  jugement  et  à  la  détermination  de  la  loge, 
où  sont  les  juges  compétents  de  telles  disputes,  à  moins 
qu'il  n'en  appelle  à  la  G.\  L.*.  C'est  là  qu'elles  doivent  être 
renvoyées,  à  moins  que  l'ouvrage  du  seigneur  ne  soit  en 
même  temps  retardé  ;  auquel  cas  on  peut  nommer  des  arbi- 


L  ORGANISATION    PRIMITIVE;    SON    ÉVOLUTION  75 

très  particuliers  ;  mais  il  ne  faut  jamais  se  porter  partie 
contre  qui  que  ce  soit  pour  ce  qui  concerne  la  maçonnerie, 
sinon  lorsque  la  loge  le  juge  d'une  nécessité  absolue. 

2°  Après  que    la  loge    est  finie  et  lorsque  les   frères  ne  sont    pas  encore 

retirés. 

Vous  pouvez  vous  réjouir  dune  manière  innocente,  vous 
traiter  les  uns  les  autres  selon  votre  capacité,  mais  en 
évitant  tout  excès  et  en  ne  forçant  aucun  frère  à  manger  ou 
à  boire  plus  qu'il  ne  veut.  Vous  ne  l'empêcherez  point  de  se 
retirer,  lorsque  les  affaires  le  demanderont,  et  vous  ne  ferez 
ou  ne  direz  aucune  chose  qui  puisse  offenser  ou  empêcher 
la  facilité  et  la  liberté  de  la  conversation.  Autrement,  cette 
belle  harmonie,  qui  doit  être  entre  nous,  perdrait  une  partie 
de  son  éclat,  et  le  but  louable  que  nous  nous  proposons 
s'en  irait  en  ruine.  Il  ne  doit  point  être  question  d'aucune 
pique  ou  querelle  particulière  dans  l'endroit  où  se  tient  la 
loge,  encore  moins  de  disputes  touchant  la  religion,  les 
nations  ou  la  politique  de  l'Etat,  parce  qu'en  qualité  de 
maçons,  nous  sommes  tous  de  la  religion  universelle  dont 
il  a  été  parlé  ;  comme  aussi  de  toutes  les  nations,  de  toutes 
les  langues  et  de  toutes  les  familles.  De  plus,  nous  sommes 
opposés  à  tous  ceux  qui  parlent  de  la  politique,  parce  que 
c'est  une  chose  qui  ne  s'accorde  et  qui  ne  s'accordera  jamais 
avec  la  prospérité  d'une  loge.  Cette  obligation  a  toujours 
été  étroitement  enjointe  et  observée,  mais  particulièrement 
depuis  la  réformation  dans  la  Grande-Bretagne,  ou  pour  le 
dire  autrement,  depuis  que  cette  nation  est  d'un  sentiment 
contraire  à  la  communion  de  Rome  et  qu'elle  s'en  est 
séparée. 

3°  Lorsque  les  frères    se  trouvent  ensemble    sans  aucun  étranger, 
quoique  ce  ne  soit  pas  dans  une  loge. 

Vous  devez  vous  saluer  d'une  manière  civile,  ainsi  qu'on 
vous  l'enseignera,  en  vous  traitant  l'un  l'autre  de  frère,  et 
vous  vous  donnerez  des  instructions  mutuelles,  quand  il 
sera  trouvé  à  propos.  Mais  cela  se  doit  faire  sans  être  vu  ni 
entendu,  sans  empiéter  l'un  sur  l'autre  et  sans  perdre  le 
respect  qui  serait  naturellement  dû  à  un  frère,  quand  même 
il  ne  serait  pas  maçon  ;  car,  quoique  tous  les  maçons  soient 
frères  sous  le  même  niveau,  cependant  la  maçonnerie  ne 
prive  point  un  homme  des  honneurs  dont  il  jouissait  aupa- 


76  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ravant  ;  au  contraire,  elle  en  est  un  accroissement,  particu- 
lièrement s'il  a  obligé  la  fraternité,  qui  doit  faire  honneur 
à  qui  il  est  dû  et  fuir  les  mauvaises  manières. 

4°  En  présence  des  étrangers  qui  ne  sont  pas  maçons. 

Vous  serez  circonspect  dans  vos  paroles  et  dans  vos 
démarches,  en  sorte  que  l'étranger  le  plus  pénétrant  ne 
puisse  découvrir  ou  trouver  ce  qu'il  n'est  pas  propre  de 
donner  à  entendre,  et  quelquefois  vous  changerez  de  propos, 
ménageant  cela  pour  l'honneur  de  la  vénérable  société. 

5°  A  la  maison  et  dans  le  voisinage. 

Vous  devez  vous  comporter  en  hommes  de  bonnes  mœurs, 
en  gens  sages  et  surtout  ne  point  faire  connaître  à  vos 
familles,  à  vos  amis  et  à  vos  voisins  ce  qui  concerne  la  loge, 
etc..  Tout  au  contraire,  vous  devez  sagement  consulter 
votre  propre  honneur  et  celui  de  l'ancienne  fraternité  pour 
raisons  dont  on  ne  doit  point  faire  mention.  Vous  devez 
aussi  prendre  soin  de  votre  santé,  en  ne  demeurant  point 
trop  tard  ensemble,  ni  trop  loin  de  vos  logis,  après  que  les 
heures  de  la  loge  sont  passées,  et  en  évitant  la  gloutonnerie 
et  l'ivresse,  en  sorte  que  vous  ne  fassiez  point  tort  à  vos 
familles  par  négligence  et  en  vous  rendant  incapables  de 
travailler. 

6°  Envers  un  frère  étranger. 

Vous  l'examinerez  avec  précaution  et  suivrez  en  ceci  la 
méthode  que  la  prudence  vous  indiquera,  afin  de  ne  point 
vous  en  laisser  imposer  par  un  faux  prétendant  plein  d'igno- 
rance que  vous  devez  rejeter  avec  mépris  et  dérision  en 
vous  donnant  de  garde  de  lui  communiquer  le  moindre 
rayon  de  lumière.  Mais  si  vous  découvrez  que  c'est  un  bon 
et  véritable  frère,  vous  devez  en  conséquence  de  cela  le 
respecter  et,  s'il  est  dans  la  nécessité,  vous  devez  l'aider  si 
vous  pouvez,  ou  bien  lui  dire  comment  il  peut  être  secouru  : 
vous  devez  encore  lui  donner  de  l'occupation  pendant 
quelques  jours,  ou  bien  le  recommander  pour  lui  en  faire 
trouver.  Au  surplus,  vous  n'êtes  pas  obligé  de  faire  plus 
que  vous  ne  pouvez,  mais  seulement  de  préférer  un  pauvre 
frère,  qui  est  bon  et  honnête  homme,  à  toute  autre  pauvre 
personne  qui  se  trouverait  dans  les  mêmes  circonstances. 
Enfin,    non    seulement  vous    observerez   ces    obligations, 


l'organisation  primitive  ;  SON  ÉVOLUTION       77 

comme  aussi  celles  qui  vous  seront  communiquées  par  une 
autre  voie,  mais  de  plus  vous  cultiverez  l'amour  fraternel, 
qui  est  le  fondement  et  la  maîtresse  pierre,  de  même  que  le 
ciment  et  la  gloire  de  cette  ancienne  fraternité.  Vous  évi- 
terez les  disputes,  les  querelles,  la  médisance  et  la  calomnie, 
et  vous  ne  souffrirez  jamais  que  les  autres  médisent  d'au- 
cun honnête  frère;  au  contraire,  vous  défendrez  sa  réputa- 
tion et  lui  rendrez  toute  sorte  de  bons  offices  autant  que 
votre  honneur  et  votre  sûreté  vous  le  permettront,  mais  non 
plus  loin.  Et,  si  quelqu'un  de  vos  frères  vous  fait  tort, 
vous  devez  vous  adresser  à  votre  loge  un  des  jours  de  la 
communication  du  quartier  ;  ensuite  de  quoi  vous  êtes  en 
droit  d'en  rappeler  à  la  G.  ' .  L.  • .  annuelle,  conformément  à  la 
louable  pratique  de  nos  pères  dans  chaque  pays,  lesquels  ne 
poursuivaient  jamais  personne  en  justice,  à  moins  que  le 
cas  ne  pût  être  décidé  autrement,  mais  qui  écoutaient 
patiemment  l'avis  sincère  et  aimable  du  maître  et  des  com- 
pagnons, quand  ils  voulaient  les  empêcher  de  prendre  des 
étrangers  à  partie  et  les  engager,  au  contraire,  à  mettre 
promptement  fin  à  toute  procédure,  afin  qu'ils  pussent  s'ap- 
pliquer à  l'affaire  de  la  maçonnerie  avec  plus  de  plaisir  et 
de  succès.  Mais,  pour  en  revenir  aux  frères  et  compagnons 
qui  sont  en  procès,  le  maître  et  les  frères  doivent  obligeam- 
ment offrir  leur  médiation,  à  laquelle  les  frères  qui  sont 
en  contestation  devraient  se  soumettre  d'une  manière  pleine 
de  reconnaissance.  Mais,  s'ils  trouvaient  cette  soumission 
impraticable,  ils  pourront  continuer  leur  procès,  non  avec 
indignation  l'un  contre  l'autre,  comme  il  se  pratique  ordi- 
nairement, mais  sans  colère,  sans  rancune,  en  ne  disant  et 
ne  faisant  rien  qui  puisse  empêcher  l'amour  fraternel  et  en 
continuant  à  se  rendre  de  bons  offices.  En  un  mot,  il  faut 
qu'on  reconnaisse  en  tout  la  bénigne  influence  de  la  maçon- 
nerie, qui  a  été  cause  que  tous  les  vrais  maçons  en  ont  agi 
ainsi,  depuis  le  commencement  du  monde  et  en  agiront  de 
même  jusqu'à  la  fin  des  temps. 


En  dehors  des  Obligations  d'un  f.\-m.\,  la  Tierce 
publia  également  les  Statuts  ou  Règlements  généraux  de 


78  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

la  confrérie  des  f.\-m.*.  compilés  en  l'année  1720  par 
Georges  Payne, alors  G.*.  M.*,  et  approuvés  le  jour  de  la 
St-Jean-Baptiste  1721  par  le  très  noble  frère  Jean  duc 
de  Montagu  et  par  la  grande  loge  qui  le  choisit  comme 
grand  maître  (I,  195).  Ces  statuts  ne  comprennent 
que  39  articles . 

Au  lieu  de  reproduire  ce  texte,  déjà  imprimé  à  plu- 
sieurs reprises,  nous  utiliserons  un  manuscrit  contem- 
porain (vers  1739),  que  nous  avons  sous  les  yeux,  pro- 
venant probablement  du  G.*.  0.*.  et  qu'une  note  ajoutée 
sur  la  couverture  indique  avoir  appartenu  au  prince 
Murât,  qui  fut  grand  maître  du  G.\  0.'.  de  France  de 
1848  à  1860. 

Ce  document,  qui  comprend  70  articles  au  lieu  de  39, 
est  beaucoup  plus  complet  que  les  statuts  publiés  par 
la  Tierce  et  a  l'avantage  d'être  expliqué  par  des  com- 
mentaires. 

Il  a  pour  titre  : 

Ordonnances  générales  des  f.\-m.\  tirées  des  archi- 
ves de  l'ordre  et  rédigées  en  1720 par  ordre  du  G.*.  M.*, 
le  frère  George  Payne,  écuyer,  et  lues  le  21  juin  de  la 
même  année  dans  l'assemblée  de  Stationers  Hall,  les- 
quelles pour  la  conformité  avec  les  usages  des  plus 
anciennes  loges  ont  ensuite  été  constatées  {sic)  avec  les 
anciens  documents  de  la  fraternité  ;  auxquelles  le 
G.'.  M.*,  frère  très  éclairé  Jean  duc  de  Montaigu  a  fait 
ajouter  des  notes  et  des  éclaircissements  qui  ont  été 
reçus  d'un  consentement  unanime  et  confirmés  par  tous 
les  frères  de  la  G.*.  L.\  le  25  mars  1722  et  sont  com- 
muniquées en  conséquence  et  mises  depuis  en  pratique 
par  toutes  les  loges  légales  (1). 

(1)  Ce  manuscrit,  traduit  manifestement  de  l'anglais,  n'est  pas 
toujours  écrit  en  très  bon  français.  Nous  l'avons  corrigé  en  plu- 
sieurs endroits  afin   d'en  rendre  la  lecture  plus  facile.  Nous  avons 


L'ORGANISATION    PRIMITIVE    ;    SON    ÉVOLUTION  70 

I.  —  Le  G.'.  M.-,  ou  son  député  a  droit  et  autorité  d'être 
non  seulement  présenta  quelque  loge  que  ce  soit,  mais  aussi, 
s'il  le  juge  à  propos,  de  la  gouverner  en  faisant  placer  à  sa 
gauche  le  maître  de  la  loge  et  en  admettant  les  frères  grands 
surveillants  pour  exécuter  ses  ordres  ;  néanmoins,  les 
frères  grands  surveillants  ne  peuvent  exercer  leurs  fonctions 
dans  aucune  loge  particulière,  ou  y  être  regardés  comme 
revêtus  de  quelque  autorité  sans  la  présence  et  le  comman- 
dement exprès  du  G.'.  M.*.,  celui-ci  pouvant  enjoindre  aux 
frères  surveillants  ordinaires  de  la  loge  ou  même  à  d'autres 
frères  de  faire  le  service  pro  tempore  (1). 

II.  —  Le  G.\  M*,  d'une  loge  particulière  a  droit  et  auto- 
rité de  convoquer  ses  membres  aussi  souvent  qu'il  le  juge  à 
propos  et  de  fixer  le  temps  et  le  lieu  de  l'assemblée  ;  en  cas 
de  mort,  de  maladie  ou  d'absence  du  G.*.  M..,  ou  de  son 
député,  le  frère  1er  surveillant  prend  sa  place  et  en  exerce 
les  fonctions. 

III.  —  Chaque  loge  doit  avoir  un  livre  qui  renferme  les 
décisions  et  tout  ce  qui  mérite  d'être  noté,  avec  une  liste 
des  frères  et  des  loges  du  même  lieu.  La  préséance  des  loges 
se  fonde  sur  leur  ancienneté. 

IV.  —  Nulle  loge  ne  doit  sans  une  permission  expresse 
du  G*.  M.',  ou  de  son  député  recevoir  au  delà  de  cinq 
frères  dans  un  même  jour,  ni  en  admettre  aucun  qui  n'ait 
vingt-cinq  ans  accomplis  et  qui  ne  soit  son  propre  maître. 

V.  —  Aucun  frère  ne  saurait  dans  le  même  circuit  être 
membre  de  plus  que  d'une  loge  ;  il  est  permis,  à  la  vérité, 
de  l'adopter  dans  d'autres   et  de  l'inviter  aux  différentes 

cependant  laissé  plusieurs  incorrections  trop   difficiles   à  corriger 
sans  altérer  le  sens. 

(1)  Dans  l'article  présent  et  les  suivants,  les  G*.  M.,  des  loges 
particulières  sont  simplement  nommés  maîtres  de  loges,  pour  les 
distinguer  du  G.*.  M.-,  de  la  G.-.  L.\  du  pays  ou  de  la  province, 
laquelle  est  formée  de  tous  les  maîtres  des  loges  et  de  leurs  surveil- 
lants qui  ne  s'assemblent  que  pour  régler  les  assemblées  générales 
et  pour  délibérer  sur  des  cas  uniquement  relatifs  à  la  f.'.-m.'.,  le 
G.*.  M.",  n'ouvrant  jamais  ladite  loge  pour  une  réception  qui  ne 
peut  avoir  lieu  que  dans  une  loge  ordinaire  (note  du  manuscrit). 


80  LA  FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

loges  de  réception  et  d'instruction,  mais  il  peut  être  admis  à 
aucune  assemblée  économique  que  hormis  celle  de  la  loge 
dont  il  est  membre  et  de  laquelle  il  a  reçu  l'habit. 

VI.  —  Personne  ne  saurait  être  adopté  en  qualité  de 
membre  d'une  loge  s'il  n'a  été  annoncé  un  mois  d'avance, 
de  façon  qu'on  ait  eu  tout  le  temps  nécessaire  de  prendre 
des  informations  de  son  caractère  moral  ;  le  G.\  M.\  peut 
seul  néanmoins  dispenser  de  cette  règle. 

Les  loges  ont  coutume  pour  procurer  une  telle  dispense 
à  un  frère  qui  voyage  dans  les  pays  étrangers  de  le  munir, 
à  sa  réquisition,  d'une  lettre  de  recommandation. 

VII.  —  Nul  ne  peut  être  reçu  membre  d'une  loge  sans  le 
consentement  unanime  de  tous  les  frères  qui  sont  présents 
lorsqu'on  le  propose.  C'est  un  droit  qui  n'admet  aucune 
dispense,  et  le  maître  de  la  loge  ne  saurait  déclarer  une 
élection  pour  valable,  tant  qu'un  frère  refuse  d'y  donner  sa 
voix  et  en  allègue  de  bonnes  raisons  ;  car,  si  l'on  forçait  une 
loge  de  recevoir  en  qualité  de  membre  quelqu'un  qui  ne  fût 
pas  généralement  agréé  de  tous,  le  mécontentement  qui  en 
résulterait  préjudicierait  à  l'union  et  à  la  liberté  si  néces- 
saires aux  frères  ouvriers,  et  pourrait  ainsi  causer  la  des- 
truction de  la  loge,  ce  que  tout  bon  frère  doit  soigneusement 
prévenir. 

VIII.  —  On  ne  doit  jamais  accorder  l'entrée  de  la  loge  à 
un  frère  visiteur,  quand  même  il  serait  instruit  de  Fart  de 
la  maçonnerie,  si,  préalablement,  il  n'est  reconnu  comme 
véritable  maçon  ou  recommandé  de  sa  loge,  ou  de  quelque 
frère. 

IX.  —  Tout  frère  qui  a  été  reçu  maçon  ou  qui  a  obtenu  le 
droit  de  bourgeoisie  dans  une  loge,  est  tenu  de  la  vêtir, 
c'est-à-dire  qu'il  doit,  à  proportion  de  ses  facultés  et  selon 
l'exigence  des  cas,  fournir  quelque  chose  aux  besoins  et  à 
l'entretien  de  la  loge,  et  s'engager  de  plus  à  se  conformer 
aux  usages  et  aux  statuts  de  la  loge  qui  lui  seront  communi- 
qués en  temps  et  lieu. 

X.  —  Aucune  société  de  maçons  ni  aucun  frère  en  parti- 
culier ne  doit  se  séparer  de  sa  loge,  à  moins  qu'elle  ne  soit 
trop  nombreuse,  et,  alors,  la  dispense  duG.\  M.*,  ou  de  son 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       81 

député  est  pourtant  requise  ;  mais  si,  après  l'avoir  obtenue, 
ils  se  séparent,  il  faut  qu'ils  entrent  dans  une  loge  légale, 
ou  qu'en  se  réunissant  ils  en  forment  une  nouvelle  avec  la 
permission  du  G.'.  M.'. 

XI.  —  Lorsqu'une  société  de  maçons  se  réunit  pour  for- 
mer une  loge,  sans  en  avoir  le  droit  ou  la  permission  du 
G.*.  M.'.,  les  autres  loges  ne  sont  nullement  obligées  de  les 
reconnaître  pour  de  vrais  f.\  -m.*.,  encore  moins  d'approuver 
leurs  ouvrages  et  leurs  décisions  ;  ils  doivent,  au  contraire, 
les  regarder  comme  des  séditieux  jusqu'à  ce  qu'ils  se  soient 
soumis  à  la  vraie  loge  et  aux  ordonnances  du  G.'.  M.'.,  et 
que  celui-ci,  après  avoir  donné  son  approbation  à  leur 
ouvrage,  en  ait  fait  part  à  toutes  les  loges  légales. 

XII.  —  Tout  frère  qui,  sans  y  être  autorisé,  a  donné  à 
d'autres  le  grade  de  maçon,  ne  doit  être  admis  dans  aucune 
loge,  ni  comme  membre,  ni  comme  visiteur,  jusqu'à  ce 
qu'il  ait  expié  sa  faute  ;  néanmoins,  un  frère  qui  a  été  reçu 
de  cette  façon  peut  obtenir  l'entrée  de  la  loge  pour  qu'elle 
l'en  juge  digne  et  que  tous  les  frères  y  donnent  leur  consen- 
tement. 

XIII.  —  Ceux  qui  ont  érigé  sans  permission  une  loge  ne 
doivent  point  être  reçus  dans  aucune  loge  légale,  à  moins 
qu'ils  n'aient  reconnu  avec  soumission  leur  faute  et  qu'ils 
n'en  aient  obtenu  le  pardon. 

XIV.  —  Si  une  loge  n'a  pas  travaillé  ou  qu'elle  ne  se  soit 
point  assemblée  pendant  douze  mois,  elle  est  censée  être 
supprimée,  et  si  elle  veut  être  comptée  de  nouveau  au 
nombre  des  loges  régulières,  elle  perd  pourtant  son  ancien- 
neté, qui  ne  court  que  du  moment  qu'elle  a  recommencé 
à  travailler. 

XV.  —  Comme  on  a  appris  que  des  loges  ont  été  établies 
en  différents  endroits  très  illégalement,  sans  autorité,  ni  le 
consentement  d'aucun  G.*.  M.'.,  il  a  été  conclu  que  ceux  qui 
déshonorent  l'art  de  cette  façon,  ne  pourront  jamais  avoir 
aucun  office,  soit  dans  les  grandes  ou  particulières  loges,  et 
qu'ils  ne  doivent  point  s'attendre  d'obtenir  des  secours,  dans 
le  besoin,  d'aucune  loge  dûment  constituée. 

LA    FRANC   MAÇONNERIE.     —    T.    I.  6 


82  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

XVI.  —  Si  un  frère  s'oublie  au  point  que  la  loge  ait  sujet 
d'être  mécontente  de  lui,  le  maître  et  les  frères  surveillants 
sont  tenus  de  l'exhorter  par  deux  fois  en  pleine  loge  de 
rentrer  en  son  devoir  ;  mais,  au  cas  qu'il  refuse  d'obéir  et 
de  se  soumettre  à  la  volonté  des  frères,  la  loge  est  en  droit 
d'agir  avec  lui  conformément  aux  lois,  ou,  si  le  maître  et  les 
frères  le  jugent  à  propos,  de  renvoyer  l'affaire  à  la  G.".  L.\ 

XVII.  —  Quand  une  loge  particulière  renvoie  une  affaire  à 
la  G.*.  L.\,  on  en  dresse  l'instruction  par  écrit  à  la  pluralité 
des  voix,  en  présence  du  maître  et  des  surveillants  de  la  loge, 
et  on  y  donne  l'approbation,  à  moins  que  la  loge  ne  charge 
ceux-ci  d'en  faire  le  rapport  de  bouche. 

XVIII.  —  Les  loges  ouvrières  doivent  être,  autant  qu'il 
est  possible,  uniformes  dans  leurs  ouvrages  ;  dans  cette 
vue,  il  faut  invoquer  souvent  des  frères  experts  en  qualité 
de  visiteurs,  afin  d'avoir  l'œil  que  l'on  travaille  partout  sur 
les  mêmes  modèles. 

XIX.  —  La  G.*.  L.\  est  composée  de  tous  les  maîtres  et 
des  frères  surveillants  des  loges  particulières;  elle  a, de  plus, 
son  G.'.  M.*.,  son  député  et  ses  grands  surveillants  ;  aucun 
frère  ne  saurait  y  être  admis,  à  moins  qu'il  ne  soit  membre 
de  ladite  loge.  Dans  tout  ce  qui  s'y  décide,  chaque  mem- 
bre a  sa  voix  et  le  G.*.  M.\  en  a  deux,  excepté  dans  le  cas 
où  l'affaire  est  entièrement  remise  à  sa  décision. 

XX.  —  Outre  les  assemblées  extraordinaires,  qui  peuvent 
avoir  lieu  de  temps  à  autre,  la  G.'.  L.\  s'assemble  réguliè- 
rement sept  fois  par  an,  savoir  :  tous  les  quartiers,  et  trois 
fois  aux  grandes  fêtes  de  l'ordre. 

XXI.  —  Aucune  nouvelle  loge  n'est  reconnue  et  on  n'ad- 
met point  ses  trois  officiers  à  la  grande  loge,  si,  première- 
ment, elle  n'a  été  légalement  constituée  en  présence  de  la 
G.*.  L.\  et  après  qu'on  en  a  fait  part  aux  autres  loges. 

XXII.  —  Généralement  tous  ceux  qui  ont  été  ou  qui  sont 
encore  grands  maîtres,  députés  ou  surveillants,  sont  tou- 
jours membres  de  la  G.1.  L.*.  et  y  ont  leur  voix. 

XXIII.  —  Les  maîtres  des  loges  particulières  et  leurs 
surveillants   se   rendent  toujours   à  la  G.*.  L.\  avec  leurs 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       83 

ornements  au  cou.  On  accorda  cependant  en  1728,  le  26  no- 
vembre, l'entrée  à  un  des  trois  officiers,  quoiqu'il  ne  fût  pas 
décoré  de  son  ornement,  qu'il  avait  remis  en  garde  à  un 
frère  qui  était  absent  Lorsqu'un  de  ces  officiers  a  quelque 
raison  qui  l'empêche  de  se  rendre  à  la  G.*.  L.\,  il  lui  est 
permis  de  s'y  faire  représenter  par  un  frère  maître  qu'il 
charge  de  son  ornement,  mais  il  faut  que  le  frère  qu'il  choi- 
sit ait  été  antérieurement  officier  qualifié  pour  être  membre 
de  la  G.'.  L.\ 

XXIV.  —  Il  faut  qu'aux  assemblées  de  la  G.'.  L.\,  qui  se 
tiennent  tous  les  trois  mois,  toutes  les  affaires  qui  regardent 
la  fraternité  ou  l'ordre  en  général,  de  même  que  celles  qui 
concernent  les  loges  particulières,  ou  quelques  frères  en 
particulier,  y  soient  traitées  et  décidées  avec  beaucoup  de 
réflexion,  d'union  et  d'amitié.  On  y  termine  ces  différends 
que  l'on  n'a  pas  pu  finir  dans  les  loges  particulières,  et  si 
un  frère  n'est  pas  content  de  ce  qu'on  y  décide,  il  est  le 
maître  d'en  appeler  à  la  première  assemblée  du  quartier, 
ou  trimestre  suivant,  et  d'y  faire  remettre  son  appel  par  écrit. 

XXV.  —  Aux  grands  jours  de  fête,  on  ne  reçoit  ni  deman- 
des, ni  appels,  ni  quoi  que  ce  soit  qui  paraisse  troubler  la 
concorde  ou  le  plaisir  de  ces  jours. 

XXVI.  —  Le  G.'.  M.*,  nomme  tous  les  ans  le  secrétaire, 
le  trésorier,  l'orateur  et  le  maître  des  cérémonies,  ou  bien 
il  confirme  à  son  introduction  les  précédents  en  leur  remet- 
tant à  cette  occasion  les  livres  et  les  marques  de  leurs 
dignités. 

XXVII.  —  Quoique  le  trésorier  ait  sa  voix  en  toutes  occa- 
sions, il  ne  peut  cependant  la  donner  à  l'élection  d'un 
G.\  M.*,  et  des  surveillants. 

XXVIII.  —  Quand  un  G.*.  M.*.,  un  maître  de  loge  et  le 
député  sont  absents,  alors  un  ci-devant  G.*.  M.*,  ou  député 
prend  le  marteau.  En  absence  d'un  plus  ancien  G.\  M.*.,  il 
est  représenté  par  le  grand  surveillant,  à  son  défaut  par  le 
second,  et  au  cas  que  celui-ci  manque  encore,  par  un  ci- 
devant  grand  surveillant  ;  mais  si  tous  ceux-ci  manquaient, 
le  plus  ancien  maître  de  la  loge  prendrait  sa  place,  et  dans 
une  loge  particulière  le  plus  ancien  maître. 


84  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN   FRANCE 

XXIX.  —  Dans  l'absence  des  grands  surveillants  ou  des 
surveillants  ordinaires,  les  ci-devant  grands  surveillants  ou 
surveillants  ordinaires  prennent  leurs  places,  et  lorsqu'ils 
n'y  sont  pas,  le  G.'.  M.*,  ou  le  député  nomment  quelque 
frère  pour  exercer  leurs  fonctions  pro  tempore. 

XXX. —  Tant  pour  la  commodité  du  G.*.  M.*,  et  des 
maîtres  des  loges  que  pour  le  maintien  de  l'honneur  et  de  la 
dignité  des  députés,  on  a  trouvé  bon  que  les  surveillants  (à 
moins  que  l'affaire  ne  soit  de  conséquence),  quand  ils  auront 
quelque  chose  à  annoncer,  s'adressent  aux  députés,  et  que 
ce  ne  sera  que  sur  le  refus  de  ceux-ci  de  proposer  le  cas, 
que  les  surveillants  s'adresseront  au  G.'.  M.'. 

XXXI.  —  Quand  il  survient  quelque  différend  entre  le 
député  et  les  surveillants  ou  d'autres  frères,  il  faut  que  les 
deux  parties,  après  en  être  convenues,  aillent  au  G.'.  M.',  qui 
aplanit  les  difficultés  ;  ceci  n'est  encore  jamais  arrivé  et  le 
G.*.  M.',  a  exercé  de  tous  temps  des  droits,  plus  par  amitié 
générale  qu'en  vertu  de  son  autorité. 

XXXII.  -  Le  G.\  M.-,  ni  les  officiers  de  la  G.'.  L.\  ne 
peuvent  exercer  en  même  temps  les  fonctions  de  maître  ou 
d'officiers  d'une  loge  particulière  ;  mais  dès  qu'ils  se  démet- 
tent de  celles  qu'ils  exercent  dans  la  grande,  ils  reprennent 
de  nouveau,  dans  les  loges  auxquelles  ils  sont  attachés,  les 
fonctions  qu'ils  exerçaient  précédemment. 

XXXIII.  —  Un  grand  officier,  lorsqu'il  est  officier  d'une 
loge  particulière,  n'est  point  privé  des  droits  attachés  à  la 
place  qu'il  occupe  dans  la  loge  particulière  et,  en  consé- 
quence, il  charge  un  des  frères  qualifiés  (quand  il  est  absent) 
de  le  représenter  pro  tempore  à  la  G.'.  L.'.  si  la  nécessité 
l'exige. 

XXXIV.  —  Si  un  G.*.  M.*,  abusait  de  ses  droits  et  qu'il  se 
rendît  indigne  de  l'obéissance  et  du  dévouement  de  la  loge, 
il  faudrait  alors  procéder  contre  lui,  selon  les  nouvelles 
ordonnances  que  l'on  ferait  en  pareil  cas,  car  jusqu'ici  elles 
n'ont  pas  été  nécessaires.  L'ancienne  société  des  f.*. -m.',  est 
aussi  fermement  et  pleinement  persuadée  qu'il  ne  sera 
jamais  question  de  faire  une  telle  ordonnance. 

XXXV.  —  Il  faut  que  le  G.*.  M.',  avec  ses  confrères  fasse, 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       85 

pendant  qu'il  est  en  charge,  au  moins  une  fois,  la  visite  de 
toutes  les  loges  particulières  qui  sont  de  son  ressort. 

XXXVI.  —  Cet  ancien  et  très  louable  usage  rend  un 
député  indispensablement  nécessaire  au  G.".  M.*.,  qui  peut 
de  temps  en  temps  lui  céder  sa  place  et  lui  confier  son 
autorité  lorsqu'on  érige  une  nouvelle  loge. 

XXXVII.  —  Les  frères  de  toutes  les  loges  et  tous  les  vrais 
maçons  dispersés  sont  tenus  de  s'assembler  chacun  en  son 
lieu  pour  la  célébration  générale  d'un  jour  dont  on  a  fait 
choix,  qui  est  celui  de  la  fête  de  St  Jean-Baptiste. 

XXXVIII.  —  Si  des  empêchements  ne  permettent  pas  de 
célébrer  ce  jour,  il  faudra  pourtant  s'assembler  afin  de  pro- 
céder à  la  nomination  du  G.*.  M.*,  de  la  G.  .  L.\ 

XXXIX.  —  Chaque  loge  doit  avoir  son  jour  de  fête  parti- 
culière ;  mais  il  ne  faut  pas  prendre  celui  de  la  fête  générale, 
auquel  les  frères  de  toutes  les  loges  se  rassemblent. 

XL.  —  Lorsque  le  G.'.  M.*,  et  la  loge  jugent  à  propos  de 
célébrer  la  grande  fête  selon  l'ancien  usage  maçonnique,  les 
grands  surveillants  font  distribuer  des  billets  d'invitation 
avec  le  sceau  du  G.*.  M.*,  et  ont  soin,  conjointement  avec 
ceux  que  les  loges  ont  nommés  pour  cet  effet,  de  faire 
acheter  et  préparer  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour  la  célé- 
bration de  ce  jour. 

XLI.  —  On  ne  doit  point  tirer  de  vin  ce  jour-là  avant  que 
le  repas  ne  soit  prêt  ;  après  8  heures  du  soir  on  ne  donne 
plus  de  vin  ni  aucune  liqueur  forte. 

XLII.  —  Les  entrées  des  appartements  destinés  au  travail 
sont  couverts  et  gardés  par  des  bons  frères  tuileurs  et  ser- 
vants dont  on  a  éprouvé  la  fidélité,  ils  ont  l'œil  à  tout  afin  de 
prévenir  le  désordre. 

XLIII.  —  On  doit  prendre  de  bons  frères  pour  le  service 
parce  qu'il  n'est  pas  permis  de  se  servir  ce  jour  de  personne 
qui  ne  soit  vrai  maçon,  afin  de  jouir  de  toute  la  liberté 
possible. 

XLIV.  —  On  nomme  des  frères  de  toutes  les  loges  pour 
recevoir  ceux  qui  arrivent,  prendre  les    billets,  faire  les 


86  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

honneurs,  introduire,  ou  refuser  l'entrée,  selon  que  les  cir- 
constances l'exigent  ;  il  ne  leur  est  cependant  point  permis 
de  renvoyer  quelqu'un  sans  en  exposer  les  motifs  à  tous  les 
frères  de  la  loge,  afin  de  prévenir  tout  mécontentement  et 
qu'un  vrai  frère  ne  soit  exclu  et  qu'un  faux  frère  ou  un  trom- 
peur ne  soit  admis.  Ceux  qui  sont  chargés  de  ce  soin  se 
rendent  de  bonne  heure  à  l'endroit  de  l'assignation  avant 
ceux  qui  ont  des  billets  et  avant  les  visiteurs. 

XLV.  —  Les  membres  de  la  G.  • .  L. * .  se  rendent  avant  le 
repas,  de  bonne  heure,  à  la  place  assignée  et  se  séparent 
avec  le  G.".  M.*,  des  autres  frères  pour  délibérer  pendant 
quelque  temps  sur  les  points  suivants  : 

1°  Pour  recevoir  les  appels,  et  après  avoir  pesé  les  raisons 
alléguées  de  part  et  d'autre,  de  chercher  s'il  est  possible  de 
réconcilier  encore  avant  le  repas  les  frères  qui  sont  en  diffé- 
rend, ou  de  renvoyer  l'affaire  à  un  temps  plus  convenable. 

2°  De  prévenir  les  disputes  et  les  désordres  qui  pour- 
raient avoir  lieu  ce  jour-là  et  de  régler  en  général  tout  de 
façon  que  rien  ne  trouble  l'union  et  le  plaisir  de  la   société. 

3°  De  tenir  conseil  sur  ce  qui  est  relatif  au  décorum,  afin 
que  rien  ne  se  passe  dans  une  aussi  nombreuse  assemblée 
qui  soit  contre  les  mœurs  et  la  bienséance. 

XLVI.  —  Il  n'y  a  pas  fort  longtemps,  le  25  novembre 
1723,  qu'il  fut  décidé  de  ne  point  recevoir  d'appel  le  jour  de 
la  grande  fête.  Anciennement  les  frères  s'assemblaient  le 
jour  de  la  St-Jean,  au  lever  du  soleil,  dans  un  couvent,  ou 
sur  une  haute  montagne  dans  le  voisinage,  et  après  y  avoir 
élu  les  grands  officiers,  ils  se  rendaient  au  lieu  de  la  fête  qui 
était  ordinairement  aussi  dans  un  couvent  ou  dans  la  maison 
d'un  maçon  distingué,  ou  bien  dans  une  auberge  spacieuse 
et  bien  construite.  Quelquefois  les  maîtres  des  loges  et  les 
surveillants  des  loges  particulières  y  attendaient  à  l'entrée 
le  G.\  M.*,  et  sa  suite,  pour  le  recevoir,  le  complimenter  et 
l'introduire  dans  la  loge.  Mais,  souvent  aussi,  le  G.'.  M.',  y 
précédait  les  frères  et  députait  ses  surveillants  pour  les 
inviter  à  entrer.  On  peut  faire  l'un  et  l'autre,  il  faut  seule- 
ment que  la  loge  soit  en  ordre  avant  le  repas. 

XLVII.  —  Quand  ceci  est  fait, le  G.*. M.'., les  grands  sur- 
veillants et  grands  officiers  se  retirent  pour  peu  de  temps  et 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       87 

laissent  les  maîtres  et  les  surveillants  des  loges  particulières 
en  liberté  d'élire  un  nouveau  G.*.  M.*,  ou  de  confirmer  le  pré- 
cédent (s'entend,  si  l'élection  n'est  pas  déjà  faite).  Si,  par  un 
consentement  unanime,  le  précédent  est  confirmé,  on  l'in- 
vite de  rentrer  et  on  le  prie,  avec  les  témoignages  de  respect 
qui  lui  sont  dus,  de  faire  l'honneur  à  la  société  d'exercer 
encore,  pendant  un  an,  les  fonctions  de  sa  charge  et,  après 
le  repas,  on  fait  savoir  qu'il  a  repris  ou  refusé  le  gouverne- 
ment, car  ce  n'est  qu'alors  qu'un  des  ci-devant  G.'.  M.\  le 
déclare  à  l'assemblée. 

Il  fut  conclu  en  1720,  le  27  décembre,  que  l'on  élirait  à 
l'avenir  le  G.'.  M.*,  quelques  jours  avant  la  grande  fête  et 
que  le  nouveau  G.*. M.*.,  ayant  celui  qui  sort  de  charge  à  sa 
gauche,  se  rendrait  à  la  fête,  de  façon  que  l'élection  dont  on 
vient  de  parler  ne  serait  simplement  qu'une  nouvelle  con- 
firmation ou  une  simple  cérémonie. 

XLVIII.  —  On  se  met  ensuite  à  table  et,  après  s'être 
levé,  on  ouvre  la  G.'.  L.\  en  présence  de  tous  les  frères 
assemblés. 

XLIX.  —  Quand  le  précédent  G.*.  M.*,  a  été  requis  avant 
le  repas  de  rester  en  charge  pour  l'année  suivante  et  qu'il 
a  accepté,  un  frère  nommé  à  cet  effet  expose  à  l'assemblée 
les  avantages  dont  on  a  joui  sous  le  gouvernement  dudit 
G.'.  M.*,  et,  en  s'adressantà  lui-même, il  le  prie,  au  nom  de 
la  G.'.L.'.,  de  faire  l'honneur  aux  frères  d'être  encore  leur 
G.'.  M.',  pour  l'année  suivante,  et,  après  qu'il  a  donné  son 
consentement  par  le  signe  d'approbation,  celui  qui  en  a  le 
droit,  le  déclare  à  haute  voix  G.'.  M.\  ;  tous  les  frères  le 
saluent  selon  l'usage  et  vont  à  lui  séparément  lui  témoigner 
leur  joie  ;  après  quoi  chacun  se  rend  à  sa  place. 

L.  —  Mais,  au  cas  que  les  maîtres  des  loges  et  les  frèrôs 
surveillants  n'eussentpas  requis  ce  jour-là  ou  antérieurement 
le  G*.  M.',  de  garder  sa  place  ou  qu'il  eût  refusé  de  la 
garder,  alors  celui-ci  déclare  le  frère  qui  lui  succède  par 
élection,  et  dès  que  la  loge  y  a  donné  son  consentement 
unanime,  on  procède  de  la  même  manière  que  l'on  vient 
de  dire  dans  l'article  précédent. 

LI.  —  Si  l'élection  d'un  G.'.  M.'.n'estpas  unanimement 
approuvée,  les  maîtres  des  loges  et  les  surveillants  y  pro- 


88  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

cèdent  une  seconde  fois,  et  si  on  rejette  encore  celle-ci,  il 
faut  prier  instamment  pour  la  troisième  fois  le  G.'.  M.',  de 
l'année  précédente  de  garder  le  marteau,  ce  qu'il  ne  saurait 
refuser  alors. 

LII.  —  La  susdite  élection  se  fait  par  le  sort  de  la 
manière  suivante  :  chaque  maître  déloge,  député  ou  surveil- 
lant, écrit  le  nom  de  son  candidat  sur  un  papier  et  celui  qui 
est  le  G.'.  M.',  pour  Tannée  suivante  (sic). 

LUI.  — Dès  que  le  G.*.  M.*,  a  été  confirmé  ou  que  le  nou- 
veau a  été  installé  et  assis  dans  la  chaise  de  Salomon,  il 
nomme  d'abord  son  député,  qui  est  aussitôt  proclamé,  salué 
et  installé  par  l'autre.  Ensuite  il  nomme  les  frères  grands 
surveillants  qui  doivent  également  être  unanimement 
approuvés  parla  G.'.L.'.et  installés  par  le  sort,  au  cas  que 
la  susmentionnée  élection  n'ait  pas  été  confirmée.  Il  nomme 
de  plus  ses  autres  officiers  qui  prennent  leurs  places.  Pour 
conclusion,  les  maîtres  de  loges  présentent  leurs  frères 
surveillants  nommés  dans  leurs  loges,  ou  élus  par  le  sort, 
lesquels,  en  qualité  de  membres  de  la  G.'.  L.\,  sont  reçus 
et  félicités  de  la  façon  ordinaire. 

LIV.  —  Si  le  frère  que  le  G.'.  M.*,  nomme  son  succes- 
seur ne  peut  être  présent  à  l'assemblée,  soit  pour  cause  de 
maladie,  ou  par  d'autres  raisons,  il  ne  saurait  être  proclamé 
G.*.  M.*,  à  moins  que  l'ancien  G.*.  M.*,  ou  quelque  autre 
maître  de  loge  n'assure,  sur  sa  parole  de  maçon,  que  le 
susdit,  nommé  ou  élu,  accepte  la  charge  en  question  et, 
dans  ce  cas,  le  précédent  G.'.  M.*,  nomme  en  qualité  de 
plénipotentiaire,  le  député  et  les  frères  grands  surveillants, 
ainsi  que  les  autres  grands  officiers,  car  les  places  ne  peu- 
vent demeurer  vacantes;  il  reçoit  aussi,  au  nom  du  G.'.  M.', 
en  charge  les  hommages  des  frères  de  la  façon  usitée.  Le 
précédent  G.'.  M.\  ou  un  des  anciens  G.'.  M.',  est  plénipo- 
tentiaire du  nouveau,  jusqu'à  ce  que  celui-ci  ait  occupé  la 
chaise,  car  le  député  ou  les  grands  surveillants  ne  sauraient 
occuper  sa  place,  à  moins  que  ce  ne  soit  par  son  ordre  ex- 
près. Au  reste,  il  remet  en  personne  entre  les  mains  du 
nouveau  G.*.  M.\  l'ornement  et  les  outils. 

LV.  —  A  la  suite  de  ceci,  le  G.'.  M.\  permet  aux  frères 


l'organisation  primitive  ;  SON  évolution       89 

qui  sont  présents  de  proposer  quelque  chose  pour  le  bien 
de  l'ordre,  et  Ion  décide  en  conséquence  ou  l'on  renvoie  les 
affaires  à  la  première  assemblée  ordinaire  ou  extraordinaire 
de  la  G.*.  L.*. 

LVI. — Ensuite,  le  G.\  M.*.,  son  député  ou  un  autre 
qui  en  est  chargé,  adresse  aux  frères  des  exhortations  con- 
venables. 

LVII.  —  Après  cela,  on  peut  porter  les  santés  ordinaires 
et  entonner  les  chansons  des  f.\-m.\  avec  l'accompagne- 
ment de  la  musique,  et,  lorsque  tout  ce  qui  est  relatif  aux 
devoirs  et  aux  obligations  du  G.".  M.*,  et  des  surveillants 
a  été  mis  sur  le  tapis,  et  qu'on  a  délibéré  sur  ces  objets,  il 
est  libre  à  chaque  frère  de  se  retirer,  ou  de  demeurer, 
pourvu  seulement  que  la  loge  se   ferme  de  bonne  heure. 

LVIII .  —  Le  maître  d'une  loge  particulière  est  constam- 
ment maître  de  la  loge  qu'il  a  créée,  soit  en  vertu  de  son 
droit,  ou  par  permission  de  la  G.'.  L.'.,  ou  parce  qu'il  a  été 
appelé.  Lorsqu'il  en  résigne  le  gouvernement,  il  peut  le 
remettre  à  qui  il  veut,  à  moins  qu'il  nepréfère  que  les  frères 
élisent  son  successeur  par  le  sort.  Il  nomme  ou  confirme 
tous  les  ans  son  député,  ses  surveillants,  après  le  consente- 
ment préalable  de  la  loge,  ou,  en  cas  qu'il  soit  refusé,  par 
le  sort.  Au  reste,  ces  ordonnances  générales  ont  lieu  pour 
les  loges  particulières  dans  tous  les  cas. 

LIX.  —  Lorsqu'une  loge  particulière  étant  trop  nom- 
breuse prend  le  parti  de  se  séparer  (car  la  séparation  ne 
peut  avoir  lieu  dans  la  G.'.  L.*.)  elle  doit  en  faire  part  au 
maître  de  la  loge,  qui  demande  en  conséquence  le  signe 
d'approbation  de  sa  loge,  lequel  doit  être  unanime  pour 
cet  effet  ;  il  communique  ensuite  sa  décision  à  la  G.  *.  L.'., 
en  requiert  le  consentement  et  la  prie  de  créer  une  nouvelle 
loge  quand  les  frères  qui  se  séparent  ont  élu  préalable- 
ment leur  maître  et  que  celui-ci  a  été  agréé  par  la  loge 
mère  ou  par  le  G.v  M.*,    du  pays. 

LX.  —  Aussitôt  que  la  séparation  est  faite  et  qu'une  nou- 
velle loge  a  été  établie,  l'ancienne  ne  peut  demander  aucun 
privilège  à  la  nouvelle,  ni  celle-ci  à  l'autre,  et  un  membre  de 
l'une  ne  saurait  être  membre  de  l'autre  en  même  temps. 


90  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

LXI.  — Quand  le  G.'.  M.*,  frappe  le  troisième  coup  de 
marteau,  tout  doit  être  dans  un  profond  silence  dans  la 
loge,  et  quiconque  y  manque  est  puni  sur-le-champ. 

LXII.  —  Nul  frère  ne  peut  être  admis  à  la  G.".  L.\  sans 
en  être  membre,  à  moins  qu'il  ne  fût  obligé  de  comparaître 
pour  quelque  affaire,  comme  suppléant  ou  comme  témoin, 
ou  qu'on  eût  été  forcé  de  le  faire  appeler  pour  donner  des 
explications  et  des  éclaircissements  dans  un  cas  particu- 
lier. 

LXIII.  —  Personne,  excepté  ceux  qui  ont  quelque  office, 
n'ose  changer  de  place  pendant  les  délibérations  et  l'ou- 
vrage (sic). 

LXIV.  —  Il  n'est  pas  permis  à  un  frère  de  parler  plus 
d'une  fois,  sur  le  même  objet,  si  ce  n'est  pour  donner  des 
éclaircissements  et  après  avoir  obtenu  la  permission  du 
maître  de  la  loge. 

LXV.  —  Nul  ne  doit  parler  sans  permission  et  qu'après 
s'être  levé  et  tourné  du  côté  de  la  chaise  ;  personne  n'ose 
interrompre  un  frère  qui  parle  ;  mais  lorsqu'il  s'écarte  de 
son  sujet,  le  maître  est  en  droit  de  le  redresser,  sur  quoi  il 
s'assied  jusqu'à  ce  qu'il  ait  obtenu  de  nouveau  la  permission 
de  poursuivre  son  discours. 

LXVI.  —  Si  quelqu'un  contrevient  deux  fois  aux  ordon- 
nances dans  un  même  jour  et  qu'il  récidive  pour  la  troisième, 
on  lui  ordonne  sérieusement  de  s'absenter  ce  jour-là  de  la 
loge. 

LXVII.  —  Si  quelqu'un  se  moque  d'un  frère  ou  qu'il 
tourne  en  ridicule  ce  qu'il  propose,  il  doit  être  exclu  de  la 
société  des  frères  et  déclaré  indigne  de  devenir  jamais 
membre  de  la  G.'.  L.\,  à  moins  qu'il  ne  reconnaisse  sa  faute 
et  qu'il  n'en  ait  obtenu  le  pardon. 

LXVIII.  —  On  ne  doit  traiter  aucun  sujet  dans  la  loge 
qui  n'ait  déjà  été  communiqué  panécrit  au  G.'.  M.\,  et  après 
qu'il  y  a  réfléchi  les  frères  peuvent  en  porter  leur  jugement 
et  le  G.'.  M.',  propose  le  pour  et  le  contre. 

LXIX.  — Le  26  novembre  1728,   l'office  d'intendant   ou 


l'organisation  primitive    ;  SON  ÉVOLUTION        91 

de  steward,  qui  pendant  quelques  années  avait  été  hors 
d'usage,  fut  rétabli  et  a  été  conservé  depuis  à  cause  de 
son  utilité  :  car  c'est  sur  lui  que  roule  particulièrement  le 
soin  de  faire  les  préparatifs  et  les  arrangements  nécessaires 
pour  les  grandes  fêtes.  Vu  donc  le  pénible  de  cette  charge 
et  l'avantage  que  les  frères  en  retirent,  il  fut  conclu  que,  pour 
éviter  à  l'avenir  toutes  disputes  et  altercations  assez  fré- 
quentes dans  de  pareilles  occasions,  on  confierait  entière- 
ment aux  susdits  frères  stewards  le  soin  de  régler  en  géné- 
ral tout  ce  qui  concerne  les  fêtes  et  de  plus  on  leur  donna 
par  reconnaissance,  le  24juin  1735,  le  droit  de  former  et 
d'établir  une  loge  particulière  (1),  et  on  statua  : 

1°  Que  cette  loge  serait  inscrite  dans  tous  les  livres  et 
dans  toutes  les  listes  de  la  G.'.  L.\  sous  le  nom  de  Loge 
intendante  ou  de  stewards. 

2°  On  leur  accorda  le  privilège  d'envoyer  douze  frères  à 
la  G.*.  L.\  en  qualité  de  syndics,  savoir  :  le  maître,  les 
deux  surveillants  de  leur  loge,  avec  neuf  frères  dont  cha- 
cun aurait  sa  voix. 

3°  On  les  décora  d'un  cordon  rouge,  en  ajoutant  la  per- 
mission d'avoir  une  doublure  de  soie  rouge  à  leurs  tabliers, 
avec  défense  à  toute  autre  loge  de  porter  le   même  habit. 

4°  Les  frères  de  la  loge  de  stewards  (à  l'exception  du 
maître  et  des  frères  surveillants)  n'ont  point  de  voix  dans 
la  G.*.  L.\,  hormis  dans  les  cas  économiques. 

5°  Cette  loge  reçoit  l'argent  pour  les  jours  de  fêtes  et 
prend  soin  des  arrangements  ;  mais  si  les  frais  ne  suffisent 
pas,  leur  loge  est  aussi  obligée  d'y  suppléer,  sans  que 
cela  retombe  à  la  charge  des  autres  loges.  Depuis  que  cette 
loge  est  établie,  elle  s'est  toujours  chargée  seule  du  soin 
de  régler  ce  qu'il  faut  pour   le  jour    de    la  grande  fête. 

LXX.  —  Toute  G.*.  L.\  a  pleinement  droit  et  autorité 
de  faire  pour  le  soutien  de  l'ancienne  société  maçonnique 
de  nouvelles  ordonnances  et  de  changer  celles-ci,  de  façon 
pourtant  que  les  anciennes  ordonnances  ne  soient  point 
lésées  et  que  les  nouveaux  statuts  que  l'on  pourrait  établir 
soient  présentés  par  écrit  dans  une  des  premières   assem- 

(1)A  la  Corne  d'abondance;  cette  loge  figure  sous  le  tableau  de 
Steele. 


92  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

blées  à  la  délibération  des  frères,  et  cela  avant  le  jour  de 
la  grande  fête,  car  le  consentement  unanime  de  tous  les 
frères  est  indispensablement  nécessaire  pour  donner  aux 
susdites  ordonnances  force  de  loi  ;  dans  cette  vue,  on  doit 
demander  solennellement  ce  consentement  d'abord  après 
le  repas  :  au  reste,  il  n'est  permis  à  qui  que  ce  soit,  ni  à  au- 
cune société,  de  faire  de  sa  propre  autorité  une  innovation 
quelconque  dans  la  rue. 

LXXI.  —  En  conséquence  d'une  décision  et  déclaration 
donnée  en  bonne  forme  le  25  novembre  1723,  toute  loge 
légalement  assemblée  a  droit  de  perfectionner  ou  d'adapter 
aux  circonstances  particulières  les  ordonnances  contenues 
dans  le  livre  imprimé  des  constitutions,  qui  a  paru  par 
ordre  de  la  G.*.  L.\  d'Angleterre  ;  mais  rien  dans  ce  livre 
n'ose  être  altéré  sans  l'aveu  de  la  plus  ancienne  loge  ;  et  l'on 
ne  doit  point  reconnaître  dans  aucune  loge  légale  tel  livre 
des  constitutions  qui  aurait  été  ainsi  réimprimé  avec  des 
changements. 

C'est  avec  cette  organisation  matérielle  que  s'installa 
la  f.\-m.\  spéculative  entre  les  années  1717  et  1723. 

Essayons  maintenant  de  dégager  de  ces  documents 
les  parties  essentielles  qui  peuvent  faire  comprendre 
les  tendances  et  le  but  des  fondateurs. 

Quelles  étaient  les  bases  de  l'association  maçonni- 
que? Quelle  était  sa  portée  pratique?  Quelles  pou- 
vaient être  les  conséquences  philosophiques  et  sociales 
d'une  semblable  organisation  ? 

Pour  bien  comprendre  la  portée  de  ces  documents, 
il  faut  d'abord  en  dégager  le  sens  symbolique  qui 
cache  le  sens  véritable. 

Les  nouveaux  maçons  ne  construisent  plus  pour  des 
propriétaires,  particuliers,  collectivités  ou  Etats.  Lors- 
qu'ils parlent  des  intérêts  des  propriétaires  ou  des 
seigneurs  qui  ont  commandé  le  travail,  il  s'agit  des 
chefs  de  l'ordre,  ou  mieux   de  l'ordre  lui-même. 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       93 

Lorsqu'ils  font  allusion  au  payement  du  travail,  cela 
veut  dire  l'avancement  de  grade  donné  en  récompense 
du  zèle  des  initiés.  Enfin  il  faut  rapporter  tous  les  con- 
seils, les  approbations  ou  les  désaveux  à  la  f. *.-m.\ 

Le  travail  à  faire,  c'est  l'organisation  et  le  développe- 
ment de  l'ordre  ;  la  construction  du  temple  à  édifier, 
la  suppression  par  la  mort  de  ceux  qui  y  mettent 
obstacle,  c'est  le  but  philosophique  et  social  de  la 
maçonnerie  à  réaliser,  en  supprimant  tout  ce  qui  para- 
lyse les  moyens  d'y  parvenir. 

Le  maçon  est  obligé  d'obéir  à  la  loi  morale,  et  ne  pas 
être  un  athée  stupide  ou  un  libertin  sans  religion,  veut 
dire  qu'on  doit  obéir  aux  règlements  maçonniques  et 
croire  à  la  religion  de  l'ordre.  En  ne  prenant  parti 
pour  aucune  des  religions  pratiquées  ni  pour  aucune 
nation,  cela  veut  dire  que  ces  religions  et  ces  nationa- 
lités doivent  être  indifférentes. 

On  engage  le  maçon  à  n'entrer  dans  aucun  complot 
contre  les  gouvernements  existants  quels  qu'ils  soient  ; 
c'est  leur  enseigner  l'indifférence  en  matière  de  sociétés 
civiles. 

Néanmoins,  si  un  frère  était  rebelle  à  l'État,  on  ne 
pourrait  l'exclure  de  la  loge,  c'est-à-dire  qu'on  devrait 
lui  venir  en  aide. 

On  ne  doit  initier  aucune  personne  ayant  une  muti- 
lation pouvant  l'empêcher  d'apprendre  l'art,  et  servir  le 
seigneur  de  son  maître:  ceci  veut  dire  qu'on  ne  peut 
recevoir  aucun  individu  ayant  des  idées  contraires 
aux  dogmes  maçonniques. 

Travailler   honnêtement  les  jours  ouvriers  (sic)  et 

vivre  honorablement  les  dimanches  et  jours  de  fêtes 

veut  dire  :  participer  avec  zèle  aux  travaux  de  l'ordre 

et  s'abstenir  les  autres  jours,  même  d'en  parler. 

Tous  les  outils  dont  on  se  servira  pour  travailler 


94  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

seront  approuvés  par  la  G.'.  L.\  veut  dire  que  tous  les 
arguments  dont  on  se  servira,  tous  les  dogmes  qu'on  in- 
voquera, devront  être  conformes  à  la  doctrine  de  l'ordre. 

Vous  devrez  être  circonspects  dans  vos  paroles  et 
dans  vos  démarches,  en  sorte  que  l'étranger  le  plus 
pénétrant  ne  puisse  découvrir  ou  trouver  ce  qu'il  n'est 
pas  propre  à  entendre,  et  ne  point  faire  connaître  à  vos 
parents  et  à  vos  amis  ce  qui  concerne  la  loge  veut 
dire  :  ne  divulguez  pas  les  secrets  de  l'ordre,  même  à  vos 
parents  et  à  vos  amis. 

Les  disputes  entre  f.\-m.\  doivent  être  jugées  par  le 
tribunal  de  la  loge. 

Les  maçons  sont  donc  des  sectateurs  de  la  religion 
universelle,  et  ils  sont  en  même  temps  de  toutes  les 
nations. 

Quant  au  procédé  matériel  à  employer  pour  consti- 
tuer les  chefs  et  les  officiers  de  l'ordre,  recevoir  les 
initiés,  les  juger,  les  chasser  ;  quant  aux  décisions 
d'ordre  général  ou  particulier  à  prendre  pour  la  propa- 
gation ou  la  sécurité  de  l'ordre,  tout  cela  est  expliqué 
très  en  détail  dans  un  document  qui  fait  suite  aux 
ordonnances  générales  et  qui  fait  partie  du  manuscrit 
provenant  du  G.'.  M.*,  le  prince  Murât. 

Ce  document  a  pour  titre  :  Lois  du  Ballottage,  qui 
doit  s'interpréter,  probablement  à  la  suite  d'une  tra- 
duction insuffisante,  par  :  règles  du  scrutin.  Il  se  com- 
pose de  22  articles  : 

I.  —  Quand  un  étranger  aspirant  a  obtenu  le  ballottage  et 
qu'il  est  affirmatif  en  sa  faveur,  il  est  dès  lors  même  en 
droit  d'être  reçu  dans  l'ordre. 

II.  —  Dans  une  loge  d'élection  et  de  ballottage,  tous  les 
frères  doivent  rester  tranquillement  assis  à  leurs  places,  et 
personne  n'ose  quitter  la  sienne,  sous  peine  de  l'amende 
ordonnée. 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       95 

III.  —  Tout  aspirant  accusé  publiquement  en  justice 
d'adhérer  à  des  opinions  contraires  à  la  vraie  doctrine  apos- 
tolique, ou  chargé  de  vices  honteux  et  de  crimes  contre  na- 
ture, est  exclu  de  Tordre  par  une  seule  balle  noire. 

IV.  —  Si  quelqu'un,  après  qu'on  a  ballotté  en  sa  faveur, 
laisse  écouler  trois  ans  sans  demander  sa  réception,  on  doit 
effacer  son  nom  et  il  faut  qu'il  s'annonce  de  nouveau  pour 
obtenir  le  ballottage. 

V.  —  Le  fils  d'un  f.\-m.'.  a  le  droit  d'être  reçupréféra- 
blement  à  des  princes  et  à  des  rois  et  d'obtenir  par  consé- 
quent avant  eux  le  ballottage,  bien  entendu  s'il  est  doué  des 
qualités  requises  à  tout  frère  de  l'ordre. 

VI.  —  Un  étranger  peut  obtenir  leballottage  dans  savingt- 
quatrième  année,  et  le  fils  d'un  f. '.-m.',  dans  sa  vingt  et 
unième  ;  on  peut  même,  si  sa  conduite  est  décente  et  d'un 
homme  fait,  fixer  un  terme  à  vingt  et  un  pour  le  premier  et 
à  dix-huit  pour  le  dernier  ;  mais  jamais  au-dessous,  et  Ton 
ne  doit  avoir  que  fort  rarement  une  telle  condescendance. 

VII.  —  Un  frère  ne  doit  jamais  proposer  quelqu'un  pour 
frère  servant,  à  moins  que  celui-ci  n'ait  été  pour  le  moins 
trois  ans  à  son  service,  de  façon  qu'il  soit  bien  assuré  de  sa 
capacité  et  qu'il  puisse  en  conséquence  après  le  ballottage 
être  son  premier  parrain. 

VIII.  —  Après  avoir  ballotté  pour  un  étranger  et  lorsque 
la  réception  s'est  trouvée  en  sa  faveur,  on  nomme  trois 
parrains,  entre  lesquels  celui  qui  Ta  proposé  doit  toujours 
être  le  premier. 

IX. —  Tous  les  frères  f.'. -m.',  en  général  peuvent  pro- 
poser des  étrangers  aspirants,  pourvu  néanmoins  que  celui 
qui  propose  soit  en  état  de  s'acquitter  des  fonctions  de 
premier  parrain  et  qu'il  ait  assez  de  capacité  et  des  lumières 
suffisantes  pour  instruire  de  ses  devoirs  et  de  ses  obliga- 
tions celui  qui  doit  être  reçu  ;  c'est  ici  qu'un  frère  encore 
novice  doit  prendre  garde  de  ne  pas  user  de  son  droit  avant 
qu'il  se  soit  bien  mis  au  fait  de  toutes  les  parties  relatives 
aux  instituts  et  travaux  de  notre  ordre. 

X.  —  Quand  toutes  les  voix  ont  été  reconnues  favorables, 


96  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

c'est-à-dire  que  tous  les  cailloux  se  trouvent  blancs,  on 
félicite  alors,  selon  la  forme  ordinaire,  celui  en  faveur  du- 
quel le  ballottage  s'est  fait,  en  s'adressant  pour  cela  à  celui 
qui  l'a  proposé. 

XI.  —  Lorsqu'il  se  trouve  une  seule  balle  noire,  le 
G.*.  M.*,  déclare  que  la  réception  aura  lieu  sans  qu'il  soit 
nécessaire  de  s'informer  qui  est  le  frère  qui  a  mis  la  balle 
noire. 

XII.  —  Deux  balles  noires  n'empêchent  pas  que  la  récep- 
tion ne  soit  également  déclarée  bonne  ;  il  faut  seulement 
alors  que  la  loge  en  reconnaisse  une,  et  le  G.*.  M.',  selon  son 
droit,  l'autre  pour  bonne  ;  dans  ce  cas  on  ne  demande  pas 
de  savoir  pourquoi  on  a  mis  les  balles  noires. 

XIII.  —  Trouve-t-on  trois  balles  noires,  la  réception  est 
remise  jusqu'à  la  première  assemblée,  afin  que,  dans  cet 
intervalle,  ceux  qui  ont  mis  les  balles  noires  puissent  allé- 
guer au  G.'.  M*,  les  motifs  qui  les  y  ont  déterminés.  Celui- 
ci  indique  ensuite  à  la  loge  le  jour  qu'elle  doit  s'assembler 
de  nouveau. 

XIV.  —  Dans  le  cas  de  4  ou  5  balles  noires,  la  réception 
est  retardée  de  six  semaines,  si  avant  la  première  assemblée 
on  déclare  au  G.'.  M.',  les  raisons  qui  les  ont  fait  mettre. 

XV.  — Lorsqu'il  se  trouve  6  ou  7  balles  noires  et  que 
l'on  indique  les  motifs  avant  le  premier  jour  de  loge,  la 
réception  est  renvoyée  à  trois  mois . 

XVI.  —  Y  a  t-il  plus  de  7  balles  noires  et  se  trouve-t-il 
sept  frères  qui  en  donnent  des  raisons  valables,  alors  l'as- 
pirant est  exclu  pour  toujours,  ce  dont  alors  on  fait  part  à 
toutes  les  loges. 

XVII.  —  Quand  il  y  a  plus  de  7  balles  noires,  mais  que 
sept  frères  n'allèguent  aucun  motif  pourquoi  on  les  y  a  mises 
et  que  d'ailleurs  ces  balles  n'excèdent  pas  le  tiers  des  frères 
qui  sont  présents,  alors  la  réception  peut  néanmoins  être 
déclarée  favorable  après  trois  mois. 

XVIII.  —  Si  aucun  des  frères  qui  ont  mis  les  balles 
noires  ne   s'annonce  dans  le  terme   prescrit  et  suivant  le 


l'organisation  primitive  ;   SON  ÉVOLUTION       97 

nombre  que  les  §  13,  14,  15,  16  et  17  déterminent,  la  loge 
déclare  alors  la  réception  pour  bonne,  pourvu  néanmoins 
que  le  nombre  des  balles  noires  n'excède  pas  le  tiers  des 
frères  présents  dans  la  loge . 

XIX.  Nul  G.*.  M.*,  n'ose,  sans  manquera  sa  foi  et  à  sa  fidé- 
lité de  f.\-m.\,  nommer  un  frère  qui  a  mis  une  balle  noire, 
si  celui-ci  ne  le  souhaite  lui-même  dans  la  loge,  et  cela, 
sous  peine  de  perdre  sa  place  de  G.'.  M.',  et  d'être  exclu 
pour  trois  ans  des  loges  de  f.'.-m.*. 

XX.  —  On  ne  refuse  jamais  le  ballottage  à  un  étranger  as- 
pirant, à  moins  qu'il  n'ait  été  déjà  annoncé  dans  une  autre 
loge  et  qu'il  en  soit  protégé  ;  c'est  pourquoi  les  secrétaires 
des  loges  doivent  s'informer  mutuellement  des  ballottages  ; 
mais  si,  par  erreur,  on  avait  ballotté  en  deux  endroits  diffé- 
rents, alors  la  loge  qui  la  première  a  accordé  le  scrutin  à 
un  aspirant,  a  exclusivement  le  droit  de  le  recevoir. 

XXI.  —  Si,  par  méprise,  on  avait  mis  une  ou  plusieurs 
balles  noires,  les  frères  qui  se  sont  trompés  peuvent,  après 
une  permission  préalable,  le  dire  et  déclarer  alors  ainsi  leur 
balle  blanche. 

XXII.  —  Le  G.'.  M.'.,  avec  ses  six  officiers,  ont  droit  de 
renvoyer  le  ballottage  de  quelqu'un  à  un  autre  temps,  afin 
de  ne  pas  l'exposer,  lorsqu'ils  peuvent  prévoir  que  les  voix 
ne  seraient  pas  favorables. 


Il  faut  le  reconnaître,  tous  ces  statuts,  devoirs, 
règlements,  sont  rédigés  avec  le  plus  grand  soin,  étu- 
diés avec  la  plus  profonde  habileté,  pour  assurer  la 
continuité  de  l'Ordre,  son  expansion,  sa  régularité  et  la 
conservation  de  son  secret  des  premiers  jours.  Alors 
que  le  but  dissimulé  était  d'étudier,  en  dehors  de  toute 
confession  régulière,  les  rapports  de  l'homme  avec  la 
création,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  cette  question 
devint  secondaire,  épuisée,  lorsque  la  maçonnerie  en 

LA  FRANC   MAÇONNERIE.    —  T.     I.  7 


98  LA   FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

arriva  au  panthéisme  et  au  naturalisme  ;  mais  les  prin- 
cipes qui  avaient  présidé  à  son  organisation  maté- 
rielle se  développèrent  rapidement  et  prirent,  à  l'insu 
même  des  maçons,  une  importance  prépondérante  ; 
avant  même  que  l'idée  de  Dieu  ait  été  bannie  de  leurs 
doctrines,  les  idées  d'égalité  sociale  imprégnèrent  leurs 
mentalités,  à  tel  point  qu'elles  se  manifestèrent  avant 
leurs  idées  antireligieuses ,  qui  triomphèrent  à  leur 
tour,  non  pas  comme  unique  but  de  la  maçonnerie, 
mais  comme  conséquence  de  l'application  de  leurs 
théories  d'égalité  à  l'au-delà,  après  les  avoir  appli- 
quées dans  la  vie  sociale  et  politique  ;  non  seulement 
ils  s'imprégnèrent,  mais  encore  ils  rirent  adopter  leurs 
doctrines  à  la  France  et  à  l'Europe  entière,  à  ce  point 
que,  de  nos  jours,  il  faut  n'avoir  aucune  aspiration 
politique  en  vue  pour  oser  attaquer  de  front  ce  qu'on 
est  convenu,  bien  à  tort,  d'appeler  le  secret  de  la 
f.\ -m.'., devenu  la  raison  d'être  des  sociétés  nouvelles. 
Comment  cette  idée  d'égalité  se  développa-t-elle  au 
point  de  devenir  le  fondement  essentiel  de  la  doctrine 
maçonnique?  Cette  évolution  peut  s'expliquer  par 
l'habitude  et  l'abus  constant,  ainsi  que  par  les  dis- 
cussions continuelles  dont  l'application  de  ces  prin- 
cipes d'égalité  fut  le  prétexte  lorsqu'on  introduisit, 
pour  des  besoins  financiers  ou  pour  la  propagande,  des 
nouveaux  adeptes  recrutés  dans  un  monde  de  gens 
d'intelligence  et  d'éducation  plus  vulgaires  que  les 
maçons  primitifs.  Les  plus  humbles  tenaient  avec 
férocité  à  être  traités  sur  le  même  pied  que  les  hommes 
de  plus  haut  rang  par  la  naissance,  par  le  savoir  ou 
par  la  fortune.  Les  luttes  de  loge  à  loge  pour  avoir 
la  préséance  en  raison  de  leur  ancienneté  n'y  furent 
pas  non  plus  étrangères.  Ne  suffît-il  pas  aussi  qu'une 
idée    flatte    les  mauvais    instincts    de    l'homme,    sou 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution       99 

orgueil,  son  envie  ou  sa  haine  pourqu'elle  soit  accueillie 
avec  faveur? 

Les  mots  de  liberté,  égalité,  fraternité  sont  bien  en 
eiïet  des  étiquettes  maçonniques.  Ce  sont  bien  les 
vertus  que  les  maçons  doivent  pratiquer  entre  eux, 
mais  entre  eux  seulement. 

Le  profane,  en  effet,  celui  qui  est  dans  les  ténèbres, 
fait  partie  dune  humanité  différente  du  monde  ma- 
çonnique ;  lui  n'est  pas  un  égal  ;  c'est  à  peine  si  le 
maçon  le  considère  comme  une  plante  de  la  vaste  pépi- 
nière dans  laquelle  il  sélectionne  ses  rejetons  ;  mais, 
afin  de  déterminer  les  vocations,  il  contamine  la  pépi- 
nière entière,  en  la  développant  en  vue  des  doctrines 
qui  doivent  dominer  en  lui  ;  en  faisant  naître  chez  le 
profane  des  doutes  au  sujet  de  ses  croyances  reli- 
gieuses, il  le  conduit  ainsi  à   la  religion  maçonnique. 

Le  maçon  est  organisé  pour  agir,  le  profane  ne  l'est 
pas  ;  le  premier,  quoique  insignifiant  comme  nombre, 
doit  triompher  du  second  !  C'est  fatal.  Tous  les  initiés 
concourent  au  même  but,  les  autres  suivent  des  voies 
différentes  et  sont  isolées  ;  autre  source  de  succès  pour 
l'Ordre. 

Mais  aussi  combien  parfaite  est  son  organisation  ! 
Avec  quel  soin  jaloux  tous  les  éléments  de  discorde 
ont  été  prévus  ;  avec  quelle  habileté  ils  sont  paralysés  ! 
Quelle  connaissance  du  cœur  humain,  de  ses  faiblesses 
et  de  ses  vices  !  Combien  les  profanes  devraient  lire  et 
méditer  l'organisation  matérielle  delà  maçonnerie  !  C'est 
sa  seule  force  et  c'est  ce  qu'on  peut  appeler  son  secret. 
Aussi  quel  travail  ont  accompli  les  fils  d'Hiram  depuis 
deux  siècles  qu'ils  sont  fortement  organisés  !  Pendant 
que  leurs  adversaires  effarés  s'attardent  à  se  moquer 
de  leurs  outils,  de  leurs  atours,  de  leurs  cérémonies 
initiatiques,  qui    ne  sont  que  la    parade   du  mystère 


m&LIQTHECA 


100  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

social  qui  se  joue  derrière  leurs  tréteaux,  pendant  qu'ils 
s'épuisent  à  la  recherche  d'un  secret  qu'ils  ne  peuvent 
imaginer,  le  maçon  construit  son  Temple  ;  au  moindre 
danger  il  interrompt  ses  travaux,  il  disparaît  ;  on  le 
croit  dompté,  il  s'organise  pour  un  nouveau  combat  ; 
on  le  croit  mort,  il  sommeille.  Le  maçon  a  tout  prévu, 
tout,  sauf  le  Dieu  créateur,  sauf  le  grain  de  sable  lancé 
par  la  Providence,  a  Lomé  de  l'univers,  plus  puissant 
que  l'humanité.  Aussi,  comme  il  le  craint  ce  Dieu  de 
miséricorde  et  de  justice,  comme  il  l'attaque  !  Seul 
obstacle  à  son  triomphe  final  et  définitif,  il  ne  faut 
pas  que  ce  Dieu  soit  ;  c'est  avec  rage  qu'il  nie  son  exis- 
tence. Sous  sa  férule  impitoyable,  comme  l'humanité 
qui  croyait  a  été  précipitée  dans  le  Temple  du  Néant  ! 

Nassistons-nous  pas,  en  réalité  et  non  au  figuré,  à 
la  réalisation  du  rêve  de  Thomas  Morus  ?  A  côté  des 
théories  philosophiques  modernes,  celles  des  kabbalis- 
tes,  des  théosophes,  des  cacomages,  ne  sont-elles  pa6 
plus  voisines  de  celles  des  Pères  de  l'Eglise,  que  celles 
de  ceux  qui,  sous  prétexte  de  sagesse  pratique,  se 
posent  en  défenseurs  du  rationalisme  ou  du  natura- 
lisme pur?  Tout  en  invoquant  la  possibilité  d'avoir 
une  solution  dans  le  sens  chrétien  et  même  catholique, 
certaines  doctrines  modernistes  sont-elles  moins  dange- 
reuses que  celles  de  Saint-Martin,  de  Swedenborg  ou 
de  Willermoz  ? 

Sont-elles  moins  dangereuses  surtout  que  celles  que 
préconisent  les  plus  modérés  d'entre  les  f.\-m.\  de  la 
fin  du  xixe  siècle,  ignorants  peut-être  de  certaines 
choses  de  leur  art,  mais  d'une  mentalité  suffisamment 
maçonnique  pour  ne  pas  être  en  contradiction  avec  les 
doctrines  de  leur  ordre,  parmi  lequel  ils  ont  des  adeptes 
complètement  convaincus  ? 

Nous   voulons     parler    des  ff.\  Findel,     Ragon  et 


L'ORGANISATION   PRIMITIVE    ;    SON    ÉVOLUTION      101 

Jouausl,  qui  passent  dans  le  monde  du  Grand  Orient 
pour  les  seuls  véritables  auteurs  maçonniques,  et  des 
ff.\  Daruty  et  Oswald  Wirth,  qui  ont  le  même  crédit 
auprès  des  loges  écossaises. 

Voyons  ce  que  disent  les  uns  et  les    autres. 


Findel  (1)  se  fait  l'écho  d'un  autre  écrivain  maçon- 
nique dont  il  adopte  les  définitions.  A  certains  égards, 
c'est  du  Raymond  Lulle  et  du  Paracelse. 

D'après  Seydel,  dit-il,  la  maçonnerie,  en  tant  que  dis- 
position de  lame,  peut  être  assimilée  au  sentiment 
religieux  ;  la  dévotion,  la  ferveur  dans  la  prière,  est  une 
disposition  toute  maçonnique.  La  prière  est  l'acte  du 
renoncement,  de  l'abandon,  de  l'abnégation  complète 
de  soi  en  présence  du  Dieu  saint  et  éternel. 

Dans  l'àme  humaine  il  y  a  deux  tendances  qui  se 
combattent  ou  se  concilient  :  le  sentiment  de  la  person- 
nalité ou  égoïsme  et  le  sentiment  idéal  ou  religieux. 

Or,  le  sentiment  religieux  est  hors  de  soi,  car  ce  qui 
constitue  le  bien  est  la  négation  du  moi  devant  une 
puissance  idéale  que  la  religion  appelle  Dieu,  et  le  mal 
consiste  dans  l'empire  absolu  du  moi  :  «  La  f.\-m.\  est 
donc  cette  disposition  de  l'âme  pour  laquelle  la  tendance 
idéale,  ou  vers  le  bien,  domine  sur  le  penchant  contraire, 
et  cette  domination  de  la  tendance  idéale,  obtenue  à  un 
degré  quelconque,  est  la  seule  condition  nécessaire 
pour  faire  partie  de  la  f.\-m.\  » 

La  société  maçonnique  n'est  pas  la  réalisation  d'un, 
plan  déterminé,  c'est  une  institution  en  voie  de  dévelop- 
pement et  d'extension. 

(1)  Histoire  de  la  F.'.-M.\,  I,  p.  13  et  suiv. 


102  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

L'idéal  poursuivi,  c'est  la  situation  par  laquelle  la 
volonté  de  Dieu  est  devenue  la  volonté  de  tous.  Comme 
la  f.\-m.\  travaille  à  faire  de  ses  adeptes  des  hommes 
de  bien,  elle  les  forme  également  et  nécessairement  à 
devenir  des  membres  fervents  de  leurs  religions  res- 
pectives. Il  proteste  donc  contre  le  reproche  fait  à  la 
f.\-m.\  de  favoriser  Tin  différence  en  matière  de  reli- 
gion. 

Et  il  explique  que  les  loges  régulièrementconstituées 
portent  le  nom  de  loges  de  Saint-Jean,  parce  qu'elles 
honorent  le  saint  précurseur  comme  leur  patron  dans 
les  trois  grades  d'élèves,  d'ouvriers  et  de  maîtres. 

Les  principaux  emblèmes  de  la  f.\-m.\  sont  ceux 
de  la  profession  de  véritables  maçons,  dont  le  but  est  de 
construire  le  temple  de  Salomon  ;  chaque  maçon  doit 
tendre  vers  la  lumière,  la  vérité  et  la  vertu  ;  d'autres 
emblèmes  sont  tirés  de  la  Bible,  des  mystères  anciens 
et  des  écrits  des  Rose-Croix. 


Dans  les  œuvres  du  frère  Ragon  (1),  la  f.\-m.\  a 
pour  caractère  fondamental  l'universalité.  Ce  caractère 
est  indispensable  à  son  essence.  Elle  est  une,  et  tout 
rite  ou  toute  nation  qui  s'écarte  de  ce  principe  s'égare 
et  sort  de  la  voie  maçonnique. 

On  a  dit  :  la  fraternité  universelle  engendrera  l'unité. 
Qu'est-ce  réellement  que  la  fraternité  universelle,  si 
ce  n'est  la  maçonnerie,  dont  les  membres  épars  chez 
tous  les  peuples  du  globe  tendent  à  n'en  faire  un  jour 
qu'une  seule  famille  de  frères,  pour  arriver  à  l'unité 
de  l'humanité  ? 

(1)  Orthodoxie  maçonnique,    p.  354,    463    et    suiv. 


l'organisation  primitive  ;  son  évolution     103 

Ragon  souhaite  que  la  maçonnerie  n'ait  qu'un  centre 
unique  d'où  elle  rayonnera  sur  toutes  les  nations,  afin 
de  pouvoir  créer  l'unité  nominale. 

Ragon  est  un  panthéiste,  très  voisin  du  matéria- 
lisme. Selon  lui,  le  soleil  est  l'auteur  de  la  substance 
universelle,  et  cependant  il  n'est  point  Dieu  ;  serait-il  la 
résidence  d'où  Dieu  anime  l'univers  ?  Dieu  est  tout  et 
tout  est  Dieu,  ou  tous  dans  un  et    un  dans    tous. 

Dieu  ne  pouvant  faire  le  néant,  ni  cesser  d'être, 
deux  barrières  sont  élevées  contre  sa  toute-puissance. 
L'homme  peut,  en  quelque  sorte,  franchir  cette  der- 
nière, car  il  peut  se  détruire,  cesser  d'être  homme; 
il  devient  quelque  chose,    mais  il  n'est    plus  homme. 

Le  néant  ne  peut  donc  avoir  lieu  tant  que  Dieu  sera. 
Dieu  ne  peut  le  faire.  Le  néant  limiterait  son  infini, 
Dieu  deviendrait  fini  ;  il  ne  serait  plus  Dieu,  ce  qui  ne 
peut  pas  être  ;  car  rien,  dans  l'univers,  ne  se  renouvel- 
lerait plus. 

Donc,  Dieu  ne  peut  faire  ni  souffrir  le  néant,  parce 
que  Dieu  ne  peut  cesser  d'être.  Il  est  tout  :  il  est  la  toute- 
puissance,  l'intelligence  universelle,  qui  crée,  anime 
tout.  L'univers  visible,  dont  il  est  le  génie  conducteur 
et  conservateur,  est  Dieu  manifesté. 

Puis  sans  se  proclamer  matérialiste,  Ragon  prend  la 
défense  de  cette  doctrine  qu'on  ne  peut  confondre,  dit-il, 
avec  l'athéisme  qui  n'existe  pas.  La  seule  division  qui 
existe,  parmi  les  hommes  de  bonne  foi,  est  dans  la 
question  de  savoir  si  la  cause  de  toute  existence  est 
spirituelle  ou  matérielle,  c'est-à-dire  isolée  ou  dépen- 
dante delà  matière,  ou  bien  inhérente  à  la  matière  et  en 
faisant  partie  intégrante. 


104  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Pour  le  f.\  Jouaust  (1),  la  f.\-m.\  a  pour  but  l'amé- 
lioration morale  et  matérielle  de  l'homme,  pour  principe 
la  loi  du  progrès  de  l'humanité,  les  idées  philosophiques 
de  tolérance,  de  fraternité,  d'égalité,  de  liberté,  abstrac- 
tion faite  de  la  loi  religieuse,  des  nationalités  et  des  dis- 
tinctions sociales.  Ce  n'est  pas  une  société  secrète, 
parce  que  dans  les  pays  où  elle  n'est  pas  persécutée 
«  elle  publie,  dit-il,  ses  lois,  règlements,  tendances  et 
travaux...,  la  liste  de  ses  membres,  leurs  lieux  et  dates 
de  réunions  »,  et  il  adopte  les  conclusions  de  la  cons- 
titution de  la  G.*.  L.\  de  Hambourg,  en  reconnaissant 
que  «  les  symboles  et  leur  explication  pour  atteindre  le 
but  proposé  sont  les  seuls  secrets  de  la  f.\-m.*.  » 


Le  f.\  Emile  Daruty  est  certainement,  de  tous  les 
écrivains  maçonniques  contemporains,  celui  qui  a  fait 
l'œuvre  la  plus  documentée  sur  l'histoire  de  son 
Ordre  (2)  ;  son  livre,  malheureusement  incomplet,  est 
écrit  de  bonne  foi,  et  si  Ton  ne  peut  le  suivre  dans  ses 
querelles  avec  le  Grand  Orient  de  France,  car  c'est 
un  fervent  adepte  du  rite  écossais,  les  documents  qu'il 
reproduit  sont  loyalement  présentés  et  peuvent  être  uti- 
lisés avec  sécurité  par  tous  les  historiens. 

La  f.\ -m.*.,  selon  Daruty,  est  une  alliance  humani- 
taire, philanthropique  et  progressive,  qui  a  pour  bases 
et  pour  principes  l'amour  de  la  vérité  et  de  la  justice, 
la  loi  du  progrès  de  l'humanité  et  les  idées  philoso- 
phiques de  liberté,  d'égalité,  de  fraternité,  de  respect 
et  de  solidarité...  elle  a  pour  objet  l'exercice  de  la  bien- 
faisance, la  recherche  de  la  vérité,   l'étude  de  la  morale 

(1)  Hist.  du  Grand-Orient,  p.  5  et  suiv. 

(2)  Recherches  sur  le  rite  écossais  ancien  accepte. 


l'organisation  primitive  ;  SON  ÉVOLUTION     105 

universelle,  des  sciences  et  des  arts,  et  pour  but,  par 
l'instruction  qu'elle  recommande  à  ses  adeptes  d'acqué- 
rir et  de  propager,  la  vulgarisation  du  vrai,  du  beau  et 
du  bien,  et,  par  suite,  l'amélioration  intellectuelle  et 
morale  de  l'homme  et  de  la  société.  Elle  considère  la 
liberté  de  conscience  comme  un  droit  absolu,  propre  à 
chaque  individu...  elle  fait  abstraction  de  la  foi  reli- 
gieuse ou  politique  des  membres,  de  leurs  nationa- 
lités et  des  distinctions  sociales,  elle  interdit  toutes  dé- 
libérations concernant  des  matières  politiques  et  reli- 
gieuses. Aussi  quoiqu'elle  proclame,  sous  le  nom  de 
«  Grand  Architecte  de  l'univers  »,  la  reconnaissance 
d'un  principe  originaire,  laisse-t-elle  à  chacun,  sur  la 
nature  même  de  ce  principe,  ses  vues  particulières  et 
s'abstient-elle  de  tout  acte  confessionnel  (1). 


Nous  terminerons  ces  énoncés  de  doctrines  maçon- 
niques par  celles  de  M.  Oswald  Wirth  (2),  un  des  ma- 
çons écossais  les  plus  intéressants  de  notre  époque  ; 
il  connaît  son  art,  il  est  partisan  des  traditions  et  les 
a  étudiées,  et,  ce  qui  est  plus  rare,  il  les  divulgue 
sans  crainte  de  s'attirer  ainsi  les  foudres  du  Grand 
Orient  (3).  Il  n'a  pas  fait  acte  de  trahison  ;  mais,  ce  qui 
est  plus  grave,  il  a  parlé  en  enfant  terrible,  faisant  re- 
marquer qu'il  pouvait  parler  après  Ragon  et  Glavel.  Il 

(1)  On  sait  que  depuis  plusieurs  années  le  G.".  0.'.  a  supprimé 
le  G*.  A.'.  del'Univ.  de  ses  rituels.  Quant  à  la  politique,  c'est  la 
préoccupation  constante  de  ses  tenues. 

(2)  Le  livre  de  l'apprenti. 

Si  Rapport  confidentiel  au  grand  collège  des  rites  {novembre 
1895)  parle  f.  *.  Amiable.  Dans  ce  rapport,  M.  O.Wild  est  malmené 
de  la  façon  la  plus  discourtoise  en  même  temps  qu'un  autre  f.*. 
d'Orléans,  le  f.'.  Doinel. 


106  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

a  donc  dit  ce  qu'il  savait.  Comme  M.  0.  Wirth  est 
le  descendant  des  alchimistes  et  des  kabbalistes,  il 
nous  montre  le  lien  qui  les  rattache  aux  f.\-m.\  du 
xvin*  siècle  et  à  ceux  des  FF.',  nos  contemporains 
qui  ont  conservé  les  traditions. 

Les  auteurs,  dit-il,  qui  ont  étudié  la  f.\-m.\  dans 
son  ésotérisme,  c'est-à-dire  dans  son  enseignement  caché, 
ont  beaucoup  insisté  sur  l'importance  de  la  question 
que  le  vénérable  dune  loge  pose  au  visiteur  :  D'où  ve- 
nez-vous ? 

Elle  doit  être  prise  par  le  penseur  dans  son  sens  le 
plus  élevé  et  conduire  ainsi  au  problème  de  l'origine 
des  choses.  L'apprenti  doit  chercher  d'où  nous  ve- 
nons, le  compagnon  ce  que  nous  sommes,  et  le  maître 
où  nous  allons.  Ces  trois  questions  formulent  l'éternelle 
énigme  que  toute  science  et  toute  philosophie  tendent 
continuellement  à  résoudre. 

En  toute  association  il  faut,  dit-il  plus  loin,  distin- 
guer l'idée  de  la  forme  :  l'idée  ou  l'esprit  agit  en  tant 
que  générateur  abstrait  ;  c'est  le  père  de  la  collectivité, 
dont  la  mère  est  représentée  par  le  principe  plastique 
qui  lui  donne  sa  forme.  Ces  deux  éléments  de  généra- 
tion et  d'organisation  sont  représentés  en  maçonnerie 
par  deux  colonnes,  dont  la  première  (masculine  active) 
fait  allusion  à  ce  qui  établit  et  fonde,  tandis  que  la  se- 
conde (féminine  passive)  se  rapporte  à  ce  qui  consolide 
et  maintient. 

C'est  dans  ce  but  que  la  f.\-m.\  est  l'alliance  uni- 
verselle de  tous  les  hommes  de  cœur  qui  éprouvent  le 
besoin  de  s'unir  pour  travailler  en  commun  au  perfec- 
tionnement intellectuel  et  moral  de  l'humanité.  M.  0. 
Wirth  développe  ensuite  le  but  de  laf.\-m.\  en  déve- 
loppant à  peu  près  les  mêmes  idées  que  le  f.\  Jouaust. 

Puis,  dans   l'explication  des   phases   de   l'initiation, 


l'organisation  primitive  ;   son  évolution     107 

M.  0.  Wirth  nous  fait  voir  comment  la  f.\-m.\  est 
encore  demeurée  en  contact  avec  les  idées  des  anciens 
alchimistes,  en  plaçant  le  récipiendaire  entre  deux  vases 
contenant  l'un  du  sel  et  l'autre  du  soufre. 

Le  soufre  correspond  à  l'énergie  expansive  qui  part 
du  centre  de  tout  être  (colonne  J)  ;  son  action  s'oppose 
à  celle  du  mercure  qui  pénètre  toutes  choses  par  une 
influence  venant  de  l'extérieur  (colonne  B).  Ces  deux 
forces  antagonistes  s'équilibrent  par  le  sel,  principe 
de  cristallisation,  qui  représente  la  partie  stable  de 
l'être. 

Lorsqu'on  demande,  dans  la  chambre  de  réflexion, 
au  récipiendaire  quels  sont  ses  devoirs  envers  Dieu, 
envers  lui-même  et  envers  ses  semblables,  voici  ce 
que  M.  0.  Wirth  répond  : 

Cette  division  ternaire  de  toutes  nos  obligations  mo- 
rales est  basée  sur  les  trois  principes  alchimiques. 

Dieu  est  ici  l'idéal  que  l'homme  porte  en  lui-même  ; 
c'est  la  conception  qu'il  peut  avoir  du  vrai,  du  juste  et 
du  beau,  c'est  le  guide  suprême  de  ses  actions,  l'archi- 
tecte qui  préside  à  la  construction  de  son  être  moral  (il 
ne  s'agit  point  là  de  l'idole  monstrueuse  que  la  supers- 
tition se  forge  sur  le  modèle  des  despotes  terrestres).  La 
Divinité  est  représentée  par  l'homme,  par  ce  qu'il  y  a 
en  lui  de  plus  noble,  de  plus  généreux  et  de  plus  pur. 
Nous  portons  en  nous  un  Dieu  qui  est  notre  principe 
pensant.  De  lui  émanent  la  raison  et  l'intelligence, 
choses  intérieures,  que  les  hermétistes  rapportaient  au 
soufre.  (Le  soleil  occulte  qui  brille  dans  le  séjour  des 
morts  ;  Osiris  ;  Sérapis  ;  Pluton  ;  la  colonne  J,  centre 
d'initiative  et  d'action  expansive.)  Les  devoirs  envers 
soi-même  sont  relatifs  au  sel,  essence  de  la  person- 
nalité, et  les  devoirs  envers  ses  semblables  au  mer- 
cure,   qui     figure    l'influence    pénétrante    du    milieu 


108  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ambiant.  Or,  tout  est  nécessairement  compris  dans 
la  réunion  du  contenu  (soufre),  du  contenant  (sel)  et 
de  l'ambiance  (mercure). 

Sous  des  formules  plus  techniques,  d'apparences  plus 
scientifiques,  on  le  voit,  il  est  encore  parmi  les  maçons 
des  adeptes  zélés  qui  remontent  à  l'alchimie  et  à  la 
kabbale,  aux  combinaisons  de  nombres  auxquels  ils 
attribuent  des  propriétés  intrinsèques  ;  les  maçons 
spéculatifs  se  complaisent  encore  dans  la  science  de 
ce  qui  n'est  pas  visible,  science  qui  ne  se  révèle  qu'à 
celui  qui  sait  regarder  au  dedans  de  soi,  science  de  la 
vérité  intégrale  aussi  certaine  que  les  mathématiques. 

Ceux  qui  voudront  étudier  les  arcanes  de  l'hermé- 
tisme et  les  propriétés  des  nombres  depuis  l'unitéjus- 
qu'au  quaternaire  pourront  lire  avec  intérêt  le  Livre 
de  l'apprenti  aussi  bien  que  la  Médecine  philosophale 
de  M.  0.  Wirth.  Cette  lecture  sera  d'autant  plus  utile 
à  la  compréhension  de  l'ésotérisme  maçonnique  que 
si  l'auteur  a  des  hypothèses  que  nous  ne  croyons  pas 
exactes  et  que,  de  plus,  nous  estimons  dangereuses  à 
agiter  pour  la  pauvre  cervelle  humaine,  a  utilisé  dans 
sa  discussion  l'a  fait  avec  compétence  et  sincérité. 


CHAPITRE  IV 

CHARLES    RADCLYFFE,  COMTE    DE    DERWENTWATER; 
LE   PRÉTENDANT   CHARLES    EDOUARD 


Les  ancêtres.  —  Les  deux  frères.  —  Les  premières  loges  en 
France.  —  Le  Grand  Maître.  —  Charles -Edouard  Stuart.  — 
Culloden.  —  Le  chapitre  d'Arras.  —  Vincennes.  —  La  fin  d'une 
race.  —  Les  persécuteurs  et  les  martyrs.  —  L'échafaud  de 
Tower-Hill.  —  Les  descendants. 


Tous  les  historiens  qui  ont  étudié  les  origines  de  la 
f.'.-m.*.  française,  à  quelque  parti  qu'ils  appartien- 
nent, désignent  Charles  Radclyffe,  lord  Derwentwater, 
comme  le  premier  grand  maître  de  la  franc-maçon- 
nerie française  en  1725,  et  la  plupart  lord  Harnouester 
comme  ayant  été  son  successeur  de  1732  à  1738. 

Charles  Radclyffe  fut,  en  effet,  le  premier  grand  maître 
de  la  f.\-m.'.  jacobite  en  France,  mais  il  ne  le  fut  qu'à 
partir  de  1732  ;  quant  à  lord  Harnouester,  il  n'a 
jamais  existé  (1). 

Le  premier  grand  maître  de  la  franc- maçonnerie  fran- 
çaise ne  fut  pas  lord  Derwentwater,  mais  le  duc  d'Antin 
(1738-1743). 

Pour  étudier  ce  problème  obscur  et  embrouillé  de 
l'introduction  de  la  f.\  m.*,  en  France,  nous  devrons 


(1)  M.  Teder  croit  que  lord  Harnouester  était  le  duc  de  Riche- 
mond,  parce  que  ce  petit-fils  de  la  duchesse  de  Portsmouth  aurait 
reçu  de  la  G.*.  L.\  de  Londres  une  patente  l'autorisant  à  consti- 
tuer des  Loges  en  France. 


110  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

entrer  dans  quelques  détails  sur  la  formation  des 
premières  loges  et  sur  le  rôle  considérable  joué  par 
Charles  Radclyffe  et  surtout  par  le  prétendant  Charles- 
Edouard  à  partir  de  1744. 

Cette  étude  fera  comprendre  comment,  dans  la  pre- 
mière moitié  du  xvme  siècle,  beaucoup  de  braves  gens 
entrèrent  dans  la  f.\-m.\  sans  se  douter  du  rôle 
qu'ils  seraient  appelés  à  jouer  parla  suite. 

Il  ne  sera  pas  sans  intérêt  de  faire  voir  comment 
Charles  Radclyffe  mourut  en  bon  chrétien  et  en  parfait 
royaliste  ;  il  ne  sera  pas  sans  intérêt  non  plus  de  cons- 
tater que,  par  un  singulier  concours  de  circonstances, 
celui  qui  introduisit  en  France  les  éléments  de  des- 
truction de  la  religion  et  de  la  monarchie  était,  en 
même  temps,  un  descendant  des  Stuarts  et  des  Bour- 
bons. 

Les  Radclyffe  appartenaient  à  une  des  plus  anciennes 
familles  d'Ecosse,  et  jusqu'à  l'extinction  de  leur  race 
ils  restèrent  fidèles  à  la  maison  des  Stuarts. 

Leur  fortune,  considérable  dès  le  moyen  âge,  s'était 
accrue  en  1417  des  terres  de  Derwentwater,  par  suite 
du  mariage  de  Nicolas  Radclyffe  avec  l'unique  héri- 
tière de  John  de  Derwentwater. 

Un  Francis  Radclyffe  ayant  épousé  Isabelle  Grey  fut 
créé  baronnet  le  31  janvier  1619  par  Jacques  VI  d'Ecosse 
(Jacques  1er  d'Angleterre).  Il  mourut  en  1622,  laissant 
13  enfants. 

Son  héritier  Edward  (1589-1663)  épousa  Elisabeth, 
fille  de  Thomas  Barton,  de  laquelle  il  eut  huit  filles  et 
un  fils,  Francis  (1624-1697),  qui  eut  de  Catherine,  fille 
de  William  Fenwick,  cinq  fils  et  deux  filles.  Il  avait 
été  créé  comte  par  Jacques  II,  le  7  mars  1688.  L'héri- 
tier du  nom,  Edward  (f  le  29  avril  1705),  avait  épousé, 
le  18  août  1687,   une  fille  naturelle  de  Charles  II  et  de 


CHARLES    RADCLYFFE 


111 


Mary  Davies,  actrice  célèbre,  qui  fit  partie  de  la  troupe 
de  William  d'Avenant,  directeur  du  théâtre  de  Lincoln's 
Inn  Fields  de  Londres.  Mary  chantait  et  dansait  à  la 
perfection.  La  chronique  théâtrale  anglaise  raconte 
que,  le  7  mars  1666,  elle  dansa  une  gigue  en  culotte 
d'homme,  ce  qui  était  alors  une  innovation  audacieuse, 
qu'elle  renouvela  le  5  août  1667  avec  le  plus  grand 
succès.  Par  ce  triomphe  l'artiste,  qui  était  aussi  une 
jolie  femme,  attira  l'attention  de  la  Cour  et  elle  figura 
souvent  dans  les  représentations  que  le  frère  de  Char- 
les II,  le  duc  d'York  (Jacques  II),  donnait  dans  son 
palais.  Dès  1670,  elle  était  la  maîtresse  du  roi,  et  elle 
en  eut,  le  16  octobre  1673,  une  fille,  Mary  Tudor. 
Richard  Fluknœ  fit  sur  la  mère,  en  1670,  l'épi- 
gramme  suivante  : 

Dear  miss  delight  of  ail  the  nobler  sort, 
Pride  of  the  stage,  and  Darling  of  the  Court. 
Chère  demoiselle,  délice  de  toutes  les  plus  nobles  destinées, 
Vous  êtes  l'orgueil  de  la  scène  et  la  favorite  de  la  Cour. 


Il  existe  trois  délicieux  portraits  de  Mary  Davies  : 
deux  de  Lely  et  un  de  Kneller. 

En  1706,  la  veuve  d'Edward  Radclyffe  épousa,  en 
secondes  noces,  Henry  Graham,  et  en  août  1707,  en 
troisièmes  noces,  James  Rocke.  Fidèle  aux  Stuarts, 
elle  avait  quitté  l'Angleterre  et  mourut  à  Paris  le  5  no- 
vembre 1726,  laissant  trois  enfants  de  son  premier 
mariage  :  James,  Mary  et  Charles. 

James,  né  à  Londres  le  28  juin  1689,  suivit,  avec  sa 
famille,  Jacques  II  à  Saint-Germain-en-Laye,  et  fut 
élevé  à  la  cour  que  tenait  cet  infortuné  prince,  grâce 
à  la  générosité  de  Louis  XIV.  Le  10  juillet  1712,  il 
épousa  Anna  Maria,  née  en  1693,  fille  de  sir  John  Webb 
deCauford,  baronnet,  et  de  Barbara,  fille  de  JohnBella- 
sysa,  baron  de  Worlaby.  Comme  nous  le  verrons  plus 


112  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

loin,  James  mourut  exécuté  en  1716  ;  quant  à  sa 
veuve,  elle  mourut  dans  un  couvent  de  Louvain  le 
30  août  1723,  laissant  une  fille  et  un  fils. 

La  fille,  Anna  Maria  Barbara,  née  en  1715,  épousa,  le 
2  mai  1732,  Robert  James,  VIIIe  lord  Petre,  né  en 
juin  1713  et  dont  la  descendance  est  représentée  de  nos 
jours  par  des  héritiers  directs. 

Le  fils  John,  né  en  1714,  fit  ses  études  à  l'Académie 
d'Angers  et  mourut  à  Londres,  le  31  décembre  1731,  à 
l'âge  de  17  ans,  chez  JohnWebb,  son  grand-père  mater- 
nel, Great-Marlborough  street,  des  suites  d'un  accident 
de  voiture  ;  comme  il  ne  laissait  pas  d'héritier  direct, 
ses  titres  échurent  à  son  oncle  Charles  Radclyffe,  qui 
ne  porta  donc  le  titre  de  5e  comte  de  Derwentwater 
qu'en  1732. 

Charles,  né  à  Little  Parndon  (Essex),  le  3  septembre 
1693,  passa  la  plus  grande  partie  de  son  enfance  à  la 
cour  de  Jacques  II,  à  Saint-Germain,  et  à  celle  de  Jac- 
ques III,  à  Rome.  Il  avait  beaucoup  de  goût  pour  l'étude 
et  avait  la  réputation  justifiée  d'être  un  homme  fort 
instruit.  Elevé  dans  la  religion  catholique,  il  n'aurait 
pas  échappé,  dit-on,  aux  influences  philosophiques,  et 
c'est  seulement  dans  les  dernières  années  de  sa  vie 
qu'il  serait  revenu  aux  pratiques  de  la  religion  de  son 
enfance. 

Au  point  de  vue  militaire,  il  avait  des  vertus  géné- 
reuses et  héroïques.  Son  esprit  très  alerte  et  très  fin 
n'avait  pas  nui  à  son  courage,  car  il  était  brave  jusqu'à 
la  témérité.  N'ayant  jamais  servi,  il  ne  connaissait  rien 
de  la  discipline  militaire,  mais  il  savait  utiliser  ses 
troupes  avec  beaucoup  d'à  propos  et  de  discernement. 

Esprit  curieux,  dans  ses  voyages,  il  prenait  toujours 
des  notes  sur  les  monuments,  les  faits  et  les  gens 
remarquables. 


CHARLES    RADCLYFFE  113 

En  1701,  le  Parlement  déclara  que  seuls  étaient  ac- 
cessibles au  trône  d'Angleterre  les  princes  protestants. 
C'est  pour  ces  causes  que  Georges-Louis,  électeur  de 
Hanovre,  succéda  à  la  reine  Anne,  sous  le  nom  de 
Georges  Ior.  Sa  mère,  fille  du  duc  de  Brunswick-Zell, 
était  petite-fille  de  Jacques  Ier. 

La  nation    anglaise  apprit   son  accession    au  trône 
avec  indifférence,  et   même  avec   animosité.    Dès  les 
premiers    mois    de   1715,    il  y  eut  des   soulèvements 
auxquels    les   jacobites    furent    en    partie    étrangers, 
Jacques  III  ayant  décidé  tardivement  d'intervenir.  Sa 
tentative   de  restauration  a  été  maintes  fois  racontée  ; 
son  rôle  actif  fut  du  reste  de  courte  durée.  Poursuivi 
par  le  duc  d'Argyle,  il  dut  s'embarquer  sur  un  bateau 
français  avec  le  comte  de  Mar  et   débarqua  à  Grave- 
lines,  pendant  que  ses  partisans  continuaient  une  lutte 
qui  ne  devait  prendre  fin  qu'après  la  bataille  de  Pres- 
ton(l),  le  15  novembre  1715.   Le  lendemain,  Thomas 
Pitt  écrivait  à  Robert  Pitt  :  «  J'ai  reçu  avis  hier  matin 
à  6  heures,  par  notre  frère,  de  la  reddition  des  rebelles 
au  nombre  de  4  à  5.000  à  Preston  ;  les  lords  Derwent- 
water  et  Widdrington  et  le  fils  de  Macintosch  sont  en 
otages.    Ces  nouvelles  ont  été  confirmées  à  10  heures 
par    un  express    envoyé  par    le    colonel   Nassau    au 
Roi...  (2)» 

Le  rôle  des  frères  Radclyffe  avait  été  considérable. 
L'attitude  de  Charles,  qui  n'avait  alors  que  22  ans,  fut 
héroïque  pendant  le  combat.  Il  encouragea  ses  troupes 


(1)  Il  y  eut  un  soulèvement  sans  importance  en  1718,  avec  le 
concours  de  l'Espagne.  Les  chefs  du  parti  jacobite  furent  les 
lords  Keith  et  Scaforth.  Jean  Keith,  comte  de  Kintore,  fut  élu 
G.'.  M.-,  de  la  G.'.  L.#.  d'Ecosse  le  30  novembre  1738  et  G.*. 
M.*,  de  la  G.".  L.\  d'Angleterre  le  24  décembre  1739. 

(2)  Manuscrits  Fortescue,  I,  55. 

LA    FRANC- MAÇONNERIE.    —    T.    I.  8 


114  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

jusqu'à  la  dernière  heure  ;  il  proposa  de  ne  pas  se 
rendre  et  de  faire  une  trouée  ;  mais  il  fut  obligé  de  se 
ranger  à  l'avis  de  la  majorité.  L'armée  jacobite,  à 
laquelle  on  avait  promis  la  vie  sauve,  se  rendit  au 
général  Wills. 

Néanmoins  la  répression  fut  sanglante  et  frappa  les 
plus  nobles  têtes  :  Derwentwater,  Wittresdala,  Guru- 
warth,  Winthoun,  Nairn,  Widdrington  et  Kennir. 

James  eut  la  tête  tranchée  le  24  janvier  1716,  bien 
que  des  pétitions  des  deux  chambres  l'eussent  recom- 
mandé à  la  clémence  du  roi  et  que  la  duchesse  de 
Richmond  eût  fait  des  démarches  personnelles  auprès 
du  souverain.  Le  roi  fut  inflexible;  Walpole,  du  reste, 
s'opposa  de  tout  son  pouvoir  à  ce  que  la  grâce  fût 
accordée. 

La  veille  de  sa  mort,  James  écrivit  à  son  frère  une 
superbe  lettre  d'un  grand  sentiment  religieux,  témoi- 
gnant de  son  amour  et  de  sa  fidélité  pour  les  Stuarts  (1). 

James  n'avait  demandé  à  Georges  Ier  qu'une  grâce 
qui  lui  fut  refusée  :  être  enseveli  auprès  de  ses  an- 
cêtres. Le  roi,  craignant  un  mouvement  populaire,  fit 
transporter  ses  restes  dans  le  cimetière  de  Saint-Gilles 
(Holborn)  ;  mais  s'il  faut  en  croire  une  légende,  ses  amis 
le  portèrent  secrètement  dans  le  Northumberland,  dans 
la  chapelle  de  Dilston,  à  côté  de  son  père. 

Les  ballades  écossaises  firent  souvent  allusion  à  la 
mort  du  héros  jacobite  : 

«  Albeit  that  hère  in  London  town,...  Quoique  ce 
soit  mon  destin  de  mourir  ici,  à  Londres,  Oh  !  trans- 
portez-moi au  Northumberland  pour  m'y  déposer  dans 
le  tombeau  de  mon  père  ;  là,  chantez  mon  Requiem 
solennel  sous  les  saintes  voûtes  d'Hexham,  et  que  six 

(1)  Dilston  Hall,  p.  136. 


CHARLES    RADCLYFFE  115 

jeunes  filles  du  beau  vallon  de  Tynedale  sèment  des 
fleurs  sur  ma  sépulture...  » 

Une  autre  ballade  raconte  que  «  le  jour  de  l'exécu- 
tion du  malheureux  comte,  les  fontaines  du  Northum- 
berland  répandirent  une  eau  teinte  de  sang  ;  le  blé 
porté  aux  moulins  rendit  une  farine  rougeâtre;  une 
aurore  boréale  teignit  le  ciel  de  lueurs  sinistres  et  les 
habitants  de  la  province  appelèrent  ce  météore  les 
cierges  funèbres  de  lord  Derwentwater  ». 

Roger  Metcalf,  qui  avait  été  employé  par  lady  Rad- 
clyfTe  pour  embaumer  les  restes  de  son  infortuné  neveu, 
a  rapporté  que  le  confesseur  qui  avait  assisté  James  lui 
avait  dit  que  le  comte  et  son  frère  Charles  avaient  écrit 
à  lord  Tawskind,  secrétaire  d'Etat,  pour  obtenir  de  le 
voir  une  dernière  fois,  et  que  cette  demandea  vait  été 
impitoyablement  refusée. 

Le  cœur  de  James  fut  envoyé  à  Angers,  dans  un 
couvent  de  jeunes  Anglaises,  mais,  au  moment  de  la 
Révolution  française,  il  aurait  été  transporté  dans  le 
couvent  des  Augustines  de  Paris. 

Charles  ne  passa  en  jugement  que  le  18  mai  1716  à 
Westminster.  Il  était  accusé  de  haute  trahison.  On  lui 
laissa  fort  peu  de  temps  pour  sa  défense  et  il  fut,  pres- 
que sans  débat,  déclaré  coupable.  Quelques  jours  plus 
tard,  avec  onze  autres  captifs,  il  fut  conduit  à  West- 
minster dans  six  carrosses  pour  entendre  sa  sentence  de 
mort.  Lorsque  la  voiture  dans  laquelle  il  se  trouvait 
traversa  Fleet  street,  elle  rencontra  la  cavalcade  qui 
accompagnait  dans  la  cité  le  roi  Georges  Ier,  qui  allait 
s'embarquer  pour  le  Hanovre.  La  voiture  des  prison- 
niers s'étant  arrêtée  devant  la  porte  d'un  distillateur, 
près  de  Temple  Bar,  Charles  demanda  de  l'anisette  et 
but  avec  ses  compagnons  et  le  geôlier  de  la  prison  de 
Newgate  ;  quand  il  arriva  à  la  Cour  de  l'Echiquier,  il 


116  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

était  trop  tard  pour  qu'on   pût  prononcer  le  jugement. 

Grâce  à  cet  incident  il  obtint,  ainsi  que  quelques-uns 
de  ses  compagnons,  un  sursis  jusqu'au  mois  de  juillet, 
sursis  qui  fut  encore  prolongé  jusqu'à  la  fin  de  l'année. 
Mais,  désespérant  d'obtenir  son  pardon  complet,  il  pré- 
para un  plan  d'évasion.  Le  11  décembre  1716,  il  parvint 
à  s'échapper  du  château  de  Newgate  avec  30  prison- 
niers. Peu  après,  il  put  gagner  la  France  ;  il  habita 
Paris  quelques  années,  suivant  la  fortune  et  les  dépla- 
cements du  prince  exilé  et  s'occupant  sans  relâche  de 
sa  restauration. 

Durant  tout  ce  temps,  Charles  n'avait  pour  vivre 
que  la  mince  pension  qui  lui  était  accordée  par  son 
infortuné  maître  et  quelques  secours  de  son  jeune 
neveu.  Il  remplissait  auprès  de  Jacques  III  les  fonc- 
tions presque  gratuites  de  secrétaire. 

Le  24  juin  1724,  il  épousa  à  Sainte-Marie  de  Bruxelles 
Charlotte  Mary  (1),  fille  unique  et  héritière  de  Charles 
Levingtone,  comte  de  Newburgh.  Née  en  1693,  Char- 
lotte Mary  était  du  même  âge  que  Radclyffe  ;  veuve 
depuis  le  21  février  1719,  elle  avait  épousé  en  premières 
noces,  en  décembre  1713,  Thomas  Clifîord,  dont  elle 
avait  eu  deux  filles  :  Françoise,  morte  sans  alliance 
le  7  juillet  1771  et  enterrée  à  Chudleigh  Church  ;  et 
Anne,  qui  épousa  le  comte  Mahony. 

Lorsque  Charles  Radclyffe  (2)  épousa  Charlotte 
Mary,  il  y  avait  de  nombreuses  années  qu'il  était  épris 
de  la  belle  veuve.  Il  la  demanda,  dit-on,  en  mariage 
seize  fois  sans  succès,  et,  s'il  faut  en  croire  des  tradi- 


(1)  Elle  mourut  à  Londres  le  4  août  1755.  Il  existe  un  portrait 
de  la  comtesse  de  Newburgh  en  mezzotinte  cité  par  Smith 

(2)  Charles  Radclyffe  signait  :  comte  deDarwentwater;  mais  son 
fils  et  ses  héritiers  signaient  Derwentwater,  qui  est  du  reste  la  véri- 
table orthographe  (lac  de  Derwent). 


CHAULES    RADCLYFFE  117 

tions  de  famille,  il  n'obtint  son  consentement  que  la 
dix-septième  fois  en  s'introduisant  dans  la  chambre  de 
la  comtesse  de  Newburgh  en  descendant  par  la  che- 
minée. Lord  Petre  possède  un  fort  curieux  tableau  re- 
présentant cet  incident. 

Pour  avoir  été  tardif,  le  mariage  n'en  fut  pas  moins 
fécond  et,  à  partir  de  1725,  les  enfants  se  succédèrent 
rapidement  :  James  Bartholemew  ;  James  Clément  ; 
Charles  ;    Charlotte  ;  Barbara  ;    Tomasina    et    Mary. 


La  f.\-m.\  corporative,  après  s'être  transformée 
presque  complètement  en  f.\-m.\  politique  jacobite 
en  Angleterre,  en  Ecosse  et  en  Irlande,  pendant  le 
xvne  siècle  et  les  premières  années  du  xvme  siècle, 
persista  pour  la  plus  grande  partie  jusqu'en  1717  sous 
cette  forme,  pendant  qu'une  faible  partie  en  Angleterre 
se  rangeait  sous  la  bannière  de  la  maison  de  Hanovre  en 
devenant  spéculative.  Pendant  tout  le  xvme  siècle  nous 
assistons  à  la  lutte  de  ces  deux  courants,  bien  que  la 
f.\-m.\  écossaise  soit,  depuis  la  défaite  de  Culloden, 
beaucoup  moins  importante  que  la  f.\  m.*,  purement 
spéculative. 

C'est  sous  la  forme  de  f. *.-m.\  jacobite  que  cette 
secte  fit  son  apparition  en  France  avec  les  régiments 
irlandais  et  écossais  (1). 

Comme  les  Stuarts  s'étaient  réfugiés  à  Saint  Ger- 
main-en-Laye,  il  est  probable  que  cette  ville  fut  pen- 
dant longtemps  le  centre  de  la  f.*. -m*,  jacobite,  et  tout 

(1)  D'après  Glavel  (120  et  165),  la  f.'. -m.,  aurait  été  introduite 
en  Allemagne  (Hambourg  1733)  parles  Stuarts.  Les  réfugiés  jaco- 
bites  dénués  de  ressources  se  faisaient  de  la  maç.*.  un  moyen 
d'existence. 


118  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

porte  à  croire  que  la  première  loge  battant  maillet  en 
France  fut  la  Bonne  Foi  à  l'0.\  des  gardes  écossaises 
du  roi  d'Angleterre  (régiment  de  Dillon).  Parmi  les 
membres  de  cette  loge  figurent,  entre  1700  et  1730, 
les  noms  de  Lally,  Linche,  Macdonald,  Bourke,  Mac- 
Carthy  OToolle,  Dillon,  O'Neil,  Butler,  Fitz-Gérald, 
Talbot  de  Tyrconnel,  etc.  Le  régiment  de  Walsh 
avait  aussi  une  loge  dont  je  n'ai  relevé  officiellement 
le  titre  :  la  Parfaite  Égalité,  qu'à  partir  de  1752.  On 
vit  figurer  parmi  ses  membres,  de  1700  à  1730  :  Dor- 
rington,  Lesley  comte  de  Rooth,  Nagle,  Butler, 
O'Calaghane,  Mac  Carthy,  Wyndham,  etc. 

Nous  retrouverons  la  plupart  de  ces  noms  lors  de 
l'installation  en  1726  de  la  loge  Saint-Thomas,  ainsi 
dénommée  en  souvenir  de  saint  Thomas  de  Cantor- 
bery,  le  saint  vénéré  de  l'Angleterre  des  Stuarts  (1). 

Il  est  plus  que  probable  que  Charles  Radclyffe  fut 
initié  par  Ramsay,  qui  était  son  ami  et  qu'il  rencon- 
trait journellement,  soit  à  la  cour  de  Jacques  III,  soit 
chez  le  duc  de  Bouillon.  S'il  faut  croire  la  tradition 
maçonnique,  qui  me  paraît  exacte,  Charles  Radclyffe 
aurait  été  le  fondateur  de  la  loge  Saint-Thomas.  Parmi 
les  membres  de  cette  loge,  je  n'ai  pas  trouvé  trace  de 
son  nom  et  jusqu'ici  je  ne  suis  parvenu  à  relever  positi- 
vement que  François  Heguerty  (2),  cadet  au  régiment 


(1)  Jusqu'à  nouvel  ordre,  je  crois  devoir  reléguer  au  nombre  des 
légendes  la  patente  delà  loge  de  Dunkerque,  soi-disant  installée  le 
13  octobre  1721  par  le  duc  de  Montagu.  Cette  loge  ne  fut  véritable- 
ment installée  que  le  1er  mars  1756  par  la  G.'.  L.\  de  France. 

(2)  F.  Heguerty,  cadet  le  l*r  avril  1724,  réformé  le  30  mai  1730  ; 
lieutenant  26  juin  1732  ;  lieut.-col.  le  21  mars  1747  ;  cap.  des  gre- 
nadiers le  21  mars  1751  ;  retiré  en  1757.  C'est  par  erreur  que  l'é- 
crivain maçonnique,  généralement  bien  informé,  le  F.'.  Daruty,  le 
désigne  comme  étant  né  à  l'île  Bourbon.  Daniel  Heguerty,  né  en 
effet  à  l'île  Bourbon  en  1722,  ne  pouvait  installer  une  loge  en  1726. 


*A 


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(A 

85 
O 

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120  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

de  Dillon  ;  Maclean  (1)  Drummond,  duc  de  Perth  ; 
Dillon  ;  Middleton,  comte  de  Mommouth  ;  Douglas  ; 
Sackeville  ;  O'Brien  ;  Max  Dermott  ;  comte  de  Hamil- 
ton  ;  Scheldon  ;Talbot,  duc  de  Tyrconnell;  Fitz  James; 
Hyde;Macdonald;Lally....  parmi  les  Français  je  trouve 
un  Choiseul,  probablement  Henri-Louis  de  Choi- 
seul-Meuse  (1687-1754)  ;  un  Tingry,  probablement 
Chrétien-Louis  de  Montmorency-Luxembourg  (1675- 
1746),  qui  fut  maréchal  de  France  ;  Monin  ;  Leroy  ; 
Salbray  ;  Picot  ou  Picod  ;  Drouin  ou  Dromy.  Il  est 
tellement  absurde  qu'avec  un  pareil  recrutement  on 
puisse  supposer  que  cette  loge  ait  été  installée  par  la 
grande  loge  orangiste  d'Angleterre,  que  je  ne  m'arrê- 
terai pas  un  instant  à  discuter  cette  supposition.  Pour 
les  mêmes  raisons,  je  ne  puis  admettre  que,  ni  en 
1726,  ni  plus  tard,  Charles  Radclyfîe  ait  été  désigné 
par  les  loges  orangistes  pour  remplir  les  fonctions  de 
grand  maître  de  la  franc-maçonnerie  française,  et 
comme  lord  Harnouester  est  le  même  personnage 
que  lord  Derwentwater  (2),  on  peut  affirmer  que  le 
premier  grand  maître  de  la  franc-maçonnerie  fran- 
çaise fut  le  duc  d'Antin. 

D'après  une  brochure  publiée  à  Francfort  en  1744 
et  citée  par  Gould  (III,  p.  139),  à  la  fin  de  1736  il 
n'y  aurait  eu  que  6  loges  dans  toute  la  France  et  pas 
plus  de  60  maçons.  A  cette  époque  seulement  Der- 
ventwater   avait    été    nommé  G.'.  M.*,    comme   suc- 

(1)  Maclean  est  désigné,  par  erreur,  sous  le  nom  de  Maskelyne, 
qui  est  l'orthographe  résultant  du  nom  prononcé  par  un  Anglais 
et  écrit  par  un  Français. 

(2)  Lord  Harnouester  est  le  nom  de  lord  Derwenwater  orthogra- 
phié par  un  Français.  Gomme  nous  l'avons  vu,  en  1726  Charles 
Radclyffe  ne  pouvait  porter  le  titre  de  comte  de  Derwentwater,  qui 
appartenait  à  son  neveu  John  ;  celui-ci  étant  mort  en  décembre 
1731,  Charles  Radclyffe  prit  en  1732  le  titre  de  son  neveu. 


CHAULES    RADCLYFFE  121 

cesseur  de  James  Hector  Maclean,  qui  occupait  ces 
fonctions  depuis  plusieurs  années.  Cette  hypothèse 
est  en  partie  exacte  :  Maclean  fut  simplement  maître 
d'une  loge  militaire  irlandaise  (1).  Avant  Derwentwater, 
le  besoin  d'un  G.*.  M.',  de  l'ordre  de  France  ne  se 
faisait  pas  sentir.  D'après  le  St-James  Evening  Post 
du  12  mai  1737,  il  n'y  avait  en  effet  que  cinq  loges  à 
Paris. 

Du  reste,  on  trouve  fort  peu  de  traces  du  rôle  maçon- 
nique de  Radclyffe  avant  1730  (2)  et,  à  partir  du  3  avril 
1732,  la  loge  de  Saint-Thomas,  par  suite  de  l'influence 
du  duc  de  Montaigu,  se  détacha  des  loges  jacobites. Cette 
loge  avait  eu  d'abord  son  local  chez  un  traiteur  anglais 
du  nom  de  Hure,  au  «  Louis  d'argent  ».  En  1729,  elle 
dut  céder  la  place  à  la  loge  orangiste,  qui  prit  le  nom 
de  cette  auberge,  et  dont  nous  parlerons  plus  loin.  Elle 
tint  des  séances,  jusqu'en  1735  au  moins,  soit  chez  Lan- 
delle,  rue  de  Buci,  soit  à  l'Hôtel  de  Soissons,  soit 
quai  de  la  Râpée.  Il  dut  donc  y  avoir,  pendant  un  cer- 
tain temps,  deux  loges  sous  le  titre  de  Saint-Thomas  : 
l'une  jacobite,  l'autre  orangiste. 

La  première  loge  orangiste  qui  fut  installée  en  France 
fut  la  loge  du  «  Louis  d'argent  »,  qui  figure  sous  le  nu- 
méro 90  dans  la  liste  de  Richard  Steele  (1732)  ;  l'ins- 
tallation eut  lieu  le  12  juin  1729,  rue  de  la  Boucherie, 
à  «  la  Ville  de  Tonnerre  »,  chez  Debure,  cousin  germain 


(1)  Je  n'ai  pas  trouvé  la  trace  de  James  Hector  Maclean  ;  par 
contre,  j'ai  rencontré  les  noms  de  deux  membres  de  cette  famille  : 
John  Maclean,  qui  avait  épousé  Marie  Macpherson,  et  le  chevalier 
Alexandre  Maclean,  capitaine  dans  le  régiment  de  Dorrington,  qui 
avait  épousé  Marie  Chilton. 

(2)  En  1743,  au  moment  du  décès  de  son  fils  Charles,  il  est  en- 
core à  Saint-Germain,  avec  Alexandre  de  Montgomery,  comte 
d'Eglentoun,  le  comte  de  Middleton,  Georges  Lesley  et  Alexandre 
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122  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

du  premier  vénérable  ou  mieux  maître  de  cette  loge  : 
André-François  Lebreton,  alors  âgé  de  21  ans,  étant  né 
le  21  août  1708,  et  qui  fut  le  premier  maître  de  loge  an- 
glais de  France,  ce  qui  établit  que  sa  loge  n'avait  aucun 
rapport  avec  la  loge  jacobite  de  Saint-Thomas.  En 
1740,  la  loge  du  «  Louis  d'argent  »  porte  le  n°  78  (Pike) 
et  elle  est  désignée  sous  le  nom  suggestif  de  «  King's 
Head  »,  Tête  de  Roi  ;  en  1763,  elle  porte  le  n°  49  (Cole)  ; 
elle  avait  encore  remplacé  Saint-Thomas  à  la  taverne 
de  «  la  Ville  de  Tonnerre  ».  En  1735,  elle  était  présidée 
par  Désaguliers  et  le  duc  de  Richmond  ;  en  présence 
du  comte  de  Waldegrave  (1),  ambassadeur  d'Angle- 
terre, du  président  de  Montesquieu,  du  marquis  de 
Lomuren,  de  lord  Dursley,  de  Fitz-James,  de  Knight 
père  et  fils,  de  Hickam,  etc.,  elle  initia  le  duc  de  Kings- 
ton, le  comte  de  Saint-Florentin  et  lord  Chewton,  fils 
du  comte  de  Waldegrave.  C'est  de  cette  loge  que  se 
détacha  une  loge,  une  fille  comme  on  disait  alors,  qui 
prit  le  nom  «  d'Aumont  »  lorsque  le  duc  de  ce  nom  en 
fut  nommé  vénérable  (2).  Alors  que  le  «  Louis  d'ar- 
gent »  avait  été  rayé  par  la  Grande  Loge  d'Angleterre, 
le  27  janvier  1768,  pour  avoir  négligé  de  se  conformer 
aux  règlements,  la  loge  d'Aumont  existait  encore  en 
1773  et  avait  pour  vénérable  Le  Lorrain  (3). 

Une  autre  loge  s'était  détachée,  dès  le  1er  décembre 

(1)  Le  comte  de  Waldegrave,  fils  de  lord  Henri  Waldegrave,  qui 
avait  épousé  Henriette  Fitz-James,  fille  de  Jacques  II  et  d'Arabella 
Churchill,  sœur  du  fameux  Marlborough.  Malgré  ses  attaches  jaco- 
bites,  pour  édifier  sa  fortune,  le  comte  de  Waldegrave  s'était  rallié 
à  Georges  II. 

(2)  Lors  de  l'installation  de  la  Constante  Amitié  à  l'0.\  de  Caen, 
le  13  septembre  1765,  Le  Lorrain  figure  comme  maître  de  cette 
loge  et  Moët,  un  des  fondateurs  de  l'ordre  de  la  Félicité,  comme 
vénérable  secret.  En  réalité  il  était  vénérable  de  la  loge  «  Le  Secret». 

(3)  Jean-Pierre  Le  Lorrain,  graveur  du  roi  pour  l'artillerie, 
neveu   de  Robert  Le  Lorrain,   officier  honoraire  du   G.".   0.\,  le 


CHARLES    RADCLYFFE  123 

1729,  de  la  loge  du  «  Louis  d'argent  »  :1  a  loge  des  Arts 
Sainte-Marguerite,  dont  le  premier  vénérable  fut  un 
lapidaire  anglais  du  nom  de  Coastown  (1).  Cette  loge 
fut  reconstituée,  le  29  octobre  1773,  par  le  G.*.  0.'., 
avec  Puisieux  (2),  architecte  du  roi,  comme  vénérable; 
cette  loge  existait  encore  en  1776  et  n'était  plus  en 
vigueur  en  1785. 

Enfin  une  cinquième  loge  aurait  été  créée  en  1729 
sous  le  titre  de  St-Pierre  et  St-Paul  en  faveur  du  Vén.\ 
M.*.  Puisieux;  comme  elle  ne  figure  sur  aucune  liste 
de  la  G.\  L.*.  d'Angleterre,  on  a  tout  lieu  de  la  sup- 
poser de  formation  jacobite. 

Ces  cinq  loges  n'étaient  pas  régulièrement  consti- 
tuées par  la  f.\  m.*,  de  Londres  qui,  avant  1766,  ne 
donna  des  patentes  officielles  qu'au  Louis  d'argent  à 
rO.\  de  Paris  ;  à  la  Parfaite  Union  à  l'0.\  de  Valen- 
ciennes  sous  le  n°  127  ;  à  la  loge  d'Aubigny  le  22  août 
1735  et  à  la  loge  anglaise  de  Bordeaux  dite  n°  204,  et 
encore  pour  cette  dernière  faut-il  faire  des  réserves, 
car  si  la  G.a.  L.*.  de  Londres  reconnut  ses  travaux  à 
partir  du  27  avril  1732,  elle  ne  délivra  les  patentes  qu'en 
1767.  Toutes  les  autres  loges  étaient  d'origine  jacobite. 

L'historique  des  cinq  loges  régulières  ou  irrégu- 
lières de  Paris  qui  passent,  avec  raison,  pour  les  cinq 
premières  de  France,  m'a  paru  un  exemple  saisissant 
de  l'incertitude  et  des  difficultés  qu'éprouva  la  f.\-m.\ 

5  juillet  1773,  mourut  en  1778  (son  testament  déposé  chez  Bour- 
sier, le  2  avril  1768,  fut  insinué  le  7  août  1778). 

(1)  Appelé  Goustaud  en  France  et  Gustos  en  Portugal.  Ce  Coas- 
town a  joué  un  grand  rôle  dans  la  propagation  de  la  f.\-ni.'.  sur 
le  continent. 

(2)  Jean-Baptiste  de  Puisieux,  né  à  Alland'huy  (Ardennes)  le 
19  janvier  1679,  mort  à  Paris,  le  6  février  1776.  Lors  de  la  consti- 
tution du  G.".  0.'.  Puisieux  était  le  doyen  des  maîtres  de  loge  de 
Paris.  Nous  lui  consacrons  une  notice,  chapitre  ix. 


124  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

pour  s'installer  en  France.  Par  la  suite,  pour  des  rai- 
sons d'intérêt  ou  d'orgueil,  les  f.'.-m. '.  inventèrent 
des  brevets  anciens,  comme  celui  de  Gerbier,  signé  en 
1721  par  le  duc  d'Antin,  qui  n'avait  alors  que  14  ans  ; 
malgré  l'évidence  de  la  fausseté  du  document,  le 
G.'.  0.*.  n'hésita  pas  à  le  considérer  comme  authen- 
tique. Aujourd'hui  les  historiens  de  toutes  nuances 
sont  à  peu  près  d'accord  pour  suspecter  un  grand 
nombre  de  pièces  analogues. 


En  présence  des  progrès  de  la  f.'.-m.*.  jacobite  en 
France,  la  f.'.-m.*.  anglaise  s'inquiéta.  De  même  qu'elle 
tendait  à  la  suppression  de  la  secte  concurrente  dans 
la  Grande-Bretagne,  la  Grande  Loge  de  Londres 
envoya  en  France  un  émissaire,  pour  réagir  contre  la 
tendance  antianglaise  de  la  f.'.-m.*.  française.  Son 
émissaire  fut  un  de  ses  anciens  grands  maîtres,  transfuge 
du  parti  des  Stuarts  et  rallié  à  Georges  II,  Jacques  Mor- 
ton,  comte  de  Douglas,  qui  eut  à  Paris  des  aventures 
qui  firent  beaucoup  de  bruit. 

Les  comtes  de  Morton  étaient  très  avancés  dans  la 
f.'.-m.*.  anglaise,  et  parmi  les  membres  de  cette  fa- 
mille on  relève  : 

Jean  Charles  Douglas,  comte  de  Morton,  G.*.  M.*,  des 
loges  écossaises,  élu  le  30  novembre  1739  ; 

Jacques  Douglas,  comte  de  Morton,  G.*.  M.*,  de  la 
f.'.-m.*.  anglaise,  élu  le  24  décembre  1740,  installé 
le  19  mars  suivant  ; 

Et  Georges  Douglas,  comte  de  Morton,  élu  G.*.  M.*- 
de  la  G.'.  L.  .  d'Ecosse  en  1790  et  1791. 

Celui  qui  nous  intéresse  est  Jacques  (James),  14e 
comte  Morton,  le  G.'.  M.',  de  la  f.'.-m.'.  anglaise,  né 


CHARLES    RADCLYFFE  125 

à  Edimbourg  en  1702,  mort  en  1768.  Il  fut  un  des  pre- 
miers transfuges  qui  abandonnèrent  le  parti  des  Stuarts 
pour  se  rallier  à  Georges  IL 

Homme  de  sciences,  mathématicien,  il  fut  élu 
membre  de  la  Royal  Society,  le  19  avril  1733.  Il  s'oc- 
cupait spécialement  d'astronomie  ;  c'est  lui  qui  fut 
chargé  en  1769,  parla  commission  des  longitudes,  d'ob- 
server le  passage  de  Vénus. 

Son  rôle  à  Paris,  où  il  séjourna  pendant  une  partie 
de  la  durée  de  la  guerre  de  succession  d'Autriche,  est 
au  moins  singulier. 

Il  était  en  France  depuis  1743,  sous  prétexte  de  santé, 
et  avait  voyagé  sur  les  rives  de  la  Loire  si  chères  aux 
Anglais.  Il  se  trouvait  à  Lorient  lorsque  l'escadre  bri- 
tannique y  fit  une  descente  et  fut  sur  le  point  de  s'empa- 
rer de  sa  personne.  Les  jacobites  le  haïssaient  et  assu- 
raient que  si  l'on  faisait  des  perquisitions  à  son  domicile, 
on  trouverait  des  preuves  d'espionnage  et  de  trahison. 
Comme  son  passeport  allait  être  périmé,  il  vint  trouver 
d'Argenson  à  Fontainebleau.  Le  ministre  lui  déclara  ne 
pouvoir  le  renouveler  et  lui  conseilla  de  faire  faire  la 
demande  par  le  prince  Charles-Edouard,  qui  se  trou- 
vait précisément  à  la  cour.  Il  n'osa  le  faire  et  se  retira 
deux  jours  chez  M.  Vanhoey,  à  qui  d'Argenson  en  fît 
amèrement  le  reproche.  Dès  qu'il  sortit  de  son  asile, 
sur  ordre  du  25  octobre  1746,  contresigné  Maurepas, 
on  l'arrêta  et  on  le  conduisit  à  la  Bastille.  Pendant 
ce  temps  on  arrêtait,  à  Paris,  sa  femme,  la  comtesse 
Agathe  Morton,  avec  sa  fille  Mary,  son  fils,  son  domes- 
tique et  sa  femme  de  chambre.  La  comtesse  Morton 
et  ses  enfants  furent  relâchés  le  31  octobre  suivant  ; 
Morton  ne  sortit  que  le  6  décembre  1746,  sur  ordre 
contresigné  d'Argenson.  Tous  ses  papiers  furent  exa- 
minés et  il  subit  de  longs  interrogatoires.  On  ne  trouva 


126  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

rien.  Cette  arrestation,  qui  avait  fait  beaucoup  de  bruit, 
fut  d'une  grande  utilité  pour  le  roi.  Grâce  à  cet  otage, 
le  ministère  britannique  consentit  à  un  règlement  assez 
équitable  pour  les  prisonniers  français  faits  à  Culloden, 
et  permit  de  faire  un  échange  avantageux. 

De  1744  à  1746,  Douglas  avait  essayé,  sans  succès 
du  reste,  de  s'introduire  dans  plusieurs  loges  en  Bre- 
tagne et  sur  les  rives  de  la  Loire  (1)  ;  il  est  permis  de 
croire  que  le  but  du  voyage  du  G.'.  M.*,  de  la  f.\-m.\ 
anglaise  fut  provoqué  par  cette  œuvre  de  propagande. 
C'est  à  cette  époque  du  reste  que  la  lutte  fut  la  plus 
ardente  entre  les  loges  anglaises  et  les  loges  jacobites. 


Charles-Edouard  -  Louis  -  Philippe  -  Casimir  Stuart , 
dont  Radclyffe  soutenait  la  politique  avec  le  concours  des 
loges  maçonniques,  était  né  au  palais  Pamphili,  à  Rome, 
le  30  décembre  1720.  Plus  de  deux  cents  témoins  assis- 
tèrent à  sa  naissance.  Dans  la  nuit,  un  astre  nouveau 
apparut  dans  le  ciel  et  les  jacobites  superstitieux  virent 
dans  ce  phénomène  un  présage  heureux  pour  la  des- 
tinée du  jeune  prince. 

Son  père  était  Jacques  VIII  d'Ecosse,  Jacques  III 
d'Angleterre  ;  sa  mère,  Clémentine  Sobieska,  était  la 
descendante  de  celui  qui  avait  si  vaillamment  défendu 
la  chrétienté  sous  les  murs  de  Vienne  en  1683. 

Rarement  naissance  fut  plus  fêtée  que  celle  de 
Charles-Edouard.  Ses  langes,  valant  6.000  scudi,  furent 
bénis  parle  pape  Clément  XI.  Gitta,  la  sage-femme  qui 

(1)  L'Union  O.*.  Lorient  1744;  Saint-Louis  de  la  Gloire  O.". 
Saumur  (12  avril  1745)  ;  la  Concorde  écossaise  O.*.  Tours  (27  sep- 
tembre 1745);  l'Heureuse  Rencontre  O.*.  Brest  (6  novembre  1745); 
la  Noble  Amitié  O.'.  Morlaix  (1746). 


CHARLES    RADCLYFFE  127 

le  présenta  aux  partisans  assemblés,  reçut  cent  doublons 
de  Jacques  III  et  des  dons  particuliers  des  membres 
du  Sacré  Collège;  le  Saint-Père  la  créa  comtesse 
romaine.  Jacques  III  annonça  en  grande  pompe  la 
naissance  de  son  héritier  à  tous  les  souverains  d'Europe. 

Jusqu'à  la  naissance  de  son  frère,  le  duc  d'York, 
Charles-Edouard  eut  pour  gouvernante  une  Anglaise 
catholique,  qui  portait  un  nom  qui  devait  devenir 
l'effroi  des  jacobites:  Miss  Walpole. 

Son  frère,  Henry-Benoît-Edward-Alfred-Louis-Tho- 
mas, naquit  le  20  mars  1725.  Miss  Walpole  fut  alors 
remplacée  par  la  maîtresse  de  Jacques  III,  la  comtesse 
d'Inverness,  qui  était  protestante. 

Les  deux  frères  eurent  successivement  pour  gou- 
verneurs :  Ramsay,  Murray,  le  comte  de  Dumbar  et 
Thomas  Sheridan. 

Ramsay,  comme  nous  l'avons  vu,  était  très  avancé 
dans  la  f.\-m.\  ;  il  fréquentait  assidûment  les  loges 
de  Paris  et  se  rendait  souvent  à  Aubigny  pour  assister 
aux  tenues  maçonniques  chez  Louise  de  Keroual, 
duchesse  de  Portsmouth.  C'est  Ramsay  qui  initia  le 
jeune  Charles-Edouard  aux  secrets  de  la  maçonnerie 
jacobite  et  qui,  en  dehors  des  satisfactions  philosophi- 
ques qu'il  devait  y  trouver,  fit  entrevoir  à  son  royal 
élève  l'intérêt  politique  qui  pouvait  en  résulter  pour 
ses  partisans. 

L'éducation  des  jeunes  princes  fut  particulièrement 
soignée.  Charles-Edouard  parlait  couramment  l'anglais, 
l'italien  et  le  français,  dont  il  ne  put  cependant  adopter 
l'orthographe. v Profondément  artiste,  le  jeune  Charles- 
Edouard  était  musicien  de  talent. 

Il  débuta  brillamment  dans  la  carrière  militaire,  à 
quatorze  ans,  au  siège  de  Gaëte,  en  1734,  avec  le  ma- 
réchal de  Berwick.  L'année   suivante,   après  un  court 


128  LA    FRANOxMAÇONNERIE    EN    FRANCE 

séjour  à  Naples  et  à  Rome,  il  fit  la  campagne  de  Lom- 
bardie.  La  guerre  terminée  en  1737,  sous  le  nom  de 
comte  d'Albany,  il  visita  Parme,  Gênes,  Milan,  Venise, 
et,  passant  par  Padoue,  Bologne  et  Florence,  il  revint 
se  fixer  à  Rome  et  à  Albano,  où  il  demeura  jusqu'à  son 
départ  pour  la  France.  C'est  dans  la  première  de  ces 
villes  qu'en  1740  Horace  Walpole  fut  à  même  de  le 
voir  et  de  l'étudier.  La  même  année,  le  président  Des 
Brosses  était  reçu  dans  leur  palais,  place  des  Saints- 
Apôtres,  parles  fils  de  Jacques  III  ;  il  a  laissé  dans  son 
journal  le  récit  de  sa  visite.  Des  Brosses  trouva  le  pré- 
tendant dévot  à  l'excès,  mais  aimable,  poli  et  gracieux, 
dénotant  une  grande  bonté  de  cœur  et  un  grand  courage. 
Pour  faire  accueil  au  président,  les  deux  frères  firent 
de  la  musique  ;  l'aîné  jouait  du  violoncelle  pendant  que 
le  cadet  chantait.  Ils  exécutèrent  la  Notte  di  Natale, 
concerto  de  Corelli. 

Le  sang  du  jeune  Charles-Edouard  bouillait  dans  ses 
veines  et  il  avait  hâte  de  rejoindre  les  armées  de 
Louis  XV,  lorsqu'il  apprit  que,  le  26  juin  1743,  le  comte 
de  Clermont  venait  de  se  faire  battre  à  Dettingen  par 
Georges  II  en  personne. 

Les  Stuarts  habitaient  Rome  lorsque,  dans  les  der- 
niers jours  de  décembre  1743  lord  Sempill,  agent  con- 
fidentiel de  Jacques  III  à  Paris,  se  rendit  mystérieuse- 
ment chez  le  chevalier  de  Saint-Georges.  Il  arrivait  de 
Versailles,  et,  grâce  à  la  duchesse  de  Châteauroux,  qui 
s'intéressait  à  la  cause  jacobite,  Louis  XV  l'autorisait  à 
venir  à  Paris  s'entendre  avec  ses  partisans,  et  lui  pro- 
mettait son  concours  pour  une  expédition  en  Angle- 
terre. 

Charles-Edouard  s'échappe  de  Rome  le  9  janvier 
1744,  sous  prétexte  d'une  partie  de  chasse.  Grâce  à  la 
connivence  du  bailli  de  Tencin  et  du  cardinal  Aquaviva, 


CHARLES    RADCLYFFE  129 

il  court  la  poste  à  franc  étrier,  jusqu'à  Gênes,  où  il 
s'embarque  sur  une  felouque  espagnole.  Il  traverse 
sans  encombre  une  escadre  anglaise,  débarque  le  13 
à  Antibes  et  couche  à  Paris  le  20.  A  peine  arrivé,  il  se 
rend  à  Dunkerque,  où  la  flotte  française  appareillait. 
Après  avoir  croisé  quelques  jours  dans  le  Pas  de 
Calais,  l'escadre  fut  rejointe  par  la  flotte  anglaise  com- 
mandée par  l'amiral  John  Norris,  devant  Dunqueness, 
lorsqu'une   tempête  dispersa  les   combattants  (1).  Le 

15  mars,  Charles-Edouard  était  de  retour  à  Gravelines 
sous  le  nom  de  chevalier  de  Douglas,  veillant  avec  le 
maréchal  de  Saxe  aux  préparatifs  d'une  nouvelle  expé- 
dition, qui  fut  contremandée  peu  après. 

En  juin,  il  était  rentré  à  Paris  et  vivait  comme  un 
ermite  à  une  lieue  de  la  capitale.  Louis  XV  ayant  refusé 
de  le  recevoir,  le  prétendant  s'en  plaignit  à  son  père,  le 

16  janvier  1745,  et  se  rendit  en  Picardie  chez  le  duc  de 
Fitz-James,  puis  chez  le  duc  de  Bouillon  (2)  à  Navarre. 
Pendant  ce  temps,  le  11  mai  1745,  avait  lieu  la  bataille 
de  Fontenoy  dans  laquelle  les  régiments  écossais  et 
irlandais  rivalisaient  de  courage  avec  la  Maison  du  roi. 

Charles-Edouard  préparait  son  expédition  d'Ecosse, 
demandant  à  ses  partisans  les  fonds  nécessaires.  Le 
12  juin  il  écrit  de  Navarre  à  son  père  qu'il  doit  60.000 
francs  au  vieux  Waters,  banquier  à  Paris,  franc-maçon 
militant,  et  le  double  à  son  fils. 

Avec  le  concours  d'Antoine  Walsh,  il  frète  à  Nantes 

(1)  «  Si  la  mer  n'avait  pas  été  alors  de  notre  côté,  dit  lord 
Mahon,  les  Stuarts  ne  pouvaient  pas  ne  pas  réussir.  » 

(2)  Le  duc  de  Bouillon  ex-prince  de  Turenne  (1686-1743),  qui  fut 
son  premier  élevé  avant  d'être  nommé  précepteur  des  fils  de  Jac- 
ques III.  Après  1730,  à  la  suite  d'intrigues  de  cour,  Ramsay  quitta 
ces  fonctions  et  devint  l'intendant  du  prince  de  Bouillon.  En  1774, 
le  G.'.  O.'.  de  Bouillon,  qui  avait  son  siège  à  Bouillon,  fonda  plu- 
sieurs loges  en  France.  Voir  chapitre  vi. 

LA    FRANC-MAÇONNERIE.  T.    I.  9 


130  LA    FRANC-MAÇONNERIE  EN   FRANCE 

l'Elisabeth,  vieux  navire  de  67  canons,  commandé  par 
le  marquis  d'O,  et  la  Doutelle,  petite  frégate  de  20 
canons,  commandée  parWalsh.  A  la  fin  de  juin  1745 
il  quitte  Navarre  et  le  2  juillet  il  s'embarque  à  Saint- 
Nazaire  sur  un  bateau  pêcheur  pour  rejoindre  la  Dou- 
telle, qui  était  mouillée  sous  Belle-Isle.  Là,  il  attend 
YElisabeth  et  les  deux  navires  appareillent  de  conserve 
le  12.  Le  16  ils  rencontrent  un  navire  anglais  de  58 
canons,  le  Lyon,  avec  lequel  ils  se  canonnent  pendant 
cinq  heures  ;  le  combat  fut  acharné  :  YElisabeth  dut 
rentrer  à  Brest  et  le  Lyon  dans  un  port   anglais. 

Malgré  ce  contretemps,  Charles  Edouard  continue 
sa  route  avec  la  Doutelle  et  parvient  à  jeter  l'ancre  entre 
South-Uist  et  Eriska.  Le  2  août  il  débarque  dans  cette 
dernière  île  et,  d'après  la  légende,  un  aigle  plana  sur  sa 
tête  pendant  qu'il  atterrissait.  Il  prend  enfin  terre  en 
Ecosse  à  Borodale. 

Nous  ne  referons  pas  le  récit  bien  connu  de  son  expé- 
dition, qui  le  conduisit  sans  obstacles  jusqu'à  Derby,  à 
35  lieues  de  Londres.  S'il  avait  marché  de  suite  sur 
cette  ville  au  lieu  de  passer  des  revues  et  de  donner  des 
bals  à  Edimbourg,  il  eût  certainement  triomphé,  car  il 
n'aurait  pas  laissé  aux  troupes  auxiliaires,  envoyées  de 
Hollande,  le  temps  d'arriver  au  secours  du  duc  de 
Gumberland. 

C'est  pendant  cette  expédition  que,  le  24  septembre 
1745,  Charles-Edouard  fut  solennellement  installé 
G.*.  M.\  de  la  f.  \-m.\  écossaise,  dans  un  chapitre 
général  de  Tordre,  tenu  dans  le  palais  d'Holyrood  (1). 

Le  19  septembre  1746,  après  avoir  erré  dans  les 
petites    îles  qui  entourent   l'Ecosse,  Charles-Edouard 


(1)  A  winiher  with  Robert  Burns,  Edimbourg,  1846,  pp.  53  et 
54,  et  Amédée  Pichot  :  Charles-Edouard. 


CHARLES    RADCLYFFE  131 

parvint  à  s'embarquer  sur  l'Heureuse,  frégate  de  30 
canons,  commandée  par  Warren,  colonel  du  régiment 
de  Dillon.  L'Heureuse  était  convoyée  par  le  Prince  de 
Conti,  de  22  canons. 


Le  prétendant  débarqua  à  Roscoff  le  10  octobre  ; 
le  14  il  avait  rejoint  son  frère  le  duc  d'York  à  Clichy. 
Par  égard  pour  son  infortune,  Louis  XV  mit  à  sa  dis- 
position le  château  Saint-Antoine,  et  par  traité  signé 
d'Argenson  et  O'Bryan,  la  France  le  reconnaissait 
comme  prince  régent  d'Angleterre. 

Ayant  obtenu  d'être  reçu  par  le  roi  à  Fontainebleau, 
il  se  rendit  près  de  Louis  XV  dans  l'appareil  royal  le 
plus  luxueux  et  le  plus  solennel,  ce  qui  indisposa  la 
cour  contre  lui,  et,  après  un  bref  séjour,  il  retourna 
chez  son  frère  à  Clichy,  sans  avoir  rien  obtenu  pour  la 
nouvelle  expédition  qu'il  projetait  (1).  S'il  faut  en  croire 
les  bruits  de  cour,  la  seconde  fille  de  Louis  XV  aurait 
manifesté  à  son  égard  les  sentiments  les  plus  tendres  ; 
on  aurait  même  parlé  de  leur  mariage . 

Après  avoir  touché  barre  à  Paris,  Charles-Edouard 
se  rendit  à  Avignon,  puis  se  dirigea  vers  l'Espagne, 
espérant  trouver  à  Madrid  les  secours  qui  lui  avaient 
été  refusés  à  Fontainebleau.  Il  traverse  donc  la  Cata- 
logne, est  reçu  à  Guadalaxara,  le  12  mars  1747,  par 
Ferdinand  VI,  qui,  tout  en  montrant  une  grande  sym- 
pathie pour  ses  infortunes,  ne  voulut  prendre  avec  lui 
aucun  engagement  politique.  Il  revint  aussitôt  en 
France  et  arriva  à  Paris  vers  le  15  avril. 


(1)  Les  22  et  26  octobre  1746,  il  remit  à  Louis  XV  deux  mémoi- 
res qui  n'eurent  aucun  effet. 


132  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

C'est  peu  après  son  retour  qu'il  aurait  constitué  à 
Arras  la  loge  la  Constance,  dont  le  père  de  Robespierre 
faisait  partie.  Voici  le  texte  de  ce  document  d'après  la 
version  la  plus  authentique,  que  nous  empruntons  à 
Daruty  : 

«  Nous  Charles-Edouard  Stuwart,  prétendant  roi 
d'Angleterre,  de  France,  d'Ecosse  et  d'Irlande,  et,  en 
cette  qualité  G.\  M.',  du  chap.*.  de  Hérédon,  connu 
sous  le  titre  de  chevalier  de  l'Aigle,  du  Pélican,  et, 
depuis  nos  malheurs  et  nos  infortunes,  sous  celui  de 
R.-.-C-.  +:(1) 

«  Voulant  témoigner  aux  maçons  artésiens  combien 
nous  sommes  reconnaissant  envers  eux  des  preuves  de 
bienfaisance  qu'ils  nous  ont  prodiguées  avec  les  officiers 
de  la  garnison  de  la  ville  d'Arras,  et  de  leur  attache- 
ment à  notre  personne  pendant  le  séjour  de  six  mois 
que  nous  avons  fait  en  cette  ville  (2),  nous  avons,  en 
leur  faveur,  créé  et  érigé,  créons  et  érigeons,  par  la 
présente  bulle,  en  ladite  ville  d'Arras,  un  souverain 
chapitre  prématial  et  métropolitain  de  R.\  C.\  +, 
sous  le  titre  distinctif  d'EcossE  jacobite,  qui  sera  régi 
et  gouverné  par  les  chevaliers  Lagneau,  de  Robespierre, 
tous  deux  avocats,  Hazard  et  ses  deux  fils,  tous  trois 
médecins,  J.-B.  Lucet,  notre  tapissier,  et  Jérôme  Tellier, 
notre  horloger,  auquel  nous  permettons  et  donnons 
pouvoir  de  faire,  tant  par  eux  que  par  leurs  successeurs, 
non  seulement  des  chevaliers  R.\-C  \,  mais  même  de 
créer  un  chapitre  dans  toutes  les  villes  où  ils  croiront 
pouvoir  le  faire,  lorsqu'ils  en  seront  requis,  sans  cepen- 

(1)  Il  serait  intéressant  de  savoir  si  les  .'.  abréviatifs  figurent 
dans  l'original  de  la  bulle,  ce  qui,  étant  donnée  l'époque,  pourrait 
rendre  douteuse  son  authenticité. 

(2)  Peut-être  les  six  premiers  mois  de  1745,  ou  mieux,  six  mois 
en  plusieurs  fois  en  1744  et  1745. 


CHAULES    KADCLYFFE  VS3 

dant.  par  eux  ni  par  leurs  successeurs,  pouvoir  créer 
deux  chapitres  dans  une  même  ville,  quelque  peuplée 
qu'elle  puisse  être  ;  et  pour  que  foi  soit  ajoutée  à  notre 
présente  bulle,  nous  l'avons  signée  de  notre  main,  et  à 
icelle  fait  apposer  le  nom  secret  de  nos  commande- 
ments, et  fait  contresigner  par  le  secrétaire  de  notre 
cabinet,  le  jeudi  15e  jour  du  2e  mois  l'an  de  l'Incarna- 
tion 1747. 

«  Charles-Edouard  Stuwart, 

«  De  par  le  Roi  :  (1) 

«  Lord  Deberkley,  secrétaire.  » 

L'authenticité  de  ce  document  a  été  mise  en  doute 
parce  que,  sur  la  pièce  originale,  Charles-Edouard  se 
serait  qualifié  roi  ;  après  vérification,  le  mot  employé 
étant  prétendant  roi,  l'objection  tombe. 

Daruty  croit  qu'il  faut  dater  la  patente  de  1745, 
parce  qu'elle  est  datée  du  jeudi  15e  jour  du  2°  mois 
5747,  soit  du  15  avril  1747,  et  il  fait  remarquer,  avec 
raison,  qu'en  1747  le  15  avril  était  un  samedi  et  non 
un  jeudi.  Il  conclut  de  là  que  le  15  avril  étant  un  jeudi 
en  1745,  c'est  à  cette  dernière  année  qu'il  faut  faire 
remonter  le  document,  et  il  le  date  dans  sa  transcription 
de  1745. 

Or,  Daruty  se  trompe,  car  il  est  vraisemblable  que 
Charles-Edouard  suivait,  comme  ses  compatriotes,  le 
vieux  style,  alors  en  retard  de  12  jours  sur  le  nouveau 
style  adopté  en  France,  et  dans  ce  cas,  le  15  avril  V.  S. 
correspondait  au  27  avril  N.  S.  qui  était  bien  un  jeudi. 

(1)  Une  expédition  de  ce  bref  destinée  au  Chap.Metrop.de  Paris, 
fut  vendue  en  vente  publique  le  27  mars  1863,  par  le  libraire 
Tross  (n°  9  du  catal.).  Les  parties  reproduites  dans  le  catalogue 
sont  conformes  au  texte  de  Daruty. 

C'était  une  pièce  in-f°  sur  velin  revêtue  du  grand  sceau  et  sept 
timbres  et  d'un  grand  nombre  de  signatures. 


134  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Dans   ces  conditions  on  peut  admettre,  mais   sous 
réserves,  l'authenticité    du    document    que   les    faits 
matériels  ne    peuvent     contredire,    puisque    Charles- 
Edouard  était    bien  f. '.-m.'.,  ainsi  que  nous  l'avons 
dit  plus  haut  (1). 


En  juillet  1747,  le  duc  d'York  se  sépare  de  son  frère 
et  se  rend  à  Rouen  auprès  de  son  père,  ce  qui  provoqua 
un  certain  froid  avec  Charles-Edouard  qui  était  resté  à 
Saint-Ouen  (2).  Il  n'avait  pas  renoncé  à  ses  projets  de 
restauration,  lorsque  par  les  préliminaires  du  traité 
d'Aix-la-Chapelle  (21  avril  1748)  Louis  XV  reconnut 
officiellement  la  maison  de  Hanovre  et  s'engagea  à 
obliger  les  Stuarts  à  quitter  la  France.  Les  10  et  18 
juillet,  Charles-Edouard  écrivit  à  Louis  XV  pour  pro- 
tester, et  à  partir  de  cette  époque  il  semble  avoir  eu  une 
grande  animosité  contre  la  maison  de  Bourbon. 

Au  lieu  de  s'apprêter  à  quitter  la  France,  il  fait 
imprimer  un  mémoire  qu'il  fait  distribuer  dans  les 
rues.  Il  proteste  encore  contre  les  fêtes  données  à 
l'occasion  de  la  conclusion  de  la  paix  et  se  moque 
de  Louis  le  Pacificateur.  Bien  plus,  il  fait  graver  par 
le  F.*.  Nicolas  Rœttiers  une  médaille  sur  la  face  de 
laquelle  figuraient  des  vaisseaux  de  la  marine  anglaise 
forçant  la  France  à  la  paix,  et  sur  l'avers  cette  men- 
tion : 

(1)  Voir  aux  appendices,  les  règlements,  protocoles,  etc.,  de  la 
f.    -m.',  jacobite. 

(2)  Le  duc  d'York  fut  nommé  cardinal  le  3  juillet  1747.  Après 
Culloden,  en  reconnaissance  du  bon  accueil  fait  par  les  maçons  de 
Toulouse  à  sir  Samuel  Lockhart,  un  partisan  des  Stuarts  constitua 
dans  cette  ville,  en  1747,  un  chapitre  sous  le  titre  les  Ecossais  fidèles, 
qui  devint  la  vieille  Bru  et  adopta  plus  tard  un  rite  à  9  degrés. 


CHARLES    RADCLYFFE  135 

CarolusWalliœ  prînceps, 
Amor  et  Spes  Brilanniœ. 

—  Si  jamais  je  remonte  sur  le  trône,  disait-il  à  qui 
voulait  l'entendre,  j  e  forcerai  la  France  à  donner  des 
otages. 

Il  affecte  de  se  montrer  en  public,  loue  un  riche  hôtel 
quai  des  Théatins  et  y  mène  un  grand  train,  tenant  les 
propos  les  plus  injurieux  pour  Louis  XV,  qu'il  avait 
complètement  cessé  de  voir. 

L'ambassadeur  d'Angleterre,  de  son  côté,  réclamait 
l'exécution  de  la  clause  du  traité  d'Aix-la-Chapelle  qui 
avait  été  signé  définitivement  le  18  octobre. 

Le  mardi  10  décembre  1748,  à  7  heures  du  soir, 
Charles-Edouard  fut  arrêté  au  Palais  Royal,  au  moment 
où  il  s'apprêtait  à  entrer  à  l'Opéra.  Pour  cette  arresta- 
tion on  avait  mobilisé  1.200  hommes  commandés  par 
le  duc  de  Biron. 

On  s'empare  de  lui  au  moment  où  il  descend  de  voi- 
ture, on  lui  lie  les  bras  et  les  jambes  avec  des  rubans 
de  soie,  et,  pour  éviter  un  attroupement,  on  le  trans- 
porte dans  une  maison  voisine.  Le  chevalier  de  Vau- 
dreuil,  major  des  gardes  françaises,  lui  conseille  de  ne 
pas  résister.  Comme  Charles-Edouard,  furieux,  conti- 
nuait à  se  défendre  et  à  protester,  on  lui  enleva  son 
épée,  son  couteau  et  ses  pistolets  ;  on  le  conduisit  en 
voiture  à  Vincennes,  où  le  gouverneur  du  château  vint 
l'attendre  à  la  porte  du  donjon  et  lui  fit  retirer  ses 
liens  enrubannés,  quand  il  eut  promis  de  ne  pas  attenter 
à  ses  jours.  Pendant  ce  temps,  on  enfermait  à  la  Bastille 
onze  gentilshommes  de  sa  suite  et  trente-neuf  domes- 
tiques de  sa  maison  (1).  Six  gentilshommes  avaient  été 
emprisonnés  avec  lui  à  Vincennes. 

(1)  Ils  furent  libérés  quelques  jours  après  (entre  le  11  et  le  19 
décembre) . 


136  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Le  roi  avait  décidé  de  le  faire  conduire  à  la  fron- 
tière de  Savoie  ;  Charles-Edouard  partit  le  dimanche 
15  décembre  à  5  heures  du  matin  ;  il  voyagea  royale- 
ment, à  petites  étapes.  Le  18  il  passait  à  Tonnerre,  le 
21  à  la  Maison  Blanche,  et  le  23  au  pont  de  Beau- 
voisin,  à  la  frontière. 


Mais  Charles-Edouard  ne  se  tient  pas  pour  battu  : 
à  peine  expulsé,  il  va  à  Chambéry,  traverse  le  Dauphiné 
et  se  rend  à  Avignon.  Invité  à  quitter  le  territoire  pon- 
tifical, il  traverse  à  nouveau  la  France  pour  se  rendre 
à  Venise,  d'où  on  l'expulse.  A  partir  de  ce  moment,  on 
perd  sa  trace.  Toutes  ses  lettres  passaient  par  l'inter- 
médiaire de  Waters,  banquier  à  Paris.  On  croit  qu'il  se 
tint  caché  chez  le  duc  de  Bouillon,  dans  les  Ardennes. 

En  septembre  1750  il  avait  l'audace  d'assister  avec 
le  colonel  Brett  à  une  réunion  jacobite  qui  se  tenait  à 
Londres  (1).  Puis  il  séjourne  à  Gand.  C'est  là  qu'il 
apprit  que  son  ancienne  amie  d'Ecosse,  Clémentine 
Walkenshaw,  était  parvenue  à  s'échapper  et  qu'elle  était 
réfugiée  à  Paris.  Il  va  la  chercher,  revient  avec  elle  à 
Gand  et,  après  plusieurs  voyages  en  Allemagne,  ils 
se  fixent  dans  le  pays  de  Liège,  où  il  se  fait  appeler  le 
comte  de  Johnson.  C'est  dans  cette  ville  que  naquit  une 
fille,  baptisée  le  29  octobre  1753,  sous  le  nom  de 
Clémentine  (2). 

Ayant  appris  que  la  France  allait  déclarer  la  guerre 
à  l'Angleterre,   il    se  rend    aussitôt  à  Navarre,  puis  à 

(1)  D'après  une  autre  version,  il  n'aurait  fait  ce  voyage  qu'en 
1753,  au  moment  de  l'exécution  du  D1'  Cameron. 

(2)  Il  signa  Johnson  sur  le  registre  de  Notre-Dame  de  Fonts.  C'est 
cette  fille  qui  devint  la  duchesse  d'Albany. 


CHAULES    RÀDCJLYFFE  137 

Nancy,  où  il  voit  le  comte  de  Lally.  Pendant  son 
séjour  à  Bouillon,  il  se  brouille  avec  Clémentine  et  vient 
à  Paris  avec  sa  fille  (1760).  En  1761  il  aurait  assisté 
à  Westminster  au  couronnement  de  Georges  III. 

Pendant  un  séjour  qu'il  faisait  chez  le  duc  de  Bouil- 
lon, il  apprit  que  son  père  Jacques  III  était  mort  à 
Rome,  le  1er  janvier  1766.  Il  se  rend  aussitôt  dans  la 
capitale  de  la  chrétienté,  sous  le  nom  de  comte  d'Albany, 
puis  se  retire  avec  son  frère  à  Albano. 

En  1772,  il  épouse  la  princesse  Louise-Maximilienne- 
Caroline  de  Stolberg-Gredern  (1),  avec  laquelle  il  fit  un 
triste  ménage  qui  est  resté  légendaire.  Au  moment  de 
son  mariage  il  avait  52  ans  et  sa  femme  19.  Ils  habi- 
tèrent Florence  ;  s'il  faut  en  croire  la  tradition,  pendant 
que  sa  femme  montrait  un  attachement  exagéré  à 
Alfieri  (2),  le  prétendant  se  livrait  à  des  accès  de  fureur 
provoqués  par  l'ivresse. 

A  partir  de  1760,  Charles-Edouard  fut  un  maçon 
très  actif,  et  de  nombreuses  loges  écossaises,  françaises 
et  allemandes  le  reconnaissaient  comme  suprême  Grand 
Maître  de  la  franc-maçonnerie.  Il  fit  partie  de  la  Stricte 
Observance  sous  le  nom  d'Eques  a  sole  aurea.  Au  con- 
vent  deWillemsbad,  plusieurs  maçons  déclarèrent  qu'il 
était  leur  chef  secret  (3). 

Charles-Edouard  mourut  à  Rome  le  31  janvier  1788 
sans  laisser  de  postérité  légitime. 

Son  frère,  devenu  le  cardinal  d'York,  mourut  dans  la 
même  ville  en  1807. 

Avec  ces  deux  princes  s'éteignirent  les  descendants 
directs  des   Stuarts,  et  tout  porte  à    croire  que  le  car- 

(1)  Née  à  Mons  en  1753. 

(2)  Plus  tard  elle  aurait  témoigné  les  mêmes  sentiments  au  peintre 
Fabre. 

(3)  Voir  aux  appendices  le  brevet  de  la  loge  d'Orléans. 


138  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

dinal  d'York  ne  succéda  pas  à  son  frère  comme  grand 
maître  secret  de  la  f.\-m.\  écossaise. 


Pendant  plusieurs  mois  la  maison  de  Hanovre  avait 
tremblé  ;  aussi  après  Culloden  la  répression  fut-elle 
encore  plus  effroyable  qu'en  1716. 

Le  soir  de  la  bataille  de  Culloden,  non  contents 
d'achever  les  blessés  et  de  mutiler  les  morts,  les  soldats 
anglais  trempaient  leurs  mains  dans  le  sang  des  vic- 
times et  s'en  jetaient  gaîment  les  éclaboussures  à  la 
face. 

Ils  laissèrent  à  dessein  quelques  blessés  exposés  aux 
intempéries  et  le  lendemain  ils  vinrent  les  égorger. 
Comme  ils  avaient  fait  le  dénombrement  de  leurs 
victimes  réservées  et  que  plusieurs  manquaient  à  l'appel, 
ils  revinrent  le  surlendemain,  fouillèrent  les  chaumières 
voisines,  massacrèrent  ou  brûlèrent  ceux  qu'ils  rencon- 
trèrent, en  riant  des  contorsions  de  leurs  victimes.  Le 
troisième  jour  on  fusillait  encore. 

Les  survivants  furent  traqués  comme  des  bêtes  fauves 
pendant  de  longs  mois.  Si  Ion  en  jugeait  quelques-uns, 
on  égorgeait  le  plus  grand  nombre  sur  place,  on  enlevait 
les  vivres  et  l'on  incendiait  fermes  et  châteaux.  Les 
malheureux  Ecossais  qui  étaient  venus  demander  grâce 
étaient  parqués  avec  leurs  femmes  et  leurs  enfants,  et 
les  régiments  anglais  les  regardaient  joyeusement 
mourir  de  faim  et  de   misère. 

Les  bourreaux,  sous  les  ordres  de  Cumberland  (1), 


(1)  Guillaume -Auguste,  duc  de  Cumberland.  troisième  fils  de 
Georges  II,  oncle  de  Georges  III,  né  le  26  avril  1721,  mort  le 
31  octobre  1765. 


CHARLES    RADCLYFFE  139 

s'appelaient  le  général  Hawley,  le  colonel  Howard  (1), 
le  capitaine  Scott,  le  major  Lockhart. 

Tontes  les  infamies  lurent  commises  :  ceux  auxquels 
on  avait  extorqué  quelque  argent,  en  leur  vendant  des 
cartes  de  protection,  étaient  brûlés  avec  leurs  sauf-con- 
duits, pendant  qu'au  camp  de  Cumberlandonse  livrait  à 
des  orgies  macabres.  Des  soldats,  sous  les  yeux  de  filles 
de  joie  dévêtues,  pendaient,  par  les  pieds,  des  prison- 
niers nus  à  deux  hallebardes  dressées  en  gibet  et  les 
passaient  aux  baguettes.  Lorsqu'on  parlait  de  lois  au 
duc  Sanglant,  il  répondait  : 

—  Les  lois  !  Quelles  lois  ?  J'enverrai  une  brigade 
pour  vous  donner  des  lois. 

«  La  loi  vint  cependant  glaner  après  la  moisson  du 
glaive.  »  Mais  comment  ! 

Malgré  la  parole  du  duc,  les  officiers  de  la  garnison 
de  Carlisle  furent  exécutés.  Les  officiers  papistes,  traînés 
en  charrette,  sans  secours  religieux,  se  rendirent  rési- 
gnés au  supplice.  L'un  d'eux,  Morgan,  lisait  des  prières 
auxquelles  ses  compagnons  répondaient.  Pendus  comme 
de  vulgaires  criminels,  on  leur  tranchait  la  tête,  on  les 
mutilait,  et  on  les  brûlait.  Le  colonel  Townley  respi- 
rant encore,  fut  saigné  au  cou  comme  un  porc  ;  on  lui 
arracha  les  entrailles  et  le  cœur  qu'on  jeta  au  bûcher. 

Ainsi  qu'aux  portes  d'un  village  de  roi  nègre,  les 
portes  de  Temple  Bar,  de  Carlisle  et  de  Westminster 
reçurent  leurs  trophées  de  têtes  coupées. 

Loin  du  combat,  abrités  par  la  Constitution,  sié- 
geaient avec  calme  les  135  pairs  présidés  par  le  chan- 
celier Hardnick.  C'est  devant  eux  que  comparurent  les 
plus  nobles  victimes  :  Cromarty,  Kilmarnock,  Balme- 
rino,  Radclyfîe,  Lovât. 

(1)  MSï  Howard  était  la  maîtresse  de  Georges  II. 


140  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

A  l'unanimité,  la  main  sur  le  cœur,  les  juges  vinrent 
successivement    déclarer  à  la  barre  du  roi  Georges  : 

—  Coupable,  sur  mon  honneur,  Mylord  ! 

Si  le  roi  Georges  gracie  Cromarty,  il  est  impitoyable 
pour  Kilmarnock  et  Balmerino,  et  voici  ce  que  porte  la 
sentence  habituelle  : 

«  Vous  serez  pendus  par  le  col,  mais  non  pas  jusqu'à 
ce  que  mort  s'ensuive,  car  vous  devrez  être  ouverts 
vivants.  Vos  entrailles  seront  arrachées  et  brûlées  sous 
vos  yeux  ;  vos  têtes  seront  ensuite  séparées  du  corps, 
et  vos  corps  coupés  en  quatre  parties  et  mis  à  la  dispo- 
sition du  roi.  » 

Le  roi  cependant  n'osa  pas  faire  exécuter  la  sen- 
tence à  la  lettre  ;  eut-il  peur  ?  eut-il  honte  ?  les  têtes 
furent  seulement  tranchées. 

Le  shériff  eut  même  la  prévenance  abominable  d'as- 
surer à  Kilmarnock  que  le  bourreau  était  habile  et,  de 
plus,  a  very  good  sort  of  man. 

La  f.\-m.\  orangiste  avait  vaincu  la  f.\-m.\  jaco- 
bite.  Le  G.  \  M.\  lord  Cranstoun  pouvait  dormir  en 
paix.  Pendant  que  les  pairs  faisaient  exécuter  à 
Londres,  la  justice  du  roi  ne  chômait  pas  en  Ecosse, 
et  des  clans  entiers   disparaissaient. 

Le  pasteur  anglican,  chapelain  de  la  prison,  prêchait 
devant  les  juges  et  prenait  pour  texte  : 

«  Moïse  dit  au  juge  d'Israël  :  Tuez  tout  homme  qui 
s'est  joint  à  Baal  Phégore  (1).  » 

Et  les  cloches  sonnaient  dans  les  presbytères  d'Ecosse 


(1)  Nous  vivons  sur  cette  légende  maçonnique  que  l'Angleterre 
était  le  pays  le  plus  civilisé,  le  plus  tolérant,  le  plus  libéral  du 
monde  civilisé,  alors  qu'eu  France,  au  contraire,  les  malheureux 
sujets  des  rois  étaient  martjTÎscs,  méprisés,  traités  en  esclaves. 
Quant  à  la  tolérance  protestante  à  l'égard  des  catholiques,  c'est 
une  pure   légende.    Voici  ce   qui  se  passait    à  Londres   en  1780, 


CHAULES    RADCLYFFE  141 

pour  magnifier  le  duc  Sanglant,  les  poètes  chantaient  le 
héros  vainqueur,  le  parlement  lui  votait  un  supplément 
de  pension  de  650.000  livres  et  le  peuple  anglais  élevait 
à  Guillaume-Auguste,  au  général  toujours  vaincu  sur  le 
continent,  une  statue  triomphale  sur  une  place  de 
Londres. 

A  cette  époque,  la  France  pouvait  écrire  sur  le  socle 
les  noms  de  ses  victoires  sur  le  duc  de  Culloden  : 

Fontenoy,  Lawfeld,  Hastembek,   Closterseven. 


Après  l'avènement  de  Georges  II,  Charles  Radclyffe 
put  résider  quelque  temps  à  Londres  avec  le  consen- 
tement tacite  de  la  police  ;  il  habitait  une  modeste 
maison,  à  Pall  Mail,  sous  le  nom  de  Mrs  Johns.  Après  un 
séjour  de  quelques  années  en  France  (1730-1735),  il 
revint  en  Angleterre  et  résida  dans  le  comté  d'Essex, 
d'où  il  se  rendait  fréquemment  dans  ses  terres  d'Ecosse. 
S'il  ne  fut  pas  molesté,  il  n'obtint  pas  un  pardon,  que 
du  reste  il  ne  sollicitait  pas.  En  1737,  il  rentra  de  nou- 
veau en  France  et  prit  du  service  dans  les  armées  de 
Louis  XV.  En  1745,  il  reçut  une  commission  pour  un 
régiment  de  Charles-Edouard  et  résolut  de  partir  pour 
l'Ecosse  avec  son  second  fils  James-Clément  ;  sa  femme 
l'y  attendait  depuis  plusieurs  mois. 

Il  s'embarqua   à  Dunkerque,  le  22  novembre  1745, 

alors   que  le   bill   de   1778  avait   rendu  aux  catholiques    certains 
droits  civils. 

Georges  Gordon,  le  méchant  fou,  comme  l'appelle  Gibbon,  mit 
la  ville  à  feu  et  à  sang,  pillant  les  églises,  poursuivant  les  catho- 
liques. Ce  ne  fut  qu'au  bout  de  quelques  jours  que  le  roi  Georges  III 
consentit  à  autoriser  les  troupes  à  marcher.  Gordon  était  l'auteur 
d'ignobles  pamphlets  contre  Marie-Antoinette.  Arrêté,  il  fut  défendu 
parErskine.  A  la  fin  de  sa  vie,  Gordon  se  fit  juif. 


142  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

sur  un  navire  nommé  le  Soleil,  emmenant  avec  lui  des 
volontaires  pour  l'armée  du  prétendant.  Il  avait  résolu 
d'atterrir  à  Montrose,  lorsqu'il  fut  capturé  sur  le  Dogger 
Bank  par  la  frégate  la  Sheerness,  ainsi  que  20  officiers 
écossais,  irlandais  et  français,  60  soldats  et  de  nom- 
breuses munitions  de  guerre.  On  conduisit  les  prison- 
niers à  Londres.  —  Charles  Radclyfîe  ressemblait  telle- 
ment à  Jacques  III  qu'on  le  prit  pour  le  chevalier  de 
Saint-Georges  et  son  fils  pour  le  Prétendant. 

Ils  furent  enfermés  dans  la  Tour  de  Londres  ;  mais  le 
27  mars  1746,  le  jeune  Radclyffe  et  4  officiers  français 
furent  libérés  sur  parole. 

La  vendredi  21  novembre  1746,  Charles  Radclyffe  fut 
conduit  au  banc  du  roi,  à  Westminster,  dans  une  voi- 
ture fortement  escortée  ;  il  était  accusé  de  haute  trahison  ; 
mais  comme  sa  tentative  de  1745  n'avait  eu  aucun 
commencement  d'exécution  sur  le  territoire  anglais,  on 
fit  remonter  le  crime  dont  on  l'accusait  à  1716,  c'est-à- 
dire  à  30  années  pendant  lesquelles  il  avait  eu  sa  grâce 
tacite,  puisqu'on  avait  à  plusieurs  reprises  toléré  son 
séjour  sur  le  sol  anglais. 

C'était  un  magnifique  cavalier  qui  n'avait  pas  moins 
de  5  pieds  10  pouces  ;  il  se  présenta  la  tête  haute,  fier 
du  superbe  uniforme  qu'il  avait  revêtu  pour  la  circons- 
tance (1)  :  habit  écarlate,  avec  revers  de  velours  noir, 
rehaussé  de  boutons  et  de  lacets  dorés  ;  il  portait  une 
perruque  à  sac  et  était  coiffé  d'un  chapeau  à  la  mode 
espagnole  avec  une  grande  plume  blanche. 

Quand,  dans  l'acte  d'accusation,  on  le  dénomma 
Charles  Radclyffe,  il  en  interrompit  la  lecture  pour 
déclarer  que  tel  n'était  pas  son  nom  et  il  attaqua  la 
régularité  de  la  procédure. 

(1)  Ce  costume  semble  être  celui  du  régiment  de  Dillon. 


CHARLES   RADCLYFFE  1  1!> 

—  Je  m'appelle  le  comte  de  Derwentwater,  dit-il,  je 
suis  sujet  du  roi  de  France,  commissionné  officier  de 
S.  M.  Très  Chrétienne  et  je  réside  effectivement  en 
France  depuis  près  de  trente  ans. 

On  dut  interrompre  l'audience  pour  contrôler  son 
identité,  et  le  procès  ne  fut  repris  que  le  24  novembre 
suivant.  A  cette  seconde  audience,  lorsqu'on  l'accusa 
de  contumace,  au  lieu  d'invoquer  la  prescription,  il 
produisit  simplement  sa  commission  du  roi  de  France 
et  pria  l'ambassadeur  de  S.  M.  sicilienne,  qui  était 
présent,  d'en  examiner  l'authenticité. 

Puis,  déclarant  à  nouveau  qu'il  s'appelait  le  comte  de 
Derwentwater,  il  refusa  de  plaider  dans  la  forme  accou- 
tumée, en  observant  qu'on  ne  pouvait  faire  la  preuve 
qu'il  avait  participé  à  la  tentative  de  1715. 

Deux  individus  de  Hexham,  près  de  Dilston, 
Abraham  Bunting  et  Thomas  Mosley,  attestèrent  qu'ils 
le  reconnaissaient  à  une  cicatrice  qu'il  avait  sur  le  front 
et  qu'ils  affirmaient  que  le  comte  de  Derwentwater 
était  bien  la  même  personne  que  Charles  Radclyffe,  qui 
s'était  échappé  de  Newgate  en  octobre  1715  et  qu'ils 
avaient  revu  à  Dilston  en  1735. 

A  la  suite  de  ces  seuls  témoignages,  le  jury  déli- 
béra aussitôt  et,  après  une  discussion  qui  dura  à 
peine  dix  minutes,  déclara  qu'il  était  bien  Charles 
Radclyffe,  convaincu  de  haute  trahison  en  1716,  et, 
en  conséquence,  le  condamna  à  avoir  la  tête  tran- 
chée. 

Le  lundi  8  décembre  1746,  à  8  heures  du  matin, 
deux  détachements  de  life-guards ,  un  de  horse- 
grenadier-guards  et  de  foot-guards  s'acheminèrent  vers 
Little  Tower  Hill. 

Les  horse-guards  firent  la  haie  pendant  que  les 
autres  troupes  entouraient  l'échafaud.  Il  n'y  avait  pas 


144  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

quatre  mois  qu'un  public  nombreux  avait  assisté  à  la 
mort  des  lords  Kilmarnock  et  Balmerino. 

L'échafaud  sur  lequel  devait  périr  Charles  Radclyffe 
était  drapé  de  serge  noire  ;  près  de  l'escalier,  on  avait 
placé  la  bière  destinée  à  recevoir  ses  restes  ;  recou- 
verte de  velours  noir,  elle  était  ornée  de  poignées  et  de 
clous  dorés,  sans  inscription  (1). 

Les  shériffs  Winterbottom  et  Alsop  arrivèrent  dans 
leurs  voitures  et  demandèrent  au  général  Williamson, 
député  gouverneur,  de  leur  remettre  le  condamné. 

Pour  son  dernier  supplice,  Radclyffe  était  vêtu  de 
son  uniforme  écarlate  ;  son  habit  avait  des  manches 
courtes  serrées  avec  de  longues  et  larges  poignées.  Ses 
boutons  et  ses  lacets  étaient  dorés  ;  son  gilet  à  longues 
basques  était  broché  ;  son  habit  de  velours  était  brodé 
d'or  ;  il  portait  des  bas  de  soie  blanche  avec  des  boucles 
en  diamants  à  ses  jarretières  et  à  ses  souliers.  Son 
chapeau,  orné  d'une  plume  blanche,  recouvrait  une 
longue  chevelure  de  cheveux  bouclés  tombant  sur  ses 
épaules.  Son  col  et  sa  chemise  étaient  festonnés  avec 
du  ruban  noir.  Il  portait  un  crucifix  d'argent  et  un 
chapelet  de  perles. 

Radclyffe  s'avança  avec  fermeté,  mais  sans  forfan- 
terie, regardant  droit  devant  lui.  Arrivé  sur  l'échafaud, 
il  s'adressa  aux  shériffs  : 

—  Je  meurs,  dit-il,  en  vrai,  obéissant  et  humble  fils 
de  l'Eglise  catholique  et  apostolique,  avec  de  sincères 
sentiments  d'amour  pour  mon  prochain,  et  le  véritable 
bon  souhait  que  je  fais  pour  mon  cher  pays  est  qu'il  ne 
soit  jamais  heureux  tant  qu'il  ne  rendra  pas  justice  à 
son  roi,  le  meilleur  et  le  plus  calomnié  des  souverains. 

(1)  D'après  A.  Pichot,  Charles-Edouard,  le  cercueil  aurait  porté 
l'inscription  suivante:  «  Garolus  Radcliff,  cornes  deDerwentwater, 
decollatus  die  8  dccembris  1746,  a?tate  58.  —  Rcquiescat  in  pace.  » 


CHARLES    RADCLYFFE  1  1.") 

Je  meurs  avec  des  sentiments  de  gratitude,  de  respect 
et  d'amour  pour  le  roi  de  France,  Louis  le  Bien-Aimé, 
un  nom  glorieux.  Je  recommande  à  S.  M.  Très  Chré- 
tienne ma  chère  famille.  Je  me  repens  du  fond  de  mon 
cœur  de  tous  mes  péchés  et  j'ai  le  ferme  espoir  d'obte- 
nir le  pardon  du  Dieu  tout-puissant,  par  les  grâces  de 
son  bienheureux  fils  Jésus-Christ,  Notre-Seigneur, 
auquel  je  recommande  mon  âme  (1). 

Après  avoir  achevé  ces  paroles,  il  se  tourna  vers  le 
bourreau,  auquel  il  pardonna,  puis  il  lui  remit  quelques 
pièces  d'or  en  disant  : 

—  Je  suis  pauvre  ;  voilà  dix  guinées  pour  vous  :  si 
j'en  avais  davantage,  je  vous  les  donnerais.  Je  désire 
que,  pour  votre  action,  il  ne  vous  soit  pas  fait  la 
moindre  peine. 

Alors  Charles  Radclyffe  s'agenouilla  près  du  billot  et 
pria  pendant  quelques  minutes.  Tout  le  monde  s'age- 
nouilla ainsi  que  lui  sur  l'échafaud.  Les  prières  termi- 
nées, il  retira  lui-même  sa  perruque,  son  habit  et  son 
gilet,  puis  il  se  tourna  vers  les  shériffs  pour  prendre 
congé  d'eux,  récita  une  courte  prière,  fit  plusieurs  fois 
le  signe  de  la  croix,  plaça  sa  tête  sur  le  billot  et  pria 
le  bourreau  de  faire  son  office  quand  il  le  verrait  tendre 
ses  mains  en  avant.  Moins  d'une  demi-minute  après, 
il  donna  le  signal  et  sa  tête  roula  sur  l'échafaud. 

Ainsi  mourut  dans  l'amour  de  Dieu,  à  l'âge  de  53  ans, 
Charles  Radclyffe,  comte  de  Derwentwater,  le  premier 
grand  maître  de  la  f.\-m.\  jacobite  en  France,  en 
invoquant  le  nom  du  Souverain  d'en  haut  et  celui  de 
Louis  XV,  roi  de  France  et  de  Navarre. 

(1)  D'après  Voltaire,  Précis  du  règne  de  Louis  XV,  in-12,  1785, 
p.  273,  Radclyffe  aurait  voulu  que  son  fils  montât  sur  l'échafaud  et 
lui  aurait  dit:  «  Mon  fils,  soyez  couvert  de  mon  sang  et  apprenez 
à  mourir  pour  vos  rois.  » 

LA   FRANC-MACONNERIE.    —   T.    I.  10 


146  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Son  cœur  fut  embaumé  et,  selon  son  désir,  porté 
près  des  restes  de  son  père  à  Dilston,  alors  que  le 
public  le  croyait  enseveli  à  Saint-Gilles,  dans  le 
Fields  ;  si  l'on  en  croit  la  tradition,  son  corps  aurait 
été  enlevé  deux  mois  plus  tard  par  M.  Walmsley  et 
transporté   à  Abbot-Stanstead,  dans  le  Hertfordshire. 

De  nos  jours,  on  n'a  pu  retrouver  aucune  trace  de  ses 
restes,  malgré  de  minutieuses  recherches  qui  furent 
faites  à  plusieurs  reprises. 


De  son  mariage  avec  la  comtesse  de  Newburg, 
Charles  Radclyffe  avait  eu  sept  enfants.  Au  moment 
de  sa  mort,  il  y  en  avait  encore  six  de  vivants,  son 
troisième  fils,  Charles,  né  en  1733,  étant  mort  le 
15  septembre  1742  à  Saint-Germain-en-Laye  (1).  Il 
laissait  deux  fils  et  quatre  filles  ;  les  trois  aînées, 
Charlotte,  Barbara  et  -Tomasina  ne  se  marièrent  pas. 
Charlotte,  qui  habita  Lille  presque  toute  sa  vie,  tou- 
chait de  Louis  XVI  en  1790  une  modeste  pension  de 
1770  livres,  en  considération  des  services  de  sa  famille. 
La  plus  jeune  de  ses  filles,  Mary,  épousa  M.  Eyre  de 
Hassop,  le  11  juin  1755.  Elle  mourut  le  27  août  1798  à 

(l)Etat  civil  de  Saint-Germain.  «  Le  mercredy  douzième  septembre 
1742  le  corps  de  Messire  Charles  Rallif,  fils  de  Messire  Charles 
Rallif  {sic),  comte  de  Derwentwater,  et  de  dame  Charlotte  Lewins- 
ton,  mort  le  jour  précédent,  âgé  de  9  ans,  a  été  inhumé  au  cime- 
tière, vêpres  chantées  en  présence  du  Clergé  dont  les  sieurs  Mau- 
rice Morphy  et  Louis  Guillon  prêtres  ont  signé  les  parents  et  amis 
du  défunt  Morphy  et  Guillon. 

«  La  Boissièré  de  Chambors, 

«  de  Par  paille  ; 

«  P.  S.  Grâce, 

«  D.  Flyn, 

«  Morphy  et  Guillon.  » 


CHARLES    RADCLYFFE  147 

Warkworth-Overtharpe,  près  Bandbury,  où  elle  fut 
enterrée. 

James  Bartholomew  était  né  à  Vincennes  le  23  août 
1725  (1)  et  Jacques-Clément  en  1727,  à  Rome.  Ce  der- 
nier fut  tenu  sur  les  fonts  baptismaux  par  Jacques  III 
et  la  reine  Marie-Clémentine  Sobieska. 

Après  la  mort  de  Charles  Radclyffe,  ses  biens  furent 
spoliés  par  la  couronne,  au  profit  de  l'Hôpital  Royal 
des  Marins  Invalides  de  Greenwich.  La  valeur  de  ces 
propriétés  en  1816  ne  représentait  pas  un  revenu  de 
moins  de  43.487  £  (1.100.000  fr.),  sans  compter  la 
valeur  des  mines. 

L'héritier  de  Charles,  James  Bartholomew,  3e  comte 
de  Newburg,  du  chef  de  sa  mère,  épousa  Barbara 
Kemp  (1720-12  septembre  1797),  de  laquelle  il  eut  un 
fils,  Antony  James,  4e  comte  de  Newburgh,  né  en 
Angleterre,  le  20  juin  1757,  et  qui  mourut  en  1814, 
sans  postérité.  Il  avait  épousé  le  30  juin  1789  Anne 
Webb,  née  en  1761,  et  qui  mourut  centenaire  en  1861. 
James  Bartholomew  était  mort  le  2  janvier  1786. 

La  vie  de  James  Bartholomew  se  passa  paisiblement, 
et  il  ne  semble  s'être  mêlé  en  aucune  façon  à  la  poli- 
tique. Il  n'avait  comme  fortune  personnelle  que 
24.000  £  (625.000  fr.)  qui  lui  furent  restitués  en  1749 
par  Georges  II,  pour  ses  terres  de  Derwentwater. 

(1)  Mairie  de  Vincennes.  Etat  civil,  paroisse  Notre-Dame  de  la 
Pissotte  :  «  Le  samedy  vingt  cinq  d'aoust  1725  fut  baptisé  un  fils  né 
le  vint  trois  dud  mois  et  nommé  Jacques  fils  de  haut  et  puissant 
seigneur  Messire  Charles  Radclyffe  et  de  Dame  Charlotte  Levinston 
née  comtesse  de  Newbrugh  son  épouse,  le  parein  Jacques  trois 
Roy  d'Angleterre,  représenté  par  Jean  comte  de  Middleton,  la 
maraine  Catherine  Brudchel,  comtesse  douairière  de  Middleton, 
représentée  par  mademoiselle  françoise  Clifford,  fille  de  feu 
Monsieur  Thomas  Clifford. 

«  Le  comte  de  Middleton, 
«  Françoise  Clifford.  » 


148  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Jacques-Clément  eut  une  vie  plus  aventureuse.  S'il 
faut  en  croire  une  note  sans  date  (1)  entièrement  de 
sa  main,  qui  figure  aux  archives  du  ministère  de  la 
guerre,  c'est  lui  et  non  son  frère  aîné  qui  aurait  été  pris 
avec  son  père  en  1745  par  la  Sheerness. 

Nous  donnons  in  extenso  cette  note  particulièrement 
intéressante  : 

Le  comte  de  RadclyfTe  Derwentwater  est  arrière-petit-fils 
de  Charles,  second  roi  d'Angleterre,  ainsi  que  les  ducs  de 
Richmond,  de  Grafton,  de  Claveland  et  de  St-Albans,  ses 
cousins.  Le  duc  de  Montagu,  les  comtes  de  Newburg,  de 
Cardigan,  de  Berkley(2),  d'Albermale,  de  Waldegrave,  le 
lord  baron  de  Belless,  le  prince  de  Guistiniani,  sont  ses 
frères,  oncles  ou  cousins  ou  neveux. 

Les  deux  comtes  de  Derwentwater,  son  père  et  son  oncle 
ajrant  armé  en  1715  pour  la  maison  de  Stuart,  eurent  le 
malheur  d'être  pris  à  Preston,  ville  du  duché  de  Lancastre. 
Son  oncle  périt  sur  un  échafaud  en  février  1716  et  son  frère, 
qui  échappa  alors  par  la  fuite  à  la  mort  à  laquelle  il  avait 
été  condamné,  la  retrouva  sur  le  même  échafaud  dans  l'en- 
treprise d'Ecosse,  sous  le  prince  Edouard  que  la  France 
favorisait. 

Voici  ses  dernières  paroles,  le  8  décembre  1746  :  Je  meurs 
avec  les  sentiments  d'amour  et  de  respect  pour  le  Roy  de 
France  Louis  le  bien-aimé,  titre  glorieux,  je  recommande  à 
Sa  Majesté  ma  chère  famille. 

Le  baron  eut  alors  la  bonté  d'accorder  le  brevet  du  colo- 
nel au  comte  de  Radclyffe  et  une  pension  de  1500  fr.  à 
chacune  de  ses  trois  sœurs.  Il  sert  au  régiment  de  Dillon 
depuis  le  21  septembre  1741  et  s'est  trouvé  dans  toutes  les 
batailles,  affaires  et  sièges  avec  ses  drapeaux.  Il  fut  pris  en 
1745  avec  son  père,  en  mer,  et  après  avoir  essuyé  les  traite- 
ments les  plus  durs,  enfermé  dans  la  tour  de  Londres  où  il 
éprouva  une  longue  captivité.  Après  le  supplice  de  son 

(1)  Cette  note  doit  remonter  à  1786,  car  elle  mentionne  comme 
vieux  de  3  ans  le  bill  de  restitution  de  1783  (proposition  Dundas). 

(2)  Berkley  figure  comme  signataire  de  la  Patente  du  Chapitre 
d'Arras . 


CHARLES    RADCLYFFE  119 

père,  le  Parlement  de  la  Grande-Bretagne  confisqua  au 
profit  de  l'Hôtel  des  Invalides  Matelots,  les  terres  de  sa 
maison,  estimées  alors  à  300  et  quelques  mille  livres  de 
rente  et  a  la  jouissance  desquelles  son  père  aurait  pu  parve- 
nir s'il  eut  voulu  renoncer  à  sa  fidélité  pour  son  légitime 
souverain.  De  cette  confiscation,  le  Parlement  retira 
24.000  C  qu'il  rendit  au  comte  de  Newburg,  frère  aîné  du 
comte  de  Radelyffe,  et  faute  d'héritiers  du  comte  de  New- 
burgh,  le  comte  de  Radelyffe  était  appelé  à  cette  succession. 
Il  n'y  a  pas  3  ans  que  le  parlement  de  la  Grande-Bretagne  a 
fait  une  loi  pour  rappeler  ses  sujets  de  la  Grande-Bretagne 
qui  sont  au  service  de  la  France,  et  qui  rend  ceux  qui 
n'obéissent  point,  déchus  de  leurs  droits  d'héritage  et  pros- 
crits comme  criminels  de  lèse  Majesté.  Il  a  fait  avec  joie  ce 
nouveau  sacrifice  et  s'est  exposé  à  tout  événement.  Cepen- 
dant, dans  la  dernière  promotion  il  a  été  oublié  dans  le 
nombre  des  Brigadiers  et  quoique  plusieurs  de  ses  cadets  y 
aient  été  compris,  il  espère  de  la  bonté  du  Roi,  son  bienfai- 
teur personnel,  et  celui  de  sa  famille,  que  tant  de  sang 
répandu,  tant  de  biens  abandonnés,  et  tant  d'attachement  et 
de  fidélité,  pour  son  service,  lui  feront  obtenir  le  grade  qu'il 
croit  être  dû  à  ses  services.  Le  comte  de  Radelyffe  n'a 
d'autres  biens  sur  la  terre  que  son  épée.  Il  a  même  sacrifié 
jusqu'à  ses  espérances,  à  celles  dont  il  se  flattait  au  service 
du  Roi.  S'il  les  perd,  il  se  trouve  sans  biens,  sans  patrie, 
sans  état. 

La  reine  d'Espagne,  par  bonté  pour  la  comtesse  de 
Mahoni,  sœur  du  comte  de  Radelyffe  et  veuve  du  comte  de 
Mahoni,  lieutenant  général  au  service  de  Naples,  a  bien 
voulu  le  recommander  à  Madame  la  Dauphine  en  mai  1752. 

Il  espère  que  M.  le  maréchal  (de  Belle-Isle  ?)  voudra  bien 
enfin  le  servir  auprès  de  Sa  Majesté  pour  lui  faire  obtenir 
sa  demande. 

Voici  quels  furent  ses  états  de  service  : 

21  septembre  1741,  enseigne  au  régiment  de   Dillon. 

25  mai  1744,  capitaine  réformé. 

3  janvier  1747,  rang  de  colonel. 

20  février  1761,  brigadier. 

3  janvier  1770,  maréchal  de  camp. 


150  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Il  fut  réformé  en  1784  (Roussel,  p.  84). 

Le  22  décembre    1747  il  avait  été  particulièrement 

recommandé  à  d'Argenson  par  le  comte  de  Clermont, 

G.*.  M.*,  de  la  f.'.-m.*.  Nous  reproduisons  la  lettre   de 

ce  prince  qui  se  trouve  aux  archives  du  ministère  de 

la  guerre. 

Après  la  mort  de  milord  Derwe  ntwater,  Monsieur,  le  roy 
jugea  à  propos  de  donner  à  M.  Radclyffe  son  second  fils,  la 
commission  de  colonel  et  les  appointements.  Il  avait  alors 
la  commission  de  capitaine  et  les  appointements  à  la  suite 
du  régiment  de  Dillon,  ce  qui  luy  faisait  en  tout  mille  écus 
de  revenu,  qui  est  toute  sa  fortune.  Aujourd'hui  il  se  trouve 
diminué  tout  d'un  coup  de  près  de  la  moitié  par  la  résolu- 
tion que  le  Roy  a  prise  de  ne  point  donner  de  doubles  appoin- 
tements. Mais  comme  l'intention  de  S.  M.  n'est  pas  de  lui 
retrancher  cette  petite  augmentation  de  fortune  qu'elle  avait 
bien  voulu  luy  faire,  en  considération  de  la  perte  de  son 
père,  il  demande  que  ses  appointements  de  colonel  lui 
soient  conservés  en  pension.  Il  ne  nuira  pas  à  l'arrange- 
ment général  que  le  Roy  a  pris  et  il  jouira  toujours  des 
mêmes  bontés  dont  S.  M.  l'avait  jugé  digne  par  sa  situation. 
J'ajouterai  que  par  rapporta  luy-même  il  mérite  beaucoup. 
Il  a  été  mon  aide  de  camp  la  campagne  dernière  et  j'ay  eu 
lieu  d'être  extrêmement  content  de  son  aplication  à  son 
devoir  et  de  l'envie  qu'il  a  de  bien  faire.  Je  vous  prie  d'avoir 
égard  à  ses  raisons,  qui  me  paraissent  très  raisonnables,  et 
à  la  recommendation  très  pressante  que  j'y  ajoute.  Vous 
connaissez,  Monsieur,  l'amitié  sincère  que  je  vous  ai  vouée. 

Louis  de  Bourbon. 

En  1789  il  touchait  de  Louis  XVI  une  pension  de 
3.456  fr.  (2.456  fr.  (1748  et  1760),  y  compris  456  fr. 
d'intérêts  d'arrérages  en  considération  de  ses  services 
et  1.000  fr.  en  1770  pour  les  mêmes  causes). 

Il  était  chevalier  de  Saint-Louis  du  30  janvier 
1757  (1). 

(1)  Brevet  expédié  par  le  comte  de  la  Serre,  maréchal  de  camp, 
le  19  janvier  1757. 


CHARLES    RADCLYFFE  151 

Jacques-Clément  ne  s'étant  pas  marié,  il  n'y  avait 
plus  de  représentants  mâles  de  cette  famille  (1).  La 
pairie  passa  dans  la  famille  ClifTort. 

(1)  Le  27  septembre  1856,  on  communiqua  le  dossier  Radclyffe 
au  marquis  Bauduini  Giustiniani.  La  descendance  de  Charles 
Radclyffe  est  aujourd'hui  représentée  en  Angleterre  par  Charles 
StephenM.  Leslie,  descendant  par  les  Eyre  de  Mary  Radclyffe,  fille 
de  Charles.  M.  Leslie  possède  à  Slindon  et  à  Hassop  l'épée  ma- 
çonnique de  Charles  et  le  linge  sanglant  qui  reçut  sa  tête.  Les 
James  Radclyffe  sont  représentés  par  lord  Petre,  ainsi  que  nous 
lavons  indiqué  plus  haut. 


CHAPITRE    V 
LES  DÉBUTS  DE  LA  F.-.-M.'.  EN  FRANCE 

Les  maîtres  de  loges.  —  Le  recrutement.  —  Les  loges  de  Paris  de 
1726  à  1771.  —  Statuts  particuliers.  —  Les  grands  maîtres 
français  :  le  duc  d'Antin,  le  comte  de  Clermont.  —  La  G.'.  L.\ 
anglaise  de  France.  —  La  G.*.  L.'.  de  France. —  Les  substituts  : 
Baur,  Lacorne  et  Chaillon  de  Jorville.  —  Beauchaine.  —  La 
patente  d'Etienne  Morin.  —  Les  frères  ennemis.  —  La  papauté 
et  la  f.'.-m.'. 

Les  deux  sources  maçonniques  qui  avaient  submergé 
l'Angleterre  devaient  également  inonder  la  France,  où 
le  courant  jacobite  avait  été  accueilli  sans  méfiance, 
voire  même  avec  sympathie,  alors  qu'il  n'en  était  pas 
de  même  de  la  f.\  m.*,  anglaise  (1). 

Le  développement  fut  pénible  ;  l'esprit  français  n'ad- 
mettait pas  volontiers  les  règles  précises  de  discipline 
qui  avaient  assuré  le  triomphe  de  l'ordre  en  Angleterre, 
et  jusqu'à  l'installation  du  G.*.  0.*.  en  1773,  l'organi- 
sation maçonnique  française  fut  une  véritable  foire, 
où  chacun  dans  sa  loge  faisait  ce  qui  lui  plaisait,  ne 
retenant  de  la  réglementation  anglaise  que  les  céré- 
monies initiatiques,  dont  il  ne  comprenait  pas  le 
symbolisme,  et  les  réunions  gaies,  suivies  de  banquets 
souvent  tumultueux.  Chaque  maître  de  loge  avait  sa 
tradition,  sa  légende  adamique,  hiramique  ou  templière, 
sans   compter  les  variantes.  Trois   maîtres    de    loge, 

(1)  Nous  désignerons  à  l'avenir  ces  deux  espèce  de  sociétés  sous 
les  noms  de  maçonnerie  jacobite  et  de  maçonnerie  anglaise. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  IV.-M.\  EN  FRANCE     153 

moyennant  finance,  en  initiaient  un   quatrième  et  l'au- 
torisaient  à  ouvrir  un  atelier  (1). 

La  plupart  étaient  des  tenanciers  de  cabarets  ;  s'ils 
ne  versaient  pas  à  boire,  ils  avançaient  les  fonds  et 
recueillaient  les  profits. 

Dans  ces  réunions,  on  s'affublait  de  multiples  rubans, 
plus  ou  moins  brodés,  agrémentés  de  bijoux  variés  ; 
on  s'appelait  frère  et  l'on  portait  des  santés.  Il  ne  semble 
pas  qu'on  y  ait  beaucoup  causé  philosophie,  politique 
ou  religion,  et  c'est  assurément  ce  qu'on  avait  de 
mieux  à  faire.  A  peine  quelques  zélés,  par-ci  par-là, 
initiés  en  Angleterre  ou  possesseurs  de  documents 
anglais,  parlaient-ils  dans  quelques  coins  du  Grand 
Œuvre,  mais  la  plupart  n'avaient  nul  souci  de  ces 
graves  questions. 

On  inventait  de  nouveaux  grades,  de  nouvelles  ori- 
gines, de  plus  en  plus  anciennes  et  de  plus  en  plus  extraor- 
dinaires. Tout  cela  faisait  joyeusement  passer  le  temps. 
Aux  loges  proprement  dites  étaient  accouplées  souvent 
des  loges  de  Fendeurs  ou  de  Félicitaires,  dans  lesquelles 
la  police  des  mœurs  aurait  pu  intervenir  ;  car  à  côté 
des  joyeux  compagnons  se  glissaient  les  vicieux  de 
toutes  catégories,  et  à  côté  de  l'innocent  maçon,  le 
diable  faisait  bien  de  temps  en  temps  quelque  bonne 
recrue.  Si  l'on  rencontre  parfois  les  grands  seigneurs 


(1)  «  Another  charge  is,  that  the  Lodges  were  proprietary, 
presided  over  by  irremovable  masters  who  had  bought  their 
patents,  and  in  orderto  make  a  profit  out  of  them,  initiated  every 
applicant  however  unworthy  that  this  may  hâve  happened  in 
some  few  cases,  especially  where  the  Master  was  innkceper,  I  am 
not  prepared  to  deny  ;  the  taunts  of  some  of  the  contemporary 
so  called  exposures  would  almost  imply  as  much  ;  but  conside- 
ring  how  many  high  names  were  enrolled  in  the  Craft  at  this 
période,  I  cannot  imagine  that  the  evil  was  of  intolérable  extent.  » 
Gonld  III,  143. 


154       LA  FRANC -MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

parmi  ceux  qui  fréquentaient  les  loges  et  trouvaient 
élégant  de  «  s'encanailler  »,  le  plus  grand  nombre 
des  maçons  était  recruté  dans  la  petite  bourgeoisie 
et  le  petit  commerce.  A  part  quelques  loges  élégantes 
que  nous  signalerons  en  leur  temps,  à  part  surtout 
les  loges  de  régiments,  qui  ne  prirent  un  certain 
essor  qu'à  partir  de  1760,  les  loges  réunissaient  des 
gens  de  peu,  comme  on  disait  alors  ;  les  loges  écos- 
saises étaient  en  général  mieux  fréquentées. 

A  part  les  ducs  de  Richemond,  de  Luxembourg 
et  d'Aumont,  les  comtes  de  Noailles,  de  Choiseul  et  de 
Tessé,  et  l'architecte  de  Puiseux,  parmi  les  maîtres 
de  loges  on  ne  trouve  que  de  tout  petits  commerçants. 
La  G.*.  L.\  qui  était  censée  gouverner  tout  ce  monde 
turbulent,  était  à  vrai  dire  plus  aristocratiquement 
composée,  et  la  plupart  de  ses  membres  tenaient  loge 
chez  l'un  d'eux.  On  jouait  à  la  maçonnerie  comme  on 
allait  chez  Ramponneau  ou  au  Soleil  d'Or.  Pendant  que 
la  duchesse  de  Portsmouth  battait  maillet  en  bonne 
compagnie,  dans  son  hôtel,  à  Paris,  ou  dans  son  châ- 
teau d'Aubigny  ;  pendant  que  le  duc  d'Aumont  pontifiait 
dans  la  loge  qui  porta  son  nom,  avec  les  Luxembourg 
et  les  Noailles,  le  plus  grand  nombre  allait  se  divertir 
chez  Chapelot  à  la  Râpée,  chez  Leroy  rue  Saint-Ger- 
main-1'Auxerrois,  ou  chez  Landelle  rue  de  Buci.  Que 
n'en  fut-il  pas  toujours  de  même  ! 

Aussi  les  historiens  f.\-m.\  font-ils  le  silence  sur 
toute  cette  période  du  développement  de  leur  ordre.  A 
force  de  se  taire,  ils  ont  fini  par  oublier  les  faits  et 
gestes  de  leurs  ancêtres,  dont  ils  savent  si  vaguement 
les  noms  des  plus  importants  d'entre  eux,  que  nous 
avons  vu  que,  dès  1770,  ils  donnaient  à  lord  Der- 
wentwaterle  nom  de  lord  Harnouester  dont  les  f.'.-m.  . 
font,   aujourd'hui   encore,     le     second    Grand    Maitre 


LES  DÉBUTS  DE  LA  I\\-M.\  EN  FRANCK     1 55 

de  l'ordre  en  France.  Ils  ignorent,  en  effet,  à  ce  point 
leur  histoire  que  le  plus  savant  d'entre  eux,  Daruty, 
parvient  à  grand'peine  à  signaler  l'existence  de  24  loges 
parisiennes  et  199  loges  provinciales  avant  la  mort  du 
comte  de  Clermont  (16  juin  1771). 

Or,  des  recherches  heureuses  m'ont  permis  de 
dresser  une  liste  de  154  loges  parisiennes,  de  donner 
le  titre  de  146  d'entre  elles,  et  d'en  désigner  huit  autres 
par  le  nom  de  leurs  vénérables  ;  j'ai  déterminé  d'autre 
part  322  loges  provinciales  et  21  loges  de  régiment.  Mes 
listes  cependant  sont  certainement  incomplètes,  car  en 
1744,  par  exemple,  il  y  avait,  d'après  divers  auteurs,  22 
loges  à  Paris,  et  je  n'ai  pu  en  dénommer  que  dix.  Beau- 
coup de  loges,  il  est  vrai,  ont  dû  avoir  des  existences 
éphémères,  irrégulières.  Tel  groupement  était  ortho- 
doxe pour  tel  maçon  et  ne  Tétait  pas  pour  tel  autre. 

On  pourra  juger  de  la  composition  des  loges  pari- 
siennes par  la  liste  que  nous  donnons  ci-dessous,  dans 
laquelle  nous  avons  pris  soin  de  marquer  d'une  *  les 
loges  signalées  par  Daruty. 

1726-1735 

1*  Saint-Thomas,   n°    1,    renouvelé    le  3 

avril  1732 12  juin  1726. 

2*  Loge  de   Coastown,   (Goustaudj  (1).     .  —     1726. 

3  Saint-Louis  d'argent,    dite  Saint-Tho- 

mas,   II,  Lebreton 7  mai  1729. 

4  Saint-Martin,    Peny   père 7  mai  1729. 

5*  Les  Arts  Sainte-Marguerite 15  décembre  1729. 

6     Saint-Pierre-Saint-Paul,     Puisieux.  —  1729. 

7*  Loge  de  Bussy    (Aumont) —  1735. 

1743-1749 

8*  Concorde,  renouvelée  le  21  mars  1764     27  décembre  1743. 

(1)  Le  nom  qui  suit  le  titre  distinctif  de  la  loge  est  celui  de  son 
vénérable  maître  qui  servait  souvent  à  désigner  la  loge.  On  disait 
également  :  L'Union  ou  la  loge  de  Duret  ;  Saint-Martin  ou  la  loge 
de  Peny,  etc. 


156  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN  FRANCE 

9     Union,  Duret 16  mai   1744. 

10     Saint-Thomas,   III,    Decourt.     ...  29  septembre  1744. 

11*  La  chambre   du  Roi 20  octobre  1745. 

12  Saint-Jean-Baptiste,    Coûteux      ...  17  mai  1746. 

13  Saint-André,  I,  Gautelme 1er  février  1747. 

14  Saint-Simon-Saint-Marcel,  Liégeois     .  8  février  1748. 

15  La  Magdelaine,  Léveillé 10  mars  1749. 

16  Cœurs  réunis,  Antin 10  avril  1749. 

17  Saint-Fidèle,  Buquet 25  octobre  1749. 

17501755 

18  Paix  Immortelle,  Paris 25  octobre  1750. 

19  Saint-Jean  des  amis  de  la  vérité,  Jour- 

nalles 24  novembre  1750. 

20  Vérité,  Leru. —  1750. 

21  Bon  Zèle,  Borel 17  janvier  1751. 

22  Saint-Philippe,  comte  de   Noailles.     .  24  février  1751. 
23*  Saint-Julien  de  la  Tranquillité.    ...  25  avril  1751. 

24  Saint- Jean  de  Luxembourg,  Potel.   .     .  —     1751. 

25  Constante  vérité 27  décembre  1751. 

26  Saint- Jean  de  la  discrétion avant  1751. 

27  Saint- Jean  de  la  Triple  Unité.     .     .     .  avant  1751. 

28  Trinité,  I,   Pirlet 25  mars  1752. 

29  Secret,  Moët 27  septembre  1753. 

30  Vrais  amis,  I,  Clément 27  décembre  1753. 

31  Saint-Louis  des  cœurs  unis  par    excel- 

lence, Boitel 4  juillet  1754. 

32  Saint-François,  Guillot 15  décembre  1754. 

33  Discrétion,  Doyère 15  décembre  1754. 

34  Charité,  Maguet 15  décembre  1754. 

35  Saint-Prudent,   Robineau 27  avril  1755. 

36  Egalité,  Dessenis 29  novembre  1755. 

1756-1759 

37  Sincérité  de   Saint-Jean,  La  Valnierre.  17  janvier  1756. 

38  Saint-André,  II,    Thibault 25  janvier  1756. 

39*  Le  Bon  Zèle,  II 7  janvier  1757. 

40  Saint-Frédéric,  Martin 11   mai  1757. 

41  Union  des  parfaits  élus,   Hardy.     .     .  24  juillet  1757. 

42  Bons  citoj'ens,   Soisson 21  décembre  1757. 

43  Persévérance,  Servant 21  décembre  1757. 

44  Vrais  amis,  II,  Molet 27  décembre  1757. 

45  Saint-Remi,  Herbin 27  décembre  1757. 

46  Fête  de  la  G.  L.  et  Trinité,  Perault.     .  16  avril  1758. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  P.*. -M.*.  EN  FRANCE     157 

47  Saint-Louis  des  Croisades,  Danthiaux.     27  juillet  17158. 

48  Parfaite    Tempérance,   Lexcombart.     .     17  décembre  1758. 

49  Saint-Etienne  des  frères  unis,  Guillet  .  24  décembre  175H. 
50*  Sainte-Geneviève,  Ledin 24  décembre  1758. 

51  Sagesse  des  parfaits  maçons, Du  Houssoy.  17  janvier  1759. 

52  Satisfaits * 18  février  1759 

53  Saint-Nicolas  des  deux  amis,  Poulet.     .  19  février  1759. 

54  Bonnes  Mœurs,  Gilet 19  février  1759. 

1760-1764 

55*  Saint-Alphonse  des  amis  parfaits  de  la 

vertu 23  mars  1760. 

56  Frères  choisis,   Guainaud 23  mars  1760. 

57  Saint-Pierre  de  la  Bonne  Foi,  Brunet  .  20  avril  1760. 

58  Bonne  Intelligence,  Pettre 10  novembre  1760. 

59*  Saint- Louis  de  la  Martinique    des  frè- 
res   réunis 11  janvier  1761. 

60*  La  noble  et  parfaite  Union 15  juin  1761. 

61  Trinité  dite  Egalité,    Tardieu.     ...  25  octobre  1761. 

62  Sainte-Claude    fille    de    Saint-Martin, 

Magnien 10  janvier  1762. 

63  Bonne  foi  primitive,  Lemonnier.     .     .  25  janvier  1762. 
64*  Saint- Joseph  de  la  Franchise.     ...  10  mars  1762. 
65*  Cœurs  simples  de    l'Etoile   Polaire.     .       3  avril  1762. 

66  Saint-Charles,    Bigarré 31  mai  1762. 

67  Enfants  de  la  Gloire,  comte  de  Choiseul.  28  octobre  1762. 

68  Saint-Clément   Saint-Charles,  Maurui.  12  décembre  1762. 

69  Saint-Louis  les  inséparables,  Xerckove.  24  septembre  1763. 
70*  Saint-Charles  des  amis  réunis     ...  24  décembre  1763. 
71     Saint-Antoine  de   la   Franche   Liberté, 

Borel 9  février  1764. 

72*  Saint-Pierre   du  parfait  accord  ...       4  novembre  1764. 

1765-1769 

73*  Les  Amis  de  la  vertu 21  mars  1765. 

74*  Les  Cœurs  unis 7  mai  1765. 

75*  David 12  décembre  1765. 

76     Humilité  des  bons  citoyens,  Lauguet.  27  décembre  1765. 

77*  Saint-Lazare 30  mars  1766. 

78*  Etoile  Polaire 17  mai  1766. 

79  Gerbe  dite  la  Providence,  Dujy.     .     .       3  juin  1766. 

80  Union  sincère,   Saulnier 3  juin  1766. 

81  Socratede  la  parfaite  union,  Bourgeois.  17  juillet  1766. 

82  Saint-Antoine  de  la  discrétion,  Poussart.  25  novembre  1766. 


158  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

83  Sagesse,  Saint-Edme,  Saint-Louis   des 

amis  réunis,    Vallée 4  février  1767. 

84  Saint-Jean  de  la  Fidélité,  Tricot     .     .  10  mai  1767. 

85  Saint- Prudent   dite  Egalité,    Regnard.  21  juin  1767. 

86  La  Vertu  et  l'Union  parfaite  de   Saint- 

Simon      4  juillet  1767. 

87*  Union  parfaite  delà  Persévérance.  .     .  15  janvier  1768. 

88  Bonne  Foi,  Blain 1er  avril  1768. 

89  Bons  Frères  réunis,  Sellier 1er  mai  1768. 

90*  Saint-Pierre  des  vrais  frères.     ...  24  juillet  1768. 

91  Saint-Henri,  Saint-Martin,    Pény    fils.     11  juin  1769. 

92  Saint-Joseph ,    fille    de     Saint-Etienne 

Cornut 11  juin  1769. 

93  Saint-Spire,   Saint-Martin    des  Frères 

de  l'aimable  Union,  Leroy.     ...     11  juin  1769. 

1771 

94  Saint-Simon,  patriarche  de  Jérusalem, 

Hamet 11  février  1771. 

95  Saint-Jacques    des  parfaits    chevaliers 

de  l'ordre,   Fouquet 7  mars  1771. 

96  Saint-Charles  des  frères   de  la   bonne 

union,  Labet 7  mars  1771. 

97*  Les  Amis  réunis 23  avril  1771. 

Loges  dont  le  titre  n'a  pu  être  retrouvé. 

98  Vén.  Duc   d'Enghien    (comte  de  Cler- 

mont  ?) 3  décembre  1750. 

99  Leclerc —        1751. 

100  Comte  de  Tessé 19  février  1759. 

101  Dansse 20  novembre  1760. 

102  Montroye —         1766. 

103  Chaudron entre  1767  et  1771. 

104  Gourlin entre  1767  et  1771. 

105  Detelleur entre  1767  et  1771. 

Sur  divers  brevets  j'ai  relevé  les  loges  suivantes  qui 
existaient  entre  les  années  1760  et  1766. 

106  La  Constance,  Vén.  chev.  de  Beauchaine. 

107  L'Intelligence,  prince  Camille  de  Rohan. 

108  Saint-Antoine,  Chaillon  de  Jonville. 

109  La  Trinité,  II,  La  Corne. 

110  La  Vertu,  Le  Boucher  de  Lenoncourt. 


LES    DÉBUTS    DE    LA    F.'. -M.'.    EN    FRANCE  159 

111  L'Exactitude,  Brest  de  la  Chaussée. 

112  Saint-Alphonse,  Daubertin. 

113  La  parfaite  Harmonie  (?),  Etienne  Morin. 

114  La  Constance  et  l'Amitié,  le  chev.  de  Beauchaine. 

115  Saint-André,  III,  Percheron. 

116  La  Candeur,  I,  Drothier. 

117  La  Sincérité,  Dutertre. 

118  Les    Inébranlables   Chevaliers    de   l'Epée    et    du   Mérite    de 
France,   Pollett. 

119  Saint -Jean  de  Jérusalem. 

120  Sciences. 

121  La  Sagesse,  Lucet. 

122  Triangle  lumineux. 

Enfin  j'ai   constaté    l'existence  des  loges  suivantes 
sans  pouvoir  déterminer  les  dates  de  leur  constitution  : 

123  Coeurs  simples. 

124  Désir. 

125  Double  intimité. 

126  Heureuse  sympathie. 

127  Notre-Dame  de  Bon  Secours. 

128  Paix. 

120  Philanthropie. 

130  Réunion  de  Saint-Martin. 

131  Saint- Antoine  des  parfaits  chevaliers  d'Orient  réunis. 

132  Saint -Antoine  de  la  perfection. 

133  Saint-Augustin  dit  les  frères  chevaliers  de  Minerve. 

134  Saint-Charles  de  la  parfaite  espérance. 

135  Saint-Claude  de  la  famille  unie. 

136  Saint-Etienne  de  la  persévérance. 

137  Saint-François  de  la  parfaite  union. 

138  Saint-Georges. 

139  Sainte-Hélène  et  Saint-Louis  réunis. 

140  Saint-Hilaire. 

141  Saint-Jacques  des  amis  intimes. 

142  Saint-Jacques  de  la  paix  immortelle. 

143  Saint- Jean  de  la  sincérité. 

144  Saint- Joachim. 

145  Saint-Louis  de  bon   accord. 

146  Saint-Louis  de  la  discrétion. 

147  Saint-Mathieu  de  la  parfaite  unité. 

148  Saint-Nicolas  de  la  constance  éprouvée. 

149  Saint-Pierre  des  amis  indissolubles. 

150  Saint-Ré my  des  vrais  frères  réunis. 


160  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

151  Saint-Simon  de  la  bienfaisance. 

152  Union  des  bons  enfants. 

153  Union  parfaite  de  Saint-Jean  de  la  Porte  latine. 

154  Union  des  Sept  Frères. 

(Il  est  possible  que  quelques-unes  des  loges  de  cette 
dernière  catégorie  fassent  double  emploi  avec  les 
nos  98  à  105.) 

Par  qui  était  gouverné  tout  ce  monde  agité  ?  A  la 
tête  de  la  f.*.-m.\  française  nous  voyons  succéder  à  lord 
Derwentwater,  non  pas  comme  membres  actifs,  mais 
comme  insignes  protecteurs,  deux  personnalités  plutôt 
amusantes  que  dramatiques  :  le  duc  d'Antin  et  le 
comte  de  Clermont,  bien  faits  l'un  et  l'autre  pour  com- 
mander aux  disciples  de  Bacchus  et  pour  présider  à 
l'embarquement  pour  Gythère.  Il  ne  faudrait  cependant 
pas  prendre  trop  au  tragique  leurs  vices  qui  n'étaient 
pas  plus  accentués  que  ceux  des  gens  de  leur  époque 
ou  de  la  nôtre,  et  l'on  ne  sait  vraiment  si  l'on  doit  rire 
ou  prendre  au  sérieux  les  statuts  reproduits  dans  l'his- 
toire des  f.vm.*.  de  la  Tierce  et  que  cet  écrivain 
fervent  de  maçonnerie  déclare  être  spéciaux  pour  la 
France  (I,  174). 

I.  —  Nul  ne  sera  reçu  dans  Tordre,  qu'il  n'ait  promis  et 
juré  un  attachement  inviolable  pour  la  religion,  le  roi  et 
les  mœurs  ; 

II.  —  Tout  brocanteur  en  incrédulité,  qui  aura  parlé  ou 
écrit  contre  les  sacrés  dogmes  de  l'ancienne  foi  des  Croisés, 
sera  exclu  à  jamais  de  l'ordre,  à  moins  qu'il  n'abjure  ses 
blasphèmes  en  pleine  assemblée  et  qu'il  ne  fasse  une  répu- 
diation de  ses  ouvrages  ; 

III.  — Nul  homme  suspect  de  vices  infâmes  et  dénaturés 
ne  sera  admis,  qu'après  avoir  donné  pendant  trois  ans  des 
preuves  éclatantes  de  son  innocence  et  de  son  respect  pour 
le  beau  sexe  ; 

IV.  —  Tout  homme  qui  place  la  félicité  à  boire,  manger 


LES  DÉBUTS  DE  LA  I  .'.-M*.  EN  FRANCE     1()1 

et  dormir,  et  la  perfection  de  l'esprit  à  jouer,  chasser,  badi- 
ner, savoir  l'histoire  des  toilettes,  parler  le  langage  des 
ruelles  et  ne  lire  que  des  ouvrages  frivoles  est  incapable 
d'entrer  dans  l'ordre  ; 

V.  —  Tout  petit  maître,  idolâtre  de  sa  personne,  de  son 
toupet  et  de  ses  ajustements  sera  obligé  en  entrant  dans 
Tordre  de  s'habiller  simplement,  sans  galon,  sans  broderie, 
sans  frange  et  sans  parure  femelle,  pendant  l'espace  de  trois 
ans  ; 

VI.  —  Nul  hypocrite  en  probité,  en  valeur,  en  dévotion, 
ni  en  morale  sévère  ne  pourra  être  admis  dans  la  sacrée 
confraternité  ; 

VII.  —  Tout  savant  qu'on  recevra  dans  l'ordre  sera 
tenu  de  promettre  qu'il  préférera  à  l'avenir  le  plaisir  de 
savoir  à  l'envie  de  briller,  qu'il  tâchera  d'avoir  le  beau  dans 
la  tête  et  le  bon  dans  le  cœur  et  qu'il  ne  montrera  jamais  l'un 
que  pour  faire  aimer  l'autre  ; 

VIII.  —  Nul  bel  esprit  qui  aura  médit,  calomnié,  satirisé 
en  vers  ou  en  prose,  et  dépensé  ses  talents  en  faux  frais,  en 
sornettes  obscènes  ou  impies,  ne  sera  reçu  qu'après  avoir 
fait  un  ouvrage  contre  sa  propre  impertinence. 

Et,  ajoute  la  Tierce,  ces  statuts  sont  exprimés  en  des 
termes  tout  à  fait  propres  pour  le  pays  où  ils  doivent  être 
observés,  sans  cependant  rien  renfermer  qui  répugne  aux 
obligations  générales  et  aux  statuts  en  usage  de  toute  anti- 
quité dans  les  loges  répandues  sur  la  surface  de  la  terre. 
Ce  qui  est  une  nouvelle  preuve  de  l'attention  de  la  vénérable 
confraternité  pour  tout  ce  qui  peut  corriger  les  défauts  et 
les  vices  du  genre  humain  selon  les  temps,  les  nations  et 
les  circonstances. 

A  la  lecture  d'un  semblable  document,  on  est  en 
droit  de  se  demander  si  l'auteur  ne  fait  pas  une  allusion 
ironique  à  tous  les  travers  qu'on  reprochait  au  duc 
d'Antin  ou  au  comte  de  Glermont,  qui  avaient  bien  des 
défauts  communs. 

On  est  d'autant  plus  en  droit  de  se  poser  la  ques- 
tion que  tous  les  documents  du  recueil  de  la  Tierce 

LA  FRANC-MACONNERIE. —  T.    I.  11 


162  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

sont  des  documents  authentiques,  y  compris  les  ori- 
gines de  la  maçonnerie.  En  la  faisant  remonter  à  Adam 
et  en  indiquant  les  loges  fondées  par  les  fils  de  Noé  et 
leurs  descendants,  il  ne  fait  que  répéter  une  fable  qui 
avait  cours,  fable  à  tout  prendre  qui  n'est  pas  plus  ri- 
dicule que  celle  d'Hiram  ou  celle  des   Templiers. 

Que  les  statuts  à  l'usage  des  Français  soient  authen- 
tiques ou  faux,  dans  les  deux  cas  ils  énumèrent  ce 
qu'on  reprochait  alors  à  nos  compatriotes  initiés  et 
justifient  mes  appréciations  antérieures  sur  la  menta- 
lité maçonnique  à  cette  époque. 

Du  reste,  les  grands  maîtres  que  se  choisissent  les 
f.  \-m.\  ne  déparèrent  pas  l'ordre,  ainsi  qu'on  va  le 
voir. 

LE    DUC    D'ANTIN. 

Louis  de  Pardaillan  de  Gondrin,  duc  d'Antin,  naquit 
le  9  novembre  1707.  Il  fut  connu  pendant  la  première 
période  de  sa  vie  sous  le  titre  de  duc  d'Epernon. 

Il  était  fils  de  Louis,  marquis  de  Gondrin  (1689-1712), 
mort  à  l'âge  de  23  ans,  après  avoir  épousé  Marie-Vic- 
torine-Sophie  de  Noailles  qui  se  remaria  avec  le  comte 
de  Toulouse  ;  il  était  le  petit-fils  de  Louis-Antoine 
(1665-1736)  et  de  Julie-Françoise  de  Crussol,  fille  du 
duc  d'Uzès.  Il  était  enfin  l'arrière-petit-fils  du  marquis 
de  Montespan  et  de  la  belle  Françoise-Athénaïs  de 
Rochechouart. 

Louis-Antoine  avait  eu  cette  bizarrerie  d'être  le  seul 
enfant  légitime  du  marquis  de  Montespan.  Cette  infor- 
tune le  suivit  toute  sa  vie,  et  à  la  cour  du  grand  roi, 
avec  l'indulgence  en  moins,  il  était  un  peu  regardé 
sinon  comme  un  bâtard,  au  moins  comme  un  in- 
trus. 

Sa  personnalité,  du   reste,  n'était  pas  sympathique. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F.  \-M.\  EN  FRANCE     163 

Médiocrement  brave,  on  avait  fort  chansonné  son  atti- 
tude à  la  bataille  de  Ramillies,  à  laquelle  il  avait  assisté 
derrière  un  buisson.  Courtisan  sans  vergogne,  il  est 
possible  cependant  que  les  histoires  des  allées  de 
marronniers  tombant  comme  par  enchantement  sur 
un  désir  exprimé  par  Louis  XIV  soient  inventées,  car 
on  n'est  pas  bien  sûr  que  l'événement  se  soit  pro- 
duit à  Petit-Bourg  ou  à  Fontainebleau.  Il  était  encore 
plus  joueur  que  courtisan,  et  ses  infortunes  au  lans- 
quenet furent  nombreuses.  Comme  on  voulait  obtenir 
pour  lui  un  poste  qu'il  désirait  vivement,  et  qu'on 
assurait  au  roi  qu'il  ne  jouerait  plus  :  «  A  la  bonne 
heure,  répondit  Louis  XIV  ;  mais  qu'est-ce  que  ça  me 
fait  que  d'Antin  joue  ou  ne  joue  plus  ?  » 

Si  d'Antin  ne  brilla  pas  à  la  guerre,  il  se  couvrit  de 
gloire  rue  Quincampoix,  et  il  fut  du  petit  nombre  des 
gens  avisés  dont  Law  fit  la  fortune. 

En  1721,  son  petit- fils,  celui  qui  devait  tenir  le 
maillet  de  Grand  Maître,  fut  nommé  gouverneur  de  l'Or- 
léanais ;  c'était  en  survivance,  car  il  n'avait  que  quatorze 
ans  ;  en  1727,  il  n'en  avait  que  vingt,  lorsqu'il  fut  mis 
à  la  tête  du  régiment  de  Royal-Marine.  Il  n'eut  pas 
l'occasion  de  prouver  son  courage.  Sa  vie  fut  assez  terne, 
et  il  semble  qu'à  part  ses  fredaines  maçonniques  (il  fut 
initié  en  1734)  il  ne  fit  guère  qu'une  conquête  dont  un 
inspecteur  de  police,  mauvaise  langue,  fut  l'historio- 
graphe. Un  jour,  paraît-il,  qu'en  Tannée  1732  il  allait 
à  la  messe  aux  Feuillants,  car  il  allait  à  la  messe,  il 
aperçut  Mlle  Elisabeth  Le  Duc  la  cadette  (1),  la  dan- 
seuse postulante  de  l'Opéra,  qu'on  appelait  l'Altesse, 
qui,  elle  aussi,  se  rendait  dévotement  aux  Feuillants  : 
«  Il  la   trouva  à   son  gré,    nous    dit  l'indiscret   poli- 

(1)  Il  ne  faut  pas  la  confondre  avec  sa  sœur  aînée  Thérèse  Le  Duc. 


164  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

cier,  la  fit  suivre  par  un  de  ses  laquais  qui  lui  proposa 
un  rendez-vous  de  la  part  de  son  maître.  La  demoiselle 
n'eut  garde  de  refuser  cette  bonne  fortune  ;  le  duc  d'E- 
pernon  soupa  avec  elle  dès  le  soir  même  ;  il  la  prit  en 
amitié  »,  et  comme  il  avait  du  crédit  à  l'Opéra,  il  la  fit 
admettre  d'autorité  dans  le  corps  de  ballet  de  l'Aca- 
démie royale.  Nous  retrouverons  Mlle  Le  Duc  chez  le 
G.*.  M.*,  successeurdu  duc  d'Antin. 

Entre  temps,  le  duc  d'Antin  avait  épousé  Géronne  de 
Montmorency-Luxembourg,  de  laquelle  il  eut  deux  filles, 
et  un  fils,  Louis  (1727-1757),  qui  mourut  sans  postérité, 
mais  en  laissant  son  nom  à  un  quartier  de  Paris. 

C'est  le  jour  de  la  fête  de  la  Saint-Jean-Baptiste,  le  24 
juin  1738,  que  le  duc  d'Antin  fut  élu  Grand  Maître  de 
la  franc-maçonnerie.  De  quel  pouvoir  tenait-il  son 
maillet  souverain  ?  D'une  loge  écossaise  ou  d'une  des 
grandes  loges  d'Angleterre  ?  Aucun  historien  n'est  fixé 
sur  ce  point.  Il  est  probable  qu'il  fut  simplement  désigné 
par  un  certain  nombre  de  loges  parisiennes,  influencées 
par  des  maçons  jacobites.  Sa  qualité  de  successeur  de 
lord  Derwentwater,  permet  de  faire  cette  hypothèse, 
la  seule  vraisemblable.  On  ne  sait  rien  de  sa  gestion. 
Les  ouvrages  maçonniques  racontent,  à  sa  louange, 
qu'il  s'opposa  bravement  à  l'entrée  du  lieutenant  de 
police  Hérault  dans  une  loge  à  la  Râpée,  malgré  les 
ordres  du  roi,  et  à  cet  acte  se  borne  l'influence  qu'il  eut 
sur  l'ordre  en  France. 

La  Tierce  signale  cependant  à  son  actif  un  acte  plus 
remarquable.  En  qualité  de  G.\M.\,  dans  une  as- 
semblée solennelle  de  la  G.\L.\  en  1740,  il  aurait 
prononcé  un  discours,  duquel  on  peut  retenir  les  pas- 
sages suivants  : 

«  ...  La  philanthropie  n'était  pas  la  base  des  répu- 
bliques de  l'antiquité.  L'amour  de  la  patrie,  mal  entendu 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F.*. -M.*.  EN  FRANCE     165 

et  poussé  à  l'excès,  détruisait  souvent,  dans  ces  répu- 
bliques guerrières,  l'amour  de  l'humanité  en  général... 
Le  monde  entier  n'est  qu'une  grande  république  dont 
chaque  nation  est  une  famille  et  chaque  particulier  un 
enfant...  »  Décidément,  le  G.*.  M." .  n'avait  pas  pour  son 
pays  un  amour  plus  intense  que  celui  témoigné  par  son 
grand-père  à  Ramillies. 

«  Nous  avons  des  secrets,  dit-il  plus  loin  ;  ce  sont 
des  signes  figuratifs  et  des  paroles  sacrées  qui  compo- 
sent un  langage  tantôt  muet,  tantôt  très  éloquent,  pour 
se  communiquer  à  la  plus  grande  distance  et  pour  re- 
connaître nos  confrères  de  quelque  langue  qu'ils  soient.  » 
Il  croit  que  c'est  l'ancien  mot  de  guerre  des  croisés  ! 

Mais  voici  qui  est  plus  grave  et  plus  symptomatique  : 
«  L'Ordre,  dit-il,  exige  de  chacun  de  vous  de  contribuer 
par  sa  protection,  par  sa  libéralité  ou  par  son  travail, 
à  un  vaste  ouvrage  auquel  nulle  académie  ne  saurait 
suffire.  Tous  les  G.'.  M.\  en  Allemagne,  en  Angleterre, 
en  Italie  et  ailleurs  exhortent  tous  les  savants  et  tous 
les  artisans  de  la  confraternité  de  s'unir  pour  fournir  les 
matériaux  d'un  dictionnaire  universel  des  arts  libéraux 
et  des  sciences  utiles,  la  théologie  et  la  politique  seuls  ex- 
ceptés. On  a  déjà  commencé  l'ouvrage  à  Londres  (1).  » 

Sous  forme  de  réclame  pour  l'Encyclopédie  bri- 
tannique, nous  voyons  réaliser  le  projet  des  habitants 
de  Bensalem,  imaginé  par  Bacon,  aussi  bien  qu'une 
nouvelle  forme  du  Dictionnaire  de  Bayle. 

(1)  Daruty,  op.  cit.,  attribue  ce  discours  à  Ramsay;  mais  ses 
arguments  ne  me  paraissent  pas  déterminants,  les  lettres  de 
Ramsay  à  Joly  de  Fleury  n'ayant  aucun  rapport  certain  avec  le 
discours  reproduit  et  pouvant  faire  allusion  à  un  discours  qui  n'au- 
rait pas  été  prononcé,  si  l'on  s'en  rapporte  à  la  note  de  Joly  de 
Fleury.  L'ouvrage  auquel  fait  allusion  le  duc  d'Antin  est  l'Ency- 
clopédie de  Chambers  publiée  à  Londres  à  partir  de  1728  sous  le 
titre  de  :  English  Cyclopedia. 


166  LA  FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Le  duc  d'Antin,  peu  après    avoir  été  nommé  maré- 
chal de  camp,  mourut  à  Paris,  le  9  décembre  1743. 
Voyons  son  successeur. 

LE   COMTE    DE  CLERMONT. 

Louis  de  Bourbon-Condé  naquit  à  Versailles,  le 
samedi  15  juin  1709,  à  4  heures  du  soir.  Il  fut  tenu  sur 
les  fonts  baptismaux  par  Louis  XV  et  par  la  duchesse 
de  Berry  le  15  novembre  1717. 

Il  était  le  troisième  fils  (1)  de  Louis  III,  duc  de  Bour- 
bon, d'Enghien,  de  Ghâteauroux,  etc.  (1710),  et  de 
Louise-Françoise  de  Bourbon,  dite  Mlle  de  Nantes,  fille 
naturelle  légitimée  de  Louis  XIV  et  de  Mme  de  Montes- 
pan. 

Louis  de  Bourbon,  comte  de  Glermont,  était  donc,  par 
Mme  de  Montespan,  arrière-grand-oncle  du  duc  d'Antin. 

Destiné  à  l'état  ecclésiastique,  il  fut  pourvu,  de  1717 
à  1733,  de  six  abbayes  qui  ne  lui  rapportaient  pas  un 
bénéfice  de  moins  de  200.000  livres  ;  il  fut  pourvu  plus 
tard  de  l'abbaye  de  Saint-Germain-des-Prés,  qui  ne 
rapportait  pas  moins  de  180.000  francs. 

Sans  être  doué  d'une  haute  intelligence,  c'était  un 
esprit  curieux  et  cultivé  ;  indulgent  pour  son  entou- 
rage, il  aimait  à  répandre  des  bienfaits  autour  de  lui, 
autant  par  faste  et  prodigalité  que  par  réelle  bonté  ;  cou- 
rageux jusqu'à  la  témérité  sur  les  champs  de  bataille, 
il  fut  assurément  moins  bien  armé  contre  le  malheur. 
Intelligence  superficielle,  il  n'avait  pas  les  qualités 
qui  accompagnent  généralement  les  natures  légères, 
il  manquait  de  finesse  dans  l'esprit  ;  il  n'avait  ni  la 
répartie  vive,  ni  le  mot  profond. 

Comme  celle    de  presque   tous  ses  contemporains 

(1)  Ses  frères  étaient  le  duc  de  Bourbon  et  le   comte   de  Charo- 
ais. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  IV. -M. \  EN  FRANCE     107 

dans  sa  situation,  son  adolescence  fut  frivole  et  dissipée; 
mais  ces  travers  eurent  cependant  quelques  compensa- 
tions. 

Nous  ne  saurions  lui  faire  grief  d'avoir,  à  lage  del4  ans, 
fait  construire  un  superbe  monument  funéraire  à  la 
mémoire  de  son  singe  Macathy,  qui  venait  de  trépasser, 
et  juger  son  caractère  d'homme  par  cette  exagération 
enfantine,  d'autant  qu'il  se  consola,  semble-t-il,  assez 
vite.  Les  propos  de  ruelle,  que  devaient  si  fort  mépriser 
les  statuts  maçonniques,  racontent  en  effet,  en  1724,  une 
aventure  plutôt  un  peu  vive  qui  lui  serait  arrivée  avec 
la  fille  de  M.  de  Matignon,  M,uede  Grave,  femme  sans 
scrupules  excessifs,  qui  au  surplus  passait  pour  une 
ébaucheuse,  comme  disaient  les  roués.  Le  vieux  comte 
de  Billy,  mentor  du  jeune  prince,  semble  avoir  joué 
dans  l'occurrence  le  rôle  de  Mercure.  L'affaire  fit  telle- 
ment de  bruit  que  le  mari  battit  sa  femme,  puis,  après 
réflexion,  se  calma. 

Le  comte  de  Clermont  ne  s'occupait  pas  que  de 
galanterie,  et  son  esprit  se  tournait  avec  assiduité  vers 
les  sciences  et  les  arts. 

S'inspirant  peut-être  de  la  Nouvelle  Atlantide,  dont 
l'abbé  Raguet  avait  publié  une  traduction  (1702),  il 
imagina  de  former  en  1729,  dans  son  hôtel,  une  sorte 
d'académie  :  la  Société  des  Arts,  dont  le  programme 
comportait  des  exagérations  d'un  ordre  gai.  A  chaque 
branche  des  sciences  ou  des  arts,  il  aurait  voulu  ac- 
coupler une  profession.  On  aurait  ainsi  agrémenté 
l'historien  d'un  brodeur,  et  on  eût  logé  le  poète  à  l'en- 
seigne du  teinturier.  Cette  académie  fonctionna  avec 
ou  sans  brodeur,  avec  ou  sans  teinturier  jusqu'en 
1737,  et  distribua  des  prix.  Parmi  les  sociétaires  figu- 
raient artistes  et  grands  seigneurs,  La  Grive,  le  graveur 
géographe  ;  Ledran,  le  chirurgien  ;  le  chevalier  de  Bé- 


168  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

thune  et  le  prince    de  Grinberghem  siégeaient  à  côté 
des  horlogers  Julien  Leroy  et  Gaudron. 

Le  comte  de  Clermont  ne  protégeait  pas  que  les 
savants,  et  son  nom  fut  malheureusement  mêlé  aux 
incidents  qui  accompagnèrent  la  mort  d'Adrienne  Le- 
couvreur,  car,  à  cette  époque,  il  était  l'amant  en  titre 
de  la  duchesse  de  Bouillon.  Peu  après,  il  abandonna 
cette  femme  tragique  qu'il  troqua  avec  Sourdis  contre 
la  Camargo.  Il  resta  huit  ans  fidèle  à  la  célèbre  danseuse, 
qui  lui  donna  deux  enfants  et  lui  fit  faire  deux  millions 
de  dettes. 

Pour  un  abbé,  la  conduite  était  leste  ;  mais,  comme 
il  ne  voulait  abandonner  ni  ses  bénéfices  ni  ses  maî- 
tresses, il  obtint,  dit-on,  du  pape  Clément  XII  un  bref 
l'autorisant  à  porter  les  armes,  et  fit  honorablement 
la  campagne  de  1733. 

Avant  de  succéder  au  duc  d'Antin  sur  l'autel  à  sept 
marches  où  siégeaient  les  G.*.  M.*.,  il  lui  succéda  dans 
les  bonnes  grâces  de  Mlle  Le  Duc,  la  danseuse  dont  nous 
avons  déjà  parlé.  Décidément  le  fondateur  de  la  Société 
des  Arts  trouvait  qu'on  pouvait  accoupler  la  chorégra- 
phie avec  la  marche  symbolique  du  maître  parfait. 

Son  zèle  artistique  dépassa  cependant  la  mesure  :  le 
22  mars  1742,  oubliant  qu'il  avait  reçu  la  Lumière,  il 
célébrait  les  Ténèbres  à  Longchamps  par  une  exhibi- 
tion qui  fit  scandale.  Il  avait  fait  à  MlleLeDuc  pour  cette 
circonstance  une  galanterie  qu'on  chansonna  trop.  La 
danseuse  figura  au  défilé  dans  une  calèche  de  canne 
peinte  en  bleu,  avec  des  ornements  d'argent,  attelée  de 
six  chevaux  nains  pas  plus  gros  que  des  dogues  ;  un 
petit  postillon  et  un  petit  hussard  richement  habillés, 
l'un  en  veste  rouge  toute  couverte  de  galons  d'argent 
avec  une  plume  bleue  au  chapeau,  l'autre  en  robe 
bleue,  le  sabre  et   le  bonnet  tout  garnis    de  plaques 


LES  DÉHUTS  DE  LA  F.\-M.\  EN  FRANCE      169 

d'argent.  M1,c  Le  Duc  tenait  les  guides,  escortée  de  deux 
valets  de  pied  déguisés. 

Le  comte  de  Glermont  s'afïichait  aussi  avec  elle  à  la 
Comédie-Française  et  à  l'Opéra. 

Ces  aventures  n'étaient  assurément  pas  faites 
pour  blesser  tout  le  monde,  car  c'est  au  lendemain  du 
scandale  qu'elles  avaient  produit  qu'il  fut  nommé, 
le  11  décembre  1743,  G.*.  M.*,  perpétuel  de  la  franc- 
maçonnerie  par  les  vénérables  de  seize  loges  pa- 
risiennes qui  composaient  alors  la  Grande  Loge  de 
Paris,  dite  Grande  Loge  de  France.  Cette  élection  fut 
acceptée  par  les  loges  de  provinces  auxquelles  on  l'avait 
notifiée.  Il  avait  eu  comme  concurrents  à  la  Grande 
Maîtrise  le  prince  de  Conti   et  le  maréchal    de   Saxe. 

Le  comte  de  Glermont  ne  semble  pas  avoir  brûlé 
d'un  zèle  ardent  pour  les  pratiques  de  l'Ordre,  et  si  quel- 
ques événements  importants  se  passèrent  sous  sa  maî- 
trise, ils  furent  certainement  provoqués  par  des  sous- 
ordres  fort  peu  recommandables,  ainsi  qu'en  font  l'aveu 
les  historiens  maçonniques. 

Peu  après  son  élection,  il  quitte  Paris  et  s'absente 
trois  années  consécutives,  pendant  lesquelles  il  fait 
brillamment  les  campagnes  de  1744-1747.  Il  participe 
largement  aux  prises  de  nombreuses  places  fortes,  et 
s'il  n'assiste  pas  à  la  bataille  de  Fontenoy,  il  a  une 
excuse  très  réelle  à  son  absence  ;  il  s'était  démis  la 
rotule  en  jouant  au  volant  avec  Mlle  Le  Duc. 

En  1747,  il  se  retire  de  l'armée,  ayant  été  blessé  de 
ne  pas  avoir  eu  la  conduite  du  siège  de  Berg-op-Zoom, 
confiée  au  maréchal  de  Lowendal. 

A  partir  de  cette  époque,  il  se  terre  avec  Mlle  Le  Duc 
dans  le  château  de  Berny,  maison  de  campagne  des 
abbés  de  Saint-Germain-des-Prés. 

Là,  il  installe  un  théâtre,  où  l'on  joue  tout  autre  chose 


170  LA  FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

I 

que  du  classique  ;  le  répertoire  est  en  grande  partie 
l'œuvre  de  Collé  ou  celle  deLaujon  qui  avait  succédé, 
en  1750,  dans  les  fonctions  de  secrétaire  de  ses  comman- 
dements, à  Moncrif,  l'auteur  de  l'Histoire  des  chats.  Le 
comte  de  Clermont  s'essaya  aussi  dans  la  composition 
dramatique,  mais  sans  grand  succès. 

Il  installa  sa  musique  sur  le  pied  de  celle  de  la  cham- 
bre du  roi  ;  elle  était  conduite  par  le  flûtiste  Michel 
Blavet  et  le  violoniste  André  Pagni  ;  Laujon,  Blavet  et 
Pagni  étaient  francs-maçons. 

Sa  troupe  dramatique,  composée  de  professionnels, 
était  souvent  renforcée  par  des  gentilshommes  de  sa 
maison,  et  lui-même  ne  dédaignait  pas,  malgré  sa  cor- 
pulence, de  figurer  les  paysans,  les  rôles  à  manteau  sé- 
rieux et  les  financiers.  Son  amour  pour  le  théâtre  était 
poussé  à  un  tel  point  qu'il  fit  construire  une  seconde 
salle,  rue  de  la  Roquette,  afin  de  pouvoir  donner  des 
représentations  pendant  ses  séjours  à  Paris. 

Malgré  ce  zèle  artistique,  lorsque,  le  1er  décembre  1753, 
il  fut  appelé  à  remplacer  Gros  de  Boze  à  l'Académie, 
les  libellistes  trouvèrent  ses  titres  un  peu  maigres,  et 
l'un  d'eux,  le  critique  Roy,  fit  circuler  la  pièce  suivante  : 

Trente  neuf  joints  à  zéro, 
Si  j'entends  bien  mon  numéro, 
N'ont  jamais  pu  faire  quarante. 
D'où  je  conclus,  troupe  savante, 
Qu'ayant  à  nos  côtés  assis 
Clermont,  cette  masse  pesante, 
Ce  digne  cousin  de  Louis, 
La  place  est  encore  vacante. 

Mal  en  cuit  au  pauvre  poète,  car,  sans  doute  au  nom 
de  la  fraternité  maçonnique,  le  comte  de  Clermont  le 
fit  si  vivement  bâtonner  que  l'on  fit  courir  le  bruit  de 
sa  mort,  bien  qu'il  n'ait  trépassé  que  dix  ans  plus  tard. 
En    cherchant    une   excuse    à    ce    manquement     aux 


LES    DÉBUTS   DE    LA    F. '.-M.'.    EN    FRANCE  171 

maximes  égalitaires,  on  peut  ajouter  que  de  tous  les 
libellistes,  Roy  fut  un  des  plus  bâtonnés.  Peut-être  aussi 
n'était-il  pas  initié. 

Bien  que  gouverneur  de  Champagne  depuis  1751,  le 
comte  de  Clermont  ne  quittait  guère  les  jupes  de 
MlleLe  Duc  qu'il  comblait  de  présents  :  maison  à  Paris, 
au  coin  de  la  rue  de  Richelieu,  près  des  boulevards  ; 
autre  maison,  4,  rue  Popincourt  ;  terre  de  Tourvoye 
près  de  Berny,  érigée  en  marquisat.  Il  fit  tant  et  si  bien, 
qu'en  1757  il  fut  obligé  d'enrayer  et  de  liquider  sa 
maison  dramatique.  Peut-être  pour  se  refaire,  comme 
le  maréchal  de  Richelieu,  il  eut  l'idée  désastreuse  de 
demander  et  la  mauvaise  fortune  d'obtenir,  en  1758,  le 
commandement  en  chef  de  l'armée  de  Hanovre,  fort  mal 
en  point.  C'est  lui  qui  organisa  la  retraite  de  Minden 
et  qui  commandait  à  Crevelt.  Remplacé  en  juillet  par 
le  maréchal  de  Contades,  il  vint  prendre  ses  derniers 
quartiers  à  Berny,  où  il  ne  trouva  rien  de  mieux  à  faire 
que  d'épouser  Mlle  Le  Duc,  devenue  marquise  de  Tour- 
voye (1). 

Boudant  la  cour,  le  comte  de  Clermont  mena  une 
vieillesse  assez  maussade  ;  aigri  par  les  désastres  de 
la  fin  de  sa  carrière  militaire  (2),  il  fronda  la  royauté 
avec  acharnement,  lors  du  renvoi  des  parlements  ;  c'est 
à  son  lit  de  mort,  où  il  était  cloué  par  la  goutte,  que  se 
réunirent  les  princes  du  sang  pour  protester  contre  le 
parlement  Maupeou.  Louis  XV  lui  tint  rigueur  et  ne 
s'inquiéta  pas  de  ses   derniers    moments.  Le  comte  de 


(1)  La  marquise  de  Tourvoye  mourut  en  1793,  rue  Popincourt. 
D'après  Gould  (III,  142),  le  comte  de  Clermont  «  en  juillet  1757, 
quitta  l'armée,  se  retira  de  la  cour  et  se  consacra  aux  sciences  et 
aux  œuvres  de  bienfaisance  jusqu'à  sa  mort.  » 

(2j  Après  la  bataille  de  Raucoux  où  le  comte  de  Clermont  s'était 
glorieusement  conduit,  alors  que  son  homonyme  le  comte  de  Cler- 


172  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Clermont  mourut  à  Versailles  le  16  juin  1771  à  6  h. 
du  soir.  Son  corps  fut  transporté  à  son  hôtel  de  la  Ro- 
quette, où  le  service  religieux  fut  fait  par  le  curé  de 
Sainte-Marguerite  et  par  Mgr  Louis  de  Conzié,  évêque 
d'Arras.  Son  corps  fut  inhumé  à  Enghien  (1). 


Nous  avons  vu  plus  haut  que  le  comte  de  Clermont 
tenait  ses  pouvoirs  de  G.*.  M.*,  du  vote  des  vénérables 
de  seize  loges  parisiennes  et  que  ces  pouvoirs  avaient 
été  ratifiés  par  les  loges  de  province . 

D'après  les  statuts  généraux  de  la  f.\-m.\  anglaise, 
ces  loges  avaient-elles  le  pouvoir  de  conférer  ce  titre  ? 
Assurément  non. 

Les  historiens  maçonniques  racontent,  avec  une  una- 
nimité complète,  sans  en  fournir  du  reste  aucune  preuve, 
que  le  11  décembre  1743,  la  Grande  Loge  d'Angleterre 
constitua  avec  les  loges  parisiennes  la  Grande  Loge 
anglaise  de  France,  qu'elle  conservait  ainsi  sous  son 
obédience.  Cet  aveu   est  précieux  à  retenir. 

mont-Gallerande  avait  failli  compromettre  la  journée,  on  avait  fait 
le  quatrain  suivant  : 

A  Raucoux  où  l'Anglais  sous  nos  coups  est  tombé, 
Des  deux  Clermont,  chose   extraordinaire, 
L'abbé  se  bat  comme  un  militaire, 
Et  le  militaire  en  abbé. 

Après  la  bataille  de  Crevelt,  en  juin  1758,  on  avait  fait  une  va- 
riante : 

Moitié  plumet,  moitié  rabat, 
Aussi  propre  à  l'un  comme  à  l'autre, 
Clermont  se  bat  comme  un  apôtre 
Et  sert  son  Dieu  comme  il  se  bat. 

(1)  Voir  J.  Cousin,  le  Comte  de  Clermont', —  Capon  et  Plessis,  en 
Théâtres  clandestins  ;  —  d'Alméras  et  d'Estrées,  les  Théâtres  liber- 
tins au  XVIII*  siècle. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  IV.-M.\  EN  FRANCE      173 

Depuis  1741,  la  France  avait  l'Angleterre  comme 
principale  adversaire  dans  la  guerre  de  la  succession 
d'Autriche,  qui  ne  devait  prendre  fin  qu'en  1748. 

Comment,  en  pleine  guerre,  une  société  française 
aurait-elle  osé  se  placer  sous  l'autorité  immédiate  de 
supérieurs  anglais,  et  se  dénommer  Grande  Loge  an- 
glaise de  France?  Alors  que  Louis  XV  soutenait  osten- 
siblement les  projets  de  Charles-Edouard  en  faveur  de 
la  restauration  de  Jacques  III  Stuart  sur  le  trône  d'An- 
gleterre, comment  le  comte  de  Clermont,  qui  devait 
figurer  brillamment  pendant  cette  guerre,  aurait-il  ac- 
cepté, lui,  prince  du  sang,  une  situation  aussi  fausse, 
aussi  criminelle  ? 

On  doit  donc  supposer  qu'il  fut  circonvenu  et  expli- 
quer son  indifférence  à  l'égard  de  la  f.\-m.\  par  le  mé- 
contentement qu'il  dut  avoir  lorsqu'il  s'aperçut  qu'on 
l'avait  trompé. 

Est-ce  encore  pour  ces  raisons  très  plausibles  que 
Louis  XV  aurait,  le  5  juin  1744,  renouvelé  les  dé- 
fenses faites  en  1737  et  1738  aux  maçons  de  s'assem- 
bler en  loges  et  aux  propriétaires  de  maisons  ou  aux 
cabaretiers  de  les  recevoir  sous  peine  de  3.000  fr.  d'a- 
mende? C'est  peut-être  pour  cela  que,  le  8  juin  1745,  une 
escouade  du  guet  avait  dispersé  une  assemblée  de 
f.'.-m.*.  qui  procédaient  à  une  initiation  à  l'hôtel  de 
Soissons,  rue  des  Deux-Ecus,  avait  saisi  meubles  et  us- 
tensiles et  condamné  le  traiteur  maître  de  loge  Leroy 
à  l'amende  réglementaire  ? 

S'il  en  est  ainsi,  et  cela  paraît  probable,  on  ne  peut 
nier  que  la  conduite  des  maçons  ait  été  condamnable 
et  antipatriotique. 

Cette  hypothèse  vraisemblable  expliquerait,  au  sur- 
plus, l'arrestation  de  Douglas,  comte  de  Morton,  dont 
nous  avons  déjà  parlé  (chap.  iv,  p.  124). 


174  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

N'est-ce  pas  encore  pour  enrayer  le  courant  maçon- 
nique orangiste  que  Charles-Edouard  installa  le  cha- 
pitre d'Arras  ? 

Il  y  avait  certainement  en  France,  à  cette  époque,  au 
moins  deux  maçonneries  ennemies.  Les  loges  des  régi- 
ments irlandais  et  écossais  qui  devaient  se  montrer  si 
brillamment  à  côté  de  la  Maison  du  Roi  à  Fontenoy 
étaient  jacobites,  alors  que  les  seize  vénérables  de  Paris 
faisaient  le  jeu  de  l'Angleterre.  N'est-ce  pas  par  une 
tactique  toute  maçonnique  que  les  f.'.-m.'.  orangistes 
eurent  l'habileté  de  se  placer  sous  le  protectorat  d'un 
prince  du  sang,  dupe  de  sa  condescendance  ? 

S'il  en  est  ainsi,  cela  explique  une  fois  de  plus  pour- 
quoi les  f.'.-m.'.  font  avec  soin  l'obscurité  et  le  silence 
sur  cette  période  de  leur  histoire. 

Dès  qu'elle  fut  installée,  «  la  Grande  Loge  anglaise 
de  France  »  s'empressa  de  reviser  la  constitution,  d'é- 
laborer de  nouveaux  règlements  et  de  créer,  «  pour  Paris 
seulement,  des  maîtres  de  loges  perpétuels  et  inamo- 
vibles, de  peur  que  l'administration  générale  de  l'Ordre, 
confiée  à  la  G.*.  L.\  de  Paris,  en  changeant  trop 
souvent  de  mains,  ne  devînt  trop  incertaine  et  trop 
chancelante.  »  Dans  les  provinces,  les  maîtres  déloges 
devaient  être  renouvelés  tous  les  ans. 

Les  ordonnances  générales  publiées  par  la  G.'.  L.à 
cette  époque  sont,  à  peu  de  choses  près,  la  reproduction 
des  19  premiers  articles  des  constitutions  anglaises  de 
1723  et  1738.  Mais  le  20e  et  dernier  article  attaque  très 
spécialement  les  loges  écossaises  dans  le  titre  de  maî- 
tre écossais  conféré  par  ces  loges. 

Dans  leur  mémoire,  publié  en  1744,  les  maîtres 
écossais  protestent  énergiquement  contre  les  attaques 
dont  ils   sont  l'objet. 

En  présence  de  ces  luttes,  souvent  discourtoises,  les 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F. '.-M.'.  EN  FRANCE     1 75 

loges  de  province  s'émancipent,  forment  des  groupes 
indépendants,  constituent  de  leur  propre  autorité  de 
nouvelles  loges,  et  bientôt  il  y  a  un  enchevêtrement  de 
mères  loges  avec  des  rites  particuliers  dans  chaque 
province  de  France.  Bien  qu'en  1747,  alors  que  la  paix 
était  virtuellement  conclue  avec  l'Angleterre,  le  comte 
de  Clermont  eût  été  autorisé  par  Louis  XV  à  porter  le 
titre  de  G.'.  M.*.,  les  autorités  maçonniques  étrangères 
ne  savaient  à  qui  s'adresser. 

A  en  juger  cependant  par  les  constitutions  faites  par 
les  deux  Eglises  maçonniques,  les  loges  écossaises 
jacobites  avaient  beaucoup  plus  d'adhérents  que  la 
Grande  Loge  anglaise  de  France. 

De  1743  à  1755,  cette  dernière  constitue  trois  loges  à 
Paris  :  la  Concorde  (1743),  la  loge  de  la  Chambre  du 
Roi  (1745)  et  Saint-Julien  de  la  Tranquillité  (1751), 
pendant  que  les  loges  écossaises  en  constituent  au 
moins  vingt-deux.  Il  en  était  de  même  en  province. 
Les  loges  de  régiments  ne  se  multiplient  pas  et  se 
cantonnent  toujours  dans  les  régiments  écossais  ou 
irlandais. 

La  G.\  L.\  anglaise  de  France  allait  donc  succom- 
ber ;  mais  en  présence  de  sa  décadence,  elle  fit  un 
dernier  effort.  Alors  que  les  hostilités  allaient  reprendre 
contre  l'Angleterre  et  ses  alliées  (guerre  de  Sept  ans, 
1756-1763),  le  4  juillet  1755  la  Grande  Loge  anglaise 
décida  de  prendre  à  l'avenir  le  titre  de  G.*.  L.\  de 
France  qu'elle  conservera  jusqu'à  la  fin,  et  ce  ne 
fut  que  plus  tard,  en  1768,  que  les  loges  de  France 
et  d'Angleterre  rentrèrent  de  nouveau  en  relation  et 
signèrent  un  concordat  par  l'intermédiaire  d'une  se- 
conde G.\  L.\  qui  s'était  créée  ainsi  que  nous  le 
verrons  plus  loin. 

D'après  Clavel  (p.  120),  à  partir  de  1756,  aux  seuls 


176  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

vénérables   de  Paris   appartenait  le  gouvernement  de 
l'Ordre,  à  l'exclusion  des  vénérables  de  province. 

Les  affaires  étaient  examinées  et  les  décisions  prises 
par  neuf  vénérables  et  neuf  officiers  qui  formaient 
Y  Assemblée  ou  Conseil  dont  les  décisions  étaient  provi- 
soires. 

La  Loge  de  communication  de  quartier,  composée  de 
trente  officiers,  nommés  pour  trois  ans  au  scrutin,  pou- 
vait approuver  ou  réformer  les  décisions  de  l'Assemblée 
ou  Conseil. 

Les  deux  assemblées  réunies  formaient  la  Grande 
Loge, 

La  correspondance  était  faite  par  une  chambre  des 
dépêches,  qui  était  chargée  de  faire  des  enquêtes  sur 
les  candidats  ;  elle  se  composait  de  neuf  officiers 
et  de  six  vénérables. 

La  G.*.  L.\  connaissait  de  tous  les  jugements  ren- 
dus par  l'Assemblée  ou  Conseil  et  par  la  loge  de  com- 
munication de  quartier. 

La  G.*.  L.\  recevait  un  tribut  annuel  de  toutes  les 
loges  de  son  ressort  ;  et  l'excédent  des  dépenses  était 
comblé  par  une  cotisation  personnelle  de  ses  offi- 
ciers. 

Ces  règlements  furent  en  vigueur  jusqu'à  la  réunion 
de  la  G.\  L.\  au  G.*.  0.\  en  1799. 

Le  registre  de  toutes  les  délibérations,  statuts,  règle- 
ments et  autres  arrêtés  de  la  T. * .  R.  * .  et  T.  • .  S.  • .  G. * .  L.  • . 
de  France,  tant  dans  les  assemblées  de  communication 
de  quartier  que  dans  celles  de  conseils  ordinaires  et 
extraordinaires,  fut  vendu  le  27  mars  1863  par  Tross 
(n°  10  de  son  catalogue).  C'était  un  registre  in-f°  de 
88  feuillets  comprenant  les  délibérations  de  la  G.'.  L.\ 
de  juin  1743  à  juin  1771,  c'est-à-dire  pendant  toute  la 
durée  de  la  grande  maîtrise  du  comte  de  Clermont. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  1V.-M.*.  EN  FRANCE     177 

Tross,  parmi  les  signatures  qu'il  annonce  très 
nombreuses,  relève  seulement  les  noms  de  Malibran, 
Martin,  Carbonnel,  Furet,  Labady  et  Boulainvilliers  (1). 

Far  son  règlement  de  1756,  la  G.*.  L.  .  de  France, 
visant  toujours  les  loges  écossaises,  décidait  de  ne 
reconnaître  que  les  trois  grades  de  la  maçonnerie  de 
Saint-Jean:  apprenti,  compagnon  et  maître,  et  de  se 
composer  exclusivement  des  vénérables  inamovibles 
des  loges  de  Paris,  présidés  par  le  G.*.  M.',  et  ses  offi- 
ciers à  sa  nomination. 

Cette  mesure  fut  inefficace,  et  la  confusion  continua 
dans  la  plupart  des  loges  de  Paris  et  de  province.  Le 
comte  de  Clermont  ne  s'occupait  du  reste  pas  de  ses 
fonctions,  et  pendant  qu'il  était  soit  à  l'armée,  soit  à 
Berny,  il  avait  délégué  ses  pouvoirs  à  des  substituts, 
recrutés  dans  la  classe  où  se  recrutaient  ordinaire- 
ment les  simples  maîtres  de  loges. 


Dès  le  jour  de  son  élection,  le  G.'.  M.*,  se  fit  suppléer 
par  un  personnage  assez  énigmatique,  dont  les  histo- 
riens maçonniques  ne  sont  pas  parvenus  jusqu'ici  à 
fixer  la  personnalité:  le  banquier  Baur.  Plus  heureux 
que  ces  historiens,  je  suis  parvenu  à  identifier  le  per- 
sonnage. 

Christophe-Jean  Baur  était  un  petit  banquier,  origi- 
naire de  Genève,  qui  installa  rue  Saint-Sauveur,  vers 
1740,  une  maison  de  prêt  à  l'usage  des  fils  de  famille 


(1)  Cette  vente  annoncée  deux  fois  par  Tross  en  1860  et  1863, 
n'aurait  pas  eu  lieu,  paraît- il,  et  les  documents  figurant  dans  ce 
catalogue  auraient  été  dispersés.  Le  registre  de  la  G.'.  L.\,  en 
particulier,  fait  aujourd'hui  partie  de  la  bibliothèque  secrète  du 
Président  du  Conseil  des  rites  du  G.'.  0.\ 

LA    FRANC-MACONNERIE.  —   T.   I.  12 


178  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

dans  l'embarras  et  des  jeunes  danseuses  de  l'Opéra 
dans  la  peine.  C'est  ainsi  qu'en  1744  il  prête  8.000  fr. 
à  M1,e  Le  Duc,  dont  nous  savons  le  rôle  auprès  du  comte 
de  Clermont.  Il  est  juste  d'ajouter  que  celle-ci  ne  les 
lui  rendit  jamais.  A  l'exercice  de  cette  profession, 
Baur  fit  cependant  une  petite  fortune:  de  1755  à  1770 
il  a  pignon  sur  rue  et  exerce  son  sacerdoce  place  des 
Victoires.  Lorsqu'il  meurt,  en  1770  (1),  il  laisse  aux 
pauvres  de  Saint-Eustache,  sa  paroisse,  1.200  fr.  et 
3.000  fr.  à  son  curé.  Comme  il  possédait  une  petite 
propriété  à  Montrouge,  il  laisse  6.000  fr.  aux  pauvres 
de  cette  commune.  Il  n'oublie  ni  ses  domestiques,  ni 
ceux  de  sa  femme.  A  celui  de  ses  parents  qui  se  trou- 
vera en  France  au  moment  de  son  décès  et  qui  sera 
apte  à  lui  succéder,  il  laisse  30.000  fr.  à  prendre  sur 
les  fonds  qui  lui  appartiennent  dans  la  société  qu'il  a 
fondée  avec  Tourton  et  Sartorius.  Le  surplus  de  ses 
biens  doit  revenir  au  f.\  Jean-François  Jaunie,  che- 
valier de  Saint-Louis,  son  beau-frère  et  ancien  ami, 
qu'il  institue  son  légataire  universel. 

On  a  accusé  Baur,  pendant  qu'il  occupa  les  fonc- 
tions de  substitut  du  G.*.  M.'.,  d'avoir  multiplié  les 
grades  à  l'infini  et  d'en  avoir  fait  un  honteux  trafic 
(Globe  I,  381).  Au  bout  de  peu  de  temps,  le  comte  de 
Clermont  aurait  été  obligé  de  se  priver  de  sa  collabo- 
ration. 


Baur  fut  remplacé  par  un  nouveau  substitut  qui  ne 
valait  certes  pas  mieux  que  lui,  les  historiens  maçon- 

(1)  Son  testament,  daté  du  23  mai  1769  et  déposé  chez  Lande- 
guerive  (Leguay),le  16  septembre  suivant,  fut  insinué  le  23  novem- 
bre 1770. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F.VM.\  EN  FRANCE      179 

niques  eux-mêmes  sont  obligés  d'en  faire  l'aveu. 
Naturellement  ce  second  personnage  est  aussi  énigma- 
tique  que  le  premier.  Il  s'agit  du  danseur  Lacorne. 
Qui  était  Lacorne? 

En  1745,  il  y  avait  à  Paris,  sous  les  ordres  du  comte 
de  Brionne,  grand  écuyer  de  France,  trois  académies 
pour  l'éducation  des  jeunes  gentilshommes.  Le  prix 
d'entrée  à  ces  académies  était  assez  élevé,  et  l'on  ensei- 
gnait aux  élèves  les  mathématiques,  les  armes,  la 
danse,  l'exercice    militaire  et  l'équitation. 

Ces  trois  académies  étaient  tenues  par  Dugard,  rue 
de  l'Université  ;  Jouan,  rue  des  Cornettes,  vis-à-vis  le 
portail  Saint-Sulpice  ;  Croissy,  au  manège  des  Tui- 
leries. 

C'est  chez  Dugard  que  Lacorne  battait  ses  entre- 
chats. Il  figure  sur  le  tableau  de  cette  école  de  1753 
au  plus  tard  à  1763  au  moins.  Pendant  toute  cette 
période  il  habitait  rue  de  Sèvres,  près  des  filles  Saint- 
Thomas  (1). 

Je  ne  serais  pas  étonné  que  Lacorne,  étant  donnée 
sa  profession,  n'ait  été  recommandé  aux  bontés  du 
comte  de  Clermont  par  Mlle  Le  Duc,  dont  il  fut  peut- 
être  le  professeur  de  danse.  Lacorne  était  voisin  du 
père  de  la  marquise  de  Tourvoye,  qui  habitait  le 
Luxembourg  en  qualité  de  concierge.  Décidément  La- 
corne, vénérable  maître  de  la  loge  de  la  Trinité,  valait 
bien  Chapelot,  Leroy  et  Baur,  et  je  ne  sais  pourquoi 
les  historiens  maçonniques  l'ont  chargé  de  tous  les 
péchés  d'Hiram  ! 

Pour  porter  sur  lui  ce   verdict  indulgent,   je  dois 


(1)  Je  ne  sais  s'il  est  la  même  personne  qu'un  certain  Lacorne, 
commandant  en  2e  en  1793  de  la  section  armée  Bonne-Nouvelle, 
121,  rue  de  Çléry,  ou  si  ce  dernier  était  seulement  son  parent. 


180  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

i 

passer,  à  la  vérité,  sous  silence  l'accusation  faite  contre 
Lacorne  par  ses  adversaires,  souvent  féroces  plus  que 
de  raison,  d'avoir  rempli  avec  zèle  auprès  du  comte  de 
Clermont  les  fonctions  que  Lebel  remplissait  auprès  de 
Louis  XV. 

Dans  le  doute  il  vaut  mieux  être  indulgent. 


Au  milieu  de  ce  monde  interlope  circulait  alors 
un  personnage  bien  curieux,  bien  de  son  temps.  Etait-il 
fou  ou  simplement  exalté?  Etait-ce  un  convaincu  jus- 
qu'au fanatisme  ou  un  chevalier  d'industrie  fort 
habile  ? 

Le  chevalier  de  Beauchaine  (1),  le  plus  fanatique 
des  vénérables  inamovibles  de  la  G.'.  L.\  de  France, 
le  même  personnage  qui  avait  établi  sa  loge  chez  une 
cabaretière  de  la  rue  Saint-Victor,  à  l'enseigne  du  Soleil 
d'Or,  où  il  couchait  et  conférait  dans  la  même  séance 
tous  les  grades  maçonniques  pour  un  écu  de  six  livres, 
institua  l'ordre  Androgyne  des  Fendeurs  et  des  Fen- 
deuses.  Il  avait  calqué  les  rites  sur  ceux  des  Fendeurs 
du  Devoir. 

La  première  assemblée  qui  eut  lieu  à  Paris  fut  pré- 
parée et  présidée,  le  17  août  1747,  par  le  Père  Maître 
Beauchaine.  Il  l'appela  :  le  chantier  du  Globe  et  de  la 
Gloire.  Il  disait  tenir  ses  pouvoirs  de  M.  de  Courval, 
grand  maître  des  Eaux  et  Forêts  du  comté  d'Eu, 
seigneur  de  Courval.  Une  grande  partie  de  la  cour  et 
de  la   ville  s'y  rendit,   la  joie  y  fut  franche   et   sans 

(1)  Je  n'ai  pu  déterminer  si  ce  Beauchaine  était  le  même  per- 
sonnage que  Beauchesne,  mousquetaire  de  la  2«  compagnie,  cheva- 
lier de  Saint-Louis,  dont  le  brevet  fut  expédié  le  12  juillet  1749  par 
le  marquis  de  Cheffreville.  Cette  hypothèse  est  vraisemblable. 


LES  DÉHUTS  DE  LA  F.\-M.\  EN  FRANCE     181 

façon.  On  s'y  promenait  bras  dessus,  bras  dessous,  en 
habits  d'étoffes  grossières  et  en  sabots.  Le  rendez-vous 
était  dans  un  vaste  jardin  de  la  Nouvelle  France. 

Ce  personnage  qui  faisait  ainsi  circuler  la  cour  et 
la  ville  s'appelait  Charles  François,  chevalier  de  Beau- 
chaine.  Pendant  la  guerre  de  Sept  Ans,  c'est  lui  qui 
suivit  l'armée  d'Allemagne  avec  une  roulotte  installée 
en  loge,  bondée  de  rituels,  de  catéchismes  maçonni- 
ques, de  bijoux,  de  rubans  et  de  costumes.  Il  s'arrêtait 
ainsi  sur  les  grandes  routes  pour  conférer  des  grades. 
Il  en  avait  quarante-cinq  à  la  disposition  des  amateurs. 

Comme  Beauchaine  voulait  recevoir  de  toutes 
mains,  il  n'avait  pas  en  apparence  pris  parti  dans  le 
conflit  anglo-écossais  qui  divisait  la  f.\-m.\  fran- 
çaise. Dans  un  brevet  du  7  juin  1760,  il  se  qualifie 
vénérable  frère  fondateur  de  la  T.*.  R.\  L.\  de  Saint- 
Jean,  écossaise  et  anglaise,  établie  à  la  suite  de  l'armée 
du  roi  très  chrétien  en  Allemagne,  sous  le  titre  de  la 
Constance.  Et  cependant  il  trahit  son  origine  quelques 
lignes  plus  loin  en  se  dévoilant  «  décoré  de  tous  les 
honneurs  et  autorisé  par  le  très  digne,  très  cher  et 
T.*.  R.\  G.*.  M.*.  Charles  Stuard  Edouard  »  (1). 

Beauchaine  n'était  pas  une  exception  ;  il  n'était  pas 
davantage  un  excentrique,  comme  les  historiens 
maçonniques  voudraient  le  laisser  croire.  Il  était  bel  et 
bien  f.\ -m.',  authentique  et  avait  à  sa  disposition  tout 
un  personnel  administratif,  beaucoup  mieux  composé 
que  celui  de  beaucoup  d'autres  rites.  Il  nous  sera  facile 
de  le  reconstituer  tout  au  moins  en  partie  à  l'aide  du 
brevet  que  nous  venons  de  citer  : 

(1)  Dans  le  Catal.  Tross,  du  27  mars  1863,  figure,  sous  le  n°  98, 
un  manuscrit  in-8°  de  50  feuillets  de  la  main  de  Beauchaine  : 
Ordre  des  chevaliers  G.  T.  G.  S.  protecteur  de  l'innocence.  Ce 
manuscrit  est  daté  de  1765. 


182  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Boom,  premier  inspecteur. 

Seur,  deuxième  inspecteur. 

Noël,  grand  maître  des  cérémonies. 

Valleton,  trésorier. 

De  Maisonval,  orateur. 

Coque,  grand  inspecteur  du  Temple. 

G.  Voiart,  gardien  des  archives. 

Le  marquis  d'Estampes,  secrétaire. 

Lhote,  garde  du  Temple. 

Desjardins,  ancien  gardien  du  Temple. 

Revillon  d'Apre  val,  décorateur. 

De  Bermaire,  S.  E.  Anglais. 

Balletier,  S.  E.  Anglais. 

Et  parmi  les  membres  :  Lantelme-Chafalier  ;  de 
Mars  ;  chevalier  de  Fergent  ;  Dumand  ;  de  Saint-Gand  ; 
le  prince  Camille  de  Rohan  ;  Clousier,  ancien  chance- 
lier ;  Letournel. 

Ce  brevet,  d'un  modèle  fort  curieux,  porte  la  mention 
qu'il  avait  été  composé  par  le  chevalier  de  Beauchaine, 
gravé  par  J.  Sam.  Mund  et  tiré  par  Joh.  Mich.  Ebense, 
Francofurti  ad  Moenum. 

On  voit  par  la  composition  de  cette  loge  qu'elle  ne 
mérite  pas  le  mépris  dont  veulent  la  couvrir  les  histo- 
riens maçonniques,  et  qu'au  contraire  elle  peut  figurer 
parmi  celles  dont  le  tableau  était  le  mieux  composé. 
Sixans  plustard,  son  recrutement  sera  encore  plus  choisi. 

Le  9  juin  1766,  le  chevalier  de  Beauchaine  avait 
modifié  le  nom  de  sa  loge,  qu'il  qualifiait  de  Grande 
Loge  anglaise  de  France  sous  le  titre  distinctif  de  la 
Constance  et  l'Amitié.  Malgré  son  nom,  la  loge  est  jaco- 
bite,  ainsi  qu'il  résulte  du  texte  gravé  du  brevet  que 
nous  avons  sous  les  yeux.  Après  les  formules  de  style 
que  nous  reproduisons  en  note  comme  type  de  ce 
genre   de    littérature,    Beauchaine  se  dénomme  véné 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F.\-M.\  EN  FRANGE     183 

rable  fondateur  de  la  Loge  anglaise  de  France  de 
Saint-Jean  dite  de  la  Constance  et  de  l'Amitié  (1), 
régulièrement  assemblée  par  le  nombre  mystérieux  et 
autorisée  par  S.  M.  Charles  III  (2),  légitime  roy  d'An- 
gleterre ,  d'Ecosse  et  d'Irlande ,  revêtu  des  grades 
éminents  de  la  maçonnerie,  chevalier  protecteur  de 
l'Innocence  et  de  Rose-Croix,  prince  d'Orient  et  d'Occi- 
dent. 

Par  ce  brevet,  Beauchaine  autorise  Michel  Martin 
Blain,  huissier  ordinaire  du  Roy  en  son  bureau  des 
finances  et  domaines  de  Tours,  vénérable  de  la  Cons- 
tance royale,  fondée  dans  cette  ville  en  1756,  à  fonder 
une  nouvelle  loge  de  Saint-Jean  sous  le  titre  de  Triple 
Nœud,  et  à  y  conférer  tous  les  grades  jusqu'à  celui  de 
Parfait  Maître. 

Le  brevet  est  signé  par  tous  les   membres  présents. 
La  signature  de  Beauchaine,   chevalier  C.'.-K.,  est 
suivie  de  celles    des  quatre  insignes  protecteurs  de  la 
loge: 

Le  marquis  de  Seignelay,  colonel  du  régiment  de 
Champagne  infanterie,  1er  protecteur  ;  l'abbé  d'Evry 
commandeur  (sic)  de  Cluny,  2e  protecteur  ;  le  comte 
de  Choiseul,  colonel  des  grenadiers  de  France,  vén. 
des  Enfants  de  la  Gloire,  3e  protecteur  ;  De  Gourgue, 
président  à  mortier,  4e  protecteur.  Puis  venaient  les 
officiers  de  la  loge  :  Noël,  parfait  écossais  et  anglais, 
secrétaire  ;  Rotrou,  frère  Terrible  E.\  et  A.'.;  De  Mai- 
Ci)  En  haut  à  droite  et  à  gauche  de  la  gravure,  différente  de  la 
précédente:  L'bi  Patrîa,  ibi  Virtus.  Dans  les  deux  colonnes,  au 
milieu  de  dessins  compliqués  :  D'un  lieu  très  fort,  très  éclairé, 
très  redoutable,  asile  assuré  de  la  vertu  opprimée,  où  régnent 
l'union,  l'égalité  et  le  silence,  sous  le  point  géométrique  du  triple 
triangle  de  la  divine  sagesse... 

(2   Jacques  III  étant  mort  le  ler  janvier  1766,  Charles  Edouard 
avait  pris  le   nom  de  Charles  III. 


184  LA    FRANC-MAÇONNERIË    EN    FRANCE 

sonval,  orateur,  E.  et  A;  Alexandre  Fieffé,  trésorier  ; 
Lafare,  frère  Terrible  ;  V.  de  Meslay,  cons.  au  Parle- 
ment ;  De  la  Boullaye,  me  des  Requestes  ;  De  la  Guil- 
laumie,  cons.  au  Parlement  ;  Percheron,  Vénérable  de 
la  L.\  Saint- André  ;  Drothier,  Vénérable  de  la  Can- 
deur 0.*.  Paris  ;  Dutertre,Vén.  de  la  Sincérité  ;  Passerat 
de  Montleduc,  G.  Insp.  G.,  Élu,  Vén.  constitué  delà 
loge  de  Dunkerque,  tenant  celle  de  Giessen  ;  Le 
Boucher  de  Lenoncourt,  G.  Vén.  G.  M.  Gr.  Insp.  G. 
Elu  constitué  de  la  loge  de  France,  d'Angleterre,  Suède 
et  Prusse,  Vén.  de  la  L.  d'Hanau  ;  V.  Pollett,  major  de 
Royal  Deux  ponts,  Vén.  des  Inébranlables  Chevaliers 
de  l'Epée,  du  Mérite  de  France  ;  Pincemaille,  Vén.  et 
maître  de  la  Candeur  0.  de  Metz  ;  Lucet,  Vén.  de  la 
Sagesse  ;  Tardieu,  1er  Surveillant  de  la  Candeur 
0.  Paris;  De  la  Marche  E.  A.*.  De  Bermaire  E.  et  A.  ; 
Crépin  A.  ;  Fontaine  A.  ;  Blain  E  ;  Bareste  A.  ;  De 
Curt  A.;  Auge  A.  et  Subi.  E.  ;  Charbot  A.  ;  Félet  A.  ; 
Marquis  d'Evry,  colonel  de  Champagne  Cavalerie,  et 
les  maîtres:  de  Miode  ;  Moudran;  Gamot  fils . 
Bouché  ;  le  marquis  de  Clermont  ;  J.  Gamot  ;  La  Ferté 
jeune  ;  Bonnet;  Adam  le  jeune;  Faureson  ;  N.  Fieffé  ; 
Bonselié  ;  Bertin  ;  Durou  ;  Prudhomme  ;  Gruglin  : 
Chevalier;  Du  Lac;  Bridel  ;  Bertin. 

Les  loges  du  chevalier  de  Beauchaine  semblent  avoir 
fait  partie  du  régime  des  Empereurs  d'Orient  et  d'Occi- 
dent. 

Elles  fonctionnèrent  à  l'instar  des  loges  dites  mili- 
taires, qui  n'étaient  à  l'Orient  d'aucun  régiment,  ni 
d'aucune  ville,  mais  à  l'Orient  de  l'endroit  où  elles  se 
trouvaient  et  qu'on  désignait  par  la  latitude  et  la  lon- 
gitude. La  Constance,  aussi  bien  que  la  Constance  et 
l'Amitié,  était  donc  une  loge  militaire  comme  St-Jean  de 
la  Gloire  ou  St-Alexandre,  l'ancienne  loge  des   mous- 


LES  DÉBUTS  DE  LA  P.'. -M.'.  EN  FRANCE     L85 

quetaires,  Les  FF.*,  de  ces  loges  étaient  en  quelque 
sorte  des  commis  voyageurs  en  f.\-m.\  et  leur  rôle  fut 
considérable  dans  la  propagation  de  l'Ordre. 


C'est  pendant  la  G.*.  Mse.\  du  comte  de  Glermont 
qu'aurait  été  donnée  la  patente  d'Etienne  Morin,  autour 
de  laquelle  les  maçons  du  rite  écossais  ancien  accepté 
ont  beaucoup  discuté  sous  le  Directoire  et  sous  l'Empire 
pour  établir  la  régularité  de  leurs  constitutions,  qu'ils 
disaient  tenir  d'Etienne  Morin,  dûment  autorisé  par  le 
conseil  des  Empereurs  d'Orient  et  d'Occident  qui 
pratiquait  le  rite  de  Perfection. 

Cette  patente,  qui  n'est  connue  que  par  des  traduc- 
tions anglaises  retraduites  en  français,  est  à  bon  droit 
suspecte.  C'est  en  1798  et  1799  qu'on  produisit  pour 
la  première  fois  des  copies  de  ce  document,  au  moment 
de  la  première  tentative  de  reconstitution  du  rite 
écossais  ancien  accepté.  Cette  patente  aurait  figuré  sur 
le  livre  d'or  de  Delahogue  que  possède  le  suprême  con- 
seil de  la  juridiction  Sud  des  États  d'Amérique. 

Tous  les  documents  contenus  dans  ce  recueil  sont 
certifiés  exacts  par  le  comte  Alexandre-François- 
Auguste  de  Grasse-Tilly,  capitaine  de  cavalerie,  auquel 
le  suprême  conseil  du  33e  degré  de  Charlestown  aurait, 
en  vertu  de  la  patente  de  Morin,  donné  le  pouvoir 
d'initier  à  ce  degré  et  de  constituer  dans  les  deux 
hémisphères  loges,  chapitres  et  consistoires  du  rite 
ancien.  Le  comte  de  Grasse-Tilly  était  un  maçon  très 
actif  que  ses  coreligionnaires  accusèrent,  ainsi  que  le 
frère  Abraham,  de  fort  vilaines  choses  plus  ou  moins 
exactes.  En  1804,  Grasse-Tilly  fonda,  pour  la  France, 
le  Suprême  Conseil  des  Souverains  Grands  Inspecteurs 


186  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Généraux  du  33e  degré  ;  il  était  Vénérable  de  la  loge 
Saint-Napoléon  à  l'Orient  de  Paris.  Représentant  à  vie 
du  G.\  M  .dans  le  Gr.\  Chap.*.  Gén.\  du  G.*.  0.*.  de 
France,  Gr.\  Gom.\  ad  vitam,  Président  du  Suprême 
Gons.  des  Souv.\  Gr.\  Insp.*.  Gén.\  du  33e  degré, 
membre  honoraire  de  toutes  les  L.\  et  Chap.-.  de 
France.  Le  4  juillet  1811,  il  fonda  à  Madrid  un  Su- 
prême Conseil  du  33e  degré. 

Or,  la  validité  de  tous  ces  pouvoirs  reposait  sur 
l'authenticité  de  la  patente  de  Morin.  Grasse-Tilly  était 
très  capable  d'inventer  cette  pièce,  comme  Gerbier  avait 
inventé  la  patente  de  1721.  Le  document  est  composé 
avec  plus  de  soins  que  celui  fabriqué  par  Gerbier,  car 
il  ne  contient  pas  d'anachronismes  brutaux  ;  en  cher- 
chant bien,  on  peut  constater  que  le  Conseil  des  Empe- 
reurs d'Orient  et  d'Occident  prend  le  titre  de  Grand 
Conseil  des  Loges  régulières  sous  la  protection  de  la 
grande  et  souveraine  loge  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  (1), 
erreur  qui,  en  changeant  l'origine  du  document,  n'en 
entraînerait  pas  la  fausseté.  Le  reste,  il  faut  le  recon- 
naître, est  exact  ou  peut  l'être. 

Daté  du  27  août  1761,  il  est  signé  par  Chaillon  de 
Jonville,  substitut  général  de  V ordre,  et  par  Lacorne, 
substitut  du  G.'.M.'.,  et  ce  n'est  qu'en  1762  que  Chaillon 
remplaça  Lacorne  dans  ses  dernières  fonctions.  Il  est 
aussi  signé  par  le  prince  (Camille)  de  Rohan,  Me  de  la 
G.'.L.*.  l'Intelligence,  Souverain  Prince  de  la  maçon- 
nerie ; 

Maximilien  de  Saint-Siméon,  1er  surveillant,  G.',  élu 
Parfait,  Chevalier  et  Prince  maçon  ; 


(1)  Je  ne  trouve  pas  trace  de  cette  loge  avant  1766  ;  il  est  cepen- 
dant possible  qu'elle  ait  commencé  ses  travaux  avant  cette 
époque. 


LES  DÉBUTS  DE  LÀ  P.'.-M/.  EN  FRANCE     187 

Savalète  de  Bukley,  G.*.  Garde  des  sceaux,  G.*,  élu 
Parfait,  G.*.  Chev.   et  Prince  maçon; 

Taupin  G.\  Ambassadeur  de  S.#.  H.*.  G.*.  Elu 
Parfait  Chev.  et  Prince   maçon  ; 

Le  comte  de  Choiseul,  Vén.  M.*,  de  laLoge  des  En- 
fants de  la  Gloire,  G.*.  Elu  Parfait  Chev.  et  Prince  maçon; 

Boucher  de  Lenoncourt,  Vén.  M.',  de  la  Loge  de 
la  Vertu,  G.-.  Elu  Parfait  Chev.  et  Prince  maçon  ; 

Brest  delà  Chaussée,  Vén.  M.*,  de  la  Loge  de  l'Exac- 
titude, G.'.  Elu  Parfait  Chev.  et  Prince  maçon. 

Il  est  enfin  contresignée  par  ordre  de  la  G.*.  L.\ 
par  Daubertin,  G.\  Élu  Parfait  Chev.  et  Prince  maçon, 
Vén.  M.*,  de  la  Loge  de  Saint-Alphonse,  G.  Secrétaire 
de  la  G.*.  L.\  et  du  Sublime  Conseil  des  Princes  ;  Par- 
faits Maçons  en  France. 

Or,  tous  ces  titres  sont  exacts  et  tous  les  person- 
nages sont  réels  ;  à  part  Saint-Siméon,  je  les  ai  retrouvés 
à  cette  époque  occupant  ces  mêmes  fonctions  dans  des 
documents  d'une  authenticité  indiscutable,  sauf  le 
comte  de  Choiseul,  qui  ne  pouvait  en  1761  être  Véné- 
rable des  Enfants  de  la  Gloire,  cette  loge  n'ayant  été 
constituée  que  le  28  octobre  1762. 

Reste  le  titulaire  même  de  la  patente  :  Etienne  Morin, 
dénommé  Stephen  Morin  d'après  la  traduction  anglaise, 
dont  on  a  voulu  faire  un  juif  à  cause  de  son  prénom 
sous  la  forme  anglaise.  Ni  Stephen,  ni  Morin  ne  sont 
des  noms  juifs,  et  quant  au  personnage  lui-même,  juif 
ou  chrétien,  on  n'a  pu  jusqu'ici  l'identifier  avec  certi- 
tude. Dans  la  patente  il  est  qualifié  Respectable  Maître 
de  la  Parfaite  Harmonie  et,  à  ma  connaissance,  une 
seule  loge  en  France  portait  ce  titre  à  cette  époque  ; 
elle  était  à  l'Orient  d'Abbeville  ;  mais,  ainsi  que  je  l'ai 
déjà  dit,  je  ne  connais  pas  les  noms  de  toutes  les  loges 
pendant  cette  période. 


188  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Parmi  les  treize  f. •.-m.',  portant  le  nom  deMorin 
que  j'ai  relevés  sur  mes  listes,  il  en  est  un  qui  est  très 
probablement  le  titulaire  de  la  célèbre  patente  :  c'est 
Etienne  Morin  de  Saint-Cirque,  entrepreneur  de  la 
verrerie  de  Sèvres,  puis  distributeur  des  Nouvelles 
ecclésiastiques,  enfermé  pour  délit  de  presse  à  la  Bas- 
tille et  élargi  par  ordres  contresignés  Maurepas,  datés 
des  22  juillet  1747  et  27  juillet  1748.  Sa  femme,  Marie- 
Nicole  Boudet,  avait  été  enfermée  en  même  temps  que 
lui  et  pour  les  mêmes  causes  du  22  juillet  au  16  décem- 
bre 1747. 


La  f.\-m.\  française  touchait  à  un  moment  critique 
de  son  existence. 

La  nomination  de  Lacorne  à  la  tête  de  l'administra- 
tion avait  provoqué  des  murmures  qui  s'accentuèrent 
d'autant  plus  qu'après  s'être  empressé  de  prendre  posses- 
sion de  ses  fonctions,  il  s'affubla  des  plus  hauts  grades 
et  peupla  la  G.*.  L.  *.  de  ses  créatures.  Un  grand  nombre 
de  maçons  donnèrent  leur  démission  ou  cessèrent  de 
participer  aux  travaux,  puis  exaspérés  refusèrent  de 
s'assembler  sous  sa  présidence. 

Furieux,  Lacorne  s'entoure  de  tous  les  gens  tarés, 
recrute  de  nouveaux  initiés  dans  les  cabarets  et  forme 
ainsi  une  Gr.\  L.\  concurrente.  La  lutte  s'engage  avec 
fureur,  et  le  désordre  devient  tel  que  le  comte  de  Cler- 
mont,  obligé  de  sortir  de  son  apathie,  révoque  Lacorne 
en  janvier  1762  et  nomme  à  sa  place  Chaillon  de  Jon- 
ville,  avec  le  titre  de  substitut  général.  Un  calme 
relatif  se  produit  et  les  deux  grandes  loges  se  réconci- 
lient le  24  juin  1762  ;  les  postes  honorifiques  sont 
partagés.  Néanmoins  personne  n'est  satisfait  et  bientôt 


LES    DÉBUTS    DE  LA   IV.-M.*.    EN    FRANCE  180 

la  lutte  recommence.  Au  renouvellement  des  officiers, 
qui  devait  avoir  lieu  en  1765,  des  cabales  se  forment 
et  Lacorne  et  ses  partisans  sont  tous  exclus  le  2  juin. 

Les  frères  exclus  refusent  d'assister  à  la  fête  du 
24  juin  suivant  et  publient  de  nombreux  libelles  contre 
les  frères  élus.  La  G.*.  L.\  met  les  auteurs  de  ces  atta- 
ques en  demeure  de  les  rétracter  sous  peine  d'exclusion 
définitive. La  plupart  obéissent,  et  les  quinze  qui  refusent 
sont  rayés  par  décrets  des  11  juillet  et  21  décembre 
1765.  Ils  sont  enfin  bannis  les  5  avril  et  14  mai  1766 
et  déclarés  déchus  de  tous  leurs  droits.  Les  frères 
frappés  de  cet  ostracisme  sont  les  frères  Bigarré,  Dau- 
bertin,  Duret,  Guillet,  Guillot,  Hardy,  Labady,  Lacan, 
Leveillé,  Maurin,  Peny,  Perrault,  Pethe,  Pirlet  et 
Poupart. 

La  G.*.  L.\  régénérée,  comme  s'appelaient  naturelle- 
ment les  frères  qui  s'étaient  emparés  du  pouvoir,  se 
composait,  le  1er  janvier  1765,  des  officiers  suivants  : 

Méry-Darcy,  Dr  de  la  Cie  des  Indes,  Prés.  ;  Bacquet, 
Prés.  ;  Duret,  Surveillant  ;  Leveillé,  Surveillant  ;  Deveau 
de  Moiré,  Surveillant  ;  Moët,  off.  de  la  maison  du  Roi, 
Secret,  gén.  ;  Levrault,  Secret.  ;Gillet,  Secret.  ;  Picot  du 
Breuil,  Secret.  ;  Leroy  Louis-François,  avocat  au  Pari., 
Orat.  ch.  Paris  ;  Ledin,  Trésorier  ;  Prader,  Expert  ; 
Goûteux,  Expert  ;  Paris,  Expert  ;  Martin,  Expert  ; 
Guaisnard  Jean,  de  Genève,  Exp.  ch.  Paris  ;  Lacan, 
Exp.  hospit.  ;  Poilet,  Maître  ;  Paillan,  Exp.  hospit.  ; 
Lexcombart,  Exp.  hospit.;  Chaudron,  Aumônier;  La 
Chaussée,  G.  Se.  T.  et  Arch.  ;  Puisieux,  arch.  juré  du 
roi,  Architecte. 

Le  14  août  1766  la  G*.  L.\,  qui  prenait  le  titre  de 
Grand  Orient  de  France,  était  composée  de  : 

Moët,  président  de  la  T.*.  R.\  G.*.  L.\,  Le  Lorrain, 
Huet  du  Plessis,  Baudson,  Gaillard,  Paris,  Richard, 


190  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Saunier,  Borel,  Pingre,  Lafin,  Lexcombart,  Goulard, 
Leroy,  orateur,  Zambault,  secrétaire  général,  Brest  de 
la  Chaussée,  garde  des  sceaux,  Joubert  de  la  Bourdi- 
nière. 

Les  lettres  devaient  être  adressées  à  Zambault,  rue 
de  la  Grande-Truanderie. 

Le  21  septembre  1766,  le  Conseil  Souverain  des  Che- 
valiers d'Orient  de  France  se  composait  des  frères  : 
Moët,  Zambault,  Leroy,  Le  Lorrain,  Baudson,  Marcel, 
Ledin,  Desalla,  Bougault,  Beauvillain,  Gouin,Paulmier 
Deynaut.  Les  lettres  devaient  être  adressées  à  Brest  de 
la  Chaussée,  rue  de  la  Chanvrerie. 

Par  suite  de  toutes  ces  discussions,  la  G.*.  L.\ 
n'avait  pu  célébrer  la  fête  de  l'Ordre  du  27  décembre 
1766  ;  on  avait  dû  la  remettre  au  4  février  suivant.  Les 
frères  bannis  se  présentèrent  pour  entrer  *,  sur  le  refus 
des  gardiens,  ils  employèrent  la  violence  et  forcèrent 
les  portes  du  temple.  Comme  on  ne  leur  permit  pas 
d'assister  à  la  tenue,  on  échangea  des  injures  et  bientôt 
des  coups.  Le  scandale  fut  énorme  ;  le  comte  de  Cler- 
mont  refusa  de  se  mêler  au  débat,  et  le  lendemain 
M.  de  Sartines  interdit  les  assemblées  de  la  G.'.L.*., 
qui  furent  ainsi  suspendues  jusqu'à  la  mort  du  comte 
de  Clermont. 

Les  partisans  de  Lacorne  en  profitèrent  pour  se 
réunir  chez  Labady.  Le  lieutenant  de  police  fait  aussitôt 
arrêter  ce  dernier  ;  il  est  emprisonné  et  exilé  à  Blois. 
Lacorne  laissa  le  calme  se  produire,  et  lorsqu'il  crut 
que  le  temps  avait  amené  l'oubli,  il  reforma  une  nou- 
velle G.*.  L.\  dans  le  faubourg  Saint-Antoine,  qui  se  mit 
aussitôt  à  constituer  à  Paris  et  en  province.  Il  parvint 
à  entrer  en  correspondance  avec  la  G.\L.\  d'Angleterre 
et  à  se  faire  reconnaître  par  elle,  puis  lança  une  circu- 
laire aux  loges  de  province.  La   nouvelle  G.\  L.*.  de 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F.'. -M.*.  EN  FRANCE     101 

France  annonce  que  les  ff.\  Peny,  Duret  et  Leveillé  ont 
reçu  en  délégation  tons  les  pouvoirs  de  l'ancienne 
Grande  Loge  (1). 

Pendant  ce  temps,  l'ancienne  G.'.  L. \  fonctionnait 
néanmoins,  mais  clandestinement.  Chaillon  de  Jonville 
et  Brest  de  la  Chaussée,  garde  des  sceaux  et  timbres, 
continuaient  la  correspondance  et  constituaient  des 
loges  de  leur  côté,  profitant  de  toutes  les  circonstances 
pour  discréditer  leurs  adversaires.  Le  8  octobre  1769,  ils 
adressent  à  cet  effet  une  circulaire  à  toutes  les  loges  de 
France.  Le  28  février  1770,  quelques  maçons  essayèrent, 
mais  sans  succès,  de  réformer  la  G.*.  L.*.  Presque  per- 
sonne ne  se  rendit  à  la  convocation.  L'année  suivante 
le  comte  de  Clermont  mourait. 


La  direction  centrale  maçonnique  ainsi  supprimée, 
on  pourrait  supposer  que  l'Ordre  était  en  train  de  dis- 
paraître de  France.  Mais  il  n'en  était  rien  ;  les  loges 
avaient  plus  ou  moins  conservé  leur  vie  particulière, 
formant  des  centres  régionaux,  demandant  ou  octroyant 
des  constitutions  et  se  groupant  suivant  les  systèmes 
qui  étaient  pratiqués. 

La  f.*.-m.\  ainsi  dispersée  ne  présentait  pas  en 
France  un  danger  social  immédiat.  Alors  qu'en  Angle- 
terre l'unité  se  faisait  chaque  jour,  en  France  comme 
en  Allemagne,  l'ordre  éparpillé  n'avait  pas  d'unité 
d'action.  Dans  ces  conditions,  la  f.\-m.\  devait  dispa- 
raître ;  elle  n'entrait  pas  en  sommeil,  elle  se  mourait, 
ayant  perdu  sa  qualité  essentielle  qui  était  sonorganisa- 

(1)  En  1758,  le  secrétaire  général  était  Robineau  et  les  secré- 
taires :  Devaux  (1758),  marquis  de  Briqueville  (1762),  Moët 
(1763). 


192       LA  FRANC -MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

tion  homogène  et  surtout  l'uniformité  de  la  mentalité 
de  ses  adeptes.  Cependant,  si  la  maçonnerie  expirait 
en  France  comme  société,  son  dogme  égalitaire  s'y 
était  implanté  plus  que  dans  aucune  autre  contrée  du 
monde  ;  c'est  là  qu'il  devait  produire  le  plus  de  mal. 
Que  tous  ces  égalitaires  dispersés  soient  groupés  sous 
une  direction  unique,  qu'ils  acceptent  la  discipline,  et 
l'on  verra  bientôt  le  cataclysme  social  éclater.  Le  mal 
couvait  et  une  étincelle  pouvait  le  ranimer.  Ce  réveil 
sera  l'œuvre  du  G.*.  0.*. 

Tous  les  petits  commerçants,  tous  les  clercs  de  pro- 
cureurs qui  étaient  entrés  dans  les  loges,  considérés 
comme  des  frères  par  les  grands  seigneurs  qu'ils  trai- 
taient en  égaux,  conservaient  leurs  idées  maçonniques 
en  dehors  de  l'atelier;  ils  trouvaient  l'égalité  aussi  vraie 
en  dehors  qu'au  dedans,  et  lorsque  les  grands  seigneurs 
ou  les  hauts  fonctionnaires  voulurent,  mais  trop  tard, 
les  expulser  des  loges,  ils  protestèrent,  s'exaspérèrent 
et  décidèrent  fermement  qu'ils  prendraient  les  pre- 
mières places,  puisqu'ils  pouvaient  le  faire.  Comme 
ils  étaient  le  nombre,  ils  devaient  triompher,  ils  en 
avaient  la  certitude.  Le  vote  par  ordres  était  supprimé 
dans  les  loges  depuis  longtemps  lorsqu'on  le  suppri- 
mera aux  Etats  généraux. 

Louis  XV  avait-il  vu  clair  lorsqu'il  fit  fermer  la 
G.'.L.*.  et  renvoya  les  parlements?  On  pourrait  le  croire, 
s'il  n'avait  pas  laissé  le  G.*.  0.\  se  reformer  en  1772  et 
1773,  à  moins  que  ceux  qui  se  mirent  à  la  tête  de  la 
maçonnerie  à  cette  époque  n'aient  eu  le  talent  de  le 
convaincre  qu'en  s'emparant  de  l'Ordre  ils  suppri- 
maient le  danger,  et  peut  être  le  crurent-ils  de  bonne  foi 
et  entraînèrent-ils  la  royauté  dans  cette  voie  si  funeste 
en  croyant  la  sauver.  Louis  XV,  qui  était  resté  ferme 
contre  les  Parlements,  céda  devant  la  maçonnerie. 


LES  DÉBUTS  DE  LA  F.\rM.\  EN  FRANGE     193 

Comment  se  retrouver  dans  ce  labyrinthe?  Faut-il 
prêter  à  des  hommes  des  vues  aussi  profondes  à  des 
échéances  aussi  lointaines  ?  N'est-il  pas  plus  logique, 
comme  nous  l'avons  dit  précédemment,  d'admettre  que 
le  dogme  maçonnique  fut  plus  fort  que  les  maçons,  que 
c'est  lui  qui  triompha  plus  que  ceux  qui  le  pratiquaient? 
Un  vertige  ne  s'était-il  pas  aussi  emparé  de  tous  les  cer- 
veaux, de  ceux  des  rois  et  des  princes  comme  de  ceux 
du  premier  maçon  venu?  A  part  l'Autriche,  l'Espagne 
et  le  Portugal,  les  autres  nations  protégeaint  la  f.\-m.\, 
et  encore  l'Espagne  et  le  Portugal  la  toléraient-ils. 

Lorsque  les  maçons  étrangers  virent  le  désarroi  qui 
s'était  emparé  des  maçons  français,  ils  essayèrent  d'en- 
vahir la  France  et  d'y  faire  fleurir  leurs  régimes.  A 
partir  de  1772,  une  nuée  d'étrangers  envahit  notre  pays, 
placé  au  centre  des  nations  européennes  ;  Paris  et  Ver- 
sailles furent  les  lieux  de  rendez-vous  de  tous  ceux  qui 
recherchaient  les  satisfactions  les  plus  élevées  de  l'in- 
telligence, les  plaisirs  les  plus  raffinés,  comme  les  vices 
les  plus  dégradants.  Tous  ces  gens  nous  arrivent 
d'Angleterre,  d'Allemagne,  de  Suède,  de  Danemark,  de 
Russie  et  de  Suisse.  La  société  parisienne  devient  cos- 
mopolite ;  les  Anglais  sont  accueillis  avec  empresse- 
ment par  les  gens  de  la  Cour  ;  les  Allemands  par  les 
hommes  de  science  ;  les  Suisses  s'emparent  des  finan- 
ciers et  les  remplacent.  La  f.\-m.\  anglaise  inspire 
le  G.*.  0.*.  ;  la  f.\-m.\  allemande,  les  philosophes.  Au 
milieu  de  cette  confusion  de  peuples,  les  idées  égali- 
taires  et  cosmopolites  font  de  tels  progrès  que  la 
France  entière  en  est  imprégnée.  Les  f.'.-m.'.  l'ont 
saturée  de  ces  utopies  dangereuses.  Tout  le  monde 
conspire  contre  Tordre  de  choses  établi,  le  plus  souvent 
sans  le  vouloir  et  sans  le  savoir.  L'idée  chemine,  arrive 
et   triomphe.   C'est    la    course    à  l'abîme.  La   vieille 

LA    KRANC-MACONNERIE.  —    T.  I.  13 


194  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

France  en  mourra.  Qui  pourra  dire  quelle  nation 
renaîtra  de  ses  cendres  ?  Naîtra-t-il  même  un  nouveau 
peuple  ? 

Est  ce  que  personne  ne  vit  clair  dans  cette  nouvelle 
orientation  donnée  à  la  vie  sociale  de  l'Europe  ?  Est- 
ce  que  personne  ne  vit  le  danger  vers  lequel  l'huma- 
nité était  entraînée? 


La  Papauté  fut  le  seul  pouvoir  qui  se  rendit  nette- 
ment compte  du  péril  que  présentait  la  maçonnerie,  et 
cela  presque  dès  le  début.  Lorsque  le  pape  Clément  XII 
lança,  le  4  mai  1738,  sa  bulle  In  eminenti  apostolatûs 
spécula,  des  enquêtes  avaient  dû  être  faites  sur  les  agis- 
sements de  la  secte,  et  il  serait  de  la  plus  haute  impor- 
tance d'avoir  communication  des  mémoires  qui  furent 
adressés  au  Vatican,  s'ils  existent  encore.  La  bulle,  en 
effet,  ne  vise  aucun  fait  précis,  et  se  borne  aux  attaques 
générales  ;  mais  ses  termes  sont  trop  formels  pour  ne 
pas  avoir  été  provoqués  par  des  faits  particuliers 
indiscutables  : 

«  Nous  avons  appris,  dit  Clément  XII,  et  le  bruit  pu- 
blic ne  nous  a  pas  permis  d'en  douter,  qu'il  s'était  formé 
une  certaine  société,  assemblée  ou  association,  sous  le 
nom  de  francs-maçons  ou  Liberi  Muratori,  ou  sous  une 
appellation  équivalente,  suivant  la  diversité  des  langues, 
dans  laquelle  sont  admises  indifféremment  des  per- 
sonnes de  toute  religion  et  de  toute  secte,  qui,  sous  les 
dehors  affectés  d'une  probité  naturelle,  qu'on  exige  et 
dont  on  se  contente,  se  sont  établi  certaines  lois, 
certains  statuts  qui  les  lient  les  uns  aux  autres, 
et  qui,  en  particulier,  les  obligent,  sous  les  plus 
grièves  peines,  en  vertu   d'un  serment   prêté   sur  les 


LES  DÉBUTS  DE  LA  P.'.-M.'.  EN  FRANCE     195 

saintes  Ecritures,  de  garder  un  secret  inviolable  sur 
tout  ce  qui  se  passe  dans  leurs  assemblées.  » 

Le  pape  interdit,  en  conséquence,  de  (aire  partie  de 
ces  sociétés,  de  favoriser  leur  accroissement,  de  leur 
donner  asile  chez  soi  ou  ailleurs,  sous  peine  d'excom- 
munication. 

Le  15  juin  1751,  le  pape  Benoît  XIV  renouvela,  par 
sa  bulle  Providas  Romanorum  Pontificam,  les  prohibi- 
tions de  son  prédécesseur  et  précisa  les  conséquences 
funestes  que  devaient  avoir  ces  associations  :  Attendu 
«  que  dans  ces  sortes  de  sociétés  et  assemblées  se- 
crètes, on  associe  indistinctement  les  hommes  de  toute 
secte  et  religion,  d'où  il  est  évident  qu'il  doit  résulter 
un  grand  dommage  pour  la  pureté  de  la  religion 
catholique  »,  et  que  «  l'obligation  stricte  du  secret 
impénétrable,  par  lequel  sont  cachées  toutes  les  choses 
qui  se  passent  dans  ces  assemblées  secrètes,  auxquelles 
on  peut  avec  raison  adapter  l'adage  dont  s'est 
servi  Cecilius  Natalis,  dans  la  cause  très  différente 
néanmoins  contre  Minutius  Félix  :  Les  choses 
honnêtes  se  plaisent  au  plein  jour  ;  les  crimes  sont 
secrets.  » 

Le  pape  relève  ensuite  les  maçons  d'un  serment  pro- 
noncé dans  les  conditions  où  ils  se  trouvaient  quand 
on  le  leur  avait  demandé  ;  «  comme  s'il  était  permis  à 
quelqu'un  de  s'étayer  d'une  promesse  ou  d'un  serment, 
pour  se  dispenser  de  répondre  à  la  puissance  légitime 
qui  rechercherait  à  connaître  si  dans  ces  sortes  d'as- 
semblées secrètes,  il  ne  se  ferait  pas  quelque  chose 
contre  l'Etat,  la  religion  et  les  lois.  » 

Le  caractère  secret  de  la  f.\-m.\  n'était  alors  nié  par 
personne,  les  nV.-mm.*.  le  reconnaissant  hautement. 
Quelques  années  plus  tard,  un  de  leurs  premiers  histo- 
riens, Thory,  débute  dans  son  avant-propos  de  YHis- 


196  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

toire  de  la  fondation  du  G.'.  0.\  de  France,  par  cet 
aveu  :  «  De  toutes  les  associations  secrètes,  la  plus 
répandue  en  France,  et  en  même  temps  la  moins  connue 
sous  les  rapports  historiques,  est,  sans  contredit, 
l'Ordre  de  la  Franche-Maçonnerie.  » 

La  Papauté  avait  bien  vu  le  péril  ;  en  temps  utile 
elle  l'avait  signalé. 

Elle  ne  fut  pas  crue  ;  en  France  elle  ne  fut  même  pas 
écoutée.  Les  Parlements  refusèrent  d'enregistrer  les 
bulles  pontificales  qui,  n'étant  pas  fulminées,  ne  pou- 
vaient avoir  aucun  effet  utile .  Un  monde  allait  dispa- 
raître. 


CHAPITRE  VI 
L'IDÉE   MAÇONNIQUE  ET  LES  GRADES 

Le  travail  de  loge.  —  L'habileté  de  la  nature.  —  Les  dupes.  — 
Les  jésuites.  —  Les  chefs  secrets!  —  Le  symbolisme.  —  Les 
cérémonies  initiatiques.  —  Retour  à  l'alchimie  et  à  la  kabbale. 
—  Les  grades.  —  Les  Rose-Croix.  —  Les  Réaux-Croix.  —  Le 
chevalier  Kadosh. 

Une  des  erreurs  les  plus  répandues  parmi  les  pro- 
fanes est  d'assimiler  les  grades  maçonniques  aux  grades 
dans  l'armée,  alors  qu'ils  devraient  être  plutôt  assimi- 
lés aux  grades  universitaires. 

Les  grades  symboliques,  les  seuls  classiques  en  ma- 
çonnerie :  apprenti,  compagnon  et  maître,  correspon- 
dent dans  une  certaine  mesure  aux  grades  de  bachelier, 
licencié  et  agrégé. 

L'obtention  de  ces  grades  témoigne  de  connaissances 
maçonniques  plus  ou  moins  avancées,  mais  ne  con- 
fère pas  ipso  facto  à  ceux  qui  les  obtiennent  une 
autorité  sur  ceux  qui  ont  des  grades  inférieurs. 

Au  xviiic  siècle,  la  complication  des  grades  était 
extrême  ;  chaque  régime  avait  sa  série  spéciale  qui 
n'était  pas  reconnue  par  le  régime  voisin. 

Chaque  grade  correspondait  à  un  avancement  dans 
la  science  ou  mieux  dans  l'art  maçonnique  qu'on  appe- 
lait alors  l'Art  Royal,  ce  qui  voulait  dire  pour  les  uns 
l'art  de  restaurer  les  Stuarts,  pour  les  autres  l'art  par 
excellence.  Qu'était  donc  cet  Art  suprême  ? 


198  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Pour  les  uns  c'était  l'étude  de  l'homme  :  ses  origines, 
son  existence,  son  but  ;  pour  les  autres  c'était  l'art  de 
mener  les  hommes,  la  première  solution  étant  seule- 
ment l'étape  nécessaire  pour  arriver  à  la  seconde. 

Au  premier  abord,  de  semblables  études  n'ont  rien  de 
répréhensible;  la  curiosité  en  pareilles  matières  ne 
peut  être  que  fort  louable. 

On  peut  à  la  vérité  s'étonner  cependant  que,  pour 
se  livrer  à  ces  études  profondes,  on  s'enferme  avec  un 
soin  jaloux  et  qu'on  fasse  prêter  à  ceux  qu'on  admet  à 
y  participer  le  serment  de  garder  le  secret.  Il  semblerait 
au  contraire  que,  par  amour  de  l'humanité,  on  devrait 
propager  les  lumières  et  transformer  le  temple  en  Soleil 
dont  les  Etoiles  extérieures  pourraient  augmenter  l'é- 
clat. » 

On  serait  en  droit  de  s'étonner  aussi  que  des  gens 
d'un  modeste  intellect  et  d'une  instruction  sommaire 
soient  appelés  à  collaborer  à  des  travaux  qui  demandent 
du  temps,  une  intelligence  supérieure  et  des  connais- 
sances approfondies.  Etudier  en  effet  les  origines  de 
l'homme,  c'est  étudier  l'origine  de  l'humanité,  et  étu- 
dier l'origine  de  l'humanité,  c'est  étudier  l'origine  du 
monde.  Pour  rester  dans  le  domaine  des  sciences 
exactes,  c'est  connaître  la  cosmogonie,  la  cosmographie, 
la  géologie,  la  paléontologie  et  l'anatomie  aussi  bien 
que  la  métaphysique  ,  la  chimie  et  la  physique.  Je  sais 
plus  d'un  maçon  du  xvme  siècle  qui  s'est  livré  à  ces 
études  avec  un  acharnement  et  une  sincérité  vraiment 
édifiantes.  Leurs  correspondances,  que  j'ai  été  à  même 
de  parcourir,  en  font  foi.  Ils  échangeaient  entre  eux  des 
vues  bizarres,  de  temps  en  temps,  pas  souvent,  des 
combinaisons  ingénieuses,  mais,  en  résumé,  aucune 
idée  digne  d'être  retenue. 

On    a  beau  leur  enseigner  que  la    maçonnerie  est 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  199 

«  Thabilctéde  la  nature,  l'intelligence  du  pouvoir  qui  est 
dans  la  nature  et  ses  diverses  opérations  ».  On  a  beau 
leur  expliquer  que  l'habileté  de  la  nature  est  d'engen- 
drer, que  l'intelligence  du  pouvoir  qui  est  dans  la  na- 
ture est  la  Nature-Dieu,  et  que  les  différentes  opérations 
de  la  nature  sont  la  génération  universelle,  quels  secrets 
révèle-t-on,  quelles  idées  fait-on  naître,  si  ce  n'est  que 
l'Acte  générateur  est  l'acte  d'un  Dieu,  que  le  Feu  sacré 
est  la  semence  universelle  de  tous  les  êtres,  que  la  Pa- 
role est  la  faculté  de  produire,  ainsi  qu'on  l'enseigne  au 
compagnon? 

Comme  ils  ne  trouvaient  pas  la  solution  avec  leurs 
propres  moyens,  beaucoup  recherchaient  le  secret 
perdu.  L'homme  primitif  savait,  croyaient-ils.  Quelques- 
uns,  élevés  cependant  dans  la  foi  chrétienne,  oubliaient 
que  l'homme  avait  été  puni  pour  avoir  voulu  savoir  ce 
qu'il  ne  pouvait  et  ne  devait  pas  savoir:  le  mystère  de 
sa  création  et  son  avenir.  Quel  est  l'homme  qui  sup- 
porterait la  vie  s'il  connaissait  son   lendemain? 

Comme  naturellement  ces  chercheurs  ne  trouvaient 
rien,  beaucoup  parmi  eux  s'en  prenaient  à  l'auteur  de 
toutes  choses  et  arrivaient  rapidement  à  conclure  que 
s'ils  ne  trouvaient  rien  c'est  qu'il  n'y  avait  rien,  et  pour 
se  consoler  de  la  désespérance  de  ce  néant,  ils  décla- 
raient indifférent  le  problème  des  origines. 

Comme  ils  avaient  trouvé  vide  la  première  chapelle 
de  leur  temple,  ils  frappaient  à  la  porte  de  la  seconde- 
Là,  au  moins,  ils  trouveraient  la  clef  du  mystère  de 
notre  être.  L'homme  est-il  ou  n'est-il  pas  ?  Qu'est-ce 
que  son  corps  ?  Qu'est-ce  que  son  âme  ?  Il  est  certain 
qu'il  a  un  corps,  mais  a-t-il  une  âme  ?  Et  ils  recom- 
mençaient à  agiter  tous  ces  problèmes,  revenant  tou- 
jours malgré  eux  à  l'origine  du  corps  et  de  l'âme,  et  ils 
trouvaient  la  seconde  chapelle  vide  comme  la  première. 


200  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Ces  étapes  sont  celles  que  doit  parcourir  le  maçon 
pour  se  perfectionner  dans  l'art,  pour  gagner  ses  grades. 
Si  sa  patience  n'est  pas  à  bout,  s'il  a  les  loisirs  de  s'oc- 
cuper de  spéculations  métaphysiques  qui  ne  nourrissent 
pas  son  corps,  il  sera  prêt  à  entrer  dans  la  troisième 
chapelle,  et  les  frères  qui  en  ont  déjà  franchi  la  porte 
lui  permettront  de  la  franchir.  Là,  on  lui  apprendra 
que  tout  ce  qu'il  a  fait  jusqu'ici  n'a  aucun  intérêt,  que 
ces  études  ne  conduisent  à  rien,  mais  qu'il  était  néces- 
saire qu'il  connût  par  lui-même  ces  vérités  négatives. 
Ce  qui  est  intéressant  et  ce  qu'il  faut  qu'il  apprenne, 
c'est  comment  on  conduit  les  hommes,  comment  on  les 
fait  concourir,  malgré  eux,  à  la  prospérité  de  l'Ordre. 
On  leur  explique  comment  un  petit  groupe  organisé  en 
aristocratie  secrète  mène  la  foule  non  organisée  ;  com- 
ment un  pouvoir  occulte,  irresponsable  mais  actif, 
mène  le  pouvoir  responsable  et  le  rend  le  principal 
artisan  de  sa  décadence  et  de  sa  mort.  On  leur  apprend 
que  les  vices  de  l'humanité  sont  les  grands  leviers  des 
habiles  ;  que,  dans  la  pratique,  on  ne  rencontre  qu'un 
obstacle  :  la  révolte  de  la  conscience  humaine,  cette 
chose  qu'ils  n'ont  pu  saisir  ni  comprendre  dans  les  deux 
premières  chapelles,  et  que  tout  l'art  consiste  à  endor- 
mir cette  conscience  pour  l'empêcher  de  se  révolter.  On 
leur  apprend  que  lorsqu'il  suffira  à  l'homme  de  déposer 
un  bulletin  anonyme  dans  une  urne  pour  entretenir  ses 
vices  et  flatter  son  orgueil,  il  le  mettra. 

Lorsque  l'initié  saura  tout  cela,  il  sera  un  maçon  par- 
fait ;  sa  mentalité  maçonnique  sera  parachevée.  En 
aucune  circonstance,  il  ne  sera  nécessaire  de  lui  donner 
un  ordre  compromettant,  il  agira  de  lui-même  et  il  fera 
agir,  conformément  à  la  doctrine  maçonnique,  il  coo- 
pérera consciemment  ou  inconsciemment  au  Grand 
Œuvre. 


l'idée  maçonnique  et  les  GRADES  201 

Voilà  ce  qu'au  xviiic  siècle  on  appelait  le  travail  de 
loge.  Voilà  comment,  au  nom  de  l'égalité,  le  maçon 
escamotait  cette  égalité  à  son  profit.  Il  veut  l'égalité  entre 
initiés,  il  veut  l'égalité  entre  profanes,  mais  il  ne  veut 
pas  l'égalité  entre  initié  et  profane.  Comme  il  connaît 
la  puissance  des  groupements  organisés  et  silencieux, 
il  s'organise  et  commande  le  silence.  Pour  empêcher 
l'ennemi  de  naître,  il  s'attaque  à  tous  les  groupements 
qui  se  créent.  Autant  que  possible,  il  les  absorbe  et,  s'il 
est  impuissant  à  triompher  par  ce  moyen,  il  les  détruit. 
De  tous  les  groupements,  les  plus  puissants  sont  les 
groupements  religieux.  Contre  eux  la  lutte  a  été  perma- 
nente et  il  est  curieux  de  suivre  le  combat  entamé  contre 
le  groupement  ennemi  par  excellence  :  la  Papauté. 
Contre  elle,  tout  d'abord,  les  maçons  ne  luttent  pas  de 
front,  ils  ne  l'attaquent  pas  dans  ses  dogmes,  mais  dans 
sa  discipline.  Dans  la  correspondance  des  maçons, 
comme  dans  celle  de  Willermoz  par  exemple,  on  cons- 
tate qu'autour  de  lui  on  veut  revenir  à  la  primitive 
Eglise  ;  on  reconnaît  la  divinité  du  Christ  qui  avait  mis 
l'humanité  dans  sa  vraie  voie.  Mais  cet  homme  pieux, 
même  dévot,  a  l'horreur  de  la  Papauté;  c'est  elle  qui 
a  tout  perdu,  c'est  d'elle  que  vient  tout  le  mal.  Galli- 
cans, jansénistes  et  parlementaires  pensent  comme  lui, 
aussi  gallicans  et  jansénistes  et  parlementaires  encom- 
brent-ils les  loges.  Ils  feront  plus  tard  le  clergé  consti- 
tutionnel. 


A  la  vérité,  ils  étaient  peu  nombreux,  les  maçons  qui 
se  livraient  à  ce  travail  ;  beaucoup,  partis  pleins  d'ar- 
deur à  la  conquête  du  feu  sacré,  nouveaux  Argonautes, 
sombraient  en    route  ou  succombaient    comme    Pro- 


202  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

méthée.  Hiérophantes  de  nouveaux  mystères,  quel- 
ques-uns se  retiraient  découragés  ;  quelques  autres, 
comme  le  duc  d'Havre,  écoutaient  leur  conscience 
tressaillir,  et  abandonnaient  la  partie. 

Mais  les  cerveaux  de  la  grande  masse  des  maçons 
étaient  modifiés  par  l'ambiance  ;  les  mots  perpétuelle- 
ment murmurés  par  ceux  qu'ils  savaient  plus  avancés 
dans  l'étude  de  l'Art  les  impressionnaient;  ils  croyaient 
que  ceux-là  savaient  ;  ils  retenaient  leurs  lambeaux  de 
révélations,  suivaient  leurs  conseils.  Ceux-là,  demi- 
dupes,  à  leur  tour  faisaient  le  travail  du  dehors,  la 
propagande  de  la  doctrine  maçonnique.  Si  un  adver- 
saire se  présentait,  on  le  tuait  moralement,  on  tâchait, 
au  nom  de  l'humanité,  de  l'anéantir;  s'il  donnait  prise 
à  la  critique,  on  le  poussait  tout  doucement  dans  un 
piège,  on  ameutait  l'opinion  contre  lui.  A  la  veille  de 
la  Révolution,  on  l'accuse  d'accaparement  :  le  pro- 
cédé réussit  toujours  ;  si  le  coupable  résiste  il  est  tué, 
comme  Berthier  ou  Foulon.  C'est  la  foule  des  profanes 
ameutés  qui  aura  commis  l'assassinat  légal.  Le  meur- 
tre anonyme  et  collectif  échappe  à  la  justice.  L'ouvrier 
du  crime  lui-même  sera  épargné.  Les  auteurs  vraiment 
responsables  auront  eu  individuellement  une  si  petite 
part  à  l'attentat,  que  leur  conscience  ne  s'agitera  pas. 
Bien  plus,  pour  beaucoup  d'entre  eux,  la  victime  seule 
est  coupable.  Pourquoi  a-t-elle  résisté  à  l'opinion  publi- 
que ?  Pourquoi  s'est-elle  mise  dans  un  mauvais  cas  ? 
Et  je  sais  des  maçons,  fort  honnêtes  gens  pour  le  reste, 
qui  ont  ainsi  pensé  en  1789  ! 

Comme  nous  l'avons  dit,  le  plus  grand  nombre 
des  maçons  ne  se  livrait  pas  au  travail  de  loge  trans- 
cendant. A  côté  des  loges  exclusivement  aristocratiques 
comme  la  Candeur,  le  Contrat  social,  Saint-Louis  du 
régiment  du  Roi,  Montmorency-Luxembourg  du  régi- 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  2().'5 

mont  de  Ilainaul,  etc.,  il  y  avait,  et  celles-là  étaient  les 
plus  nombreuses,  les  loges  de  menus  employés,  de 
petits  commerçants,  de  clercs  de  procureurs,  d'huis- 
siers... L'objectif  des  membres  des  premières  était  la 
recherche  du  plaisir,  celui  des  secondes  était  la  satis- 
faction de  la  vanité.  La  pratique  et  l'abus  des  plaisirs 
démoralisa  les  uns  ;  le  besoin  de  satisfaire  l'orgueil 
incita  les  autres  à  la  haine.  Lorsque  le  cataclysme 
éclatera,  l'aristocratie  sera  découragée,  les  autres  seront 
forts  de  toute  la  puissance  de  leur  haine  exaspérée.  La 
maçonnerie  est  bien  l'art  de  conduire  les  hommes. 


A  côté  de  la  Papauté  un  autre  corps  organisé  attirera 
dès  le  début  les  attaques  de  la  maçonnerie.  Les  jésuites 
sont  puissants  ;  ils  sont  riches  ;  ils  sont  intelligents  ;  ils 
sont  unis.  Il  faut  les  détruire.  Avec  quelle  habileté  on 
crée  les  dangers  sous  leurs  pas  !  avec  quelle  virtuosité 
on  tire  parti  du  procès  de  la  Chalotais  et  de  celui  du 
Père  La  Valette  !  On  forme  contre  eux  l'opinion  :  dans 
les  loges,  dans  les  salons,  dans  les  sociétés  littéraires, 
dans  les  pamphlets,  dans  la  rue.  Le  maçon  ne  cesse  de 
crier  à  la  persécution  à  l'occasion  des  procès-verbaux 
dressés  chez  des  marchands  de  vin,  pendant  que 
Choiseul  chasse  les  jésuites  de  France,  pour  que  le 
maçon  martyr  s'installe  dans  le  noviciat  de  leur  ordre, 
rue  du  Pot-de-Fer  ;  et  le  courant  de  l'opinion  est  telle- 
ment violent  que  personne  ne  s'aperçoit  de  la  super- 
cherie 1  Cette  proscription  est  tellement  une  tactique 
générale,  que  les  jésuites  sont  chassés  de  tous  les 
royaumes  catholiques,  de  l'Espagne,  du  Portugal  et, 
ce  qui  est  plus  extraordinaire,  de  Rome  même  !  Voilà 
comment  on  conduit  les  hommes. 


204  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

Pour  remporter  toutes  ces   victoires,    y  a-t-il   une 
volonté  unique,  y  a-t-il  un  comité  directeur  ?  un  chef 
ou  des  chefs  inconnus?  Est-ce  une  nation  ?  est-ce  une 
race  qui  mène  le  branle  ?  Albion  ou  Israël  ? 

Non,  laf.\-m.\  n'a  pas  de  semblables  chefs,  parce 
que  les  régimes  sont  trop  différents,  trop  nombreux, 
souvent  trop  ennemis  les  uns  des  autres.  C'est  l'idée 
maçonnique  qui,  en  évoluant,  mène  tout  ce  monde  à 
l'insu  même  du  plus  grand  nombre.  Tantôt  elle  lie 
partie  avec  une  nation,  tantôt  avec  une  autre  ;  tantôt 
elle  prête  son  concours  à  une  émeute,  tantôt  à  une  autre, 
suivant  que  son  instinct  la  pousse  d'un  côté  ou  de 
l'autre.  Jusqu'en  1771,  la  grande  loge  anglaise  n'a 
probablement  constitué  que  cinq  loges,  tant  à  Paris 
qu'à  Bordeaux,  à  Valenciennes,  à  Aubigny  et  à  Gre- 
noble ;  si  celle  de  Bordeaux  en  a  constitué  à  son  tour 
une  dizaine,  les  deux  autres  n'en  ont  pas  constitué  une 
seule.  Toutes  les  autres  loges  sont  d'origine  jacobite  ; 
un  petit  nombre  seulement  a  adopté  les  régimes  alle- 
mands. Gomment  peut-on  admettre  qu'avec  une  sem- 
blable origine  la  f. \-m.\  ait  été  une  société  exclusive- 
ment anglaise  ?  Est-elle  juive  ?  Pas  davantage.  Des 
polémiques  ont  été  engagées  sur  ce  sujet  entre  adver- 
saires de  la  f.'.-m.*.  Les  partisans  de  l'origine  juive 
ont  tout  juste  trouvé  dans  une  loge  de  Bayonne  quel- 
ques juifs  avec  lesquels  leurs  frères  refusaient  de  tra- 
vailler. Il  faut  vraiment  peu  connaître  la  société  fran- 
çaise du  xviii*  siècle  pour  émettre  une  semblable 
hypothèse.  Socialement  parlant,  le  juif  n'existait  pas 
avant  1790.  Il  n'y  a  pas  lieu  de  s'attarder  sur  ce  sujet 
tant  que  l'on  n'aura  pas  donné  la  preuve  de  la  présence 
des  juifs  dans  les  loges. 

Ges  hypothèses  gratuites,  inventées  pour  les  besoins 
d'une  petite  église,  n'ont  aucune  valeur  historique. 


l'idée  MAÇONNIQUE  et  les  grades  205 

Pourquoi  s'acharner  à  trouver  des  êtres  humains  là 
où  il  n'y  a  qu'une  idée  ?  pourquoi  s'acharner  à  trouver 
un  secret  là  où  on  ne  peut  trouver  que  l'évolution  de 
cette  idée? 


Il  y  a  cependant  dans  la  f..-m.\  une  autre  source  de 
danger  :  les  symboles  des  cérémonies  initiatiques, 
dans  lesquelles  on  parle  constamment  de  vengeances 
à  exercer,  d'actes  matériels  à  accomplir  en  immolant 
une  victime.  Ces  fantasmagories  ne  sont  pas  sans 
influence  ;  elles  éduquent  le  cerveau  et  la  conscience  ; 
elles  peuvent,  à  un  moment  donné,  provoquer  chez  des 
sujets  spéciaux  des  résolutions  coupables.  On  connaît 
la  légende  du  meurtre  d'Hiram,  l'architecte  du  temple 
de  Salomon  ;  la  mort  du  templier  Jacques  Molay  et 
l'exécution  du  roi  Charles  Ier.  Suivant  les  régimes, 
c'est  l'un  ou  l'autre  de  ces  meurtres  qu'il  faut  venger. 
Bien  entendu,  en  langage  symbolique,  Hiram,  Molay, 
Charles  Ier,  veulent  dire  la  f.\-m.\  A  tous  les  degrés 
de  l'échelle  maçonnique  on  fait  allusion  à  cette  ven- 
geance. Les  initiations  aux  grades  symboliques  ont  été 
maintes  fois  racontées,  nous  ne  nous  y  attarderons  pas . 

Mais  nous  entrerons  dans  des  détails  plus  précis 
sur  le  rituel  de  Rose-Croix  tel  qu'il  était  suivi  à  la  veille 
de  la  Révolution  par  les  membres  du  Contrat  social. 
Nous  verrons,  par  l'énoncé  des  doctrines  adoptées  et 
par  les  rites  indiqués,  comment  le  maçon  du  xviii6  siè- 
cle est  le  descendant  direct  de  l'alchimiste,  de  l'astro- 
logue et  du  kabbaliste. 

Le  document  que  nous  avons  sous  les  yeux  est  des 
plus  précieux.  Il  fait  partie  d'un  recueil  de  rituels  en 
usage   dans  les  loges  du  rite  écossais  philosophique. 


206  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  tête,  une  gravure  à  la  sépia  représente  un  soleil  dont 
les  rayons,  traversant  un  triangle,  sont  limités  par  un 
cercle  encadré  par  un  carré  concentrique  entouré  de 
branches  d'acacia  dans  lesquelles  circule  un  ruban 
portant  en  haut  la  légende  Si  fodieris  inverties,  et  sur 
les  côtés  :  Loge  du  Contrat  social  de  Saint-Jean  à 
l'Orient  de  Paris.  Les  rituels  datés  du  21  février  1784 
(21e  jour  du  12e  mois  5783)  sont  signés  :  La  Rochefou- 
cauld-Bayer,  Brommer,  Lafisse,  Grant  de  Blaërfindy, 
Bertolio,  de  Leutre  et  Laborde. 

Le  rituel  donne  dans  les  plus  grands  détails  la  des- 
cription des  salles  et  les  costumes  des  membres  du 
chapitre.  Nous  résumerons  toutes  ces  descriptions  pour 
faire  voir  à  quelles  puérilités  s'attachaient  des  gens 
qui  tournaient  en  dérision  les  cérémonies  du  culte 
catholique. 

Le  grade  de  Rose-Croix  est  conféré  en  chapitre.  Le 
chef  du  chapitre  s'appelle  souverain  G/.-M.-.  ;  son  pre- 
mier surveillant  prince  grand  prieur  ;  le  second,  prince 
grand  surveillant.  Les  officiers,  tels  que  l'orateur,  secré- 
taire, trésorier,  économe,  sont  qualifiés  princes  com- 
mandeurs, et  les  autres  frères  simplement  princes  ou 
chevaliers. 

Le  but  du  chapitre  en  ce  grade  est,  pour  tous  les 
chevaliers,  d'attendre  l'arrivée  du  soleil  dans  les  douze 
maisons  ou  figures  du  zodiaque  et  de  tirer  des  quatre 
éléments  et  des  trois  règnes  de  la  nature,  alliés  ensemble, 
le  fameux  Alkaestdes  alchimistes. 

La  salle  où  l'on  tient  chapitre  est  un  carré  long,  plus 
étendu  de  l'Orient  à  l'Occident  que  du  Midi  au  Nord, 
à  cause  du  soleil  qui  éclaire  plus  de  ce  côté.  Dans  le 
centre,  on  figure  un  grand  cercle,  autour  duquel  sont 
représentées  les  douzes  figures  du  zodiaque,  lesquelles 
renferment  le   cadavre   d'Hiram-Abif,    symbole    de  la 


l'idée  maçonnique  et  les  (.rades  207 

nature  morte  que  le  Grand  Œuvre  doit  faire  revivre. 
Au-dessus  se  trouve  la  grande  pentacule  (1)  de  Salo- 
mon,  lame  d'or  de  forme  triangulaire  capable  de  tout 
vivifier  par  sa  vertu  divine  ;  d'un  côté  une  clef,  de 
l'autre  une  balance.  Le  zodiaque  est  entouré  de  nuages. 
On  y  voit  d'un  côté  un  grand  aigle  qui  désigne  un 
gardien  terrible  et  de  l'autre  un  soleil  qui  marque  le  but 
du  grade  de  Rose-Croix  et  la  recherche  du  soleil  de  vie. 
A  l'Occident  est  le  Mont  Ebron,  où  est  censé  être  le 
corps  d'Hiram.  La  planche  à  tracer  de  maître  y  est 
figurée  ;  c'est  l'image  du  premier  travail  des  philosophes 
qui  opère  la  vie  en  produisant  la  vraie  pierre  cubique, 
dite  pierre  bénite  ou  des  philosophes. 

A  l'entrée  deux  grandes  colonnes,  Jackin  et  Booz, 
symbolisent  l'apprentissage  dans  le  Grand  Œuvre  ;  un 
coq  représente  la  vigilance  et  la  force  dans  les  opéra- 
tions ;  une  étoile  flamboyante  indique  le  commencement 


(1)  Voici  en  résumé  l'explication  de  la  pentacule  donnée  dans  une 
autre  partie  du  rituel  :  le  roi  Salomon  en  instituant  la  maçonnerie 
créa  trois  grades,  dont  le  dernier  était  la  maîtrise.  Les  maîtres 
étaient  instruits  de  la  science  kabbalistique  ;  leur  marque  hono- 
rifique était  un  triangle  d'or  appelé  pentacule,  grâce  auquel  on  con- 
naissait toutes  les  sciences  occultes,  y  compris  les  plus  abstraites. 
Sur  un  côté  de  la  pentacule  était  gravé  dans  un  double  delta  le  mot 
Messias,  qui  signifie  :  Trésor  des  philosophes,  entouré  du  mot 
Adonaï,  renfermé  dans  les  six  angles  des  deux  deltas.  De  l'autre  côté 
était  gravé,  également  dans  le  double  delta,  le  sublime  mot  qui 
signifie  :  Lumière  du  grand  oeuvre  accompli  ;  les  six  angles  por- 
taient le  mot  Jehova.  Lorsque  Hiram  Abif  fut  trouvé  mort,  il  portait 
la  pentacule  sur  son  sein  suspendue  à  une  chaîne  d'or  ;  on  la  porta 
à  Salomon,  qui,  en  récompense  de  la  découverte  qu'on  avait  faite 
du  corps  d'Hiram  et  de  ses  assassins,  désigna  quinze  maîtres 
parmi  les  plus  zélés  et  les  décora  de  la  pentacule,  en  leur  donnant 
les  connaissances  kabbalistiques  qui  lui  étaient  attribuées.  On 
espérait,  à  l'aide  de  ce  bijou  sacré,  retrouver  la  parole  perdue  qui 
d'un  seul  mot  exprimait  aux  initiés  tout  ce  qu'ils  pouvaient  désirer 
en  partageant  en  quelque  sorte  la  gloire  éternelle  et  les  trésors  les 
plus  précieux  de  l'humanité. 


208  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

de  l'œuvre  prenant  couleur  ;  la  lune  est  le  symbole  des 
sacrés  mystères  de  l'Ordre.  Une  pierre  brute  désigne  la 
matière  informe  et  une  pierre  cubique  pyramidale  cette 
matière  développée  par  le  sel  et  le  soufre.  De  plus,  une 
équerre,  un  niveau,  un  fil  à  plomb  et  un  maillet.  On 
remarque  encore  un  grand  autel  enflammé  par  le  feu 
élémentaire  tiré  du  ciel  ;  un  grand  bassin  pour  purifier 
les  trois  règnes  de  la  nature  ;  un  castor,  image  du  travail 
continuel  du  vrai  philosophe,  et  enfin  une  chouette,  em- 
blème du  secret  et  du  silence  dans  lequel  on  doit  opérer. 

Pour  procéder  à  la  réception  d'un  Rose-Croix,  la 
salle  du  conseil  doit  être  tendue  de  noir  et  décorée  de 
douze  colonnes  corinthiennes  de  marbre  blanc  veiné  de 
noir,  avec  des  chapiteaux  et  des  socles  en  or  (deux  à 
l'Orient,  deux  à  l'Occident,  quatre  au  Nord  et  quatre  au 
Midi).  Sur  le  milieu  de  chaque  colonne  est  suspendu 
un  cartouche  entouré  de  festons  et  de  guirlandes  de 
feuilles,  de  fleurs  et  des  pierres  précieuses  attribués  à 
chaque  mot  dans  le  Grand  Œuvre.  Ces  douze  cartou- 
ches représentent  les  douze  maisons  célestes  correspon- 
dant aux  douze  noms  de  Dieu  n'en  composant  qu'un 
seul.  On  écrira  aussi  sur  les  cartouches  en  lettres  d'or 
les  douze  noms  de  l'Etre  suprême  et  des  esprits  qui 
sous  sa  puissance  président  à  chaque  mois  de  l'année, 
enfin  les  douze  signes  du  zodiaque  qui  y  correspondent. 
Le  tout  sera  disposé  de  la  façon  suivante  : 

1°  A  l'Orient  du  côté  du  Nord  :  Marchidiel,  Jehova, 
Mars,  le  Bélier  ; 

2°  A  l'Orient  du  côté  du  Midi  :  Asmodel,  Emmanuel, 
Avril,  le  Taureau  ; 

3°  A  l'Occident  du  côté  du  Nord  :  Ambriel,  Tétra- 
grammaton,  Mai,  les  Gémeaux  ; 

4°  A  l'Occident  du  côté  du  Midi  :  Mariel,  Jeha,  Jesas, 
ou  Jésus,  Juin,  le  Cancer; 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  209 

5°  Au  Midi  du  côté  de  l'Orient  :  Verchiel,  Messias, 
Juillet,  le  Lion  ; 

6°  Au  Midi  :  Kormaliel,  Orpheton,  Août,  la  Vierge  ; 

7°  Au  Midi  :  Zuriel,  Anasbona,  Septembre,  la  Balance  ; 

8°  Au  Midi  :  Barbiel,  Erigion,  Octobre,  le  Scorpion; 

9°  Au  Nord  du  coté  de  l'Occident  :  Adnakiel,  Jerse- 
mon,  Novembre,  le  Sagittaire; 

10°  Au  Nord  :  Hamdel,  Eloym,  Décembre,  le  Capri- 
corne ; 

11°  Au  Nord  :  Gabriel,  Agla,  Janvier,  le  Verseau  ; 

12°  Au  Nord:  Acchiel,  Meleck,  Février,  les  Poissons. 

Le  trône  du  souverain  grand  maître  est  placé  entre 
les  deux  colonnes  de  l'Orient  et  élevé  sur  trois  marches. 
Le  dais  aux  tentures  rouges  galonnées  d'or  est  surmonté 
d'un  grand  aigle  d'or  becqué,  membre  et  couronné  en 
noir,  tenant  dans  ses  serres  d'un  côté  une  balance,  de 
l'autre  une  clef  d'or.  Le  trône  est  noir  et  or.  Au  fond 
du  dais,  une  étoile  flamboyante  d'or  ornée  du  Yoth.  A 
gauche  du  trône  un  autel  triangulaire  en  or  portant 
une  Bible,  un  compas,  une  clef  et  un  maillet.  Au 
milieu  du  plancher  la  balance  kabbalistique  de  Salo- 
mon  et  au-dessous  une  balance  réelle. 

La  salle  du  conseil  est  éclairée  sur  les  quatre  faces 
par  dix  bras  de  métal  doré,  ayant  chacun  trois  bran- 
ches et  placés  entre  les  colonnes  deux  à  l'Orient,  deux 
à  l'Occident,  trois  au  Midi  et  trois  au  Nord. 

Le  pavé  est  également  éclairé  à  l'Orient  du  côté  du 
Midi  et  de  chaque  côté  de  l'Occident  par  un  chandelier 
à  deux  branches,  au  centre  par  un  chandelier  à  une 
branche.  Toutes  les  bougies  sont  jaunes  et  n'ont  servi 
qu'une  fois,  parce  que  tous  les  matériaux  employés  au 
Grand  Œuvre  doivent  être  vierges,  non  mixtes.  Pour  les 
allumer,  il  faut  autant  que  possible  employer  de  l'ama- 
dou enflammé  au   soleil   et,  à  son   défaut,    la    pierre 

LA.    FUANC-MaC.ONNERIB.  —  T.  I.  14 


210  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

et  l'acier,  mais   jamais  le  feu   commun  et   ordinaire. 

Le  prince  grand  prieur  et  le  prince  grand  surveillant 
sont  assis  dans  de  petits  fauteuils  d'or  élevés  sur  un 
degré,  ayant  devant  eux  une  petite  table  triangulaire 
couverte  d'un  tapis  d'or  pour  pouvoir  frapper  du 
maillet. 

L'orateur  et  le  secrétaire  sont  assis  de  la  même 
manière,  mais  avec  des  ornements  proportionnés  à 
leurs  charges. 

Tous  les  princes  sont  assis  sur  des  chaises  bleues 
filetées  de  noir  ;  chacune  d'elles  porte  les  armoiries 
de  son  titulaire.  On  devra  faire  usage  de  maillets  noirs 
filetés  de  jaune. 

Les  princes  sont  vêtus  de  noir,  chapeau  uni  à 
plumet  blanc  sur  la  tête,  l'épée  au  côté,  garde  ornée 
d'un  ruban  feu  au  lieu  de  l'écharpe  ordinaire.  Leur 
tablier  blanc  est  bordé  et  doublé  de  rouge  ;  une  brode- 
rie ou  un  dessin,  représentant  sur  son  milieu  un  grand 
aigle  noir  pareil  à  celui  qui  orne  la  salle  ;  sur  sa  bavette, 
renversée  pour  la  circonstance,  la  lettre  J  est  figurée  en 
noir.  Ils  portent  à  la  troisième  boutonnière  de  leur 
habit  une  rosette  de  ruban  rouge  à  laquelle  pend  un 
aigle  d'or.  Les  gants  doivent  être  bordés  et  doublés  de 
rouge  ;  sur  le  dessus  de  la  main  droite  est  brodée  en 
noir  une  balance  et  une  clef  au-dessus  de  la  gauche. 

Les  princes  sont  décorés  de  trois  bijoux  :  un  compas 
couronné  appuyé  par  son  ouverture  sur  un  quart  de 
cercle  portant  au  milieu  une  croix  tirée  de  la  balance 
kabbalistique  de  Salomon,  à  ses  pieds  un  pélican  avec 
sept  petits  et  de  l'autre  côté  un  aigle  les  ailes  éployées. 
Une  branche  d'acacia  circule  entre  ces  ornements.  Ce 
bijou  est  l'emblème  des  trois  règnes  de  la  nature  qui 
entrent  dans  le  travail  de  la  vraie  science.  Le  second 
bijou  est  un  triangle  équilatéral,  autrement  dit  penta- 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  211 

cule  du  roi  Salomon.  Ce  bijou  renferme  toute  la 
science  kabbalistique  dont  chaque  lettre  renferme  une 
puissance  dans  l'opération  du  Grand  Œuvre  ;  le  dernier 
bijou  est  l'aigle  noir  dont  nous  avons  déjà  parlé.  Il  est  le 
symbole  du  rang  suprême  de  l'Ordre  où  on  l'emploie. 

Pour  être  à  l'ordre  dans  le  chapitre,  on  porte  les  trois 
doigts  du  milieu  de  la  main  droite  sur  le  cœur,  en 
tenant  le  pouce  et  le  petit  doigt  dans  le  creux  de  la 
main. 

Pour  la  réception  d'un  aspirant  Rose-Croix,  la 
chambre  de  réflexion  est  dépouillée  de  tout  ornement  ; 
aussi  obscure  que  possible,  elle  sera  éclairée  seulement 
par  une  petite  lumière  posée  sur  une  table  noire  sur 
laquelle  on  a  placé  un  pot  d'eau,  du  sel,  un  pain  et  du 
soufre.  Au-dessus  de  la  table  est  pendu  au  mur  un 
tableau  représentant  un  coq  et  un  sablier,  portant  écrit 
au-dessus  en  gros  caractères  :  Patience  et  persévérance. 
Devant  la  table,  un  trépied  percé  par  le  fond  sert  de 
siège  au  récipiendaire. 

Le  rituel  de  l'ordre  du  Chevalier  de  l'Aigle  noir  ou 
Souverain  prince  Rose -Croix  débute  par  un  aperçu 
historique  qui  mérite  d'être  intégralement  reproduit  : 

«  Tout  bon  maçon  instruit  des  mystères  de  l'Ordre, 
possédant  les  hauts  grades,  doit  s'être  imaginé  que  la 
maçonnerie  a  un  but  qui  doit  encore  exister,  que  le  tra- 
vail ne  portait  pas  seulement  à  élever  des  édifices  au  vrai 
Dieu,  qu'il  ne  se  bornait  pas  non  plus  aux  seules  vertus 
morales  ;  quelque  autre  motif  avait  donné  naissance 
à  un  ordre  aussi  sublime;  oui,  mes  TT.-.  CC.\  FF.'., 
la  vraie  philosophie  connue  et  mise  en  pratique  par  le 
roi  Salomon,  c'est  la  base  sur  laquelle  la  maçonnerie  est 
bâtie  ;  cet  homme  doué  de  sapience  et  le  plus  sage  des 
rois  de  son  temps,  ne  pouvant  travailler  seul,  choisit 
dans  ses  Etats  un  nombre  de  sujets  selon  son  cœur  ;  il  se 


212  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

les  attacha  par  les  bienfaits  en  les  regardant  comme  ses 
ff.\  et  les  initia  dans  les  secrets  les  plus  cachés  de  l'art 
kabbalistique  ;  qu'il  serait  à  souhaiter,  mes  TT.\  CC.\ 
FF.'.,  que  cet  art  nous  fût  parvenu  dans  toute  sa  clarté  ; 
mais  nos  anciens  maçons,  soit  par  prudence  ou  par 
d'autres  raisons,  nous  ont  caché  les  points  les  plus 
importants  de  cet  art  divin  sous  des  types  qui  ne  pré- 
sentent que  des  énigmes  ;  heureux  celui  d'entre  nous  qui 
sera  assez  laborieux  pour  faire,  par  ses  recherches  et 
son  travail,  la  découverte  de  ces  sublimes  vérités,  il 
pourra  être  assuré  d'avoir  trouvé  la  vraie  félicité  à 
laquelle  un  mortel  puisse  aspirer,  car  sa  santé  sera 
conservée,  ses  jours  prolongés  et  ses  mœurs  exemptes 
d'être  corrompues  par  les  vices  où  l'indigence  et 
l'infirmité  ne  conduisent  que  trop  l'espèce  humaine. 
Réfléchissons,  MM/.  TT.\  CC.\  FF.-.,  sur  tous  les 
objets  qui  vous  auront  affectés  dans  les  différents 
grades  par  où  vous  aurez  passé,  et  vous  verrez  que 
c'étaient  autant  de  signes  et  de  mystères  dont  vous 
deviez  un  jour  avoir  la  clef,  c'est-à-dire  apprendre  au 
vrai  à   quoi  ils  devaient  s'appliquer. 

«  Cet  éminent  grade  les  renferme  tous,  il  en  fait  l'ana- 
lyse, il  vous  présente  du  travail  à  entreprendre;  c'est  à 
vous,  MM.'.  TT. *.  CC*.  FF.*.,  à  entrer  dans  sa  carrière 
munis  de  l'amour  de  la  vérité  et  de  la  persévérance.  Ce 
grade,  qui  compte  un  ordre  de  parfaits  maçons,  a  été 

mis  en  lumière  par  le  f.  \  R qui  l'a  tiré  du  trésor 

kabbalistique  du  Docteur  et  Rabbin  Néamuth,  chef 
de  la  synagogue  de  Leyde  en  Hollande,  qui  en  avait 
conservé  les  précieux  secrets  et  le  costume  ainsi  qu'on 
va  voir  les  uns  et  les  autres  dans  le  même  ordre  qu'il 
les  a  mis  dans  son  Talmud  mystérieux.  » 

Plus  loin  on  explique  que  si  les  Chevaliers  de  l'Aigle 
noir  sont  appelés  Roses-Croix, c'est  parce  que  «  Raymond 


l'idée  MAÇONNIQUE  ET  LES  grades  213 

Lulle  (1),  grand  maçon  et  philosophe  hermétique,  ayant 
trouvé  par  la  science  kahhalistique  le  vrai  salut  de  vie 
par  le  mariage  des  six  métaux,  il  en  composa  un  parfait 
appelé  or  ;  il  le  présenta  au  roi  d'Angleterre  qui  en  fit 
fabriquer  de  la  monnaie,  où  d'un  côté  était  une  croix 
symbole  des  quatre  éléments,  et  de  l'autre  une  rose, 
symbole  du  triomphe  du  Travail  et  le  prix  des  sages, 
l'épine  n'appartenant  qu'aux  vrais  trompeurs  et  aux 
sots.  Raymond  Lulle  fut  fait  chevalier  et,  depuis  lui, 
tous  ceux  qui  travaillent  à  la  science  kabbalistique  ou 
art  royal   sont  appelés  chevaliers  Roses-Croix. 

«  Ce  sublime  grade  est  en  vénération  dans  toutes  les 
cours  du  Nord  et  en  Prusse,  où  le  souverain  en  est  le 
protecteur  et  le  G.*.  M.*.  C'est  pour  cela  qu'il  lui  a 
même  donné  le  nom  d'Aigle  noir  comme  roi  des  oiseaux 
et  le  seul  fait  pour  voler  au  devant  du  soleil  et  en 
fixer  la  lumière. 

«  Le  but  de  ce  grade  est  la  science  sublime  des  con- 
naissances de  la  nature  et  d'en  tirer  un  travail  utile  au 
genre  humain,  soit  dans  la  purification  des  métaux 
imparfaits  pour  les  transmuer  en  or,  seule  produc- 
tion parfaite  de  la  nature  et  comme  telle  l'emblème  de 
la  divinité  qui  n'a  en  soi  ni  impuretés,  ni  commence- 
ment, ni  fin  ;  aussi  l'or  se  trouve-t-il  toujours  en  même 
poids  et  valeur  dans  tel  feu  que  vous  puissiez  le  mettre  ; 
c'est  aussi  le  fond  du  mystère  de  la  salamandre  qui 
vit  dans  le  feu  et  du  phénix  qui  renaît  de  ses 
cendres .  Il  n'est  point  ici  compris  parmi  les  six  autres 
impurs  parce  que  physiquement  il  est  tout  esprit  et  par 


(1)  Les  kabbalistes  désignaient  Raymond  Lulle  sous  le  nom 
d'Alallamack.  Seul  il  serait  parvenu  à  réaliser  le  mariage  céleste  de 
l'époux  avec  les  six  vierges  dont  il  eut  le  bonheur  de  faire  naître  le 
Messias,  probablement  dans  une  vie  antérieure,  car  les  kabbalistes 
mettent  Alallamack  en  relation  avec  Salomon. 


214  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ce  moyen  est  incorruptible.  De  ce  métal  pur  et  rendu 
potable  vous  en  tirez  magnétiquement  la  médecine 
universelle,  dont  l'existence  ne  peut  se  nier,  attendu  tout 
ce  qui  est  dit  dans  l'Ecriture  sacrée  et  dans  tous  les 
philosophes  hermétiques  et  notamment  (Le  diadème  des 
sages,  1782),  par  le  premier  but  de  l'association  des 
chanoines  de  Paris  et  autres  officiers  ecclésiastiques 
qui  sont  venus  après  les  druides  ou  prêtres  des  anciens 
Gaulois,  desquels  ils  tenaient  cette  science  par  tradi- 
tion, ce  qui  se  trouve  aisément  dans  les  annales  de  Paris. 
«  Ces  ecclésiastiques  qui,  suivant  les  anciens  apôtres, 
étaient  médecins  des  corps  et  des  âmes,  soignaient  les 
malades  et  les  traitaient  avec  beaucoup  d'humanité  et 
de  charité.  Ce  qui  était  admirable,  c'est  qu'ils  guéris- 
saient toutes  les  maladies  et  infirmités  (si  Dieu  n'en 
ordonnait  autrement)  par  des  remèdes  naturels,  dont 
ils  avaient  la  connaissance  philosophique  acquise  par 
l'usage  et  l'étude  de  la  sage  nature  qui  les  fournit  en 
profusion  à  ceux  qui  sont  ses  scrutateurs,  sans  qu'il 
soit  besoin  d'avoir  recours  à  des  secours  étrangers,  im- 
puissants et  destructeurs.  C'est  pourquoi  ils  avaient 
leur  école  de  médecine  près  de  leur  église,  rue  de  la 
Bûcherie,  laquelle  existe  encore  aujourd'hui.  Et  comme 
l'amour  de  Dieu  et  du  prochain  faisait  tout  leur  devoir 
et  leur  mérite,  en  ces  temps  de  sagesse  et  de  simplicité, 
ils  obtinrent  de  faire  construire  près  d'eux  un  hôtel  de 
charité,  où  l'on  apportait,  recevait  et  traitait  les  infirmes 
et  malades  avec  tous  les  soins  et  secours  dont  par 
esprit  d'institution  et  d'état  ils  étaient  capables,  et 
s'en  faisaient  un  point  essentiel  de  religion.  Ils  opéraient 
des  cures  et  guérisons  miraculeuses  et  si  surprenantes 
que  cet  hôpital  d'infirmerie  fut  alors  appelé  Hôtel  de 
Dieu  et  par  corruption  Hôtel-Dieu,  ainsi  qu'on  peut  le 
voir  dans  Nicolas  Flamel.  » 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  215 

Nous  sommes  entrés  dans  tous  les  d  étails  qui 
accompagnaient  les  initiations  et  nous  avons  choisi 
la  plus  curieuse  d'entre  elles  ;  nous  avons  également 
donné  in  extenso  le  type  d'un  balustre  (discours)  tel 
qu'il  était  d'usage  d'en  prononcer,  afin  que  le  lecteur 
puisse  se  rendre  compte  de  la  phraséologie  amphi- 
gourique alors  en  usage,  et  enfin  qu'il  soit  un  exemple 
des  formules  employées  pour  faire  allusion  au  mystère 
de  la  création.  Nous  en  avons  assez  dit  précédemment 
pour  qu'il  soit  inutile  d'insister  sur  l'étoile  flam- 
boyante et  la  parole  perdue. 

Nous  allons  voir  maintenant  comment  on  ouvrait  un 
chapitre  et  comment  se  faisait  la  réception  d'un  aspi- 
rant Rose-Croix. 

Le  souverain  G.*.  M.\,  après  s'être  fait  assurer  des 
portes  et  de  la  valeur  maçonnique  des  fT.\  présents, 
frappait  un  grand  coup  de  maillet  sur  l'autel.  Aussitôt 
tous  les  princes  se  tenaient  debout  et  à  l'ordre.  Lorsque 
les  deux  surveillants  avaient  à  leur  tour  frappé  un  coup 
de  maillet,  le  souverain  G.'.  M.*,  prenait  la  parole  : 

—  Princes  chevaliers  de  l'Aigle  noir,  prince  grand 
prieur,  prince  grand  surveillant  et  officiers  dignitaires, 
aidez-moi  à  ouvrir  le  chapitre . 

On  échangeait  alors  le  signe, puisleprincegrand  prieur 
et  le  prince  grand  surveillant  présentaient  la  pointe  de 
leurépée  au  souverain  G.'.  M.\,  et  tous  les  princes  se 
mettaient  à  l'ordre  ;  le  souverain  G.  *.  M.*,  reprenait  alors 
la  parole. 

D.  Prince  grand  prieur,  quelle  heure  est-il  ? 

R.  Souverain  G.*.  M.*.,  l'étoile  du  matin  paraît. 

D.  Prince  grand  prieur,  que  devons-nous  faire  ? 

R.  Nous  devons  reprendre  nos  travaux. 

D.  Prince  grand  surveillant,  quel  est  votre  devoir  ? 

R.  S.*.  G.*.  M.*.,  c'est  de  voir  si  le  chapitre  est  scellé 


216  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

hermétiquement,  si  les  matériaux  sont  prêts,  si  les 
éléments  se  distinguent,  si  le  noir  fait  place  au  blanc 
et  le  blanc  au  rouge. 

D.  Prince  grand  surveillant,    voyez  si  tout  est   prêt. 

R.  S.'.  G.*.  M.*,  tout  est  prêt,  vous  pouvez  commencer 
l'œuvre  ;  tout  est  prêt,  le  feu  prend  couleur,  tout  est 
prêt. 

D.  Prince  grand  prieur  et  prince  grand  surveillant, 
quittez  le  fer,  prenez  vos  maillets  et  disposez  les  princes 
dans  leurs  postes. 

R.  Princes  chevaliers  qui  habitez  le  zodiaque,  observez 
dans  vos  travaux  d'être  exacts  à  nous  procurer  les  trois 
règnes  de  la  nature,  c'est-à-dire  :  les  animaux,  les  végé- 
taux et  les  minéraux,  subordonnés  à  chaque  signe  et  à 
chaque  mois  de  l'année,  et  renfermez  tous  vos  métaux 
dans  la  maison  du  soleil. 

D.  Princes,  que  le  bruit  de  vos  outils  retentisse 
d'un  pôle  à  l'autre  et  que  l'Orient  et  l'Occident  dirigent 
désormais  le  cours  des  planètes. 

Le  Souverain  G.*.  M.*,  frappe  ensuite  trois  fois  deux 
coups  de  maillet,  les  deux  surveillants  font  de  même. 

D.  Princes  chevaliers,  le  chapitre  est  ouvert  ;  faisons 
notre  devoir. 

Les  deux  surveillants  répètent  ces  paroles,  tous  les 
assistants  font  les  signes  ;  on  applaudit  sept  fois  (six 
et  un)  en  disant  trois  fois  Vivat,  puis  chacun  prend  sa 
place  et  l'on  procède  à  la  réception. 

Le  parrain,  assisté  d'un  chevalier  préparateur,  va 
chercher  le  récipiendaire  dans  la  chambre  de  réflexion  et 
lui  demande  s'il  désire  toujours  avec  ardeur  se  faire 
recevoir  chevalier  de  l'Aigle  noir.  Sur  sa  réponse  affir- 
mative, le  préparateur,  après  lui  avoir  bandé  les  yeux, 
l'introduit  en  le  prenant  par  la  main  dans  un  apparte- 
ment tendu  de  noir  dans  lequel  se  trouve  étendu  surune 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  217 

table  le  dernier  chevalier  reçu,  couché  sur  le  dos,  con- 
trefaisant le  mort  ;  on  fait  toucher  le  corps  au  récipien- 
daire, et  pendant  qu'on  lui  fait  faire  des  voyages  autour 
de  la  chambre,  le  chevalier  étendu  sur  la  table  se  retire 
sans  bruit  et  l'on  met  à  sa  place  un  cœur  de  bœuf  ou  de 
mouton,  une  tète  de  mort  et  une  lumière. 

On  demande  au  récipiendaire  s'il  est  toujours  décidé 
à  poursuivre  sa  course  et  à  anéantir  tout  ce  qu'on  lui 
ordonnera.  Dès  qu'il  a  répondu  affirmativement,  on  le 
conduit  armé  d'un  poignard  près  du  cœur  de  bœuf  et 
on  lui  dit  : 

—  Frappez  et  n'hésitez  pas  ;  malheur  à  vous  si  vous 
vous  repentez  du  coup  que  vous  aurez  porté. 

L'aspirant  perce  le  cœur  et  y  tient  le  poignard  plongé. 

—  Savez-vous  ce  que  vous  venez  défaire?  lui  demande 
le  préparateur. 

—  Je  ne  sais  rien.  Tout  ce  que  je  puis  croire,  c'est 
que  j'ai  frappé  quelque  corps,  mais  je  ne  m'en  repens 
pas,  et  pour  preuve  de  ce  que  j'avance,  je  suis  prêt  à 
recommencer. 

On  retire  le  bandeau  qui  couvrait  les  yeux  de  l'aspi- 
rant, afin  qu'il  puisse  contempler  la  lumière,  le  cœur  et 
la  tête  de  mort.  Au  bout  d'un  instant,  le  préparateur 
reprend  : 

—  Emportez  ce  cœur  au  bout  de  votre  poignard  et 
suivez-moi. 

Arrivé  à  la  porte  du  chapitre,  le  parrain  frappe  deux 
coups  irréguliers,  auxquels  le  prince  grand  surveillant 
répond  par  une  batterie  semblable,  et  s'adressant  à  son 
collègue  *, 

—  Prince  grand  prieur,  on  frappe  en  profane  à  la 
porte  du  chapitre. 

Celui-ci  en  prévient  le  souverain  G. '.M.*.,  qui  ordonne 
au  prince    grand  surveillant  qui    frappe    de  lui    en 


218  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

rendre  compte.  Après  avoir  parlementé  avec  le  prépa- 
rateur, le  prince  grand  surveillant  assure  au  souverain 
G.*.  M.',  que  le  trophée  que  l'aspirant  va  lui  présenter 
sera  une  garantie  suffisante  en  sa  faveur. 

On  demande  au  parrain  le  nom,  l'âge  du  candidat, 
les  grades  par  lesquels  il  a  passé  pour  oser  prétendre 
au  sublime  grade  de  Rose-Croix. 

On  l'introduit  ensuite  à  l'occident  du  chapitre,  le 
parrain  et  le  préparateur  remettent  le  récipiendaire  au 
souverain  G.'.  M.',  et  vont  reprendre  leurs  places. 

Après  avoir  posé  à  l'aspirant  des  questions  sur  son 
passé  maçonnique,  le  souverain  G. \  M.*,  lui  explique 
que  le  trophée  représenté  par  le  cœur  a  pour  objet  de 
lui  rappeler  que  lorsqu'il  a  été  reçu  apprenti  il  a  prêté 
le  serment  solennel,  et  qu'il  a  consenti  à  avoir  le  cœur 
arraché  s'il  devenait  parjure  à  ses  engagements.  Comme, 
de  plus,  dans  le  grade  de  Rose-Croix,  il  faut  des  hommes 
résolus  sur  lesquels  on  puisse  compter  dans  le  besoin, 
on  a  voulu  éprouver  son  courage.  L'aspirant  profite  de 
la  circonstance  pour  assurer  qu'il  est  prêt  à  exécuter  les 
ordres  du  souverain  G.*.  M.*.,  de  quelque  nature  qu'ils 
soient. 

Lorsqu'il  a  reçu  cette  assurance,  le  souverain  G.*. M.*, 
autorise  l'aspirant  à  venir  jusqu'au  pied  de  son  trône 
en  exécutant  la  marche  des  quatre  éléments,  qui  se  fait 
parles  quatre  points  cardinaux  en  partant  par  l'Occident 
passant  par  le  Centre,  allant  au  Nord,  traversant  de 
nouveau  le  Centre  pour  arriver  au  Midi,  puis  à  l'Orient 
et  enfin  aux  pieds  du  souverain  G.'.  M.'.,  devant  lequel 
il  se  met  à  genoux  en  posant  la  main  droite  sur  le  plat 
de  la  Bible. 

Le  récipiendaire  prête  alors  son  serment. 

—  Je  promets  et  jure,  dit-il,  devant  le  Suprême  et 
Grand  Architecte  de  l'Univers  et  devant  le  souverain 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  219 

chapitre  ici  assemblé  de  sceller,  garder  et  ne  jamais  ré- 
véler les  secrets  des  chevaliers  de  l'Aigle  noir,  dits  Roses- 
Croix,  à  aucun  des  profanes  ou  maçons  inférieurs  à  ce 
grade,  sous  quelque  prétexte  que  ce  puisse  être  ;  de  n'en 
parler  qu'en  chapitre  et  lors  du  travail.  Si  j'y  manque 
et  que  je  devienne  parjure,  je  consens  et  je  pardonne 
ma  mort  à  ceux  des  chevaliers  qui  me  la  donneront 
de  quelque  manière  que  ce  soit,  par  le  fer,  le  feu  ou  le 
poison  ;  que  ma  mémoire  soit  en  horreur  parmi  les 
Roses-Croix  et  les  maçons  répandus  dans  le  monde 
entier  ;  priez  pour  moi,  mes  frères,  que  Dieu  me  soit  en 
aide  et  me  préserve  de  manquer  à  mon  obligation. 

Le  serment  prêté,  le  grand  prieur  fait  relever  le  can- 
didat, le  présente  au  souverain  G.*.  M.\  qui  le  fait 
passer  à  sa  droite  et  le  décore  sur-le-champ  des  bijoux, 
gants  et  tablier  de  l'ordre  ;  puis  il  lui  donne  les  signes, 
mots  et  attouchements. 

—  Le  signe,  dit-il,  se  fait  dans  l'appel  en  portant  l'in- 
dex de  la  main  droite  sous  le  nez,  ensuite  sur  la  joue 
jusqu'à  l'oreille,  puis  en  le  descendant  le  long  du  cou 
jusqu'à  la  clavicule  afin  déformer  l'équerre.  On  répond 
par  le  même  signe,  mais  avec  la  main  gauche.  —  L'at- 
touchement se  donne  en  s'embrassant  réciproquement  : 
chacun  avance  son  pied  droit  et  se  donne  un  coup  de 
talon.  Le  mot  sacré  est  Messias,  qui  veut  dire  trésor  des 
philosophes.  Celui  de  passe  ou  d'entrée  est  Oc/z,  qui 
signifie  semence  de  tous  les  métaux. 

Le  candidat  va  se  faire  reconnaître  par  tous  les  princes, 
puis  est  reçu  parle  souverain  G.*.  M.',  qui  lui  dit  : 

—  Par  le  pouvoir  que  j'ai  reçu  et  du  consentement 
unanime  de  cette  auguste  assemblée,  je  vous  reçois 
prince  maçon  par  le  T.*.  P.*.  grade  de  Chev.  de  l'Aigle 
noir  de  Rose-Croix  d'Allemagne  dont  vous  êtes  revêtu 
et  devenu  membre. 


220  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

L'orateur  lui  dévoile  alors  en  ces  termes  les  mystères 
du  grade  : 

—  La  figure  de  cette  loge  tracée  est  un  carré  long 
plus  étendu  de  l'Orient  à  l'Occident  que  du  Midi  au 
Nord,  parce  que  le  soleil  éclaire  plus  le  globe  terrestre 
dans  le  premier  sens  que  dans  le  second,  puisqu'il  ne 
sort  jamais  au  delà  des  tropiques. 

Vous  voyez  ici,  dans  le  centre,  un  grand  espace  cir- 
culaire composé  de  nuages  renfermant  les  cercles  du 
zodiaque  où  sont  contenues  les  douze  maisons  du  soleil, 
gardées  chacune  par  un  des  douze  mois  de  l'année  ; 
chaque  mois  vous  devez  rentrer  dans  la  chambre  qui 
le  représente  pour  y  travailler  et  attirer  la  visite  de 
l'astre  lumineux  vivifiant  toute  la  nature  et  toute  la 
matière. 

Le  soleil  doit  être  reçu  par  les  quatre  éléments  que 
vous  inviterez  à  vous  tenir  compagnie,  car  sans  eux  la 
maison  serait  triste  ;  vous  ferez  banqueter  le  soleil  des 
mets  tirés  des  animaux  et  des  fruits,  qui  sont  nourris 
dans  l'intérieur  de  chaque  maison  céleste.  Si  vous 
observez  toutes  ces  choses,  vous  opérerez  avec  fruit. 

Dans  le  cours  de  notre  travail,  il  faut  considérer  la 
matière  comme  morte;  le  cadavre  d'Hiram  en  est  l'em- 
blème. Il  faut  le  vivifier  et  le  faire  renaître  de  ses  cendres, 
ce  que  vous  obtiendrez  par  la  végétation  de  l'arbre  de  vie 
représenté  par  la  branche  d'acacia  ;  mais  vous  ne  sau- 
rez opérer  avec  fruit,  si  vous  vous  écartez  de  l'équerre 
et  du  compas  qu'il  faut  sans  cesse  avoir  devant  vous. 

Ces  deux  bijoux  ne  sont  pas  les  seuls  dont  vous 
devez  faire  usage  ;  ils  sont  accompagnés  des  deux  ins- 
truments indispensables  :  la  balance  et  la  clef.  Vous  ne 
pouvez  non  plus  vous  passer  de  la  pentacule,  qui  ren- 
ferme toutes  les  vertus  célestes. 

Abandonnons  pour  un  moment,  MM.".  VV.\  CC*. 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  221 

FF.'.,  le  centre  mystique  de  notre  loge,  traversons  la 
lune  qui  doit  couvrir  nos  sacrés  mystères  et  parcourons 
l'espace  qui  l'environne.  A  l'Occident  nous  trouverons  le 
mont  Ebron,  sur  le  sommet  duquel  on  éleva  les  deux 
grandes  colonnes  Jackin  et  Booz,  c'est-à-dire  Force  et 
Beauté,  premier  principe  du  grand  œuvre  que  vous  allez 
entreprendre.  La  force  est  représentée  par  les  matériaux 
que  vous  devez  employer  et  la  beauté  par  Y  ouvrage 
qu'ils  nous  produiront. 

La  colonne  Jackin  était  dédiée  à  Dieu,  tout  venant 
de  lui;  c'est  ce  que  vous  êtes  présentement,  puisque 
vous  allez  commencer  à  travailler.  Vous  deviendrez 
compagnons  quand  vous  commencerez  à  connaître  la 
beauté  de  la  matière  élémentaire  ;  enfin,  vous  devien- 
drez maîtres  quand  vous  aurez  placé  dans  votre  plan- 
che la  route  fixe  du  soleil. 

A  l'Orient,  nous  voyons  ungrand  aigle,  roi  des  ani- 
maux de  l'air,  le  seul  qui  puisse  fixer  l'astre  radieux,  car 
la  matière  de  sa  nature  n'a  point  de  forme  ;  c'est  la  forme 
qui  développe  la  couleur  ;  le  noir,  c'est  la  matière  hors 
d'œuvre.  Change-t-elle  de  couleur  ?  elle  reprendra  une 
forme  nouvelle,  et  un  soleil  des  plus  brillants  en  sortira. 
De  même  que  la  naissance  du  soleil  est  annoncée  par 
l'étoile  du  matin,  l'étoile  flamboyante  dans  sa  rougeur 
est  accompagnée  par  la  fraîcheur  argentine  de  la  lune. 

Dans  le  plan  de  la  loge,  vous  découvrirez  une  pierre 
brute,  matière  informe  qu'il  faut  préparer,  une  pierre 
cubique  à  sommet  pyramidal,  et  la  matière  dévelop- 
pée :  le  sel  et  le  soufre. 

L'équerre,  le  niveau,  la  perpendiculaire  et  le  maillet 
vous  serviront  à  construire  les  maisons  du  soleil  par  où 
vous  devez  faire  passer  la  matière  informe.  Aussi  fau- 
dra-t-il  les  construire  avec  règle  et  préparation  ;  sans 
cela  l'esprit  de  vie  ne  saurait  s'y  loger. 


222  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


Avec  tous  ces  instruments  vous  construirez  le  grand 
autel  sur  lequel  brûlera  le  feu  tiré  du  ciel,  et  le  grand 
bassin  servira  à  vous  purifier  les  mains ,  le  corps  et  tout 
ce  que  vous  toucherez  pour  opérer  avec  fruit.  Soyez  labo- 
rieux comme  le  castor  et  cachez-vous  comme  la  chouette, 
afin  de  bien  travailler  à  l'abri  des  regards  des  curieux. 

Le  souverain  G.*.  M.\  ajoute  à  son  tour  : 

—  Chevaliers,  princes  nouveaux  reçus  dans  l'ordre 
des  chevaliers  de  l'Aigle  noir,  lorsqu'on  vous  mit  en 
réflexion,  vous  aperçûtes  du  pain,  de  l'eau,  du  sel,  du 
soufre,  un  coq  et  un  sablier,  avec  ces  mots  :  Patience  et 
persévérance  ;  matières  symboliques  et  faciles  à  expli- 
quer. 

Par  le  pain  et  l'eau,  on  vous  marque  la  sobriété  dans 
vos  repas  ;  par  le  sel,  les  bonnes  mœurs  que  vous 
devez  avoir  pour  vous  conserver  parmi  les  hommes  ; 
par  le  soufre,  Y  ardeur  secrète  que  vous  devez  avoir  de 
parvenir  à  la  science  kabbalistique  en  formant  votre 
esprit  à  savoir  promptement  tous  les  instants  où  la 
lumière  vous  éclairera  ;  par  le  coq,  la  vigilance  dans 
toutes  vos  œuvres,  et  le  sablier  désigne  le  temps  que  l'on 
doit  employer  au  travail  qui  doit  être  compté  par 
heures  et  par  minutes.  Aidons  donc  les  nouveaux  che- 
valiers à  découvrir  le  principe  de  vie  renfermé  dans  le 
cœur  de  la  matière  première  connue  sous  le  nom 
d'Alkaest. 

Puis  le  souverain  G/.  M.*,  fait  l'instruction  du  grade 
par  un  dialogue  avec  les  surveillants.  De  ce  dialogue  il 
résulte  que  le  souverain  G*.  M.',  se  tient  à  l'Orient 
pour  y  attendre  l'arrivée  du  soleil  et  l'accompagner  dans 
ses  douze  maisons  célestes  dont  les  honneurs  sont  faits 
par  le  Grand  Architecte  de  l'Univers  lui-même,  sous 
douze  noms  sacrés,  tirés  chacun  des  douze  lettres  du 
grand  nom  de  Dieu  en  hébreu  :  Getimoaljeam.Les  douze 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  223 

maisons  sont  partagées  en  quatre  parties  égales  qui 
sont  les  quatre  saisons  de  Tannée,  qui  expliquent  l'uti- 
lité du  travail. 

Dans  ce  travail  on  doit  employer  les  quatre  éléments 
et  les  trois  règnes  de  la  nature  qui,  pour  être  utilisés 
convenablement,  doivent  être  pris  dans  leurs  vraies 
saisons,  pour  que  le  genre  humain  puisse  y  trouver 
d'immenses  trésors. 

Adonaï,  le  plus  puissant  nom  de  Dieu,  met  tout  l'uni- 
vers en  mouvement  ;  le  chevalier  qui  serait  assez 
heureux  pour  le  prononcer  kabbalistiquement  aurait  à 
sa  disposition  les  puissances  qui  habitent  les  quatre 
éléments  et  les  esprits  célestes  ;  il  posséderait  aussi 
toutes  les  vertus  utiles  à  l'homme  et  parviendrait  avec 
leur  concours  à  la  découverte  du  premier  des  métaux 
qui  est  le  soleil,  qui  provient  de  l'alliance  intime  des 
six  métaux  (1)  inférieurs,  dont  chacun  contient  la 
semence,  et  la  fournit  dans  le  lit  nuptial. 

Les  six  métaux  inférieurs,  le  plomb,  l'étain,  le  fer, 
le  cuivre,  le  mercure  et  l'argent,  sont  symbolisés  par 
Saturne,  Jupiter,  Vénus,  Mercure  et  la  Lune  ;  l'or- 
soleil,  le  premier  des  métaux,  est  placé  en  leur  centre, 
bien  que  physiquement  il  ne  soit  point  un  métal,  car  il 
est  tout  esprit  et  par  là  incorruptible,  et  c'est  pour  ces 
raisons  qu'il  est  l'emblème  de  la  Divinité,  incapable 
d'aucune  altération. 

Pour  parvenir  à  allier  les  six  métaux  et  à  n'en  faire 
qu'un  seul  qui  ne  soit  point  un  métal,  on  se  sert  de  la 
règle  et  de  la  balance  que  Salomon  a  laissées  dans  son 
traité  précieux  de  ses  Clavicules  kabbalistiques.  La 
Kabbale  est  la  pratique  secrète  des  hautes  sciences  ou 


(1)   Salive,  suc   gastrique,  suc  intestinal,  bile,   sang,   lymphe   et 
moelle,  toutes  matières  condensées  dans  la  semence. 


224  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

connaissance  des  secrets  de  la  nature  et  de  la  grandeur 
de  Dieu. 

Pour  sa  balance,  Salomon  se  servait  de  25  nombres 
sous-divisés  de  la  façon  suivante  :  1,  2,  3,  4,  5,  qui 
contient  25  fois  l'unité  ;  12  fois  2,  8  fois  3,  6  fois  4  et 
5  fois  5. 

Sept  philosophes  ont  donné  la  clef  de  cette  balance  : 
Albumasaris,  Pythagore,  Ptolémée,  Antidonis,  Platon, 
Aristote  et  Hali.  Chacun  d'eux  s'est  attaché  à  un 
métal,  ils  en  ont  fait  un  traité  et  en  ont  donné  la 
mesure,  la  règle  et  la  balance  pour  les  mettre  en  œuvre, 
et  chaque  traité  est  sous  la  domination  d'un  génie  élé- 
mentaire. Les  métaux  et  les  génies  correspondants 
sont:  Plomb,  Aratron  ;  Etain,  Retor  ;  Fer,  Phalech  ; 
Or,  Och  ;  Cuivre,  Hagit  ;  Mercure,  Aphiel,  et  Argent, 
Hali. 

Pour  fabriquer  l'Alkaest,  esprit  ou  dissolvant,  inventé 
par  Van  Helmont,  il  faut  commencer  par  travailler  à 
l'alliance  des  quatre  éléments  simples  dont  tous  les 
êtres  sont  composés  et  les  trois  règnes  de  la  nature 
chacun  dans  leur  saison,  renfermés  dans  chacune  des 
maisons  du  soleil  en  commençant  par  celle  de  Mars, 
parce  que  c'est  par  elle  que  commence  l'année  dans  la 
philosophie  hermétique  et  en  astronomie.  On  prépare 
mystérieusement  les  trois  productions  de  la  nature  avec 
le  feu  élémentaire  tiré  de  la  matière  première  par 
attraction  et  force  centripète  des  mixtes,  mises  en  diges- 
tion dans  le  fourneau  économique  allumé  par  les  quatre 
vents. 

Ce  trésor  produit  des  trésors  immenses  pour  l'huma- 
nité et  qui  dureront  autant  que  le  monde.  Il  n'y  a  que 
les  vrais  maçons  qui  puissent  participer  au  Grand 
Œuvre,  et  encore  bienpeu  y  parviennent-ils. 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  225 

Si  étrange  que  cela  puisse  nous  paraître,  des  gens 
qui  n'étaient  pas  stupides  ni  de  mauvaise  foi  s'amu- 
saient ù  ce  jeu  étrange  à  la  fin  du  xvme  siècle  ;  le 
marquis  de  la  Rochcfoucauld-Bayer(l),  un  des  auteurs 
de  ce  rituel,  était  un  Fort  honnête  homme,  qui  ne  songea 
pas  un  instant  à  fronder  la  royauté,  ni  à  attaquer  la 
religion.  Et  cependant,  depuis  1776,  il  était  G.*.  M.  \  du 
rite  écossais  philosophique.  En  1780,  il  était  membre 
delà  Candeur  à  l'Orient  de  Paris,  et  en  1787  député  au 
G.-.  0.*.  de  Saint-Jean-d'Ecosse  de  l'Indulgente  Amitié 
à  l'0.\  de  Barbezieux,  et  vénérable  du  Contrat  social  à 
l'0.\  de  Paris  ;  il  est  vrai  que,  l'année  suivante,  il  fut 
remplacé  dans  ces  dernières  fonctions  par  le  comte  de 
Gand. 

Quelque  singulière  que  soit  l'initiation  au  grade  de 
Rose-Croix  ordinaire,  celle  des  Réaux-Croix,  autre 
variété  du  même  grade,  est  encore  plus  bizarre.  Dans 
sa  correspondance  avec  le  prince  Charles  de  Hesse  et 
avec  le  duc  Ferdinand  de  Brunswick,  Willermoz,  qui 
avait  été  admis  Réau-Croix  par  Bacon  de  la  Chevalerie, 
délégué  de  Martines  de  Pasqually,  définira  ce  grade,  et 
une  lettre  de  Pasqually  expliquera  comment  on  devait 
le  conférer  (2). 

Pour  les  Réaux-Croix,  l'Angleterre  est  bien  la  patrie 
de  la  f.\-m.\,  et  Cromwell  aurait  trouvé  l'ancien  institut 
des  architectes  d'Orient,  conservé  dans  le  palais  de 
Whitehall,  mais  il  l'aurait  mal  interprété .  Cet  institut 
avait  été  fondé  par  les  F.  R.  A.  C.  X.  (Fratres  Roseœ  et 

(1)  Jacques-Louis  de  La  R.-B.  (1717-1797)  avait  épousé,  par  con- 
trat du  18  août  1750,  Suzanne  Poictevin  du  Plessis- Landry.  En 
1789,  il  habitait  110,  rue  de  Vaugirard,  et  touchait  une  pension  de 
4  000  fr.  en  qualité  de  colonel  réformé  des  grenadiers  royaux  du 
Poitou. 

(2)  Dans  le  tome  II  nous  reviendrons  sur  l'histoire  des  Réaux- 
Croix.  Voir,  Gould,  III. 

LA    FRANC-MACONNERIE.    —    T.   I.  15 


226  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

aureae  cruels  Christ ïani)  qui  font  remonter  leur  origine 
à  un  prêtre  de  Sérapis,  nommé  Ormus,  qui  vivait  vers 
l'an  46,  au  temps  où  saint  Marc  évangélisait  l'Egypte. 
Ormus  ayant  été  baptisé,  adapta  les  doctrines  secrètes 
des  Egyptiens  aux  enseignements  du  christianisme. 

En  l'an  151,  des  Esséniens  et  des  juifs  convertis  et 
savants  dans  les  sciences  occultes,  se  joignirent  aux 
Ormusiens  conservateurs  des  mystères  de  Moïse,  de 
Salomon  et  d'Hermès.  Ces  doctrines  furent  transformées 
au  vie  et  au  vne  siècle  et  n'ont  pas  changé  depuis  En 
1188,  quand  Jérusalem  fut  reprise,  trois  adeptes  vinrent 
en  Ecosse  et  perpétuèrent  l'Ordre,  qui  ne  comportait 
que  peu  d'initiés.  Cromwell  aurait  été  Réau-Croix.  D'a- 
près Charles  de  Hesse,  les  R.  f  d'Occident  ainsi  que  les 
f.  \  moraves  étaient  sortis  d'une  branche  de  ces  Réaux 
f ,  mais  ils  avaient  des  connaissances  très  inférieures  à 
celles  des  Réaux-Croix,  qui  étaient  infiniment  sublimes. 

Willermoz  donne  de  curieux  détails  dans  une  lettre 
qu'il  adresse  au  prince  de  Hesse,  le  20  octobre  1780. 

Il  explique  que,  bien  qu'ayant  fait  suivre  sa  signa- 
ture du  signe  R.  f,  il  n'est  pas  Rose-Croix,  mais 
Réau-Croix  :  «  J'admets,  écrit-il,  beaucoup  des  connais- 
sances des  Roses-Croix,  mais  leur  base  est  toute  de  la 
nature  temporelle  ;  ils  n'opèrent  que  sur  la  matière 
mixte,  c'est-à-dire  mélangée  du  spirituel  et  du  matériel  ; 
et  ont  par  conséquent  des  résultats  plus  apparents  que 
ceux  des  Réaux-Croix,  qui  n'opèrent  que  sur  le  spirituel 
temporel  et  dont  les  résultats  se  présentent  sous  forme 
de  hiéroglyphes.  » 

Dans  chaque  groupe  de  Réaux-Croix  il  y  a  un  chef 
plus  puissant  que  les  autres.  Sur  toute  la  surface  de  la 
terre  il  n'y  a  que  7  chefs,  sans  compter  le  chef  suprême. 
Pasqually  en  aurait  connu  un  en  Italie  et  un  autre  en 
Asie.  Willermoz  dit  ne  posséder  sur  tout  que  des  con- 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  227 

naissances  théoriques ,  son  initiateur  (Pasqually) 
l'ayant  élevé  rapidement  et  l'ayant,  peu  après,  quitté 
pendant  de  longues  années  :  «  Il  devait  revenir  en 
France  pour  achever  mon  instruction,  quand  il  mou- 
rut. Celui  que  je  crois  son  légitime  successeur  (le  fils 
de  Pasqually)  a  encore  bien  des  années  à  attendre  pour 
reconnaître  les  vertus  qui  ont  été  mises  en  lui  et  encore 
plus  pour  être  utile  aux  autres,  étant  encore  très  jeune. 

«  J'ai  été  établi  pour  conserver  le  dépôt  qui  m'a  été 
confié,  etplusieurs, par  mon  ministère, ont  eu  des  signes 
certains  que  la  route  que  je  leur  traçais  était  sûre,  et 
moi-même,  quoique  moins  virtuel  pour  mon  propre 
compte  que  je  l'ai  été  pour  autrui,  j'en  ai  reçu  quelque- 
fois des  signes  si  positifs,  si  évidents,  si  convainquants 
que  je  ne  puis  douter  de   la  vérité    des    principes.   » 

Pour  Willermoz,  c'est  dans  l'ordre  des  Réaux-Croix 
que  réside  l'ordre  par  excellence  dans  toute  la  force  du 
terme  (Réau,  puissant  prêtre).  Les  connaissances  per- 
dues par  la  chute  de  l'homme  et  rendues  par  le  Christ, 
auraient  été  perdues  par  les  papes.  Les  vrais  Réaux 
seuls  ont  gardé  la  puissance  d'ordination  sacerdotale  du 
culte  primitif.  Ceux  ainsi  ordonnés  s'appellent  Coens. 

Voyons  maintenant  comment  on  était  admis  parmi 
les  Réaux-Croix.  C'est  Pasqually  qui  l'explique  dans 
une  lettre  à  Bacon  de  la  Chevalerie  ;  nous  la  repro- 
duisons textuellement,  y  compris  les  fautes  d'ortho- 
graphe caractéristiques. 

«  A  Bordeaux,  le  2  mai  1768. 

«  Je  réponds  T.  H.  T.  R.  M.  aussi  prompteraent  que  je 
le  peut  à  la  demande  que  vous  me  faites  touchant  le  grade 
de  Reaux  croix  que  vous  voulez  donner  à  notre  T.  H.  T. 
R.  M.  De  Villermoz.  Je  ne  me  refuserais  jamais  pour  que 
ce  R.  M.  soit  recompensé  à  tout  égards  et  même   avec    sa- 


228  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

tisfaction,  personne  plus  que  lui  le  mérite  davantage.  Vous 
me  permettrez  P.  M.  de  vous  faire  les  observations  secrètes 
de  notre  loy  abstraite  a  ce  sujet.  Vous  ne  devez  point  ignorer 
que  nous  ne  jouissons  en  notre  qualité  d'hommes,  d'Image 
et  de  ressemblance  divine  que  de  deux  choses  qui  sont 
réellement  en  notre  pouvoir  qui  sont  les  différents  actes 
cérémoniaux  de  nos  opérations  qui  sont  au  nombre  de 
quatre  auxquelles  il  nous  est  donné  une  seule  puissance  a 
chaque,  qui  font  quatre  puissances  ce  qui  complette  avec 
les  quatres  cérémonies  le  nombre  infini  de  huit.  Toutes  ces 
choses  nous  sont  données  avec  précision  d'heures,  de  jours, 
de  semaines,  de  mois,  de  lunes  et  d'années.  Et  que  par  ce 
moyen  en  suivant  scrupuleusement  ce  qui  nous  est  prescrit 
par  Dieu  même,  nous  osons  nous  attendre  à  un  succès  plus 
considérable  de  nos  travaux  que  lorsque  nous  en  sortirons. 

Vous  savez  que  je  vous  ai  toujours  dit  qu'il  n'était  point 
en  mon  pouvoir  de  satisfaire  entièrement  l'homme  a  ce  sujet 
et  qu'à  Dieu  seul  appartenait  cette  sublime  opération. 

A  toutes  ces  choses  prés,  T.  P.  M.  comment  pouvoir 
nous  promettre  quelque  succès  en  faveur  du  candidat  que 
vous  voulez  admettre  à  une  opération  hors  de  son  tems,  un 
fruit  prématuré  est  hors  de  saison,  une  opération  de  prin- 
cipe faite  hors  de  son  tems  est  sans  fruit.  Vous  me  re- 
pondrez  à  tous  cela  comment  faire  ?  Je  lui  ai  promis. 
Je  dirai  a  cela  tempis,  vous  avez  mal  promis,  ces 
sortes  de  choses  sont-elles  en  votre  pouvoir  ?  Indiffé- 
remment cela  ne  se  peut  d'aucune  façon  si  nous  ne  sui- 
vons scrupuleusement  ce  qui  nous  est  prescrit.  La  pré- 
cision de  la  cérémonie  ne  suffit  pas  seule,  il  faut  encore  une 
exactitude  et  une  sainteté  de  vivre  au  chef  qui  mène  les 
cercles  d'adoption  inllecte  (sic)  il  lui  faut  donc  une  prépara- 
tion spirituelle  faite  par  la  prière,  la  retraite  et  la  moration, 
vous  avez  sçu  comment  je  me  suis  comporté  a  Paris  a  cet 
égard.  Cependant  je  ferai  mes  efforts  pour  abandonner  mes 
affaires  domestiques  afin  de  me  disposer  a  vous  fortiffier 
dans  votre  opération,  pour  recompenser  le  zèle  et  les  tra- 
vaux laborieux  au  R.  M.  De  Willermoz,  que  je  crois  être 
digne  du  succès  que  je  lui  désire  dans  cette  opération,  il  ne 
dépendra  pas  de  moi  pour  qu'il  soit  satisfait.  Qu'il  vous 
souvienne  que  c'est  le  dernier  et  le  premier. 

Vous  observerez  pour  cette  cérémonie  de  faire  les  mêmes 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  220 

cercles  que  je  fis  pour  la  réception  du  T.  P.  M.  de  Luzi- 
gnem,  vous  attaquerez  l'angle  de  l'Ouest  comme  votre  chef 
angle.  Il  ne  vous  est  point  permis  d'attaquer  a  l'Est  directe- 
ment, ce  tens  étant  passé.  Vous  ferez  toutes  les  mêmes  céré- 
monies, tant  en  prières  qu'en  parfum;  vous  n'offrirez  d'autre 
holocoste  d'expiation  que  la  tête  d'un  chevreuil  mâle,  que 
vous  ferez  acheter  indifféremment  au  marché,  laquelle  tête 
sera  avec  sa  peau  velue.  Vous  la  préparerez  ainsi  que  l'on  pré- 
pare le  chevreuil  avant  de  l'égorger.  Ensuite  vous  dresserez 
trois  feux  nouveaux.  Dans  celui  qui  sera  au  nord  vous 
mettrez  la  tête  sans  langue  ni  cervelle  mais  bien  avec  les 
yeux.  Dans  celui  qui  sera  au  midi  vous  y  mettrez  la  cer- 
velle. Dans  celui  qui  sera  à  l'Ouest  vous  y  mettrez  la  langue. 
Lorsque  le  tout  brûlera  le  candidat  jettera  trois  grains  de 
sel  assez  gros  dans  chaque  feu.  Ensuite  il  passera  ses  mains 
par  trois  fois  sur  chaque  flamme  de  chaque  feu  en  signe  de 
purification.  Ilaurale  genout  droit  a  terre  et  l'autre  debout 
et  dira  ensuite  ce  mot  inéfable  que  vous  trouverrez  marqué 
dans  l'écrit  cy  joint  ainsi  que  leur  nombre  caractères  e' 
hyerogliphes  lesquels  seront  tracés  devant  chaque  feu  te- 
qu'ils  sont  marqués. 

«  Si  on  ne  peut  avoir  une  tête  de  chevreuil,  on  prendra  ls 
tête  d'un  agneau  couverte  de  sa  peau.  Il  faut  absolument 
que  sa  peau  soit  noire  sinon  l'holocoste  serait  action  de 
grâce  et  non  d'expiation.  Le  candidat  fera  la  cérémonie  de 
la  tête  d'agneau  ou  de  chevreuil  avant  tout  autre  cérémonie. 
Les  cercles  et  l'appartement  ou  l'on  fait  l'opération,  seront 
entièrement  préparés  ainsi  que  nous  avons  jadis  fait.  Vous 
aurez  de  l'eau  comme  il  convient,  vous  commencerez  votre 
opération  le  onze  du  courant,  vous  suivrez  le  12  et  finirez 
le  13  pour  que  vous  vous  rencontriez  aux  jours  relatifs  ou 
manquement  de  la  saison.  Par  le  nombre  des  jours  que  je 
vous  fixe,  vous  remarquerez  le  nombre  de  confusion  par  y. 
Le  nombre  terrestre  et  corporel  par  -^  et  par  -^  puissance. 
Ensuite  vous  ferez  commencer  par  les  invocations  or- 
dinaires et  conjurations  entre  lesquelles  vous  joindrez 
celle  du  commandeur  d'Orient.  Après  les  trois  jours  d'opé- 
rations faites,  vous  ramasserez  soigneusement  les  cendres 
des  trois  feux  que  vous  joindrez  à  celle  que  je  vous  ai  don- 
née. Vous  donnerez  au  candidat  un  scapulaire  pareil  a  celui 
des  autres  R.  f.  Vous  lui  ferez  faire  un  talisman  égal  aux 


230  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

autres,  vous  assemblerez  pareillement  vos  deux  P.  M.  R.  -j- 
dont  l'un  et  l'autre  feront  chaque  jour  une  opération  et  vous 
ferez  la  dernière,  il  est  égal  qui  des  deux  commence. 
Vous  observerez  de  faire  dire  au  candida  la  prière 
qui  est  a  la  suite  des  mots  d'abord  qu'il  aura  passé  les 
mains  ouvertes  sur  le  feu  de  l'holocoste,  vous  aurez  de 
toutes  nécessité  deux  rechauds  un  peu  grands  pour  faire 
consommer  la  langue  et  la  cervelle,  et  celui  qui  sera 
sous  la  cheminée  de  la  Chambre  figurera  le  Nord,  les  deux 
réchauds  figurerons  le  midi  et  l'Ouest  conformément  à  l'an- 
cien usage,  ou  Ion  portait  des  caisses  grillés  pour  faire  les 
holocostes  en  campagne.  Voilà  T.  P.  M.  tout  ce  que  je  puis 
faire  en  faveur  du  zèle  du  R.  M.  De  Willermoz,  Dieu  fasse 
qu'il  l'entende  et  qu'il  retire  de  cette  opération  tout  l'avan- 
tage et  le  succès  qu'il  mérite.  J'abandonne  avec  plaisir  mes 
propres  affaires  pour  sa  satisfaction  ne  comptant  pas  beau- 
coup sur  la  propagation  de  l'ordre  par  la  lenteur  que  je  lui 
voie.  Je  vous  prie  d'assurer  le  R.  P.  M.  de  Willermoz  de 
mon  sincère  attachement. 

«  Ne  faites  fautes  de  prévenir  tous  les  R.  R.  M.  M.  Réaux 
Croix  de  l'opération  que  vous  allez  faire  a  l'extraordinaire, 
n'importe  qu'ils  soient  ou  non  avertis  quinze  jours  d'avance 
comme  il  convient.  Si  vous  n'agissiez  point,  comme  je  vous 
le  dis,  les  R.-j-  pourraient  très  bien  vous  refuser  la  recon- 
naissance du  R.  -}-  que  vous  auriez  fait  et  m'en  porter  leurs 
plaintes  pour  qu'il  ne  fut  point  inscrit  dans  mes  circonfé- 
rences se  crettes  ainsi  que  dans  mon  répertoire  universel. 
Faites  écrire  par  un  des  R.  P.  R.  f  aux  T.  P.  M.  de  Champol 
eon,  au  T.  P.  M.  de  Grainville,  au  T.  P.  M.  de  Luzignem 
pour  éviter  toutes  sortes  de  discution. 

«  Vous  n'oublierez  point  de  faire  boire  le  calice  en  céré- 
monie après  la  réception  et  vous  donnerez  le  pain  mistique 
ou  cimentaire  a  mangera  votre  Reaux  -J*  nouvellement  reçu 
dans  la  même  cérémonie  que  vous  m'avez  vu  faire.   » 


On  a  vraiment  peine  à  croire  qu'en  plein  xvme  siècle 
il  y  avait  encore  des  gens  se  livrant  à  ces  pratiques 
surannées  et  ridicules,  surtout  lorsqu'on  constate  que 
Willermoz  n'était  pas  parmi  les  plus  exagérés,  et  qu'en 


l'idée  maçonnique  et  les  grades  231 

dehors  de  la  maçonnerie  c'était  un  brave  homme,  un 
honnête  commerçant  et  un  bon  père  de  famille. 

11  est  un  autre  rituel  également  intéressant,  c'est 
celui  de  chevalier  Kadosch,  dont  nous  n'avons  pu  trou- 
ver aucun  exemplaire  ancien  aussi  explicite  que  ceux 
de  Rose-Croix  et  de  Réau-Croix  que  nous  venons  de 
citer.  Cependant  nous  en  avons  rencontré  un  qui  pour 
être  moins  ancien  n'en  est  pas  moins  intéressant, 
attendu  que  s'il  faut  en  croire  l'auteur,  le  f.\  Fabien 
30e. *.,  le  texte  qu'il  donne  est  la  reproduction  d'un 
«  Rituel  ancien  formulé  à  nouveau  suivant  la  pratique 
moderne  (1)  ».  Dans  ce  rituel  il  est  expliqué  que  «  dans 
les  grades  philosophiques,  le  maçon  ne  reçoit  plus  l'im- 
pulsion de  personne.  Dans  la  première  série,  il  façonne 
les  cœurs,  dans  la  seconde  il  façonne  les  esprits  ;  voici 
que  dans  la  troisième,  il  façonne  les  volontés  »  (p.  13). 

Puis  il  explique  au  candidat  que  l'échelle  maçonnique 
a  sept  échelons, qui  symbolisent:  la  probité, l'expérience, 
la  fermeté,  la  persévérance,  la  religion,  la  science,  et 
enfin  le  septième  échelon  «  est  »,  dit-il,  «  celui  que  tu 
gravis  maintenant  en  groupant  les  sciences  et  les  ver- 
tus qui  peuvent  te  rendre  apte  à  gouverner  la  volonté 
des  autres  en  lui  faisant  accepter  ton  autorité  »  (p.  16 
et  17).  En  conséquence,  les  échelons  descendants 
symbolisent  :  les  lettres,  les  sciences  proprement  dites, 
les  arts,  l'agriculture,  l'industrie,  le  commerce  et  la 
politique. 


(1)  Paris,   Hugonis,  près  le  G.*.   Bibl.   de   l'Institut,  N.   S.  0.* 
19  012. 


CHAPITRE  VII 
LE    POUVOIR    ROYAL    ET    LA  F.-M.    -    LES    SCHISMES 


L'attitude  du  pouvoir.  —  Louis  XV  était-il  f.-m.?  —  Le  G.*.  0/.  de 
Bouillon.  — La  vieille  Bru.  — La  M.'.  L.-.  Ecossaise  de  Marseille- 
— '  Le  chapitre  de  Clermont.  —  Martines  de  Pasqually  et  les  Elus 
Cohens.  —  St-Jean  de  Jérusalem  et  les  Empereurs  d'Orient  et 
d'Occident.  —  La  maçonnerie  de  perfection.  —  Les  Chevaliers 
d'Orient.  —  Le  baron  de  Tschoudy.  —  Perneti  et  les  Illuminés 
d'Avignon.  —  Chatanier  et  la  Nouvelle  Jérusalem  des  illuminés 
théosophes.  —  La  décadence  delà  maçonnerie. 


Si  les  persécutions  sont  favorables  aux  sociétés  qui 
les  subissent,  la  f.\-m.\  n'aurait  guère  dû  se  développer 
en  France,  car  elle  ne  peut  sérieusement  invoquer  les 
rigueurs  de  l'ancien  régime  pour  expliquer  l'hostilité 
dont  elle  fera  preuve  contre  la  royauté.  Nous  avons 
signalé  (chap.  v,  p.  164  et  173)  les  bénignes  mesures  de 
police  prises  contre  des  f.\-m.\  dont  les  réunions, 
contraires  au  règlement  et  quelque  peu  tumultueuses, 
avaient  attiré  l'attention. 

Dans  l'Orléanais,  leurs  nombreuses  assemblées  in- 
quiétèrent l'administration  locale,  qui,  en  fin  décompte, 
ne  fit  rien  pour  les  disperser.  Par  le  récit  que  nous  allons 
faire  de  ces  incidents,  on  pourra  se  rendre  compte  à 
quel  point  l'autorité  royale  était  bienveillante  et  pater- 
nelle (1). 

(1)  Nous  avons  extrait  ce  récit  et  les  documents  qu'il  contient 
d'un  ouvrage  sur  les  loges  d'Orléans,  que  l'auteur  a  cru  devoir 
retirer  de  la  circulation. 


LE    POUVOIR    ROYAL    ET    LA    P.  M.  LES    SCHISMES   233 

Le  2  mai  1711,  le  procureur  du  Roi  au  Présidial,  Leelerc  de 
Douy,  qui  avait  succédé  eu  1710  à  Legrand  de  Melleray,  adressait 
au  chancelier  d'Agucsscau  la  dépêche   suivante  : 

«  Il  se  forme  depuis  quelque  temps,  en  celte  ville,  une  asso- 
ciation sous  le  nom  de  francs-inuçous,  et  le  nombre  en  aug- 
mente de  jour  en  jour.  Ces  particuliers  s'assemblent  jusqu'au 
nombre  de  30  et  40,  dé  différents  états  et  conditions,  et  ne 
se  retirent  le  plus  souvent  du  lieu  de  l'assemblée  que  dans 
la  nuit.  Le  secret  inviolable  qu'ils  s'obligent  à  garder,  et 
qu'ils  observent  en  effet,  me  fait  ignorer  le  motif  de  pareilles 
assemblées  ;  et,  quoique  je  pense  que  le  plaisir  de  la  table 
en  fasse  le  principal  objet  par  les  fréquents  repas  qu'ils  se 
donnent  les  uns  aux  autres,  je  craindrais  les  suites  de  cette 
union,  si  l'on  n'y  remédiait  dès  sa  naissance.  De  pareilles 
assemblées,  quoique  innocentes  dans  leurs  commencements, 
peuvent  devenir  un  jour  criminelles,  et  toutes  les  lois  du 
royaume  s'accordent  à  les  proscrire  comme  pouvant  être 
préjudiciables  au  repos  et  à  la  tranquillité  de  l'Etat.» 

Il  demande  des  ordres;  en  conséquence  le  chancelier  écrit  à 
Guillaume-François  Joly  de  Fleury,  qui  était  alors  procureur 
général  au  Parlement  de  Paris,  le  4  mai  1743  : 

«  Par  les  différents  avis  qui  me  parviennent  des  provinces, 
je  vois  que  le  mystère  ou  la  folie  des  f.\-m.\  se  répand  dans 
beaucoup  d'endroits,  et  que  c'est  une  maladie  qui  devient 
contagieuse.  Toute  association,  de  quelque  genre  qu'elle 
soit,  est  toujours  dangereuse  dans  un  Etat,  et  surtout  quand 
on  y  mêle  un  secret  et  une  apparence  de  religion,  qui  pour- 
rait bien  cacher  beaucoup  de  libertinage.  Je  crois  donc  que 
vous  jugerez  à  propos  d'approfondir  la  vérité  des  faits  que 
noire  substitut  explique,  et  de  prendre  les  mesures  néces- 
saires pour  dissiper  cette  nouvelle  troupe  qui  se  forme  à 
Orléans.  » 

Le  procureur  général  demanda  des  éclaircissements  et,  le  15  mai, 
Leelerc  de  Douy  lui    répondit  : 

«...Ils  forment  entre  eux  un  corps  composé  de  gens  de 
différents  états  et  conditions,  unis  entre  eux  par  des  liens 
d'une  confraternité  réciproque,  qui  ne  leur  permet  plus  que 


234  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

de  s'appeler  du  nom  de  frères.  Le  noble  et  le  roturier, 
l'officier  et  l'artisan,  honteusement  confondus,  jouissent 
ensemble  des  mêmes  avantages.  La  qualité  d'homme  qu'ils 
envisagent  seule  les  uns  dans  les  autres,  qui  les  rend  tous 
égaux  par  la  nature,  leur  fait  oublier  toute  distinction  de 
rang  et  de  naissance,  et  même  de  religion,  puisqu'ils  ne 
feraient  aucun  scrupule  de  s'associer  l'hérétique,  l'infidèle, 
l'idolâtre  ;  je  le  sais  d'un  f.\-m.\  étranger  qui  m'en  est 
convenu,  et  je  craindrais  fort  que  cette  association  ne  fut  un 
jour  préjudiciable  à  la  religion,  si  elle  ne  l'est  aussi  à  VEtat, 
puisqu'il  est  difficile  de  porter  des  coups  à  la  religion,  que 
l'Etat,  par  un  contre-coup  inévitable,  ne  s'en  ressente  aussi, 
et,  si  je  ne  me  trompe,  dans  l'idée  que  je  me  fais  des  maximes, 
quoiqu'austères  en  apparence,  qui  servent,  selon  eux,  de 
fondement  à  leur  association,  et  qu'ils  doivent  s'étudier  à 
réduire  en  pratique,  je  n'y  aperçois  rien  que  de  propre  à 
former  Vhonnète  homme  païen  ;je  n'y  trouve  point  le  chrétien 
et  le  catholique.  » 

Après  de  nombreux  et  très  exacts  détails  sur  les  réceptions  et 
les  rîtes,  il  termine  ainsi  : 

«  J'apprends  en  ce  moment  que  les  assemblées  des  f.\-m.  . 
sont  fréquentes,  qu'elles  sont  portées  bien  avant  dans  la 
nuit  et  que  les  associés  ne  se  retirent  même  le  plus  souvent 
qu'au  jour.  » 

L'affaire  n'eût  pas  de  suite,  probablement  grâce  à  l'interven- 
tion de  M.  de  Beauclas,  substitut  de  Joly  de  Fleury  et  qui  était 
f.-.-m.'.. 

On  se  borna  donc  le  5  juin  1744  à  renouveler  les  défenses  de 
1737. 

11  est  singulier  de  constater  d'autre  part  l'attitude 
des  f.\-m.\  à  l'égard  de  la  personne  du  roi.  A  lire  leurs 
panégyriques,  il  semblerait  que  ce  sont  eux  qui  lui  ont 
donné  le  surnom  de  Bien-Aimé.  Il  est  le  meilleur,  le 
plus  grand, le  plus  vertueux  des  princes;  sous  son  règne „ 
on  voit  renaître  l'âge  d'or. 


LE  POUVOIR  ROYAL  ET  LA  F. -M.  —  LES  SCHJSMES  235 

Voici  ce  qu'on  chante  dans  la  très  vénérable  confré- 
rie des  francs-maçons  en  1752  (1)  : 

Sous  l'auguste  Louis,  dont  l'amour  le  plus  tendre 
Couronne  les  vertus,  que  ne  doit-on  attendre  ? 
En  lui  l'humanité  prodiguant  son  Trésor, 
Ouvre,  par  l'Esprit  Saint,  l'entrée  au  siècle  d'or. 

Dans  les  papiers  de  l'abbé  Pingre,  f.\~m.\  des  plus 
militants  (bibl.  Sainte-Geneviève,  2484),  nous  trouvons 
des  manifestations  de  tendresse  encore  plus  vives. 
Voici  ce  qu'il  écrit  sur  Louis  XV,  lorsque  ce  prince 
posa  la  première  pierre  de    l'église    Sainte-Geneviève  : 

Lorsque  le  sceptre  en  main  Louis  dicte  des  lois, 
Dans  son  maître  un  Français  bénit  un  tendre  père  : 
Si,  pour  fonder  un  temple  il  prend  en  mains  l'équerre, 
Dans  son  frère  un  maçon  voit  le  plus  grand  des  rois. 

Vient  ensuite  une  poésie  latine  (2)  dont  voici  la  tra- 
duction : 

«  O  vous  par  qui  notre  Art  vraiment  Royal  doit,  après 
avoir  dissipé  les  ténèbres,  répandre  une  lumière  toujours 
nouvelle  sur  la  postérité  la  plus  reculée,  vivez  longtemps, 
et  que  vos  années  multipliées  soient  toujours  marquées 
au  sceau  du  bonheur.  Vivez  pour  vos  peuples,  ils  ne 
peuvent  être  heureux  sans  vous.  En  affermissant  les  traités 
d'une  paix  désirée,  vous  faites  fleurir  toutes  les  sciences, 
les  arts  n'imitent  pas  seulement, ils  surpassent  la  nature;  le 
commerçant,  en  sûreté  sous  vos  auspices,  vole  sans  crainte 
aux  extrémités  de  l'univers.  Par  vous  la  religion  conserve 
toute  sa  splendeur;  sous  vos  lois,  Thémis  rappelle  tout  aux 
poids  d'une  balance  aussi  ferme  qu'équitable  ;  la  piété  et  la 
foi  osent  montrer  leur  front  auguste,  une  juste  vengeance  est 
le  prix  certain  de  tous  les  crimes.  O  le   meilleur  des  rois, 

(1)  Morphée  Franc-maçon,  Jérusalem,  MDCCLII,  p.  91. 

(2)  En  tête  la  dédicace  suivante  :  Ludovico  dilectissimo  lapidem 
ad  normam  exigenti. 


236  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EX    FRANCE 

par  qui  les  Français  voient  renaître  le  siècle  d'or,  puissiez- 
voils  vivre  heureux  pendant  un  nombre  de  siècles  égal  à 
celui  des  canons  que  les  maçons  ont  tirés  en  votre  honneur 
dans  toute  l'étendue  de  l'univers,  à  celui  des  éloges  que 
l'assemblage  de  toutes  les  vertus  vous  a  mérités,  à  celui  des 
citoyens  dont  la  tranquillité  est  nécessairement  liée  avec  la 
conservation  du  vrai  Père  de  la  Patrie.  » 

Peut-on  conclure  de  ces  citations  que  ce  plus  grand 
des  rois  dans  lequel  le  maçon  voit  un  frère,  léquerre  en 
main,  était  également  f.\-m.\?  Il  est  très  probable  que 
Louis  XV  ne  fut  jamais  initié,  mais  on  peut  croire 
qu'il  accepta  le  titre  de  protecteur  insigne  de  l'ordre. 

Alors  que,  dans  toute  l'étendue  de  l'univers,  les 
maçons  tiraient  le  canon  en  son  honneur,  c'est-à-dire 
buvaient  à  sa  santé,  peut-on  accuser  Louis  XV  d'avoir 
persécuté  la  f.\-m.\?  Assurément  non. 

D'autre  part,  le  grand  nombre  de  schismes  qui  na- 
quirent de  1745  à  1771,  la  disjonction  de  ces  nombreux 
régimes,  prouvent  au  contraire  que  l'ordre  avait  toute 
licence  pour  se  développer. 

Enumérons  donc  les  plus  importantes  de  ces  petites 
églises. 


Sans  être  téméraire,  on  peut  supposer  que  les  divers 
régimes  jacobites  sont  sortis  du  Grand  Orient  de 
Bouillon,  bien  qu'on  ne  puisse  en  faire  la  preuve 
absolue. 

Les  ducs  de  Bouillon,  ainsi  que  nous  l'avons  vu  dans 
le  chapitre  iv,  ont  été,  pendant  tout  le  xvme  siècle,  sous 
l'influence  directe  des  Stuarts.  Charles-Edouard  est 
constamment  à  Navarre,  en  Normandie,  à  Bouillon, 
dans  le  Luxembourg,  à  Sedan  ou  à  l'hôtel  Bouillon  du 


LE    POUVOIIl    ROYAL    ET    LA    F. -M.    —    LES    SCHISMES    237 

quai  Malaquais,  et  Ramsay,  après  avoir  élé  le  précep- 
teur du  fils  du  duc  de  Bouillon,  devint  l'intendant  du 
père. 

Or,  comme  le  duc  de  Bouillon  fonda  un  régime  spé- 
cial, et  que  de  son  côté  Ramsay  faisait  remonter  la 
maçonnerie  à  Godefroy  de  Bouillon,  c'est-à-dire  à 
l'époque  des  Croisades,  on  est  en  droit  de  supposer 
que  ce  rite  nouveau  fut  l'œuvre  de  la  collaboration  de 
ces  deux  personnages.  On  ne  sait  pas  exactement  à 
quelle  époque  lut  installé  cet  Orient.  Ragon  prétend 
qu'il  n'existait  plus  en  1774,  et  précisément,  d'après 
Tliory,  au  cours  de  cette  année,  il  constituait  plusieurs 
loges  ;  plus  loin  nous  citerons  une  patente  de  cet 
Orient,  datée  de  1780. 

Le  siège  de  ce  régime  était  à  Bouillon  ;  le  duc  en 
était  le  grand  maître  avec  le  titre  de  Protecteur,  ainsi 
qu'il  résulte  du  sceau  de  cet  Ordre  autour  duquel  était 
inscrite  la  légende  suivante  :  Godfredns,  Deigratia,  Dux 
Bulloniensis,  Prolector.  Les  constitutions  étaient  déli- 
vrées au  nom  de  la  G.*.  L.\  Royale  d'Edimbourg.  Parmi 
ses  membres,  tous  gens  de  haute  naissance,  figuraient 
les  Rohan.  D'après  un  diplôme  donné  en  1780  (1),  par 
la  T.*.  R.\  L.\  Ecoss.  de  St-Jean  sous  le  titre  distinctif 
de  St-Charles  de  la  Parfaite  Harmonie,  du  G.'.  0.*.  de 
Bouillon,  à  Jean  Bagge  né  à  Bergen  (Norwège)  les  hauts 
officiers  étaient  :  le  prince  Camille  de  Rohan,  le  prince 
de  Guemené,  le  duc  de  Montbazon,  Jobard,  Linotte,  etc. 

A  la  fin  du  xvne  siècle  et  au  commencement  du 
xvme,  un  Bouillon  avait  été  en  lutte  ouverte  avec 
Louis  XIY.  Emmanuel-Théodore  de  la  Tour  d'Auver- 
gne, cardinal  de  Bouillon  (2),  avait,  pendant  la  guerre 


(1)  Catal.  Tross  du  27  mars  1863,  n°  68. 

(2)  Né  à  Turenne,  le  24  août  1644,  mort  à  Rome  en  mars  1715. 


238  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

de  la  succession  d'Espagne,  entretenu  des  correspon- 
dances coupables  avec  Marlborough,  Orrery,  Galloway, 
etc.,  et  avait  dû  quitter  la  France  en  1710  ;  décrété  de 
prise  de  corps  par  le  Parlement,  il  vit  mettre  le  séquestre 
sur  ses  abbayes.  Après  avoir  erré  en  Europe,  envoyant 
à  tous  propos  des  mémoires  justificatifs,  il  parvint  à 
obtenir  la  restitution  de  ses  revenus  et  mourut  à  Rome 
dans  une  profonde  retraite.  Depuis  cette  époque,  les 
ducs  de  Bouillon  figuraient  parmi  les  seigneurs  qui 
n'avaient  pas  pris  leur  parti  de  la  suppression  des 
grandes  puissances  féodales  et  avaient  reconnu  la 
royauté  française  avec  une  arrière-pensée  et  le  regret 
d'un  passé  déjà  lointain.  Cependant,  Charles-Godefroy 
occupa  les  fonctions  de  grand  chambellan  du  roi 
Louis  XV  à  partir  de  1728  jusqu'à  sa  mort  (1770). 

Charles  Godefroy  avait  eu  deux  fils. 

Emmanuel-Théodore,  prince  souverain  de  Bouillon, 
se  maria  quatre  fois.  De  son  premier  mariage  avec  une 
La  Trémoille  il  eut  deux  fils  et  cinq  filles  ;  un  fils  du 
deuxième  lit  mourut  en  bas  âge  ;  deux  filles  de  son  troi- 
sième et  de  son  quatrième  lit  épousèrent  l'une  le 
prince  de  Soubise,  l'autre  le  prince  de  Beauvau. 

Ses  deux  fils  du  premier  lit,  Frédéric-Maurice-Casi- 
mir, prince  de  Turenne,  grand  chambellan  (1723),  et 
Charles-Godefroy,  vicomte  de  Turenne  (1706-1771), 
épousèrent  successivement  Marie-Pauline  Sobieska,  et 
par  leur  femme  étaient  par  conséquent  alliés  aux 
Stuarts,  Jacques  III  ayant  épousé  une  Sobieska. 

Charles-Godefroy,  le  G.\  M.-,  du  G.*.  0.'.  de 
Bouillon,  était  un  des  princes  les  plus  titrés  de  France. 
En  dehors  de  sa  souveraineté  de  Bouillon,  il  était  duc 
d'Albret  et  de  Château-Thierry,  comte  d'Auvergne, 
d'Evreux  et  de  Bas-Armagnac,  baron  de  Montgacon, 
Caullac,  Oliergues,  seigneur  de  Crégny,  Senis,    Fres- 


LE    POUVOIR    ROYAL   ET    LA    F. -M.  —    LES   SCHISMES   239 

seins,  Vawercourt,  pair  et  grand  chambellan,  gou- 
verneur et  lieutenant  général  pour  le  Roi  du  haut  et 
bas  pays  d'Auvergne,  mestre  de  camp,  et  depuis  1748 
grand  chambellan  en  survivance. 

De  son  mariage  avec  sa  belle-sœur  Marie  Sobieska 
(1724)  il  eut  un  fils  et  une  iille  qui  épousa  Jules 
Mériadec  deRohan. 

Le  fils  Godefroy-Charles-Henri,  qui  lui  succéda 
dans  ses  titres  et  dans  sa  G.*.  M.*.  (26  janvier  1728- 
3  novembre  1792),  mourut  non  pas  à  l'étranger,  mais 
au  château  de  Navarre . 

C'est  lui  qui  reconnut  comme  membre  de  sa  famille 
Théophile  -  Malo  Corret  de  Kerbeaufïret,  connu  plus 
tard  comme  premier  grenadier  de  France,  sous  le  nom 
de  la  Tour  d'Auvergne  (1). 

Godefroy-Charles-Henri  se  maria  deux  fois  :  la  pre- 
mière fois  il  épousa  Mlle  de  Marsan,  de  la  maison  de 
Lorraine,  et  la  seconde  fois  Mlle  de  Banastre,  dont  il 
n'eut  pas  d'enfants  (2). 

De  son  premier  lit  il  eut  trois  fils  et  une  fille.  Les 
trois  derniers  moururent  en  bas  âge  (3). 

L'aîné,  Jacques-Léopold-Charles-Godefroy,  qui  fut  le 
dernier  duc  de  Bouillon  (15  janvier  1746-7  février 
1802),  était  né  sans  jambes  et  on  avait  dû  l'élever  dans 
un  fauteuil.  Le  jour  de  son  mariage  avec  la  princesse 
de  HesseRheinfelsRothenbourg(1766),  «ondutlepor- 


(1)  Il  était  descendant  illégitime  de  Henri  de  la  Tour  vicomte 
d'Auvergne,  etc.,  et  de  Adèle  Court. 

(2;  Les  amours  de  la  duchesse  de  Bouillon  avec  Maurice  de 
Saxe,  le  comte  de  Clermont,  le  marquis  de  Sourdis,  etc.,  sont 
connus. 

(3)  Il  eut  aussi  de  nombreux  enfants  naturels  dont  un  de  la  grand', 
mère  de  George  Sand,  Marie  Raniteau,  dite  Mme  de  Verrières, 
puis  Mme  de  Furcy,  actrice  de  la  troupe  du  maréchal  de  Saxe. 
Ce  fils  fut  connu  sous   le  nom  de  Beaumont-Bouillon. 


240  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ter  dans  le  lit  de  sa  femme  ;  ce  fut  du  reste  la  seule  et 
unique  fois,  car  il  jura  le  lendemain  qu'il  ne  la  rever- 
rait jamais  de  sa  vie  et  tint  parole  (1)  ». 

Pendant  qu'il  faisait  des  folies  pour  une  demoiselle 
Guesse,  sa  femme  avait  une  liaison  publique  avec  le 
prince  Emmanuel  de  Salm-Salm,  un  des  membres  les 
plus  militants  de  la  loge  des  Neuf  Sœurs 

S'il  mourut  sans  postérité  légitime,  il  avait  eu  ce- 
pendant un  fils  de  Marthe  Serson,  dite  Mme  d'Aubigny, 
puis  de  Moitiers  ;  ce  fils  était  mort  en  1779,  âgé  de 
trois  ans  (2). 

Le  dernier  duc  de  Bouillon  resta  en  France  pendant 
toute  la  Révolution  et  ne  fut  jamais  inquiété,  malgré  ses 
titres  et  son  immense  fortune.  Faut-il  attribuer  cette 
bienveillance  des  pouvoirs  jacobins  à  ses  infirmités  ou  à 
ses  origines  maçonniques  ?  Un  membre  de  sa  famille, 
Godefroy  de  Beaumont-Bouillon,  dit  le  chevalier  de 
Beaumont,  abbé  et  avocat  au  Parlement  (1750-1823), 
fut,  de  1780  jusqu'à  sa  mort,  un  des  membres  influents 
de  la  maçonnerie. 


En  1747  ou  1748,  deux  officiers  de  Charles-Edouard, 
sir  Samuel  Lockhartet  Barnewal,  vicomte  de  Kingston, 
fondèrent  à  Toulouse  un  régime  nouveau,  sous  le  titre 
d'  «  Ecossais  fidèles  »,  connu  par  la  suite  sous  le 
nom  de  Vieille  Bru  (3). 


(1)  Il  avait  adopté  Jacques-Léopold-Charles-Godefroy  de  la 
Tour  d'Auvergne,  pauvre  lieutenant  de  vaisseau  de  la  marine 
anglaise. 

(2)  Voir  Vte  Révérend,  Annuaire  de  la  noblesse. 

(3)  Voir,  dans  la  seconde  partie,  l'historique  de  cette  loge. 


LE    POUVOIR    ROYAL   ET    LA    F. -M.    —    LES   SCHISMES   211 

A  la  tète  de  ce  régime  siégeait  un  consistoire  com- 
posé de  trois  chapitres,  dont  les  membres  s'appelaient 
menatzehims,  ou  chefs  suprêmes.  Le  premier  chapitre 
comprenait  les  grades  d'apprenti,  de  compagnon,  de 
maître  et  de  maître  d'art  ;  le  second  suivait  le  système 
templier  (Ransay)  ;  il  comprenait  quatre  degrés  d'élus  ; 
le  troisième  comprenait  les  initiés  à  la  maçonnerie 
scientifique  (kabbale,  alchimie,  etc.). 

Le  G.'.  0.*.  ne  voulut  pas  reconnaître  la  Vieille  Bru, 
et  plus  tard,  lorsque  «  les  Ecossais  fidèles  »  devinrent 
«  Napoléonmagne  »,  cette  loge  demanda,  mais  en  vain, 
de  faire  dater  sa  fondation  de  1747.  L'authenticité  de 
la  patente  primitive  était  douteuse  et  Napoléonmagne 
prit  date  du  27  mars  1805. 


Muni  de  pouvoirs  datés  d'Edimbourg  du  17  juin  1751, 
un  Écossais  entré  en  France  à  la  suite  de  Jacques  II, 
George  de  Walnon  (1),  fonda,  le  27  août  1751,  une  loge 
à  Marseille  sous  le  titre  de  Saint-Jean-d'Ecosse,  puis  céda 
ses  pouvoirs  à  un  membre  de  cette  loge,  Alexandre 
Routier,  qui  les  transporta  à  son  tour,  le  17  mai 
1762,  à  la  loge  à  laquelle  il  était  affilié,  qui  prit  alors 
le  titre  de  Mère  loge  écossaise  de  Marseille.  Cette 


(1)  Le  1er  juillet  1751,  la  Perfect  Lodge  Scotland  était  dirigée  par 
Worchester  G.  M  ;  S.  Egmond,  1er  G.  Surv*  ;  G.  Oston,  2e  G. 
Surv1  ;  Leicester  ;  Mansfield  et  Duvalnons.  C'est  peut-être  de  ce 
dernier  qu'il  s'agit. 

Cette  même  année,  la  Grande  Loge  d'Ecosse  avait  à  sa  tête  : 
James,  Lord  Boyd,  G.  M.  ;  colonel  John  Young  Dép.  G.  M.  ; 
John  Douglas,  subs1.  G.  M.  ;  James  Stewart,  sen-  G.  W.  ;  John 
Handerson  of  Leiston,  Jun.  G.  W.  ;  Thomas  Miln  G.  Tr.  ;  John 
Mac  Dougal  G-  See;  Robert  Alison,  G.  Clk.  Les  grands  stewards 
étaient  :  John  Wilson  ;  John  Oswald;  John  Ros  ;  Georges  Ritchie 
et  William  Mac  Lean. 

LA   FRANC -MAÇONNERIE.    —  T.  I.  1Ç 


242  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EX    FRANCE 

i 

loge  devint  rapidement  la  rivale  de  la  G*.  L.\  anglaise 
de  France.  Elle  fonctionna  avec  activité  jusqu'en  1793, 
constituant  de  nombreuses  loges  en  Provence,  dans  le 
Levant  et  dans  les  colonies.  Lorsqu'elle  reprit  ses  tra- 
vaux, le  10  mars  1801,  elle  prit  le  titre  deM.'.L.'. 
écossaise  de  France  ;  ses  travaux  ne  prirent  fin  qu'en 
1815. 

Parmi  les  loges  fondées  par  la  M.  L.  Ecossaise  de 
Marseille  figure  Saint-Jean-d'Ecosse  de  la  Vertu  per- 
sécutée, constituée  en  1766,  à  l'0.\  d'Avignon,  qui 
prit  plus  tard  le  titre  de  Mère  Loge  Ecossaise  du  Comtat 
Venaissin  ;  c'est  cette  dernière  loge  qui  céda  ses  titres  à 
la  loge  de  Saint-Lazare  à  FO.\  de  Paris,  qui  devint 
Saint-Jean-d'Ecosse  du  Contrat  social  (1). 

En  1752,  fut  fondé  à  Paris  un  régime  maçonnique 
qui  a  laissé  peu  de  traces  de  sa  constitution  et  de  son 
fonctionnement,  bien  que  divers  rites  paraissent  s'être 
inspirés  de  celui  qu'il  pratiquait. 

Le  Souverain  Conseil  Sublime  Mère  Loge  Ecossaise 
du  Grand  Globe  Français,  qui  modifia  son  titre  pour 
devenir  le  Souverain  Conseil  Sublime  Mère  Loge  des 
Excellents  du  Grand  Globe  Français,  octroyait  les  plus 
hauts  grades.  La  déclaration  du  duc  de  Luxembourg  du 
1er  mai  1772  permet  de  supposer  que  ce  frère  actif  en 
faisait  partie. En  1780,  le  conseil  des  Empereurs  d'Orient 
et  d'Occident  s'empara  du  titre  sous  le  nom  de  Su- 
blime Mère  Loge  Ecossaise  du  Grand  Globe  Français, 
Souveraine  G.*.  L.\  de  France. 


(1)  Voir  la  liste   des  loges  constituées   par  cette  puissance  dans 
l'historique  des  loges. 


LE    POUVOIH    ROYAL    ET    LA    F. -M.     —     LES    SCHISMES    243 

Les  dissentiments  qui  divisaient  les  loges  de  Paris 
et  leur  mauvaise  composition  provoquèrent  la  for- 
mation d'un  groupement  nouveau.  Un  ardent  partisan 
des  Stuarts,  le  chevalier  de  Bonneville,  fonda  à  Paris,  le 
24  novembre  1754,  un  chapitre  auquel  il  donna  le  nom 
de  Chapitre  de  Cleumont,  du  nom  du  G.*.  M.',  sous 
les  auspices  duquel  il  s'était  placé.  Les  membres  de  ce 
régime,  qui  faisaient  partie  des  personnages  les  plus 
distingués  de  la  cour  et  de  la  ville,  se  réunissaient  dans 
le  superbe  local  de  la  Nouvelle  France  (faubourg  Pois- 
sonnière) qui  servait  aussi  aux  réunions  des  Fendeurs 
du  chevalier  de  Beauchaine.  Ce  chapitre  n'eut  qu'une 
existence  éphémère,  mais  il  acquit  néanmoins  une 
grande  puissance  et  une  haute  réputation  ;  on  y  suivait 
le  régime  de  Ramsay-Bouillon.  C'est  là  que  le  baron  de 
Hund  reçut  les  hauts  grades  et  qu'il  puisa  les  principes 
de  la  doctrine  de  la  Stricte  Observance  ;  c'est  lui  qui 
transforma  les  chevaliers  du  Temple  (de  Salomon)  en 
Templiers.  Dans  ce  régime  se  serait  fondue  l'autre 
branche  delà  maçonnerie  jacobite  connue  sous  le  nom 
de  Souverain  Conseil  Sublime  Mère  Loge  du  Grand 
Globe  Français,  dont  on  ignore  les  actes. 

On  confond  généralement  le  chevalier  de  Bonneville, 
soit  avec  Nicolas  de  Bonneville,  né  en  1722,  et  qui 
depuis  1779  touchait  une  pension  de  3.000  fr.  pour 
retraite  en  qualité  de  lieutenant-colonel  du  régiment 
de  Commissaire-Général-Cavalerie,  avec  rang  de  mestre 
de  camp,  soit  avec  Nicolas  de  Bonneville,  homme  de 
lettres  et  libraire,  auteur  des  Jésuites  chassés  de  la 
maçonnerie  brisée  par  les  maçons  et  des  Jésuites 
retrouvés  dans  les  ténèbres  (3  vol.  1788),  sans  remar- 
quer que  ce  dernier,  illuminé  de  Weishaupt,  né  en 
1760,  ne  pouvait  fonder  un  chapitre  en  1754. 

Le  fondateur  de  ce  régime  était  le  chevalier  Chris- 


244  LA   FRANC-MAÇONNERIE  EN    FRANCE 

tophe  de  Bonneville,  né  en  1724,  lieutenant  en  second 
au  régiment  de  Royal-Roussillon  (1),  membre  de  l'Union 
Fraternelle  à  l'0.\  de  ce  régiment  (2). 

Le  rite  des  Elus  Cohens,  composé  en  1754  par  Mar- 
tines  Pasqually,  ne  semble  pas  avoir  une  origine  jaco- 
bite  ,mais  il  fut  adopté  par  un  certain  nombre  de  loges 
de  ce  régime.  Pasqually  passa  sa  vie  à  enseigner  dans 
les  loges  et  sociétés  mystiques  une  espèce  de  religion 
qu'il  disait  tenir  d'une  ancienne  tradition.  Il  voulait 
réunir  tous  ses  adeptes  épars  dans  une  vaste  organi- 
sation et  il  aurait  été  le  grand  prêtre  d'une  religion 
secrète  dont  les  hauts  titulaires  étaient  désignés  par  le 
titre  de  Réaux-Croix  (3).  Il  affilia  un  grand  nombre 
d'adhérents  dans  le  Midi  et  en  particulier  à  Avignon, 
à  Marseille,  Toulouse  et  Bordeaux  (4).  Il  eut  moins 
de  succès  à  Paris,  où  il  enseigna  dès  1768,  et  où  on 
ne  parvint  à  former  un  groupement  qu'en  1775.  Avec 
Pasqually  nous  sommes  en  pleine  théurgie. 

D'après  son  traité  sur  la  réintégration  des  êtres 
dans  leurs  premières  propriétés,  vertus  et  puissances 
spirituelles  et  divines,  Martines  était  partisan  d'une 
sorte  de  panthéisme  mystique,  affirmé  et  non  démon- 
tré :  à  l'origine,  tous  les  êtres  sont  contenus  dans  le 
sein  de  Dieu,  auteur  de  toutes  choses  et  dont  la  volonté 
les   dirige  dans  cette  unité,  tout  en  les  faisant  émaner 

(1)  En  1789,  touchait  550  fr.  de  pension  en  qualité  d'ancien  lieu- 
tenant en  second  au  régiment  de  Royal-Roussillon. 

(2)  Le  vénérable  de  cette  loge  était  le  capitaine  comte  de  Moreton 
de  Chabrillan,  qui  joua  un  rôle  important  dans  la  formation  de  la 
garde  nationale  parisienne,  en  juillet  1789. 

(3)  Voir  chap.  vl,  le  grade  de  Réaux-Croix. 

(4)  En  février  1770,  Pasqually  habitait  à  Bordeaux  chez  Car- 
valho,  juif  converti,  maison  Poiraud,  près  la  porte  de  la  Monnaie. 
En  avril  1771,  il  habitait  Paris,  hôtel  des  Trois-Rois,  rue  Montor- 
gueil,  près  la  Comédie-Italienne  (Papus,  p.  48). 


LE  POUVOIR  ROYAL  ET  LA  F. -M.  —  LES  SCHISMES  245 

par  une  effusion  perpétuelle  sous  la  forme  de  chéru- 
bins, séraphins  et  archanges,  dont  l'expansion  pro- 
voqua la  chute.  L'homme  créé  est  donc  déchu.  Dans 
son  exil,  il  aspire  à  la  réintégration  et,  pour  cela,  il 
doit  identifier  sa  volonté  avec  celle  de  Dieu  et,  par 
conséquent,  s'annihiler.  Les  purs  esprits  peuvent  à  ce 
prix  reconquérir  l'existence  divine. 

Mais  comme,  pour  atteindre  ce  but,  il  faut  l'interven- 
tion des  esprits  qui  peuplent  l'intermonde,  on  doit 
entrer  en  relation  avec  eux.  Par  gradation,  on  arrivera 
jusqu'à  Dieu  par  la  pratique  d'un  culte  mystérieux. 
C'est  le  retour  aux  traditions  de  la  Kabbale,  aux  sacri- 
fices expiatoires  d'animaux. 

Il  y  a  neuf  degrés  divisés  en  trois  classes  pour  arriver 
jusqu'à  Dieu  : 

lre  classe:  apprenti,  compagnon,  maître,  grand  élu 
et  apprenti  Cohen. 

2e  classe  :  compagnon  et  maître  Cohen,  grand  archi- 
tecte et  chevalier  commandeur,  ces  deux  derniers 
degrés  formant  les  Elus  Cohens. 

Enfin  la  classe  secrète  avec  les  Réaux-Croix. 

C'est  la  régénération  de  l'homme  par  sa  réintégra- 
tion dans  son  innocence  primitive  perdue  par  le  péché 
originel. 

La  doctrine  mystique  embrasse  la  création  de 
l'homme,  et  les  châtiments  de  son  corps,  de  son  âme 
et  de  son  esprit,  dont  on  arrivera  à  la  réintégration 
par  deux  opérations  successives  : 

Le  postulant,  monceau  de  boue,  pour  recevoir  la 
lumière  devra  s'engager  à  ne  plus  toucher  à  l'arbre  de 
la  science  du  bien  et  du  mal.  Néanmoins  il  violera 
ses  engagements  et  sera  précipité  dans  les  flammes, 
mais  par  ses  remords  il  obtiendra  le  pardon  de  Dieu. 

Dans  la  seconde  phase,  il  est  animé  du  souffle  divin 


246  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

et  peut  connaître  alors  les  secrets  les  plus  cachés  de 
la  nature,  y  compris  toutes  les  sciences,  même  la 
Kabbale. 

Le  12  décembre  1765,  la  G.'.L*.  de  France  désavoua 
les  doctrines  de  Pasqually  et  refusa  de  reconnaître  les 
loges  formées  par  lui.  Néanmoins  il  fit  quelques  adhé- 
rents, et  plus  tard  le  G.*.  0.'.  devait  revenir  sur  les 
décisions  de  la  G*.  L.*.  en  reconnaissant  que  le  rite 
des  Elus  Cohens  était  celui  qui  avait  conquis  le  plus 
d'élèves  et  conservé  avec  le  plus  de  soin  le  secret  de 
ses  mystérieux  travaux. 

Les  sectateurs  prirent  le  nom  de  Martinistes  et 
furent  confondus  par  la  suite  avec  les  adeptes  de 
Saint-Martin,  son  élève  le  plus  célèbre.  Dans  leurs 
réunions,  les  Elus  Cohens  développaient  leurs  vertus 
actives  et,  par  des  voies  sensibles,  on  obtenait  d'abord 
des  manifestations  d'ordre  intellectuel  puis  la  science 
des  esprits,  par  des  visions  d'ordre  sentimental,  ini- 
tiaient à  la  science  des  âmes. 

«  Martinez  Paschalis,  dit  Martinès  de  Pasqually,  et 
qui  probablement  s'appelait  Martin  Pascalis,  juif  por- 
tugais, fut  le  fondateur  des  Illuminés  français,  des 
Elus  Coëns  !  »  Telle  est  la  légende  qui  a  cours  sur  ce 
personnage. 

Qui  a  prouvé  que  Martin  Pascalis  était  juif  et  Portu- 
gais ?  Il  a  signé  parfois  Don  Martinès  de  Pasqually. 
Or,  Don  est  espagnol  ;  un  Portugais  eût  signé  Dom 
Martinès.  Le  nom  de  Pascalis  n'est  pas  plus  juif  que 
celui  de  Portalis  ;  Pasqually  et  surtout  de  Pasqually 
n'a  rien  d'hébreu. 

Au  surplus,  l'acte  de  baptême  (à  Sainte-Croix  de 
Bordeaux)  de  son  fils,  reproduit  par  Papus,  établit  la 
catholicité  de  Pasqually.  Dans  cet  acte,  du  20  juin 
1768,  le  fils  est  appelé  Jean-Jacques-Philippe-Joacin- 


LE    POUVOIR    ROYAL    ET    LA    F.-M.    —    LES    SCHISMES    217 

Anselme  de  La  Tour  de  la  Case  ;  le  père,  sire  Jacques- 
Delivon-Joacin  La  Tour  de  la  Case,  Don  Martines  de 
Pasqually,  et  la  mère  dame  Marguerite-Angélique  de 
Colas  de  Saint-Michel.  Pasqually  se  serait  marié  à 
Bordeaux,  en  septembre  1767,  avec  Mlle  de  Colas,  fille 
du  major  du  régiment  de  Foix. 

En  1769,  lors  de  son  procès  contre  Bonnichon  (dit 
du  Guers),  Pascalis  prouva  sa  catholicité. 

D'autre  part,  M.  Franz  von  Baader  prétend  que 
Pascalis  est  né  à  Grenoble,  paroisse  Saint-Hugues 
(Notre-Dame),  en  1715,  et  que  c'était  un  simple 
ouvrier  en  voiture. 

Pascalis  n'est  pas  né  à  Grenoble,  ni  paroisse  Saint- 
Hugues,  ni  paroisse  Saint-Louis,  ni  paroisse  Saint- 
Laurent,  ni  paroisse  Saint- Joseph. 

J'ai  tout  lieu  de  croire  cependant  qu'il  est  originaire 
d'une  famille  de  Grenoble  et  qu'il  est  fils  de  Jean- 
Pierre  Pascalis,  maître  écrivain,  professeur  de  langue 
latine,  et  de  Madeleine  d'Alençon.  De  ce  mariage  sont 
nés  : 

1°  Madeleine,  baptisée  le  4  avril  1711  à  Saint- 
Hugues  ; 

2°  Françoise,  baptisée  le  2  décembre  1712  à  la 
même  paroisse; 

3°  Marie,  baptisée  le  5  juin  1721  à  Saint-Louis  ; 

4°  Félix,  né  en  1724  à  Saint-Hugues,  mort  le  3  juin 
1727. 

On  peut  supposer  que  celui  qui  nous  occupe  est  né 
en  1715  dans  les  environs  de  Grenoble,  et  que  son  nom 
est  tout  simplement  Martin  Pascalis. 

Pasqually,  puisque  tel  est  le  nom  qu'il  adopta,  s'em- 
barqua pour  Saint-Domingue  à  Bordeaux  le  5  mai 
1772.  Il  avait,  paraît-il,  entrepris  ce  voyage  pour 
recueillir  une  succession.  Il  mourut  à  Port-au-Prince 


248  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

le  mardi  20  septembre  1774,  laissant  un  fils  qui  faisait 
ses  études  au  collège  de  Lescar,  près  de  Pau  (1). 
Avant  de  mourir,  il  désigna  pour  son  successeur  son 
cousin  Armand-Robert  Caignet  de  Lestère,  commis- 
saire général  de  la  marine  à  Port-au-Prince  depuis 
1771. 

Parmi  les  disciples  de  Pasqually,  un  grand  nombre 
parvinrent  à  la  célébrité  : 

Paul-Henry  Thury,  baron  d'Holbach  (1723-1789),  le 
fameux  auteur  du  Système  de  la  nature  ; 

Duchanteau  ^Touzay) ,  hébraïsant  et  kabaliste, 
auteur  d'un  Calendrier  magique,  convoqué  aux  con- 
vents  de  Paris  de  1785  et  1787,  qui  mourut  des  suites 
d'une  expérience  alchimique  faite  dans  la  loge  des  Amis 
réunis  de  Paris.  Je  ne  sais  si  Duchanteau  est  le  même 
personnage  que  Touzé,  vénérable  le  28  mai  1777  de  la 
loge  Saint-Nicolas  de  la  Parfaite  Union  à  l'Orient  de 
Paris,  en  1778  secrétaire  de  la  Chambre  de  Paris  de  la 
G.*.  L.\,  ou  que  Touzet,  procureur  au  Ghâtelet,  cloître 
Saint-Merry,  en  1776  membre  de  l'Etoile  Polaire  à 
l'0.\  de  Paris,  et  en  1774  et  1787  député  de  la  Réunion 
des  Etrangers  0.\  de  Moscou; 

Pierre-André  de  Grainville,  créole  de  l'ile-Bourbon, 
capitaine  au  régiment  de  Foix  (1767-8)  et  chef  de  ba- 
taillon au  régiment  de  Boulonnais,  chevalier  de  Saint- 
Louis,  chevalier  Grand  Profès  de  la  Stricte  Observance, 
le  26  mars  1785,  sous  le  nom  d'Equesa  Cruce  stellata, 
commis  voyageur  très  actif  de  ce  régime  en  Bretagne, 
convoqué  aux  convents  de  Paris  de  1785  et  1787. 

L'abbé  Fournier,  auteur  d'un  ouvrage  mystique 
publié  à  Londres  en    1791  :  Ce  que  nous  avons  été,  ce 


(1)  Dans  un  brevet  du  29  février  1804  de  la  Parfaite  Réunion  à 
l'Orient  de  Paris  figure  la  signature  d'un  Pascali. 


LE   POUVOIR    ROYAL    ET   LA    F. -M.    —   LES   SCHISMES   219 

que  nous  sommes  et  ce  que  nous  serons;  nous  retrou- 
verons l'abbé  Fournier  à  La  Haye  en  1811,  parmi  les 
Illuminés  les  plus  actifs.  C'est  probablement  Dom 
Achille  Fournier,  auteur  de  Y  Histoire  de  l'homme  con- 
sidéré dans  ses  mœurs  et  dans  sa  vie  privée,  Paris, 
Leclerc,  1779,  3  vol.  in-12  ; 

Jacques  Cazotte  (1720-1792),  le  célèbre  auteur  du 
Diable  amoureux,  visionnaire  convaincu,  qui  devait 
mourir  guillotiné  à  la  suite  d'une  condamnation  inex- 
plicable ; 

Le  comte  puis  marquis  Gabriel  de  Bèrnège,  qu'on 
appellera  tantôt  Berney,  tantôt  Lerney  ou  Lernay, 
major  au  service  du  roi  de  Sardaigne,  qui  en  1758 
introduisit  dans  la  loge  des  Trois  Globes  à  l'0.\  de 
Berlin  les  grades  du  Conseil  des  empereurs  d'Orient  et 
d'Occident,  membre  très  actif  de  la  Stricte  Observance, 
où  il  remplissait  les  fonctions  de  grand  maître  provin- 
cial de  la  vme  province  sous  le  nom  d'Eques  a  Turre 
aurea  ; 

Saint-Amand,  probablement  le  même  personnage 
que  Jean-Florimond  Boudon  de  Saint-Amans  (1748- 
1831),  l'ancien  correspondant  du  Musée  de  Paris  à 
Agen,  membre  de  diverses  académies,  en  1809  orateur 
des  Admirateurs  de  l'Univers  à  l'0.\  de  Paris,  natura- 
liste, archéologue,  historien,  littérateur  et  agronome  ; 

D'Hauterive,  dont  nous  n'avons  pu  déterminer  la 
personnalité  civile  ; 

Bacon  de  la  Chevalerie,  Saint-Martin  Willermoz, 
de  Luzignem,  de  Loos,  etc.,  sur  lesquels  nous  aurons  à 
revenir  longuement. 


Le  4  juillet  1755,  des  statuts,  scellés  du  sceau  mysté- 


250  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

rieux  du  livre  rouge  avec  des  fils  d'or  et  d'azur,  étaient 
dressés  par  la  R.\  L.\  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  à 
l'0.\  de  Paris,  gouvernée  par  le  comte  de  Clermont, 
G.*.  M.*,  de  toutes  les  loges  régulières  de  France.  Ces 
statuts,  en  44  articles,  devaient  servir  de  règlement  à 
toutes  les  loges  de  France  ;  ils  proclamaient  la  supré- 
matie des  grades  écossais,  en  indiquant  l'origine  jaco- 
bite  de  ce  régime,  établissant  ainsi  son  hostilité  avec 
la  G.*.  L.\  anglaise  de  France  qui  ne  reconnaissait  pas 
ces  grades  (1). 

C'est  de  cette  loge  que  faisaient  partie  les  fonda- 
teurs du  Conseil  des  Empereurs  d'Orient  et  d'Occi- 
dent. 

La  loge  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  semble  être 
entrée  en  sommeil  au  moment  de  la  formation  du 
G.*.  0.'.,  la  plupart  des  membres  du  Conseil  des  Empe- 
reurs étant  entrés  dans  la  combinaison  du  duc  de 
Luxembourg.  Mais  la  G.*.  L.\  dissidente  la  reconstitua 
le  3  janvier  1779.  Elle  eut,  depuis  cette  époque  jusqu'en 
1813,  pour  vénérable  le  f.\  Jeanty,  négociant,  14,  rue 
Poissonnière  (2). 

Cette  loge  rentra,  sous  l'Empire,  dans  la  juridiction 
du  G.-.  0.-. 

Le  Conseil  des  Empereurs  d'Orient  et  d'Occident  fut 
un  des  régimes  maçonniques  les  plus  importants.  Ce 
chapitre  de  hauts  grades  formé  à  Paris,  en  1758,  cons- 
tituait loges,  chapitres  et  collèges.  Les  membres  pre- 
naient les  noms  les  plus  pompeux  : 

(1)  Nous  nous  rangeons,  sur  ce  point,  à  lavis  de  Daruty,  contre 
Kloss  et  Findel,qui  attribuent  ces  règlements  à  la  G.-.  L".  anglaise 
de  France.  C'est  à  tort  que  Thory  attribue  la  fondation  du  Con- 
seil des  Empereurs  à  la  grande  loge  du  rite  ancien  et  accepté  de 
Londres. 

(2)  En  1784,  Jeanty  était  également  membre  de  Saint -Pierre  de 
la  Fidélité  des  Amis  réunis  à  l'O.  de  Paris. 


LE    POUVOIR    ROYAL    HT    LÀ    F.-M.    —    LES    SCHISMES    251 

Souverains  Princes  maçons  ; 

Substitut  général  de  l'Art  royal  ; 

Grands  surveillants  ; 

Olïiciers  de  la  grande  et  souveraine  loge  de  Saint- 
Jean  de  Jérusalem. 

Ce  Conseil  aurait  été  fondé  par  un  sieur  de  Saint- 
Gelaire,  qui  avait  déjà  introduit  en  France,  en  1757, 
l'ordre  des  Noachites  ou  chevaliers  prussiens  ;  Saint- 
Gelaire  prenait  le  titre  d'Inspecteur  général  des  loges 
prussiennes. 

Pendant  que  la  G.*,  et  S.'.  L.\  de  Saint-Jean  de 
Jérusalem  constituait  par  toute  la  France  des  loges  de 
Perfection,  le  Conseil  des  Empereurs  créait  collèges 
et  chapitres,  et  en  particulier  le  collège  de  Valois  et  en 
1759,  à  Bordeaux,  un  Souverain  Grand  Consistoire  des 
Sublimes  Princes  du  Royal  Secret  (1),  qui  constitua 
à  son  tour  plusieurs  ateliers. 

Malgré  l'opposition  de  la  G.\  L.*.,  plusieurs  de  ses 
membres  se  font  affilier  au  Conseil  des  Empereurs  : 
Chaillon  de  Jonville,  le  prince  Camille  de  Rohan, 
Daubertin  (2),  etc. 

Le  Conseil  publie,  en  1762,  une  liste  des  25  degrés 


(1)  Voy.  chap.  v,  Beauchaine  et  Etienne  Morin. 

(2)  Joseph-Alphonse  Daubertin,  rue  de  la  Madeleine  (Boissy 
d'Anglas),  vis-à-vis  le  marché  d'Aguesseau,  conseiller  du  roi,  gref- 
fier, commissaire  en  chef  du  Conseil  d'Etat  privé,  caissier  de  l'ar- 
tillerie et  du  génie.  En  1761,  G.'.  Secret,  de  laG.'.  L.*.  et  du  Sup. 
Conseil  des  Princes  parfaits  maçons  en  France,  vénérable  maître 
de  Saint-Alphonse  O*.  Paris,  banni  de  la  G*.  L.\  en  1765  ;  rentré 
en  grâce  en  1771,  fut  un  des  signataires  de  l'acte  d'union  du  17  sep- 
tembre 1772  entre  la  G'.  L.-.  et  le  Conseil  des  Empereurs  ;  2e  et 
1er  surveillant  de  la  Chambre  d'administration  du  G.-.  O.-.  (1773- 
4);  secrétaire  général  de  cette  Chambre  1 1774-1784).  En  1776 
député  au  G.*.  O.'.  de  la  Parfaite  Amitié  O.'.  d'Auxonne;  de  la 
Parfaite  Fraternité  O.'.  du  Croisic;  de  la  G'.  L.-.  Provinciale  de 
la  Concorde  et  de  la  Parfaite  Amitié  O.'.  de  Dijon. 


252  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

qu'il  conférait  alors,  et,  le  22  septembre  de  la  même 
année,  le  Grand  Consistoire  des  Princes  du  Royal  Secret 
adopte  à  Bordeaux  les  règlements  et  constitutions  de 
la  Maçonnerie  de  Perfection  ;  ce  document  fut  ratifié  à 
Berlin  le  25  octobre  suivant. 

Dans  ce  rite  de  Perfection  dit  aussi  d'Hérodom,  les 
25  degrés  étaient  divisés  en  sept  classes,  et  pour  passer 
d'un  grade  à  un  autre,  il  fallait  avoir  un  nombre  de 
mois  déterminé  de  chaque  grade.  Pour  passer  d'ap- 
prenti à  T.*.  111.'.  Souv.*.  Prince  de  la  Maçonnerie, 
grand  Chev. *.  Subi.',  commandeur  du  Royal  Secret,  il 
fallait  le  nombre  mystérieux  de  81  mois.  A  l'expiration 
de  ce  délai,  le  maçon  cueillait  la  Rose  mystique 
(secret  templier). 

Ce  sont  ces  règlements  qui  furent  appelés  «  Les 
Grandes  Constitutions  de  1762  ».  Comme  ils  ne  furent 
connus  en  France  que  lors  de  la  réintroduction  du 
rite  écossais  en  France  par  le  comte  de  Grasse-Tilly, 
leur  authenticité  est  très  discutable,  et  elle  a  été  du 
reste  très  discutée  par  les  historiens  défenseurs  du 
G.*.  0.'.  ennemis  de  l'écossisme,  et  en  particulier  par 
Ragon. 


En  1762  se  produisit  une  scission  dans  le  Conseil 
des  Empereurs,  un  nouveau  conseil  se  forma  sous  le 
nom  de  Chevaliers  d'Orient.  Mais  à  la  fin  de  1779  les 
deux  fractions  se  réunirent  et  formèrent  le  Conseil 
Suprême  des  Princes  Maçons  dont  les  hauts  digni- 
taires prenaient  le  titre  de  Grands  Inspecteurs  géné- 
raux. 

A  la  tête  des  mécontents  était  le  frère  Pirlet,  tailleur 
d'habits   et   vénérable  de  la  Trinité  à  l'0.\  de  Paris. 


LE    POUVOIR    HO  Y  AL    ET    LA    P. -M.    —    LES    SCHISMES    253 

Le  baron  de  Tschoudy  était  l'auteur  de  leurs  rituels. 
D'après  le  nouveau  Conseil,  l'initiation  maçonnique 
remontait  aux  Egyptiens  ;  le  rite,  composé  de  quinze 
grades,  s'arrêtait  à  celui  de  chevalier  d'Orient  ou  de 
l'Epée. 

En  1766,  le  baron  de  Tschoudy  adresse  une  circu- 
laire aux  ff/.-m.*.  français,  pour  protester  contre  la 
filiation  templière,  et  il  se  sépare  pendant  deux  ans  de 
ce  régime,  pour  fonder  l'Ordre  de  l'Etoile  Flamboyante 
sur  laquelle  nous  reviendrons  plus  loin. 

A  bout  de  ressources,  le  22  janvier  1780,  les  mem- 
bres du  Conseil  Suprême  réunirent  à  leur  régime 
l'ancien  Grand  Globe  Français  qui  était  en  décadence, et 
la  réunion  de  ces  trois  groupes  forma  la  Sublime  Mère 
Loge  Ecossaise  du  Grand  Globe  Français,  souveraine 
G  \  L.\  de  France.  Malgré  ces  efforts,  les  trois  régimes 
périclitaient  et  en  étaient  réduits  à  proposer  par  sous- 
cription les  grades  maçonniques  à  raison  de  6  livres 
par  livraison.  Plus  tard  tous  ces  débris  joindront  leurs 
infortunes  à  des  groupes  que  le  G.'.O.'.  avait  délaissés  et 
formeront  le  Grand  Chapitre  général  de  France  (1782). 


C'est  encore  à  la  suite  de  mécontentements  et  de 
discussions  au  sein  du  Conseil  des  Empereurs  que  se 
forma  un  régime  nouveau,  celui  de  I'Etoile  Flam- 
boyante, dont  le  fondateur  était  le  baron  Théodore- 
Henry  de  Tschoudy,  sur  lequel  nous  nous  arrêterons, 
par  suite  de  l'incertitude  des  historiens  sur  sa  personne 
civile. 

Les  Tschoudy  appartenaient  à  une  famille  parle- 
mentaire, originaire  de  Suisse  et  établie  à  Metz  depuis 
le  commencement  du  xvie  siècle. 


254  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

On  a  confondu  Théodore-Henry  avec  son  cousin  et 
beau-frère  Jean-Baptiste-Louis-Théodore,  né  à  Metz 
le  15  août  1734  et  mort  dans  la  même  ville  le  7  mars 
1784.  Capitaine  au  régiment  de  Jenner,  chevalier  de 
Saint-Louis,  à  la  mort  de  son  père  Claude-Henry,  il 
avait  été  bailli  de  Metz  et  chef  de  la  noblesse  messine. 
A  la  fin  de  sa  vie,  il  s'occupa  de  littérature  et 
d'histoire  naturelle.  Son  fils  Jean-Joseph-Charles  Ri- 
chard a  été  également  confondu  avec  Théodore-Henry. 
Né  à  Metz  le  3  avril  1764,  il  mourut  le  14  août  1822. 
Ancien  officier  général,  il  était  correspondant  de  la 
Société  royale  et  centrale  d'agriculture  de  Paris. 

La  vie  de  Théodore-Henry  fut  plus  compliquée  que 
celle  de  ses  proches. 

Né  à  Metz  le  21  août  1727,  fils  d'un  conseiller 
d'honneur  au  Parlement,  il  débuta  dans  la  carrière 
paternelle,  mais  pendant  fort  peu  de  temps,  son 
humeur  vagabonde  l'entraînant  dans  de  multiples 
aventures.  En  1752,  Théodore-Henry,  après  avoir 
publié  à  la  Haye,  contre  la  bulle  de  Benoît  XIV,  les 
Etrennes  au  Pape  ou  les  f.\-m.\  vengés,  se  rend  à 
Rome,  sous  le  nom  de  chevalier  de  Lucy,  où  il  publie 
le  Vatican  vengé,  apologie  ironique,  ou  Lettre  d'un 
père  à  son  fils.  A  la  suite  de  la  publication  de  ce  pam- 
phlet, il  dut  quitter  Rome,  et  se  réfugia  en  Russie. 
Sans  ressources,  il  s'engagea  dans  la  troupe  des  comé- 
diens français  de  la  tzarine  Elisabeth,  puis  devint 
secrétaire  particulier  du  comte  Ivan  Schouvaloff,  sous 
le  nom  de  comte  de  Petlange.  C'est  sous  ce  nom 
qu'en  1755  il  publia  le  Caméléon  littéraire.  Il  aban- 
donna ce  journal  pour  remplir  les  fonctions  de 
secrétaire  de  l'Académie  de  Moscou,  et  enfin  celles  de 
gouverneur  des  pages  de  la  Cour. 

Pendant  qu'il   était  auprès   du  comte  Schouvaloff, 


LE  POUVOIR  ROYAL  ET  LA  F. -M.  —  LES  SCHISMES  255 

commettant  un  véritable  abus  de  confiance,  il  avait 
livré  à  ce  ministre  une  lettre  chiffrée,  qu'un  agent 
diplomatique  nommé  Meissonnier  l'avait  chargé  de 
mettre  à  la  poste  à  l'adresse  de  Durand,  ministre  du 
roi  de  France  à  Varsovie,  ce  qui  avait  provoqué  l'ar- 
restation de  Meissonnier. 

Obligé  de  quitter  la  Russie,  Tschoudy  eut  l'impru- 
dence de  se  rendre  à  Paris.  A  peine  arrivé,  il  fut  en- 
fermé à  la  Bastille  le  16  mai  1756,  sur  ordre  de  d'Agues- 
seau,  et  il  y  resta  jusqu'au  2  août  suivant,  la  cour  de 
Russie,  sur  la  demande  de  sa  mère,  étant  intervenue 
en  sa  faveur.  Il  se  lance  alors  exclusivement  dans  la 
maçonnerie  messine.  Le  5  mars  1764,  il  préside  la  loge 
Saint-Etienne  à  l'O.'.  de  Metz  ;  mais,  en  1765,  il  donne 
sa  démission  et  vient  se  fixer  à  Paris,  où  il  se  fait  affilier 
au  Conseil  des  Chevaliers  d'Orient. 

En  1766,  il  fonde  l'Ordre  de  l'Étoile  Flamboyante  com- 
posé de  grades  chevaleresques,  remontant  aux  Croisades 
d'après  le  système  templier.  C'était  un  retour  au  sys- 
tème de  Ramsay,  mais  perfectionné  par  l'expérience, 
s'il  faut  l'en  croire.  D'après  lui,  la  f.\-m.\  aurait  été 
fondée  par  Pierre  l'Ermite.  Son  système  aurait  été 
emprunté  à  l'ordre  de  la  Palestine,  qui  existait,  dit-on,  à 
Paris  du  temps  de  Ramsay.  Tschoudy,  dans  son  Etoile 
Flamboyante  ou  la  société  des  f.\-m.'.  considérés  sous 
tous  les  aspects,  réduit  les  grades  à  cinq  :  Apprenti, 
Compagnon,  Rose-Croix,  Grand  écossais  de  la  voûte 
sacrée  de  Jacques  VI  et  Grand  Écossais  de  Saint-André 
d'Ecosse,  supprimant  le  grade  de  maître,  sous  prétexte 
qu'il  aurait  été  inventé  uniquement  en  souvenir  de  la 
mort  de  Charles  Ier. 

Tschoudy  mourut  en  1769,  laissant  un  manuscrit 
inédit  qui  ne  fut  publié  qu'en  1787  :  Recueil  précieux 
de  la  maçonnerie   adonhiramite,  dans  lequel  il  préconi- 


256  LA    FRAXC-MACOXXERIE    EX    FRANCE 

0 

sait  un  système  de  treize  grades  comprenant  le  grade 
de  maître  et  ayant  pour  grade  suprême  le  noachite  ou 
chevalier  prussien. 

Un  brevet  donné  à  l'abbé  Pingre  le  25  août  1766 
(Bibl.  Sainte-Geneviève,  Mist.  3031),  en  nous  faisant 
entrevoir  l'organisation  de  Tschoudy,  nous  donne  la 
liste  de  ses  adhérents. 

Nous  Sérénissime  Lord  maître  grand  corar.  duchap.*. 
T.*.  111.".  de  la  Palestine,  Mtie  de  la  L.  S  E.  de  Metz,  assisté 
de  quelques-uns  des  officiers  du  4.  f.  R.  collège  fondateur 
St-André  St-Théodore  y  établis  et  de  tous  les  4.  f.  R. 
collège  St-Pierre  et  de  France, par  nous  exigés  en  cet  Orient, 
Certifions  que  notre  T.*.  C.\  F.'.  Alexandre  Guy  de  Pingre 
a  été  par  nous  reçu  chev.  de  St-André  d'Ecosse  et  admis  au 
complément  de  l'Art  Royal,  en  sa  qualité  d'apprenti,  com- 
pagnon et  maître,  comme  tel  imbu  de  toutes  les  connais- 
sances de  l'ordre  et  de  droit  constitué  l'un  des  chefs  d'ice- 
luy.  Le  recommandons  à  l'amitié  et  bon  accueil  de  tous  nos 
collèges  correspondants.  Sa  signature  étant  en  marge  pour 
la  vérification  des  présentes.  Enfoy  de  quoi  les  lui  avoir  fait 
expédier  signées  de  nous,  contresignées  par  le  com.  au 
bureau,  scellé  du  sceau  du  4  f.  R.  collège  fondateur  et  de 
celui  de  S.'.  L.".  M. \  pour  par  ledit  frère  jouir  de  tous  les 
honneurs,  prérogatives  et  privilèges  attachés  à  sa  dignité. 
Donné  à  l'Orient  de  Paris  le  25  août  1766. 

F.*.  Théodore  Henry,  baron  de  Tschoudy,  G.  Cmr.  de  la 
Palestine  S.-.  L.'.  M.',  du  Col.'.,  M.',  de  la  L.*.  P.  .  E.\, 
Ch.\  de  Tordre  du  Christ. 

Moët,  L  S.  M.  du  collège  Ec.\  de  St-Pierre;  Puisieux  ; 
Cretot  ;  Garrou  ;  Martin  ;  Saget  ;  Loreau;  Caseuilh  jeune  ; 
Caseuilh  aîné  ;  Paulinier  ;  Ledin  ;  Joubert  de  la  Bourdi- 
nière  ;  Loisel  ;  Maheu  ;  De  Fosseux;  Colson  ;  Zambault,  G. 
des  Sceaux.  —  Par  mandement:  Fouvier,  chev.  de  Palestine. 


Antoine-Joseph    Perneti  naquit  à  Roanne  le  13  fé- 
vrier 1716.  Il  était  le  neveu  du  chanoine  de  Lyon  Jacques 


D^tv 


LA    FRANC-MAÇONNERIE.    —T.  I. 


17 


258  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Perncti,  littérateur  (mort  en  1777!,  et  oncle  de  Joseph- 
Marie  Perneti,  qui  fut  baron  du  premier  empire, 
général  de  division,  pair  de  France  et  sénateur  du 
second  empire  (1766-1856). 

D'après  le  père  du  général  Thiébault,  «  Perneti  avait 
un  caractère  de  modération  et  de  bonhomie  tel  qu'il  ne 
se  brouillait  jamais  avec  personne,  que  même  il  obli- 
geait, quand  il  le  pouvait,  et  qu'il  était  d'une  complai- 
sance précieuse  dans  la  société.  Il  croyait  à  la  kabbale, 
aux  revenants,  aux  sortilèges,  etc.  ;  mais,  malgré  ce  ridi- 
cule, tout  le  monde  l'aimait  ».  Entré  jeune  dans  les 
ordres,  il  prononce  ses  vœux  comme  bénédictin  de 
Saint-Maur,  à  Saint-Germain-des-Prés.  La  première 
œuvre  qui  soit  restée  de  lui  est  un  Manuel  bénédictin 
de  1754.  Il  s'occupa  ensuite  de  beaux-arts  et,  en  1757, 
publia  un  Dictionnaire  portatif  de  peinture. 

Sous  l'influence  des  doctrines  de  Pasqually,  il  s'a- 
donne à  la  Kabbale  et,  en  1758,  fait  paraître  son  Dic- 
tionnaire mytho-hermétique  et  les  Fables  Egyptiennes  et 
Grecques  dévoilées.  Persuadé  qu'Homère  avait  appris 
l'alchimie  en  Egypte,  il  ne  voit  dans  Ylliade  que  des 
leçons  allégoriques  sur  cet  art,  et  dans  Y  Odyssée,  qu'une 
peinture  des  erreurs  où  tombent  les  adeptes  avant  de 
parvenir  à  la  connaissance  du  grand  œuvre.  Puis  il 
abandonne  provisoirement  l'alchimie,  part  en  qualité 
d'aumônier  en  1763  avec  Bougainville  pour  l'expédition 
des  Iles  Malouines  et  publie  le  récit  de  son  voyage. 
Rentré  à  Saint-Germain-des-Prés,  la  vie  monastique  lui 
paraît  lourde  et  il  est  un  des  vingt-huit  religieux  de  ce 
couvent  qui,  le  15  juin  1765,  demandent  l'abolition  de 
la  règle.  Il  se  rétracte  avec  ses  collègues,  le  11  juillet  sui- 
vant, mais  sans  changer  d'avis.  Peu  après,  il  jette  le  froc 
aux  orties  et  se  rend,  en  1765,  à  Avignon,  où  il  organise, 
en  1766,  le  régime  des  Illuminés  d'Avignon  et  crée  le 


LE  POUVOIR  ROYAL  ET  LA  P.-M.  —  LES  SCHISMES  259 

grade  de  Chevalier  du  Soleil  ;  plus  tard,  l'Académie 
des  vrais  maçons  ou  Académie  des  sages,  qui  se  fonde  à 
Montpellier,  s'occupe  sous  le  régime  de  Perneti  de 
science  hermétique  et  porte  le  nombre  des  grades  à  six  : 

1°  Le  Vrai  Maçon  ; 

2°  Le  Vrai  Maçon  dans  la  Voie  droite  ; 

3°  Le  Chevalier  de  la  Clef  d'or  ; 

4°  Le  Chevalier  de  l'Iris  ; 

5°  Le  Chevalier  des  Argonautes  ; 

6°  Le  Chevalier  de  la  Toison  d'or. 

Obligé  de  quitter  Avignon,  Perneti  se  rend  en  Prusse, 
où  Frédéric  II,  qui  l'a  confondu  avec  son  oncle  Jacques, 
le  nomme,  en  1767,  conservateur  de  la  bibliothèque  de 
Berlin  et  membre  de  l'Académie  Royale  de  cette  ville 
avec  1.200  rixdales  d'appointements.  Peu  après,  il 
reçoit  le  bénéfice  de  l'abbaye  de  Burgel,  en  Thuringe. 
Il  remplit  ces  diverses  fonctions  jusqu'en  1782  ;  sa  tra- 
duction des  merveilles  du  Ciel  et  de  YEnfer,  de  Sweden- 
borg, lui  fit  perdre  la  faveur  de  Frédéric,  et  il  rentra 
en  France  en  1783. 

Il  était  resté  en  relations  avec  ses  adeptes  d'Avignon, 
où  il  revint  probablement  à  plusieurs  reprises,  car, 
d'après  Clavel,  ce  fut  lui  qui  fonda  en  1770  la  G.*.  L.\ 
Ecossaise  du  Comtat  Venaissin.  D'après  un  manuscrit 
conservé  à  la  bibliothèque  d'Avignon  (n°  3090),  de  1779 
à  1785,  Perneti  était  en  relations  avec  de  nombreux 
Illuminés  :  le  comte  Grabianca,  grand  seigneur  polo- 
nais et  sa  femme  ;  Annette  et  Tècle  Grabianca  ;  la 
comtesse  Stadnisca  ;  le  comte  Tarnovski  ;  le  comte 
Ronikier;  Borelli  ;  Catherine  Baley  ;  Morinval  ;  Louis- 
Joseph-Bernard-Philibert  de  Morveau  dit  Brumore  ; 
M1U  Bruchié  ;  le  prince  Henri  de  Prusse  ;  Perneti 
Cadet  ;  de  Servières  ;"Blainville  ;  Bouge  ;  de  la  Richar- 
dière,  etc. 


260  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1774  et  1775  existait  encore  une  loge  irrégulière 
(d'après  le  G.*.  0.'.),  sous  le  titre  de  Saint-Jean  des  secta- 
teurs de  la  vertu,  qui  pratiquait  le  régime  de  Perneti. 
Cette  loge  avait  pour  vénérable  un  Sr  de  Saint-Léger, 
qui  sollicita  sa  régularisation  auprès  delà  G..\L.\  par 
l'intermédiaire  de  son  député  François  Martin  de  la 
Noue,  avocat  au  Parlement.  Cette  régularisation  fut 
refusée,  sur  l'opposition  de  Fon  vielle. 

Il  semble  que  cette  loge  se  soit  fondue  avec  Saint- 
Jean  d'Ecosse  de  la  vertu  persécutée,  instituée  par 
Saint-Jean  d'Ecosse  à  l'0.\  de  Marseille  le  17  août  1774. 
D'après  la  Chaîne  d'union  (IV,  417),  cette  loge  existait 
dès  1742  comme  mère  loge,  mais  tous  les  papiers  la 
concernant  auraient  été  saisis  par  le  grand  inquisiteur 
Mabile,  qui  fit  poursuivre  ses  membres. 

En  décembre  1775,  de  Leutre  demanda  au  G.  * .  0 . \  de 
reviser  les  titres  de  cette  loge,  dont  on  trouvait  l'anti- 
quité exagérée,  attendu  qu'elle  ne  put  produire  les 
diplômes  qu'elle  tenait,  disait-elle,  du  comte  de  Clermont 
et  que  son  vénérable,  Saint-Léger,  remit  des  titres  pro- 
venant d'une  puissance  maçonnique  inconnue  ou  mé- 
connue du  G.'.  0.*. 

Parmi  ses  membres  figuraient  :  Pierre  Joseph 
d'Aulps,  marquis  de  Blacas  ;  Guignet  de  Bassinet  ; 
Charles-Michel-Jean-Louis-Toussaint,  marquis  d'Ai- 
grefeuille  (1);  Dom  Bolindreau,  DomChabrier  et  Dom 
Bequar,  bénédictins  ;  de  Bassinet  d'Augard,  cha- 
noine ;    Baron  d'Astier,   ami  de  J.-J.  Rousseau  ;    de 


(1)  Chevalier  de  Malte, procureur  général  à  la  chambre  des  comp- 
tes et  cour  des  aydes  de  Montpellier,  administrateur  du  dépôt 
littéraire,  président  du  chapitre  des  hauts  grades    philosophiques. 

En  1806  membre  du  Choix  (H.  D.  M.  de  Kg.),  vénérable  d'honneur 
du  Phénix  0.\  de  Paris,  G.  off.  honoraire  du  G.'.  O.'.  (1745- 
1818). 


LE  POUVOIR  ROYAL  ET  LA  F. -M.  —  LES  SCHISMES  201 

Leutre  (1)  ;  de  Falque  (2);  d'Aymé;  de  Fonviellc  ; 
Bertholier,  prêtre  ;  Nalives  de  Saint-Cyr  (orateur  en 
1788). 

Cette  loge  en  constitua  plusieurs  : 

La  Parfaite  Union  à  l'0.\  de  Villeneuve,  le  7  oc- 
tobre 1781  ;  Saint-Charles  du  triomphe  de  la  Parfaite 
Harmonie  à  l'0.\  de  Paris,  le  19  mai  1782  ;  la  Vraie 
Sagesse  à  l'O.*.  de  Montpellier,  le  27  avril  1773. 

Lors  de  son  retour  à  Paris  en  1783,  Perneti  eut  des 
démêlés  avec  l'archevêque,  qui  voulait  le  faire  réintégrer 
son  couvent.  Il  se  retira  chez  son  jeune  frère,  directeur 
des  fermes  à  Valence,  et  de  là  se  rendit  à  Avignon, 
où  il  fit  encore  du  prosélytisme  maçonnique.  En  1787, 
il  avait  une  centaine  d  affiliés  qui  se  réunissaient  à  sa 
maison  de  campagne,  appelée  le  Thabor,  près  de  Bédar- 
rides.  En  1790,  il  publia  à  Paris  :  Les  vertus,  le  pou- 
voir,  la  clémence  et  la  gloire  de  Marie,  mère  de  Dieu, 
Arrêté  en  1793,  il  est  sauvé  par  le  9  thermidor.  Il  se 
retire  de  nouveau  à  Valence,  où  il  continue  ses  recherches 

(1)  Bourgeois  de  Paris,  l'un  des  fondateurs  de  la  M.*.  L.\  du  rite 
écossais  philosophique  dans  laquelle  il  a  rempli  les  fonctions 
de  secrétaire  (1779),  maître  parfait  Ecossais  (1784),  député  des 
Amateurs  de  la  sagesse  0.\  Marseille  (1787).  Poursuivi  en  1793 
comme  membre  du  Contrat  social,  il  dut  s'expatrier  et  mourut  à 
Hambourg,  d'après  Daruty.  Cependant,  nous  trouvons  en  1812  de 
Leutre  père  membre  non  résident  de  la  Mère  Loge  Ecossaise.  Son 
fils,  Joseph-Antoine-François,  négociant  à  Lyon,  en  1806  était  mem- 
bre non  résident  du  Choix  0.\  de  Paris,  sous  le  nom  de  R-p-t.,  et 
en  1812  grand  inspecteur  non  résident  de  la  M.*.  L." .  Ecossaise. 

(2)  Peut-être  est-ce  Ernest-Frédéric -Hector  Falcke,  conseiller  et 
bourgmestre  à  Hanovre,  reçu  profès  de  la  Stricte  Observance  le 
1er  novembre  1782,  sous  le  nom  de  Eques  a  Rostro,  par  Ferdi- 
nand, duc  de  Brunswick  Lunebourg.  Falcke  aurait  fait  partie  des 
Illuminés  de  Bavière  sous  le  nom  d'Epéménidès  ;  nous  signalons 
pour  mémoire  un  Falck-Schek,  grand  rabbin  qui  en  Angle- 
terre aurait  donné  au  G*.  M.-,  le  duc  de  Chartres  un  talisman  en 
lapis-lazuli  qui  devait  conduire  ce  prince  au  trône  et  que  MI11C  de 
Lacroix  brisa  par  exorcisme  sur  sa  poitrine. 


262  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

sur  la  pierre  philosophaleetl'élixir  de  longue  vie.  C'est 
dans  cette  ville  qu'il  mourut  en  1801,  persuadé,  jusqu'à 
sa  dernière  heure,  qu'il  avait  trouvé  le  moyen  de  pro- 
longer son  existence  de  plusieurs  siècles. 


En  1767,  un  maçon  français,  le  chirurgien  Benedict 
Chatanier,  essaya  vainement  de  fonder  à  Paris  une  so- 
ciété secrète,  dans  le  but  de  propager  le  système  de  la 
Nouvelle  Jérusalem  de  Swedenborg,  sous  le  nom  d'iLLU- 
minés  théosophes;  il  se  disait  théosophe  chrétien.  A  la 
suite  de  son  insuccès,  bien  qu'il  fût  membre  delaGr.\ 
L.\  de  France  et  vénérable  de  Socrate  de  la  Parfaite 
Union  à  l'0.\  de  Paris,  il  alla  pratiquer  son  système 
à  Londres,  où  il  réussit.  Son  rite  comprenait  six 
degrés  : 

1°  Apprenti  Théosophe  ; 

2°  Compagnon  Théosophe  ; 

3°  Maître  Théosophe  ; 

4°  Ecossais   sublime  ou    Théosophe  illuminé  de  la 
Jérusalem  céleste  ; 

5°  Frère  Bleu  ; 

6°  Frère  Rouge. 


On  a  pu  se  convaincre  par  l'étude  que  nous  venons 
de  faire  de  tous  ces  schismes  que  la  maçonnerie  fran- 
çaise était  très  divisée,  et  encore  n'avons-nous  énuméré 
que  les  principaux,  ceux  ayant  cours  à  Paris  et  dans 
quelques  grandes  villes. 

A  la  vérité,  leur  nombre  était  beaucoup  plus  consi- 
dérable,  si  l'on     compte    les    schismes    locaux    qui 


LE    POUVOIR    ROYAL   ET    LA    F.   M.    —   LES    SCHISMES   263 

étaient  presque  aussi  nombreux  que  les  loges.  Nous 
aurons  l'occasion  d'y  revenir,  lorsque  nous  ferons  l'his- 
torique des  ateliers  et  chapitres  de  province. 

Jusqu'en  1771,  nous  ne  voyons  donc  qu'un  nombre 
infime  de  loges  d'origine  anglaise  ou  vraiment  écos- 
saise, et  ces  dernières  ne  sont-elles  encore  que  des  loges 
anglaises  constituées  par  l'intermédiaire  d'une  loge 
d'Ecosse,  elle-même  sous  l'obédience  de  la  grande  loge 
de  Londres. 

En  France,  deux  courants  se  sont  dessinés  :  le  courant 
jacobite,  le  plus  nombreux,  et  le  courant  alchimique, 
qui  prendra  par  la  suite  plus  d'importance  au  fur  et  à 
mesure  que  la  politique  jacobite  n'aura  plus  déraison 
d'être,  ni  de  but  possible,  même  pour  les  gens  enclins 
aux  illusions   les  plus  excessives. 

La  Grande  Loge  de  France,  ou  mieux  la  G  \  L.\  de 
Paris,  est  divisée  en  deux  confraternités  qui  se  poursui- 
vent de  leurs  invectives  et  même  de  leurs  coups.  Nom- 
mées exclusivement  par  des  maîtres  de  loges  parisiens, 
elles  n'ont  qu'une  autorité  illusoire  sur  les  loges  de  pro- 
vince. Les  luttes  byzantines  des  plus  hautes  autorités 
maçonniques  de  France  semblent  présager  la  fin  d'une 
organisation  religieuse,  philosophique  et  sociale  qui  n'a 
aucune  raison  d'être.  La  vraie  f.*.-m.\,  la  f.\-m.\ 
anglaise,  n'avait  pas  pu  s'acclimater  dans  notre  pays. 

Dans  notre  prochain  volume,  nous  verrons  comment 
et  sous  quelles  influences  le  duc  de  Luxembourg  in- 
conscient réorganisa  laf.*.-m.\  française,  en  s'inspi- 
rant  exclusivement  de  la  f.\-m.\  anglaise.  Nous 
constaterons  comment,  en  la  groupant  et  en  l'unifiant, 
il  en  fera  le  redoutable  engin  de  destruction  de  l'an- 
cienne France. 


CHAPITRE  VIII 
LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  F.  .  M 


Leurs  causes  et  leur  but.  —  Les  locaux  :  Les  tenues  privées.  —  La 
Grande  Loge.  —  Le  Grand  Orient  ;  ses  pérégrinations.  —  Les 
locaux  parisiens.  —  Les  faux  noms  des  loges.  —  Les  hiérogly- 
phes. —  Les  ères  maçonniques.  —  Les  mots  secrets.  —  Les 
signatures.  —  Le  langage  conventionnel. 


La  F.\-m.\  s'est  plu,  dès  le  début  de  son  organisa- 
tion, à  entourer  les  réunions  de  ses  membres  d'une 
série  de  petits  mystères  qui  devaient  frapper  l'ima- 
gination des  profanes  et  leur  faire  croire  que,  pour 
cacher  avec  autant  de  soin  ce  qui  se  passait  dans  ses 
assemblées,  elle  devait  posséder  un  terrible  secret  : 
emploi  de  mots  bizarres  et  de  sens  incompréhensible, 
signes  et  attouchements  spéciaux,  noms  de  loges  dé- 
naturés, correspondance  par  lettres  chiffrées,  costumes 
et   bijoux  singuliers,  almanachs   surannés. 

Sans  parler  du  prestige  qu'elles  leur  donnaient  auprès 
du  public  profane  et  des  menus  initiés,  toutes  ces 
fantasmagories  enfantines,  pour  ridicules  qu'elles  nous 
paraissent,  avaient,  à  tout  prendre,  leur  côté  pratique  : 
elles  donnaient  de  l'importance  au  serment  du  silence 
imposé  aux  adeptes,  et  assuraient  pratiquement  la  sécu- 
rité des  réunions.  Ces  petits  mystères,  inutiles  en  appa- 
rence, amusaient  ceux  qui  les  pratiquaient;  beaucoup 
les  prenaient  même  très  au  sérieux;  ils  faisaient  partie 
de  l'exercice  du  culte.  Pour  la  plupart  des  f.\-m.\  du 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  F.\-M.\      265 

xvinc  siècle,  ils  constituaient  la  maçonnerie,  et  c'est  là 
leur  excuse.  Nous  verrons  même  les  plus  notoires 
d'entre  eux  discuter  gravement  pour  savoir  si  l'on  peut 
oser  remplacer  le  mot  des  apprentis  :  Tubalcaïn,  par 
le  mot  Thaleg,  sous  prétexte  que  Tubalcaïn  était  le  père 
de  la  métallurgie  et  que  les  métaux  étaient  enlevés  aux 
candidats  à  l'apprentissage.  Pour  les  maçons  latomi- 
sés,  ces  menues  choses  ont  autant  d'importance  que 
l'origine  des  êtres,  les  merveilles  de  la  nature,  les  phéno- 
mènes de  la  génération,  les  destinées  de  l'humanité  et 
l'existence  de  Dieu.  Ils  s'acharnent,  dans  des  combats 
homériques,  à  propos  de  procédés  d'initiation,  et,  au 
nom  de  la  fraternité,  échangent  des  paroles  aigres- 
douces, de  très  hypocrites  insinuations,  et  même  de  fort 
vilaines  accusations. 

Voyons  donc  en  quoi  consistaient  ces  menus  mys- 
tères. 

Parcourons  d'abord  les  locaux  où  on  les  mettait 
en  pratique. 

les  locaux 

Nous  n'avons  pu  trouver  aucun  document  positif 
sur  le  local  dans  lequel  avaient  lieu  les  tenues  de  la 
Grande  Loge  de  France  (1).  Selon  l'usage  presque 
constant  à  cette  époque,  les  réunions  importantes 
devaient  avoir  lieu  chez  le  substitut  du  G.*.  M.*,  ou 
chez  un  grand  dignitaire.  L'adresse  officielle  pour  la 
correspondance  était  le  bureau  du  Secrétaire,  chez  le 
Grand  Garde  des  Sceaux  et  Archives.  Nous  pouvons 


(1)  Dans  ce  chapitre  nous  étudierons  l'histoire  de  la  f.\-m.\ 
jusqu'en  1815,  afin  de  ne  plus  avoir  à  revenir  sur  ce  côté  épisodique 
de  notre  travail. 


266  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

i 

donc  suppposer  qu'avant  1771  la  G.*.  L.\  de  France 
avait  son  local  ordinaire  chez  Brest  de  la  Chaussée,  c'est- 
à-dire  hôtel  de  Charras,  rue  de  la  Sourdière.  Les  dissi- 
dents (les  frères  bannis)  siégeaient  rue  St-Antoine,  avant 
1773,  et  rue  d'Argenteuil,  chez  Diavant,  après  1775. 

Lorsque  le  G.*.  0.*.  se  forma,  ses  membres  se  réuni- 
rent quelquefois  chez  le  duc  d'Orléans,  mais  le  plus 
souvent  les  assemblées  avaient  lieu,  soit  chez  le  duc 
de  Luxembourg,  soit  dans  des  établissements  publics  ; 
une  d'elles  fut  convoquée  au  local  de  la  loge  des  Amis 
réunis,  dont  j'ignore  l'emplacement  à  cette  époque. 

D'après  des  gravures  du  xviii6  siècle,  dédiées  à  Tra- 
venol,  auteur  du  Catéchisme  des  Francs-Maçons,  les  loges 
ne  procédaient  pas  à  leurs  tenues  dans  des  locaux 
ayant  une  architecture  intérieure  spéciale  ;  on  étalait 
simplement  par  terre  la  figuration  d'une  loge  peinte 
sur  une  toile  ;  on  raconte  même  que  le  chevalier  de 
Beauchaine  se  contentait  de  dessiner  à  la  craie  sur  le 
parquet  lès  emblèmes  nécessaires  aux  tenues  (1). 
Néanmoins,  d'après  les  descriptions  des  assemblées, 
on  devait  disposer  d'une  façon  particulière  les  meubles, 
tables,  bancs,  chaises  et  fauteuils,  suivant  le  grade  des 
officiers  qui  devaient  les  occuper.  Il  y  avait  aussi  un 
grand  luxe  de  lumières.  L'organisation  d'une  tenue 
nécessitait  tout  un  appareil  spécial  difficilement  trans- 
portable. 

Les  assemblées  de  loges  ordinaires  avaient  lieu  chez 
le  Vénérable  Maître,  qui  fournissait  local,  vivres  et 
rafraîchissements,   et  c'est  peut-être  pour  cette  cause 


(1)  L'abbé  Perau,  dans  le  Secret  des  francs-maçons  (1744),  p.  65 
et  87,  fait  observer  <r  qu'au  milieu  de  la  chambre  de  réception  il  y 
a  un  grand  espace  sur  lequel  on  crayonne  deux  colonnes  »,  et  que 
les  figures  nécessaires  à  la  réception  sont  également  crayonnées 
sur  le  plancher  de  la  salle. 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LÀ  F.\-M.\       2G7 

que,  dans  beaucoup  de  cas,  les  Vénérables  Maîtres 
étaient  limonadiers  ou  traiteurs.  Il  était  certes  des 
accommodements  avec  le  Grand  Architecte  de  l'Uni- 
vers ;  l'initié  était  invité  à  ne  voir  que  trois  pieds  dans 
une  table  qui  en  avait  quatre,  et  à  multiplier  par  la 
pensée  le  nombre  restreint  des  lumières  afin  d'en  voir 
le  nombre  sacramentel  ;  de  même  on  effectuait  des 
voyages  remplis  de  péripéties  en  faisant,  les  yeux 
bandés,  le  tour  de  la  salle  de  réception.  Ce  ne  fut,  en 
effet,  qu'à  partir  de  1774  qu'on  développa  en  France 
la  pompe  du  culte.  Les  f.\-m.\  français,  en  s  installant 
dans  le  noviciat  des  jésuites,  suivirent  l'exemple  des 
f.\-m.\  anglais  qui,  après  s'être  réunis  cinquante  ans 
dans  des  tavernes,  avaient  fait  construire  un  superbe 
local. 

La  G.*.  L.\  d'Angleterre  avait  pris  cette  décision 
depuis  1771.  Le  22  février  1775,  on  lui  présenta  le  plan 
d'un  nouveau  local  ;  les  frères  avaient  souscrit  100.000  fr. 
Le  1er  mai  suivant,  on  posa  solennellement  la  première 
pierre  du  monument,  qui  fut  inauguré  le  23  mai 
1776  (1). 

C'est  au  coin  de  la  rue  de  Mézières  et  de  celle  du  Pot- 
de-fer  (actuellement  rue  Bonaparte,  n° 82),  dans  l'ancien 
noviciat  des  jésuites  chassés  de  France  depuis  dix  ans, 
que,  le  12  août  1774,  le  G.*.  0.\  prit  possession  de  son 
somptueux  local  dont  le  loyer  annuel  atteignait  le  prix  de 
5.400  fr.,  très  élevé  pour  l'époque  (2).   Des  dépenses 

(1)  En  1788  on  construisit  en  plus  à  Londres  une  Taverne,  pour 
les  f\'-m.\ 

(2)  Ce  local  avait  été  proposé  le  7  mars  1774  au  G.'.  O.-.  par 
Pierre  Poncet,  entrepreneur  des  bâtiments  du  roi,  architecte  véri- 
ficateur général  de  la  caisse  et  membre  de  la  chambre  d'adminis- 
tration au  G.*.  O.'.  Poncet  était  député  de  plusieurs  loges  de  Cha- 
lon-sur-Saône et  de  Dijon  de  1774  à  1787  et  membre  de  la  L.  des 
Arts  Sf«-Marguerite. 


268  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

considérables  furent  faites  pour  l'aménagement.  Voici 
la  description  qui  en  est  faite  dans  l'état  du  G.\  0.\  (1) 
que  nous  résumons. 

Les  ateliers  étaient  élevés  de  vingt-quatre  degrés 
au-dessus  du  sol  de  la  ville  et  composés  de  trois  salles 
auxquelles  on  accédait  par  des  vastes  portiques  en 
enfilade,  qui  permettaient,  de  l'entrée,  d'apercevoir  le 
trône  distant  de  125  pieds  (42  mètres). 

La  première  salle  était  décorée  d'une  étoffe  à  fleurs 
de  différentes  couleurs,  la  seconde  d'une  moire  bleue 
et  blanche  avec  un  double  rang  de  banquettes  bleues 
garnies  de  franges  d'or.  Ces  deux  salles  étaient  éclairées 
par  un  grand  nombre  de  lustres  en  cristaux.  La  3e 
salle,  celle  des  travaux,  longue  de  78  pieds  et  large  de 
21  (environ  26  m.  sur  7m.),  était  divisée  en  deux  par- 
ties. La  partie  de  l'orient  avait  27  pieds  de  long  et  35 
de  hauteur,  avec  un  plafond  bleu  de  ciel  ;  elle  était 
formée  parune  estrade  élevée  de  3  marches.  Le  pourtour 
de  lambris  sculpté  portait  des  piédestaux  surmontés 
de  pilastres  cannelés  or  et  argent.  Cette  partie  de  la 
salle  était  éclairée  par  150  lustres  de  cristal.  Au  fond, 
une  nouvelle  estrade,  également  surélevée  de  3  marches, 
portait  le  trône  élevé  d'une  marche  et  formant  une 
troisième  estrade  sur  laquelle  était  le  fauteuil  de  velours 
bleu  rehaussé  d'or  du  Sér.*.  G.*.  M.*.  Un  tapis  brodé 
d'or  et  d'argent,  nuancé  des  couleurs  les  plus  éclatantes, 
couvrait  l'autel  (table).  Le  trône  était  surmonté  d'un 
vaste  dais  enrichi  d'ornements  d'or  et  d'argent  et 
surmonté  d'un  lustre  de  20  lumières. 

Sur  la  seconde  estrade,  deux  fauteuils  de  velours 
bleu  étaient  réservés  au  T.*.  111.'.  Administrateur  géné- 
ral et  au  T. \  R.\  G.*.  Conservateur.  Sur  la  première 

(1)  Etat  de  1777,  4e  partie,  p.  7  et  suivantes. 


LES    PETITS    SECRETS    DE    LA    IV. -M.'.  2()9 

estrade,  des  sièges  de  même  étoffe  placés  en  demi-cercle 
étaient  réservés  aux  grands  officiers  Da  côté  du  midi, 
étaient  les  bureaux  du  G.*.  Orateur,  des  Orateurs  des 
Chambres,  du  Trésorier  général  et  de  l'Architecte  véri- 
ficateur de  la  caisse  ;  du  côté  du  nord,  les  bureaux  du 
Secrétaire  général,  des  Secrétaires  des  chambres  et  du 
Garde  des  Sceaux. 

L'autre  partie  de  la  salle  avait  51  pieds  de  long  sur 
21  de  hauteur  ;  tendue  en  bleue,  ornée  de  galons  et  de 
franges  d'argent  et  de  festons  dorés,  elle  était  couron- 
née par  un  plafond  d'azur  éclairé  par  deux  cents  bou- 
gies placées  sur  des  girandoles  en  cordon.  Elle  était 
garnie  d'un  double  rang  de  banquettes  ornées  d'argent 
placées  sur  des  gradins.  Sur  le  rang  inférieur  à  l'inté- 
rieur, se  tenaient  les  Officiers  et  les  plus  anciens 
Députés.  A  l'occident,  étaient  les  tables  triangulaires 
des  Surveillants  couvertes  de  tapis  bleus,  avec  des 
broderies  d'or  et  d'argent,  figurant  les  attributs  de  ces 
officiers.  A  côté,  s'élevaient  deux  colonnes  d'or  ornées 
de  chapiteaux,  portant  chacune  un  lustre  de  15  lu- 
mières. 


C'est  dans  ce  local  que  siégea  le  G.'.  0.*.  jusqu'en 
février  1793,  date  à  laquelle  le  duc  d'Orléans  ayant 
donné  sa  démission  de  G.*.  M.*.,  l'Ordre  entra  en  som- 
meil pour  ne  se  réveiller  qu'en  1795.  Le  f.\  Alexandre- 
Louis  Roettiers  de  Montaleau  emporta  les  archives  et 
tint  quelques  réunions  clandestines  chez  lui,  23,  rue 
de  Bondy.  Emprisonné  pendant  la  Terreur,  il  vit  périr 
sur  Téchafaud  deux  de  ses  parents  ;  plus  heureux 
qu'eux,  il  fut  délivré  par  le  9  Thermidor. 

Peu  à  peu,  le  G.*.  0.*.  se  reconstitua,  et,  en  1801,  il 


270  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

tint  ses  assemblées  dans  l'ancienne  maison  des  Dames 
de  la  Miséricorde,  rue  du  Vieux-Colombier,  n°  450 
(n°  8  en  1806),  en  face  de  la  rue  du  Gindre  (partie  de  la 
rue  Madame)  (1).  C'est  le  24  décembre  1802  seule- 
ment que  fut  inauguré  officiellement  le  nouveau 
local. 

Ce  jour-là,  le  parvis  du  Temple  était  occupé  par 
un  nombre  de  frères  d'autant  plus  grand  qu'on  célébrait 
la  fête  de  l'Ordre.  Les  colonnes  (bancs)  étaient  com- 
plètement garnies.  Le  G.*.  Vén.\  Roettiers  de  Monta- 
leau,  qui  remplaçait  le  G.*.  M.',  dont  les  fonctions 
avaient  été  supprimées,  après  avoir  fait  procéder  à 
l'appel  des  Vén.\  des  LL.*.  établies  à  l'0.\  de  Paris, 
suivant  l'ancienneté  de  leurs  constitutions,  se  mit  à  leur 
tête,  accompagné  des  Officiers  du  G.*.  0.*.  et  des  Dépu- 
tés, et  se  rendit  à  la  porte  du  nouveau  Temple.  Ayant 
frappé  mystérieusement,  il  lui  fut  répondu  par  un  seul 
coup,  à  la  manière  des  profanes.  A  sa  voix,  les  portes 
s'ouvrirent  et  il  se  rendit  à  la  place  qui  lui  était  réservée 
sur  l'estrade.  Tous  les  postes  étant  occupés,  on  éleva 
les  pavillons  de  l'Ordre,  et  la  cérémonie  débuta  par 
une  invocation  au  G.*.  A.*. de  l'Univers.  Le  G.'.  Vén.\ 
purifia  l'eau  et  tira  dune  pierre  à  fusil  le  feu  nouveau 
dont  il  éclaira  le  Temple.  Une  «  harmonie  éclatante  » 
emplit  le  parvis  et  «  suspendit  tout  sentiment  »  dans  le 
cœur  des  frères.  Une  «  mélodie  majestueuse  et  tendre 
d'un  cantique  »  chanté  par  des  frères,  sur  les  paroles  du 
f.\  Bizancourt  avec  musique  du  f.\  Bertin  de  l'Opéra 
ayant  imprégné  toutes  les  âmes,  on  procéda  à  la  puri- 


(1)  En  1836,1a  maison  située  en  face  de  la  rue  du  Gindre  portait 
les  n°s  10  et  12.  Le  n°  8  était  à  moitié  distance  entre  la  rue  du 
Gindre  et  la  rue  du  Pot-de-fer.  Tout  ce  quartier  a  été  bouleversé 
lors  du  percement  delà  rue  de  Rennes.  En  1789,  l'immeuble  portait 
le  n°  61. 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  F.'. -M.*.      271 

fication  par  le  feu.  Le  G.'.  Vén.\  invoqua  la  protection 
et  les  bénédictions  du  G.*.  A.*,  de  l'Un.*.  Des  couplets 
du  f.\  Beaumont  mis  en  musique  parle  f.\  La  Forêt, 
artiste  de  l'Opéra,  furent  chantés  ;  lef.\  Pajotd'Orville 
le  jeune,  orateur  de  la  chambre  symbolique,  prit  la 
parole,  racontant  ce  que  les  ff.\  avaient  souffert  pen- 
dant la  Terreur,  célébrant  «  la  fermeture  du  Temple  de 
Janus  et  l'aimable  paix  redescendue  sur  la  terre  grâce 
aux  prodiges  opérés  par  un  héros  aussi  sage  dans  les 
conseils  que  vaillant  dans  les  combats  »,  dont  l'Europe 
étonnée  ne  savait  «  ce  qu'elle  devait  le  plus  admirer 
en  lui,  du  guerrier  ou  du  pacificateur  ». 

Au  G.'.  Orateur  succéda  le  f. \  Angebault,  1er  Grand 
Surveillant,  qui  présenta  l'examen  des  opinions  établies 
sur  la  maçonnerie;  il  fit  l'historique  de  l'Ordre;  «  le  fruit 
de  ses  recherches  profondes  fut  un  puits  lumi- 
neux »  où  les  maçons  devaient  trouver  d'utiles  et 
salutaires  instructions.  Le  f.*.  Angebault  n'hésita  pas 
à  faire  remonter  les  origines  de  l'Ordre  aux  premiers 
âges  du  monde.  D'après  lui,  les  montagnes  de  Caf 
dans  le  Caucase  semblent  avoir  été  ses  premiers 
berceaux.  Surkage,  prince  des  géants,  ayant  défendu 
de  molester  les  enfants  de  Selth,  ce  dernier  lui  donna 
sur  sa  demande  Rucail  son  frère,  versé  dans  toutes  les 
sciences,  pour  Véclairer  et  gouverner  ses  Etats.  Cainma- 
rath,  qui  vivait  dans  la  même  région,  ayant  remis  son 
empire  à  son  fils,  celui-ci  fut  assassiné  par  les  géants  ; 
Cainmarath  remonta  sur  le  trône  pour  le  venger  et 
retrouver  son  corps.  Après  avoir  raconté  l'histoire  de 
Salomon  ou  Salimon,  des  Chinois,  des  Indous,  des 
Chaldéens,  des  Perses,  des  Egyptiens,  de  Zoroastre, 
du  Soleil,  d'Adonis,  de  Mercure,  de  Toth,  de  Moïse 
et  de  Tibère,  etc.,  sans  vouloir  se  prononcer  entre 
Wittemberg,  Genève  et  Rome,  Luther,    Calvin   et  la 


272  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Papauté,  l'orateur  vantait  la  grandeur  passée  de  la 
maçonnerie  et  annonçait  son  triomphe  futur. 

Le  G.'.  0.*.  ne  devait  pas  faire  un  long  séjour  rue  du 
Vieux-Colombier.  En  1806,  il  abandonna  son  local,  qui 
fut  occupé  par  de  nombreuses  loges  sous  l'Empire,  et 
s'installa  47,  ru9  du  Four-Saint-Germain  (297  section- 
naire,  43  actuel),  en  face  de  la  rue  de  l'Egout,  supprimée 
par  le  percement  de  la  rue  de  Rennes. 

Le  G-*.  0.*.  tint  ses  assises  dans  ce  local  jusque  sous 
le  second  empire  ;  c'est  à  cette  époque  qu'il  s'installa 
16,  rue  Cadet,  où  il  siège  encore. 


Leslocauxdes  loges  parisiennes  ont  une  histoire  moins 
pompeuse  et  moins  précise  que  celle  des  locaux  du  G.*. 
0.  '. ,  tout  au  moins  pour  la  période  qui  précède  l'empire. 

La  première  loge  parisienne,  Saint-Thomas  au  Louis 
d'Argent,  s'installa  chez  Landelle,  rue  de  Buci  ;  elle 
quitta  ce  local  en  1732  pour  tenir  ses  séances  chez  de 
Bure,  à  la  ville  de  Tonnerre,  rue  des  Boucheries-Saint- 
Germain.  Elle  fut  remplacée  rue  de  Buci  par  la  loge 
du  duc  d'Aumont.  En  1737,  les  f.\-m.\  tiennent  leurs 
agapes,  sinon  leurs  séances,  chez  Chapelot,  à  l'enseigne 
de  Saint-Bonnet,  à  la  Râpée  ;  en  1738  et  1745,  chez 
Leroy,  traiteur,  hôtel  de  Soissons,  rue  des  Deux-Ecus. 
En  1747,  le  chevalier  de  Beauchaine  brocante  les  hauts 
grades,  au  Soleil  d'or,  rue  Saint- Victor.  En  1773,  le 
duc  de  Chartres  tint  ses  assises  à  son  château  de 
Mousseau  et  dans  une  loge  particulière  qu'il  avait  fait 
installer  cour  des  Fontaines  (place  de  Valois  actuelle). 
Sous  la  Révolution,  l'immeuble  portait  le  n°  1114. 
Il  fut  occupé  en  1804  par  le  Temple  des  Muses  et  en 
1806  par  le  Cercle  oriental  des  Philadelphes. 


LES    PETITS   SECRETS   DE   LA    F.\-M.\     .  273 

En  177,"),  la  loge  de  Saint-François  du  Parlait  Con- 
tentement, qui  avait  pris  la  direction  des  frères  bannis 
du  G.*.  0.*.,  se  réunissait  chez  son  vénérable  Jean-Fer- 
dinand Diavant,  traiteur  rue  d'Argenteuil.  La  même 
année,  la  Candeur  avait  une  tenue  de  réception  suivie 
d'une  grande  Tète  au  Vaux  Hall  de  la  rue  de  Bondy, 
chez  l'artificier  Torré. 

En  1776,  la  loge  des  Neuf  Sœurs  se  réunissait  rue  du 
Pot-de-fer  et  sa  loge  d'adoption  à  Auteuil. 

En  1778,  les  Chevaliers  et  Nymphes  de  la  Rose, 
société  pseudo-maçonnique,  tenait  ses  séances  à  la 
Folie  Titon,  rue  de  Montreuil,  que  devait  occuper 
quelques  années  plus  tard  le  marchand  de  papiers 
peints  Réveillon. 

La  loge  du  Contrat  social  avait  acheté  le  19  juin  1779 
l'hôtel  Bullion,  ancien  hôtel  de  la  Grande  Chancellerie 
de  France,  10,  rue  Coq-Héron  (rue  Jean-Jacques-Rous- 
seau). Elle  en  posait  la  première  pierre  le  24  décembre 
suivant,  sous  la  présidence  du  G.\  M.*,  marquis  de  la 
Rochefoucauld-Bayer,  assisté  de  Troubat  de  la  Salle, 
de  Lafîsse  et  de  Leutre.  Cet  hôtel  devait  être  pillé 
en  1789.  Sous  le  nom  de  Saint-Alexandre,  cette  loge 
reviendra  dans  son  ancien  local  en  1815. 

En  1781  les  Amis  Réunis  s'assemblaient  7,  rue 
Royale-Montmartre  (rue  Pigalle)  ;  mais  leurs  chapi- 
tres étaient  convoqués  3,  rue  de  la  Sourdière.  Les 
Cœurs  Simples  de  l'Etoile  polaire  s'étaient  installés  en 
1783  rue  du  Fouarre. 

La  loge  parisienne  de  la  Stricte  Observance,  la  Bien- 
faisance, avait  loué  en  1787  l'Hôtel  de  Brégy,  21,  rue 
des  Mauvais-Garçons.  La  même  année,- les  Ami*:  des 
Noirs  tenaient  leurs  séances  à  l'hôtel  de  Lussan,  10, 
rue  Croix-des-Petits -Champs  ;  la  loge  «  l'Amitié  », 
34,  rue  des  Petites-Ecuries,    aux  Jardins  de  l'Amitié, 

LA    FRANC-MACONNERIE.    —    T.    I.  18 


274  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

à  côté  du  cabinet  d'histoire  naturelle  du  Sr  Aubert  ; 
le  club  ou  société  des  Colons,  171,  Palais-Royal;  la 
Société  Olympique,  65,  dans  le  même  Palais,  et  la 
Société  des  Etrangers  (Réunion  des  Etrangers),  11, 
rue  Plâtrière.  En  1808,  la  loge  Saint-Alexandre  devait 
occuper  quelque  temps  ce  dernier  local. 

Le  10  mars  1797,  le  Centre  des  amis  s'installe  dans 
son  nouveau  temple,  450,  rue  du  Vieux-Colombier  (n°8, 
en  1806)  où  devait  s'installer  peu  après  la  Vraie  Réu- 
nion (1800-1814).  Le  G.'.  O.*.,  qui  en  fit  son  local  en 
1802,  donna  asile  ou  eut  pour  successeurs  dans  cet 
immeuble  :  la  Parfaite  Réunion  (1802);  l'Amitié  et 
les  Amis  Eprouvés  (1804)  ;  l'Olympique  de  la  Parfaite 
Estime,  la  Colombe,  la  Paix  Immortelle,  Saint-Alphonse 
des  Amis  Parfaits  de  la  vertu,  Saint-Eugène  et  l'Union, 
ci-devant  Saint-Louis  (1806)  ;  l'Impériale  des  Francs 
Chevaliers  et  Caroline  (1808). 

A  l'hôtel  d'Aligre,  rue  d'Orléans-Saint-Honoré,  sié- 
gèrent conjointement  :  l'Espérance  (1802)  ;  l'Epi  d'Or 
(1804)  ;  les  Amis  de  la  Sagesse  (1805)  ;  l'Avenir  Fran- 
çais et  les  Sincères  (Amis  1806). 

Les  Elèves  de  Minerve  s'installèrent  luxueusement  7, 
rue  Paradis,  en  1803  (n°  4  en  1806).  Le  Point  Par- 
fait et  la  Bonne  Union  venaient  les  rejoindre  en 
1806. 

En  1804,  les  loges  écossaises  s'assemblaient  dans  un 
souterrain,  chez  Mauduit,  traiteur,  boulevard  Poisson- 
nière; 1  Océan,  25,  rue  du  Mail. 

Un  des  locaux  les  plus  fréquentés  à  partir  de  1805 
était  la  galerie  de  Pompéi,  38,  rue  Neuve-des-Petits- 
Champs  (23  actuel).  C'est  Saint-Alexandre  qui  semble 
l'avoir  inauguré  en  1804  ;  viennent  ensuite  :  les  Amis 
de  la  vertu  (1805)  ;  Anacréon,  Sainte-Caroline,  Saint- 
Jean  d'Ecosse  de  la  Parfaite  Union, Sainte-Joséphine  et 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  1  .  \-.M.\       275 

Saint-Napoléon  (1806)  ;  les  Frères  Amis,  le  Phœnix  et 
Royal  Arch  (1808)  ;  le  Grand  Sphinx  (1810). 

Le  Châtelet,  1  ter,  place  et  maison  du  Chàtelet,  don- 
nait asile  en  1806  aux  Amis  de  la  Paix,  aux  Chevaliers 
de  la  Croix,  à  la  Clémente  Amitié,  à  Mercure  et  Thémis,  à 
Saint-Antoine  du  Parfait  Contentement,  à  Saint  Claude 
de  la  Paix  sincère,  à  Saint-Jean  du  Bon  Accord,  à  Saint  - 
Jean  de  Palestine,  à  Saint-Louis  de  la  Martinique  des 
Frères  Réunis,  à  Saint-Pierre  des  Amis  Réunis  et  à 
Sainte-Thérèse  des  Amis  de  la  Constance  ;  en  1810,  aux 
Amis  Triomphants. 

En  1808,  le  Centre  des  Amis  se  réunissait  dans  le  local 
du  G.*.  O.'.  47,  rue  du  Four-Saint-Germain.  Il  est  plus 
que  probable  qu'un  grand  nombre  de  loges  fréquen- 
taient également  ce  local. 

Au  219  bis  de  la  rue  Saint-Honoré,  en  face  de  la  rue 
du  Lycée  (rue  de  Valois \  un  local  spécial  servait  en 
1809  aux  Admirateurs  de  l'Univers  et,  en  1810,  au 
Point  Parfait. 

Enfin,  en  1815,  la  loge  Sainte-Caroline  avait  ouvert 
un  nouveau  local,  10,  rued'Antin. 

LES   FAUX   NOMS   DES   LOGES 

Après  avoir  vu  où  se  tenaient  les  assemblées  maçon- 
niques, voyons  comment  on  dissimulait  les  noms  des 
loges. 

Le  procédé  est  plus  qu'enfantin.  Il  ne  fut  du  reste 
guère  employé  qu'à  partir  de  la  formation  du  Grand 
Orient,  qui  donna  l'exemple  en  s'appelant  le  Grand 
Netori.  La  plupart  des  loges  l'imitèrent  en  se  faisant 
adresser  leur  correspondance  sous  le  couvert  de  l'ana- 
gramme de  leurs  noms. 

La  Candeur  fait  adresser  ses  lettres    à  M.  du  Nacre  ; 


276  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

les  Amis  Réunis  à  M.  Misa  du  Renis  ;  les  Amis  Incorrup- 
tibles à  M.  Sima  Selbet  purrocni  ;  les  Amis  Eprouvés  à 
M.  Moïse  Vuparès  ;  le  Grand  Sphinx  à  M.  Legrand 
d'Esphingloux  (la  loge  du  Grand  Sphinx)  ;  Saint- 
Claude  de  la  Paix  sincère  à  M.  Salinçaix  père,  etc. 

Les  loges  de  provinces  imitent  l'exemple  donné  par 
les  loges  de  la  capitale. 

L'Age  d'or  d'Agen  fait  écrire  à  M.  Garode  ;  la  Par- 
faite Sincérité  d'Amiens,  à  M.  Feratipeterniceis;  l'Amé- 
nité d'Angoulême  à  Mme  Maétine  ;  Napoléon  Le  Grand 
de  la  même  ville,  à  M.  Noël  Opan  ;  la  Paix  et  Union 
de  Nantes,  à  M.  Pontuxi  aîné  ;  les  Vrais  Frères  unis  de 
Tonnay-Charente,  à  MM.  Sivranius  frères  ;  les  Amis  de 
l'ordre  et  de  l'Union  de  Villefranche  (Aveyron),  à 
MM.  Roder  et  Unoni,  etc..  (1). 

J'en  passe  et  des  meilleurs. 

Le  procédé  est  tellement...  naïf  qu'il  en  est  presque 
touchant. 


LES    HIEROGLYPHES 

Pour  chiffrer  leurs  lettres,  le  procédé  n'est  guère  plus 
savant. 

La  cryptographie  est  un  art  difficile,  et  il  est 
presque  impossible  d'inventer  un  chiffre  qu'on  ne 
puisse  mettre  au  clair.  Néanmoins,  il  y  a  des  procédés 
qui  rendent  le  déchiffrage  long,  pénible,  et  qui  deman- 
dent des  connaissances  techniques  spéciales. 

Or,  tout  procédé  qui  consiste  à  remplacer  la  même 
lettre  toujours  par  le  même  signe,  permet  à  un  écolier 


(1)  Voir  la  liste    de  ces    anagrammes  dans  la  Franc-Maçonnerie 
démasquée  de  1906,  où  se  trouve  un  curieux  article  de  M-  Soulacroix. 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  IV.-M.\       277 

cryptographe  de  déchiffrer  le  texte  caché  presque  à  livre 
ouvert  en  quelques  minutes.  Bien  que  les  tables  de 
Vigener,  les  chiffres  à  grille  ou  à  dictionnaires  aient 
été  connus  au  XVIIIe  siècle,  ce  fut  cependant,  sauf  une 
exception,  le  procédé  d'écolier  qu'employèrent  les 
F.\  M.-. 

Nous  donnons  aux  appendices  les  séries  d'hiéro- 
glyphes maçonniques  que  nous  avons  pu  connaître, 
car  ils  peuvent  servir  à  toute  personne  possédant  des 
brevets  à  découvrir  la  signification  des  phrases  qui 
veulent  être  secrètes. 


LÈRE    MAÇONNIQUE. 

Les  dates  maçonniques  ne  sont  pas  plus  mystérieu- 
ses que  les  hiéroglyphes  de  leurs  correspondances. 

Les  maçons  les  plus  sages,  il  faut  le  reconnaître, 
sont  les  maçons  anglais,  qui  se  servent  tout  simple- 
ment de  l'ère  chrétienne  grégorienne. 

En  général,  les  Français  se  bornent  à  ajouter  4.000  ans 
à  l'ère  chrétienne,  à  commencer  l'année  le  1er  mars  et  à 
dénommer  les  mois  de  un  à  douze,  le  mois  de  mars  por- 
tant le  numéro  un  et  le  mois  de  février  le  numéro  douze . 

Le  suprême  Conseil  du  33e  de  Charlestown,  celui 
de  Dublin  et  l'ordre  de  Misraïm  ajoutent  4004  ans 
(annus  lucis). 

Le  rite  écossais  ancien  accepté,  sous  prétexte  de  dater 
de  l'ère  de  la  restauration  des  Stuarts  (?),  se  sert  de 
l'ère  judaïque,  et  ajoute  à  l'ère  chrétienne  3.760  ans 
(annus  mundi) . 

Le  rite  de  Royal-Arch  ajoute  530  ans  à  1ère  chré- 
tienne (annus  inventionis). 

Les  Templiers  ajoutent  tantôt  1.000  ans  (annus  dis- 
positionis),  tantôt  1.118  ans  (annus  ordinis). 


278  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Le  rite   écossais  change  fréquemment  les  noms  des 
mois  et  emploie  les  dénominations  judaïques  : 
Mars,  Nissan. 
Avril,  Jiar. 
Mai,  Si  van. 
Juin,  Tamouz. 
Juillet,  Ab. 
Août,  Elul. 
Septembre,  Tisri. 
Octobre,  Hesvan. 
Novembre,  Kislev. 
Décembre,  Tebeth. 
Janvier,  Schebat. 
Février,  Adar. 

LES  MOTS  SECRETS 

Les  mots  constituent  un  mystère  plus  sérieux  ;  il 
est  certain  que,  sans  indiscrétion,  il  est  impossible  de 
les  deviner  et  ils  peuvent  être  des  moyens  certains  de 
se  reconnaître  entre  initiés.  Comme  on  peut  et  comme 
on  doit  les  dire  à  voix  basse,  ils  sont  plus  sûrs  que 
les  signes  et  les  attouchements,  qu'un  œil  indiscret  peut 
voir,  retenir  et  reproduire. 

Il  y  a  deux  sortes  de  mots  maçonniques  :  les  mots 
solsticiaux  ou  mots  de  semestre,  qu'on  change  deux 
fois  par  an,  en  juin  et  en  décembre,  et  les  mots  pro- 
pres à  chaque  grade,  qui  restent  les  mêmes,  sauf  modi- 
fications des  rituels. 

On  peut  arriver  à  connaître  lespremiers,  et  une  étude, 
même  peu  approfondie,  de  la  maçonnerie  permet  de 
connaître  les  seconds. 

En  principe,  les  mots  de  reconnaissance  étaient 
toujours   les    mêmes  ;  c'étaient    ceux    de    l'apprenti  : 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  F.\-M.\ 


279 


Jakin  et  Booz;  mais  bientôt  ces  mots  furent  divulgués. 
C'est  pour  éloigner  les  faux  frères  que,  lors  de  l'instal- 
lation du  duc  de  Chartres  en  qualité  de  G.\  M.*.,  le 
28  octobre  1773,  on  inventa  le  mot  de  semestre.  Ce 
mot  fut  donné  par  le  grand  administrateur  général,  le 
duc  de  Luxembourg.  Pour  le  transmettre  aux  loges  de 
province,  on  avait  fait  faire  des  feuilles  imprimées 
portant  sur  la  partie  extérieure  la  mention  suivante  : 
«  Ce  billet  ne  peut  être  ouvert  qu'en  loge  par  le  T.*.  C.\ 
F.\  Vén.\  ou,  en  son  absence,  par  l'officier  qui  prési- 
dera ».  Le  billet,  plié  et  clos,  était  mis  sous  enveloppe 
à  l'adresse  des  loges.  Le  mot  du  24  juin  1778  est  : 
Aimons-nous  (1).  Le  billet,  après  communication  aux 
frères,  était  brûlé  en  loge  par  le  Vénérable. 

Quant    aux    mots    correspondants    aux   grades,  ils 
étaient  les  suivants  avant  la  Révolution  : 


Mots  secrets 

Mots  de  passe 

Apprenti 

Jakin 

Tubalcain 

Compagnon 

Booz 

Schibboleth 

Maître 

Mac  Benac 

Giblin 

Maître  parfait 

Jehovah 

Cabal 

Maître  parfait  par  curiosité 
Puissant  Irlandais ,  juge  des 

Jehovah 

Zerbal 

ouvriers 

Tito 

Xingel 

Petit  Elu  des  neuf  ou  chev. 

de  l'inconnu 

Nékum 

Stokin 

G.  maître  élu  des  quinze 

Zeomot 

Eleham 

Maître  anglais 

Jakinaï 

Jehova 

Dans  les  loges  Ecossaises  jacobites 


Apprenti 

Compagnon 

Maître 

G.  Ecossais  de  Clermont 

Arche  maître 

Royal  Arch 


Jakin,  Acacia 
Jakin,  Stokin 
Gomes,  Gabaon 
Jakin,  Jehova 
Jehova,  Adonaï 
Bétel 


Tubalcain 
Mac  Benac 
Giblin 

Gabaon,  Giblin 
Alléluia 
Ego  sum 


(1)  Bibl.  Arsenal,  Ms.  10247. 


280 


LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


G    Ecossais  du  Levant  ou 

Souverain  Pontife 
Partait  Elu  du  G.  Ecoss. 
de  Jacques  VI,  roi  de  la 
Grande-Bretagne 
Chevaliers  de  FÉpée 
Chevaliers  de  l'Orient 
Rose-Croix,  Chevaliers  de 

„  l'Ais!e 

Chevaliers  de  Palestine  ou 
de  la  Triple  Croix 

Souverain  du  Temple 

Prince  de  Jérusalem 

Chevaliers  Ecossais 

Noachides,  chevaliers  prus- 
siens 

Chevalier  du  Soleil 


Ad 


onai 


Adonaï 

\ 

Juda,  Benjamin 
Rafodom 

I.n.r.i 


Good 
(  Gahaleon 
}  Mohabin 
(  Macmaharabahac 

Libertas 

Javerum,  Hamaim 

Emmanuel 


Dieu  le  veut 
Jakin,  Jérusalem 
Adar 
Pharax 

Sem,Cham,Japhet  )  ° 

Adonaï  Stibium 


Le  voyage  de  Dieu 
Mac  Benac,  Hiram 
Thébet 
Kadosch 


Il  est  certain  qu'en  présence  d'un  pareil  déluge  de 
mots  fantastiques,  le  nouvel  initié  croyait  à  des  secrets 
extraordinaires  et  que,  pour  avoir  la  clef,  il  fallait  arriver 
aux  grades  les  plus  élevés  ;  il  n'avait  que  la  première 
lettre  du  logogriphe,  à  lui  de  trouver  la  dernière.  Dans 
chaque  régime, des  frères  se  mettent  à  l'œuvre,  cherchent 
la  signification  symbolique  de  tous  ces  mots,  les  ratta- 
chant aux  légendes  d'Adam  premier  maçon,  de  Noé,  de 
Salomon,  d'Hiram,  de  Labance,  des  Croisades,  des 
Templiers,  de  Charles  Ier  Stuart.  Autant  de  régimes,  au- 
tant de  mots,  d'orthographes,  de  sens  et  de  légendes.  Et 
tout  cela,  pour  en  revenir  à  la  légende  primitive,  la  re- 
construction symbolique  du  temple  de  Jérusalem  sup- 
posé merveilleux,  dissimulant  l'étude  de  l'homme  dans 
le  passé,  le  présent  et  le  futur.  Dans  tous  ces  mythes,  il  y 
a  constamment  un  homme  assassiné,  dont  il  faut  venger 
la  mort  ;  assassinat  symbolique  de  Hiram,  architecte 
du  temple  imaginaire,  vengeance  réelle  contre  ceux  qui 
s'opposent  au  développement  pratique  du  travail  du 
Grand  Œuvre  maçonnique. 

Ces  logogriphes  ont  tellement  peu  un  sens  réel  et 
positif  qu'en  18131e  f.\  de  l'Aulnaye  publia  un  Tui- 


LES    PETITS    SECRETS    DE    LA    F. 


M, 


281 


leur  des  23  degrés  de  l'Ecossisme,  dans  lequel  les  mots 
sacrés  aussi  bien  que  les  mots  de  passe  sont  très  difïe- 
rents  de  ceux  qu'on  voit  figurer  dans  les  rituels  anté- 
rieurs et  que  nous  avons  reproduits  plus  haut. 
Voici  les  nouveaux  mots  : 


Apprenti 

Compagnon 

Maître 

Maître  secret 

Maître  parfait 

Secrétaire  intime 

Prévôt  et  juge 

Intendant  des  bâtiments 

Maître  élu  des  neuf 

Maître  élu  des  quinze 

Elu  secret 

Sublime  chevalier  élu 

Grand  maître  architecte 

Royal  Arch 

Grand  Ecossais  de  la  voûte 
sacrée 

Chevalier  d'Orient  ou  de 
l'Epée 

Prince  de  Jérusalem 

Chevalier  d'Orient  et  d'Oc- 
cident 

Rose- Croix  d'Herodom 

Grand  Pontife  ou  Sublime 
Ecossais 

Vénérable  grand  maître 

Noachite  ou  chevalier  prus- 
sien 

Chevalier  Royal  Hache  ou 
Prince  du  Liban 

Chef  du  Tabernacle 

Prince  du  Tabernacle 

Chev.  du  Serpent  d'airain 

Ecossais  Trinitaire  ou 
Prince  de  la  Merci 

G.  Com.  du  Temple 

Chev.  du  Soleil 

G.  Ecossais  de  St-André 

Chev.  Kadosch  ou  chev.  de 
l'Aigle  blanc  et  noir 

G.  Inspecteur  Inquisiteur 
commandeur 


Mots  sacrés 

Mots  de  passe 

Rooz 

Tubalcain 

Jakin 

Schibboleth 

Moabon 

Tubalcain 

Iod 

Zizon 

Jehovah 

Acacia 

Ivah 

Johaber 

Jakinaï 

Tito 

Jakinaï 

Juda 

.Neckam 

Nikar 

Zerbai 

Helcham 

Neckam 

Neckam 

Adonaï 

Stolckin 

Adonaï 

Rabacim 

Jehovah 

Ego  sum 

Jehovah 

Macmaha 

îRaphadon                 ' 

Ya    j'aurum     ha- 
meim 

Adar 

Thebet 

Abaddon 

Jabulum 

Salathiel 

Emmanuel 

Alléluia 

Emmanuel 

Ragabassi 

Jeksonne 

Sem,Cham,  Japhet 

Phaleg 

Noe 

Japhet 

Jehovah 

Ouriel 

Dieu  le  veut 

Le  voyage  de  Dieu 

Moïse 

T                * 

I.n.r.i. 

Jehovah,  Jakin 

Gomel 

J.n.r.i 

Salomon 

Adonaï 

Stibinm 

Nekamah 

Ardarel 

Jabamiah 

Eliel 

Justice 

Phaal  kol 

282  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Sublime   Prince  du  Royal 

Secret  Salix  Phaal  kol 

Souv.  G.  Insp.  Général  Baclim  Endiague 

Par  un  phénomène  très  singulier,  mais  cependant 
très  explicable,  après  s'être  meublé  la  tête  de  tous  ces 
noms  compliqués,  après  s'être  entêtés  dans  des  re- 
cherches extravagantes,  les  cerveaux  des  initiés  Travail- 
leurs se  déformaient  et  ils  en  arrivaient  à  croire  à  la 
réalité  de  leurs  rêves.  Ces  études  conduisaient  à  un 
genre  de  folie  spéciale  :  l'acharnement  dans  l'hébéte- 
ment latomique  qui  conduisait  le  malade  aux  baquets 
de  Mesmer,  à  la  loge  de  Cagliostro,  chez  le  tireur  de 
tarots  Etiella,  ou  à  l'Illuminisme,  après  avoir  passé  par 
les  Chevaliers  bienfaisants,  les  Philalèthes,  ou  le  rite 
écossais  philosophique. 


LES  SIGNATURES 

La  signature  ornée  d'un  signe  maçonnique  n'a 
jamais  été  obligatoire  pour  les  initiés,  ni  dans  leurs  si- 
gnatures courantes,  ni  même  dans  leurs  signatures 
maçonniques.  A  cet  égard,  il  n'y  a  pas  de  règles,  et 
c'est  par  zèle  ou  par  nécessité  que  certains  d'entre  eux, 
environ  la  moitié,  ont  adopté  les  trois  points  symp- 
tomatiques. 

On  peut  donc  affirmer  qu'il  ne  suffit  pas  qu'une 
signature  n'ait  pas  de  signes  maçonniques  pour  que 
l'individu  qui  l'a  faite  ne  soit  pas  f.\-m.\    „ 

Par  contre,  il  faut  reconnaître  que  le  hasard  seul  ou 
la  fantaisie  ne  peuvent  expliquer  l'introduction,  dans 
une  signature,  des  signes  particuliers  que  nous  allons 
énumérer.  On  peut  tout  au  plus  admettre  que,  dans 
des  circonstances  spéciales,  ces  signes  aient  été  employés 


LES    PETITS    SECRETS    DE    LA    F.VM.\ 


28:5 


par  quelques  mystificateurs  ou  quelques  vaniteux  de 
franc-maçonnerie. 

Je  suis  parvenu  à  établir  60.000  fiches,  et  j'estime 
que  j'ai  à  peine  dépassé  la  moitié  du  nombre  des  initiés 
français  pendant  une  période  d'un  siècle  environ.  Or, 
parmi  les  signatures  ornées  des  signes  maçonniques, 
j'ai  pu  établir  que  83  0/0  d'entre  elles  figuraient  sur  mes 
listes.  11  n'est  donc  pas  téméraire  d'admettre  que  si  je 
n'ai  pu  identifier  les  17  0/0  qui  restent,  cela  tient  à 
l'état  incomplet  de  mes  listes. 

Quels  sont  les  signes  distinctifs  les  plus  usités  ? 

1°  Les  3  points  en  ligne  : 


2°  Les  3  points  en  ligne  entre  deux  barres  : 


— -~ ~~~t  ii_i 


284  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN  FRANCE 

3°  Les  deux  barres  :  — 
4°  Les  3  points  en  triangle  : 


«>v*^» 


y<,  .*£"<St  *4& 


Et,  plus  rarement  les  signes  suivants  : 


Le  troisième  et  le  dernier  de  ces  signes  sont  moins 
probants  que  les  cinq  autres  et  on  les  trouve  souvent  à 
la  fin  d'un  document  pour  indiquer  qu'il  est  terminé. 
Le  dernier  accompagne  quelquefois  des  signatures  no- 
toirement profanes,  celle  de  Molière  par  exemple. 

Le  signe  le  plus  ancien  nous  vient  d'Angleterre,  où 
il  était  adopté  avant  1745  :  les  3  points  en  ligne  et, 
quelquefois,  ces  points  entre  deux  barres. 

Le  plus  ancien  diplôme  français  dans  lequel  j'ai 
constaté  l'emploi  des  trois  points  entre  les  deux  barres 
est  du  7  juin  1760.  Ce  sont  les  deux  premières  séries 
et  les  deux  barres  sans  points  qui  sont  presque  exclu- 
sivement adoptées  jusque  vers  1771,  et  jusqu'en  1820, 
elles  sont  encore  les  plus  généralement  employées. 

Vers  1771  apparaissent  les  3  points  en  triangle.  La 
plus  ancienne    signature  que  je  connaisse  sous  cette 


LES    PETITS    SECRETS    DE    LA    F.'.-M.*. 


285 


forme,  est  celle  du  baron  de  Toussainct,  qui,  non  con- 
tent de  mettre  cette  variante  après  son  nom,  le  faisait 
précéder  du  type  n°  2.  Sans  compter  les  autres  fiori- 
tures hiramiques. 


\ïfvt 


La  première  pièce  imprimée  du  Grand  Orient,  con- 
tenant les  3  points  en  triangle,  est  une  circulaire  du 
12  août  1774,  et  l'emploi  de  ces  trois  points  est  exclusi- 
vement réservé  à  indiquer  des  abréviations  dans  l'em- 
ploi des  mots  usuels  :  G.\  0.\  pour  Grand  Orient,  G.\ 
A.,  de  l'U.\  pour  Grand  Architecte  de  l'Univers,  etc. Les 
procès-verbaux  originaux,  jusqu'en  1791,  les  seuls  que 
j'aie  eus  en  mains,  en  font  même  un  usage  très  restreint. 

A  partir  de  1771,  et  surtout  de  1781,  le  type  4  se  subs- 
titue de  plus  en  plus  aux  types  1,  2  et  3,  et,  à  partir  de 
1820,  il  est  le  type  presque  exclusivement  adopté. 

En  dehors  de  ces  types,  une  grande  variété  de  signes 
Bt  d'abréviations  sont,  par  contre,  en  usage,  mais  exclu- 
sivement dans  des  documents  maçonniques. 

Ainsi,  le  duc  de  Luxembourg  fait  toujours  précéder 
sa  signature  du  triangle  lumineux,  au  centre  duquel  il 
place  la  lettre  hébraïque  Yoth. 


W 


^a*  *^* 


cfy& 


7&&6&i<£> 


286        LA  FRANC  MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

D'autres  remplacent   ce  Yoth    soit  par  un  Gamma, 
soit  par  un  G,  soit  par  trois  points. 


&£a~  *- 


^<~£  *ffî 


£<£%  ***(&*£*'.*-&  k%-fà 


Les  signatures  font  aussi  presque  toujours  mention 
des  fonctions  :  V.'.  (vénérable)  ;  G.*.  0.*.  (grand  ora- 
teur) ;  G.*,  des  S.*,  et  Arch.\  (garde  des  sceaux  et  ar- 
chives) ;  F.*.  Terr.\  (frère  terrible);  M.*.  E.\  (maître 
écossais)  ;  S.*.  P.*.  R.'.f  (Souverain  Prince  Rose-Croix); 
K.\  D.*.  S.*.  (Kadosch)  et  pour  les  grades  supérieurs 
32e,  33<. 


Dans  les  diplômes  écossais,  particulièrement,  on 
indique  soigneusement  la  longitude  et  la  latitude  de  la 
loge,  comme  si  l'on  était  en  pleine  mer.  Les  signes 
cabalistiques  et  les  écritures  puérilement  secrètes  sont 
multipliés.  Lorsqu'ils  parlent  de  leurs  très  respectable 
frères,  ils  portent  le  zèle  jusqu'à  écrire  TTT.\  RRR/ 
FFF.\,  dételle  sorte  que  le  signe  perd  complètement  sa 
valeur  abréviative. 

Dans  les  loges  du  rite  d'Hérodom  de  Kilwining,  les 
membres  se  distinguent  par  des  noms  de  convention, 
noms  de  vertus  philosophiques  ou  morales,  en  suppri- 
mant une  partie  des  lettres  du  mot  :  S.  n.  c.  r.  t.  (sin- 


' 


LES  PETITS  SECKETS  DE  LA  F.*. -M 


287 


çérité),  P.  r.  s.  v.  r.  c.  (Persévérance).  Le  grade  su- 
prême Astharta  s'écrit  A.  s.  t.  r.  t.  Dans  la  Stricte 
Observance,  les  membres  se  placent  sous  l'invocation 
d'une  planète,  d'un  objet,  ou  d'une  épithète  élogieuse  ; 
ils  signent  en  latin,  d'abord  leur  prénom,  puis  la-  men- 
tion du  grade  de  chevalier,  puis  le  nom  de  la  planète  ou 
de  l'objet.  Ainsi  :  Ferdinand,  chevalier  de  la  Victoire 
(Ferdinandus  Eques  a  Victoria),  est  le  duc  Ferdinand  de 
Brunswick  ;  Hubertus  Eques  a  Tomba  sacra  est  le 
baron  de  Dalberg  ;  Carolus  Eques  a  Leone  résurgente 
est  le  prince  Charles  de  Hesse. 

Tous  les  brevets  sont  rehaussés  de  larges  rubans  mul- 
ticolores auxquels  sont  attachés  des  sceaux  enfermés 
dans  des  boîtes  en  fer-blanc  et  parfois  en  argent.  Tel 
brevet  en  possède  sept  ;  sur  l'un  d'eux  j'ai  relevé  près 
de  cent  signatures,  et  quelles  signatures  ! 

Les  Templiers  ajoutent,  en  dehors  de  leurs  grades 
interminables,  une  croix  à  deux  branches. 

Les  Amis  Réunis  sont  plus  compliqués;  voyez  Doazan; 


Certains  mettent  cinq,  sept,  neuf  points  et  même 
plus  ;  mais  le  record  de  la  complication  appartient  sans 
contredit  à  Martines  de  Pasqually  : 


jE  cielU^ytines 


288  LA    FRANC-MACONNERIE   EN    FRANCE 

Toutes  ces  fantasmagories  avaient  pour  but  de  satis- 
faire la  vanité  des  initiés  et  d'exciter  la  curiosité  des 
profanes  ;  cela  avait  un  petit  air  mystérieux  et  cabalis- 
tique qui  n'était  fait  pour  déplaire  ni  aux  uns,  ni  à  cer- 
tains autres. 

Mais  pourquoi  les  deux  barres  et  les  points? 

Bien  que  je  n'aie  trouvé  d'explication  officielle  dans 
aucun  ouvrage,  il  me  paraît  que,  sans  être  devin, 
on  peut  facilement  en  trouver  une. 

Les  deux  barres  symbolisent  les  deux  colonnes  du 
Temple  et  les  points  les  nombres  mystérieux  des  grades 
maçonniques. 

Dans  la  religion  d'Hiram,  car  en  somme  la  maçon- 
nerie est  une  religion,  les  nombres  jouent,  en  effet,  un 
rôle  considérable  ;  les  f.\-m.\  leur  attribuent  des 
significations  symboliques  souvent  bizarres. 

Les  trois  premiers  grades,  les  seuls  que  lesf.\-m.\ 
qui  se  disent  sérieux  reconnaissent  :  Apprenti,  Compa- 
gnon et  Maître,  sont  numériquement  représentés  parles 
nombres  3,  5  et  7,  correspondant  aux  nombres  de 
coups  frappés  dans  les  cérémonies  initiatiques  à  ces 
divers  grades.  Dans  les  grades  supérieurs,  ils  ne  par- 
lent pas  de  moins  de  3  fois  3  et  vont  même  jusqu'à 
3  fois  3  répétés  3  fois  3  fois,  ce  qui  fait  81,  le  nombre 
parfait.  J'avoue  que,  dans  mes  recherches,  je  n'ai 
encore  pu  mettre  la  main  sur  la  signature  de  ce  maçon 
idéal. 

LE  LANGAGE  CONVENTIONNEL. 

Les  francs-maçons  français,  dans  leur  langage  et 
dans  leurs  écrits,  emploient  une  phraséologie  spéciale  et 
des  mots  auxquels  ils  donnent  un  sens  différent  de  leur 
sens  habituel.   Bacon  de  la  Chevalerie   fut  l'inventeur 


LES  PETITS  SECRETS  DE  LA  F. '.-M.'.       289 

de    plusieurs  de    ces   termes   particuliers,   les    autres 
furent  consacrés  par  l'usage   et  l'habitude. 

Les  réunions  de  francs-maçons  dans  les  loges 
s'appellent  des  tenues  et  dans  les  G.'.L.*.  ou  au  G. \0.\ 
on  emploie  de  préférence  le  mot  assemblées .  Les  dis- 
cours s'appellent  des  balustres  ;  les  minutes  des  pro- 
cès-verbaux, des  esquisses,  et  les  procès-verbaux,  des 
planches  à  tracer.  Les  oraisons  funèbres  sont  des  co- 
lonnes funèbres. 

Dans  une  loge,  les  tenues  des  grades  symboliques  se 
font  dans  le  Temple  de  l'atelier.  Il  y  a,  en  plus,  les  Cha- 
pitres qui  réunissent  les  membres  qui  possèdent  des 
grades  supérieurs  à  celui  de  maître,  les  Aréopages,  les 
Grands  Tribunaux,  etc. 

A  l'entrée  on  tuile  l'arrivant  pour  reconnaître  s'il 
est  bien  initié  ,  et  le  frère  chargé  de  ces  fonctions 
s'appelle  frère  tuileur.  A  l'intérieur  le  frère  couvreur 
veille  à  la  sécurité  et  au  secret  des  réunions. 

Mais  c'est  spécialement  dans  les  banquets  qu'on 
emploie,  sans  raison  sérieuse,  des  mots  dénaturés  pour 
exprimer  des  choses  vraiment  insignifiantes.  Ainsi  : 


Barrique 

veut  dire 

bouteille 

Canon 

— 

verre 

Cantique 

— 

chanson 

Ciment 

— 

poivre 

Colonne  d'Harmonie 

musiciens 

Drapeau 

— 

serviette 

Etoile 

— 

lumière 

Glaive 

— 

couteau 

Lumière 

.  — 

officier 

Mastiquer 

— 

manger 

Pierre  brute 

— 

pain 

Pioche 

— 

fourchette 

Plateau 

— 

plat 

LA   FRANC-MAÇONNERIE.    — 

T.    I. 

19 

290  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


Poudre  faible            veut  dire 

eau 

—      forte                    — 

vin 

—      fulminante          — 

liqueur 

Sable                                  — 

sel 

Sable  jaune                      — 

poivre 

Tirer  le  canon                 — 

boire 

Truelle                             — 

cuiller 

Tuile                                  — 

assiette 

Voile                                 - 

nappe 

On  pourrait  multiplier  les  exemples  de  ces  paroles 
mystérieuses,  mais  cela  serait  sans  intérêt. 

Il  est  plus  curieux,  par  contre,  de  signaler  les  expres- 
sions maçonniques  auxquelles  la  Révolution  a  fait  une 
fortune. 

Ainsi  les  provinces  maçonniques  étaient  appelées  des 
départements  ;  la  réunion  des  députés  des  loges  et  des 
hauts  dignitaires  s'appelait  puissance  législative  et  corps 
législatif;  les  décisions  étaient  des  décrets. 

Les  grades  maçonniques  étaient  groupés  sous  trois 
couleurs  particulières  :  le  bleu  correspondait  aux  gra- 
des symboliques  ;  le  rouge,  aux  grades  chapitraux  ; 
le  blanc,  aux   grades  philosophiques. 

Enfin  la  devise  maçonnique  :  Liberté,  Egalité,  Fra- 
ternité, devint  la  devise  révolutionnaire. 


CHAPITRE  IX 
PROFILS     MAÇONNIQUES 


La   manie   égalitaire  ;    ses  conséquences.   —  Le  cabaretier  maître 
de  loge.    —  Le    robin.  —   Le   bourgeois.  —  L'homme  à  talent. 

—  L  officier.    —    Le   parlementaire.   —   Le  noble.  —  Puisieux. 

—  Procope.  —  St-Germain.  —  Le  Breton.  —  Bacon  de  la  Che- 
valerie. —  Stroganofr*.  —  Savalète  de  Lange- 


Dans  les  chapitres  précédents  nous  avons  déjà 
donné  les  biographies  d'un  certain  nombre  de  francs- 
maçons  importants  et  mis  en  lumière  les  mentalités  que 
la  pratique  de  l'Art  Royal  avait  développées  chez  eux. 

Charles  Radclyffe,  Charles-Edouard,  le  duc  d'Antin 
et  le  comte  de  Clermont  furent  plutôt  de  grands  pro- 
tecteurs honoraires  que  des  maçons  ardents.  Aucun 
d'eux  ne  semble  avoir  fait  du  travail  de  loge. Par  contre, 
nous  nous  sommes  étendus  longuement  sur  un  certain 
nombre  de  pratiquants,  de  dévots,  de  bigots  et  de  fana- 
tiques de  la  religion  d'Hiram,  tels  que  Ashmole,  Désa- 
guliers,  Ramsay,  Swedenborg,  Martines  de  Pasqually, 
Perneti,  Beauchaine,  Tschoudyet  Willermoz.  La  série 
ne  serait  pas  complète,  les  types  ne  seraient  pas  suffi- 
samment variés,  si  nous  ne  joignions  pas  à  ces  chefs  de 
sectes,  penseurs  plus  ou  moins  profonds,  des  personna- 
lités ayant  surtout  joué  un  rôle  pratique.  Nous  essaye- 
rons donc  de  représenter  tous  les  types  divers  que  la 
franc-maçonnerie  a  pu  produire  ;  le  jovial  Procope  ;  Pui- 
sieux le  doux  fanatique;  Saint-Germain  le  thaumaturge; 


292  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

le  religieux  Le  Breton;  Bacon  delà  Chevalerie,  le  mili- 
taire exalté  ;  l'étranger  Stroganoff;  Savalète  de  Lange, 
le  passionné  de  la  secte  et  du  sexe.  A  côté  de  toutes  ces 
personnalités  qui  ont  laissé  un  nom  et  ont  eu  des  car- 
rières qu'on  a  pu  suivre,  il  y  avait  la  foule  des  maçons 
qui  n'ont  laissé  que  peu  de  traces  personnelles,  mais 
qu'on  peut  facilement  reconstituer,  lorsqu'on  a  par- 
couru de  nombreuses  correspondances  échangées 
entre  initiés  ;  des  types  généraux  surgissent  d'eux- 
mêmes,  sans  qu'aucun  de  ces  types  puisse  s'appliquer 
à  une  personne  déterminée,  types  collectifs  beaucoup 
plus  dangereux  que  les  déformations  individuelles, 
car  leur  responsabilité  est  impersonnelle,  ou  partagée 
avec  trop  de  complices. 

Quel  détraquement  pouvait  produire  l'enseignement 
et  la  pratique  des  idées  égalitaires,  sur  des  personna- 
lités différentes,  appartenant  à  des  milieux  sociaux 
hétérogènes,  plus  habitués  à  s'apercevoir  qu'à  se  fré- 
quenter ?  quelle  influence  pouvaient  avoir  sur  des  cer- 
veaux bourgeois  les  appellations  pompeuses  des  hauts 
grades  maçonniques,  les  emblèmes  et  les  bijoux  don- 
nant l'illusion  de  grands  cordons  et  de  décorations  ? 
quels  terribles  effets  devait  produire  sur  des  cervelles 
de  petits  commerçants  leur  promiscuité  dans  les  ban- 
quets avec  les  grands  seigneurs  et  les  riches  financiers? 
Comment  les  cerveaux  des  uns  et  des  autres  se  défor- 
maient-ils ? 

Dans  les  conditions  où  se  recrutaient  les  membres 
des  loges,  les  idées  maçonniques  devaient  amener  une 
désagrégation  sociale,  provoquée  par  l'envie  haineuse 
des  classes  inférieures,  et  par  la  sensibilité  philoso- 
phique exagérée  des  hautes  classes,  émasculées  par  les 
rêveries  creuses  de  leurs  cerveaux  qui  roulaient  à  vide. 
Le  calme  était  donné  aux    hommes  timorés  par  l'ap- 


PROFILS   MAÇONNIQUES  293 

parence  de  grandeur  de  l'idée  égalitaire;  les  cerveaux 
ardents  étaient  exaltés  par  ces  mêmes  doctrines  ;  les 
âmes  religieuses,  confondant  l'humilité  sociale  avec 
l'humilité  individuelle,  n'apercevaient  que  la  mise  en 
pratique  des  paroles  du  Christ.  Toutes  les  consciences 
pouvaient    donc  être  en  paix. 


Le  cabaretier,  maître  de  loge,  a  fort  peu  souci  de 
l'origine,  de  la  raison  d'être  et  du  but  de  l'Ordre 
auquel  il  est  affilié.  Il  en  connaît  tout  le  culte  exté- 
rieur, et  rien  de  plus  ;  mais  ces  puérilités  pompeuses,  il 
les  connaît  à  fond  ;  il  ne  fait  pas  une  faute  dans  le  serre- 
ment de  main,  ni  dans  la  marche,  ni  dans  les  mots  se- 
crets ;  il  connaît  par  le  menu  les  tentures  que  l'on  doit 
mettre  et  les  costumes  qu'il  faut  porter  dans  chaque 
circonstance.  La  f.'.-m.'.  est  une  annexe  de  son  com- 
merce, un  comptoir  où  l'on  consomme,  où  Ton  paie  vin, 
limonade  et  présence;  elle  lui  apporte  une  clientèle  dont 
il  est  jaloux.  S'il  est  âpre  au  gain,  comme  tout  petit 
commerçant,  il  est  flatté  d'être  appelé  vénérable  maître 
par  le  robin,  l'officier  et  quelquefois  le  noble,  vrai  ou 
faux,  qui  achalandé  son  industrie.  Pour  lui,  la  f.'.-m.', 
est  une  bonne  affaire.  Parfois  il  prend  son  rôle  au 
sérieux  et  estime,  à  force  de  s'entendre  honorer  dans 
ses  fonctions,  qu'il  est  l'égal  de  ceux  qui  fréquentent  sa 
loge.  Le  dogme  maçonnique  agit  sur  lui  à  sa  façon, 
terre  à  terre  ;  néanmoins,  l'empreinte  est  profonde. 
Les  blessures  faites  à  sa  vanité  ou  à  son  envie  ne  se- 
ront pas  oubliées.  Il  se  déclasse  par  en  haut,  prend  des 
vices  au-dessus  de  son  rang  et  au-dessus  de  sa  bourse. 
Que  viennent  les  mauvais  temps,  qu'il  ait  à  se  plaindre, 
avec  ou  sans   raison,  d'un  voisin    qui   aura  refusé  de 


294  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

le  traiter  en  égal  sans  cependant  vouloir  l'humilier, 
la  haine  lui  montera  au  cœur,  et  si  l'occasion  s'en 
présente,    il  le  lui  fera  bien    voir. 


Il  est  une  autre  sorte  de  maçon  plus  dangereuse 
encore,  c'est  le  clerc  de  procureur,  l'huissier,  l'homme 
de  loi  sans  talent  et  sans  clientèle,  qui  en  cherche  une 
dans  les  loges,  persuadé  qu'il  importe  peu  d'avoir  du 
mérite  et  des  connaissances  professionnelles,  mais 
qu'avec  des  relations  on  fait  son  chemin,  qu'on  ne  le  fait 
pas  autrement  ;  il  a  le  caractère  ergoteur  des  gens  de 
chicane,  la  conscience  relative  de  ces  clercs  de  la 
basoche  qui  ont  l'âme  tranquille  lorsqu'ils  ont  respecté 
la  loi  en  la  tournant  habilement.  Pour  eux,  la  légalité 
retorte  remplace  la  vérité  et  la  justice,  mots  creux,  vertus 
dangereuses  à  pratiquer.  Ce  genre  de  maçons  traite 
volontiers  les  frères  comme  il  traiterait  la  partie 
adverse  dans  un  mauvais  procès. 

Sur  lui  aussi  l'égalité  maçonnique  fera  ses  ravages  ; 
elle  augmentera  ses  talents  à  ses  propres  yeux,  et  par 
contre  diminuera  ceux  de  ses  adversaires  ;  à  fréquenter 
d2S  gens  titrés,  il  s'appellera  du  nom  de  la  terre  de 
son  père,  ou  de  celui  de  son  vide-bouteille  *  s'il  n'a  rien 
de  tout  cela,  il  empruntera  le  nom  de  sa  ville  natale. 
S'il  s'introduit  dans  les  hauts-  grades,  affublé  de  tous 
les  oripeaux  d'usage,  paré  de  décorations  plus  brillantes 
que  la  croix  de  Saint-Louis,  enrubanné  de  soieries 
plus  éclatantes  que  les  ordres  du  roi,  traité  de  Souve- 
rain Prince  ou  de  Sublime  Quelque  chose,  il  prendra 
tout  cela  au  sérieux,  titres  et  défroques,  méprisera  son 
voisin,  qui  garde  sa  boutique,  sa  femme  et  son  temps, 
méprisera  bien  plus  encore,   mais  cette   fois   au    nom 


PROFILS    MAÇONNIQUES  295 

de  l'égalité,  celui  qui  passera  à  ses  côlés  comblé  d'hon- 
neurs et  d'ornements  authentiques.  Dans  son  esprit 
faussé  la  haine  régnera  en  souveraine  maîtresse,  car  il 
appliquera  légalité  ainsi  qu'une  décision  judiciaire. 
Ce  n'est  pas  lui  qui  perdra  son  temps  dans  des  re- 
cherches illusoires  sur  l'origine  de  l'homme  et  son  but 
final .  Encore  une  recrue  pour  l'émeute  si  les  temps  s'y 
prêtent.  Celui-là  s'appellera  Maillard,  Joachim  Ceyrat, 
Coflinhal. 


Ou  bien  encore  le  petit  bourgeois,  vivant  en  rentier, 
soit  qu'il  ait  su  se  contenter  d'une  fortune  modeste, 
soit  qu'il  ait  pris  sa  retraite  et  cédé  son  commerce. 
Ne  plus  rien  faire  est  une  étape  vers  la  noblesse.  S'il  ne 
trouve  aucune  fissure  pour  y  pénétrer,  la  fraternité  ma- 
çonnique lui  en  donnera  l'illusion.  Sa  mentalité  lui  fait 
envisager  toutes  choses  comme  une  transaction  com- 
merciale ;  est-ce  que  le  commerce  ne  consiste  pas  à 
acheter  au  meilleur  marché  et  à  vendre  le  plus  cher 
possible?  Défendre  son  argent  et  attaquer  celui  des 
autres,  n'est-ce  pas  le  but  de  l'existence?  Il  achètera  de 
l'égalité  à  bon  compte  dans  les  loges,  nulle  part  il  ne 
trouvera  mieux.  Et  comme  il  a  payé  en  entrant,  qu'il 
débourse  pour  rester,  il  veut  en  avoir  pour  son  argent, 
la  meilleure  part.  Désœuvré,  il  cherchera  les  fonctions 
d'officier  de  loge  pour  tenir  une  place  d'honneur 
dans  cette  société  d'égaux.  Il  fraternisera  dans  les 
banquets  avec  ses  anciens  clients  et  en  prendra  les 
allures.  Le  soir  en  rentrant,  il  resservira  à  sa  femme 
stupéfaite,  mais  émerveillée,  toutes  les  bribes  de  fausse 
science  qu'il  aura  broutées  dans  les  parterres  de  la  ma- 
çonnerie ;  il  lui  dévoilera,  par  faveur  spéciale,  deslam- 


296  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

beaux  de  la  légende  d'Hiram,et  dans  son  demi-sommeil 
il  parlera  de  projets  de  vengeance  ;  dans  ses  rêves  il 
accomplira  des  actes  héroïques  pour  défendre  une  so- 
ciété où  on  lui  apprend  de  si  belles  histoires.il  discutera 
toutes  choses  avec  des  phrases  toutes  faites,  apprises  à 
force  de  les  entendre  répéter.  Philosophe,  politique, 
homme  de  guerre,  il  sera  tout  cela  et  trouvera  qu'il  était 
né  pour  toutes  ces  choses;  il  parlera  d'égalité  à  tout 
venant,  et  si  on  le  critique,  ou  même  si  l'on  ne  le  com- 
prend pas,  au  nom  de  cette  même  égalité,  il  pensera 
que  contradicteurs  ou  indifférents  sont  des  êtres  infé- 
rieurs et  stupides.  La  maçonnerie  aura  encore  déformé 
ce  malheureux,  né  brave  homme,  et  dont  la  destinée 
n'aurait  pas  dû  le  porter  plus  haut  que  son  bonnet  de 
nuit,  ni  le  descendre  plus  bas  que  les  cancans  de  son 
arrière-boutique.  Heureux  encore  si  une  nature  parti- 
culièrement prudente  lui  fait  craindre  les  coups  qu'on 
peut  éviter  ;  il  n'ira  pas  se  compromettre  dans  une 
journée  révolutionnaire  ;  mais  il  y  assistera  des  fenê- 
tres de  l'Hôtel  de  Ville,  dont  il  sera  électeur  ;  il  s'ap- 
pellera Veytard,  Buffaut,  Varangue.  Certes,  il  ne  tuera 
ni  Berthier  ni  Foulon,  mais  il  trouvera  que  ces  gens-là 
ont  eu  grand  tort  de  s'attirer  la  haine  des  habitués  de 
la  place  de  Grève  et  du  Palais-Royal,  et  qu'il  vaut 
mieux  les  abandonner  à  l'émeute  que  de  risquer  d'en 
être  soi-même  la  victime. 


C'est  encore  l'homme  à  talent,  heureux  malgré  tout 
de  frayer  avec  des  militaires  et  des  hommes  bien  nés  ; 
le  temps  qu'il  perdra  dans  les  loges  ne  lui  rapportera 
que  des  flatteries  pour  son  amour-propre  ;  mais  il  y 
sera    sensible  ;    intelligent,   si   en    plus    il  est    malin, 


PROFILS    MAÇONNIQUKS  297 

il  saura  faire  mousser  ses  qualités,  trouver  une  clien- 
tèle parmi  les  frères.  Peut-être  ne  se  lancera-t-il  pas 
dans  les  hautes  spéculations  métaphysiques  ;  mais 
comme  tous  ces  gargarismes  philosophiques  et  hu- 
manitaires sont  de  mode  dans  les  loges,  il  prendra 
le  vernis  d'une  science  qui  n'est  pas  la  sienne,  et  son 
amour-propre  y  trouvera  encore  son  compte.  Comme 
tous  les  gens  qui  ne  connaissent  que  la  surface  d'une 
science  ou  d'un  art,  il  s'y  croira  maître.  S'il  est  obligé 
de  s'avouer  qu'en  pareille  matière  il  n'est  pas  créa- 
teur, il  se  croira  bon  juge.  Son  intelligence  générale 
et  son  talent  particulier  y  perdront  quelque  chose,  et 
il  sera  la  victime  de  son  luxe  maçonnique  ;  il  n'osera 
pas,  lorsque  les  mauvais  temps  viendront,  blâmer  ce 
qu'il  a  si  souvent  encensé  ;  les  théories  de  loge  sur 
l'égalité  qu'il  a  répétées  à  tout  propos,  le  désarmeront 
contre  la  poussée  de  l'égalité  venue  d'en  bas. 


Dans  les  parlottes  maçonniques,  le  moins  que  puisse 
y  perdre  l'homme  de  haut  mérite,  c'est  le  temps  qu'il 
aurait  pu  passer  à  produire  ou  à  agir.  Avec  l'habitude 
journalière  de  traiter  sur  le  pied  d'égalité  des  gens 
qui  lui  sont  très  inférieurs,  il  doutera  de  lui-même  ; 
dans  les  échanges  d'idées  auxquels  il  se  laissera  en- 
traîner, il  donnera  plus  qu'il  ne  recevra,  et  ses  ensei- 
gnements seront  toujours  des  présents  inutiles  et  même 
dangereux  ;  en  vulgarisant  de  grandes  pensées,  il  les 
rapetissera,  ne  fût-ce  que  pour  se  faire  comprendre. 

Si,  par  malheur,  il  se  laisse  prendre  au  piège  habile- 
ment préparé  du  travail  de  loge,  il  se  détournera  de 
sa  vocation  pour  suivre  une  voie  nouvelle,  dans  laquelle 
il  sera  un   homme  ordinaire,    en  attendant  d'être   un 


298  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

mécontent,  car  il  se  sera  engagé  dans  un  chemin  sans 
issue,  dans  la  recherche  d'un  problème  sans  donnée 
sérieuse,  sans  équations  possibles  et  sans  solution  dé- 
sirable. 

La  grande  science  expérimentale  et  pratique  de  Con- 
dorcet  se  perdra  dans  des  abstractions.  Bailly  égarera 
son  bagage  scientifique  en  se  laissant  entraîner  par  la 
politique  des  loges  ;  leurs  rôles  seront  pitoyables  et 
leurs  fins  tragiques. 


A  fréquenter  des  gens  d'éducation  médiocre,  le  noble 
apprendra  peut-être  à  son  frère  d'atelier  quelques 
belles  façons,  dont  celui-ci  se  parera  comme  M.  Jour- 
dain de  sa  prose,  mais  de  son  côté  il  y  perdra  de  sa 
distinction  plus  qu'il  en  aura  donné  ;  son  charme  dis- 
paraîtra et  son  prestige,  vu  de  trop  près,  n'y  gagnera 
assurément  pas.  Souvent,  aussi  ridicule  que  le  bour- 
geois ou  le  boutiquier,  lorsqu'il  voudra  faire  de  la 
haute  science  maçonnique,  il  laissera,  sans  s'en  douter, 
glisser  dans  la  rue  l'égalité  qu  il  a  courtoisement  pra- 
tiquée dans  les  loges  ;  sans  compter  qu'à  force  de  la 
proclamer,  il  finira  souvent  par  y  croire.  Après  avoir 
considéré  les  cérémonies  des  loges  comme  une  esca- 
pade passagère,  il  en  fera  le  péristyle  lumineux  con- 
duisant à  la  politique  et  aux  assemblées  de  la  Révo- 
lution. Lorsque  celle-ci  explosera,  le  noble  aura  lui- 
même  détruit  son  ordre.  Quant  à  lui,  démoralisé, 
émasculé,  il  sera  devenu  un  combattant  inutile;  il 
n'aura  pas  le  courage  actif  qui  provoque  la  résis- 
tance nécessaire,  mais  seulement  le  courage  résigné  à 
la  mort.  Avec  lui  il  aura  entraîné  toute  l'ancienne 
France,  depuis   le  roi  jusqu'au  dernier  gagne-denier. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  2\)\) 

Ossature  de  la  monarchie,  il  s'étonnera,  après  s'être  sup- 
primé avec  élégance,  de  voir  cette  monarchie  s'écrouler. 


Sur  l'officier  les  idées  égalitaires  feront  les  ravages 
les  plus  pernicieux  et  auront  des  conséquences  les 
plus  dangereuses  pour  la  société  qu'il  est  appelé  à  dé- 
fendre. A  fréquenter  les  loges,  où  les  sous-officiers  et 
soldats  sont  admis,  lorsqu'il  n'y  a  pas  une  loge  spéciale 
pour  eux  souchée  au  régiment,  il  perdra  son  prestige 
et  son  autorité  auprès  de  ses  subordonnés,  ses  égaux 
et  parfois  ses  supérieurs  dans  l'atelier,  en  même  temps 
que  ces  inférieurs  perdront  le  sentiment  de  la  hiérar- 
chie nécessaire  et  l'esprit  de  la  discipline  indispensable. 
Il  subira  encore  une  autre  transformation  mentale 
néfaste  à  l'égard  de  ses  supérieurs,  analogue  à  celle 
de  ses  inférieurs  envers  lui.  Lorsque  viendra  la  Révo- 
lution, la  désorganisation  intellectuelle  et  hiérarchi- 
que sera  complète,  en  attendant  le  désordre  matériel 
que  les  Jacobins  provoqueront  et  entretiendront. 


Chez  le  magistrat  au  Parlement,  en  lutte  tradition- 
nelle depuis  deux  siècles  avec  le  pouvoir  royal,  la  dé- 
sagrégation aura  encore  de  plus  terribles  effets.  Dans 
ce  milieu,  où  la  dignité  et  la  vertu  sont  souvent  factices 
et  intéressées,  les  idées  égalitaires  ne  feront  qu'entrete- 
nir et  exaspérer  cet  état  de  révolte  latent  qui  avait  pro- 
duit déjà  tant  de  maux.  Le  magistrat,  légiste  impla- 
cable, appliquera  ses  théories  comme  une  ordonnance 
ou  un  arrêt,  et  il  le  fera  d'autant  plus  complètement 
qu'elles  seront  en  accord  complet  avec  sa  mentalité 


300  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

professionnelle.  Les  loges  n'auront  pas  besoin  d'avoir 
recours  aux  lits  de  justice  pour  lui  faire  enregistrer  et 
applsiquer  leurdécisio  ns. 


Le  duc  d'Orléans  réclamera  à  Louis  XVI  l'égalité 
devant  les  marches  du  trône  de  France  ;  il  aura  beau 
ensuite  faire  abandon  du  nom  et  des  droits  de  sa  race 
pour  personnifier  le  dogme  maçonnique  :  sur  le  même 
échafaud  que  son  roi  roulera  la  tête  de  Philippe  Ega- 
lité. 

Après  avoir  sauvé  la  maçonnerie  désorganisée  et 
expirante,  en  lui  donnant  la  direction  unique  du  G.*. 
0.'.  ;  après  avoir  versé  dans  toutes  les  sectes,  depuis 
les  loges  militaires  jusqu'aux  loges  égyptiennes  de 
Cagliostro,  le  duc  de  Luxembourg,  à  la  fin  de  sa  car- 
rière, ira  former  un  régiment  émigré  en  Portugal  ;  les 
Noailles  battront  maillet  pour  voir  guillotiner  le  maré- 
chal de  Mouchy  ;  le  duc  de  la  Trémouille,  prince  de 
Tarente,  aura  donné  au  G.*.  0.\  le  crédit  de  sa  pré- 
sence pour  que  le  prince  de  Talmont  soit  fusillé  par  un 
Rossignol;  les  Rohan,  les  La  Rochefoucault,  les  Choi- 
seul,  les  Ségur,  auront  brillé  dans  les  loges  pour  voir 
leurs  noms  sur  les  listes  de  victimes  de  l'Abbaye,  des 
Carmes,  de  Gisors  ou  de  la  place  de  la  Révolution.  Et, 
derrière  eux,  toute  la  noblesse  de  cour  sortira  des  loges 
pour  se  rendre  à  l'armée  de  Condé  ou  au  tribunal 
révolutionnaire.  Si  quelques-uns  d'entre  eux  ne  furent 
que  des  inconscients  et  quelques  autres  des  crimi- 
nels, tous  furent  des  coupables.  Les  sociétés  sont  tou- 
jours détruites  par  les  fautes  de  leurs  défenseurs  natu- 
rels. La  maçonnerie  a  conduit  la  noblesse  au  suicide.  Il 
faut  oser  le  reconnaître,  il  faut  oser  le  dire,  pour  que 


PROFILS    MAÇONNIQUES  301 

la  leçon  de  la  veille  puisse  servir  demain.  Toute  brave 
qu'elle  était  sur  les  champs  de  bataille  ou  dans  les 
combats  singuliers,  la  noblesse  de  cour  est  morte  de 
lâcheté  morale,  entraînant  avec  elle  dans  sa  chute  toute 
l'admirable  noblesse  de  province  vivant  modestement 
et  dignement  sur  ses  terres;  pour  être  disproportionné, 
le  châtiment  n'en  était  pas  moins  fatal.  La  fissure  qui 
a  fait  crouler  notre  ancien  édifice  social  n'avait  été 
faite  ni  parles  vices  ni  par  l'insuffisance  de  la  noblesse, 
mais  par  le  corrosif,  l'esprit  d'égalité  maçonnique. 


J.-B.    DE    PUISIEUX 
(1679-1776) 

Le  plus  vénérable  des  Vénérables  français  est  sans 
contredit  Jean-Baptiste  de  Puisieux,  architecte  juré  du 
roi.  Né  à  Alland'huy  (Ardennes)  le  19  janvier  1679,  il 
a  presque  découvert  l'élixir  de  longue  vie,  car  il  mou- 
rut Agé  de  97  ans,  à  Paris,  le  6  février  1776. 

Il  avait  été  cristallisé  par  la  f.\-m.*,  car  c'était  assu- 
rément le  maçon  le  plus  assidu  et  le  plus  convaincu  de 
France  ;  il  consacrait  tous  ses  loisirs  à  l'Art  Royal. 
Placé  par  son  père  chez  un  avocat  au  Parlement  de 
Paris,  il  abandonna  bientôt  l'étude  du  droit  pour  se 
consacrer  aux  sciences  et  à  l'architecture. 

S'il  publia,  en  1765,  un  Traité  de  Géométrie,  on  ne  peut 
douter  que  c'est  uniquement  parce  que  cette  science 
avait  été  perchée  sur  le  plus  haut  degré  de  l'échelle 
templière.  Il  s'occupa  aussi  d'architecture,  probable- 
ment pour  les  mêmes  raisons  et  peut-être  aussi  parce 
qu'il  était  architecte  juré  du  roi.  Il  présenta  même,  en 
1758,  un  projet  pour  la  nouvelle  église  Sainte-Geneviève  ; 
si  ses  plans  ne  furent  pas  adoptés,  sa  défaite  fut  hono- 


302  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

rable,  car  il  fut  nommé  contrôleur  de  travaux  sous  les 
ordres  de  son  heureux  vainqueur  Jacques-Germain 
Soufïlot.  Ses  succès  furent  plus  notoires,  par  compen- 
sation, dans  l'architecture  maçonnique.  Appelé  à  faire 
partie  de  la  Grande  Loge  de  France  en  1762,  le  1er  jan- 
vier 1765  celle-ci  l'honorait  des  fonctions  de  grand 
architecte,  malgré  ses  86  ans.  Lors  de  la  constitution  du 
G.*.  0.*.,  il  figura  comme  député  en  qualité  de  doyen, 
car  à  ses  titres  il  pouvait  ajouter  qu'en  1729  il  avait  été 
maître  de  la  loge  Saint-Pierre  et  Saint-Paul  à  l'Orient 
de  Paris,  où  il  avait  été  remplacé  dans  ces  fonctions 
le  13  septembre  1765  par  le  frère  Zambault.  Son  fils 
était  vénérable  d'une  des  plus  anciennes  loges  de 
France  :  les  Arts  Sainte-Marguerite. 

Pour  rendre  hommage  à  la  vérité  et  mettre  l'hono- 
rable Vénérable  à  l'abri  de  la  médisance  et  du 
ridicule,  j'ajouterai  qu'il  ne  faut  pas  le  confondre  avec 
Philippe-Florent  de  Puisieux,  dont  la  femme,  Made- 
leine d'Arsant,  défraya  abondamment  la  chronique 
scandaleuse,  à  une  époque  où  les  chroniqueurs 
étaient  bavards  et  malveillants.  La  belle  Madeleine, 
après  avoir  été  fort  liée  avec  Diderot,  qui  fit  pour  elle 
les  Bijoux  Indiscrets,  devait  mourir  aux  Incurables, 
le  29  janvier  1799.  L'épouse  légitime  de  Jean-Baptiste 
était  au  contraire  une  femme  fort  vertueuse,  qui  mourut 
bien  avant  son  mari,  auquel  elle  n'avait  donné  qu'un 
fils. 

Puisieux  avait  fait  son  testament  le  10  mars  1771  et 
huit  jours  après  sa  mort,  le  14  février  1776,  la  minute 
en  fut  déposée  au  greffe  de  l'Abbaye  royale  Sainte- 
Geneviève,  le  défunt  étant  mort  rue  Saint-Etienne-des- 
Grès,  où  il  avait  son  domicile  depuis  le  5  septembre 
1763,  ayant  à  cette  date  vendu,  devant  Me  Régnault, 
notaire  royal,  sa  maison  de  la    rue  des  Bernardins  à 


PROFILS    MAÇONNIQUES  303 

la  fabrique  de  Saint-Nicolas  du  Chardonnet.  Puisieux 
laissa  à  sou  fils  une  médaille  d'or  ;  à  sa  sœur  ses  meu- 
bles et  300  livres,  et  il  donnait  quittance  de  sa  créance 
à  Louise-Geneviève  Laisné,  femme  d'Antoine  Nollet, 
marchand  à  Paris.  D'après  les  rituels  que  je  possède 
et  qui  lui  ont  appartenu,  Puisieux  devait  suivre  le 
régime  jacobite.  Il  devait  s'occuper  également  de  kab- 
bale et  d'alchimie,  ayant  laissé  un  manuscrit  indi- 
quant le  moyen  de  faire,  avec  de  l'étainde  Cornouailles, 
de  l'argent  «  sortant  du  feu  blanc  et  pouvant  souffrir 
la  coupelle  ».  Pour  lui,  «  l'aigle  étendu  est  de  l'armoniac 
sublimé  (sic)  ;  la  gelée  de  loup,  de  la  teinture  d'anti- 
moine congelée  ;  l'estomac  d'autruche,  de  l'eau  forte  ; 
le  lyon  vert,  de  la  teinture  de  vitriol,  etc.  » 

Jean-Baptiste  de  Puisieux  appartenait  à  la  catégorie 
des  maçons  sincères,  ne  voyant  dans  les  régimes  qu'ils 
pratiquaient  que  l'étiquette  humanitaire,  les  préten- 
tions scientifiques,  les  aspirations  métaphysiques 
creuses,  et  prenant  tout  cela  au  sérieux.  Les  travaux 
maçonniques  du  f.\  de  Puisieux  n'ont  jamais  dû  faire 
tort  qu'à  ses  travaux  professionnels.  Puisieux  était  du 
reste  un  fort  brave  homme  et  ses  connaissances  alchi- 
miques lui  servirent  au  moins  à  composer  une  eau 
excellente  pour  les  yeux,  qu'il  distribuait  aux  pauvres 
chaque  matin.  Dans  un  âge  très  avancé,  il  allait  encore 
visiter  les  malheureux  et  leur  porter  ses  bienfaits  et 
ses  consolations; 

MICHEL     PROCOPE 

(1684-1753) 

Gil  Blas,  en  rentrant  chez  l'épicier  liquoriste  de  la 
rue  des  Fossés-Saint-Germain,  y  trouva,  nous  raconte 
Lesage,    un    petit   médecin  brun   qu'on    nommait  le 


304  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Dr  Cuchillo,  dont  la  figure  lui  fit  mépriser  la  colère. 
Lesage  avait  traduit  en  espagnol  le  nom  italien  de 
Coltelli,  comme  les  habitants  du  quartier  de  Bussy 
l'avaient  traduit  en  français  sous  le  nom  de  Couteau.  Ce 
docteur  dont  Gil  Blas  méprisait  la  colère,  petit,  laid, 
noir  et  bossu,  était  Michel  Procope  Couteau,  le  plus 
gai  des  maçons  de  France.  Malgré  ses  infirmités,  le 
Dr  Procope  fut  un  homme  à  succès,  dont  le  beau  sexe 
appréciait  les  mérites.  Il  avait  du  reste  de  qui  tenir. 
Son  père,  Francesco  dei  Coltelli,  fils  d'Onofrio,  gentil- 
homme palermitain,  en  avance  sur  son  siècle,  n'avait 
pas  cru  déchoir,  lorsqu'après  avoir  traîné  inutilement 
dans  les  -rues  de  Paris  son  épée  en  verouil,  il  s'était 
décidé  à  prêter  l'aide  de  sa  jeune  activité  aux  Arméniens 
qui,  en  1670,  tenaient  un  café  à  la  foire  Saint- 
Germain.  A  ce  métier  encore  innommé,  il  avait  su 
faire  fortune  et,  en  1675,  il  se  lançait  dans  le  commerce 
et  dans  le  mariage.  Epicier  et  cafetier-liquoriste,  rue  de 
Tournon,  il  distilla  lui-même  ses  produits  et  épousa 
Marguerite  Crouïn,  dont  il  eut  au  moins  huit  enfants. 
La  pauvre  Marguerite  en  mourut  ;  elle  ne  fut  pas 
pleurée  longtemps.  Dans  l'année  qui  suivit  sa  mort,  le 
15  juillet  1697,  Francesco  convolait  en  secondes  noces 
à  Saint-Sulpice,  malgré  ses  quarante-sept  ans,  avec  une 
fille  de  bonne  maison,  âgée  de  vingt-quatre  ans,  Anne- 
Françoise  Garnier  de  Vaulnay.  Cette  seconde  épouse 
ne  lui  donna  que  quatre  héritiers.  Riche  de  douze 
enfants,  Francesco  dei  Coltelli,  devenu  François  Pro- 
cope, sans  qu'on  ait  jamais  su  pourquoi  il  s'était  placé 
sous  le  patronage  de  Procope  de  Gaza,  historien  byzan- 
tin, installa  son  célèbre  café  rue  des  Fossés-Saint- 
Germain-des-Prés,  en  face  de  la  Comédie,  sous  la  pro- 
tection du  Saint-Suaire  de  Turin. 

Il  se  retira   en  1716,  après  fortune  faite,  laissant  la 


PROFILS    MAÇONNIQUES  .')().") 

place  à  son  second  fils   Alexandre,  qui  fit   souche  de 
cafetiers. 

Comme  beaucoup  de  commerçants  parisiens,  Fran- 
çois avait  destiné  un  de  ses  fils  à  l'état  ecclésiastique. 
Michel  avait,  dès  l'âge  le  plus  tendre,  montré  des  dis- 
positions singulières  et  un  aplomb  remarquable  :  à 
l'âge  de  neuf  ans,  il  prêchait  dans  l'église  des  Cordeliers 
un  sermon  en  grec,  composé  par  lui.  Son  zèle  religieux 
devait  bientôt  se  refroidir  ;  après  avoir  reçu  les  ordres 
mineurs,  il  renonça  à  soigner  les  âmes  pour  se  vouer 
au  soin  des  corps.  En  1708,  il  était  reçu  docteur  méde- 
cin. Singulier  médecin  du  reste;  agité,  jamais  à  la  même 
place,  on  le  trouvait  plus  souvent  au  café  fraternel, 
dont  il  était  un  des  attraits,  dans  les  loges  de  f.\-m.*. 
ou  au  spectacle  que  dans  son  cabinet  de  consultations. 
A  plusieurs  reprises  il  quittait  Paris,  pour  aller  on  ne 
sait  où  ;  se  mariant  authentiquement  deux  fois,  sans 
compter  une  certaine  Anglaise  fort  riche,  qui  passe 
pour  avoir  été  sa  femme,  sans  qu'on  puisse  trouver  la 
trace  de  cette  union. 

Né  à  Paris  le  7  juillet  1684,  Michel  avait  épousé, 
avant  1718,  Charlotte  Beaune,  qui  mourait  en  1728, 
précédant  de  quelques  mois  dans  la  tombe  une  fille 
qu'elle  avait  eue  en  1719.  Peu  après  le  décès  de  sa 
femme,  Michel,  suivant  l'exemple  paternel,  épousait 
en  secondes  noces  Madeleine-Henriette  de  Brisseau  de 
Montfort,  qui  habitait  le  château  de  Montfort  près  du 
Mans.  Comme  sa  première  femme,  Madeleine  mourait 
prématurément  en  1735,1a  même  année  qu'un  fils  qu'elle 
avait  eu  en  1733.  Michel  se  fixait  alors  à  Paris  :  en  1741 , 
il  était  professeur  de  pathologie, en  1747,  professeur  de 
chirurgie  française  et,  en  1752,  bibliothécaire  et  régent 
de  la  Faculté.  Il  mourut  le  31  décembre  1753,  rue  de 
Seine,  faubourg  Saint-Germain.  Quelques  jours  avant 

LA  FRA.NC-MACONNERIE.  —  T.  I.  20 


30(5  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

sa  mort,  le  25  décembre,  il  avait  fait  son  testament 
devant  Me  Dupré,  notaire  royal,  laissant  une  fortune 
modeste  et  pas  d'héritiers  directs.  A  sa  sœur,  chanoi- 
nesse  régulière  de  Picpus,  il  laissait  60  livres  de  rentes 
viagères  ;  160  livres  de  capital  à  la  dame  de  Gages  et 
150  à  la  femme  Cochois. 

Comme  médecin,  Michel  Procope  laissa  un  léger 
bagage  littéraire.  Son  œuvre  la  plus  connue  est  Y  Art 
de  faire  des  garçons,  publiée  à  Montpellier,  en  1770 
seulement.  Ce  travail  ressortissait  peu  de  la  science 
médicale  ;  il  était  bien  plutôt  le  fruit  de  l'exemple  donné 
par  son  père,  à  moins  qu'il  n'ait  été  la  divulgation  du 
secret  maçonnique. 

Son  intarissable  gaîté  et  sa  passion  pour  les  specta- 
cles, dont  il  jugeait  finement  les  pièces  nouvelles,  ses 
fréquentes  relations  avec  les  acteurs  auxquels  il  don- 
nait de  bons  conseils,  et  avec  les  actrices  auxquelles  il 
en  donnait  de  mauvais,  incitèrent  Procope  à  se  lancer 
dans  la  carrière  d'auteur  dramatique,  où  il  obtint 
quelques  succès,  avec  Arlequin  balourd  joué  à  Londres 
en  1719,  Y  Assemblée  des  Comédiens,  les  Fées,  Pygmalion, 
la  Gageure  et  Les  deux  Basiles. 

La  colonne  funèbre  (oraison  funèbre)  de  Michel 
Procope  futprononcée  par  le  f.\  Claude-Martin  Giraud 
en  1754,  sous  le  titre  de  la  Procopade  ou  Apothéose  du 
docteur  Procope,  poème  en  six  chants,  publié  à 
Londres  en  1754. 

Procope  était  membre  de  la  R.\  L.\  de  Saint- Jean  de 
la  Discrétion  à  l'0.\  de  Paris.  Les  ouvrages  contempo- 
rains du  fameux  docteur  parlent  de  son  zèle  maçon- 
nique, et  je  ne  serais  pas  étonné  que  le  célèbre  café  de 
la  rue  des  Fossés-Saint-Germain  ait  souvent  servi  de 
loge.  Procope  est  presque  le  seul  maçon  de  cette  épo- 
que dont  le  nom  soit  resté  populaire. 


PHOFILS    MAÇONNIQUES  'M)7 

Ainsi  que  nous  l'avons  dit,  Michel  Procope  était  un 
maçon  gai,  et  cependant  précurseur  du  Neveu  de 
Rameau  ;  frère  peu  terrible,  il  ne  dut  pas  prendre  la 
maçonnerie    plus   au    sérieux  que   la  médecine  ou    le 


mariage. 


SAINT-GERMAIN 

(1700(?)-1784) 

L'inconnu  qui  apparaît  successivement  dans  toutes 
les  contrées  de  l'Europe,  pendant  la  seconde  moitié  du 
xvine  siècle,  sous  les  noms  de  comte  Tzarogy,  prince 
Rakoczy,  général  Soltikoff,  marquis  de  Montferat, 
comte  de  Bellamye,  comte  de  Saint-Germain  et  comte 
de  Veldona,  est  sans  contredit  le  produit  le  plus  cu- 
rieux de  la  flore  maçonnique. 

Dans  ce  singulier  personnage  tout  est  mystérieux  et 
extraordinaire  :  son  origine,  sa  vie  et  sa  mort. 

On  fait  sur  sa  naissance  les  récits  les  plus  contra- 
dictoires ;  non  seulement  il  ne  les  dément  pas,  mais 
au  contraire  il  les  encourage,  les  multiplie.  Est-il 
Portugais,  Espagnol,  Juif,  Français  ou  Russe  ?  Nul 
ne  peut  le  dire  avec  preuves  à  l'appui. 

Tour  à  tour,  avec  les  noms  que  nous  venons  d'énu- 
mérer,  il  se  dit  ou  on  le  dit  fils  :  du  prince  de  Tran- 
sylvanie, le  célèbre  Rakoczy  ;  d'un  Portugais,  le  mar- 
quis de  Betmar  ;  du  père  Aymar,  jésuite  espagnol  ; 
d'un  juif  d'Alsace,  nommé  Wolff  ;  d'un  sieur  Rotondo, 
receveur  des  contributions  à  Aix.  D'après  Choiseul, 
qui  l'a  protégé  quelque  temps  à  la  Cour,  il  était  fils 
d'un  juif  portugais  et  dirigeait  une  manufacture  d'in- 
dienne à  Moscou.  Si  on  lui  désigne  plusieurs  pères, 
personnages  inconnus  ou  hypothétiques,  on  ne  lui  dési- 
gne qu'une  mère  :  il  aurait  été  le  fils  naturel  de  la  veuve 


308  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN   FRANCE 

du  roi  Charles  II  d'Espagne,  la  reine  Anne  de  Neubourg, 
dont  Victor  Hugo  devait  faire  la  maîtresse  de  Ruy  Blas. 

Avant  d'examiner  la  maternité  possible  d'Anne  de 
Neubourg,  il  faudrait  fixer  approximativement  la  date 
de  la  naissance  de  l'enfant  qu'elle  aurait  mis  au  monde. 
Sur  ce  point,  les  versions  sont  également  contradictoires 
et  invraisemblables.  En  1760,  Saint-Germain  aurait  eu 
4.000  ans  selon  les  uns,  350  ans  suivant  les  autres  ;  les 
plus  raisonnables  lui  attribuaient  seulement  une  cen- 
taine d'années.  Comme  nous  le  verrons  plus  loin,  il  est 
probable  qu'il  naquit  à  la  fin  du  xvne  ou  pendant  les 
premières  années  du  xvni0  siècle.  Comme  il  mourut 
très  âgé,  en  1784,  c'est  à  cette  dernière  hypothèse,  la 
seule  admissible,  que  nous  nous  arrêterons. 

Marie-Anne  de  Pfalz-Neubourg  était  née  le  28  oc- 
tobre 1667  ;  sœur  de  l'empereur  d'Allemagne,  elle 
avait  épousé  en  premières  noces  l'électeur  palatin. 
Après  la  mort  de  Louise  d'Orléans,  nièce  de  Louis  XlV 
et  première  femme  de  Charles  II,  l'Autriche  l'imposa 
comme  épouse  à  ce  prince  dégénéré  de  la  maison  de 
Habsbourg  (4  mai  1690).  Cette  princesse  prit  aussitôt 
le  pouvoir  en  main,  avec  le  concours  d'intrigants 
allemands  :  Henri  de  Visser,  ministre  palatin,  le  Père 
Gabriel  Chiesa,  capucin,  et  le  baron  de  Berlepsch.  Sa 
vie  privée  aurait  été  désordonnée,  et  parmi  les  amants 
qu'on  lui  prête  figurent  le  musicien  Matteuci  et  le  ban- 
quier Adanero,  qui  devint  ministre  des  finances.  Après 
avoir  fait  le  jeu  de  l'Autriche,  la  reine  Marie,  grâce  à 
l'habileté  de  l'ambassadeur  de  France,  détermina  au 
dernier  moment  Charles  II  à  faire  son  testament  en 
faveur  du  petit-fils  de  Louis  XIV.  Si  Philippe  V  l'é- 
loigna  de  la  cour,  à  cause  de  son  esprit  d'intrigue,  et 
l'exila  à  Tolède  puis  à  Bayonne,  il  lui  fit  une  pension 
de  400.000  ducats. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  309 

C'est  le  20  septembre  1708  que  la  reine  arriva  à 
Bayonne.  Reçue  par  les  autorités  à  la  porte  Saint- 
Léon  avec  les  plus  grands  honneurs,  elle  fut  logée  au 
Château- Vieux,  puis  s'installa  à  l'hôtel  Montaut,  qui 
appartenait  aux  Lalande.  Après  avoir  passé  deux  ou 
trois  étés  à  Lissagne,  qu'elle  avait  acheté  aux  Belzunce, 
elle  fit  construire  le  château  de  Marrac,  mais  ne 
voulut  jamais  l'habiter,  parce  qu'une  de  ses  femmes 
s'était  installée  sans  son  ordre  dans  une  des  chambres. 

D'une  taille  majestueuse,  d'un  teint  éclatant,  elle  était 
déparée  par  un  embonpoint  excessif.  Sa  mauvaise 
santé  l'obligeait  d'aller  fréquemment  aux  eaux  de 
Cambo  ou  à  celles  de  Tercis. 

Menant  une  vie  fastueuse,  elle  était  très  aimée  des 
habitants  de  Bayonne.  Malgré  son  énorme  pension, 
elle  fit  1.200.000  livres  de  dettes  que  Ferdinand  VI 
acquitta  avant  son  départ  de  Bayonne  (17  septembre 
1738).  La  population  l'accompagna  en  grande  pompe 
jusqu'à  Lorminthoa. 

Gravement  indisposée  en  passant  à  Pampelune,  elle 
mourut  à  Guadalajara,  le  16  juillet  1740. 

D'après  la  tradition  locale,  que  ne  confirme  pas  l'état 
civil,  elle  aurait  eu,  pendant  son  séjour  à  Bayonne, 
une  fille  du  chevalier  de  Larreteguy,  dont  le  frère 
aurait  été  détenu  longtemps  au  château  d'If  pour  avoir 
crié  :  Place  à  ma  belle-sœur!  un  jour  que  la  reine  était 
arrêtée  dans  les  rues  de  Bayonne  par  un  encombre- 
ment. Le  chevalier  de  Larreteguy  se  maria  par  la  suite 
et  eut  un  fils  Charles-Léonard-Eugène  de  Larreteguy- 
Vignolles,  capitaine  aux  chasseurs  des  Vosges  (1). 


(1)  Epousa  Marie-Catherine-Julie  Potier.  En  1787  possédait  une 
maison  rue  de  la  Chaussée-d'Antin.  Il  figura  sur  les  listes  des  émi- 
grés sous  le  nom  dénaturé  de  Larritigny-Vignolles. 


310  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANGE 

Si  Saint-Germain  était  le  fils  de  Marie  de  Neubourg, 
on  ignore  si  son  père  était  Matteuci,  Adanero,  Larre- 
teguy  ou  un  autre,  car  d'après  les  mémoires  de  Grosley, 
vers  1763,  les  grands  banquiers  de  Hollande  disaient 
qu'il  était  fils  d'une  princesse  réfugiée  à  Bayonne  au 
commencement  du  xvme  siècle  et  d'un  juif  portugais 
de  Bordeaux,  version  acceptée  par  le  duc  de  Choiseuî, 


Si  l'on  s'en  rapporte  aux  confidences  de  Saint-Ger- 
main, son  origine  serait  très  différente.  Voici  ce  que 
raconte  le  prince  de  Hesse  sur  ce  singulier  person- 
nage qui  avait  été  son  commensal  pendant  ses  dernières 
années  (1)  : 

«  A  mon  retour  de  la  guerre  de  succession  de  Bavière, 
fin  août  1779,  je  vis  à  Altona  le  comte  de  Saint-Germain,  qui 
parut  vouloir  m'accorder  son  amitié,  surtout  quand  il  apprit 
que  je  n'étais  pas  un  paresseux  et  que  je  n'avais  pas  de  pré- 
dilections pour  d'autres  études  qui  auraient  pu  m'empêcher 
de  m'occuper  de  sciences  naturelles.  Il  me  dit  alors  :  «  J'irai 
vous  voir  en  Schleswig  et  vous  verrez  alors  quelles  grandes 
choses  nous  ferons  ensemble.  »  —  Je  lui  fis  comprendre 
que  j'avais  beaucoup  de  raisons  de  ne  pas  répondre  aussitôt 
à  sa  bienveillance.  —  Il  me  répondit  :  «Je  sais  que  je  suis 
obligé  d'aller  vous  voir  et  de  vous  causer.  »  —  Je  ne  sus 
trouver  d'autre  excuse  pour  échappera  ses  instances  que  de 
lui  dire  que  le  commandant  de  Kappen,  qui  était  resté  en 
arrière  pour  cause  de  maladie,  me  suivrait  quelques  jours 
après  et  qu'il  pourrait  lui  communiquer  ce  qu'il  avait  à  me 
dire.  Aussi  j'écrivis  à  Kappen  pour  le  prier  de  faire  son 
possible  et  lui  faire  comprendre  qu'il  ne  pouvait  pas  venir. 
Kappen  vint  à  Altona  et  lui  parla.  Alors  le  comte  lui 
dit  :  «  Vous  pourrez   dire  ce  que   vous  voudrez,  il  faut  que 


(1)  Mémoires  du  prince  de  Hesse,  dictés  par  lui-même   Le  texte 
traduit  que  nous  reproduisons  est  uue  analysedu  texte  très  prolixe. 


PHOFILS    MAœNNIQUl  S  !>11 

j'aille  en  Schleswig  et  je  non  démordrai  pas,  le  reste  s'ar- 
rangera  .'  Faites  en  sorte  de  me  trouver  là  un  logement.  » 
Kappcn  me  fit  part  de  son  désir  que  je  ne  pus  approuver. 
J'avais  du  reste  reçu  bien  des  renseignements  à  l'armée 
prussienne  sur  cet  homme  peu  ordinaire  et  j'avais  surtout 
causé  de  lui  avec  mon  ami  le  commandant  Frankerberg 
qui  me  dit  :  «  Vous  pouvez  être  assuré  que  ce  n'est  pas  un 
trompeur  et  qu'il  possède  de  grandes  connaissances.  Il  se 
trouvait  à  Dresde  quand  j'habitais  cette  ville  avec  ma  femme. 
Il  nous  témoignait  à  tous  deux  beaucoup  de  bienveillance. 
Ma  femme  voulait  vendre  une  paire  de  boucles  d'oreilles. 
Un  bijoutier  lui  en  offrait  un  prix  dérisoire.  Elle  en  pariait 
en  présence  du  comte  qui  lui  dit:  «Voulez-vous  me  les  mon- 
trer? »  ce  qu'elle  fit  volontiers.  Puis  il  reprit  :  «  Voulez-vous 
me  les  confier  pendant  quelques  jours?»  Puis  il  les  lui  rendit 
embellies.  Le  bijoutier  auquel  elle  les  remontra  lui  dit:  «  Ce 
sont  là  de  belles  pierreries,  elles  sont  toutes  différentes  de 
celles  que  vous  m'avez  montrées  autrefois  »,  et  il  lui  en 
donna  plus  du  double. 

«  Saint-Germain  vint,  peu  après,  à  Schleswig.  Il  m'entre- 
tint de  grandes  choses  qu'il  voulait  entreprendre  pour  le 
bien  de  l'humanité.  Je  n'avais  nulle  envie  d'être  son  disciple, 
mais,  peu  après,  je  me  fis  un  devoir  de  conscience  de  renon- 
cer à  des  connaissances  qui  pouvaient  m'être  utiles,  par  un 
esprit  de  fausse  sagesse  et  par  avarice.  Il  parla  beaucoup  de 
rendre  les  couleurs  plus  belles,  d'améliorer  les  métaux,  et  il 
soutint  qu'il  ne  fallait  pas  chercher  à  produire  de  Tor  alors 
même  qu'on  en  trouverait  la  combinaison,  et  il  resta  inflexi- 
ble sur  ce  point.  Les  pierres  précieuses  coûtent  leur  prix  de 
premier  achat,  mais  quand  on  sait  les  traiter,  leur  prix  s'élève 
de  beaucoup.  Il  n'y  avait  pour  ainsi  dire  rien  dans  la  nature 
qu'il  ne  savait  améliorer  ou  utiliser.  Il  me  communiqua 
presque  toutes  ses  connaissances  sur  les  sciences  naturelles, 
mais  il  ne  me  donnait  là  que  les  premiers  principes  et  m'a- 
bandonnait à  moi-même  pour  trouver  les  moyens  pratiques 
d'arriver  au  but  et  se  réjouissait  beaucoup  sur  mes  pro- 
grès dans  ces  sortes  de  recherches. 

((  C'est  ainsi  qu'il  fît  par  rapport  aux  métaux  et  aux  pierres 
précieuses.  Pour  ce  qui  concerne  les  couleurs,  il  m'instruisit 
directement  et  me  mit  au  courant  de  bien  d'autres  choses 
importantes.  On  sera  peut-être  curieux   de  connaître  son 


312  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

histoire  et  je  désire  la  donner  fidèlement  en  me  servant 
de  ses  propres  paroles,  tout  en  ajoutant  quelques  notes 
explicatives.  » 

D'après  Charles  de  Hesse,  il  avait  84  ans  quand  il 
vint  en  Schleswig  et  mourut  à  l'âge  de  88  ou  89  ans.  Il 
dit  à  ce  prince  qu'il  était  le  fils  du  prince  Rakoczy  de 
Sickenburgen  et  de  sa  première  épouse,  née  Tékely.  Il 
fut  placé  sous  la  protection  du  dernier  Medici,  qui, 
pendant  son  enfance,  le  faisait  coucher  dans  sa  propre 
chambre.  Quand  il  apprit  que  ses  deux  sœurs,  filles  de 
la  princesse  Charlotte-Amélie  de  Hesse-Rotenburg-Man- 
fried  (1),  s'étaient  soumises  à  l'empereur  Charles  VI  et 
avaient  reçu  de  ce  souverain  les  noms  de  Saint-Charles 
et  de  Sainte-Elisabeth,  il  résolut  de  se  nommer  lui- 
même  Saint-Germain,  le  Saint  Frère. 

Si  le  prince  de  Hesse  ne  peut  authentiquer  l'o- 
rigine de  Saint-Germain,  il  déclare  avoir  appris,  par 
d'autres  sources,  que  les  derniers  Medici  l'avaient 
réellement  beaucoup  protégé.  Les  membres  de  cette 
grande  famille  florentine  étaient  très  au  courant 
des  recherches  scientifiques,  et  il  n'est  pas  étonnant 
qu'il  ait  reçu  d'eux  ses  premières  connaissances  sur 
ces  matières.  Saint-Germain  déclara  au  prince  de 
Hesse  avoir  découvert  les  forces  de  la  nature  par  ses 
propres  moyens  et  par  des  recherches  persévérantes. 
Il  connaissait  les  propriétés  des  simples  et  en  avait 
composé  des  médicaments  dont  il  usait  personnel- 
lement et  qui  avaient  contribué  à  fortifier  sa  santé  et 
à  prolonger  sa  vie.  Il  connaissait  aussi  tous  les  remèdes 
utilisés  par  les  médecins  de  son  temps.  Cependant, 
après  sa  mort,  les  docteurs  attaquèrent  violemment  la 

(1)  On  a  vu  chap.vn,  p.  239,que  le  duc  de  Bouillon  avait  épousé 
une  princesse  de  Hesse. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  313 

réalité  de  ses  connaissances  médicales.  Il  y  avait,  à 
Schleswig,  un  médecin  nommé  Labow,  exerçant  en  même 
temps  la  profession  de  pharmacien.  11  ne  lui  payait 
pas  moins  de  1.200  thalers  par  an  pour  préparer  ses 
formules  et  en  particulier  un  thé  spécial  connu  sous 
le  nom  de  thé  de  Saint-Germain  et  qu'on  pouvait  encore 
se  procurer  à  l'époque  où  le  prince  de  Hesse  écrivait 
ses  mémoires .  11  le  faisait  vendre  aux  riches  et  distri- 
buer gratuitement  aux  pauvres  qu'il  faisait  aussi  soigner 
avec  succès  par  le  Dr  Labow.  Ce  qui  n'empêche  pas 
qu'après  la  mort  de  Saint-Germain,  le  prince  de  Hesse 
fut  harcelé  par  des  récriminations  venues  de  toutes 
parts. 

Saint-Germain  voulut  aussi  fonder  une  fabrique  de 
couleurs.  Celle  de  M.  Otto,  maire  et  conseiller  à  Ec- 
kenforde,  étant  inoccupée  depuis  la  mort  de  cet  indus- 
triel, Charles  de  Hesse  l'acheta  dans  de  bonnes  con- 
ditions, y  installa  son  hôte  et  lui  procura  des  tissus 
de  soie  et  de  lin.  Il  vit  teindre ensa présence,  dans  une 
grande  chaudière,  quinze  livres  de  soie  suivant  un 
procédé  expérimenté  au  préalable  dans  une  simple 
tasse.  Malheureusement,  sur  ces  entrefaites,  Saint-Ger- 
main fut  atteint  de  rhumatismes  dont  il  ne  se  guérit 
jamais,  malgré  ses  remèdes.  Hesse  allait  le  voir  souvent 
à  Eckenforde,  et  prétend  qu'à  chaque  visite  il  acqué- 
rait de  lui  de  nouvelles  connaissances. 

Quelque  temps  avant  sa  mort,  le  Prince  le  trouva 
très  affaibli.  Il  déclinait  à  vue  d'œil.  Après  avoir  dîné 
avec  lui  dans  sa  chambre  à  coucher,  Saint-Germain 
l'obligea  à  s'asseoir  près  de  son  lit,  lui  parla  avec 
abandon  et  lui  fît  de  nombreuses  prédictions.  Au  mo- 
ment de  se  séparer,  il  le  supplia  de  revenir  le  voir  le 
plus  tôt  possible.  A  la  visite  suivante,  Hesse  le  trouva 
beaucoup  mieux,  mais  aussi  beaucoup  moins  expansif. 


314  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

m 

Néanmoins,  lorsque  le  prince  partit  pour  Cassel  en 
1783,  Saint-Germain  lui  fit  la  confidence  que,  s'il  venait 
à  mourir  pendant  son  absence,  il  trouverait  un  billet 
cacheté  à  son  adresse  lui  donnant  toutes  satisfactions. 
Ce  billet,  remis  à  des  mains  peut-être  infidèles,  ne  lui 
parvint  jamais.  Au  moment  de  le  quitter,  il  l'avait 
supplié  en  vain  à  plusieurs  reprises  de  lui  révéler  ver- 
balement ce  qu'il  promettait  de  lui  écrire  ;  il  lui  répon- 
dit :  Oh  !  combien  je  deviendrais  malheureux,  mon 
cher  prince,  si  je  me  permettais  de  parler  ! 

L'opinion  de  Charles  de  Hesse  lui  était  exception- 
nellement favorable.  S'il  faut  croire  les  mémoires  de  ce 
prince,  il  n'aurait  jamais  rencontré  un  homme  aussi 
sage,  aimant  autant  l'humanité,  ne  demandant  d'argent 
que  pour  le  donner  aux  pauvres.  Il  pensait  rendre  les 
gens  plus  heureux  en  leur  procurant  des  jouissances  à 
des  prix  modérés  ;  brillantes  étoffes  aux  belles  couleurs. 
Très  lucide,  il  connaissait  l'histoire  dune  façon  admi- 
rable. Il  avait  séjourné  dans  tous  les  pays  d'Europe,  y 
compris  la  Turquie  ;  mais  la  France  était  son  pays  de 
prédilection.  Présenté  à  Louis  XV  par  Mme  de  Pom- 
padour,  il  aurait  été  invité  aux  petits  soupers  de 
Marly.  Le  roi,  qui  avait  grande  confiance  dans  ses 
moyens,  lui  confia  plusieurs  missions  diplomatiques 
à  l'insu  de  ses  ministres  ;  mais  selon  l'habitude  de  ce 
souverain,  lorsque  ses  agents  étaient  brûlés,  il  les 
abandonnait.  Envoyé  dans  ces  conditions  à  la  Haye 
pour  négocier  de  la  paix  avec  l'Angleterre,  Choiseul 
en  eut  connaissance  et  résolut  de  le  faire  arrêter.  Saint- 
Germain  parvint  à  s'échapper  et  se  réfugia  en  Alle- 
magne sous  le  nom  de  comte  de  Weldona  (Well  done, 
bien  fait). 

Ses  principes  philosophiques  étaient  le  plus  pur 
matérialisme,  qu'il   défendait   avec  une  telle  habileté 


PROFILS    MAÇONNIQUES  315 

qu'il  était  difficile  de  le  contredire.  Rien  moins  qu'ad- 
mirateur du  Christ,  il  se  laissait  aller  à  des  attaques 
auxquelles  Hesse  l'ut  obligé  de  répondre  : 

—  Mon  cher  comte,  il  ne  dépend  que  de  vous  de 
croire  ou  de  ne  pas  croire  en  Jésus-Christ;  mais  je  ne 
vous  cacherai  pas  que  vous  me  causez  un  véritable 
chagrin  lorsque  vous  parlez  ainsi  d'une  croyance  à 
laquelle  je  suis  attaché. 

Après  un  long  silence,  Saint-Germain  lui  répondit  : 

—  Jésus-Christ  n'est  rien,  mais  vous  faire  de  la 
peine  c'est  quelque  chose  ;  aussi  je  vous  promets  de  ne 
plus  traiter  ces  questions  en  votre  présence. 

Néanmoins  sur  son  lit  de  mort  à  Eckenlbrde, 
comme  Hesse  était  absent,  il  pria  le  Dr  Labow  de  dire 
au  prince  de  Hesse,  lorsqu'il  reviendrait  de  Cassel,  que 
Dieu  lui  avait  fait  la  grâce  avant  de  mourir  de  changer 
de  manière  de  voir  et  que,  sachant  le  plaisir  que  cela  lui 
causerait,  il  pourrait,  dans  un  autre  monde,  contribuer 
à  son  bonheur.  Le  récit  de  la  mort  de  Saint-Germain, 
tel  qu'il  est  exposé  dans  les  mémoires  du  prince 
de  Hesse,  est  en  tous  points  conforme  au  récit  qu'en  fît 
ce  prince  au  moment  même  des  événements.  Le 
28  mai  1784,  il  écrivait  en  effet  de  Hanau  à  Willermoz  : 

«...  Le  fameux  comte  Saint-Germain  a  expiré  le  27  février 
au  matin,  après  une  maladie  d'une  année  et  demie  à  peu  près. 
Il  me  fit  savoir,  quelques  semaines  avant  sa  mort,  par  un 
homme  de  confiance,  qu'il  avait  enfin  appris  par  ce  long 
terme  de  souffrances  à  se  soumettre  à  Dieu.  C'était  un  bien 
grand  mot  de  sa  part.  Je  ne  sais  si  je  vous  ai  fait  part  d'une 
des  dernières  conversations  que  j'ai  eues  avec  lui.  Vous 
savez  qu'il  disait  :  Je  suis  le  plus  ancien  des  maçons,  mais 
il  avait  toujours  fait  semblant  de  ne  rien  savoir  de  la  maçon- 
nerie et  des  hautes  connaissances  ;  cependant,  la  dernière 
année,  bien  des  eirconstances  me  confirmèrent  le  contraire. 
Enfin,  dans  une  conversation  bien  intéressante,  où  il  revenait 


316  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

justement  d'une  agonie  où  il  avait  cru  expirer,  et  moi  qui 
étais  présent  n'en  avais  point  douté,  je  commençais  à  entrer 
dans  plusieurs  détails  avec  lui,  auxquels  il  me  répondit  avec 
une  précision  et  promptitude  surprenantes.  Je  lui  deman- 
dais :  Est-ce  que  vous  avez  connu  un  certain  Marschal  de 
Bieberstein  ? 

Rép.  —  Oui,  très  bien. 

—  Où  l'avez-vous  vu? 

—  A  Varsovie. 

—  Est-ce  qu'il  savait  quelque  chose  ? 

—  Relata  refero.  Il  ajouta  :  Me  comprenez-vous  bien,  mon 
enfant  ? 

—  Oui,  mon  cher  comte  ;  je  vois  que  cela  veut  dire  qu'il 
avait  des  papiers  et  que  cette  instruction,  il  pouvait  la  don- 
ner à  d'autres. 

Il  approuva  cela. 

—  Feu  Hund  ne  voulait  pas  nous  tromper  pourtant, 
n'est-ce  pas  ? 

—  Non  1  c'était  un  bon  homme. 

Je  dis  ex  abrupto  :  Qui  était  le  prédécesseur  de  Mars- 
chall  ? 

Réponse  très  prompte  et  sans  penser  un  instant  :  —  Le 
baron  Rod,  à  Kônigsberg. 

Voici  de  toutes  les  preuves  de  notre  filiation  la  seule 
bonne  que  j'aie  jamais  eue  ;  mais  elle  ne  saurait  l'être  pour 
d'autres.  J'ai  cru  vous  faire  plaisir  en  vous  communiquant 
cette  anecdote (1)  » 

Un  autre  document  confirme  encore  l'exactitude  de 
la  date  de  sa  mort  ;  c'est  le  relevé  du  registre  de  l'état 
civil  de  la  ville  d'Eckenforde  (Schleswig)  ;  à  la  date  du 
2  mars  1784  il  est  fait  la  mention  suivante  : 

Gestorben  :  am  27  Februar 

Bestattet  :  am  2  Mars 

Der  sich  so  nennende  Graf  von  S1  Germain  und  Wel- 


(1)  Dans  le  tome  II,  nous   reviendrons  sur   cette  conversation 
relative  aux  origines  de  la  Stricte  Observance. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  317 

dona,  weiterc  nachrichten  sind  nicht  bcckannt  wordcn  in 
hiesiger  kirche  still  beygcsctzt  (sic). 

Décédé  le  27  florier.  —  Enterré  le  2  mars. 

«  Celui  qui  se  donnait  le  nom  de  comte  de  S1  Germain  et 
Weldona  et  sur  lequel  on  n'a  pas  d'autres  renseignements, 
a  été  enterré  dans  cette  église.    » 


Nous  avons  vu  dans  le  récit  du  prince  de  Hesse  que 
Saint-Germain  lui  avait  dit  positivement  qu'il  était  fils 
du  prince  Rakoczy  et  de  sa  première  femme  née  Tékely  et 
qu'il  avait  84  ans  vers  1780,  époque  de  son  arrivée  à 
Schleswig.  Il  serait  donc  né  vers  1696  et  probablement 
en  Transylvanie  ou  en  Hongrie.  Un  chercheur  heureux 
aura  peut-être  la  bonne  fortune  de  trouver  son  acte  de 
naissance,  si  Saint-Germain  a  dit  la  vérité  au  prince 
de  Hesse. 

Le  plus  célèbre  des  Rakoczy,  le  père  supposé  de  Saint- 
Germain,  est  surtout  connu  du  public  français  par  la 
marche  qui  porte  son  nom  et  que  Berlioz  a  immor- 
talisée (1).  François-Léopold  Rakoczy,  né  en  1676  au 
château  de  Borshi,  près  de  Patak,  était  le  descendant  de 
Georges  Ier  Rakoczy,  prince  de  Transylvanie  (1591-1648). 
Il  épousa  en  effet  une  Tékely  en  premières  noces  et  en 
secondes  noces,  en  Italie,  une  princesse  de  Hesse.  Sou- 
tenu par  Louis  XIV,  après  avoir  lutté  avec  énergie 
contre  l'Autriche,  il  dut  se  réfugier  à  Paris  au  commen- 
cement de  1713,  où  le  grand  roi  lui  fit  une  pension  de 
100.000  livres.  Ces  ressources  étant,  paraît-il,  insuffi- 
santes, car  il  avait  avec  lui  une  suite  nombreuse    de 


(1)  Cette  marche,  attribuée  successivement  à  Barna  Mihali,  à 
Scholes  et  à  Bihari,  n'est  certainement  pas  l'œuvre  de  Rakoczy, 
(Voir  Intermédiaire  des  Ch.  et  des  C.  1907.) 


318  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

compatriotes,  Rakoczy  aurait  augmenté  son  revenu 
en  donnant  à  jouer  à  l'hôtel  du  Pérou,  rue  Jacob,  puis 
à  l'hôtel  de  Transylvanie,  qu'il  avait  loué  quai  Mala- 
quais(l).  D'un  tempérament  excessif,  quand  Rakoczy 
n'était  pas  à  la  tête  de  ses  bandes  de  Kuruczes.  il 
menait  une  vie  d'ascète.  C'est  ainsi  qu'après  avoir 
séjourné  à  Paris,  à  Passy  et  à  Clagny,  il  se  réfugia,  en 
1714,  chez  les  camaldules  de  Grosbois.  Le  26  août  1717, 
il  prit  congé  des  bons  Pères  pour  reprendre  son  aven- 
tureuse existence.  En  1718,  il  se  rendit  à  l'appel  du 
sultan,  qui  venait  de  déclarer  la  guerre  à  l'Autriche. 
Bien  qu'il  n'ait  rien  pu  tenter  contre  les  impériaux,  par 
suite  de  la  victoire  du  prince  Eugène  à  Belgrade,  il  fut 
traité  avec  beaucoup  d'égards  par  la  Porte  ;  après  la 
paix  de  Passarovitz,  il  se  retira  à  Radosto,  non  loin  de 
la  mer  de  Marmara,  menant  avec  les  siens  une  vie 
monacale  jusqu'à  sa  mort,  le  8  avril  1735. 

Faut-il  voir  dans  cette  personnalité  chevaleresque  le 
père  du  comte  de  Saint-Germain?  Je  laisse  cette  hypo- 
thèse vraisemblable  à  vérifier  aux  chercheurs  hongrois 
qui  s'intéressent  à  la  haute  figure  de  Rakoczy. 


Si,  abandonnant  le  récit  du  prince  de  Hesse,  nous 
cherchons,  dans  les  mémoires  contemporains,  ce  qui  a 
pu  être  dit  sur  les  origines  et  sur  les  actes  de  Saint-Ger- 
main, nous  ne  trouvons  que  les  affirmations  conformes 
à  celles  du  prince. 


(1)  Hôtel  Lautrec.  Cet  immeuble  est  occupé  en  partie  de  nos 
jours  par  M.  Rapilly,  marchand  d'estampes.  Voir  la  très  intéres- 
sante étude  de  M.  Mouton  sur  l'hôtel  de  Transylvanie.  C'est  à 
l'hôtel  de  Transylvanie  que  l'abbé  Prévost  fait  jouer  Manon  et  le 
chevalier  des  Grieux. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  319 

Nous  analyserons  successivement  les  principales 
d'entre  elles. 

Dans  ses  souvenirs,  le  comte  deGleichen  (p.  121)  nous  raconte  que 

«  revenant  à  Paris  en  1759,  il  lit  une  visite  rà  la  veuve 
du  chevalier  Lambert,  qu'il  avait  connue  précédemment  ; 
il  y  vit  entrer  après  lui  un  homme  de  taille  moyenne,  très 
robuste,  velu  avec  une  simplicité  magnifique  et  recherchée. 
Il  jeta  son  chapeau  et  son  épée  sur  le  lit  de  la  maîtresse  du 
logis,  se  plaça  dans  un  fauteuil  près  du  feu  et  interrompit 
la  conversation  en  disant  à  l'homme  qui  parlait  :  —  Vous  ne 
savez  pas  ce  que  vous  dites,  il  n'y  a  que  moi  qui  puisse 
parler  sur  cette  matière,  que  j'ai  épuisée,  tout  comme  la 
musique  que  j'ai  abandonnée,  ne  pouvant  plus  aller  au 
delà. 

«  Je  demandais  avec  étonnement  à  mon  voisin  qui  était 
cet  homme-là,  poursuit  Gleichen,  et  il  m'apprit  que  c'était  le 
fameux  M.  de  Saint-Germain,  qui  possédait  les  plus  rares 
secrets,  à  qui  le  roi  avait  donné  un  appartement  à  Chambord, 
qui  passait  à  Versailles  des  soirées  entières  avec  S.  M.  et 
Mme  de  Pompadour  et  après  qui  tout  le  monde  courait 
quand  il  venait  à  Paris.  » 

M»ie  Lambert  invita  Gleichen  à  dîner  pour  le  lendemain  avec 
Saint-Germain  :  celui-ci  faisait  la  cour  à  sa  fille  et  logeait  dans 
la  maison.  Gleichen,  médusé  par  le  personnage,  ayant  risqué 
quelques  propos  sur  la  peinture,  eut  l'approbation  de  Saint- 
Germain  qui,  après  le  dîner,  lui  montra  une  dizaine  de  tableaux 
merveilleux.  Il  lui  fit  également  voir  des  pierreries  et  surtout  des 
diamants  de  couleur  d'une  grosseur  et  d'une  perfection  surpre- 
nantes. Saint-Germain  raconta  qu'il  avait  assisté  à  l'histoire,  en 
témoin  :  Henri  VI,  François  Ier,  etc.,  lui  avaient  parlé. 

«  Ces  bêtes  de  Parisiens,  dit-il  à  Gleichen,  croient  que 
j'ai  500  ans  et  je  les  confirme  dans  cette  idée  parce  que  je 
vois  que  cela  leur  fait  tant  de  plaisir  ;  ce  n'est  pas  [que  je 
sois  infiniment  plus  vieux  que  je  ne  parais.  » 

Lord  Gower,  qui  contrefaisait  admirablement  les  gens,  se  fit 
passer  un  jour  dans  un  salon  du  Marais  pour  Saint-Germain  et 
déclara    avoir   connu    particulièrement    Jésus-Christ,     la     sainte 


320  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

Vierge,  sainte  Elisabeth,  et  même  sainte  Anne.  C'est  cette  facé- 
tie qui    fit  croire  que  Saint-Germain  avait  dix-sept  cents  ans. 

Quoi  qu'il  en  soit,  Rameau  et  une  vieille  parente  de  l'ambas- 
sadeur de  France  à  Venise,  assurèrent  avoir  connu  Saint-Germain 
dans  cette  ville  en  1710  et  qu'il  paraissait  alors  avoir  50  ans  ;  en 
1759  il  paraissait  en  avoir  60.  Et  le  secrétaire  de  Gleichen,  Morin, 
qui  l'avait  connu  en  Hollande  en  1735,  ne  le  trouvait  pas  changé. 
A  sa  mort,  en  1780,  on  lui  donnait  toujours  60  ans  (nous  avons 
vu  qu'il  mourut  en  1784).  Sa  philosophie  était  celle  de  Lucrèce. 
Il  laissait  volontiers  planer  le  mystère  sur  la  noblesse  de  son  ori- 
gine et  racontait  son  enfance  environnée  d'une  suite  nombreuse, 
sur  des  terrasses  magnifiques,  sous  un  soleil  radieux.  En  fait, 
personne  n'a  rien  su  de  lui. 

Il  parlait  l'allemand,  l'anglais  et  le  français  avec  un  accent 
piémontais,  et  l'espagnol    et  le  portugais   sans  le  moindre  accent, 

Il  se  serait  fait  appeler  autrefois  marquis  de  Montferrat.  Le 
vieux  baron  de  Stoch  a  dit  à  Florence  que  sous  la  Régence,  il 
avait  connu  un  marquis  de  Montferrat  qui  passait  pour  un  fils 
naturel  de  la  veuve  de  Charles  II,  retirée  à  Ba37onne,  et  d'un 
banquier  de  Madrid. 

Saint-Germain  fréquentait  chez  M.  de  Choiseul,  qui  un  jour, 
en  présence  de  Gleichen,  dit  à  sa  femme  qu'il  lui  défendait  de 
suivre  le  régime    d'un  homme  aussi  équivoque  que  Saint-Germain. 

Le  bailli  de  Solar  ayant  demandé  si  on  savait  qui  il  était, 
Choiseul  répondit  que  c'était  le  fils  d'un  juif  portugais,  qui  trom- 
pait la  crédulité  de  la  cour  et  de  la  ville,  et  qu'il  était  dangereux 
de  laisser  le  roi  seul  avec  un  semblable  personnage. 

Saint-Germain  était  l'âme  damnée  du  maréchal  de  Belle-Isle. 
Il  aurait  été  envoyé  avec  les  instructions  du  maréchal,  approuvées 
par  le  roi,  à  la  Haye  pour  traiter  avec  le  duc  Louis  de  Brunswick 
d'une  alliance  avec  la  Prusse  et  d'une  rupture    avec   l'Autriche. 

M.  d'Affry,  ambassadeur  du  roi  en  Hollande,  se  plaignit  à 
Choiseul  et  réclama  aux  états  généraux  de  lui  livrer  Saint- 
Germain  pour  l'envoyer  à  la  Bastille.  Le  roi  n'osa  pas  intervenir 
et  laissa  toute  liberté  à  Choiseul.  Saint-Germain  parvint  à  s'é- 
chapper en  Angleterre  (1).  De  là,  il  se  rendit  à  Pétersbourg,  à 
Dresde,  à  Venise,  à  Milan.  En  1770,  il  reparaît  à  Libourne  avec 
un  nom  et  un  uniforme  de  général  russe. 

Gleichen   termine  en  racontant   son    séjour  chez   le   margrave 


(1)  Dans  les  Nouvelles  de  Londres  du  10  mai  1760,  reproduites 
dans  la  Gazette  de  France  du  24  mai  suivant  (p.  249),  nous  lisons: 
«  Le  prétendu  comte  de  Saint-Germain  a  été  arrêté  dans  cette  ville 
et  il  a  été  confié  à  la  garde  d'un  messager  d'Etat.  » 


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LE    COMTE    DE     S'1:     GERMAIN 
CÉLÈBRE    ALCHIMISTE: 

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PROFILS    MAÇONNIQUES  321 

d'Anspach  et    sa    mort    à  EcUenfœrde,  chez    le  prince    Charles  de 
liesse. 

De  son  côté  Mme  du  Hausset,  dans  ses  Mémoires 
publiés  par  Crauford,  donne  sur  lui  d'intéressants 
détails  (1). 

«  Il  venait  souvent  chez  Mme  de  Pompadour  un  homme  qui 
était  bien  aussi  étonnant  qu  une  sorcière.  C'est  le  comte  de 
Saint-Germain, qui  voulait  faire  croire  qu'il  vivait  depuis  plu- 
sieurs siècles.  Un  jour,  Madame  lui  dit  devant  moi  à  la  toi- 
lette :  —  Comment  était  fait  François  Ier?  C'est  un  roi  que  j'au- 
rais aimé.  — Aussi  était-il  très  aimable,  dit  Saint-Germain, 
et  il  dépeignit  ensuite  sa  ligure  et  toute  sa  personne  comme 
Ton  fait  d'un  homme  qu'on  a  bien  considéré.  —  C'est  dom- 
mage qu'il  fût  trop  ardent.  Je  lui  aurais  donné  un  bien  bon 
conseil  qui  l'aurait  garanti  de  tous  ses  malheurs  ;  mais  il  ne 
l'aurait  pas  suivi,  car  il  semble  qu'il  y  ait  une  fatalité  pour 
les  princes  qui  ferment  leurs  oreilles,  c'est-à-dire  celles  de 
leur  esprit,  aux  meilleurs  avis,  surtout  dans  les  moments 
critiques.  —  Et  le  Connétable,  dit  Madame,  qu'en  dites- vous? 

—  Je  ne  puis  en  dire  trop  de  bien  et  trop  de  mal,  répondit- 
il.  —  La  cour  de  François  Ier  était-elle  fort  belle  ?  —  Très 
belle,  mais  celle  de  ses  petits-fils  la  surpassait  infiniment  ; 
et  du  temps  de  Marie  Stuart  et  de  Marguerite  de  Valois, 
c'était  un  pays  d'enchantement,  le  temple  des  plaisirs  ;  ceux 
de  l'esprit  s'y  mêlaient.  Les  deux  reines  étaient  savantes, 
faisaient  des  vers,  et  c'était  un  plaisir  de  les  entendre. 
Madame  lui  dit  en  riant  :  —  Il  semble  que  vous  ayez  vu  tout 
cela.  —  J'ai  beaucoup  de  mémoire,  dit-il,  et  j'ai  beaucoup  lu 
l'histoire  de  France.  Quelquefois  je  m'amuse  non  pas  à  faire 
croire,  mais  à.  laisser  croire,  que  j  ai  vécu  dans  les  plus  anciens 
temps.  —  Mais  enfin  vous  ne  dites  pas  votre  âge,  et  vous  vous 
donnez  pour  fort  vieux.  La  comtesse  de  Gergy,  qui  était,  il 
y  a  cinquante  ans,  je  crois,  ambassadrice  à  Venise,  dit  vous 
y  avoir  connu  tel  que  vous  êtes  aujourd'hui.  —  Il  est  vrai, 
Madame,  que  j'ai    connu,  il  y  a  longtemps,  Mme  de  Gergy. 

—  Mais,  suivant  ce  qu'elle  dit,  vous  auriez  plus  de  cent  ans 

(1)  Mém.  de  MmQ  du  Hausset,  p.  148  et  179. 

LA  FRANC-MAC.ONNERIE.    —   T.    I  21 


322  LA   FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

à  présent  ?  —  Cela  n'est  pas  impossible,  dit-il  en  riant  ;  mais 
je  conviens  qu'il  est  encore  plus  possible  que  cette  dame, 
que  je  respecte,  radote.  —  Vous  lui  avez  donné,  dit-elle,  un 
élixir  surprenant  par  ses  effets  ;  elle  prétend  qu'elle  a 
longtemps  paru  n'avoir  que  vingt-quatre  ans.  Pourquoi  n'en 
clonneriez-vous  pas  au  roi  ?  —  Ah  t  Madame,  dit-il  avec 
une  sorte  d'effroi,  pour  que  je  m'avise  de  donner  au  roi 
une  drogue  inconnue,  il  faudrait  que  je  fusse  fou. 

Je  rentrai  chez  moi  pour  écrire  cette  conversation.  Quel- 
ques jours  après,  il  fut  question  entre  le  roi,  Madame, 
quelques  seigneurs  et  le  comte  de  Saint-Germain,  du  secret 
qu'il  avait  de  faire  disparaître  les  taches  des  diamants.  Le 
roi  se  fît  apporter  un  diamant  médiocre  en  grosseur  qui 
avait  une  tache.  On  le  fit  peser,  et  le  roi  dit  au  comte  :  —  Il 
est  estimé  six  mille  livres,  mais  il  en  vaudrait  dix  sans  la 
tache.  Voulez-vous  vous  charger  de  me  faire  gagner  quatre 
mille  francs  '?  Il  l'examina  bien  et  dit:  —  Cela  est  possible, 
et  dans  un  mois  je  le  rapporterai  à  Votre  Majesté.  —  Le 
comte,  un  mois  après,  rapporta  au  roi  le  diamant  sans  tache  ; 
il  était  enveloppé  dans  une  toile  d'amiante  qu'il  ôta.  Le  roi 
le  fit  peser,  et  à  quelque  petite  chose  près,  il  était  aussi 
pesant.  Le  roi  l'envoya  à  son  joaillier,  sans  lui  rien  dire, 
par  M.  de  Gontaut,  qui  rapporta  9600  fr.  ;  mais  le  roi  le  fit 
redemander  pour  le  garder  par  curiosité.  Il  ne  revenait  pas 
de  sa  surprise,  et  il  disait  que  M.  de  Saint-Germain  devait 
être  riche  à  millions,  surtout  s'il  avait  le  don  de  faire  avec 
de  petits  diamants  de  gros  diamants.  Il  ne  dit  ni  oui  ni 
non  ;  mais  il  assura  très  positivement  qu'il  savait  faire 
grossir  les  perles  et  leur  donner  la  plus  belle  eau.  Le  roi 
le  traitait  avec  considération,  ainsi  que  Madame.  C'est  elle 
qui  m'a  raconté  ce  que  je  viens  de  dire. 

M.  Quesnay  m'a  dit,  au  sujet  des  perles  :  —  C'est  une  ma- 
ladie des  huîtres,  et  il  est  possible  d'en  savoir  le  principe. 
Ainsi  M.  de  Saint-Germain  peut  grossir  les  perles  ;  mais  il 
n'en  est  pas  moins  charlatan,  puisqu'il  a  un  élixir  de  longue 
vie,  et  qu'il  donne  à  entendre  qu'il  a  plusieurs  siècles  ;  le 
maître  au  reste  en  est  entêté  et  en  parle  quelquefois  comme 
étant  daine  illustre  naissance. 

Je  l'ai  vu  plusieurs  fois,  il  paraissait  avoir  50  ans  ;  il 
n'était  ni  gras  ni  maigre;  avait  l'air  fin,  spirituel,  était  mis 
très  simplement,  mais  avec  goût,    et  portait  aux  doigts  de 


PROFILS   MAÇONNIQUES  i>23 

très  beaux  diamants,  ainsi  qu'à  sa  tabatière  cl  à  sa  montre.  Il 
vint,  un  jour  oà  La  cour  était  en  magnificence,  chez  Madame, 
avec  des  boucles  de  souliers  et  de  jarretières  de  diamants 
fins  si  belles,  que  Madame  dit  qu'elle  ne  croyait  pas  que  le 
roi  en  eut  d'aussi  belles.  Il  passa  dans  l'antichambre  pour 
les  défaire  et  les  apporta  pour  les  voir  de  plus  près  ;  et  en 
comparant  les  pierres  à  d'autres,  M.  de  Gontaut,  qui  était  là, 
dit  qu'elles  valaient  au  moins  200.000  fr.  Il  avait  ce 
même  jour  une  tabatière  d'un  prix  infini,  et  des  boutons  de 
manches  de  rubis  qui  étaient  étincelants.  On  ne  savait  pas 
d'où  cet  homme  était  si  riche,  si  extraordinaire,  et  le  roi  ne 
souffrait  pas  qu'on  en  parlât  avec  mépris  et  raillerie.  On  l'a 
dit  bâtard  d'un  roi  de  Portugal. 

M.  de  Saint-Germain  dit  un  jour  au  roi  :  —  Pour  estimer 
les  hommes,  il  ne  faut  être  ni  confesseur,  ni  ministre,  ni 
lieutenant  de  police.  Le  roi  lui  dit  :  — Et  roi.  —  Ah  !  dit-il, 
Sire,  vous  avez  vu  le  brouillard  qu'il  faisait  il  y  a  quelques 
jours  ;  on  ne  voyait  pas  à  quatre  pas.  Les  rois,  je  parle  en 
général,  sont  environnés  de  brouillards  encore  plus  épais, 
que  font  naître  autour  d'eux  les  intrigants,  les  ministres 
infidèles;  et  tous  s'accordent,  dans  toutes  les  classes,  pour 
lui  faire  voir  les  objets  sous  un  aspect  différent  du  véri- 
table. 

J'ai  entendu  cela  de  la  bouche  du  fameux  comte  de  Saint- 
Germain,  étant  auprès  de  Madame,  qui  était  incommodée 
et  dans  son  lit.  Le  roi  y  vint  et  le  comte,  qui  était  très  bien 
vu,  avait  été  reçu.  Il  y  avait  là  M  de  Gontaut,  Mme  de 
Brancas  et  i'abbé  de  Bernis.  Je  me  souviens  que  le  même 
jour,  le  comte  étant  sorti,  le  roi  tint  un  propos  qui  fit  de  la 
peine  à  Madame.  Il  était  question  du  roi  de  Prusse,  et  le 
roi  dit:  —  C'est  un  fou  qui  risquera  le  tout  pour  le  tout,  et  qui 
peut  gagner  la  partie,  quoique  sans  religion,  sans  mœurs  et 
sans  principes.  Il  veut  faire  du  bruit,  et  il  en  fera  ;  Julien 
l'Apostat  en  a  bien  fait.  — Jamais,  dit  Madame,  lorsqu  il  fut 
sorti,  je  ne  l'ai  vu  si  animé  ;  mais  enfin  la  comparaison  de 
Julien  l'Apostat  n'est  pas  mauvaise  vu  l'irréligion  du  roi 
de  Prusse.  S'il  se  tire  d'affaire  avec  tous  les  ennemis  qu'il 
a.  il  sera  dans  l'histoire  un  grand  homme.  M.  de  Bernis  lui 
dit  :  —  Madame  est  juste  dans  ses  jugements,  car  elle  n'a 
pas  lieu,  ni  moi  non  plus  qui  l'approuve,  de  s'en  louer.  » 


324  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Enfin  Dufort  de  Cheverny  (1)  décrit  le  personnage 
d'une  façon  qui  mérite  d'être  retenue  : 

»  ...  Chez  deuxjeunes  femmes  fort  aimables,  qui  voyaient 
la  meilleure  compagnie  de  Paris  et  tout  ce  qui  faisait  le  plus 
debruit,  il  rencontra  le  fameuxSaint-Germain,  Rose-Croix, 
Juif  errant,  qui  a  fait  des  pierres  et  diamants  à  Chambord, 
et  s'est  éclipsé  depuis,  pour  finir,  très  âgé,  obscurément, 
dans  une  petite  ville  d'Allemagne.  C'était  un  petit  homme 
de  45  ans  (1747),  d'une  figure  très  commune,  mais  fort  spiri- 
tuel ;  magnifique  pour  donner  des  bagatelles  aux  femmes, 
parlant  avec  feu  et  bien,  mais  par  énigmes,  donnant  ou  lais- 
sant toujours  quelque  chose  à  deviner  ;  se  vantant  de  con- 
naître comme  de  visu  les  personnages  les  plus  fameux  dont 
on  lui  parlait,  s'enveloppant  d'un  nuage  sur  son  âge  et  sur 
sa  vie,  parlant  de  tout,  comme  s'il  avait  tout  appris,  se  trom- 
pant du  reste  souvent.  » 

L'abbé  Barruel,  parlant  de  la  société  qui  se  réunissait  à  Erme- 
nonville après  la  mort  de  J.-J.  Rousseau,  sous  la  direction  du 
R.\  F.*,  de  Sâint-Germain,  «  ose  avancer,  dit  Abraham  (2),  que 
les  femmes  réunies  dans  cette  société  étaient  communes  aux  ff.\,  à 
l'exception  de  celle  que  le  chef  avait  choisie  ;  cette  assertion  est 
contraire  à  toute  vérité.  Tous  ceux  qui,  comme  moi,  ont  eu  l'avan- 
tage de  connaître  le  f.\  de  Saint-Germain,  peuvent  assurer  qu'il 
n'a  jamais  donné  ni  des  exemples  ni  des    leçons    de  libertinage.. .  » 

Pour  être  juste,  il  faut  reconnaître,  en  effet,  que  les 
accusations  portées  contre  Saint-Germain  par  Bar- 
ruel (3),  ne  peuvent  être  exactes  en  ce  qui  concerne  sa 
participation  aux  orgies  d'Ermenonville.  Car  les  faits 
qu'il  relate  se  passèrent  en  1785,  et,  à  cette  époque. 
Saint-Germain  était  mort  depuis  plus  d'un  an. 

D'après  des  renseignements  particuliers  qui  m'ont  été 
obligeamment  fournis  par  le  prince  Charles  de  Lœvens- 

(1)  Mémoires,  I,  56. 

(2)  Histoire  du  Jacobinisme,  IV,  270. 

(3)  Miroir,  III,  17. 


PROFITS    MAÇONMOII.S  .'525 

tein  :  ci  Au  cours  de  ses  nombreux  voyages,  Saint-Ger- 
inain  arriva  à  Leipzig,  en  1777,  où  il  se  présenta  sous 
le  nom  de  comle  de  Weldona  ;  il  disait  également  s'ap- 
peler le  prince  Rakoczy.  Il  lit  dans  cette  ville  la  con- 
naissance du  conseiller  du  Bosc.  Ce  conseiller,  dans 
une  lettre  au  prince  Frédéric-Auguste  de  Brunswick, 
déclare  que  Saint-Germain  est  expert  en  matière  de 
teinture  de  la  laine  et  de  la  soie  et  qu'il  est  à  la  tète 
d'une  manufacture  d'indienne  à  Moscou  ;  il  savait  éga- 
lement colorer  les  pierres  précieuses,  sauf  le  diamant, 
mais  ne  savait  fabriquer  ni  l'or,  ni  les  pierres.  En  pré- 
sence du  conseiller  intime  Wurmb,  qui  le  fît  venir  à 
Dresde,  il  avoua  avoir  entre  60  et  70  ans,  être  f.*.- 
m.\  au  4e  degré,  mais  qu'il  ignorait  les  secrets  de  la 
secte.  » 

Ce  qui  ressort  de  cet  ensemble  de  documents,  c'est 
que  Saint-Germain  était  f.\-m.\,  et  plus  avancé  en 
grade  qu'il  lui  plaisait  parfois  de  le  reconnaître. 
D'après  Le  Couteulx  (1),  il  aurait  été  initié  par  Schaep- 
fer.  Il  fit,  dans  tous  les  cas,  partie  de  la  Stricte  Obser- 
vance d'Allemagne  (2). 

Je  ne  connais  qu'une  œuvre  de  Saint-Germain  :  c'est 
un  manuscrit  relié  en  veau,  de  forme  triangulaire, 
écrit  sur  parchemin  en  caractères  particuliers.  Il  a  pour 
titre  :  La  Magie  sainte  révélée  :  Mosé  retrouvé  dans  un 
monument  égyptien  et  pieusement  conservé  en  Asie  sous 
la  devise  d'un  dragon  ailé. 

Le  faux-titre  porte  la    mention  suivante  :   Ex  dono 

(1)  Les  Sectes  et  sociétés  secrètes,  p.  151. 

(2)  Voir  également  sur  Saint-Germain  :  Gérard  de  Nerval  ;  les 
Illuminés,  p.  227. — Mounier,  de  l Influence...,  p.  139-143.  —  Doinel, 
La  Loque  noire.  —  La  Mothe-Langon,  le  Comte  de  Saint- Ger- 
main et  la  Marquise  de  Pompadour  (pour  mémoire).  —  Mémoi- 
res de  Casanova,  III,  250.  —  Voltaire,  édit.  Beuchot,  LUI,  393,  et 
LVIII,  360,  390.  —  Bulaû,  etc. . . 


326  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

sapientissimi  comitis  Saint- Germain  qui  orbem  terrarum 
perciicurrit  (1). 

Saint-Germain  fut  à  coup  sûr  un  précurseur  élégant 
de  Cagliostro.  Sa  mentalité  maçonnique  est  particuliè- 
rement intéressante  à  étudier. 

Sur  sa  personne  il  laisse  planer  un  mystère  qui  doit 
éveiller  la  curiosité,  attirer  des  sympathies.  Virtuose 
dans  l'art  du  mensonge,  il  ne  dit  pas  de  contre-vérités; 
mais  par  son  silence  il  sait,  mieux  que  par  les  plus 
savants  discours,  accréditer  les  fausses  légendes  qu'on 
répète  sur  son  compte.  Il  a  la  rare  faculté  de  savoir  se 
taire  et  d'en  profiter  avec  habileté.  Probablement  pos- 
sesseur d'une  fortune  moyenne,  il  sut  à  propos  faire 
d'utiles  sacrifices  d'argent  :  ainsi  donna-t-il  à  Louis  XV 
un  diamant  de  10000  au  lieu  et  place  d'une  pierre  de 
6000  ;  nous  l'avons  vu  employer  en  Allemagne  le 
même  procédé.  A  ces  manœuvres,  il  trouvait  vite  son 
compte  de  toutes  façons.  Ces  sacrifices  étaient  de  bons 
placements  :  affichage  et  réclame  judicieux  et  pro- 
ductifs. 

Eut-il  dans  la  f.  \-m.\  un  rôle  dirigeant,  prépondé- 
rant? Certes  non,  car  personne  n'eut  ce  rôle.  Il  semble 
avoir  été  surtout  un  frère  de  la  section  des  sciences 
vraies  ou  fausses,  et  surtout  un  frère  industriel  habile. 
Mystificateur  de  premier  ordre,  après  avoir  vécu  comme 
s'il  avait  une  fortune  qui  permît  de  ne  pas  compter,  il 
mourut,  semble-t-il,  sans  fortune.  Il  mentit  en  silence 
jusqu'à  sa  dernière  heure,  et,  inconsciemment,  ses 
adeptes  le  font  encore  mentir  du  fond  de  sa  tombe, 
d'où  ils  le  font  sortir,  revivre  et  circuler  encore  de  nos 
jours. 

(1)  Ce  manuscrit  appartient  à  M.  Potier. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  W21 


LEBRETO N 
(1708-1779) 

André-François  Lebreton,  né  à  Paris  le  21  août  1708, 
fut  le  premier  maître  de  loge  dont  le  nom  soit  parvenu 
jusqu  à  nous.  Sa  loge  avait  pour  titre  :  le  Louis  d'ar- 
gent (1). 

En  1725,  à  la  mort  de  Laurent  d'Houry,  qui  avait 
imaginé  YAlmanach  Royal  en  1683,  sa  veuve  con- 
tinua la  publication  de  ce  recueil  et  s'adjoignit  pour  sa 
rédaction  son  petit-fils  Lebreton,  qui  devint  à  son  tour 
imprimeur  de  l'almanach  en  1744.  Lebreton,  qui  avait 
épousé  Marguerite  Devaux,  mourut  sur  la  paroisse  de 
Saint-Sé vérin,  le 4  octobre  1779.  Son  acte  de  décès  porte 
qu'il  était  premier  imprimeur  du  roi,  ancien  juge-consul 
et  syndic  de  la  librairie.  Il  fut  inhumé  dans  le  charnier 
du  Crucifix  de  cette  église,  en  présence  de  Laurent 
d'Houry,  imprimeur  de  S.  A.  S.  Mgr  le  duc  d'Orléans, 
de  son  cousin  germain,  et  d'André-François  Debure, 
libraire,  gendre  du  Sr  d'Houry.  Sur  son  testament, 
déposé  le  30  août  1779  chez  Me  Boursier  (aujourd'hui 
Me  Georges  Meunier,  notaire,  94,  boulevard  Montpar- 
nasse), il  laissa  aux  pauvres  de  la  paroisse  Saint-Séve- 
rinune  somme  de  1.200  francs  et  pareil  legs  à  ceux  de 
Massy  (Palaiseau).  En  bon  chrétien,  il  demande 
qu'il  soit  dit,  tous  les  ans  à  perpétuité,  une  messe  le 
30  novembre,  tant  à  Saint-Séverin  qu'à  Massy,  pour  le 
repos  de  son  âme,  et  laisse  à  cet  effet  100  francs  de 
rente  à  chacune  de  ces  fabriques.  A  l'abbé  Lebreton  de 
la  Lonetière,  il  fait  don  d'un  exemplaire  du  diction- 
naire de  Ducange  et  de  quatre  volumes  de  Fables  de  la 

(1)  Voy.  chap.  iv,  et  monographies  des  loges. 


328  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Fontaine,  illustrés  par  Oudry  ;  au  curé  de  sa  paroisse, 
l'abbé  Cantuel  de  Blanus,  il  lègue  une  tabatière  d'or. 

Jusqu'à  la  fin  de  sa  vie,  Lebreton  assista  religieuse- 
ment à  toutes  les  tenues  du  G.1.  0.'.  et  sa  signature 
figure  parmi  celles  des  vénérables  doyens  à  côté  de 
celles  de  Carbonel,  Puisieux,  Le  Lorrain,  Leveillé,  etc. 

Pour  ne  rien  celer,  je  suis  obligé  d'avouer  que  Lebre- 
ton fut  embastillé  comme  un  simple  gentilhomme  : 
entré  à  la  Bastille  le  23  avril  1766,  par  ordre  contre- 
signé Saint-Florentin  (un  f  \-m.\),  il  en  sortit  le  30; 
«  on  ne  sait  pas  exactement  le  motif  de  sa  détention, 
nous  dit  M.  Funck-Brentano,  auquel  il  faut  toujours 
emprunter  quelque  chose  lorsqu'on  parle  de  la  Bastille  ; 
mais  il  paraît  que  son  crime  n'était  pas  capital  et  que 
sa  faute  n'était  qu'une  imprudence  occasionnée  par 
l'envie  qu'il  avait  d'obliger.  » 


BACON    DE     LA    CHEVALERIE 

(1731-1821)  (?) 

Parmi  les  nombreuses  variétés  de  f.*.-m.\  que  vit 
éclore  le  xvme  siècle,  une  des  plus  curieuses  est  sans 
contredit  celle  des  rêveurs  naïfs,  imaginatifs  convain- 
cus, se  livrant  au  travail  spéculatif  de  loge,  alchimie 
du  cerveau.  Parmi  ces  maçons,  disciples  de  Sweden- 
borg, de  Martines  de  Pasqually  ou  de  Saint-Martin, 
figurent  les  Willermoz,  le  duc  de  Luxembourg,  Rcettiers 
de  Montaleau  et  Bacon  de  la  Chevalerie. 

La  branche  des  Bacon  à  laquelle  appartenait  Bacon 
de  la  Chevalerie,  fixée  dans  le  Ljronnais,  sortait  vrai- 
semblablement des  Bacon  de  Normandie  dont  la 
famille  avait  été  illustre.  Par  contrat  du  10  juillet 
1390,  Jean  de  Luxembourg  épousa  Alice  de  Flandre, 


PROFILS    MAÇONNIQUES  329 

dame  de  Richebourg,  fille  de  Jeanne  Bacon,  dame  de 
Molay.  Cette  descendance  incertaine  n'était  pas  faite 
pour  déplaire  à  Jean-Jacques  Bacon,  qui  par  la  suite 
n  hésitait  pas  à  rappeler  qu'il  tenait  par  alliance  au 
templier  Jacques  Molay. 

En  1514,  nous  trouvons  un  Bacon  tabellion  en  Nor- 
mandie. A  partir  de  cette  époque,  la  famille  des  Bacon 
semble  avoir  mené  une  existence  nomade.  Thomas 
Bacon,  olïîcier  des  armées  du  roi  vers  1760,  laisse  trois 
fils. 

En  1700,  Pierre  Bacon  de  Lambrine,  seigneur  de 
Gourdet,  ancien  lieutenant  au  régiment  d'Auvergne- 
infanterie  et  volontaire  dans  le  régiment  de  cavalerie 
d'Audicourt,  habitait  à  Saint-Marias-lez-Bourges,  en  la 
sénéchaussée  de  Guyenne,  et  fournissait  ses  lettres  de 
noblesse.  Son  frère  aîné,  Pierre,  avait  été  successive- 
ment volontaire  dans  les  gardes  du  roi,  lieutenant  au 
régiment  de  Jonzac  et  volontaire  au  régiment  d'Audi- 
court  ;  son  frère  cadet,  Girard  de  Bacon,  seigneur  de 
Bardes,  avait  servi  en  qualité  de  cadet  aux  régiments 
de  Nazze  et  de  Jonzac.  On  trouve  enfin,  à  la  date  du 
17  juillet  1709,  le  contrat  de  mariage  de  Henri-Louis 
Bacon,  fils  de  Jean,  qui  épouse  une  de  ses  parentes, 
Marguerite  Bacon,  fille  de  Claude  Bacon,  conseiller  du 
roi,  lieutenant  des  traites  foraines  à  Châlons. 

Jean-Jacques  Bacon  de  la  Chevalerie  naquit  à  Lyon, 
sur  la  paroisse  Saint-Paul,  le  8  janvier  1731.  Il  était  fils 
de  Daniel  Bacon  de  la  Chevalerie,  et  de  Claudine 
André,  sa  légitime  épouse.  Il  eut  pour  parrain  Jean 
Bonnat  de  Mably,  prévôt  général  des  provinces  de 
Lyonnais,  Forest  et  Beaujolais,  père  du  célèbre  abbé,  et 
pour  marraine  demoiselle  Jacqueme  Basset,  épouse  de 
Jean-Baptiste  Bay,  seigneur  de  Curis. 

En  1746,  Jean- Jacques  Bacon,  âgé  de   15  ans,  entre 


330  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

dans  la  seconde  compagnie  des  Mousquetaires  de  la 
garde  du  roi,  dits  Mousquetaires  noirs,  dont  le  capi- 
taine-lieutenant était,  depuis  1729,  le  marquis  de 
Montboissier.  En  1747,  il  est  successivement  lieutenant 
en  second  et  lieutenant  au  régiment  de  Custine-infan- 
terie.  En  1757,  il  est  aide-major  dans  le  corps  des 
volontaires  du  Dauphiné  ;  l'année  suivante,  à  la  date 
du  1er  mars,  il  prend  rang  comme  major  de  ce  régiment, 
puis  passe  la  même  année  dans  un  régiment  de  dra- 
gons en  qualité  de  capitaine.  En  août  1761,  il  est 
pensionné  de  500  fr.  ;  en  octobre,  il  est  lieutenant-colo- 
nel et  commande  un  corps  de  300  hommes  d'infanterie, 
et  le  15  octobre,  il  est  décoré  de  Saint-Louis. 

Par  ordonnance  du  3  décembre  1762,  il  est  employé 
à  Saint-Domingue  avec  2.000  francs  d'appointements. 

Au  commencement  de  1768,  il  remplissait  encore  les 
fonctions  de  lieutenant-colonel  d'infanterie  dans  cette 
colonie,  et  il  attendait,  depuis  sept  ans,  sa  nomination 
de  brigadier  (1).  Le  retard  apporté  à  sa  nomination 
provenait  des  inimitiés  puissantes  qu'il  s'était  créées 
dans  la  famille  de  sa  femme  ;  d'après  une  note  sans 
date  du  bureau  des  colonies,  «  il  avait  épousé  à  Saint- 
Domingue  une  parente  de  Fournier  de  la  Chapelle, 
procureur  général,  et  ce  fonctionnaire,  mécontent  de  ce 
mariage,  s'était  dispensé  d'assister  au  mariage.  Bacon 
était  en  discussion  et  en  échange  d'injures  avec  son 
beau-père,  et  disait  à  qui  voulait  l'entendre  que  sans 
1  âge  et  la  grosseur  énorme  du  père  de  sa  femme,  il 
aurait  terminé  la  discussion  par  des  voies  de  fait.  Un 
procès  était  en  instance  devant  le  juge  du  Cap.  Il  avait 
été  décerné  contre  lui  un  décret  d'arrestation  lorsque  le 


(1)  Ministère  de  la  guerre.  Dans  ses  lettres  des  7  janvier  et  2  fé 
vrier  1768,  il  dit  qu'il  a  sept  enfants  dont  cinq  fils. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  331 

vicomte  de  Belzunce  lit  arrêter  les  poursuites  eu  se  fai- 
santremettrelaprocédure  ».  Néanmoins,  à  la  suite  de  ces 
scandales,  Bacon  dut  rentrer  en  France  pour  que  l'af- 
faire n'eut  pas  de  suites.  Il  était  du  reste  très  éprouvé 
par  le  climat,  et  son  frère  venait  de  mourir  de  la 
dysenterie. 

Le  20  août  1768,  il  prend  rang  comme  colonel  d  in- 
fanterie. Le  lerjuillet  sa  pension  est  réglée  à  2.650  francs, 
et  le  1er  mars  1780  il  est  nommé  brigadier  d'infanterie. 
Enfin,  en  décembre  1789,  il  est  désigné  par  les  élec- 
teurs des  communes  du  département  du  nord  de  Saint- 
Domingue  comme  capitaine  général  des  troupes 
patriotiques   avec  rang  de  lieutenant  général. 

Avec  cette  carrière  si  bien  remplie,  Bacon  ajoutait  de 
brillants  états  de  service.  Il  s'était  trouvé  aux  sièges  de 
Berg-op-Zoom,  des  forts  Bowere  et  Mormond,  de  Lille 
et  de  Maestricht  ;  il  avait  pris  part  aux  batailles  de 
Lawfeld,  Minden  et  aux  combats  de  Warburg  et  de 
Corbach. 

Il  avait  reçu  un  coup  de  feu  à  la  jambe  au  siège  de 
Berg-op-Zoom,  avait  eu  le  pied  percé  de  part  en  part 
d'un  coup  de  baïonnette,  et  l'épaule  cassée  à  la  sur- 
prise de  Zierenberg  ;  après  avoir  eu  trois  chevaux 
tués  sous  lui,  il  avait  été  fait  prisonnier. 

Le  10  octobre  1759,  il  avait  attaqué  et  enlevé  à  Kes- 
selback  un  détachement  de  dragons  ennemis,  plus 
nombreux  que  celui  qu'il  commandait.  Pendant  la 
retraite  de  Minden,  il  avait  pris  le  service  d'aide  maré- 
chal général  des  logis  à  la  tête  de  la  colonne  d'artillerie 
par  ordre  du  maréchal  de  Contades. 

Aussi,  en  1780,  lorsqu'il  prend  sa  retraite  provisoire, 
ses  notes  sont-elles  excellentes  ;  elles  portent  :  «  officier 
qui  a  des  talents  militaires,  très  intelligent». 

Sa  nomination  de  lieutenant  général  commandant  la 


332  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

partie  nord  de  Saint-Domingue  fut  confirmée  par  un 
décret  sanctionné  par  le  roi  en  1790.  Rentré  en  France 
pour  prendre  les  ordres  de  Louis  XVI  au  sujet  de  cette 
colonie  dont  l'ordre  était  gravement  compromis,  il 
pouvait  dire  que,  pendant  son  commandement,  pas  une 
goutte  de  sang  n'avait  été  répandue.  Lorsqu'il  arriva  à 
Paris,  la  monarchie  allait  succomber,  il  fut  aussitôt 
arrêté,  mis  en  prison,  et  dépouillé  de  tout  ce  qu'il 
possédait,  même  de  ses  papiers.  Sa  pension  fut  liquidée 
à  167  francs.  Pendant  «  vingt  ans  il  dut  vivre  du  travail 
de  ses  mains,  ne  voulant  pas  plier  devant  l'usurpa- 
teur du  trône  de  ses  maîtres  (1)  ». 

Le  16  mars  1815,  il  expose  qu'il  est  dans  une  misère 
extrême,  qui  ne  lui  permet  pas  de  se  procurer  un  habit 
et  une  croix  de  Saint-Louis  pour  être  présenté  au  roi 
qui  lui  a  fait  une  pension  de  1.200  francs  ;  qu'il  ne  peut 
retirer  son  brevet  de  maréchal  de  camp,  parce  qu'il  ne 
peut  payer  le  droit  de  sceau  ;  qu'il  a  85  ans  et  qu'il 
est  chevalier  de  Saint-Louis  depuis  54  ans  ;  qu'il  est 
malade  d'un  catarrhe  ;  que,  «  vieux  serviteur  du  roi,  il 
brûle  de  sacrifier  à  son  service  le  reste  de  sa  vie.  » 

Sur  la  chemise  du  dossier,  il  est  fait  mention  qu'une 
pension  supplémentaire  de  800  francs  lui  avait  été  ac- 
cordée le  1er  juillet  1819. 

Le  19  janvier  1821,  il  réclamait  encore,  rappelant 
qu'il  avait  90  ans  et  que  lorsqu'il  parvint  en  France,  en 
1792,  il  avait  été  témoin  «  de  la  chute  de  son  infortuné 
monarque  et  avait  été  plongé  lui-même  dans  des 
cachots  où  il  avait  langui  vingt-cinq  mois  ». 

Je  n'ai  pu  découvrir  la  date  de  la  mort  de  Jean-Jac- 
ques Bacon  de  la  Chevalerie. 

En  juillet  1844,  le  ministère  de  la  guerre  ignorait  la 

(1)  Ministère  de  la  guerre,  lettre  du  14  juillet  1814. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  333 

date  et  le  lieu  de  son  décès  el  faisait  faire  des  recher- 
ches qui  demeurèrent  infructueuses.  Son  dernier  domi- 
cile connu  était  12,  rue  du  Four-Saint-Germain  (1821) 
près  le  G.\  0  *. 

La  vie  maçonnique  de  Bacon  fut  aussi  longue  que  sa 
vie  militaire.  Disciple  de  Martines  de  Pasqually  (1)  et 
de  Saint-Martin,  Bacon  dut  déhuter  dans  la  maçonnerie 
entre  1750  et  1760. 

En  1762,  il  était  vénérahle  de  la  Félicité  à  l'Orient  de 
Rouen  et  en  1764  vénérable  de  la  loge  militaire  de 
Saint-Jean  de  la  Gloire,  alors  à  Lyon.  Dans  cette 
dernière  loge  il  faisait,  le  17  janvier  1766,  en  qualité  de 
G.*.  Orateur  de  la  G. \  L.\  Prov.*.,  l'oraison  funèbre  de 
Bayde  Thelius,  capitaine  de  dragons  au  régiment  d'Au- 
tichamp.  En  1766  il  était  substitut  universel  du  G.'.  M.*, 
des  Elus  Coens.  En  1768  il  figurait  parmi  les  disci- 
ples de  Martines  de  Pasqually.  Il  collabora  activement, 
de  1771  à  1773,  à  la  formation  du  G.'.  0.*.  C'est  en 
partie  grâce  à  son  concours  que  la  paix  put  être 
conclue,  le  26  juin  1773,  entre  la  loge  Saint -Alexandre 
et  celle  des  Amis  réunis  (2).  Le  27  octobre  suivant,  c'est 
sur  sa  proposition  que  le  G.*.  0.'.  arrête  que  les 
artisans,  domestiques  et  gens  de  maison  ne  pourront 
être   reçus  que   comme  ff.\  servants  et  que   les  mots 

(1)  Lorsque  Pasqually  installa  son  tribunal  souverain  de  Paris, 
en  mars  1767,  Bacon  fut  nommé  substitut  de  Pasqually. 

(2)  Le  rôle  de  Bacon  en  cette  circonstance  est  assez  louche.  Il 
aurait  voulu  présider  à  une  concentration  maçonnique  dans  le 
genre  de  celle  que  tentait  à  la  même  époque  la  Stricte  Observance 
templière  en  Allemage.  Membre  des  Amis  réunis  et  de  la  Stricte 
Observance,  il  louvoya  habilement  entre  les  deux  régimes,  qui 
voulaient  l'un  et  lautre  accaparer  le  G*.  0.'.  En  fin  de  compte, 
Bacon  fit  le  jeu  des  Philalèthes.  En  cela  il  obéit  peut-être  à  l'in- 
fluence des  doctrines  de  Pasqually,  bien  qu'il  eût  été  en  froid  avec 
son  souverain  maître,  qui  l'avait  remplacé  dans  ses  fonctions  de 
substitut  par  le  f.\  de  Serre. 


334  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

procès-verbaux  et  plumitifs  seront  remplacés  par 
planches  à  tracer  et  esquisses.  Très  féru  de  la  grande 
science,  il  est  désigné,  le  27  décembre  de  la  même 
année,  pour  faire  partie,  avec  le  comte  de  Stroganofi 
et  le  baron  de  Toussainct,  de  la  Commission  des  hauts 
grades. 

Le  26  janvier  1774,  il  est  président  de  la  chambre  de 
Paris  et  député  de  la  G.'.  L.\  provinciale  de  Lyon,  de 
la  Parfaite  Amitié,  des  Vrais  Amis  réunis,  de  la  Sagesse 
et  de  la  Parfaite  Union. 

Le  2  avril  1775,  il  est  un  des  fondateurs  de  la  loge 
militaire  de  la  Candeur,  dont  il  est  G.*.  Orateur  puis 
G.*.  Aumônier. 

En  1776,  alors  que  l'on  ne  pouvait  représenter  que 
cinq  loges  au  G.*.  0.*.,  il  est  député  de  l'Amitié  et  de  la 
Française  àl'O.'.  de  Bordeaux,  de  la  Concorde  à  l'0.\ 
de  Colmar,  de  la  G.*.  L.\  provinciale  de  Lyon,  de  l'Au- 
guste Félicité  àl'O.'.  de  Nancy  et  du  Directoire  écossais 
de  Strasbourg. 

Le 31  mai  1776, en  qualité  de  G.*.  Orateur  du  G.'.  0.\, 
il  provoque  le  traité  d'union  entre  le  G  \  0.*.  et  les  Di- 
rectoires de  la  Stricte  Observance  de  Lyon,  Bordeaux 
et  Strasbourg  (1). 

De  1777  à  1782,  il  rédigera  les  États  du  G.*.  O.'.et  re- 
présentera la  Bienfaisance  à  l'0.\  de  Lyon. 

Le  13  mai  1777,  c'est  lui  qui  fait  à  la  Candeur  le 
récit  des  persécutions  subies  à  Napies  parles  f.\-m.\ 
Lors  de  la  formation  de  la  loge  d'adoption  annexée  à 
cet  atelier,  il  composera  les  couplets  chantés  parle  comte 
et  la  comtesse  de  Bethizy  pour  la  réception  de  la  com- 
tesse de  Rochechouart. 


(1)  Le  6  mars  1781,  il  provoquera  la  même  union  avec  le  direc- 
toire de  Septimanie  (Montpellier). 


PROFILS    MAÇONNIQUES  335 

De  1782  à  1785,  il  se  brouillera  avec  le  G.*.  0.\ 

De  1785  à  1789,  il  sera  le  député  au  G.\  0.*.  de  la 
Bienfaisance  à  l'0.\  de  Grenoble,  de  l'Urbanité  à  10.'. 
de  Montpellier,  de  Saint-Jean  à  l'0.\  de  Saint- Quen- 
tin, des  Braves  Maçons  de  Saint-Louis  à  l'0.\  de 
Saarbruck,  de  la  Parfaite  Union  et  de  la  Bonne  Amitié 
à  l'0.\  de  la  Martinique. 

En  1785  et  en  1787,  il  sera  convoqué  aux  convents 
organisés  à  Paris  par  les  Philalèthes,  en  qualité  de 
représentant  de  la  Stricte  Observance,  dont  il  était 
grand  profès  sous  le  nom  d'Eques  ab  apro. 

Sous  l'Empire,  nous  le  retrouverons  officier  d'honneur 
du  G.'.  0..,  dont  il  sera  G.*.  Expert  en  1814.  Il  était 
aussi  Vénérable  d'honneur  des  Arts  réunis  à  l'0.\  de 
Bouen. 

En  1806,  il  se  faisait  affilier  à  l'ancienne  académie 
des  vrais  maçons  de  Narbonne  (Philadelphes)  et  était 
en  relations  fréquentes  avec  les  Chefdebien,  fonda- 
teurs du  régime.  Le  20  janvier  1806,  il  écrivait  à  l'un 
d'eux  :  «  Je  ne  suis  pas  Philalèthe,  mais  je  suis,  comme 
vous  le  savez,  substitut  universel  pour  la  partie  septen- 
trionale du  B.\  ordre  des  Elus  Coens,  rit  intérieure- 
ment peu  connu  »,  et  le  6  septembre  suivant  :  «  Je  suis 
au  rang  de  ces  vieux  animaux  domestiques  qui  ne  sont 
plus  bons  à  rien  et  qu'on  laisse  vivre  par  charité.  » 

En  1808,  Bacon  s'était  retiré  dans  le  giron  du  G.*.  0.*. 
et  à  chaque  changement  de  domicile  s'en  rapprochait 
de  plus  en  plus.  De  la  rue  Guisarde  (1808),  il  se  rend 
6,  rue  du  Vieux-Colombier  (1814),  et  enfin,  42,  rue  du 
Four  Saint-Germain-des-Prés  (1815-1821). 

Fanatique  de  f.\-m.\,  le  travail  déloge  avait  quelque 
peu  atrophié  son  intelligence,  et,  pendant  toute  une 
période  de  sa  vie,  il  fut  affligé  d'une  folie  spéciale  que 
l'on  rencontre  fréquemment  chez  les  martinistes  :  il  se 


336       LA  FRANC- MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

croyait  le  fils  de  Dieu.  Sorti  de  la  f.\-m.\,  il  raisonnait 
comme  tout  le  monde,  ainsi  que  sa  correspondance 
permet  de  le  constater. 

Le  31  octobre  1780,  Willermoz,  écrivant  au  duc  de 
Brunswick,  disait  de  lui  «  qu'il  avait  reçu  depuis  long- 
temps des  connaissances  distinguées,  mais  qui  s'étaient 
fort  effacées  pour  les  avoir  beaucoup  négligées  bien  qu'il 
n'en  convienne  pas  »,  et  Willermoz  ajoutait  confidentiel- 
lement :  «  Il  n'est  point  dans  l'ordre  intérieur  de  la 
classe  de  grand  profès  et  il  en  ignore  même  l'existence.  » 
Mais,  ce  qui  est  plus  grave  pour  l'état  mental  de  Bacon, 
c'est  ce  que  Millanois  écrivait  sur  lui  à  Willermoz  le 
14  août  1783  :  «  J'ai  vu  la  Chevalerie  dont  les  affaires 
vont  bien  mal.  Je  ne  suis  pas  étonné  que  vous  soyez 
si  éloignés  l'un  de  l'autre;  quoique  vous  ayez  puisé 
dans  les  mêmes  sources,  vous  pensez  bien  différem- 
ment :  vous  croyez  en  Jésus-Christ,  et  lui  se  croit 
semblable  à  lui.  Voilà  ce  que  je  n'ai  pas  entendu  sans 
étonnement  et  sans  scandale.  »  Bacon  de  la  Chevalerie 
est  un  des  exemples  les  plus  typiques  des  déformations 
cérébrales  que  produisait  alors  la  f.\-m.\,  même  sur 
des  cerveaux  assez  solidement  constitués. 

On  se  rendra  compte  de  son  état  d'esprit  par  la 
lettre  suivante,  publiée  par  M.  Baader  (1)  dans  son 
intéressant  ouvrage  sur  Pasqually  :  «  Un  jour  que  je 
n'étais  pas  parfaitement  pur,  raconte  Bacon ,  j  e  combattais 
tout  seul  dans  mon  petit  cercle,  et  je  sentais  que  la  force 
supérieure  d'un  de  mes  adversaires  m'accablait  et  que 
j'allais  être  terrassé.  Un  froid  glacial,  qui  montait  de 
mes  pieds  vers  le  cœur,  métouffait,  et,  prêt  à  être 
anéanti,  je  m'élançai  dans  le  grand  cercle  poussé  par 
une  détermination  obscure  et  irrésistible.  Il  me  sembla 

(1)  Enseignements  secrets  de  Martincs  de  Pasqually,  p.  xxxvi. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  337 

en  y  entrant  que  je  me  plongeais  dans  un  bain  tiède 
délicieux,  qui  remit  mes  esprits  et  répara  mes  forces 
dans  l'instant.  J'en  sortis  victorieux,  et  par  une  lettre 
de  Pasqually,  j'appris  qu'il  m'avait  vu  dans  ma  défail- 
lance et  que  c'était  lui  qui  m'avait  inspiré  la  pensée  de 
me  jeter  dans  le  grand  cercle  de  la  puissance  suprême.  » 
Et  Bacon  n'était  pas  un  des  plus  exaltés  parmi  ceux 
qui  s'occupaient  de  travail  de  loge  ! 


ALEXANDRE    DE     STROGANOFF. 
(1733-1811) 

La  f.'.-m.*.  française  au  xvinc  siècle  était  essentielle- 
ment cosmopolite  ;  et  autour  des  loges  et  dans  les  cha- 
pitres nous  voyons  figurer  un  nombre  considérable 
d'étrangers,  qui  ne  trouvant  pas  chez  eux  la  liberté 
nécessaire,  venaient  en  France  où  ils  avaient  la  faculté 
de  tout  faire,  d'autant  plus  grande  que  précisément  ils 
étaient  étrangers.  Dans  les  loges  françaises,  ils  ne  sont 
pas  des  comparses  et  jouent  souvent  des  rôles  impor- 
tants, se  considérant  comme  chez  eux  ;  il  semble  du 
reste  qu'il  y  ait  eu  dans  la  f.'.-m.'.  européenne  un  mot 
d'ordre  général  :  les  souverains  étrangers  étaient  admi- 
rés, portés  aux  nues  en  France,  tels  Frédéric  II,  la  grande 
Catherine,  les  rois  de  Danemark,  de  Suède,  les  petits 
princes  souverains  d'Allemagne.  Ce  qui  même  était 
plus  inexplicable,  plus  dangereux,  tous  les  ennemis  du 
pouvoir  royal  en  France  étaient  accueillis  avec  enthou- 
siasme par  les  divers  souverains,  travaillant  ainsi  à  la 
perte  des  pouvoirs  monarchiques  avec  une  coupable 
inconscience.  D'Allemagne,  de  Russie,  de  Pologne,  de 
Suède,  de  Danemark,  de  Suisse,  de  Hollande  et  des 
Pays-Bas  autrichiens  nous  arrivaient  une  foule  de  ma- 

LA   FRANC-MACONNRIE.    —    T.     I.  22 


338  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ï 

çons  de  toutes  les  conditions  :  philosophes,  banquiers  et 
grands  seigneurs.  Tous  ces  gens  venaient  préparer  chez 
nous  la  recherche  du  grand  œuvre,  le  triomphe  de  la 
maçonnerie.  Ils  s'appelaient  Hund,  Cagliostro,  Mes- 
mer, Stark,  Walterstoff,  Hesse,  Salm,  Kirbourg,  Stro- 
ganoff, Proly,  Pereira,  Saint  Germain,  Staël,  Aranda, 
Dorset,  Bommer,  Hulsen,  Kollowrath  ;  les  ambas- 
sades, transformées  en  loges,  étaient  des  lieux  d'asile 
assurés,  au  seuil  desquelles  les  agents  du  pouvoir  royal 
devaient  s'arrêter. 

Pendant  la  période  qui  suivra  la  mort  du  comte  de 
Glermont  et  qui  précédera  la  Révolution,  nous  retrou- 
verons tous  ces  personnages,  intriguant,  organisant  la 
chute  de  la  monarchie  française,  le  gouvernement,  par 
sa  tolérance  coupable,  leur  assurant  une  sécurité  inex- 
plicable ! 

Parmi  les  premiers  arrivés  figurait  Alexandre  de 
Stroganoff,  dont  nous  allons  étudier  le  rôle  (1). 

Les  Stroganoff  appartenaient  à  une  vieille  famille 
moscovite,  qui  était  sortie  du  commerce  au  xve  siècle 
pour  entrer  dans  la  noblesse  par  la  grande  porte.  En 
1446,  lors  de  l'invasion  tartare,  un  Stroganoff  avait  payé, 
de  ses  propres  deniers,  la  rançon  du  Kniaz  Vasili 
l'aveugle,  prisonnier  de  l'ennemi.  Pendant  le  xvie  siècle, 
un  autre  Stroganoff  avait  entrepris  la  conquête  de  la 
Sibérie. 

En  1756,  cette  illustre  famille  était  représentée  par 
Alexandre  Stroganoff,  dont  la  mère,  Sophie  Naryschkin, 
était  morte  en  1737  et  dont  le  père,  Serge,  venait  de 
mourir. 

Alexandre  était  né  le  3  janvier   1733.   Comme  tous 


(1)  Nous    avons  adopté    l'orthographe  :    Stroganoff  et  non   Stro- 
gonoff,  parce  que  c'est  ainsi  qu'il  signait. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  339 

les  jeunes  seigneurs  russes,  à  peine  sa  première  instruc- 
tion achevée,  il  entreprit  avec  son  précepteur  un 
voyage  en  Europe.  Il  parcourut  ainsi  l'Allemagne,  la 
Hollande,  l'Italie,  la  Suisse  et  la  France.  Il  rentrait  à 
Pétersbourg  le  23  juillet  1757,  pour  épouser,  le  18  février 
1758,  Anna  Michaïlowna  Vorontzoff,  qui  mourut  le 
21  lévrier  1769,  après  s'être  séparée  de  lui  en  1764.  Peu 
d'années  auparavant,  en  1760,  à  la  suite  d'une  mission 
à  Vienne,  Stroganogoff  avait  été  créé  comte  du  Saint- 
Empire. 

Il  ne  resta  pas  veuf  longtemps.  En  1770,  il  épousait 
en  secondes  noces  la  princesse  Catherine  Petrowna 
Troubetzkoi  (1).  Après  avoir  fait  à  Ferney  le  pèleri- 
nage à  la  mode,  le  ménage  vint  se  fixer  à  Paris,  rue 
de  Verneuil,  près  la  rue  de  Poitiers  (2),  où  il  résida 
jusqu'en  1779.  Ce  second  mariage  ne  fut  pas  plus  heu- 
reux que  le  premier.  La  comtesse  Stroganoff,  à  la  fin  de 
1779,  abandonnaitson  mari  en  lui  laissant  son  fils  Paul, 
pour  aller  vivre  publiquement  avec  Yvan  INicolaïewith 
Korsakov(3).  Le  scandale  avait  éclaté  en  Russie.  Stro- 
ganoff revint  aussitôt  en  France  (4),  servant  à  sa  femme 
une  grosse  pension.  Il  avait  néanmoins  conservé  à 
Pétersbourg,  où  il  venait  fréquemment,  un  grand  train 
de  maison,  s'occupant  de  charité  et  consacrant  ses 
dernières  années  à  la  direction  de  la  construction  du 
sanctuaire  de  Notre-Dame  de  Kazan. 

Comme  beaucoup  d'étrangers,  Stroganoff  était  imbu 

(1)  Née  en  1744,  morte  le  20  novembre  1815. 

(2)  De  1776  à  1779,  ils  habitaient  rue  Montmartre,  près  le  boule- 
vard, en  face  de  l'hôtel  d'Uzès  (emplacement  du  n°  26  actuel). 

(3)  Né  en  1754,  mort  en  1831. 

(4)  De  1780  à  1783  il  habita  13,  rue  de  Richelieu  (26  actuel). Dans 
cette  maison  habitaient  également  le  Sr  Messin,  tenant  «  magasin 
de  toutes  sortes  de  marchandises  de  fantaisie  »,  et  M11<3  Berlin, 
célèbre    modiste   de  Marie-Antoinette. 


340  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

avec  excès  des  idées  philosophiques  françaises,  et  c'est 
dans  la  pratique  des  doctrines  encyclopédiques  qu'il  fit 
élever  son  fils  Paul  par  Gilbert  Romme,  celui-là  même 
qui  devait  prendre  une  si  large  part  à  la  Révolution  dès 
son  début,  siéger  à  la  Convention  et  se  poignarder  après 
l'insuccès  de  l'insurrection  jacobine  de  prairial  anlll(l). 
Gilbert  Romme  ne  se  consacrait  pas  exclusivement  au 
jeune  Stroganoff;  il  s'occupait,  avec  le  père  de  son  élève, 
de  recherches  de  mines  en  Auvergne  et  en  Dauphiné, 
voulant  réaliser  pratiquement  sous  cette  forme  la  décou- 
verte de  la  pierre  philosophale.  Paul  fut  élevé  à  la  Jean- 
Jacques,  pratiquant  les  sports  en  même  temps  que  la 
philosophie.  Lorsque  la  Révolution  arriva,  il  se  trou- 
vait, sous  le  nom  de  Paul  Ochter,  particulièrement  lié, 
du  consentement  de  son  Mentor,  avec  Théroigne  de 
Méricourt,  la  célèbre  courtisane  révolutionnaire.  Ils 
habitaient  ensemble  rue  Saint-Honoré  (2).  Il  la  suivit 
ensuite  dans  le  local  des  Amis  de  la  loi,  moitié  loge  ma- 
çonnique, moitié  club,  situé,  23,  rue  de  Rouloi,  à  l'hôtel 
de  Grenoble,  près  la  rue  Croix-des-Petits-Champs  (3). 
Paul  Ochter  était  bibliothécaire  du  club.  Romme  le  pré- 
senta même  aux  Jacobins  et  l'envoya  rouler  la  brouette 
au  Champ-de-Mars,  lors  de  la  fête  de  la  Fédération. 

Alexandre  Stroganoff,  peut-être  déjà  désillusionné 
par  les  premiers  événements  de  la  Révolution,  était  resté 
en  Russie  ;  inquiet  de  la  tournure  que  Romme  faisait 
prendre  à  l'éducation  de  son  fils,  il  leur  conseilla  dis- 


(1)  Nous  avons  emprunté  une  partie  de  ces  documents  à  la 
remarquable  étude  de  S.  A.  I.  le  grand-duc  Nicolas  Mikaïlowich 
sur  le  comte  Paul  Strogonoff. 

(2)  Dans  la  maison  qui  portait  le  n°  282  avant  le  percement  de  la 
rue  des  Pyramides. 

(3)  En  l'an  XI,  cet  hôtel,  tenu  par  Vary,  portait  le  n°  35.  Proba- 
blement n°  6,  eu  1806,  et  n°  4  actuel. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  341 

crètement  de  quitter  Paris,  Le  précepteur  et  l'élève  se 
rendirent  en  Auvergne.  Sur  le  conseil  de  Romme,  Paul 
Ochter  signa  un  procès-verbal  d'enterrement  civil  de 
son  domestique.  Alexandre  trouva  que  Romme  allait 
un  peu  loin  et  rappela  son  fils  à  Pétersbourg.  Sous  des 
influences  plus  calmes,  Paul  Ochter  redevint  le  comte 
Stroganoff  et  il  mourut  à  Pétersbourg  en  1817,  après 
avoir  été  grand  chambellan,  président  de  l'académie 
des    Beaux-Arts  et  conseiller  intime  d'Alexandre  Ier. 

Quand  Alexandre  Stroganoff  collabora  avec  Sava- 
lète  de  Lange  à  la  fondation  de  la  loge  des  Amis  réunis, 
pendant  les  premiers  mois  de  1771,  il  était  déjà  très 
avancé  dans  les  grades  maçonniques.  Lorsque  les  offi- 
ciers de  cette  loge  furent  élus  à  la  suite  de  sa  reconstitu- 
tion parle  G.*.  0.'.,  il  fut  nommé,  le  21  juin  1773,  Pre- 
mier Surveillant.  A  cette  même  date,  il  était  Trésorier 
de  la  Chambre  d'administration  du  G.*.  0.*.,  et  le  27 
décembre  il  fut  désigné  pour  remplir  les  fonctions  de 
Grand  Garde  des  sceaux. 

En  1775  il  était  le  représentant  au  G.\  0.'.  de  toutes 
les  loges  de  Franche-Comté  réunies.  Il  collabora  à  la 
fondation  de  la  Candeur  à  l'0.\  de  Paris,  et  en  1775  il 
en  était  le  deuxième  Surveillant.  En  1777  il  est  premier 
Grand  Surveillant  du  G.\  0.'.  ;  en  1779,  associé  libre 
de  la  loge  des  Neuf  Sœurs.  II  faisait  enfin  partie  de  la 
Stricte  Observance  depuis  1774. 

Convoqué  aux  convents  de  Paris  en  1775  et  1787,  il 
n'y  assista  pas. 

Créé  comte  russe  le  21  avril  1798,  il  mourut  le  11 
septembre  1811  (1). 

(1)  Très  versé  dans  la  littérature  française,  il  fut  l'auteur  d'une 
pièce  intéressante:  La  Matinée  de  V amateur,  jouée  sous  Catherine  II 
au  théâtre  de  l'Hermitage  {Théâtre  de  VHermitage,  Paris,  Buisson, 
an  VII,  2  vol.  in-8°). 


342       LA  FRANC-MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

SAVALÈTE  DE  LANGE 

(1746-1797) 

Le  nom  de  Savalète  de  Lange  a  défrayé  les  chro- 
niques de  l'histoire  anecdotique,  à  propos  du  célèbre 
homme-femme  mort  à  Versailles,  le  6  mai  1858,  sous 
le  nom  d'Henriette- Jenny  Savalète  de  Lange.  Autour 
de  cette  aventure  dont  on  n'a  pas  encore  percé  le 
mystère,  on  a  accumulé  une  telle  quantité  d'erreurs, 
que  les  personnalités  des  Savalètes  sont  aujourd'hui 
confondues.  On  ne  distingue  plus  le  père  du  fils. 

Pour  retrouver  le  fameux  maçon  philalèthe,  réta- 
blissons les  états  civils. 

Savalète  père,  né  le  11  novembre  1713  et  mort  à 
Paris  le  22  février  1797,  garde  du  Trésor  royal  en  titre 
de  1756  à  1788,  ne  porta  jamais  que  le  nom  de  Magnan- 
ville  et  ne  semble  pas  s'être  occupé  de  maçonnerie.  De 
Marie-Emilie  Joly  de  Choin,  son  épouse,  il  eut  deux  fils 
et  trois  filles.  Celles-ci  devinrent  MmesDupleix  de  Pernon, 
Thiroux  de  Gervilliers  et  Dompierre  d'Hornoy.  Le  plus 
jeune  des  fils  mourut  en  1754,  âgé  de  quatre  ans. 

L'aîné,  Jean-Pierre-Paul,  né  en  1746,  mourut  à 
Paris,  le  11  décembre  1797.  Conseiller  au  Parlement, 
puis  en  1774  adjoint  à  son  père  avec  la  survivance 
de  garde  du  Trésor  royal,  il  occupa  ces  fonctions 
jusqu'en  juillet  1788.  A  partir  de  cette  époque,  il  ne 
fut  plus  qu'administrateur  sous  les  ordres  de  Du- 
fresne,  intendant  du  Trésor  royal.  En  1790,  Dufresne 
prend  le  titre  de  directeur  général  du  Trésor  public 
et  Savalète  de  Lange  celui  de  trésorier  et  payeur  (1). 

(1)  Savalète  de  Lange  est  en  même  temps  capitaine  des  gardes 
nationales  parisiennes  du  bataillon  de  Saint-Roch  et  aide  de  camp 
de  Lafayette. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  343 

Par  la  loi  du  30  mars  1791  le  Trésor  public  devient 
!  i  Trésorerie  nationale,  dirigée  par  un  comité  composé 
de  six  membres  dont  Grouville  est  le  secrétaire  ;  Sava- 
lète, dès  lors,  n'est  plus  que  le  commissaire  de  la 
deuxième  section  des  dépenses.  C'est  ce  Savalète  qui 
est  le  célèbre  f.'.-m  \ 

Savalète  de  Lange  eut  de  Geneviève-Louise  Hatry, 
de  1790  à  1797,  quatre  enfants  qu'il  reconnut  avant  de 
mourir:  Augustin-Charles-Théophile,  né  le  12  mai 
1790,  mourut  le  1er  novembre  1865;  Ange-Louis- 
Dieudonné,  né  le  17  février  1792,  mourut  le  31  mars 
1831  ;  Louise-Léonie,  née  en  1795,  mourut  le  5  octobre 
1871  ;  et  Isidore-Paulin,  né  le  4  juillet  1797,  mourut  le 
9  mai  1860. 

Il  n'eut  certainement  pas  de  Geneviève  Hatry  d'autre 
enfant  né  en  1786,  sans  cela  il  l'eût  reconnu  comme  les 
autres,  et  on  peut  au  surplus  s'étonner  à  bon  droit  que 
les  quatre  enfants  reconnus  et  leur  mère  ne  soient  pas 
intervenus,  en  1820,  lorsque  Hen nette- Jenny  fit  dresser 
son  acte  d'identité  soit  pour  protester,  soit  au  contraire 
pour  le  confirmer. 

Donc  si  Henriette-Jenny  était  fils  de  Savalète  de 
Lange,  il  n'était  pas  fils   de  Geneviève  Hatry. 

Etait-il  fils  de  Mlle  Grandville,  comme  le  suppose 
M.  Moussoir  ?  C'est  possible,  et  dans  ce  cas,  étant 
donné  le  passé  de  la  mère,  on  s'explique  facilement 
pourquoi  Henriette-Jenny  disait  ne  pas  connaître  son 
nom,  et  pourquoi  les  enfants  se  tinrent  cois  en  1820. 

Peut-être  aussi  était- il  fils  d'une  jeune  comédienne 
qui  avait  14  ans  en  1785  et  dont  nous  parlerons  plus 
loin  (1). 


1)  M.    Lenôtre  suppose    que  Henriette-Jenny   était  un  domes- 
tique d'Orléans  nommé  B.,  qui,  après  avoir  substitué  Ml,e  de  Tin- 


344  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN   FRANCE 

Qui  était  Mme  de  Grandville?  Raconter  son  histoire, 
c'est  raconter  celle  de  Savalète  de  Lange  et  de  quelques 
f.\-m.\  ;  nous  nous  étendrons  sur  le  sujet  avec  des 
réserves  dont  les  lecteurs  comprendront  les  raisons. 
Mme  de  Grandville  ou  mieux  Mlle  Grandville  portait  pro- 
bablement un  nom  de  guerre  ;  elle  demeurait  rue  des 
Bons-Enfants  ;  c'était  une  des  prêtresses  les  plus 
achalandées  du  bataillon  de  Cythère,  à  la  fin  du  règne 
de  Louis  XV. 

Sa  clientèle  était  nombreuse  et  presque  choisie,  et 
nous  n'en  connaissons  certainement  qu'une  faible  partie. 
S'il  faut  croire  les  rapports  de  police  publiés  par  M.  Piton, 
nous  voyons  circuler  dans  son  boudoir  un  grand 
nombre  de  personnages  plus  ou  moins  distingués  :  un 
Hollandais,  M.Maibon;  Groue,  officier  de  cavalerie  qui 
lui  fait  faire  un  carrosse,  dont  le  marquis  de  Crussol  (1) 
fournit  les  chevaux  ;  le  comte  d'Usson  la  fait  venir 
chez  lui,  dès  que  sa  femme  est  partie  ;  M.  Genty  lui 
donne  un  nœud  de  diamants  de  6.000  livres,  dont  elle 
réclame  la  facture  afin  de  pouvoir  la  montrer  à  ses 
amies  ;  de  plus,  Genty  lui  donne  50  louis  par  mois  ; 
M.  de  Caire  lui  donnait,  dit-on,  son  cœur  et  sa  fortune, 
pendant  que  sa  femme,  qui  ne  l'ignorait  pas.  réparait  les 
torts  faits  à  son  patrimoine  avec  les  libéralités  du  duc 


teniac  à  Mlle  de  Savalète,  s'était  lui-même  substitué  à  Mlle  de 
Tinteniac  et  par  conséquent  à  M1Ie  de  Savalète.  Pour  établir  sa 
thèse,  il  suppose  encore  qu'il  y  avait  un  Savalète,  parent  des 
gardes  du  Trésor  royal,  qui  aurait  été  le  père  de  Mlle  de  Savalète- 
Or,  à  la  fin  du  xvme  siècle,  il  n'y  avait  pas  d'autres  Savalète  que 
ceux  dont  nous  avons  parlé.  Enfin  il  est  inadmissible  qu'en  1793 
on  ait  pu  substituer  M!1c  de  Tinteniac,  née  à  Plouneventer 
(Finistère)  le  11  janvier  1776  et,  par  conséquent,  âgée  de  17  ans, 
à  M1Ie  de  Lange,  née  en  1786,  âgée  de  7  ans. 

(1)  Vénérable  des   Frères  d'Armes  à   l'O.*.  de  Berry-cavalerie. 
Grand  conservateur  de  l'ordre  en  France. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  345 

d'Aumont  (1);  Chaillon  de  Jonville  (2)  lui  donne 
9.000  livres  pour  sa  fête  ;  M.  de  Garigaud,  armateur 
de  Lorient,  lui  donnait  30  louis  par  mois;  M.  de  Ségur, 
officier  aux  gardes,  ne  lui  offrait  pas  d'argent  ;  M.  de 
Sainte-Foy  n'allait  chez  elle  que  le  matin,  afin  de  ne 
pas  rencontrer  M.  de  Caire  ;  le  vicomte  de  Noë,  furieux 
de  s'être  aperçu  que  le  marquis  de  Crussol  lui  avait 
pris  sa  maîtresse,  se  vengeait  avec  Mlle  Granville, 
etc. 

La  vie  extérieure  de  M1,e  Grandville  n'était  pas  plus 
régulière  que  sa  conduite  intime.  Elle  assiste  à  tous  les 
soupers  donnés  chez  le  baigneur  de  la  rue  de  Riche- 
lieu et  dans  bien  d'autres  maisons  moins  recomman- 
dables  ;  elle  a  des  procès  avec  ses  fournisseurs  ;  reçoit 
des  coups  de  canne  à  travers  le  visage,  jette  des 
chandeliers  à  la  tête  de  ses  partenaires,  car  elle  donne 
à  jouer  ;  chez  elle  on  se  traite  de  j.-f.,  on  se  soufflette  et 
on  ameute  le  Palais-Royal. 

C'est  au  milieu  de  ce  sabbat,  de  1770  à  1775,  que  le 
pauvre  Savalète,  que  certains  f.\-m.\  appelleront 
l'Ange  par  dérision,  essaie  de  temps  en  temps  de  placer 
naïvement  son  mot  et  d'apporter  son  cœur,  pour  avoir 
sa  place  rue  des  Bons-Enfants.  Mais  il  n'apportait  pas 
que  son  cœur;  les  rapports  de  police  nous  apprennent 
que  M.  de  Magnanville  le  fils,  c'est  ainsi  qu'on  appe- 
lait alors  le  futur  philalèthe,  lui  écrivait  tous  les  jours 
et  lui  envoyait  tout  ce  qu'il  pouvait.  Il  commence  par 
des  bracelets,  qu'il  paie,  puis  fait  des  dettes,  et  son 
père,  vers  1772,  en  règle  pour  40.000  fr.  Il  promit 
alors    de    ne    plus    recommencer  ;    mais   peu     après 

(1)  Maître  d'une  loge  portant  son  nom.  Très  lancé  dans  la 
maçonnerie,  ainsi  que  sa  sœur  la  duchesse  de  Villeroi. 

(2)  En  1762,  substitut  général  du  comte  de  Clermont,  vénérable 
maître  de  la  loge  Saint-Antoine,  dite  Saint-Thomas. 


340  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

M,le  Granville  lui  ayant  déclaré  net  qu'elle  le  mettrait 
à  la  porte  s'il  interrompait  le  cours  de  ses  générosités, 
il  commande  à  nouveau  bracelets  et  diamants,  et 
cependant  il  joue  chez  elle  le  rôle  de  doublure...  en 
quatrième  et  ne  montre  le  nez  que  lorsqu'il  ne  plaît 
pas  aux  autres  de  venir. 

L'inspecteur  de  police  ne  dit  pas  si  on  tenait  loge 
rue  des  Bons-Enfants,  mais  nous  avons  été  à  même  de 
voir  qu'il  ne  manquait  qu'un  initié  pour  avoir  les 
cinq  Frères  nécessaires  à  la  constitution  d'un  atelier 
parfait. 

Je  ne  crois  pas  devoir  m'excuser  de  cet  exposé  quel- 
que peu  long  des  aventures  de  cette  jeune  personne  ;  il 
nous  fait  voirSavalète  sous  un  jour  peu  connu  et  nous 
démontre  qu'alors  les  f.\-m.\  n'étaient  pas  plus  ver- 
tueux que  leurs  profanes  contemporains. 

C'est  au  milieu  de  ces  aventures  de  jeunesse,  qui 
auront  des  suites,  que  Savalète  s'occupait  du  grand 
œuvre,  de  l'origine  des  êtres,  de  leur  vie  présente  et  du 
but  final.  Il  fondait  l'ordre  sévère  des  Philalèthes,  cher- 
cheurs de  vérité,  se  faisait  écouter  au  G.\  0  *.  et  provo- 
quait des  convents  à  Paris.  Avec  le  duc  de  Luxem- 
bourg, il  est  une  des  étoiles  les  plus  éclatantes  du  ciel 
maçonnique.  Il  fraye  avec  Cagliostro  le  cacomage,  avec 
le  tireur  de  cartes  Etiella,  aussi  bien  qu'avec  Willermoz, 
Saint-Martin,  Rœttiers  de  Montaleau,  Duchanteau  et  le 
duc  de  Chartres. 

Nous  n'avons  trouvé  aucune  trace  de  la  vie  maçon- 
nique de  Savalète  de  Lange  avant  les  premiers  mois 
de  1771,  et  cependant  il  est  probable  qu'il  fut  initié 
quelques  années  avant  cette  époque.  La  fondation  de  la 
Société  des  Philalèthes  n'était  pas  assurément  l'œuvre 
d'un  débutant.  Est-ce  par  Duchanteau,  ou  par  Mar- 
tines  Pasqually,  ou  bien  encore  par  Court  de  Gébelin 


PROFILS    MAÇONNIQUES  M7 

qu'il  iil  son  apprentissage?  Si  Ton  tient  compte  du 
milieu  dans  lequel  il  vivait,  de  la  nature  de  ses  aspira- 
tions maçonniques,  du  régime  qu'il  fonda,  on  peut 
croire  que  ce  furent  surtout  les  théories  de  Martines 
Pasqually  qui  l'influencèrent,  et  précisément  cette  espèce 
d'illuminé  vint  à  Paris  en  1767.  Plus  tard  seulement 
Saint-Martin  l'inspira  ;  plus  tard  encore,  il  croira  pro- 
gresser dans  la  science  maçonnique  en  adoptant  les 
théories  des  Illuminés  d'Allemagne. 

En  1771,  Savalète  avait  25  ans  ;  avocat  au  Parlement, 
il  fut  exilé  lors  de  l'arrivée  de  Maupeou  à  la  tête  de 
la  nouvelle  magistrature  politique.  Avec  les  anciens 
présidents  des  Grandes  Chambres  il  entra  en  lutte 
avec  le  pouvoir  royal  ;  ceux-ci  avaient  pris  pour  pro- 
tecteurs les  princes  du  sang  et  en  particulier  le  comte 
de  Clermont,  G.\  M*,  de  la  maçonnerie. 

Parmi  les  fondateurs  de  la  secte  des  Philalèthes 
nous  voyons,  à  côté  de  Savalète,  son  oncle  Thiroux  de 
Gervillers,  son  cousin  germain  du  Pleix  de  Perles,  le 
baron  de  Salis-Séevis,  le  marquis  de  Clermont-Ton- 
nerre,  Nicolas  Autour,  le  marquis  de  Ghambonas,  le 
comte  de  Stroganoff,  le  comte  de  Salignac-Fénelon, 
les  frères  Tassin,  Bouret  de  Vezelay,  Bollioud  de 
Saint  -  Julien  ,  le  vicomte  de  Saulx-Tavannes ,  le 
vicomte  d'Houdetot,  le  marquis  de  la  Jamaïque,  Méry 
d'Arcy,  etc.  Pas  un  seul  de  ces  maçons  n'avait  encore 
marqué,  d'aucune  façon,  ni  dans  la  maçonnerie,  ni 
ailleurs. 

Ce  n'est  que  plus  tard,  après  la  formation  du  G.'.  0.*., 
à  laquelle  les  Philalèthes  collaborèrent  avec  ardeur, 
que  des  célébrités  comme  Court  de  Gébelin  (1)  furent 


(1)  Le  premier  tableau  des  Amis  réunis,  celui  de  1774,  ne  fait  pas 
mention  de  Court  de  Gébelin. 


348  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

admises,  et  plus  tard  encore  que  les  hommes  qui  de- 
vaient provoquer  le  mouvement  révolutionnaire  furent 
introduits  ;  la  loge  des  Philalèthes  fut  fondée  par  la  G.*. 
L.\  de  France  le  23  avril  1771  sous  le  titre  distinctif 
des  Amis  réunis.  Ses  vénérables  furent  successivement 
Savalète,  Bollioud  de  Saint-Julien,  Taillepied  de 
Bondi  et  le  banquier  Tassin. 

Les  règlements  des  Amis  réunis  furent  arrêtés 
pour  la  première  fois  le  24  juin  1774.  Par  la  suite,  ils 
furent  modifiés  le  22  février  1778,  le  26  mars  1783  et  le 
6  mars  1788.  Lors  de  cette  dernière  réorganisation,  on 
en  fit  une  véritable  machine  de  guerre  politique  divi- 
sée en  cinq  branches  comprenant  :  les  fondateurs,  les 
agrégés,  les  associés  libres  résidents,  les  associés 
libres  correspondants  et  les  gardiens  du  Temple  ou 
membres  du  chapitre  qui  comprenait  douze  classes. 

Les  membres  de  la  loge  se  réunissaient,  le  premier 
vendredi  de  chaque  mois,  rue  Royale-Montmartre, 
ceux  du  chapitre,  37,  rue  de  la  Sourdière  (1)  (art.  6). 
En  plus,  le  bureau  des  fondateurs  devait  nommer  deux 
commissaires  qui,  réunis  au  vénérable,  au  trésorier  et 
au  contrôleur,  devaient  former  un  comité  permanent 
(art.  7).  Les  douze  classes  dont  nous  avons  parlé  se 
décomposaient  de  la  façon  suivante  : 

I.  —  Collège  de  Maçonnerie  symbolique  : 

1°  Apprenti  ;  2°  compagnon  ;  3°  maître  ;  4°  élu  ; 
5°  écossais. 

II.  —  Chapitre  des  Chevaliers  des  Amis  réunis, 
formant  tribunal  d'honneur: 

6°  Chevaliers  d'Orient  ;  7°  Roses-Croix  ;  8°  Chevaliers 
du  Temple. 

(1)  Voir  chap.  vin. 


PROFILS    MAÇONNIQUES  349 

III.  —  Conseil  des  T.  B.  des  Amis  réunis,  formant 
tribunal  maçonnique  : 

8°  Philosophes  inconnus  ;  10°  Sublimes  Philoso- 
phes ;  11°  Initiés;  12°  Philalèthes. 

Au  début,  l'organisation  était  moins  complète  ;  les 
Philalèthes,  ou  Amis  de  la  vérité,  comme  leur  nom 
l'indique,  professaient  une  doctrine  qui  avait  pour  but 
le  perfectionnement  de  l'homme  en  le  rapprochant  de  la 
source  divine.  C'étaient  les  théories  de  Swedenborg 
et  de  Pasqually.  Une  large  part  était  donnée  aux 
sciences  occultes.  Chacun  travaillait  dans  la  branche 
de  l'Art  qui  convenait  le  mieux  à  ses  aspirations.  Sava- 
lète,  par  exemple,  après  avoir  essayé  du  mesmérisme, 
faisait  de  la  médecine  occulte  (1)  et  de  l'initiation 
par  communication,  nous  dirions  aujourd'hui  par 
contact.  Il  s'occupait  avec  ardeur  de  tout  ce  qui  tou- 
chait à  la  maçonnerie,  cherchant  à  s'introduire  dans 
tous  les  régimes  concurrents  pour  connaître  leurs 
secrets  et  faire  des  adhérents  (2).  Il  cherchait  à  se  faire 
désigner  ainsi  que  les  autres  Philalèthes  comme  repré- 
sentant   des    loges  de    province,  et  cherchait  même  à 


(1)  En  1783,  Savalète  était  très  lié  avec  Onésime-Henri  de  Loos 
(1725-1785),  alchimiste,  disciple  de  Pasqually,  qu'il  avait  assisté  à 
Paris  comme  membre  de  son  Tribunal  souverain.  Lorsque  les 
Philalèthes  s'étaient  réunis  chez  du  Terray  pour  organiser  le 
convent  de  1785,  Savalète  avait  fait  partie  de  cette  réunion  avec 
Loos,  Salzac,  Lamarque,  Astier,  Labady,  Saulx-Tavannes,  Court 
de  Gébelin  et  Von  Reichel.  Loos  était  l'auteur  d'un  volume  bizarre 
publié  en  1781  sous  le  pseudonyme  de  Philanthropos,  citoyen  du 
monde  :  a  Décadence  des  sages  ou  démonstration  de  la  nature  infé- 
rieure, dans  laquelle  on  trouvera  une  analyse  rai  sonnée  des  Erreurs 
et  de  la  Vérité  (de  Saint-Martin),  une  dissertation  étendue  sur  la 
Médecine  universelle.  » 

(2)  En  1781,  il  était  parvenu  à  se  faire  remettre  les  archives  des 
Elus  Coens  de  Pasqually. 


350  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

accaparer  le  G.*.  0.'.,  dont  il  avait  été  un  des  membres 
les  plus  actifs. 

Le  21  juin  1778,  il  est  maître  des  cérémonies  de  la 
Chambre  d'Administration  du  G.*.  0.\ 

Le  6  juin  et  le  27  décembre  1774,  il  est  secrétaire, 
puis  orateur  de  la  même  Chambre.  Il  est  en  même 
temps  député  de  Saint-Jean  0.*.  de  Beauvais  ;  de  Saint- 
Jean  0.'.  de  Guise  ;  de  l'Union  indissoluble  du  corps 
du  génie  à  l'O.'.  du  régiment  (Mézières)  ;  de  l'Humanité 
0.'.  Saint-Quentin  et  de  la  Parfaite  Union  0.\  de 
Rennes. 

Le  28  février  1776,  il  est  2e  surveillant  de  la  Chambre 
des  Provinces  du  G.*.  0.'.  ;  il  est  député  des  Amis 
réunis,  Saint-Hilaire  et  Notre-Dame  0.*.  de  Givet  :  de 
l'Intimité  0.*.  de  Niort;  delà  Parfaite  Union  0.'.  de 
Saint-Pierre  de  la  Martinique. 

En  1777,  il  est  grand  secrétaire  du  G.\  0.*.,  en  1778, 
président  de  la  Ve  classe  des  Amis  réunis,  et  en  1779 
il  préside  la  XIIe. 

En  1785,  il  fonde  la  Société  Olympique  0.*.  de 
Paris;  en  1787,  officier  d'honneur  du  G.*.  0.*.,  il  est 
député  de  l'Union  Parfaite  0.*.  de  Salins;  des  Frères 
choisis  0.*.  de  Saint-Pierre  de  la  Martinique  ;  de 
l'Olympique  de  la  Parfaite  Estime  0.*.  Paris,  et  de  la 
Parfaite  Amitié  0.'.  de  Port-Royal  de  la  Martinique.  En 
1788  et  1789  il  sera  membre  du  Lycée,  filiale  de  la 
maçonnerie.  Pendant  la  Révolution,  il  fera  partie  de  la 
Société  de  1789,  et  des  clubs  Monarchique  et  de  Valois. 

Nous  ne  raconterons  pas  ici  le  rôle  des  convents  de 
Paris  de  1785  et  1787  qu'il  organisa  et  présida,  réser- 
vant cette  étude  longue  et  importante  pour  le  2e  volume 
de  ce  travail. 

Nous  ne  pouvons  cependant  passer  sous  silence 
l'influence   qu'eurent  auprès    de  lui    les  Illuminés  de 


PROFILS    MAÇONNIQUES  351 

Bavière.  En  dehors  de  Bode  (l)(Amelius)  et  de  Busche 
(Bavard)  (2),  qui  jouèrent  un  rôle  secondaire,  deux 
autres  illuminés  jouèrent  un  rôle  beaucoup  plus  consi- 
dérable auprès  des  Amis  réunis  :  le  marquis  de  Chef- 
debien  (3),  avec  lequel  Lange  finit  par  se  brouiller  par 
suite  de  compétitions  personnelles  et  un  illuminé  autri- 
chien, Kollowrath  (4),  qui  vint  à  Paris  dans  les  derniers 
mois  de  1782  pour  illuminiser  Savalète  et  les  Phila- 
lèthes.  Kollowrath  poursuivait  en  même  temps  un  autre 
but  :  empêcher  tout  rapprochement  entre  les  membres 
des  Amis  réunis  et  ceux  de  la  Stricte  Observance, 
Brunswick,  Hesse  et  Willermoz,  en  particulier.  Kollow- 
rath réussit  dans  sa  mission  et,  le  4  mars  1783,  Savalète 
écrivait  à  Willermoz  :  «  Nous  n'avons  aucun  tort  envers 
vous,  nous  ne  craignons  pas  vos  menaces.  Nous  n'a- 
vons rien  voulu  de  vous  que  ce  que  nous  avons  obtenu  : 
votre  démission.  Lef.*.  de  Lange  et  tous  ses  amis  vous 
permettent  de  dire  et  de  penser  ce  qu'il  vous  plaira  sur 
leur  régime  dont  vous  ne  connaîtrez  rien,  absolument 
rien,  pas  même  son  plan  et  son  objet.  Je  n'aurai  pas  de 


(1)  Bode  (Jean-Joachim-Christophe),  instrumentiste  et  composi- 
teur allemand  (1730-1793),  connu  sous  le  nom  d'Amelius  dans  la 
secte  des  Illuminés  de  Bavière  et  d'Eques  a  lilio  convallium  dans 
la  Stricte  Observance. 

(2)  Busche  (baron  Guillaume  de),  officier  hanovrien  au  service 
de  Hollande.  Une  faut  pas  le  confondre  avec  Durand  Joseph  Busche, 
Procureur  au  Parlement,  officier  du  G.\  0.*.,  suppléant  du  Tiers 
aux  Etats  généraux  pour  Paris  hors  les  murs. 

(3)  Marquis  de  Chefdebien,  François,  —  ancien  chevalier  de 
Malte,  membre  de  la  Stricte  Observance  sous  le  nom  d'Eques  a 
capite  galeato-  Fondateur  du  rite  primitif  des  Philadelphes  de 
Narbonne. 

(4)  Kollowrath-Krakowski  (le  comte  Léopold  de),  président 
d'une  loge  d  adoption  à  Vienne,  était  en  relations  intimes  avec 
Bacon  delà  Chevalerie;  illuminé  de  Bavière  sous  le  nom  de  Numé- 
nius,  il  était  membre  de  la  Stricte  Observance  sous  le  nom  d'Eques 
ab  aqnila  fulgente.  Ministre  d'Etat  autrichien  (1726-1809). 


352  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

peine  à  prouver  votre  ignorance  à  cet  égard  en  publiant 
votre  correspondance,  et  je  le  ferai  pour  me  justifier  aux 
yeux  de  mes  amis,  vis-à-vis  desquels  vous  cherchez  à 
m'inculper.  Je  la  remets  à  sept  membres  de  la  XIIe  classe 
des  Amis  réunis  dont  voici  les  noms  :  d'Héricourt,  de 
Cony,  de  Méry,  Gébelin,  Taillepied  de  Bondy,  qui, 
réunis  au  marquis  de  Ghefde  bien  età  moi,  composent 
cette  réunion  de  six  ou  sept  frères  que  vous  citez  avec 
une  ironie  peu  fraternelle  et  une  insinuation  encore 
moins  charitable  dans  votre  lettre  au  f.\  de  l'Etang. 
Mais  ils  ne  gouvernent  point,  ils  travaillent  entre  eux 
de  bon  accord,  non  pas  à  dominer  les  autres  dans  l'Eu- 
rope, mais  à  s'instruire  eux  et  les  autres  Amis  réunis 
de  leur  classe  dans  le  petit  cercle  où  la  Providence 
divine  les  a  placés.  » 

On  peut  voir  par  cette  lettre  que  la  correspondance 
entre  membres  de  régimes  concurrents  n'était  pas  pré- 
cisément tendre.  Les  relations  fraternelles  cessaient  dès 
que  les  membres  d'un  groupe  craignaient  l'envahisse- 
ment des  membres  d'un  autre  groupe. 

Kollowrath  parti,  Savalète  essaya  de  se  rapprocher  de 
Willermoz  par  l'intermédiaire  du  ducd'Havré-Croy  (1)  > 
mais  ce  dernier  perça  bien  vite  la  tactique  du  chef  des 
Philalèthes  et,  le  10  juin  1783,  il  écrit  à  Willermoz  que 
toute  réunion  des  deux  régimes  à  Paris  serait  la  suppres- 
sion de  la  Stricte  Observance  en  raison  de  l'énorme 
supériorité  du  nombre  des  Philalèthes. 

Ayant  échoué  auprès  du  duc  d'Havre,  Savalète  fait  de 
nouvelles  tentatives  auprès  d'un  autre  ami  de  Willer- 
moz, Millanois  (2).  Celui-ci  écrit,  le  6  juillet  1783,  que 

(1)  Duc  d'Havré-Croy,  colonel  commandant  du  régiment  de 
Flandre-infanterie,  vénérable  de  la  Bienfaisance  à  l'O.  de  Pans, 
membre  delà  Stricte  Observance  sous  le  nom  d'Eques  a  porta  optato. 

(2)  Millanois  (Jean-Jacques-François),  avocat  du  roi  en  la  séné- 


PROFILS    MAÇONNIQUES  353 

Savalète   a   essayé    de   le    circonvenir,   en    diminuant 
l'importance    du    convent  de  Willemsbad    et    en    lui 
déclarant  d'un  ton  prophétique  que  l'enthousiasme  des 
Princes  allemands  ne  durerait  pas.  Puis  brusquement 
il  lui  a  parlé   «   de  son  attachement  avec  une  femme  à 
laquelle  il  tient  fortement,  attachement  qu'il  considère 
comme  licite  ».  Est-ce  encore  MUe  Gran ville?  Est-ce  déjà 
Geneviève  Hatry  ?  Est-ce  une  troisième  ?  Le  13  juillet 
suivant,  Savalète  insiste  sur  l'alliance  des  deux  régimes 
auprès  de  Millanois.  Il  est  prêt,  dit-il,  à  seconder  l'ins- 
tallation de  la  loge  de  la  Stricte  Observance  à  Paris  (la 
L.\  la  Bienfaisance),  si  on  le  laisse  l'installer.    En  ce 
moment  un  autre   illuminé,  le  baron   de   Hillmer  (1), 
influence  fortement  Savalète  et  fait  de  nombreuses  ten- 
tatives  auprès  de  Saint-Martin. 

Le  27  juillet,  Millanois  raconte  à  Willermoz  la  visite 
qu'il  a  faite  à  Auteuil  à  l'amie  de  Savalète  :  «  J'y  ai 
bien  souffert,  écrit-il,  et  je  vous  avoue  que  je  ne  puis 
être  de  l'avis  du  f.\  de  Lange  sur  cette  liaison.  Il  a  eu 
beau  me  dire  que  je  devais  la  regarder  comme  sa  femme 
et  cependant  ne  pas  en  faire  semblant,  je  me  suis  cru 
chez  une  fille,  qui  a  l'entretien  honnête,  j'en  conviens, 
l'esprit  cultivé,  peut-être  des  qualités,  mais  elle  laisse 
entrevoir  sous  cette  écorce  ce  qu'elle  fut  autrefois  (2).  » 
En  1785,  ce  sont  des  histoires  plus  étranges  que  l'on 


chaussée  de  Lyon,  député  du  tiers  de  cette  ville  aux  Etats  géné- 
raux, membre  de  la  Stricte  Observance  sous  le  nom  d'Eques  a 
quatuor  pallis. 

(1)  Baron  d'Hillmer,  baron  du  Saint-Empire,  se  disait  prince 
palatin,  chef  d'un  établissement  (?)  à  Varsovie. 

(2)  D'après  le  ton  de  cette  lettre,  on  doit  croire  qu'il  s'agit  plutôt 
deMll8Grandville  que  de  Geneviève  Hatry.  Signalons,  pour  ne  rien 
omettre,  que  cette  dernière  avait  une  sœur,  qui  s'appelait  préci- 
sément Henriette-Louise,  née  le  15  juillet  1780,  institutrice,  morte 
à  Paris  le  6  août  1832. 

LA   FRANC-MAÇONNERIE.    —  T.  I.  23 


354  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

raconte,  et  le  latin  seul  devrait,  dans  plusieurs  circons- 
tances, braver  les  termes  des  anecdotes  racontées  par  le 
correspondant  de  Willermoz  qui  est  le  f.\  Tieman  (1). 

Nous  avons  dit  que  Savalète  s'occupait  de  médecine 
maçonnique,  nous  allons  voir  comment  il  la  pratiquait  : 
«  Lange  se  perd  tête  baissée,  écrit  Tieman  le  21  mars 
1785  ;  il  a  établi  deux  ou  trois  boutiques  qu'il  dirige. 
Dans  sa  Société  Olympique  il  fait  des  maçons  par  com- 
munication ;  il  y  reçoit  des  femmes,  car  tout  doit  être 
maçon.  De  là,  ne  croyant  guère  au  magnétisme,  il  tra- 
vaille une  jeune  comédienne  de  quatorze  ans  pour  lui 
donner  ses  règles  et  finit  par  coucher  avec  elle.  Tout 
cela  fait  des  disparates  épouvantables.  Le  baron  de 
Gleichen  (2)  me  dit  l'autre  jour  que  la  vérité  est  comme 
un  pucelage  que  tout  le  monde  cherche,  qu'on  juge 
cher,  et  dont  on  dit  en  rougissant  après  l'avoir  attrapé 
que  c'est  bien  peu  de  chose.  Jugez-moi  un  peu,  je  vous 
prie,  ces  chercheurs  (3).  » 

La  maçonnerie,  on  le  voit,  pouvait  conduire  à  de  sin- 
guliers résultats. 

Si  Tieman  s'étonne  de  ka  thérapeutique  de  Savalète, 
il  reçoit  quelques  jours  plus  tard  des  confidences  d'un 
tout  autre  genre  qui  le  surprennent  encore  plus.  Le 
2  mai  de  la  même  année,  il  écrit  :  «  Lange  a  la  fièvre, 
il  croit  en  Dieu  !  » 

Avec  Savalète  de  Lange,  nous  avons  vu  un  genre  de 
maçon  spécial   qui  ne  fut  pas  une  exception.  Avec  lui 


(1)  Tieman  de  Berend  (Frédéric),  Saxon  au  service  de  Catherine  II. 
Il  voyageait  beaucoup  pour  la  Stricte  Observance,  où  il  portait  le 
nom  de  Eques  a  corde. 

(2)  Baron  de  Gleichen  (Charles-Henri),  diplomate  danois  (1733- 
1807),  secrétaire  des  Amis  réunis. 

(3)  La  lettre  est  de  1785  ;  Henriette  Jenny  serait  né  en  1786. 
Ne  serait-il  pas  le  fils  de  la  jeune  comédienne  en  traitement? 


PROFILS    MAÇONNIQUES  .'355 

nous  assistons  à  une  dépression  cérébrale  d'un  genre 
1res  particulier  provoquée  par  des  éludes  hors  de  la 
portée  de  L'intelligence  et  de  l'instruction  de  celui  qui 
s'y  adonne  imprudemment.  Nous  reviendrons  longue- 
ment sur  le  personnage  dans  le  récit  que  nous  ferons, 
dans  le  second  volume,  de  l'organisation  maçonnique 
qui  précéda  la  Révolution  et  dans  l'étude  des  événe- 
ments qui  l'accompagnèrent. 

Après  la  mort  de  Savalète  de  Lange,  on  vendit  aux 
enchères  puhliques  les  papiers  des  Philalèthes  dont  il 
était  demeuré  détenteur,  et  les  instruments  du  labora- 
toire de  chimie  installé  dans  les  annexes  de  la  loge  des 
Amis  réunis  et  qui  avaient  été  la  cause  de  la  mort  de 
l'infortuné  f.\  Duchanteau  (1),  victime  d'une  explo- 
sion. 


(1)  Duchanteau  (Touzay),  peintre.  Professeur  de  Théosophie, 
hébraïsant  et  kabbaliste,  auteur  d'un  calendrier  magique,  disciple 
de  Pasqually,  c'est  lui  qui  avait  initié  le  baron  de  Staël  et  le  duc 
a  Havre-  Croy. 


ÉTAT  DES  LOGES 

EXISTANT  EN  FRANCE  EN   1771 


LOGES  DE  PARIS 


Dans  le  chapitre  V  nous  avons  donné  la  liste  des  loges  de  l'0.\  de 
Paris  par  ordre  de  constitution,  probable  ou  réelle.  Afin  que  le  lecteur 
puisse  retrouver  plus  facilement  l'historique  de  ces  loges,  nous  les  clas- 
serons ici  par  lettres  alphabétiques.  Cette  liste  de  154  noms,  beaucoup 
plus  complète  que  les  listes  publiées  jusqu'à  ce  jour,  n'est  certainement 
pas  définitive.  Je  suis  certain  que,  parla  suite,  on  complétera  mon  travail. 

Toutes  ces  loges  étaient-elles  régulières  ou,  comme  Tondit  en  termino- 
logie maçonnique,  étaient-elles  régulièrement  constituées  ? 

Il  est  impossible,  pour  la  plupart  d'entre  elles,  de  répondre  positive- 
ment. En  effet,  pendant  la  période  qui  précéda  la  formation  du  Grand 
Orient  de  France,  les  pouvoirs  constituants  étaient  aussi  multiples  que 
peu  définis.  La  G'.  L.\  de  France  aussi  bien  que  la  G.*.  L.\  Anglaise  de 
France  était  de  formation  exclusivement  parisienne,  et  les  loges  de  pro- 
vince n'étaient  ni  officiellement  ni  régulièrement  représentées  à  ses 
assemblées.  A  Paris  même,  toutes  les  loges  ne  tenaient  pas  leurs  titres 
constitutifs  directement  de  la  G .  * .  L.  • .  Trois  maîtres  de  loges  et  souvent  deux 
constituaient  parfois  une  nouvelle  loge  de  leur  propre  autorité.  Dans  ces 
conditions,  avant  la  formation  du  G.'.  0.\,  comment  établir  qu'une  loge 
était  régulièrement  constituée  ? 

Lorsque  cette  autorité  administrative  fonctionna,  elle  reconnut  en 
somme,  comme  régulières  dans  le  passé,  toutes  les  loges  qui  consen- 
tirent à  se  placer  sous  son  obédience.  Les  seules  discussions  qui  sur- 
girent furent  relatives  à  la  date  à  laquelle  on  ferait  remonter  les  premiers 
travaux  de  la  loge.  Tous  les  ateliers  avaient  un  intérêt  d'amour-propre 
aristocratique,  et  un  intérêt  matériel  à  reculer  le  plus  possible  la  date  de 
leur  origine,  souvent  au  delà  du  réel  et  même  du  vraisemblable. 
Lorsque  le  G.\  0.\  craindra  la  puissance  en  instance  de  régularisation, 
il  cédera  jusqu'à  admettre  des  patentes  évidemment  fausses,  comme 
celle  de  Gerbier.  Dans  ces  conditions,  nous  avons  cru  devoir  faire  figu- 
rer dans  nos   listes  toutes    les   loges    ayant  fonctionné,  quelle  que  soit 


358  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

l'origine  de  leurs  titres  constitutifs  et  quel  qu'ait  été  par  la  suite  le  ver- 
dict du  Grand  Orient  en  réponse  à  leur  requête. 

AMIS  RÉUNIS 

Nous  réservons  pour  le  second  volume  une  partie  de  l'historique  de  cette 
très  importante  loge  qui  fut  constituée  dans  les  derniers  mois  de  la 
période  que  nous  étudions  dans  ce  volume.  Dans  les  profils  maçonniques 
(biographie  de  Savalète  de  Lange),  nous  avons  déjà  donné  quelques  ren- 
seignements sur  la  fondation  du  groupe  des  Philalèthes,  nous  nous  bor- 
nerons donc  à  faire  ici  la  monographie  purement  matérielle  de  cette  loge. 

Les  Amis  Réunis  furent  constitués  par  la  G.'.  L.  .  de  France  (non  dis- 
sidente) le  23  avril  1771.  Ses  titres  furent  renouvelés  par  le  G.-.  O.'.  le 
25  octobre  1773  pour  prendre  rang  de  la  date  de  sa  première  constitu- 
tion. Je  n'ai  pu  établir  si  la  loge  des  Philalèthes  avait  un  lien  quelconque 
avec  une  loge  ayant  également  pour  titre  les  Amis  Réunis  et  dont  il 
est  parlé  dans  Y  Etoile  Flamboyante  (II,  12)  D'après  Tschoudy,  l'auteur 
de  cet  ouvrage,  un  discours  moral  aurait  été  prononcé  en  comité  le  23 
août  1765  par  le  V.\  F.*.  G.  de  V.,  Orateur  de  la  L.'.  des  Amis 
Réunis.  De  nombreuses  LL.\  se  formaient  par  ia  réunion  de  maçons 
qui  ne  se  faisaient  constituer  en  loge  régulière  que  beaucoup  plus  tard. 
Il  est  possible  que  les  Amis  Réunis  se  soient  formés  de  la  sorte. 

Je  n'ai  pu  trouver  le  tableau  des  membres  lors  de  la  fondation  de  la 
loge;  maisle  tableau  de  1774  que  nous  reproduisons,  en  indiquant  la  qua- 
lité de  fondateur  chaque  fois  que  le  nom  du  membre  le  comporte,  permet 
de  reconstituer  le  personnel  de  la  loge  à  sa  création.  A  ces  noms  il  faut 
cependant  ajouter  tout  au  moins  Niepce  et  Joubert,  qui  en  1773  et  1774 
demandèrent  au  G.\  O.'.  des  certifiats  comme  membres  des  Amis  Réunis. 

Thory  {Acta  Latomorum,  1,109)  nomme  également  Court  de  Gebelin 
et  Baudard  de  Saint-James  parmi  les  fondateurs.  Je  n'ai  trouvé  que 
beaucoup  plus  tard  trace  de  leur  passage  dans  cet  atelier. 

Tableau  du  24  juin  111k 

1.  Charles-Pierre-Paul  Savalète  de  Lange,  G.  du  Très.  Roy.,  maître 
à  tous  grades  Symb.,  fondateur,  Secret.  Ch.  adm.  et  député  de  plusieurs 
L.-.  de  province  Fondateur.  Vén.'.  et  G.',  archiviste.  — 2.  Pierre-Fran- 
çois-Denis Dupleix  Daperles.  ancien  Cons.  au  G.  Cons . ,  Me  Ecoss.  fond .  à 
la  créât.  —  3.  André-Claude  Thiroux  de  Gervillers,  mestre  de  camp  de 
dragons,  chev. 'de  St-Louis,  Me  Ecoss.  associé  libre  à  la  création.  —  4.  Robert 
Deshayes,  anc.  cap.  com. milice  de  la  Guadeloupe  et  Marie  Gaîande,  leur 
député  à  la  suite  de  sconseils  du  Roi,  Me  Ecoss.  fond,  à  la  création.  — 
5.  Hercule  Bn  de  Salis-Séevis,  brig.  des  armées  du  Roi.  cap.  g.  suisses, 
chev.  Mérite  Militaire,  chev  R  +  fondateur  off.  en  exercice  de  la  Chambre 
de  Paris  (+  le  2  juillet  1774).  —  6.  Georges-Etienne  de  Courbeville,  av. 
pari,  ch.  R  -j-  associé  libre,  membre  à  la  création.  —  7.  Desforges  de 
Beaumé,  chevaux-légers  de  la  garde  du  Roi,  m.  fondât.,  membre  à  la 
créaion. —  8.  Etienne  de  Fumars,gouv.  des  enfants  de  M.  le  Marquis  de 
Vérac,  Me  à  la  création.  —  9.  Louis-François  Radel,  architecte  expert 
du   Roi,  Me  membre    à  la    création.   —  10.  Jean-Antoine    Martin,    nég., 


LOGES   DE    PARIS  359 

Me  fondât,  à  la  création.  —  11.  Charles-Denis  Cahouët,  recev.  à  la  Che- 
vrette,M*,  amateUTi  à  la  création. —  12.  Bonaventure-Gervais  Simon  Bazin 
de  la  Répenalière,  médecin  de  Montpellier  et  méd.  ord.du  duc  d'Orléans, 
Mc,  membre  à  la  Création.  —  13.  Nicolas-Joseph-Gabriel  Desforges  de 
Beanmé,  prêtre,  chanoine  de  Laon,  Me  a  donné  sa  démission),  à  la 
création.  —  14.  Maulgué,  Pourvoyeur  du  Roi,  Mc,  Ecoss,  fondât.,  a 
donné  sa  démission  —  15.  DeClermont,  Marquis  de  Tonnerre,  cap.  caval. 
au  reg.  du  Hoi,  M»  à  tous  grades,  fondateur,  grand  introd.d'h.  au  G.-.  O.'. 

—  10.  François-Marie  Griois,  caissier  du  petit  comptant  du  Très.  Koy. 
Mc,  membre.  —  17.  Jacques  Perault,  archit.  Me,  amateur,  ne  vient  plus. 

—  18.  Achille-Edme  Leblanc  de  Pomard,  mousq.  gris,gouv.  du  Pont-Ste- 
Ifaxence,  Lieut.  Maréch.  de  Fr.  Me,  membre. —  19.  Gabriel-François  Cohier, 
aumônier  gén.  caval.  promu  membre  soc.  roy.  Londres,  associé  libre.  — 
20.  ComtedeMarcouville,  chev.  de  St-Louis, cap.  caval.  écoss. retiré.  —21. 
Ch.de  Ramaceuil,chev.de  St-Louis, cap.  caval.  Mc  fondateur, ne  vient  plus. 

—  22.  Pierre-Octave  de  Milleville  baron  de  Lieurayen  Normandie,  Mc  fon- 
dateur.—  23.  Pierre-Nicolas  Autour,  dir.manuf.  roy.des  draps  et  teintures 
Gobelins,  Me  fondateur.  — 24.  Marquis  de  Chambonas,  cap.  rég.  Chartres 
caval.,  Meà  tous  grades  fondât.,  n'a  pas  paru  depuis  6  mois.  —  25.  Jean- 
Laurent  Woulf,  off.  inf.  Ecoss.  membre  exp.  ch.  prov.  —  26.  Alexandre 
Comte  de  Stroganoff,  conseiller  privé,  Chambellan  actuel  imp.  Russie, 
com.  des  ordres  de  l'Aigle  blanc,  de  St-Stanislas  et  deSte-Anne,  Mc  à  tous 
grades,  fondateur,  grande  Garde  d'H.  des  se.  du  G.  O.  —  27.  J.-B. 
Apert  de  St-Rémy,  com.  de  police  à  Metz,  Me  à  tous  grades,  amateur.  — 
28.  Jacques-Elisabeth-Octave  Milleville  deSt-Mart.,  cap.  rég.  roy.  Cham- 
pagne caval.  Me  membre,  a  donné  sa  démission  —  29.  Hubert  Robert, 
peintre  du  roi,  apprenti  associé  libre.  —  30.  Louis  chev.  de  Rool,  ofi.  g. 
suisses  comp.  M*,  vient  rarement.  —  31.  Jean-Louis  de  Salignac  baron 
de  la  Motte-Fénelon,  ofl.  G.'.  0.\  Me  fondateur.  —  32.  Louis-Marie  Era- 
manuel-Maximilien,  marquis  de  l'Aubespine,  col.  inf.,  Ma  membre.  — 
33.  Gabriel  Tassin  de  l'Etang,  off.  des  chasses  du  roi,  Me  fondateur,  dép. 
prov.  au  G.*  O.  .  —  34  Bouret  de  Vezelay,  très,  de  la  guerre,  apprenti, 
fondateur.  —  35.  Louis-Daniel  Tassin,  banquier,  Me  fondateur, 
Très.  G.'.  O.'.  —  36.  Boulongne  de  Preminville,  Très.  extr.  des  guerres 
écoss.,  ancien  fondateur,  a  donné  démission.  —  37.  Jean-François- 
Victor-Auguste  Bollioud  de  Saint-Julien,  rec.  gén.  clergé  en  survivance, 
chev.  R.-f,  fondateur,  dép.  province  au  G.'.  O.'.  — 38.  Antoine-Julien 
Duvivier,  écuyer,  Me  parfait  anglais,  fondateur.  —  39.  Camille  Cusset, 
bourgeois  de  Paris,  Me  fondateur.  —  40.  G. -B. -Sébastien  de  Bréval.  pro- 
fesseur de  violoncelle,  Me  amateur.  —  41.  Pierre-Louis  Moreau,  arch. 
delà  ville,  Me  membre.  —  42.  Jean  Dubourg,  élève  en  archit.,  Me  ama- 
teur. —  43.  Alexandre-César  Fremin,  baron  de  Stonnes,  mousq. 
noir,  Me  membre.  —  44.  Jean  Chiquet  de  Champrenard,  anc.  cons.  au 
Pari,  de  Dijon,  M*'  fondateur.  —  45.  Charles-Dominique  Sulpice  de  Saulx, 
vicomte  de  Tavannes,  col.  rég.  reine  inf.,  Me  fondateur.  — 46.  Adam- 
François  de  la  Mothe.  Bgs.  de  Paris,  Me  membre,  en  voyage  pour  un  an. 

—  47.  Julien  Navoigile,  professeur  de  violon,  Me  amateur,  n'a  pas 
paru  depuis  son  admission.  —  48.  Guillaume  de  Fréval,  cap.  caval., 
Me  à  tous  grades,  fondateur.  —  49.  Cœsar-Louis- François-Marie  Ange, 
vicomte  d'Houdetot,  lieut.  gendarmerie,  Me  fondateur.  —  50.  Aimé- 
René,  comte   de  Mornay,  comp.    associé  libre,  à    Mantes  toute  l'année. 


360  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

—  51.  Louis-Claude  de  Surbeck,  off.  gardes  suisses,  comp.  fondateur.  — 
52.  Charles-Ferdinand-Pascal-Janvier  Stuard,  marquis  de  la  Jamaïque, 
petit  élu  fondateur,  Me  Cérém.*.  G.'.  O.'.  —  53*  Louis-Henri  Maréchal- 
Paisible,  Me  de  musique  deMme  la   duchesse  de  Bourbon,  Me   amateur. 

—  54.     Hoock  de    l'Etang,    cap.    rég.    Custine,  app.    fondateur  libre. 

—  55.  Antoine  Carbonel,  av.  Pari.  Ecoss.,  ass.  libre,  off.  hon.  G.*.  O.'. 
et  doyen.  —  56.  Philippe  Radel,  chirurg.  maj.,  Me  amateur,  parti 
pour  l'Inde.  — 57.  Vicomte  de  Chazeron,  cap.  caval.,  app.  fondateur. — 
58.  Charles-Emmanuel  de  Senecterre,  cap.  caval.  à  son  rég.  app.  fon- 
dateur —  59.  Antoine- Pierre  Le  Tourneur,  mar.  logis  de  l'armée,  Me  fon 
dateur.  —  60.  Jean-François,  abbé  Rozier,  chev.  église  Lyon,  Me  à  tous 
grades,  ass.  libre,  Prés.  ch.  provinces.  — 61.  Bernard-Louis  Verlac  de 
la  Bastide,  av  pari,  écos.,  merab.  —  62.  J.-B.  de  Salcot,  vicomte  de  la 
Blache,  guidon  de  gendarmerie,  app.  fondateur.  — 63.  Alexis,  marquis  de 
Vassé,  cap.  inf.,  app.  fondateur.  — 64.  Jacques-Pierre-Elizabeth  Paquet, 
secr.  de  Savalète  de  Lange,  Me  amateur.  —  65.  Demachy,  apothicaire, 
membre  Ac.  sciences,  Me  à  tous  grades,  ass.  libre  G.\  Arch.\  G.*.  O.*. 

—  66.  Jean-François  De  Méry  d'Arcy,  dir.  de  la  Compagnie  des 
Indes,  Me  à  tous  grades  symb.,  fondateur  Prés.  ch.  adm. 

Tableau  des  officiers   au  25  juin    111k. 

Vén.\,  Savalète  de  Lange  ;  1er  surv.\,  Tassin  l'aîné;  2e  surv.-.,  ba- 
ron de  Salis  (mort)  :  1er  surv.-.,  Bollioud  de  Saint-Julien  ;  1er  subst.-., 
Cusset,  pour  la  classe  des  fondateurs  ;  2e  subst..,  Bazin,  pour  la  classe 
des  membres  ;  3e  subst.'.,  Cohier  pour  la  classe  des  associés  ;  1er  exp.v, 
marquis  delà  Jamaïque  ;  2e  exp.\,  Dupleix  Duperies  ;  secret  *.,  Ta- 
vannes  ;  subst.'.,  Verlac  de  la  Bastide  ;  corn.',  du  secr.*.,  Paquet  ;  Me 
cérém.-.,  Tassin  de  l'Etang  ;  aide  Me  cérém.*.,  Chiquet  de  Champrenard 
fondateur  ;  aide  Mc  cérérn.\,  Autour  membre;  1er  surv.-.,  du  porche, 
Le  Tourneur  ;  2e  surv.-.,  du  porche,  de  Surbeck  ;  G.-,  arch.-.,  Savalète  de 
Lange  ;  G.-,  se.-,  et  timb.-.,  Radel;  G.'.Me  hôtel,  Verlac  de  la  Bastide  ; 
aumônier,  comte  de  Stroganoff  ;  trésorier,  Griois  ;  archit.-  ,  Radel  ; 
s. -arch.'.,  Apert  ;  décorateur,  Dubourg. 

Les  deux  f.-.  suivants  se  sont  engagés  à  remplir  les  fonctions  portées 
au  dernier  chap.  des  règl.  portant  pour  titre  :  des  secours  pour  les 
malades  ;  médecin,  Bazin  ;  apothicaire,  Demachy. 

Musique  :  directeur,  Bréval.  Les  ff. -.  ci-dessous  ne  viennent  en  L.\ 
que  lorsqu'ils  sont  convoqués. 

Harmonie  :  clarinettes.  1.  Gaspard  ;  2.  David  ;  —  cors,  Hébert, 
Morcrt  ;  —  bassons,  Thadée,  d'Argent  l'aîné.' 

Service  :  Me  d'hôtel  de  service,  Derieux. 

Off.*.  seuvans  :  office,  des  Landes  en  chef,  dos  Landes  neveu,  Tri- 
bert  cadet,  Legard  ;  —  cuisine,  Guibert,  chef;  Janniot,  L'archer  et  Le- 
clerc,  aides. 

Concierge,  Guerrier  ;    Servant  hon.,  Jacquinet,  commis  de  l'Ordre. 

D'après  les  Statuts  et  règ.  particuliers  de  la  R.'.  L.\  à  l'O.'.  de  Paris. 
arrêtés  par  délib.  à  l'époque  de  la  Saint-Jean  l'an  de  la  vraie  lumière 
5774,  xvi  et  77  pp.  in-8°,  sans  nom  d'imp. 

En  1776  et  1777  le  vén.\  est  Bollioud  de  Saint-Julien  ;  Savalète  est 
secrétaire  et  le  maître  des  comptes  Le  Long,   son    député    au    G.-.     O.-. 


LOGES    l>K    PARIS  361 

En  1785,  Taillepied  de  Boudy,  receveur  général  des  finance!  Mt:,  rue 
di-  Richelieu,  est  vén.'.  En  1788  et  1789,  il  est  remplacé  par  le  banquier 
Tassin. 

D'après  Us  mémoires  de  Sergent  (J  ),  en  1790,  des  noms  plus  significatifs 
auraient  fait  partie  des  Amis  Réunis.  Je  dois  reconnaître  que  je  n'ai 
trouvé  aucune  trace  des  noms  cités  par  Sergent  ;  je  les  cite  donc  pour 
mémoire  : 

Bailly,  Barnave,  Beauhamais,  Broglie,  Buzot,  Cannes  (Carra),  Dupont 
(de  N.),  Grégoire,  La  Fayette,  les  Lameth,  La  Rochefoucaut,  Le  Chape- 
lier, Le  Pclctier,  Mirabeau.  Monlmorenc}',  Noailles,  Petion,  Talleyrand, 
Flouret  (Thouret). 

Depuis  1788,  la  L.\  avait  pris  une  grande  extension  et  elle  devait 
former  le  groupe  maçonnique  le  plus  important  de  Paris.  D'après  l'ar- 
ticle VII  de  son  règlement  de  1788,  ((  en  décembre  le  bureau  nommait 
deux  commissaires  qui.  réunis  au  vén.*.,  au  trésorier  et  au  contrôleur, 
formaient  une  commission  permanente  )). 

D'après  les  registres  de  délibérations  des  membres  des  5e  et  7e  classes 
du  chapitre,  qui  en  comportait  12,  on  pourra,  se  rendre  compte  de  l'im- 
portance de  ce  groupement.  Sur  ces  registres  on  relève  les  noms  sui- 
vants ; 

Chapitre  5*  classe. 

Savalète  de  L.,  Tassin,  Lelong,  Martin,  abbé  Cohier,  Demachy,  de 
Scrilly,  de  Rlosseville,  Paquet,  Lourdct,  Bollioud  de  Saint-Jullien,  Petit 
de  la  Honville,  comte  de  Stroganoff,  Harvoin,  Pasquier,  Letourneur,  de 
Villiers,  de  Javons,  de  la  Fresnayc,  Lefebvre,  Leroy,  Saint  James,  Petit- 
Deslandes,  Barckaus,  Lourdet  de  Santerre,  de  Mercy.  Millon  d'Ailly,  de 
Pigis,  Choart,  Dubail,  de  Lonlanière,  Guichard,  Bitch,  Anjorant,  Lan- 
glois,  Vilette,  Rover,  Fromains,  Gay,  Millon  d'Anival,  de  Beaune, 
Mariage  (de  Lille),  Douarville,  de  Méry  d'Arcy,  Salivet,  Morin,  Paris, 
marquis  de  Vassé,  Ernick,  des  Entelles,  Lesage,  Taillepied  de  Bondi,  Le 
Carpentier,  des  Chenailles,  Nicolaud  de  Montriblond,  de  Launay,  Ber- 
theaume,  Delahaye,  Otto,  Pinson  de  Menerville,  Chrétien,  André,  de 
Chompré.  Devienne,  Boutroy.de  Paris  la  Brort,  Siedler,  Isnard,  Wurcka- 
lowiez,  Canavas,  Bartsch,  Dassy,  Vaudenj'ver,  Eynaud,  Garnier, 
Barmond,  abbé  de  Barmond,  Blasius  aîné,  Chambreuil,  Costé,  Julien, 
de  Langeron,  Puy  de  Rosny,  Philippon,  Matis,    comte  Séneffe,  Cheriot. 

Chapitre  7e  classe. 

Savalète  de  Lange,  Guimps  fils  aîné,  Langîois,  Villette,  Letourneur, 
Ernest,  Mariage,  de  la  Ferrière,  baron  d'Ogny,  Chevalier  Bouardy,  Gui- 
chard, Paquet,  Taillepied  de  Bondy,  Emiels,  Thiroux  de  Gervillers,  de 
Grandmaison,  Lesage.  baron  de  Saint-James,  Perrière,  Deschevailles, 
Willemot,  Harvoin,  Espell,  Champré,  Boutroy,  Chrétien,  Barckaus,  de 
Meurvillc,    Francœur,   Isnard,    Tassin  de    l'Etang,    Siedler,  de  Javons, 

(l)llcminisccnses  of  a  régicide,  edited  frem  the  original  mst  of  sergent  Marceau  ,by 
If.  C.  M    Simpson,  London. 


362  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Bartsch,  Aujorant,  Bertheaume,  Rivière,  Saint-Charles,  Petit-Deslandes, 
Corbin  de  Pontbriant,  Eynaud,  Martin  de  Blosseville,  Geoffroy,  Dassy, 
Vendenyver,  d'Ailly,  de  Bernières,  Oudet  père  et  fils,  Dubail,  Lelong, 
de  Pigis,  Maschkoff,  Bitch,  Phillippon,  de  la  Noraye,  Parquier,  Doazan 
fils,  d'Orcy,  de  Rosny. 

Les  Amis  Réunis  étaient  encore  en  vigueur  en  1792. 

D'après  un  brevet  donné  le  12  juin  1792  à  Antoine-Gilles  Savin,  com- 
mandant du  2e  bataillon  de  la  l'e  légion  de  la  garde  nationale,  né  à 
Paris  en  1755,  y  demeurant  rue  de  Charonne,  membre  essentiel  et 
Rose-Croix,  les  lumières  des  Amis  Réunis  étaient  Rœttiers  deMontaleau, 
vén.*.  ;  Lesage,  trésorier  ;  Rivière,  orateur  ;  Lesage,  secrétaire  ;  Hur- 
delet,  garde  des  sceaux  ;  et  Laffilard. 

Les  Amis  Réunis  survécurent  à  la  Révolution.  Il  est  même  possible 
que  la  L.'.  ne  soit  pas  entrée  en  sommeil  pendant  la  Terreur.  Sous 
Vempire  elle  eut  pour  vén.*.  Lourdet  de  Santerre,  auteur  dramatique  (1)  ; 
mais  son  importance  était  beaucoup  moins  grande  que  sous  Louis  XVI. 

AMIS  RÉUNIS  DU  BON  ZÈLE 

En  janvier  1787,  un  ancien  vén.-.  du  Bon  Zèle  nommé  Charpentier  fut 
interdit  par  le  G.'.  O.'.  pour  avoir  érigé  une  L.\  de  ce  nom  sous  le 
drapeau  de  la  G.'.  L.*. 

Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

AMIS  DE  LA  VERTU 

Cette  L.-.  fut  constituée  par  la  G.*.  L.*.  le  21  mars  17G5  et  renouvelée 
par  le  G.\  0.\le28  octobre  1774. 

En  1775,  six  membres  de  cette  L.*.  demandent  des  certificats  au  G.-. 
O.'.  :  Huet  du  Plessis,  Prat,  Fournier  le  jeune,  Deslaurieres,  Famin, 
Pyvron  de  Morlat. 

En  1776  et  1777,  son  vén.'.  est  Joubert  de  la  Bourdinière, dessinateur 
et  décorateur,  officier  du  G.'.  O.'.,  rue  Tire-Chape  ;  son  député  au  G.*. 
O.'.  est  l'abbé  Jardin,  officier  adjoint  du  G.*.  O.'.,  rue  Croix-des-Petits- 
Champs,  maison  de  M.  Tack  ;  le  secrétaire  est  un  commis  de  l'amirauté  : 
Soudan,  rue  Saint-Honoré.  Comme  la  plupart  des  LL.*.,  celle  des  Amis 
de  la  Vertu  tint,  le  24  août  1779,  une  assemblée  extraordinaire  pour  célé- 
brer la  fête  du  roi. 

En  1785,  son  vén.'.  était  Groizard,  officier  d'infanterie,  18,  rue  du 
Fouarre. 

En  1788  et  1789,  Groizard  était  remplacé  par  Le  Go,  notaire,  38, 
rue  des  Fossés-Montmartre.  Le  secrétaire  était  Metzinger,  entrepreneur 
des  bâtiments,  16,  rue  Culture-Sainte-Catherine.  Son  député  auG.'.O". 
était  Vaillant  de  Bissy,  entrepreneur  des  illuminations  de  la  Cour,  rue 
de  Coudé. 

Une  L.  ,  du  même  titre  fut  constituée  le  14  juillet  1805  dans  le  local 
<lu  36,  rue  Neuve-des-Petits-Champs. 

En  1808,  le  vén.'.  de  cette  L.'.  était  un  ancien  militaire  nommé  Lalle- 

(1)  Jean-Baptiste  L.  de  S.  (1732-1815),  auditeur  puis  conseiller  en  la  chambre  des 
comptes.  Depuis  1760,  conseiller  du  roi  en  l'hôtel  de  ville. 


LOGES    DE    PARIS  363 

mont,  14,  rue  du  Petit- Lion- Luxembourg,  et  en  1813  et  1814  levén.'.  était 

Hnntier,  ancien  militaire,  17,  rue  de  Tournon. 

Cette  L.\  ne  semble  pas  être  le  réveil  de  celle  de  1765. 

ARTS  SAINTE-MARGUERITE 
Pour  cette  L .'.  i  voirchap.  iv,  p.  123. 

AUMONT 

Pour  cette  L.'.,  voir  chap.  iv,  p.  123. 

Le  13  septembre  1765,  cette  L.'.  installa  à  Paris  la  Constante  Amitié, 
qui  devait  fonctionner  à  Caen.  A  cette  époque,  le  MedeL.'.  était  le  graveur 
Le  Lorrain,  que  nous  retrouvons  en  1773  dans  les  mêmes  fonctions.  Cette 
installation,  par  suite  de  la  délibération  de  la  G.*.  L.'.  de  Fr.  du  10 
septembre  1765,  fut  faite  par  4  commissaires  :  Le  Lorrain,  Pirlet  (de  la 
Trinité  ,  Leroy  (des  Cœurs  Simples),  et  Moet  (du  Secret).  L'extrait  de  la 
délibération  est  signé  par  Zambault,  secrétaire  général  de  la  G.*. 
L.\  etvén.-.  de  Saint-Pierre  et  Saint-Paul. 

BONNE  FOI 

Le  1er  avril  1768  fut  installée  par  la  G.'.  L.".  de  France  une  L.-.  sous 
ce  titre  en  faveur  de  Blain  Me  de  L.'..  Elle  existait  encore  en  1779. 
Elle  ne  reconnut  pas  le  G.*.  O'.  et  disparut  avant  la  Révolution. 

RONNE  FOI   PRIMITIVE 

Cette  L.*.  datant  du  25  avril  1752  ne  fut  reconnue  par  la  G.-.  L.*.  de 
Fr.  que  le  25  janvier  1762.  Son  Me  s'appelait  Le  Monier  ou  Le  Maunier. 
En  1779,  cette  L.'.  n'était  plus  en  vigueur. 

BONNE  INTELLIGENCE 

Installée  le  10  novembre  1760 en  faveur  de  Pettre,Me  de  L.'.,  cette  L.*. 
existait  encore  en  1779.  Elle  disparut  avant  1789.  Elle  n'avait  pas  re- 
connu le  G.",  O.*. 

BONNES  MŒURS 

Cette  L.".  fut  installée  le  23  mars  1760  sous  la  maîtrise  de  Gilet.  Elle 
subsistait  en  1779,  ne  reconnut  pas  le  G.'.  O.*.  et  disparut  avant  la 
Révolution. 

BONS  CITOYENS 

Installée  le  21  décembre  1757  en  faveur  de  Soisson.  Elle  était  en  vigueur 
en  1779,  mais  disparaissait  peu  après.   Ne  reconnut  pas  le  G.'.  O.'. 

BONS  FRÈRES  RÉUNIS 

Cette  L.-.  fut  installée  le  1«  mai  1768  en  faveur  de  Sellier.  Subit  les 
mêmes  vicissitudes  que  la  précédente. 


364  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


BON  ZELE 

Cette  L.\  fut  constituée  par  la  G.'.  L.\  le  17 janvier  1751  en  faveur  du 
maître  Borel.  Les  patentes  furent  renouvelées  parle  G.'.  O.*.  le  21  jan- 
vier 1774. 

Jusqu'en  1773  je  n'ai  relevé  les  noms  d'aucun  membre  de  cette  L.'. 
qui  avait  cependant  une  certaine  importance.  De  1773  à  1775,  des  cer- 
tificats sont  demandés  au  G.'.  O.*.  par  plusieurs  de  ses  membres  :  Ame- 
nil  ;  Arnault  ;  de  Claritte  ;  Clavel  ;  Corregio  :  Daiglancey  ;  Douitton  des 
Sanguins  ;  chev.  de  Froger  ;  Guyot  ;  de  Vaudremont  ;  abbé  Vautrin. 

En  1776  et  1777,  elle  ne  comptait  pas  moins  de  30  membres;  son  vén.\ 
était  Baillot,  Me  fondeur,  rue  du  Harlay,  et  son  député  au  G.'.  O.*. 
Charpentier,  premier  commis  du  Cabinet  de  l'ordre  du  Saint-Esprit,  rue 
Saint-Germain-l'Auxerrois. 

En  1785,  Je  vén.\  était  Froment,  avocat  au  Parlement,  commis  au  ca- 
binet de  l'ordre  du  Saint-Esprit,  au  Pont  au  Change  vis-à-vis  le  café  du 
Méridien.  Son  député,  toujours  le  même,  demeurait  rue  Montmartre  vis-à- 
vis  celle  du  jour.  Charpentier  avait  été  vén*.  de  cette  L.-.  ;  le  15  jan- 
vier 1787  une  circulaire  du  G.".  O.'.  portait  son  interdiction  pour  avoir 
érigé  la  L.'.  des  Amis  Réunis  du  Bon  Zèle  sous  le  drapeau  de  la  G.  '.  L.'. 
de  Fr.  En  1788  et  1789,  le  vén.'.  était  Las  Brugnias,  tailleur,  rue  de  Be- 
thisj',  maison  du  marchand  de  tabac. 

Cette  L.'.,  entrée  en  sommeil  à  l'époque  de  la  Révolution,  ne  fut  pas 
reconstituée  sous  l'Empire. 

Sous  ce  même  titre  une  autre  loge  fut  constituée  par  une  puissance 
inconnue  le  7  janvier  1757. 

BUSSY 

Voy.  chap.  iv,  page  121  et  L.'.  d'Aumont. 

W.  J.  Hughan  cite  le  Saint-James  Evening  Post  du  20  sept.  1735  : 

«  On  écrit  de  Paris  que  Sa  Grâce  le  due  de  Richmond  et  le  Dr  Désagu- 
liers,  ex-G.\  M.',  de  l'anc.  et  hon.  Société  des  M.*,  lib.  et  accept.  munis 
à  cet  effet  d'une  autorisation  signée  du  G.*.  M.-,  et  scellée  de  son  sceau 
ainsi  que  de  celui  de  l'ordre,  ont  convoqué  une  L.*.  à  l'Hôtel  de  Bussy, 
dans  la  rue  de  Bussy.  Etaient  présents  :  S.  E.  le  comte  de  Waldegrave, 
ambass.  de  S.  M  près  du  roi  de  France  ;  le  très  hon.  Prés,  de 
Montesquieu  ;  le  marquis  de  Lomuren  ;  Lord  Dursley,  fils  du  comte  de 
Berkley  ;  l'hon.  Fitz-Williams  ;  MM.  Knight  père  et  fils  ;  le  Dr  Hickam; 
et  plusieurs  autres  personnages  anglais  et  français . 

Les  nobles  et  les  gentlemen  ci -après  désignés  y  ont  été  reçus  dans 
l'ordre  ;  savoir  :  Sa  Grâce  le  duc  de  Kingston  ;  l'hon.  comte  de  Saint 
Florentin,  secret.  d'État  de  S.  M.  très  Chrét.  ;  le  tr.  hon.  Lord  Chewton, 
fils  de    Lord  Waldegrave  ;  MM.  Pelham,  Arminger,  Colton,  Clément. 

A  la  suite  de  la  cérémonie,  les  nouveaux  frères  ont  offert  un  splendide 
banquet  à  toute  la  compagnie.  » 

(Daruty,  p.  88,  donne  la  biog.  succincte  de   ces  divers    personnages.) 

Cette  L.'.  prit  le  nom  du  duc  d'Aumont  après  que  celui-ci  en  fut  nommé 
vén.-. 

Elle  existait  encore  en  1773;  son  vén.*.  était  Le  Lorrain. 


LOGES  DE  PARIS  365 


CANDEUR 


En  1766,  il  y  avait  sous  ce  titre  une  L.\  qui  ne  semble  avoir  eu  aucun 
rapport  avec  la  célèbre  L.'.  de  ce  nom  constituée  en  1775.  (Voy.  chap.  v, 
p.  184.)  La  Candeur  de  17(56  est  citée  dans  un  brevet  de  Beauchaine.  A 
cette  époque  Drothier  était  son   vén.'.  Me  et  Tardieu  son  premier  surv.*. 

CHAMBRE  DU  ROI 

UneL.'.  sous  ce  titre  aurait  été  constituée  le  20  octobre  1745  par  la 
G.*.  L.\  angl.de  France  (à  10*.  de  Paris  ou  de  Versailles  ?).  Elle  était 
composée  des  officiers  attachés  à  la  maison  du  roi.  Parmi  eux  un  aumô- 
nier, plusieurs  capucins,  des  valets  de  chambre  ,des  pages,  des  gardes  du 
corps,  des  officiers  aux  gardes,  etc.  Elle  tenait  note  de  ses  travaux  et 
plusieurs  des  contemporains  de  Besuchet  auraient  vu  son  registre  (Be- 
suchet,  34). 

CHARITÉ 

Le  16  décembre  1754,  fut  constituée  par  un  pouvoir  inconnu  une  L.*. 
sous  ce  titre  en  faveur  de  Magnet.  Cette  L.*.,  en  vigueur  en  1779,  disparut 
peu  avant  ou  pendant  la  Révolution. 

CŒURS  RÉUNIS 

Une  L.\  fut  créée  sous  ce  nom  le  10  avril  1749  en  faveur  d'un  nommé 
Oudin.  Celui-ci  était  mort  avant  1779  et  sa  L.*.  n'était  plus    en  vigueur. 

CŒURS  SIMPLES  et   CŒURS   SIMPLES    DE    L'ÉTOILE    POLAIRE 

Cette  L*.  fut  à  son  heure  une  des  plus  importantes  de  France  ;  pen- 
dant deux  ans  (1775-6)  de  nombreux  off.  du  G.*.  0.\  furent  parmi  ses 
membres.  Le  personnage  important  de  cette  L.'.  était  l'abbé  Pingre,  bi- 
bliothécaire de  l'abbaye  de  Sainte-Geneviève.  A  part  quelques  officiers 
et  quelques  savants,  cette  L.*.  était  surtout  composée  d'hommes  de  loi, 
conseillers  au  Châtelet  ou  au  Parlement,  notaires,  huissiers.:. 

Constituée  parla  G.'.  L.\  le  3  avril  1762,  sous  le  titre  de  Cœurs  Sim- 
ples, ses  titres  furent  renouvelés  le  13  juin  1775  par  le  G.'.  O.'.  sous  le 
titre  de  Cœurs  Simples  de  l'Etoile  Polaire.  Je  n'ai  pu  relever  aucun  nom 
des  membres  de  la  première  période,  si  ce  n'est  celui  de  Leroy,  avocat 
au  Parlement,  son  vén/.  m.*,  en  1773. 

En  1775,  sept  de  ses  membres  demandent  des  certificats  au  G.'.  O.*.  : 
Jeanrat  de  Bertry  ;  Gauthier  de  Glaubry  ;  Jeanrat  ;  de  Marolles  ;  Villiers 
de  la  Noue  :  Villers  de  la  Berge,  et  de  la  Jénière. 

En  1776,  la  L.\  a  32  membres  ;  46  en  1777  au  moment  de  sa  plus  grande 
prospérité.  Pendant  ces  deux  années,  l'abbé  Pingre  est  son  vén.*. 

En  1776,  son  secrétaire  est  Mangiu  fils,  entrepreneur  de  bâtiments,  rue 
Saint-Jean  deBeauvais,  et  son  député,  Mangin  père. 

En  1777,  ce  dernier  est  remplacé  par  le  marquis  deBaroncelly-Javons, 
officier  aux  gardes  rançaises,  off.  G.'.  O.'.,  rue  Neuve-des-Petits- 
Champs,  vis-à-vis  la  compagnie  des  Indes. 


366  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Dans  les  papiers  de  l'abbé  Pingre  (1)  on  trouve  une  convocation  pour 
le  banquet  du  18  février  1783  qui  devait  avoir  lieu  à  11  heures  du  matin 
dans  le  local  ordinaire  de  la  L.'.,  rue  du  Fouarre  et  signée  du  secrétaire 
Chuppin.  A  cette  convocation  on  a  joint  un  tableau  de  la  L.\  que  nous 
reproduisons  ci-dessous  ;  il  ne  comprenait  que  31  noms  : 

Tableau  de  1783. 

Barroci  l'aîné,  libraire,  quai  des  Augustins  ;  Baudeau,  vie.  gén.,  prince, 
évêque  de  Wilna,  rue  Hautefeuille  ;  le  Camus  de  Mézière,  archit  ,  rue  du 
Foin;Chandon  de  Sari,  proc  Chat.,  rue  Beaubourg;  Carel,  pens.  du  roi, 
rue  du  Fouarre  ;  Chuppin  de  Germigny  père,  cons.  Chat.,  rue  Sainte-Mar- 
guerite ;  Chuppin  fils,  av.  Pari.,  rue  Sainte-Marguerite  ;    Combette,  chef 
bureau  fermes, rue  des  Prouvaires  ;  Desmures,  huissier  chambre  de  la  reine, 
rue  Jacob  ;  de  la  Frenaye,  notaire  honor.,  rue  et  île  Saint-Louis;  Foullon, 
cons.  Pari.,    rue  Fossés-du-Temple  ;  de  Germigny  fils,  rue  Sainte-Mar- 
guerite ;  Imbert  de  Lattes,  secret,  chambre  reine,  rue  Bourbon  ;  Javons, 
marquis  de  Baronceli,  off.  rég     gardes,    rue    de    Richelieu  ;  Jeanrat.  de 
l'Ac.  se.  à  l'Observatoire  ;  Le  Febvre,  chan.  régul.  à  Sainte- Geneviève  ; 
Chev.  de    Loménie,    off.  rég.   Dauphin  ;  Millon    père,  cons.    Chat.,    rue 
Saint-André-des-Arts  ;  Millon  fils,  rue    Saint-André-des-Arts  ;  Pean  de 
la  Jennière,  aide    maj.  Hôtel  des  Invalides  ;  Petit  de  la  Honville.  lieut. 
part.    Châtelet,    rue    Saint- Antoine];    Pingre,    chan.     rég.,   rue    Sainte- 
Geneviève  ;    Pinson,   chirurg.,  rue  de  Richelieu  ;  Poncet,  architecte,  rue 
Saint-Etienne-des-Grès  ;    le    Roy  de   Montecly,  av.  Pari.,  rue  de  la  Sor- 
bonne  ;  de    Saint-Cergues,  contrôl.    maison    Madame,    rue   Beaubourg  ; 
Talon,  cons.  Pari.,  rue    Montmorency    au    Marais  ;    Vauviliers,  lecteur 
du  roi,  prof.  roy.   en  langue  grecque   de    l'Ac.    Inscript.   Collège  Royal, 
place  Cambray  ;  Villiers   de  la  Noue,  cons.  Chût.,  rue  des   Tournelles  ; 
Villiers  de  la  Berge,  cons.   Pari.,  rue  des  Tournelles  ;  Villot  de  Fréville, 
lieut.  gén.,  connétable,  rue  Saint-Victor. 

En  1785,  Chuppin  de  Germigny  père,  rue  Sainte-Marguerite  Saint- 
Germain,  est  vén.\,  et  Millon  père  député  au  G.*.  O.'. 

En  1788  et  1789,  l'abbé  Pingre  est  de  nouveau  vén.\  et  l'abbé  Bau- 
deau,  prévôt  mitre  de  Vidzini,  vicaire  général  et  plénipotentiaire  du 
prince  évêque  de  Wilna,  est  député  au  G.*.  O.'.  Cette  L.'.  disparut  à  la 
Révolution  et  ne  fut  pas  remise^en  vigueur  sous  l'Empire. 

CŒURS  UNIS 

Cette  L.'.  fut  constituée  le  7  mai  1765  par  un  pouvoir  inconnu.  Recon- 
nue par  la  G.'.  L.-.  le  28  février  1773,  elle  rentra  sous  l'obédience  du 
G.".  O*.  le  29  mai  1775.  Au  cours  de  cette  dernière  année,  un  de  ses 
membres,  le  sr  de  la  Lolterie,  demanda  un  certificat  au  G.*.  0.\ 

En  1776,  Brard,  Me  en  chirurgie,  est  son  vén.-.,  Lanneau,  rue  de 
Verneuil,  son  secrétaire,  et  Gérard  DuHant,  lieutenant  au  régiment  de 
Flandre,  rue  de  la  Vannerie,  son^député  au  G.'.  O.*.  La  L.  .  avait 
17  membres.  En  1777,  le  vén.-.  est  Jouve,  officier  de  frégate  du  roi, 
rue   des   Fossés- Saint- Victor.  En  1785,    il  est  remplacé    par  Du   Cluzel, 

(1)  Bibl.  Sainte-Geneviève,  3031. 


loc.es  de  paris  'Mu 

premier  commit  aux  vivres  de  la  Marine,  rue  Neuve  tic  Luxembourg. 
Le  député  est   Laudigeois,  négociant  place  Dauphine.  Du  Cluzel  occupa 

Ks  mêmes  fonctions  en  1788  et  1789,  mais  le  député  est  Charité  jeune, 
orfèvre,  22,  rue  aux  Ours. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  les  Cœurs  Unis  reprirent  leurs 
travaux  le  14  mars  1807.  Le  vén.\  était  Verdier-Heurtin,  docteur  méde- 
cin, 05,  rue  Montorgueil.  et  le  député  au  G.*  0.\  Delachenal-Villars, 
employé,  20,  rue  du  Caire. 

Le  30  juin  1812,  d'après  un  brevet  de  maître  donné  à  Etienne  Garnier, 
propriétaire,  né  à  Ville-du  Grand-Lucé  (Sarthe5,  les  officiers  et  membres 
de  la  L.'.  étaient:  Lapierre,  vén.'.  ;  Jobert,  1er  surv.'.;  Jalabert, 
2e  surv.'.  ;  Lcrieux  (?),  garde  des  sceaux  ;  Weidner,  secrétaire  général  ; 
Gudefroy  aîné,  chev.'.  E!coss.'.  ;  Bouvriat,  chev.\  de  l'O.'. 

Lapierre,  5,  rue  des  Lions-Saint-Paul,  employé  à  la  préfecture  de  la 
Seine,  était  encore  son  vén.'.  en  1813  et  1814.  Cette  L.'.,  qui  avait  un 
chapitre,  avait  pour  député  au  G.'.  O.v  Weidner,  licencié  en  droit, 
26,  rue  Poissonnière. 

LA  CONCORDE  et  LA  CONCORDE  FRATERNELLE 

Cette  L.'.  fut  constituée  par  la  G.'.  L.'.  d'Angleterre  sous  le  premier 
titre,  avec  le  n°  109,  le  27  décembre  1743.  Le  21  mars  1764,  la  G,\  L.\ 
de  Fr.  accorda  ensuite  au  f.'.  Richard  la  patente  personnelle  sous  le  titre 
de  Concorde  Fraternelle.  Le  G.'.  0.\  renouvela  les  patentes  le  26  août 
1775  sous  le  premier  titre. 

En  1776,  cette  L.'.  comprenait  37  membres.  Son  vén.*.  était  le 
l)r  Guillotin,  rue  de  la  Bucherie  ;  son  secrétaire,  Fournel,  avocat  au 
Parlement,  rue  des  Bernardins  ;  et  son  député,  Trudon  de  Boiss}', 
notaire,  rue  Montmartre.  Parmi  ses  membres  :  Gilles  et  Faucon.  Trudon 
devenait  vén.'.  en  1777  et  était  remplacé  comme  député  par  Souchu 
de  Rennefort,  greffier  en  chef  du  Grand  Conseil,  cloître  Notre-Dame. 
Ce  dernier  occupait  encore  ces  fonctions  en  1785.  A  cette  époque,  le 
vén.'.  était  l'épicier  de  la  Voypierre,  rue  Mauconseil,  vis-à-vis  le  passage 
Saint-Jacques  de  l'Hôpital. 

Cette  L.'.  disparut  vers  1786  et  ne  reprit  pas  ses  travaux  par  la 
suite. 

CONSTANCE  ET  AMITIÉ 

Sur  cette  L.'.,  qui  existait  en  1766  et  avait  Charles-François  de  Beau- 
chaine  comme  vén.'.  fondateur,  voir  chap.  v,  p.  184. 

CONSTANTE  VÉRITÉ 

Cette  L.'.  fut  constituée  par  un  pouvoir  inconnu,  le  27  décembre 
1751,  en  faveur  de  Joannin.  En  1779,  elle  n'était  plus  en  vigueur. 

DAVID 

Après  avoir  été  une  des  L.*.  les  plus  fréquentées  de  Paris,  en  1776 
elle  n'avait  plus  que  11  membres  et  vers  1779  elle  disparaissait  pour  ne 
plus  reparaître.  Constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  12  décembre  1765,  ses 
patentes  avaient  été  renouvelées  par  le  G.'.  0.\  le  24  janvier  1773. 


368  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1776,  son  vén.*.  était  Baudson,  négociant,  et  son  secrétaire  Pérot, 
négociant  rue  du  Cloître-Saint-Avoye.  Parmi  ses  membres,  en  1775, 
Jean  et  Jérôme  Brun,  Baudson  et  Vols. 

DÉSIR 

Cette  L.'.,  dont  je  n'ai  pu  trouver  la  date  de  constitution,  avait  pour 
vén.*.  en  1788  Parchot  de  Villemouze,  conseiller  au  G.*.  Cons.'.,  84, 
rue  de  la  Verrerie,  et  pour  secrétaire  Février  l'aîné,  négociant,  81,  Chaus- 
sée d'Antin.  En  1789,  ces  deux  fonctions  étaient  remplies  par  Liendon, 
avocat  au  Parlement,  et  Pivet,  chef  des  comptes  des  domaines  du  roi, 
20,  rue  du  Mail. 

Entrée  en  sommeil  à  la  Révolution,  cette  L.*.  ne  se  réveilla  jamais. 

DISCRÉTION 

Constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  15  décembre  1754,  cette  L.\  avait  Doyère 
pour  maître.  Elle  travaillait  encore  en  1779.  A  partir  de  celte  claie,  on 
n'en  trouve  plus  trace. 

DOUBLE  INTIMITÉ 

Constituée  aune  époque  inconnue,  cette  L.'.  disparut  définitivement 
en  1790.  En  1789,  elle  avait  pour  vén.*.  Randon  de  Lucenay,  colonel  de 
cavalerie,  off.  du  G.'.  0.*.,  rue  Taitbout,  et  pour  secrétaire,  Lechauve 
de  Vigny,  13,  rue  de  Grammont. 

ÉGALITÉ 

Cette  L.*.,  constituée  le  29  nov.  1755  par  la  G.'.  L.'.  en  faveur  d'un 
sr  Dessenis,  n'était  plus  en  vigueur  en  1779,  par  suite  du  décès  du  titu- 
laire.  Elle  ne  fut  pas  reconstituée. 

ENFANTS  DE  LA  GLOIRE 

Cette  L.'.  fut  constituée  le  28  octobre  1762  par  la  G.'.  L.'.  en  faveur 
du  comte  de  Choiseul.  D'après  la  patente  d'Etienne  Morin  du  27  août 
1161,  à  cette  époque  son  vén.'.  était  également  le  comte  de  Choiseul, 
G.1.  Elu  Parfait  M.*.,  chev.'.  et  prince  maçon,  etc..  Comme  cette  L.-. 
ne  fut  constituée  que  18  mois  plus  tard,  cet  anachronisme  pourrait  faire 
douter  de  l'authenticité  de  la  patente  d'Et.  Morin.  Les  annuaires  du 
premier  Empire  parlent  des  Enfants  de  la  Victoire  en  sommeil  en  1808  ; 
il  s'agit  probablement  des  Enfants  de  la  Gloire. 

(Voir  sur  cette  L.*.  chap.  v,  p.  183.) 

ÉTOILE  POLAIRE 

Cette  L.*.,  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  Cœurs  Simples  de  l'Etoile 
Polaire,  fut  constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  14  mai  1766.  Le  G.*.  O.".  re- 
nouvela ses  titres  le  21  février  1774.  Je  n'ai  pu  relever  les  noms 
d'aucun  de  ses  membres  avant  1776.  A  cette  époque,  son  vén.'.  était  de 


LOGES    DE    PARIS  369 

Sainte-Croix t  entrepreneur  général  du  pavé  (le  Paris.  Touzct,  procu- 
reur au  Chàtelet,  cloître  Saint-Merry,  était  son  secrétaire,  et  Peyrilhe 
son  député.  En  1777,  son  vén.-.  est  de  Junquières,  écuyer,  procureur  au 
Parlement,  rue  Guénégaud,  et  son  député  Brunot  de  Beyre,  agent  de 
change,  off.  du  G.*.  O.'.,  rue  Saint-Thomas  du-Louvre. 

En  1776,  cette  L.-.  comprenait  vingt  membres  ;  l'année  suivante,  elle 
en  avait  perdu  cinq. 

Eu  1785,  le  vén.'.  est  Chevalier,  négociant,  rue  Perdue,  off.*.  du 
G.".  O.-.,  et  le  député  le  l)r  Mallet,  rue  des  Barres. 

En  1788,  le  vén.'.  est  le  D'  Suc,  le  célèbre  chirurgien,  rue  des  Barres, 
et  le  député  Mandron  de  Vermont,  avocat  au  Parlement,  officier  de  ville, 
off.  .  du  (i  .  O.-.,  rue  de  l'Arbre-Sec.  En  1789,  son  vén.-.  est  Picard, 
procureur  au  Parlement,  off.'.  du  G.'.  O.-.,  rue  de  Seine. 

Cette  L.  .,  entrée  en  sommeil  en  1790,  ne  fut  pas  reconstituée. 

EXACTITUDE 

On  ne  relève  d'indications  sur  cette  L.'.  que  dans  la  patente  d'Et. 
Morin  du  27  août  1761.  Le  vén.'.  était  alors  Brest  de  la  Chaussée  G.-. 
E.\  M.*.  P.\  Ç.  .  P.-.  maç.\  G.-,  élu  Parf.\  M.-.  Chev.\  et  P.\  M.-. 

FÊTE  DE   LA  G.v  L..  DE  LA    TRINITÉ 

Le  16  avril  1758,  la  G.-.  L.1.  constitua  sous  ce  nom  une  L.-.  dont 
Perault  fut  le  vén.*.  m.'.  Cette  L  \  existait  encore  en  1779. 

FRÈRES    CHOISIS 

Sous  ce  titre  fut  fondée  le  23  mars  1760  par  la  G.".  L.'.  une  L.\  dont 
le  vén.-.  m.-,  était  un  citoyen  de  Genève  nommé  Guainard.  En  1773, 
Guainard  était  encore  le  vén.-.  de  cette  L.-.  qui  existait  en  1779. 

GERBE  dite  LA  PROVIDENCE 

Fondée  le  3  juin  1766  par  la  G.*.  L.-.,  cette  L.-.  avait  pour  vén.-.  M" 
Uujy.  Etait  encore  en  vigueur  en  1779. 

GOUSTAUD 

L.\  fondée,  dit-on,  en  1726,  par  un  lapidaire,  originaire  de  Berne, 
d'après  les  «  Procédures  curieuses  de  l'Inquisition,  le  Portugal  contre 
les  Francs-maçons  ».  Son  nom  fut  traduit  en  Angleterre  par  celui  de 
Coastown  et  en  Portugal  par  celui  de  Custos.  Voir  p.  123. 

IIEURECSE    SYMPATHIE 

Cette  L.-.,  constituée  à  une  époque  inconue,  en  1789  avait  pour  vén.'. 
Pernot-Duplessis,  procureur  au  Parlement,  off.-.  du  G.-.  O.-.,  rue  de 
Coudé.  Cette  L.-.  était  de  formation  jacobite. 

D'après  un  brevet  de  1788  donné  à  Nicolas  Pernot  Duplessis 
en    qualité    «    d'affilié    et  reçu    membre   du    chapitre   métropolitain  », 

LA    FRANC- MAÇONNERIE.    —  T.    I.  24 


370  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

auraient  fait  partie  du  chapitre  de  cette  L.*.  :  Gerbier,  G.".-M.\  perpét.-. 
hon.\  ;  Rœttiers  de  Montaleau  ;  Castel,  Rivière  et  Carret,  députés 
du  chap.\,  fondateurs  ;  Castel,  Rivière,  2e  surv.\,  Dejunquiéres, 
orateur  ;  Desveux,  trésorier  général  ;  Canel,  Gaume,  Thénet,  officiers  ; 
Oudet,  chancelier,  garde  des  sceaux  et  archives  ;  de  Vezou,  Demeissen, 
Pantonnier,  de  Saucourt,  Laurent,  Penorel,  Gillet  de  Lacroix,  Sabat, 
membres. 

Cette  L.\  disparut  en  1790  et  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

HUMILITÉ   DES    BONS  CITOYENS 

Fondée  par  la  G.  \  L.\,le  27  décembre  1765,  en    faveur  de    Laugnet, 
vén.\  m.*,  cette  L.\,  n'étaitplus  en  vigueur  en  1779. 

INÉBRANLABLES  CHEVALIERS  DE  L'ÉPÉE  ET  DU  MÉRITE  DE  FRANCE 

Cette  L.\  est  mentionnée  dans  un  brevet  de  Beauchaine  (chap.  v, 
p.  184).  En  1766,  son  vén.\  m.-,  était  Pollett,  major  de  Royal  Deux-Ponts. 

INTELLIGENCE 

D'après  la  patente  d'Et.  Morin  de  1761,  cette  L.\  avait,  à  celle 
époque,  pour  vén.\  m.*,  le  prince  de  Rohan,  souv.".  prince  de  la  M.'. 

LOUIS  DARGENT 

Pour  cette  L.'.,  qui  fut  constituée  parla  G.'.  L.\  d'Angleterre,  le  7 
mai  1729,  en  faveur  de  Le  Breton  et  qui  est  souvent  désignée  sous  le 
titre  de  Saint-Thomas  au  Louis  d'Argent,  voir    ebap.  iv,  p.  118. 

MAGDELEINE 

Cette  L.\  fut  constituée  par  la  G.\  L.-.,  le  10  mars  1749,  en  faveur  du 
vén.'.  m.'.  Leveillé.  Elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

NOBLE  ET  PARFAITE  UNION 

Cette  L.".,  constituée  par  une  puissance  inconnue,  le  15  mai  1761,  eut 
ses  pouvoirs  renouvelés  par  la  G.*. -L.*.  le  28  septembre  1772  et  par  le 
G.'.-O.'.le  14  mars  1774. 

On  ne  trouve  pas  trace  des  noms  de  ses  membres  fondateurs 

De  1776  à  1789  son  vén.'.  était  Gerbier,  médecin  de  Monsieur,  rue 
Saint-Victor,  et  son  secrétaire  Fleury,  avocat  au  Parlement,  rue  des 
Saints-Pères.  En  1776,  elle  se  composait  de  26  membres  parmi  lesquels  : 
le  marquis  et  le  chev.\  de  Matharel,  le  comte  de  Fienne,  Morel  de  la 
Verderie,  Marion,  Beaudu,  abbé  Muguet,  marquis  de  Brice,  Henri,  chev. 
de  Chauvigny,  chev.  de  Brisson,  Kosictzki,  Milly  de  La  Croix,  Quille 
de  Vauratier,  marquis  de  Haunoy  et  de  la  Salle. 

Cette  L.\  disparut  définitivement  en  1791. 

NOTRE-DAME  DE    BON-SECOURS 

Cette  L.'.,  constituée  à  une  époque  inconnue  par  une  puissance  in- 
connue, n'a  laissé  aucune    trace. 


LOGES    DE    PARIS  371 


PAIX 


En  1773,  il  y  avait  une  L.\  sous  ce  titre,  aj'ant  pour  vén.\  Méry 
d'Arcy,  directeur  de  la  Compagnie  des  Indes. 

PAIX  IMMORTELLE 

La  G.\  L.\  créa  sous  ce  titre  un  atelier  le  25  octobre  1750,  en  faveur 
du  vén.'.  ni.'.  Paris.  Cette  L.'.  était  en  vigueur  en  1779. 

Une  L.'.  sous  le  même  titre  fut  constituée  par  le  G.\  O.*.  le  15  sep- 
tembre 1804. 

Le  4  novembre  1805,  ses  membres  étaient  invités  à  se  réunir,  le  23 
à  4  h.,  à  son  temple  ordinaire,  rue  du  Vieux-Colombier,  n°  8,  au  ci-de- 
vant couvent  de  la  Miséricorde,  pour  fêter  les  victoires  des  armées  fran- 
çaises. 

La  convocation  était  signée  :  Lafon,  vén.".  ;  d'Houdan,  l,rsurv.\  ;  Hen- 
riette, 2e  surv.'.  ;  Langlois,  orateur  ;  Petitclair,  secrétaire  ;  Aumelas, 
Me  des  banquets,  13,  rue  Caumartin. 

Lafon,  officier  du  G.*.  0'.t  fut  vén.*.  jusqu'en  1813.  En  1814,  il  est 
vén.*.  d'hon..,  et  le  vén.'.  en  titre  est  Quelen,  employé.  Son  député  au 
G.'.  O.'.  est  Lefol  jeune,  commis  marchand  de  bois,  quai  Saint-Bernard. 

PARFAITE  TEMPÉRANCE 

Lexcombartfut  le  vén.'.  m.*,  de  cette  L.'.,  constituée  parla  G.*.  L.'.  le 
17  décembre  1758.  Elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

PERSÉVÉRANCE 

Cette  L.'.,  constituée  le  21  décembre  1757,  par  la  G.'.  L.*.,  avait  pour 
vén.'.  m.*.  Servant.  Elle  fonctionnait  encore  en  1779. 

PHILANTHROPIE 

Cette  L.'.,  probablement  la  même  que  celle  qu'on  appelle  Philanthro- 
pique, fut  fondée  à  une  époque  inconnue  par  une  puissance  inconnue. 
En  1788  et  1789,  elle  avait  pour  vén.'.  l'abbé  Barbier  de  Saint-Preux, 
professeur  de  géographie,  rue  de  Jérusalem,  et  pour  député,  Compagnon, 
marchand,  rue  des  Petits -Augustins.  Disparut  définitivement  vers  1790. 

PARFAITE  HARMONIE 

Dans  la  patente  d'Et.  Morin  de  1761,  cette  L.'.  est  indiquée  comme 
étant  celle  de  Morin. 

RÉUNION    DE   SAINT-MARTIN 
Cette  L..,  créée  à  une  époque  inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAGESSE 

D'après  un  brevet  de  Beauchaine  (chap.  v,  p.  184),  en  1766,  cette  L.'. 
avait  pour  vén.'.  m.'.  Lucet. 


372  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


SAGESSE  DES  PARFAITS   MAÇONS 

Sous  ce  titre,  la  G.\  L.\  créa,  le  17  janvier  1759,  un  atelier  en  faveur 
du  vén.*.  m.-,  du  Houssay.  Elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

SAGESSE,  SAINT-EDME  ET  SAINT  LOUIS  DES  AMIS  RÉUNIS 

Il  fut  fondé  le  4  février  1767  une  L.\  sous  ce  titre  parla  G.*.  L".  en 
faveur  du  vén.-.  m.-.  Vallée.  Elle  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-ALPHONSE 

D'après  la  patente  d'Et.*.  Morinde  1761,  il  existait  à  cette  époque,  sous 
le  titre  de  Saint-Alphonse,  une  L.\  dont  le  vén.*.  m.-,  était  Daubertin. 
Grand  Elu,  parf.-.  maç. '.,  chev.\  prince  maç.\,  G.',  secret.",  de  la 
G.*.  L.'.  et  du  Sup.\  Cons.  .  des  princes  parfaits  maçons  de  France. En 
1773,  Daubertin  était  encore  vén.-.  de  cette  L.-.  C'est  la  même  que  SAINT- 
ALPHONSE  DES  AMIS  PARFAITS  DE  LA  VERTU  ;  elle  avait  été  con- 
stituée par  la  G.-.  L.'.  le  23  mars  1760,  sous  le  titre  de  Saiut-Al 
phonse.  Ces  titres  furent  renouvelés  par  la  même  puissance  le  1er  dé- 
cembre 1771.  C'est  le  21  mars  1781  seulement,  lorsque  le  G.-.  0.'. 
renouvela  ses  patentes,  qu'elle  prit  le  titre  de  Saint-Alphonse  des  Amis 
parfaits  de  la  vertu. 

De  1785  à  1789,  son  vén.  *.  fut  Jamart,  sous-chef  des  domaines,  rue 
Saint-Etienne,  à  la  Villeneuve.  En  1785,  son  député  fut  Pignier,  huissier 
commissaire  priseur,  cul-de-sac  Ferou  ;  en  1788  et  1789,  ce  fut  Messein, 
directeur  des  comptes  des  messageries  royales,  off.'.  du  G.'.  O.*.,  rue 
de  Bouloy. 

Cette  L.*.,  entrée  en  sommeil  en  1791,  reprit  ses  travaux  sous  l'empire. 
De  1806  à  1814,  elle  eutpour  vén.'.  Le  Graverend,  employé,  rue  Cassette, 
et  pour  député  Desages,  employé  au  ministère  du  Grand  Juge,  35,  rue 
Grange-Batelière. 

SAINT-ANDRÉ 

Deux  L.-.  furent  créées  sous  ce  titre  :  la  première  par  une  puissance 
jacobite  (peut-être  Charles-Edouard),  le  1er  février  1747,  en  faveur  du 
vén.-.  m.'.  Gantelme  qui  mourut  avant  1756. 

La  seconde  fut  constituée  parla  G.'.  L.-.  le  25  janvier  1756,  en  faveur 
de  Thibault  qui  mourut  avant  1766  ;  d'après  un  brevet  de  Beauchaine 
(chap.  v,  p.  184),  en  1766  le  vén.*.  m.-,  était  Percheron.  En  1779  elle 
n'était  plus  en  vigueur. 

SAINT-ANTOINE   DES  RONS  AMIS 

La  L.*.  créée  sous  ce  nom  à  une  époque  inconnue  par  une  puissance 
inconnue  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-ANTOINE  DE  LA    DISCRÉTION 

La  G.-.  L.*.  fonda  uneL.-.  sous  ce  titre  le  25  novembre  1766  en  faveur 
du  vén.'.  m.'.  Poussard.  Cette  L.-.  fonctionnait  en  1779. 


LOGES    DE    l'A  1US  373 

SAINT-ANTOINE  DE  LA   FRANCHI-:  LIBERTÉ 

Cette  L.\,  fondée  le  9  juin  1764,  et  qui  était  encore  en  vigueuren  1779, 
avait  Bore]  pour  vén.\  m.*. 

SAINT-ANTOINE  DES   PARFAITS  CHEVALIERS  D'ORIENT  RÉUNIS 
De  date  et  d'origine  inconnues,  cette  L.\  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-ANTOINE   DE    LA   PERFECTION 

En  1773,  de  Carbonnel,  avocat  au  Parlement,  était  vén.\  d'une  L.\ 
portant  ce  titre. 

SAINT-AUGUSTIN,  dite  LES    FRÈRES  CHEVALIERS  DE  MINERVE 

On  n'a  aucune  trace  de  cette  L.\,  dont  la  date  de  fondation  et  l'origine 
sont  inconnues. 

SAINT-  CHARLES 

La  G.\  L.\  fonda,  le  31  mai  1762,  une  L.\  sous  ce  titre  en  faveur  du 
vcn.\  m.'.  Bigaré.  Cette  L.\  existait  en  1779. 

SAINT-CHARLES  DES  AMIS  RÉUNIS 

Cette  L.\,  constituée  le  20  décembre  1763,  par  une  puissance  inconnue, 
fit  reconnaître  ses  titres  par  la  G.'.  L.*.  le  20  novembre  1772  et  par  le 
G.-.  CV.  le  24  janvier  1773. 

En  1766,  elle  n'avait  que  12  membres  ;  son  vén.  *.  était  Lafin,  intéressé 
dans  les  affaires  du  roi.  et  son  secrétaire  Barbier,  négociant,  rue  Beaure- 
paire.  Parmi  ses  membres  :  Linger  le  jeune,  Barié,  Dutertre  de  Belle- 
Isle,  Lebon,  Chabouillé,  Lauroy,  Bongart,  Marin  et  Valade. 

En  1779,  figuraient  :  Trudon  des  Ormes,  notaire,  rue  Saint-Antoine, 
Paulmier,  notaire,  rue  Saint- Victor,  et  J.  Jolly,  procureur  au  Parlement, 
rue  des  Barres. 

De  1785  à  1889,  son  vén.'.  est  Duluc,  horloger  du  comte  d'Artois,  rue 
Saint-Dominique,  off.\  du  G.*.  0.\ 

Cette  L.\  ne  survécut  pas  à  la  Révolution. 

SAINT-CHARLES  DES   FRÈRES  DE  LA  BONNE  UNION 

Fondée  par  la  G.-.  L.\  le  7  mars  1771  en  faveur  du  vén.*.  m.".  Lobet, 
cette  L.\  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-CHARLES   DE   LA  PARFAITE  ESPÉRANCE 

Cette  L.'.,  fondée  à  une  date  inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-CLAUDE  DE  LA  FAMILLE  UNIE 

Fondée  à  une  date  inconnue,  cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 


374  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

SAINT-CLAUDE,  fille  DE  SAINT-MARTIN 

Fondée  le  10  juin  1762  par  la  G.-.  L.\  en  faveur  du  vén.v  m.*.  Magnien, 
cette  L.\  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-CLÉMENT.  -  SAINT-CHARLES 

Cette  L.\  fut  fondée  le  12  décembre  1762  parla  G.'.  L.'.  en  faveur  du 
vén.*.  m.*.  Maurion.  En  1779  elle  fonctionnait  encore. 

SAINT-ÉTIENNE   DES  FRÈRES  UNIS 

Cette  L.*.  fut  constituée  le  24  décembre  1758  par  la  G.'.  L.'.  en 
faveur  du  vén.*.  M.'.  Guillet.  Elle  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-ÉTIENNE  DE  LA  PERSÉVÉRANCE 

Cette  L.".,  fondée  à  une  époque  inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-FIDÈLE 

C'est  en  faveur  du  vén.".  J.\  Buquet  que  la  G.'.  L.'.  fonda  cet  atelier 
le  25  octobre  1749.  Le  f.\  Buquet  étant  mort,  celte  L.'.  ne  fonctionnait 
pas  en  1779. 

SAINT-FRANÇOIS 

Cette  L.-.  fut  constituée  le  15  décembre  1754  en  faveur  du  vén.-.  m.-. 
Guillot.  Elle  fonctionnait  en  1779. 

SAINT-FRANÇOIS  [DE   LA   PARFAITE  UNION 

Cette  L/.  d'origine  inconnue  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-FRÉDÉRIC 

Le  11  mai  1757,  la  G.-.  L.'.  constitua  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Martin 
une  L.'.  sous  ce  titre.  Elle  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINTE-GENEVIÈVE 

Fondée  par  la  G.\  L.'.  le  24  décembre  1758  en  faveur  du  vén.1.  m.*. 
Ledin.  Elle  fut  reconstituée  par  le  G.'.  O.*.  le  24  janvier  1778.  Ledin, 
officier  chez  le  roi,  rue  Neuve-Saint-Augustin,  était  encore  vén.'.  de  cette 
L.*.  en  1785.  En  1788,  elle  était  en  sommeil.  Elle  ne  reprit  jamais  ses  tra- 
vaux. 

SAINT-GEORGES 

D'origine  inconnue,  cette  L".  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINTE-HÉLÈNE  ET    SAINT-LOUIS  RÉUNIS 
Cette  L.".  n'a  pas  laissé  de  traces. 


LOGES    DE    PARIS  «57f> 


SAINT-HENRI  ET  SAINT-MARTIN 

Fondée  le  11  juin  1769,  en  faveur    de  Pcny  fils,    par  la  G.*.  L.\,    cet 
atelier  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-IIILAIRE 

Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-JACQUES  DES  AMIS  INTIMES 
Cette  L.  .  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-JACQUES  DE  LA  PAIX  IMMORTELLE 
Cette  L.\  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-JACQUES  DES  PARFAITS  CHEVALIERS  DE  L'ORDRE 

Fondée  le  7  mars  1771  par  la  G.*.  L.*.  en  faveur  du  vén.\  m.*. 
Fouquet  ;  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT- JEAN  DES  AMIS  DE  LA  VÉRITÉ 

Constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  24  novembre  1750  en  faveur  du  vén.\ 
m.-.  Journalle  ;  existait  encore  en  1779. 

SAINT-JEAN  RAPTISTE 

Cette  L  \  fut  fondée  le  17  mai  1746  en  faveur  du  vén.\  m.".  Coûteux. 

En  1788  et  1789  son  vén.\  était  Blanchet,  receveur  aux  domaines,  10, 
rue  Thévenot,  son  secrétaire  était  Selincart,  mercier,  426,  rue  Saint-Denis, 
et  son  député  Villete  de  la  Mussélerie,  agent  de  change,  off.'.  du  G.« 
O.'.,  27.  rue  de  Grenelle-Saint-Honoré. 

Celte  L.'.  disparut  pendant  la  Révolution  et  ne  reprit  jamais  ses  tra- 
vaux. 

SAINT-JEAN  DE  LA  DISCRÉTION 

Dans  un  recueil  de  chansons  de  1752,  il  y  a  une  épître  dédicatoire  à 
Mr  I.\  L.\  C.'.,  très  vén.\  m.",  de  la  L.".  de  Saint-Jean  de  la  Discrétion, 
par  L.  " .  C.".,  orateur  de  la  susdite  L.*.  Dans  ce  recueil  on  relève  les  noms 
suivants  :  Dr  Procope,  Ricaut,  de  Lansa,  de  la  Tierce,  Naudot. 

SAINT-JEAN  DE  LA  FIDÉLITÉ 

Fondée  le  10  mai  1767  par  laG.\  L.\  en  faveur  du  vén.\  ra.\  Tricot, 
cette  L.-.  fonctionnait  en  1779. 

SAINT-JEAN  DE  JÉRUSALEM 

C'est  dans  cette  L.'.  qu'aurait  été  délivrée  la  patente  d'Et.  Morin  en 
1761  (voy.  chap.  v,  p.  185> 


376  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

D'après  Daruty,  les  statuts  de  cette  L.*.,  composés  de  44  articles, 
scellés  du  sceau  mystérieux  de  la  L.-.  écoss.'.  en  cire  rouge  avec  des  fils 
d'or  et  d'azur,  auraient  été  publiés  le  4  juillet  1755  sous  le  titre  :  «  Statuts 
dressés  par  la  R.\  L.'.  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  à  l'Orient  de  Paris 
gouvernée  par  le  T.\  H.*,  et  T.\  P.\  seigneur  Louis  de  Bourbon,  comte 
de  Clermont,  prince  du  sang  G.'.  M.\  de  toutes  les  L.\  régulières  de 
France  pour  servir  de  règlement  à  toutes  celles  du  royaume.  » 

Dans  sa  Bibliothèque  particulière  (n°  9  du  catalogue),  le  G.".  0.\  pos- 
sède une  copie  «  des  premiers  travaux  maç.\  de  la  L.-.  de  Saint-Jean 
de  Jérusalem,  dite  Nationale  lors  de  sa  prétendue  érection  en  G.'.  L.*. 
de  France  sous  le  titre  de  G.-.  Ov.  de  France  »  ;  cette  copie,  qui  doit 
provenir  des  papiers  de  la  G.-.  L.-.  de  France,  est  simplement  la  repro- 
duction des  procès -verbaux  des  réunions  préparatoires  et  des  premières 
séances  du  G.'.  O.'. 

Cette  L.'.  fut  reconstituée  en  faveur  d'un  marchand  nommé  Jeanty  par 
la  G/.  L.\  le  3  janvier  1779.  Ce  Jeanty  était  encore  vén.\  de  cette 
L.\  en  1813  et  1814  (14,  rue  Poissonnière).  Le  député  était  à  cette  époque 
un  receveur  des  rentes  nommé  Rozier. 

SAINT-JEAN  DE  LUXEMBOURG 

Cette  L.'.  ne  fait  pas  double  emploi  avec  la  L.-.  de  ce  nom  à  l'O.*. 
d'un  régiment  de  Hainaut,  car  elle  fut  créée  par  la  G.-.  L.".  en  1751  en 
faveur  du  vén.\  m.\  Potet.  En  1779  elle  n'était  plus  en  vigueur. 

SAINT-JEAN  DE  LA  SINCÉRITÉ 
Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-JEAN  DE  LA  TRIPLE  UNITÉ 

Dans  le  recueil  de  chansons  publié  en  1752,  il  est  fait  mention  (p.  122) 
d'un  couplet  composé  par  un  frère  de  cette  L.'. 

SAINT- JOACHIM 

Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-JOSEPH,  611e  DE  SAINT-ÉTIENNE 

Créée  le  11  juin  1769  par  la  G.'.L.*.  en  faveur  du  vén.*.  m,*.  Cornut. 
En  vigueur  en  1779. 

SAINT-JOSEPH  puis  SAINT-JOSEPH  DE  LA  FRANCHISE 

Le  10  mars  1762,  la  G.'.  L.\  constitua  une  L.'.  sous  le  titre  de  Saint- 
Joseph.  Les  titres  furent  renouvelés  par  le  G.-.  O.'.  sous  le  même  titre 
le  10  février  1774,  et  sous  le  titre  de  Saint- Jean  de  la  Franchise  le 
22  septembre  1779. 

En  1776,  cette  L.*.  comptait  36  membres.  Son  vén.'.  était  Huit,  pein- 
tre, rue  Saint-Germain-l'Auxerrois  ;  Ory,  limonadier,  1er  surw .  et  député, 
devint  vén.'.  en  1777.   En  1785,  c'est  encore    un   Ory,    receveur   de    la 
Loterie,  rue  Saint-Denis,  qui  est  vén.'.  Maratraj-,  avocat  au  Parlement 
rue   Saint-Germain-l'Auxerrois,  est  député. 


LOGES   DE    PARIS  377 

SAINT-JULIEN   DE  LA    TRANQUILLITÉ 

Cette  L.\  fut  constituée  le  25  avril  17.")1  par  la  G.'.  L.\  et  ses  pouvoirs 
furent  renouvelés  par  le  G  \  0.\  le  2  juillet  1774.  En  1770,  eette  L.-. 
comptait  16  membres.  Elle  fut  présidée  en  1770  et  1777  par  Coconier, 
orfèvre,  rue  de  Montmorency,  et  de  1785  à  1790  par  Coconier,  filigra- 
niste  du  roi,  rue  Jean-Robert. 

Cette  L.  .  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

SAINT-LAZARE,  -  ÉQUITÉ,  -  CONTRAT   SOCIAL 

Cette  L.'.  eut  de  nombreux  avatars.  Son  importance  fut  considérable. 
Nous  aurons  dans  le  2e  volume  à  faire  l'historique  de  la  L.\  d'adoption 
qu'elle  s'était  annexée  et  dans  le  3e  volume  nous  aurons  à  revenir  longue- 
ment sur  sa  réinstallation  de  1807. 

La  constitution  primitive  de  cette  L.\  remonte  au  30  mars  1760.  Elle 
portait  le  titre  distinctif  de  Saint- Lazare,  du  nom  de  son  vén.\  fondateur 
qui  fut  Lazare  Philibert  Bruneteau,  directeur  d'une  maison  d'éducation 
militaire  pour  la  jeune  noblesse.  S'il  faut  en  croire  le  catalogue  Tross 
(27  mars  1863},  dans  lequel  figurent  tous  les  papiers  de  cette  L.\  antérieu- 
rement à  1700,  elle  aurait  existé  sous  le  nom  de  l'Equité  et  sa  constitution 
du  30  mars  1766  n'indique  que  la  date  de  sa  reconnaissance  par  la  G.\ 
L.".  de  France. 

En  1770,  pendant  le  sommeil  de  la  G.'.  L.-.,  Saint-Lazare  demanda  et 
obtint  de  nouvelles  constitutions  de  la  mère  L.'.  écossaise  de  Marseille, 
qui  les  lui  délivra  sous  le  titre  de  Saint-Jean  d'Ecosse  du  Contrat  Social. 
Néanmoins  le  9  octobre  1772  elle  rentre  sous  l'obédience  de  la  G.*.  L.*. 
qui  le  21  janvier  1773  lui  redonne  son  ancien  titre  de  Saint-Lazare. 
Mais  peu  après  elle  reprend  ses  constitutions  écossaises  nationales  et  son 
titre  de  Contrat  Social  ^4  mai  1774).  Le  21  janvier  1776,  elle  est  reconnue 
par  le  G.'.  O.-.  sous  le  titre  de  Saint-Lazare.  Le  2  août  1776  elle  se 
qualifie  M.'.  L.'.  écossaise  de  France,  et  le  5  mai  suivant  elle  se  fait 
installer  parla  G.'.  L.'.  écossaise  du  Comtat-Venaissin  sous  le  titre 
de  :  Saint-Jean  d  Ecosse  du  Contrat  social.  M.\  L.'    écoss.    de  France. 

Le  G.-.  O.*.  dès  le  21  mai  refusa  de  la  reconnaître  comme  M.".  L.'. 
Le  Contrat  social,  espérant  forcer  la  main  au  G.-.  O.".,  s'entendit  avec  la 
M*.  L.'.  du  Comtat-Venaissin,  et  le  18  août  1776  cette  autorité  s'incor- 
pora à  elle  en  lui  transmettant  tous  ses  droits. 

Bien  que  le  Contrat  social  ne  cherchât  à  se  faire  reconnaître  par  le  G.". 
O.*.  que  comme  L  \  symb.\,  le  9  décembre  suivant,  le  G.'.  O.".  lui 
enjoignit  de  ne  plus  fonctionner  comme  M.'.  L  *.  sous  peine  de  radiation. 
A  cette  menace  la  M.*.  L.\  le  27  décembre  nomma  La  Rochefoucauld 
Bayer  G.-.  M/,  et  le  baron  de  Brommer  Subs.  G.\  M.\ 

La  lutte  se  prolonge  en  pourparlers  pendant  près  de  deux  ans.  Le 
18  mai  1778,  le  G.\  O.'.  la  raie  de  la  liste  des  L.'.  régulières.  Le  5  juillet, 
le  Contrat  social  adresse  un  mémoire  justificatif  à  toutes  les  L.*.  de 
France.  Le  19  juin  1779,  elle  adresse  un  deuxième  mémoire.  Si  beaucoup 
de  L.\  prennent  son  parti,  elle  a  contre  elle  la  puissante  autorité  des 
empereurs  d'Orient  et  d  Occident.  Le  10  décembre  le  G.\  O.*.  aj^ant 
confirmé  sa  radiation,  elle  adresse  le  15  aux  LL.-.  de  France  une  lettre 
circulaire  que  nous  reproduisons  d'après  celle  adressée  à  la  L.'.  Saint- 
Amiable  à  l'0.\  de  Riom  : 


378  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


TT.\  CC.  FF.'. 

Sensibles  comme  nous  devions  l'être  aux  marques  d'amitié  que  nous 
avons  reçues  du  plus  grand  nombre  des  RR.\  LL.'.  de  France  et  de  la 
vôtre  en  particulier,  par  la  planche  tracée  que  vous  nous  avez  fait  la 
faveur  de  nous  adresser,  en  date  du  6e  jour  du  9e  mois  del'an  de  laV.'. 
L.'.5778,  nous  aurions  désiré  vous  en  témoigner  plustôt  notre  reconnais- 
sance, et  vous  donner  des  marques  authentiques  de  notre  attachement 
et  de  notre  tendresse  fraternelle.  Notre  malheureuse  affaire  avec  le  G.'. 
O.'.  les  incidens  qu'elle  a  fait  naître,  des  circonstances  particulières 
nous  ont  tellement  occupés  jusqu'ici,  qu'obligés  continuellement  de  nous 
défendre  ou  de  pourvoir  à  des  affaires  urgentes,  nous  avons  été  dans 
l'impossibilité  de  satisfaire  le  désir  le  plus  cher  à  nos  exurs.  Nous 
voyons  arriver  avec  la  plus  grande  satisfaction  le  temps  heureux  où 
dans  le  sein  de  la  paix  nous  pourrons  nous  occuper  uniquement  de  nos 
travaux  et  de  l'amitié  de  nos  FF.'.  C'est  dans  cette  viie  que  nous  travail- 
lons à  construire  un  temple  durable,  digne  de  la  majesté  du  G.'.  A.",  de 
l'Univers,  autant  qu'il  nous  est  possible  de  le  faire,  et  dans  lequel  nous 
serons  bien  empressés  de  recevoir  ceux  des  membres  de  votre  R.\  L.\ 
que  leurs  affaires  conduiront  dans  notre  O.-.  et  qui  voudront  bien  nous 
faire  la  faveur  de  nous  visiter. 

Si  nous  avions  pu  avoir  quelque  doute  sur  la  bonté  de  notre  cause,  ce 
doute  aurait  été  dissipé,  TT.*.  CC.'.  FF.*., par  la  planche  tracée  que  vous 
avez  publiée  en  notre  faveur.  Défendus  par  vous,  devions-nous  avoir  la 
plus  légère  crainte  ;  et  nos  raisons  ne  devaient-elles  pas  être  du  plus 
grand  poids  auprès  des  autres  L.\  L.\  de  France,  lorsqu'elles  étaient 
présentées  par  vous,  avec  toute  la  franchise  de  la  vérité  et  toute  la  force 
de  l'éloquence?  Aussi  nous  croyons  vous  devoir  en  grande  partie  le  juge- 
ment favorable  du  plus  grand  nombre  des  ateliers,  et  nous  vous  prions 
d'être  bien  persuadés  de  toute  notre  reconnaissance. 

Sans  doute  TT.'.  CC  '.FF.',  vous  aurez  vu  l'imprimé  que  le  G.'.  O.'. 
vient  de  publier  contre  nous,  dans  lequel  il  a  prétendu  répondre  à  notre 
premier  mémoire  et  justifier  l'arrêté  de  la  Chambre  de  Paris.  Nous 
avons  cru  devoir  y  faire  une  réponse  qui  sera  la  dernière  de  notre  part. 
Il  n'y  a  que  trop  longtemps  que  notre  L.'.  est  occupée  de  discussions 
fâcheuses.  Elle  soupire  plus  que  jamais  après  le  repos  et  la  tranquillité. 
Quelque  soit  son  sort  relativement  au  G.'.  O.-..  il  sera  toujours  bien  heu- 
reux tant  qu'elle  conservera  l'amitié  de  votre  R.\  L.\  et  tant  que  vous 
voudrez  bien  agréer  les  sentiments  les  plus  tendres  et  les  plus  fraternels 
avec  lesquels  nous  avons  la  faveur  d'être  P.*.  les  S.".  N.\  M.\  C".  et 
C*.  P.\  N.\ 

TT/.  CC.'.  FF.'. 

Vos  très  humbles  et   très  affectionnés  serviteurs  et  FF.'. 
Les  FF.',  de  la  M.\  L.\  E.\  de  l'Or,  de  Paris. 

F.  La  Rochefoucauld  Bayer. 
Lafisse,  orateur. 

Par  mandement  :  De  Leutre,  secrétaire  >J<  S.  V.  M.  S. 
Scellé  par  nous  garde  des  sceaux  : 

dUrre. 


LOGES   DE    PARIS  370 

Enfin  un  concordat  intervient  le  5  novembre  1781.  La  M.*.  L.\  re- 
connaît la  suprématie  cln  G.*.  0.*.  et  renonce  à  son  titre  dnns  sa  cor- 
respondance avec  celte  autorité,  mais  elle  le  conserve  à  l'égard  des 
ateliers  qu'elle  a  constitues,  elle  renonce  a  constituer  de  nouvelles  L.\ 
sur  le  territoire  français,  mais  conserve  celte  prérogative  pour  l'étran- 
ger.   Par  contre,    elle  pourra  partout  affilier  aux  hauts  grades. 

ESn  principe,  la  M.'.  L.%  écoss.'.  professe  la  Mac.',  hermétique 
d'Avignon  avec  des  modifications  dans  le  degré  d'instruction  ;  elle 
adopte,  en  1778,  six  degrés  que  lui  emprunte  l'Académie  des  Vrais 
Maçons  à  1*0.'.  de  Montpellier. 

Ce  régime,  qui  était  l'œuvre  du  chirurgien  Alexandre  Boileau,  fut  mo- 
difié peu  après  par  son  auteur  en  vertu  des  pouvoirs  que  lui  conférèrent 
les  G.'.  M.',  des  LL.\  unies  de  la  Basse  Saxe,  de  la  Pologne  prussiennei 
de  la  Livonie  et  delà  Courlande(ll  juillet  1776).  Boileau  est  nommé  G.'. 
sup.\  nat.*>  des  LL.'.  et  Ch.\  réunis  du  rég.  écoss.  philos.de  France  avec 
pouvoir  de  créer  un  Tribunal  chef  d'ordre  et  des  tribunaux  suffragants 
dont  les  membres,  sous  le  titre  de  G.*.  Insp.\  Corn.'.,  sont  chargés  du 
maintien  du  dogme  et  de  la  haute  administration  du  rite. 

Le  20  janvier  1777,  la  M.'.  L.\  condamne  le  grade  de  Chev.\  du 
Temple  et  tout  ce  qui  a  rapport  au  système  templier,  et  néanmoins 
adopte  le  s3'stème  de  la  Stricte  Observance. 

En  1780,  le  baron  Grant  de  Blaerfindy  est  autorisé  à  fonder  en  France 
une  Académie  des  Sublimes  Maîtres  de  l'Anneau  Lumineux  dans  lequel 
on  accepte  l'hypothèse  de  Pythagore  comme  fondateur  de  la  f.*.  m.". 

Cette  Académie  est  fondée  au  Contrat  social,  et  Grant  communique  ses 
grades  à  Bommart,  maire  de  Douai. 

Le  17  octobre  1783,  Boileau  crée  un  G.*.  Chap.*.  métrop.'.  écoss.'.  et 
un  tribunal  de  GG.\  Insp.\  Corn.',  chefs  d'ordre  en  France  qu'il  souche 
à  la  M  .  L.\  Boileau  se  démet  alors  de  son  titre  de  G.*,  sup.".  nat.\  en 
faveur  du  baron  de  Brommer  qui,  élu  président  du  tribunal,  constitue 
7  tribunaux  suffragants  dans  les  LL.'.  suivantes  :  Parfaite  Union,  Ov. 
Douai;  Parfaite  Amitié,  O.'.  Puy  Laurens ;  Sagesse  et  Union,  Ov.  Tou- 
louse; Père  de  Famille,  0.*.  Angers  ;  Amitié  et  Fraternité,  0.\  Dunker- 
que  ;  Elèves  de  Thémis,  O.'.  Anvers  ;  Paix,  O.'.  Bruxelles. 

En  dehors  des  grades  symboliques,  les  M.*.  L.\  confèrent  7  hauts 
grades. 

Le  nombre  des  L.\  constituées  par  la  M.\  L.\  écoss.  est  très  impor- 
tant : 

1777  :  22  mai,  Saint-Alexandre  d'Ecosse  de  l'Indulgente  Amitié, 
O    .  Barbezieux  ;  11  mai,  Mystères  d'Hermès,  O.'.  Naples. 

1778  :  8  mars,  Vertu,  0.\  Issoudun  ;  18  avril,  Fidélité,  Ov.  Gênes; 
26  août,  Parfaite  Union,  O.*.  Mâcon. 

1779  :  24  mars,  Tendre  Accueil,  0.\  Glanfeuil  ;  24  mai,  Amis  de  la 
Vertu,  Ov  Tours;  16  août,  Zélée,  0.\  Bayonne  ;  27  nov.,  Olympique, 
0.\  Paris. 

1780  :  lr  mars,  Saint-Jean  de  Palestine,  0.\  Paris;  20  mai,  Parfaite, 
O.*.  Nantes. 

1782  :  Saint-Alexandre  d'Ecosse,  0.\  Paris;  21  octobre,  Saint-Jean 
d'Ecosse  de  Jérusalem,  O.'.  Lyon:  31  oct.,  Frères  Réunis,  O.'.  Perpi- 
gnan^? nov.,  Constance,  O.  .  Aix-la-Chapelle. 

1783  :  15  février,  Frères  Choisis,  0.\    Saint-Pierre  de   la    Martinique, 


380  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

S 

Etoile  Polaire,  0.\  Abbeville,  Saint-Jean  de  Sully,  O*.  Saint-Flour; 
2  avril,  Parfaite  amitié,  O.-.  Reims,  Triple  union,  O.-.  Reims; 
31  juillet  :  Vrai  Zèle,  0.\  Auxerre;  23  octobre,  Trois  Frères  réunis,  O.*. 
Versailles. 

1784  : 3  mars,  Parfaite  union,  O.  .  Douai;  24  juin,  Amateurs  de  la 
Sagesse,  O.'.  Marseille,  Frères  réunis,  O.'.  Tournai. 

1785  :  26  avril,  Humanité,  0.\  Petit  Goave  ;  Unanimité,  O.*.  Saint- 
Dominique  ;  Patriotisme,  O.'.  Versailles;  20  juillet,  Amitié,  O.'.  Be- 
sançon. 

1786  :  21  juin,  Espérance,  0.\  Turin. 

1787  :  11  avril,  Serpent  d'V.irain.  O.-.  Cassel  ;  14  mai,  Vraie  Lumière, 
0.\  Palerme  ;  11  juin,  Héroïsme,  O.'.  Cie  Ecossaise  des  Gardes  du  Roi  ; 

1788  :  23  juin,  Père  de  famille,  O.*.  Angers;  15  septembre,  Choix 
des  hommes,  O.'.  Jacmel. 

En  1773,  Bruneteau  était  encore  vén.\ 

En  1776,  le  Contrat  social  comprenait  36  membres  et  le  vén.'.  était 
le  comte  de  la  Galissonnière,  colonel  commandant  du  régiment  de 
Flandre,  rue  du  Cherche-Midi.  Le  secrétaire  était  Des  François,  inter- 
prète du  roi,  rue  du  Colombier,  et  son  député  le  marquis  de  La  Salle. 

En  1779,  le  comte  de  la  Rochefoucauld  Bayer  était  vén.'.  G.\  M.\ 
En  1785  il  céda  le  maillet  au  baron  de  Brommer,  chev.  du  Mérite,  rue  du 
Haut-Moulin.  Le  secrétaire  était  De  Leutre  et  le  député  l'abbé  Bertolio. 
Ces  deux  derniers  conservèrent  leurs  fonctions  jusqu'à  la  fermeture  de 
la  L.\  en  1791.  En  1788,  le  vicomte  de  Gand,  grand  d'Espagne  de  pre- 
mière classe  et  mestre  de  camp  commandant  le  régiment  de  Champagne- 
infanterie,  présida  la  L.\  et  ne  se  retire  qu'à  son  entrée  en  sommeil. 

Dès  1788,  la  M.*.  L.\  entra  en  désaccord  sinon  en  lutte  avec  les 
membres  avancés  de  la  f.'.-m.'.,  en  particulier  avec  Nicolas  Bonneville. 
Son  livre  sur  les  Jésuites  chassés  de  la  f.'.-m.*.  fut  brûlé  dans  la  salle 
des  Pas  Perdus  de  la  rue  Coq-Héron  où  se  trouvait  le  local  de  la  L.\ 
Néanmoins  la  M.-.  L.\  prit  unepart  active  aux  débuts  de  la  Révolution, 
mais  ceux  de  ses  membres  qui  n'émigrèrent  pas  furent  vite  désillu- 
sionnés. Après  le  drame  de  Varennes,  il  faut  reconnaître  que  cette 
M.*.  L.1.  eut  le  courage,  et  à  cette  époque  c'était  presque  de  l'héroïsme, 
d'envoyer  une  circulaire,  le  16  juillet  1791,  aux  chapitres  qui  reconnais- 
saient son  autorité,  pour  leur  conseiller  le  respect  de  la  Constitution  et 
«  le  plus  entier  dévouement  au  roi  Louis  XVI,  légitime  souverain  ». 

Peu  de  jours  après,  le  31  juillet,  l'abbé  Bertolio,  son  grand  orateur, 
demanda  la  suppression  des  travaux.  Les  réunions  cependant  eurent 
lieu  jusqu'en  septembre,  époque  à  laquelle  elle  cessa  tous  travaux. 
Elle  ne  devait  les  reprendre  qu'en  1801,  sous  le  titre  de  Saint- Alexandre 
d'Ecosse,  ainsi  que  nous  le  verrons  dans  le  troisième  volume. 

D'après  le  catalogue  de  Tross  déjà  cité,  les  annuaires  du  G.\  0.\, 
l'historique  de  Daruty  et  divers  brevets,  j'ai  réuni  une  liste  de  167 
membres  qui  fréquentèrent  cette  L.\  de  1773  à  1791.  Cette  liste  doit 
être  presque  complète  : 

Achet  ;  Auriol  ;  Aigremont  (d')  ;  Attigny  (d')  ;  Aigrefeuille  (d'  ; 
Artaud  (chev.)  ; 

Brommer  (baron  de)  ;  Bertolio  ;  Bruneteau  fils  ;  Bruneteau  père  ;  Boil- 
leau  chirurgien  ;  Burard;  Beaurepaire  (Chacheré  deN  :  Blaërfîndy  (Grant 
baron  de)  ;    Beyerlé;  Balbi  ;  Bertrand  ;    Brunoy  ;    Bonvallon  ;   Bignon  ; 


LOGES    DE    PARIS  381 

Boizat  sculpteur  :  Belle-Isie  (de)  ;  Bar  (de)  ;  Brongnard  (architecte)  ; 
Busoni  ;  Belizard  (architecte)  ;  Beaurain  (de)  ;  Beauvallei  ; 

Court  de  Gcbclin  ;  Chabrier  ;  Chambrun  (de)  ;  Crussol-Montausier 
(Viclor  de);  Chelard  ;  Chahanais  ;  Cosnac;  Clermont- Tonnerre  ;  Cordier  ; 
Chaix  ;  Charbonnel  ;  Clapier  ;  Chcflbnlainc  ;  Chuteauncuf  'marquis   de)  ; 

De  Leutre  ;  Des  François  ;  Dubuissonnais  ;  Dagraindcs  Hubats  ;  Dolo- 
micu  (comte  de)  ;  Dufour  (Armand)  ;  Dessaiu,  libraire  ;  Duvergcr  ;  Du- 
coudray  ;  Du  Fa}'  ;  Dupuy-Montbrun,  abbé  ; 

Elcho  Lord)  ;  Eschenauer,  banquier  à  Strasbourg  ;  Floquet  ;  Fitz 
Gerald  ;  Fleury  (de)  ;  Foulquier  ;   Frist  ; 

Gand  (vicomte  de)  ;  Guérin  de  la  Madeleine  ;  Gruet-Villeneuve  ; 
Golwin  ;  Ghendt  (de),  graveur  ;  Grammont  (marquis  de)  ;  Grimaldi 
(Antoine),  prince  de  Monaco  ;  Grammont-Caderousse  ;  Grasse  Tilly  (de)  ; 
Guillotiu  ;• 

Harmand  ;  Hour(Frcd,  comte  de)  ;  Imbert  ;  Jacquetot  ;  Jones  (Paul)  ; 
Krumpholz  ; 

La  Rochefoucauld  Bayer  ;  Le  Sage  (Gaspard)  ;  La  Gâche  (Louis)  ; 
Laubée  ;  Lecourt  ;  La  Galissonnière  (comte  de)  ;  La  Salle  (marquis  de)  ; 
Lafisse  ;  Lenoir  ^Alexandre)  ;  La  Tour  d'Auvergne  (prince  de)  ;  Luxem- 
bourg (duc  de)  ;  Lowendal  ;  Lucajr  (de)  ;  Lanneau  de  Marcy  ;  La  Garde 
(Hughes  de)  ;  La  Garde  (marquis  de)  ;  Lamarre  (de)  ;  Lambert  du  Fresne  ; 
Lal'ayctte  (marquis  de)  ;  Latouche  (de)  ;  Laïs,  chanteur  ;  Lœwenstein 
(de)  ;  La  Roche-Aymon  (de);  La  Roche-Lambert  ;  Lavalette  (de)  ;  La 
Borde  ;  Labarte  ;  Ledru  ;  Legendre  ;  Lisle  (de)  ;  Longueval  (de)  ; 

Milleville  (vicomte  de  ;  Montausier  ;  Moreau  (architecte)  ;  Méon  ;  Murât; 
Monlblanc  (de)  ;  Massieux  ;  Miromesnil  (de)  ;  Martens  (comte  de)  ;  Mon- 
talembert;  Massiac  ;  Menou  (de)  ;  Muratori  ;  Mauroy(de)  ;  Montchal(de)  ; 
Mestre  (de)  ;  Montesquiou  ;  Morel  ;  Nicmyriez  (Henry),  colonel  àea 
troupes  de  Pologne  ; 

Panckouke  (Placide)  ;  Pommei*elle  (abbé)  ;  Pelé  ;  Pescheloche  ;  Preville 
deN  ;  Pasquier  ;  Pontavice  (de)  ;  Pestalozzi;  Petrowiski  (Rob.)  ;  Pesche- 
loche (de)  ; 

Rossignol  (Antoine)  ;  Rosset  ;  Robineau  de  Beauvoir;  Ranson  ;  Radel, 
arch.  ;  Rozières  (baron  de)  ;  Rousseau  ; 

Starinsk  (comte)  ;  Sacchini  ;  Segur  (vicomte  Alexandre  de)  ;  Saint- 
Jean  ;  Sauvage,  peintre  ;Santerre;  Stein  (comte  de)  ;  Saint-Germain  (de)  ; 
Saint-Paul  ;  Saint-Georges  (chev.  de)  ; 

Troubat  de  la  Salle  :  Thory  ;  Tulou  ;  Trémont  (de)  ;  Trudon  ;  The- 
ralle  ; 

Urre  (d')  ;  Vismes  (de)  ;  Vaux  (vicomte  de)  ;  Vernet  ;  Villaret  (de)  ; 
Villeneuve  (de)  ;  Wiehorsy  (comte  de). 

SAINT-LOUIS  DU  BON  ACCORD 
Cette  L.v  n'a  laissé  aucune  trace. 

SAINT-LOUIS  DES  CŒURS  UNIS  PAR  EXCELLENCE 

Fondé  le  4  juillet  1754  par  la  G.-.  L.\,  cet  atelier  avait  pour  vén.'. 
m.\  Boitcl  et  fonctionnait  encore  en  1779. 


382  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

SAINT-LOUIS    DES   CROISADES 

La  G.\  L.\  fonda  le  27  juillet  1758  cet  atelier  en  faveur  du  vén.. 
m.'.  Danthiaux.  En  vigueur  en  1779. 

SAINT-LOUIS  DE  LA  DISCRÉTION 
Cette  L.'    n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-LOUIS  DE  LA  MARTINIQUE  DES  FRÈRES  RÉUNIS 

Cette  L.".  fut  une  des  plus  importantes  de  Paris  à  partir  de  1785.  Les 
écrivains  maçonniques  prétendent  qu'elle  n'interrompit  pas  ses  travaux 
pendant  le  cours  de  la  Révolution.  Créée  le  11  janvier  1761  par  un  pou- 
voir inconnu,  elle  fit  renouveler  ses  titres  par  la  G.*.  L.*.  le  11  dé- 
cembre 1772  et  par  le  G.\  Cv.  le  5  juillet  1774- 

En  1776,  elle  comprenait  50  membres.  A  cette  époque  et  jusqu'en  1779, 
elle  eut  pour  vén..,  Poupard,  menuisier,  rue  des  Arcis,  puis  rue  Saint- 
Merry.  En  1776  et  1777,  son  député  était  Aubry,  bonnetier  à  l'abbaye 
Saint-Germain-des-Prés.  Parmi  les  membres  :  Lemonnier.  Ses  députés 
furent  ensuite  :  en  1785,  Alexandre,  premier  clerc  de  Silly,  notaire, 
rue  Saint-Honoré  ;  et,  à  partir  de  1788,  Brazon,  procureur  au  Parlement, 
rue  des  Prêtres-Saint-Germain-l'Auxerrrois.  Cette  L.*.  comprenait  un 
chapitre  depuis  le  25  mars  1785. 

Le  7  août  1805,  elle  inaugura  son  nouveau  temple  au  ci-devant  Châ- 
telet.  Le  vén.'.  Komarzewski,  avant  de  le  purifier,  lut  une  invocation  au 
grand  Arch.  de  l'Univers.  Les  Annales  (I.  176)  donnent  les  détails  de 
cette  fête .  A  cette  époque,  l'orateur  était  Pierre. 

En  1806  et  1808  elle  eut  pour  vén.*.,  Pierre,  chef  de  division  à  la  Pré- 
fecture, 20,  rue  Cassette.  Le  député  de  laL.-.  était  Fourquier,  receveur 
de  l'Enregistrement,  28,  rue  du  Cherche-Midi,  et  le  député  du  chapitre 
Gandillaud. 

En  1813  et  1814,  Rauzet,  employé,  25,  rue  de  Bouloy,  est  vén.'.  et 
Ramboz,  imprimeur  en  taille-douce,  député  de  la  L.\  et  du  chapitre. 

SAINT-LOUIS    LES    INSÉPARARLES 

Cette  L.*.,  créée  le  21  septembre  1763  en  faveur  de  Xerckove,  existait 
encore  en  1779. 

SAINT-MARTIN 

Cette  L.*.  fut  fondée  le  7  mai  1729  ?  par  un  pouvoir  inconnu,  en  faveur 
de  Peny  père.  Cette  L.*.  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-MATHIEU  DE  LA  PARFAITE  UNITÉ 
Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-NICOLAS  DE  LA   CONSTANCE  ÉPROUVÉE 
Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  de  traces. 


LOGES   DE   PARIS  383 


SAINT-NICOLAS  DES    DEUX  AMIS 

Cette  L.\,  fondée  le  19  février  1759  par  In  G.*.  L.\,  en  faveur  du  vén.'. 
m.'.  Poulet  (résidant  à  Tours),  fonctionnait  encore  en  1779,  présidée  de- 
puis lo  22  novembre  1773  par  le  vén.1.  ni.-.  Hérault. 

SAINT-PHILIPPE 

Créée  le  24  février  1751  par  la  G.\  L.\,  en  faveur  du  vén.*.  m.*,  comte 
de  Noailles,  elle  fonctionnait  en  1779. 

SAINT-PIERRE  DES  AMIS  INDISSOLUBLES 
Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-PIERRE  DE  LA  BONNE  FOI 

Fondée  le  20  avril  1760,  par  la  G.1.  L.\,  en  faveur  du  vén.1.  m.*.  Bru- 
net,  était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT- PIERRE  DU  PARFAIT  ACCORD 

Cette  L.1.  fut  constituée  le  4  novembre  1764  par  la  G.*.  L.'.,  et  d'a- 
près Rebold,  elle  n'aurait  été  constituée  que  le  17  septembre  1780  par  le 
G.\  0.\  Elle  n'a  laissé  aucune  trace  avant  la  Révolution. 

De  1802  à  1806,  il  y  eut  une  L.*.  sous  ce  titre  qui  avait  pour  vén.'.  Le- 
bidois,  tablettier,  75,  rue  Saint-Martin.  En  1806,  elle  n'était  plus  en  vi- 
gueur. 

SAINT-PIERRE  SAINT-PAUL 

Cette  L.\,  constituée  en  1729  en  faveur  de  Puisieux,  avait  pour  vén.'. 
m.\  le  13  septembre  1765,  Zambault,  secrétaire  général  de  la  G.".  L.*. 
En  1779,  elle  n'était  plus  en  vigueur. 

SAINT-PIERRE  DES  VRAIS  FRÈRES 

Constituée  le  24  juillet  1768,  par  la  G.*.  L.*.,  elle  fit  renouveler  ses 
titres  par  le  G.*.  0.'.  le  6  décembre  1773. 

De  1773  à  1776,  son  vén.*.  fut  Maugean  père,  bourgeois  de  Paris  ;  son 
secrétaire  était  Murge,  rue  Saint-Honoré,  et  son  député  Maugean  fils  ;  elle 
ne  comptait  que  19  membres. 

De  1777  à  1785,  son  vén.*.  fut  de  Drancy,  écuyer,  rue  du  Temple,  puis 
rue  Neuve-Saint-Laurent,  et  son  député  Joly,  directeur  des  droits  du 
Roi,  rue  Vieille-du-Temple. 

En  1788,  elle  était  en  sommeil  :  elle  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

SAINT- PRUDENT 

Créée  par  la  G.'.  L..,  le  27  avril  1755,  en  faveur  du  vén.".  m.'.  Robi- 
neau.  En  1779,  ce  vén.*.  était  mort  et  la  L.*.  en  sommeil. 


384  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

SAINT-PRUDENT   dite  ÉGALITÉ 

Cette  L.'.,  qui  succéda  peut-être  à  la  précédente,  fut  constituée  le 
21  juin  1767,  par  la  G.\  L.*.,  en  faveur  de  Regnard.  Etait  en  vigueur 
en  1779. 

SAINT- REM  Y 

Cette  L.\  fut  créée  en  1757  par  la  G.\  L.-.,  en  faveur  de  Herbin.  Ce 
vén.\  m.*,  étant  mort,  elle  fut  peut-être  remplacée  par 

SAINT-REMY  DES  VRAIS  FRÈRES  RÉUNIS 

En  1773,  le  vén.-.  m.\  de  cette  L..  était  Joubert  delaBourdinière.  Elle 
disparut  avant  la  Révolution  et  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

SAINT-SIMON  DE  LA  BIENFAISANCE 
Cette  L.#.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-SIMON  PATRIARCHE   DE  JÉRUSALEM 

Créée  par  la  G  .'.  L.*.  le  11  février  1771  en  faveur  du  vén.-.  Hamel  ; 
était  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-SIMON  SAINT-MARCEL 

Cette  L.'.,  constituée  le  8  février  1748,  en  faveur  de  Liégeois,  n'était 
plus  en  vigueur  en  1779,  son  vén.'.  m.',  étant  mort. 

SAINT-SPIRE,  SAINT-MARTIN  DES  FRÈRES  DE   L'AIMABLE  UNION 

Cette  L.'.  fut  fondée  le  11  juin  1769  par  la  G.\  L.-.  en  faveur  de  Le- 
roy et  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-THOMAS 

Il  y  eut  plusieurs  L/.  sous  ce  titre  et  il  est  difficile  de  les  discerner. 
(Voy.  chap.  iv,  p.  118).  Lorsqu'une  L.\  changeait  de  maître,  elle  chan- 
geait parfois  de  nom,  et  de  plus,  s'il  n'y  avait  pas  cession  régulière 
de  maîtrise,  le  nouveau  maître  faisait  renouveler  ses  titres  par  l'autorité 
qu'il  reconnaissait.  C'est  probablement  pour  ces  raisons  que  la  G.'.  L.\ 
constitue  les  titres  de  cette  L.\  le  29  mai  1744  en  faveur  d'un  nommé 
Decourt,  qui  était  encore  titulaire  en  1779. 

D'après  la  patente  d'Et.  Morin  en  1761,  Chaillon  de  Jonville,  substitut 
général  de  l'ordre,  chef  des  grades  éminents,  commandeur  et  sublime 
prince  du  royalsecret,  aurait  été  vén/.  m.*,  de  la  première  L.\  de  France 
Saint- Antoine  appelée  Saint-Thomas  (sic). 

SAINT-THOMAS  DE  LA  TRINITÉ 

Cette  L.\  fut  créée  le  28  avril  1776  par  la  G.\  L.\  en  faveur  d'Hamo- 
nis.  Etait  en  vigueur  en  1779. 


LOGES    DE    PARIS  )>8."> 


SATISFAITS 


Créée  le  18  février  1759  par  la  G.\  L.\  en  faveur  de  Pradier,  cetle 
L.\   a'était  plus  en  vigueur  en  1779  par  suite  du  décès  de  son  vén.'.  m.-, 

SCIENCES 

Cette  L.'.  aurait  été  fondée  vers  1766  par  Helvétius.  Elle  ne  fut  régu- 
larisée par  la  G.\  L.\  de  France  qu'après  bien  des  difficultés  et  après 
la  mort  de  son  fondateur  (26  décembre  1771).  En  1773,  son  vén.\  était 
Jérôme  de  La  Lande.  Elle  n'a  jamais  figuré  sur  les  listes  du   G.'.  O.-. 

SECRET 

Cette  L.'.  fut  fondée  en  faveur  de  Moret  par  la  G.".  L.\  le  27  septembre 
1753.  Elle  fonctionnait  encore  en  1779. 

SINCÉRITÉ 

D'après  un  brevet  de  Beauchaine  (chap.  v,  p.  184).  En  1768,  le  vén.'. 
de  cette  L.\  était  Dutertre. 

SINCÉRITÉ  DE  SAINT-JEAN 

Cette  L.'.  fut  créée  le  17  janvier  1756  par  la  G.'.  L.\  en  faveur  du 
vén.'.  ro.*.  la  Valnière.  En  vigueur  en  1779. 

SOCRATE  DE  LA  PARFAITE  UNION 

Cette  L.\  fut  fondée  le  17  juillet  1766  par  Bourgeois  ;  elle  ne  fonc- 
tionnait pas  en  1779  par  suite  du  décès  de  son  titulaire. 

D'après  Clavel  (p.  169),  Benedict  Chastanier,  membre  delà  G.\  L.'. 
de  France,  aurait  été  vén.".  de  cette  même  L.'.  en  1766,  et  modifiant  les 
rites  des  Illuminés  d'Avignon, il  aurait  créé  les  Illuminés  Théosophes.  Ce 
rite  n'ayant  pas  réussi,  il  le  transporta  à  Londres  en  1767  où  il  eut  beau - 
coup  de  succès.  Le  but  de  cetle  secte  aurait  été  de  propager  les  doctrine» 
de  la  Nouvelle  Jérusalem  de  Swedenborg. 

SOLEIL  D'OR 

L.-.  particulière  de  Beauchaine  (voir  chap.  v,  p.  183). 

TRIANGLE  LUMINEUX 

D'après  YEtoile  flamboyante  (II,  112),  le  2  novembre  1764  des  instruc- 
tions auraient  été  données  au  comité  par  le  T.'.R.'.  F.\  C.\  D.\  E." . 
orateur  d'une  L.\  portant  ce  titre. 

TRINITÉ  et  TRINITÉ  dite  ÉGALITÉ 

Cette  L.\  fut  créée  le  25  mars  1752  par  la  G.'.  L.\  en  faveur  de  Pir- 
let  ;  Lacorne  en  fut  également  vén.*.,  et  le  25  octobre  1761  les  patentes. 

LA    FUANC-MACONNERIE.   —  T.   I.  !  25 


I>8()  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

furent  renouvelées  en  faveur  de  Tardieu,  sous  le  titre  de  Trinité  dite 
Egalité. 

Celte  L.'.  reprit  son  titre  primitif  lorsqu'elle  fut  reconstituée  par  le 
G.'.  O.-.  le  25  septembre  1783. 

En  1785,  elle  avait  pour  vén.\  Richaud,  médecin  de  la  comtesse  d'Ar- 
tois, rue  Montorgueil,  et  pour  député,  Langlois,  négociant, 23,  rue  Neuve- 
Saint-Eustache. 

En  1788  et  1789,  son  vén.\  était  Joigny,  avocat  au  Parlement,  37,  rue 
Feydeau,  et  son  député,  Lorin,  employé  au  Mont-de-Piété,  off.'.du  G..O., 
place  de  la  Comédie-Italienne. 

Après  avoir  disparu  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux 
le    26   juillet    1799    et  refit    ses    règlements  le   10  juillet  1805. 

A  cette  époque,  le  tableau  de  la  L/.  ne  comprenait  pas  moins  de  34 
membres  :  Vén.\,  Lasserrez,  off..G.-.  O.  .  ;  1er  surv.*.,  Petit  Jean  Din- 
ville,  off.\  G.*.  0.\  ;  2e  surv..,  Thiébault,  off.\  G.\  O.-.  ;  orateur, 
Prousteau-Montlouis,  R  -j-  ;  secret..,  Géneux,  off.\  G.-.  O.".  ;  trésorier, 
Petitbon,  off.\  G.'.  O.*.  ;  1"  exp.'.,  Chauveau,  R-f  ;  2"  exp.v,  Gataycs, 
R--J-  ;  3  exp.-.,  Baron,  M.\  ;  M.*.  Cérém.,  Pérot,  M.-.;  hospitalier,  Sau- 
vage, R--f-  ;  G.',  des  Se..,  Noirdemange,  off.'.  G.*.  O.1.  ;  G.-.  arch.\, 
Duroux.  R— J- ;  architecte,  Charnej'  aîné,  M.'.  ;  couvreur,  Genillon  M.'.  ; 
député,  Mosnier;  orat.-.  adj.\,  Tribalet,R-f  ;  sec.-,  adj.-.,  Lerouge,  R-"j"-, 
M.-.  Cérém.-.  adj.'.,  Laruelle  du  Port,  M.-.  ;Lefebre,  R-"f;  Quenin  père, 
M.-.  ;  Kienlin,  off.\  G.-.  O.-.  ;  Vandemputte,  M.-.  ;  Got,  R-y.-.  ;  Du- 
roux, R--jv.  ;  Alexandre,  M.-.  ;  Borel  Vernières,  M.*.  ;  Bernard,  M.-.  ; 
Moreau,  R--f  ;  Emont  M.-.  ;  Charney  jeune,  M.-.:  Biston,  M.*.  ;  Cha- 
naing,  Comp.-.  ;  Delaunay,  app.-. 

De  1800  à  1802,  cette  L.-.  eu\  pour  vén.\  :  Joigny,  homme  de  lettres, 
20,  rue  de  Provence,  et  pour  député,  Géneux,  chef  de  bureau  àla  trésorerie, 
6,  rue  d'Anjou  Saint-Honoré. 

Lasserez  fut  vén.-.  en  1805  et  1806,  Géneux  en  1808  et  Lavallée  en  1813 
et  1814. 

De  1806  à  1814,  son  député  fut  Mosnier,  homme  de  loi,  20,  rue  du 
Faubourg-Saint-Honoré. 

A  cette  L.-.  était  annexée  une  L.-.  d'adoption. 

UNION 

Le  16  mai  1744,  la  G.-.  L.'.  installa  cet  atelier  en  faveur  de  Duret.  Etait 
en  vigueur  en  1779. 

UNION    DES  BONS  ENFANTS 

Cette  L.-.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

UNION  PARFAITE  DE  LA  PERSÉVÉRANCE 

Cette  L.-.,  fondée  le  15  janvier  1768  par  la  G.-.  L.'.,  existait  encore  en 
1779. 

UNION  PARFAITE  DE  SAINT-JEAN  DE   LA   PORTE  LATINE 
Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  de  traces. 


LOGES    DE    PARIS  387 

UNION    DES  PARFAITS  EU  s 

Fondée  le  24  juillet  1757  par  la  G.'.  L.\  en  faveur  de  Hardy,  cette  L  \ 
était  en  vigueur  en  1779. 

UNION  DES  SEPT  FRÈRES 

Fondée  à  une  date  inconnue,  cette  L.'.  avait  pour  vén.*.  en  1788  et 
1789  Lesucur,  bandagiste  place  de  Grève.  Disparut  avec  la  Révolution  et 
ne  reprit  pas  ses  travaux. 

UNION  SINCÈRE 

Créée  le  3  juin  176G  parla  G.'.  L.".  en  faveur  du  vén.\  m.'.  Saulnier, 
elle  était  en  vigueur  en  1779. 

VÉRITÉ 

Une  L.\  fut  créée  sous  ce  titre  par  la  G.*.  L..  en  1750.  Son  vén.\ 
ni.",  étant  mort,  cette  L.'.  n'était  plus  en  vigueur  lorsque  le  G.".  O.'.  la 
reconstitua,  le  30  juillet  1776,  pour  prendre  rang  seulement  du  11  juillet 
précédent.  A  cette  date,  elle  comprenait  18  membres. 

Son  vén.'.  de  1776  à  1790  fut  Morel,  officier  du  régiment  de  Boulonnais, 
rue  Saint-Germain-l'Auxerrois.  Son  secrétaire  fut  Pécoul,  avocat  au  conseil 
souverain  de  la  Guadeloupe,  puis  Durand,  avocat  au  Parlement,  7,  rue 
de  la  Colombe.  Cette  L.".  disparut  en  1791  et  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

VERTU 

D'après  la  patente  d'Et.  Morin,  en  1761,  le  vén.*.  m.',  de  cette  L.*. 
était  Boucher  de  Lenoncourt,  G.\  élu  parfait  maître,  chevalier  prince 
maçon. 

VERTU  ET  UNION  PARFAITE  DE  SAINT-SIMON 

Cette  L.\,  constituée  le  4  juillet  1767  par  la  G.".  L.\,  existait  encore  en 
1779. 

VRAIS  AMIS 

Les  patentes  de  cet  atelier  furent  souvent  renouvelées. 

Créée  une  première  fois  parla  G.'.  L.'.  le  27  décembre  1753  en  faveur 
de  Clément,  ce  vén.'.  m.\  étant  mort,  les  titres  furent  renouvelés  le 
27  décembre  1757,  au  nom  de  Molet,  qui  mourut  avant  1774.  Le  G.\  O.'. 
renouvela  à  son  tour  ses  titres  le  19  septembre  1774.  Le  nom  d'un  seul 
de  ses  membres,  Anselme,  est  parvenu  jusqu'à  nous.  En  1776,  la  L.-. 
n'était  déjà  plus  en  vigueur. 

VRAIE  LUMIÈRE 

Les  constitutions  primitives  de  cette  L.*.  furent  données  à  l'Orient  de 
Nancy  le  14  mai  1762.  Elles  furent  transportées   à    l'Or.',  de  Paris  et 


388  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

renouvelées  par  la  G.'.  L.".,  le  12  mars  1772  et  par  le  G.*.  O.'.,  le  5 
octobre  1773. 

De  1773  à  1777,  son  vén.\  était  le  baron  de  Toussainct,  libre  baron  du 
Saint-Empire,  conseiller  des  finances,  docteur  endroit,  avocat  au  Parle- 
ment, off.-.  du  G.'.  O.'.  ;  son  1er  surv.\  trésorier,  Ch.-P.  Morin.  Les 
secrétaires  furent  successivement  Lelièvre,  étudiant  en  médecine,  rue  de 
Seine,  et  Joffroy,  commis  aux  archives  du  Louvre,  rue  Saint  Honoré. 

Cette  L.\,  qui  avait  24  membres  en  1776,  semble  avoir  cessé  ses 
travaux  vers  1778. 

De  1773  à  1775  on  relève  parmi  ses  membres  :  de  Guerville,  Besnard, 
Jouve,  Déliasse,  Delignat-Flavignac,  Vignerfus,  Roland,  Saint-Hilaire, 
Deshayes,  Dey,  Petit,  de  Sainte-Avoie,  Masme,  de  Coursin,  Bonnaire, 
Noirde  mange. 


La  G.*.  L.\  constitua  en  plus  cinq  L.'.  dont  on  n'a  pu  retrouver  les 
titres,  en  faveur  des  vén.\  m.'.  :  Dansse,  le  20  novembre  1760  ;  duc 
d'Enghien,  le  3  décembre  1750  ;  Leclerc,  1751  :  Montroye,  1766  ;  comte 
de  Tessé,  le  19  février  1759. 

Les  deux  premières  et  la  dernière  de  ces  L.*.  fonctionnaient  en  1779  : 
Leclerc  et  Montroye  étant  morts,  leurs  L.*.  n'étaient  plus  en  vigueur. 
Pour  les  mêmes  causes  3  autres  L.'.  étaient  en  sommeil,  celles  de 
Chaudron,  Detelleur,  Gourlin. 

Enfin  on  n'a  pu  retrouver  les  noms  ni  les  dates  de  constitution  des 
L.'.  des  onzeVén.v  suivants  :  Boze  delà  Bize,  Delaître,  Des  Clouzelles, 
Gouttard  aîné,  Hue,  comte  de  Jagny,  Jumigny,  Malibran,  Montroye, 
comte   d'Ossun,   Pasquault,  Vendeusse. 

Toutes  ces  L.*.  étaient  en  sommeil  en  1779. 


II 

LOGES  DE  PROVINCE 


ABBEVILLE  (1) 

PARFAITE  et  PARFAITE  HARMONIE 

Le  31  janvier  1764,  la  G.*.  L.\  aurait  constitué  une  L.*.  en  faveur  du 
vén.  .  m.',  d  Hernis. 

Cette  L  *.  est  probablement  la  même  que  la  Parfaite  Harmonie  consti- 
tuée également  par  la  G.  .  L.*.  le  26  janvier  1764,  renouvelée  par  le 
G.'.  O'.  le  11  janvier  1776  en  rappelant  les  travaux  commencés  le 
17  octobre  1750. 

Cette  L.".,  qui  comportait  17  membres  en  1776,  avait  alors  pour  vén.-. 
de  Latre  l'aîné,  négociant,  rue  du  Puits-de-la-Chaîne. 

La  correspondance  était  adressée  poste  restante,  à  Jean-Marie  Trophat 
(anagramme  de  Parfaite  Harmonie)  ;  son  député  était  le  comte  de  Corregio. 

En  1777,  elle  avait  20  membres;  son  vén*.  était  d'Hercey,  ancien 
officier  d'infanterie  ;  son  secrétaire,  Alyamet  deFournival,  ancien  officier. 

En  1785,  son  vén.  .  était  Devos,  négociant,  et  son  député.  Théophile 
Vaurobais,  négociant. 

En  1788,  ce  dernier  fut  nommé  vén.*.  et  Tannée  suivante  fut  remplacé 
par  Hommassel-Manessier,  négociant. 

En  1788  et  1789,  son  député  fut  de  Pioger,  chevau-léger  de  la  garde 
du  roi,  chev.  de  Saint-Lazare  et  de  Notre-Dame  du  Mont-Carmel, 
ancien  maire,  commandant  la  ville  d'Abbeville. 

Cette  L.-.  reprit  ses  travaux  sous  l'empire.  De  1808  à  1810,  son  vén.'. 
était  Baron,  contrôleur  des  contributions  directes. 

En  1810,  figuraient  parmi  ses  membres  :  Hecquet,  Fraissard,  Mon- 
tendre,  Siffait- Roger,  Denoyelle,  André  de  Poilly,  Mourot,  Monteau, 
Paumier,  Dequevauviller. 

Darcourt  fut  son  vén.'.  en  1813  et  Hecquet  notaire,  en  1814. 

De  1808  à  1814  son  député  fut  Delaunay,  officier  du  G.-.  O.'. 

AIX 

ÉTROITE  PERSÉVÉRANCE 

Fondée  en  1762,  elle  reçut  son  titre  constitutif  d'une  L.'.  écossaise  de 
Marseille,  «  La  Prudence  ». 

(1)  Dans  les  monographies  de  L.*.  de  province,  nous  avons  emprunté 
de  nombreux  noms  à  la  Chaîne  d'Union,  à  l'Histoire  générale  de  la 
F.  M.\  en  Normandie,  par  le  F.',  de  Loucelles,  et  aux  Ephémérides  de 
Lyon,  etc.  Nous  avons  également  consulté  des  tableaux  de  loges,  des 
brevets,  des  correspondances  de  maçons  et  les  annuaires  du  G.'.  O  *. 


390  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1768,  elle  fusionna  avec  les  Amis  Réunis  et  devint  l'Etroite  Persé- 
vérance des  Amis  Réunis.  Avant  la  réunion,  son  vén.\  était  Duranti  de 
la  Calade  père,  conseiller,  puis  président  à  la  cour  des  comptes. 

Sa  devise  était  :  Vis  unita  fortior- 

Après  la  réunion,  Portalis,  alors  âgé  de  22  ans,  fut  son  vén.*.  Parmi 
ses  membres,  Duranti  de  la  Calade  fils,  conseiller  à  la  cour  des  comptes, 
Méri,  le  comte  de  la  Canorgue  et  de  Magallon,  avocat  général. 

De  1774  à  1781,  cette  L.'.  se  réunit  à  «  l'Amitié  ».  En  1776,  son  vén.*. 
était  Espariat,  avocat,  ancien  vén.1.  de  l'Amitié. 

SAINT- JEAN  D'ECOSSE  DE  LA  RÉUNION 

Cette  L.*.  passe  pour  la  plus  ancienne  d'Aix  ;  elle  aurait  été  constituée 
par  une  L.*.  anglaise  de  Marseille.  En  1764,  elle  comprenait  19  membres 
dont  :  de  Ricard,  Lange  de  Saint-Cafren,  Damât  de  Foucrelle.  Ses 
membres  étaient  magistrats  ou  avocats.  On  ne  trouve  plus  de  traces  de 
cette  L.'.  après  1766. 

AMIS  RÉUNIS 

Fondée  le  12  juin  1766  par  la  G.'.  L..  en  faveur  du  vén-.  m.1.  Therris, 
elle  comprenait  12  membres,  tous  bourgeois  ou  commerçants.  Comme 
nous  l'avons  vu,  elle  se  réunit  en  1768  à  l'Etroite  Persévérance. 

CALISSANE 
En  1168,  il  existait  sous  ce  titre  une  L.'.  clandestine. 

AMATEURS  DE   LA   VERTU 

Cette  L.*.,  qui  existait  avant  la  Révolution,  constituée  par  une  puis- 
sance inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 

ALBY 

SAINT-JEAN  D'ALBY 

En  1744,  une  L.\  aurait  été  constituée  sous  ce  titre  par  la  G."  L..*. 
en  faveur  du  marquis  de  Maleuse  ;  elle  existait  encore  en  1779. 

ALENÇON 

SAINT-LOUIS  DES  CŒURS 

Cette  L.*.,  fondée  le  10  mai  1762  en  faveur  du  Vén.'.  M*.*.  Castaing: 
paraît  être  la  plus  ancienne  d'Alençon.  Elle  existait  encore  en  1779. 

co:urs  zélés 

Cette  L.*.,  probablement  la  même  que  la  précédente,  n'aurait  eu  ses 
constitutions  primitives    que  le    10    mai    1763,    bien    que   fonctionnant 


LOGES    DE    PROVINCE  391 

depuis  1752.    En   1808  elle  est  désignée  connue   L.\  en  sommeil  sous  le 

titre  de  Saint-Louis  des  Cœurs  zélés. 

L.i  (1    .  L.\     renouvela  ses  titres  en  1772  et  le  G.\  O.*.  le  7  mai   1774. 

En  177(5  et  1777,  elle  a  pour  vén.\  Castaing,  receveur  des  tailles;  elle 
comprenait  12  membres. 

Vax  1785,  son  vén.'.  était  de  Foulogne,  ancien  officier  au  régiment  de 
Bourbon-infanterie,  son  secrétaire  était  Taupin,  directeur  général  des 
Fermes,  et  son  député  Boucault. 

Parmi  ses  membres:  Costard  de  Bursard,  de  Hécalde,  de  Bordier, 
Fromond  de  Bouailles,  d  Hattot  de  Chavanncs,  comte  des  Essarts  de  la 
Verrerie,  de  Glatigny,  Coste  de  Vaugourdon,  cbev.  de  Monligny,  Macé 
de  Choisel,  de  Guiberville,  de  la  Hue,  Bouley,  prieur  de  Sainte-Marie, 
Marescot  de  Briante,  Moisson  de  Vaux  et  Lalande  de  Sainte-Croix. 

Cette  L.\  disparut  à  la  Révolution. 

SAINT-CHRISTOPHE  DE  LA  FORTE    UNION 

Constituée  le  2  juillet  17(54  par  la  G.-.  L.*.  en  faveur  du  vén.'.  ni.-,  de 
Fresnais  sous  le  titre  de  Saint-Jacques-Saint-Christophe,  ses  constitu- 
tions primitives  furent  renouvelées  par  la  même  puissance  le  29  septem- 
bre 1772,  sous  le  litre  de  Saint-Christophe  de  la  Forte  Union  et  par  le 
G.-.  0.\  le  23  septembre  1774. 

Les  membres  de  cette  L.\  semblent  avoir  eu  le  caractère  chicanier 
que  Boileau  prête  aux  Normands.  Jaloux  de  ses  titres,  elle  fut  en  lutte 
répétée  avec  les  autres  L.'.  d'Alençon. 

En  1782,  une  scission  s'étant  produite  entre  ses  membres,  plusieurs 
d'entre  eux  demandèrent  à  constituer  une  nouvelle  L.-.  sous  le  titre 
d  Fimiles  d'Oreste  et  Pylade.  Malgré  ce  titre  fraternel,  l'orage  éclata 
bientôt.  Le  temple  de  la  Forte  Union  fut  profané  et  les  bijoux  dispa- 
rurent. Les  Emules  d'Oreste  et  Pylade  furent  accusés  de  ces  méfaits,  à 
tort,  paraît-il,  car  les  f. '.  de  la  Forte  Union  durent  retirer  leurs  accusations. 

En  1776  et  1777,  cette  L.'.  comprenait  18  membres;  son  vén.*.  était 
Lesueur  de  Petitville,  mestre  de  camp  de  cavalerie,  en  son  château  du 
Val,  son  secrétaire  était  Pihan,  procureur  aux  juridictions  royales 
d'Alençon  et  son  <?éputé,  Costard  de  Bursard,  ancien  mousquetaire. 

En  1778  et  1779,  ce  dernier  devint  vén.' .  En  1781-1782  et  en  1785- 
1788,  Fresnais  père,  négociant,  ancien  échevin,  occupa  ces  fonctions  ;  et 
en  1783-1784,  Daquin,  prêtre,  professeur  de  physique  au  Collège  royal 
d  Alençon. 

En  1789  et  1790,  le  vén.*.  était  Le  Moine,  contrôleur  des  étapes  et 
convois  militaires. 

De  1785  à  1790,  le  député  fut  Delaunay  Le  Bled,  avocat  au  Parle- 
ment . 

Parmi  ses  membres  nous  relevons  :  Langlois-Lafontaine,  procureur  au 
bailliage  et  siège  présidial  ;  Lesage  du  Parc  ;  Rémont  de  Recalde  ; 
d'Hallot  de  Chavannes  ;  Lenoir  du  Frêne  ;  Le  Villain  du  Friche  ;  de 
Froger,  du  Ronceray  ;  de  Frotté  ;  le  Sage  de  la  Corneillère  ;  Bellon}-  de 
Watgz,  sous-prieur  de  l'abbaye;  de  Chamenel  et  Bourdon,  religieux  béné- 
dictins,   et  Castaing,  négociant. 

Cette  L.".  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution  et  ne  les  a  pas 
repris  depuis,  tout  au  moins  sous  son  ancien  titre.  La  L.1.  de  la  Fidélité, 


3\)2  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


formée  en  1802,  se  réclama  de  Saint-Christophe  de   la  Forte  Uniou  pour 
Faire  remonter  ses  travaux  au  2  juillet  1764. 


AMBERT 
CŒURS  RÉUNIS 

Il  y  eut  avant  la  Révolution  une  L.-.  sous  ce  titre  à  Ambert  ;  elle  n'a 
pas  laissé  de  traces. 

ANDELYS  (les) 

PARFAITE  CORDIALITÉ 

Constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  8  janvier  1767.  cette  L.*.  fut  recons- 
tituée par  le  G.'.  O. '.  le  29  avril  1779  et  se  réinstalla  le  21  octobre  sui- 
vant. A  cette  dernière  date  son  vén.'.  était  l'abbé  de  Saint  Martin, 
chanoine  de  la  collégiale  ;  parmi  ses  membres  on  relève  les  noms  de 
Beuzelin  de  Racouval,  Beuzelin  de  Verneuil,  de  Molaincourt,  de  Le- 
Ycyrac,  baron  de  Saussay,  de  Chalange,  Dubuc,  curé  de  Vimont. 

De  1785  à  1790,  le  vén.'.  fut  de  la  Barre,  lieutenant  des  Maréchaux  de 
France  ;  le  secrétaire,  Boulloche.  juge  civil  et  criminel  de  police  au 
bailliage;  et  le  député,  le  chev.'.  du  Coudray,  capitaine  de  cavalerie, 
chevalier  de  Saint-Louis.  Cette  L.'.  disparut  vers  1791. 

ANGERS 

SAINT-PAUL  dite  LA  PRUDENCE 

Fondée  en  1753  par  la  G*.  L.*.  en  faveur  de  Dessolais,  cette  L.\  était 
encore  en  vigueur  en  1779. 

PARFAITE   UNION 
Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

UNION   FRATERNELLE 

Celte  L  '.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

Les  L.*.  importantes  d'Angers  ne  furent  constituées  qu'après  1771. 

ANGOULÊME 

unité  des  cq:urs 

Cette  L.-.,  que  par  la  suite  on  qualifia  d  irrégulière,  fut  la  première 
constituée  à  cet  Orient  en  faveur  du  P.*.  Brunet,  capucin,  son  vén-.,  le 
17  décembre  1760. 

En  1765,  le  P.'.  Brunet,  qui  habitait  généralement  Gonesse.  était 
«ncore  son  vén.'.  Parmi  ses  membres  on  relève  les  noms  suivants: 
Dumoulin,  peignier;  Besson,  aubergiste;  Godineau,  garçon  boulanger; 


LOGES    DK    PROVINCE  393 

Coulon,    régent;  Blanchard   d«   Pnymariin;  Nègre   frères,  horlogers; 

Lemaitre,  cl i t  le  Petit  Bon  Dieu,  peintre;  Calaud  ;  Lctourneau,  régent; 
Cossard,  orfèvre  ;  Clavaud  fils,  marchand;  Tabaud,  minime  ;  Civadière; 
Dezille  et  Théophile,  capucins. 

Cette  L.\  était  en  continuelles  discussions  avec  la  Parfaite  Union  du 
même  Orient.  (Mamoz,  La  F.'.  M.\  à  Angoulèmc  au  XVIII^  siècle.) 

En  1778,  le  tahleau  de  la  L.\  était  ainsi  constitué  : 

De  Maubuée,  chanoine  ;  Lescalier,  sous-ingénieur  ;  Roullet,  chirurgien  ; 
Ducluzeau,  proc.  au  prés,  du  comte  d'Artois  ;  Clavaud  l'aîné,  négociant  ; 
Dussouchet,  négociant  ;  Poitevin  de  Beaupré,  bourgeois  ;  de  Bussac 
l'aîné,  bourgeois  ;  Vaslet,  proc.  auprès.  ;  Azemard,  négociant;  Sallée, 
chirurgien  ;  Sazerac  des  Roches,  négociant  ;  Dupcyrat  le  jeune,  négo- 
ciant ;  Buchey,  orfèvre  ;  Nadaud,  horloger  ;  de  Limaigne,  avocat  ; 
Noël  fils,  négociant  ;  Massedin,  feudiste. 

Cette  L.'.  disparut  avant  la  Révolution. 

PARFAITE  UNION 

La  formation  de  cette  L.\  est  particulièrement  intéressante.  Grâce  aux 
recherches  de  M.  Mamoz,  nous  voyons  comment  se  formait,  au 
xvm*  siècle,  l'agglomération  maçonnique  d'où  la  L.'.  devait  sortir. 

En  1757,  il  y  avait  à  Angoulême  deux  F.1.  M.\  :  Denis- Louis  Jauré, 
reçu  m.*,  écoss.\  à  Rouen  en  1746,  et  Biaise  Bourrut-Leméry,  cordelier, 
affilié  à  Nantes  en  1748.  Ce  furent  ces  deux  personnalités  qui  initièrent 
les  maçons  d'Angoulême  avant  la  formation  de  la  L.\  Parmi  ceux-ci: 
Andri,  orfèvre,  major  de  la  milice  bourgeoise  ;  Lardi,  marchand,  et 
Rabin,  major  de  l'Hôpital.  En  1762,  le  duumvirat  est  renforcé  par 
François  Trémeau  jeune,  initié  à  Paris  En  1763  et  1764,  ils  avaient 
formé  une  L.\  indépendante  procédant  à  des  réceptions. 

C'est  le  12  octobre  1764  que  la  constitution  de  cette  L.'.  fut  régula- 
risée par  la  G  \  L.-.  en  faveur  de  Jean  Brun  fils,  subdélégué  de 
l'Intendance.  Voici  quel  était  le  tableau  de  la  L.'.  lors  de  l'installation, 
le  2  décembre  suivant  : 

Vén..,  Jean  Brun  fils;  1er  surv..,  Jean-Baptiste  Andri;  2e  surv.-.,  Tré- 
meau jeune  ;  orateur,  Louis-Denis  Jouré  ;  trésorier,  Trémeau  fils  aîné  ; 
secrétaire,  Barthélémy  Chavigni  ;  arch.*..  Jean-Baptiste  Rulier  ;  hospi- 
talier, Jean  Martin  ;  experts,  visiteurs,  Miteau  et  Pierre  Laroche  de  Girard  ; 
aumônier,  François  Georges  Beziard;  Frère  Terrible,  Jean-Baptiste  de  la 
Gravière  ;  hospitalier,  Félix  Robin  ;  tuileur,  Jean  Dabescot  ;  sur  les 
colonnes  :  Jean  Lardi,  M.\  Roy,  prêtre  ;  Pierre  Loreau,  avocat  ;  Mar- 
celin Bolaix,  religieux,  compagnons. 

En  1765,  figuraient  aussi  dans  cette  L.*.  :  Cravaud  fils  aîné;  Létour- 
neau  ;  La  Cossonnière  fils  ;  Chassin,  curé  de  Saint-Ausone  ;  Dumoulin  ; 
Coppart  ;  Dussouchet  ;  Pénot  ;  Laroche  ;  Ducluzeau  et  Coulon. 

M.  Mamoz  relève  également  parmi  les  membres  de  cette  L.-.  :  Jacques 
Delestre,  maître  de  psallette  ;  Charles  Glace,  fils  aîné  ;  François  Glace 
père,  négociant  ;  Louis  Blanchard,  maître  de  forges  ;  François  de  la 
Pouge  de  la  Blancherie,  maître  de  forges  ;  Pierre  Jeudi  fils  aîné  et  Jean 
Jeudi  jeune,  négociants  ;  Léonard  Dereix-Derivierre  ;  Antoine  Marchais 
fils  aîné,  négociant  ;  Eustache,  capucin  ;  Guillaume  Texier  de  Lavallade, 
marchand   et  consul  ;   Albert   Maudet,    carme  ;  Pierre-François-Achille 


394  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

de  Lamarque,  ancien  très,  des  inval.  de  la  Marine  à  Saint-Domingue  ; 
Bernard  Mouget,  carme  ;  Pierre  Dufour,  carme  ;  Charles-Joseph 
Ducluzeau,  greffier  des  eaux  et  forets  ;  Louis  Blanchard  de  Pujrmartin 
fils,  directeur  de  forges  à  Roussines  ;  Etienne-Louis  Marchais  fils  jeune, 
négociant  ;  Pierre  Marchais  de  la  Berge  ;  Henry  de  Labarderie  ; 
Laviatte  ;  Pissier  ;  Civadière;  Jacques  Boiteau  ;  Jean  Mathieu  ;  Rivaux, 
avocat  ;  Fontréaulx  de  Saint-Martin  ;  Ogerdias  et  Vallcteau  de  Cha- 
brefy. 

En  1776,  cette  L.\  était  moins  prospère  qu'à  sa  création,  elle  n'avait 
plus  que  27  membres.  Son  vén.\  était  Duclusat,  greffier  en  chef  des 
eaux  et  forêts  ;  son  secrétaire  était  Marchais  du  Rocher,  négociant  En 
1777,  la  décadence  de  la  L.\  s'accentuait  encore,  elle  n'avait  plus  que 
15  membres.  Brun  était  renommé  vén.\  et  son  secrétaire  était  Foureaux 
de  Saint-Martin,  avocat  au  Parlement.  Ce  dernier  fut  vén.\  de  1785 
jusqu'à  la  dispersion  de  la  L.  .  en  1790.  De  1776  à  17S0,  cette  L.\  eut 
pour  député  le  docteur  Guillotin,  officier  du  G.'.  O.-. 

Elle  disparut  vers  1791  et  ne   reprit  pas  ses  travaux. 


ANNONAY 
VRAIE  VERTU 

D'après  M.  Léon  Rostaing(l),  cette  L.\  aurait  été  installée  le  1er  avril 
1766  parla  Parfaite  Union  à  l'O.".  du  régiment  de  Vivarais  et  par  la 
Parfaite  Union  à  l'O.'.  de  Tournon.  Comme  cette  dernière  L.\  ne  fut  elle- 
même  constituée  qu  en  1774,  nous  croyons  plutôt  que  la  Vraie  Vertu  fut 
installée  le  1er  octobre  1766  par  la  L.".  Saint-Louis  à  l'O.*.  du  corps 
royal  du  Génie  (Metz),   comme    le  prétend  la  Chaîne  d'Union  (IV,   484  . 

La  Vraie  Vertu  paraît  du  reste  avoir  été  indépendante  de  la  G.\  L-., 
qui  ne  lui  donna  pas  de  titres  constitutifs.  C'est  le  G.'.  O  *.  qui,  le 
2  avril  1775,  lui  donna  ses  patentes  en  les  antidatant  du  4  juillet  1774, 
et  en  faisant  remonter  ses  travaux  au  1er  octobre  1766.  Cette  L.\,  qui 
avait  une  grande  importance  numérique,  réunissait  la  meilleure  société 
d'Annonay.  Elle  s'adjoignit  une  L.\  d'adoption  qui  ne  fut  pas  très  flo- 
rissante. C'est  de  son  sein  que  sortit  le  groupe  qui,  en  1780,  forma  la 
Vraie  Amitié.  Un  grand  nombre  de  membres  de  ces  L.\  jouèrent  un  rôle 
important  pendant  la  période  électorale  de  1789,  et  les  administrations 
départementales  de  1790  et  1791  furent  presque  exclusivement  recrutées 
parmi  les  membres  de  ces  deux  L.-. 

Voici,  d'après  M.  L.  Rostaing,  les  noms  de  tous  les  membres  de  la  Vraie 
Vertu  de  1766  à  1808  :  —  1766  :  Baron,  négociant  ;  Bollioud  de  Saint- 
Julien,  receveur  général  du  clergé  ;  Bon  ; démissionnaire)  ;  Chomel,  avo- 
cat ;  Chomel  de  Midon,  licencié  en  droit  ;  Duret,  négociant  ;  Frachon, 
procureur  au  bailliage  ;  Soubeyran  de  la  Rochette  ;  Lombard  (vén.\)  ; 
Missolz  de  la  Pra,  lieutenant-colonel  d'artillerie,  chevalier  de  Saint- 
Louis  ;  le  chev.*.  de  Missolz,  lieutenant-colonel  d'artillerie,  chew.  de 
Saint-Louis;  Monneron,  avocat,  receveur  du  grenier  à  sel,  vén.\  ;  Mont- 

(1)  Les  anciennes  L.'.  maç.'.  d'Annonay  et  'es  clubs.  Cette  étude,  très 
complète,  est  du  plus  haut  intérêt.  —  Voir  également  les  travaux  du 
Dr  Francus  sur  la  f.'.-m.'.  dans  l'Ardèche. 


LOGES    DE    PROVINCE  i)(.)."> 

golfier,  Alexandre-Charles,  licencié  en  théologie,  ancien  proviseur  du  col- 
lège d'Autan  à  Paris,  chanoine  de  l'église  collégiale,  vén.\;  Montgollier, 
fabricant  de  papiers  à  Vidalon-le-Bas,  vén.*.  ;  Lemore  de  Pignien  ;  Tour- 
ton  ;  Blaehier,  chevalier  de  Saint- Louis  ;  Lonihard  de  Quincieux,  avo- 
cat puis  procureur  du  roi  en  la  sénéchaussée,  vén.-.  —  1767  :  Soubcyran 
de  Beauvoir,  bailli  d'épée  de  la  baronnie  de  Tour  des  Chalamon  ; 
Imbard.  —  1708  :  Fonrnat  de  Brcnieu,  vén.".  ;  baron  de  Causon  :  Cho - 
mel  de  Jarnieux,  en  religion  le  P.  Roch,  récollet,  vicaire  de  la  com- 
munauté ;  Fourra,  récollet,  gardien  du  couvent  ;  Defrénois,  officier  de 
la  légion  de  Hainaut.  —  1770  :  Bonfîls,  curé  d'Annonay,  chanoine  régu- 
lier de  Saint- Ruf  ;  Pourrat,  provincial  des  cordeliers,  commissaire 
général  et  gardien  du  grand  couvent  de  Paris  ;  Duret,  médecin  ;  des 
Chabert,  célestin  ;  Peyron  ;  Chabert,  avocat. — 1771  :  Bollioud  deBragieux, 
▼en.'.  ;  Yéron  de  la  Rama.  — 1772,  Monneron,  membre  du  Conseil  supé- 
rieur de  Pondichéry  ;  comte  de  Vogué,  vén.*.  ;  Alléon  aîné,  négociant  : 
Fromageot,  prieur  de  Gondargnes.  — 1773  :  Ravel,  bourgeois,  gradué 
eu  droit.  —  1774  :  Monneron,  chanoine  de  l'église  collégiale.  —  1775  : 
Bollioud  de  Tartara.  —  1782  :  Murol,  avocat  au  Parlement  ;  Chapuis, 
conseiller  du  roi,  greffier  en  chef  de  la  sénéchaussée  ;  Duret,  docteur  en 
médecine  ;  Fournat  d'Ay,  père.  —  1783  :  de  Barjac,  ancien  prieur  des 
Célestins  ;  le  chev.-.  de  Barjac  ;  Montgolfîer  {Etienne  de),  fabricant  de 
papier,  inventeur  des  aérostats  ainsi  que  son  frère.  —  1784  :  Montgolfîer 
(Michel  Joseph  de)  ;  Desfrançais  de  Lolmes,  conseiller  du  roi,  juge  mage, 
lieutenant  général  de  la  sénéchaussée  ;  Perné  du  Sert,  membre  de  la 
L.\  la  Paix  àl'O.'.  de  Toulouse.  —  1785  :  Desfrançais  de  Thorrenc, 
chevalier,  ancien  conseiller  ;  marquis  de  Lestrange  à  Saint-Alban.  — 
1787  :  Fournat  de  Brézenaud  ;  Duval,  avocat  au  Parlement.  —  1788  : 
Nozarède,  receveur  des  domaines  du  roi.  —  1789  :  Veyre  de  Soras, 
capitaine  de  cavalerie,  chev.'.  de  Saint-Louis.  —  18C6  :  le  chev.". 
de  Monteil,  ancien  adjudant  du  général  de  Précy  à  Lyon  ;  Tavernier, 
avocat  ;  Lioud.  —  1807  :  Daymé,  manufacturier  ;  Johannot,  fabricant 
de  papier:  Bravais,  médecin  ;  le  comte  Lamajarie  du  Soursac  ;  du  Liron 
de   Montyver  et  de    Digoine  fils. 

Bollioud  de  Saint-Julien,  ancien  législateur,  fut  vén.-.  de  la  Vraie 
Vertu  jusqu'en  1815. 

Les  lettres  étaient  adressées  à  M.  de  la  Vauterive  (anagramme  de  la 
Vraie  Vertu),  à  l'hôtel  Camon  ou  Monac  (anagramme  de  Camon). 

PARFAITE   AMITIÉ 

Cette  L.-.  n'a  pas  laissé  de  traces.  Il  s'agit  peut-être  de  la  Vraie  Ami- 
tié constituée  en  1780. 

ÉTOILE  BRILLANTE  DE  LA  FILLE  PREMIÈRE  DE  LA  CONSTANCE 
Cette  L.-.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

ARPAJON 

PARFAITE  UNION 
SOPHIE-MADELEINE 

Ces  deux  L.-.  n'ont  pas  laissé  de  traces. 


396  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


ARRAS 


CONSrANCE 


Les  membres  de  cette  L.*.  avaient  la  prétention  d'appartenir  à  la  plus 
ancienne  L.\  de  France.  Ils  voulurent  prendre  rang  du  15  avril 
1687,  prétendant  avoir  été  constitués  à  cette  date  par  le  T.".  111.'.  F.',  le 
comte  de  Pembrocke,  grand  visiteur  de  la  M.-.  G.  .  L.\  de  Londres 
en  vertu  de  pouvoirs  légaux.  Toutes  ces  allégations  étaient  fantaisistes, 
et  jamais  aucune  autorité  maç.\  ne  voulut  y  ajouter  foi.  Sans  être  aussi 
ancienne,  la  L.".  d'Arras  devait  remonter  assez  loin.  Elle  existait  certai- 
nement lorsque  Charles-Edouard  y  créa  un  chapitre  en  faveur  des  FF.-. 
Lagneau,  de  Robespierre,  Hazard,  Lucet,  etc.,  en  1747.  (Voy.  chap.  iv, 
p.  132) 

En  1775,  Lucet,  qui  était  vén.\,  étant  mort,  fut  remplacé  par  le  F.*. 
Delecourt,  1er  surv.\  Un  certain  nombre  de  L.-.  à  cette  époque  et  même 
antérieurement  reconnaissaient  à  la  Constance  le  titre  de  Mère  L/.  écos- 
saise jacobite,  cela  n'est  pas  douteux  ;  le  fait  était  notoire  et  il  ne  paraît 
pas  que  jamais  Charles-Edouard  ait  protesté  contre  l'usage  qu'on  y  fai 
sait  de  son  nom. 

Dès  le  9  février  1773,  Lucet  avait  demandé  au  G.-.  O.'.  des  constitu- 
tions personnelles  qui  lui  furent  refusées.  Malgré  la  recommandation  du 
F.-,  chev.'.  de  Loos  de  Bayac,  Delecourt  prétendit  par  la  suite  que  sans 
préjudice  de  la  valeur  de  ses  titres  primordiaux,  sur  sa  demande  et  celle 
de  ses  deux  surveillants  de  Dion  et  Raulin,  le  12  novembre  1779  des 
lettres  de  constitution  et  de  reconstitution  furent  présentées  au  G.'.  O.'., 
qui  refusa  de  les  ratifier.  L'année  suivante,  11  frères,  fatigués  de  la  pré- 
sidence de  ce  maître  de  L.'.  déjà  vieux  et  sourd,  demandèrent  et  obtinrent 
de  constituer  une  nouvelle  L.\  sous  le  titre  de  l'Amitié  La  scission  datait 
de  1764.  Delecourt  protesta,  continua  ses  travaux  ;  plus  tard,  il  prétendit 
même  avoir  été  reconnu  par  le  G.'.  O.'.  le  18  juillet  1783,  avec  son  rang 
et  ancienneté,  ce  qui  était  faux. 

En  1785,  la  plus  grande  partie  des  membres  de  la  Constance  l'avaient 
abandonnée  pour  fonder  les  Amis  Réunis,  ce  qui  n'avait  pas  empêché 
cette  loge  de  continuer  à  fonctionner  avec  quelques  amis  fidèles. 

Ce  qui  est  certain,  c'est  que  le  1er  février  1787,  le  G.".  O.".  reconnut  que 
les  titres  perdus  de  cette  L.\  devaient  dater  de  la  G.'.  M.*,  du  comte  de 
Clermont. 

Si  cette  L.\  et  son  chapitre  cessèrent  leurs  travaux  pendant  la  Révolu- 
tion, ce  qui  est  douteux,  ils  rentrèrent  en  activité  dans  les  dernières 
années  du  xvme  siècle.  Le  4  mai  1800,  le  chapitre  décida  de  demander  le 
visa  du  G.\  O.  .  Celui-ci,  moins  difficile  qu'avant  la  Révolution,  l'accepta 
dans  son  obédience  le  27  décembre  1801,  mais  pour  prendre  rang  seule- 
ment du  19  novembre  1783. 

A  cette  époque,  le  vén.*.  était  Delecourt,  ancien  notaire  ;  le  secrétaire, 
Chevalier,  négociant.  Ce  dernier  fut  vén.".  en  1802.  En  1805  et  en  1809, 
Delecourt  reprit  ses  fonctions. 

En  1808,  Callens,  négociant,  fut  vén.-.,  et  en  1813  et  1814,  Dupain. 
lieutenant  quartier-maître  de  gendarmerie.  Les  lettres  étaient  adressées 
sous  le  couvert  de  l'anagramme  barbare  d  Ecnatsnoc. 

En  1780,  la  mère  L.".  d'Arras  avait  érigé  un  chapitre  de  R.-J*  à  Paris 


LOGES    DE   PROVINCE  397 

sous  le  litre  «  Chapitre  d'Arras  de  la  vallée  de  Paris  ».  Elle  avait  en  plus 
5  chapitres  sullragants  dans  les  L.\  suivantes  :  1«  Saint-Jean  du 
Hou  Accord,  ().'.  de  Paris;  2°  Intime  fraternité,  ().*.  de  Tulle  ;  3"  Sagesse. 
().•.  de  Lyon  ;  4°  Française  dans  la  ville,  Gv.  de  Bordeaux  ;  5°  Sincôro 
Amitié,  Ov.  d'Amiens. 

La  Constance  était  en  correspondance  avec  13  L.\  à  l'O.'.de  Paris 
et  27  à  l'O.'.  de  diverses  villes  de  province  :  l'Amitié,  la  Bonne  Union, 
la  Parfaite  Réunion,  le  Point  Parfait,  Sainte-Joséphine,  l'Ecossaise  (?), 
Saint-Alexandre,  le  Phénix,  l'Age  d'or,  les  Sincères  Amis,  le  Grand 
Sphinx  et  les  Amis  de  la  paix,  ci-devant  les  Amis  joyeux,  à  l'O.'.  de 
Paris;  la  Parfaite  Union,  O.'.  de  Douai;  Saint-Jean  du  Désertât  la  Par- 
faite Union,  O.*.  de  Valenciennes  ;  les  Amis  Réunis  et  la  Modestie,  O  '. 
de  Lille  ;  la  Philanthropie,  O/.de  Saint-Quentin  ;  l'Aurore  delà  liberté, 
().'.  de  Réthune;  l'Heureuse  Réunion,  O.'.de  Saint-Omer  ;  Saint-Louis 
3fes  Amis  lléunis  et  la  Parfaite  Union,  O.".  de  Calais  ;  la  Réunion,  O.'. 
d'Aire  ;  l'Amitié  fraternelle,  0.\  de  Dunkerque  ;  la  Thémis,  O.".  de  Cam- 
brai ;  la  Réunion  des  Amis  du  Nord,  O.*.  de  Bruges  ;  les  Trois  niveaux, 
O.*.  d'Osteude  ;  la  Constance  éprouvée  et  les  Frères  réunis,  O.*.  de 
Tourna}-  ;  l'Aménité  et  les  3  H,  O.*.  du  Havre  ;  la  Concorde,  O.'.  de 
Mons  ;  l'Amitié,  O.'.  de  Courtray  ;  les  Arts  réunis,  O.'.  de  Dijon;  les 
Enfants  de  la  Concorde  fortifiée,  O.'.  de  Luxembourg  ;  le  Secret  des  trois 
Rois,  O.*.  de  Cologne  ;  la  Fidèle  Maçonne,  O.*.  de  Cherbourg  ;  Saint- 
Frédéric  des  Amis  choisis,  O.'.  Boulogne-sur-Mer  ;  la  Sincérité  et  Par- 
faite Union,  O.'.  de  Besançon. 

En  1805,  cette  L.\  comptait  38  membres  résidents,  13  non  résidents, 
16  correspondants,  3  membres  de  l'harmonie  et  deux  frères  servants.  — 
Membres  résidents  :  Delecourt,  ancien  notaire,  vén.\  fondateur  ;  Mojs- 
sent,  négociant,  1er  surv.*.  ;  Berton,  négociant,  2e  surv.".  ;  Lefran,  avo- 
cat, orateur  ;  Bécu,  cafetier,  secrétaire  par  intérim  ;  Zanoli  ,  lieut -col. 
12e  inf.  légère,  garde  des  sceaux  ;  Plé,  aubergiste,  trésorier  ;  Triboulet, 
propriétaire,  architecte  :  Beauchamps,  employé  des  postes,  1er  expert  ; 
Baptault,  cap.  12e  infanterie  légère,  ambassadeur  ;  Libersalle,  huissier, 
M°  des  cérémonies  ;  Peugnet,  entrepreneur  de  bâtiments,  architecte  ; 
Poitard,  avoué,  2e  expert;  Hébert,  huissier,  secrétaire  adjoint  ;  Delval- 
lée,  aubergiste,  3e  expert  ;  Boniface,  fabricant  d'huiles,  économe  ; 
Calens,  négociant  en  dentelles,  intendant  des  fêtes  ;  Perot  dit  Bel  As- 
pect, tailleur,  vérificateur  ;  Leclercq,  imprimeur  libraire,  tuileur  ; 
Alexandre  fils,  négociant  en  dentelles,  hospitalier  ;  Leclerc,  employé  à  la 
recette,  aumônier  ;  Testevide,  cap.  12e  inf.  légère,  adjoint  au  garde  des 
sceaux;  Dufey,  sous-lieut.  inf.  légère,  adjoint  à  l'orateur  ;  Pouget,  cap. 
12#  inf.  légère,  vérificateur  adjoint  ;  Colomb,  lieut.  12*  inf.  légère,  porte- 
étendard  ;  Ugenaud,  cap.  12e  inf.  légère,  porte-épée  ;  Abeline,  lieut. 
12°  inf.  légère,  chirurgien  ;  Benoît,  lieut.  12e  inf.  légère,  f.'.  terrible  ; 
Huguet,  lieut.  2e  inf.  légère,  aumônier  ;  Fumé,  chirurgien-major  au 
58°  de  ligne,  1er infirmier  ;  Le  François,  cap.  au  2e  inf.  légère,  2e  infir- 
mier ;  Noël,  préposé  aux  vivres,  garde  des  postes  du  temple  ;  Terrel, 
commis  négociant,  1er  silenciaire  ;  Barnouin,  s. -lieut.  3e  inf.  légère, 
2e  silenciaire  ;  Delannoy,  marchand,  compagnon  ;  Parmentier,  chirur- 
gien, comp.*.  ;  Boehme,  lieut.  2e  inf.  légère,  comp.'.  ;  Davre,  auber- 
giste, apprenti.  —  Membres  non  résidents  :  Gorlier,  marchand  plombier, 
ex-garde  des  sceaux  ;   Perot,    dit  Cornille,    marchand    plombier,  ex-ler 


398  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

surv.-.  ;  Het,  tanneur,  ex-trésorier  ;  Leducq,  avocat,  ex-orateur  ;  Petit- 
Forgeois,  marchand,  ex-secrétaire  ;  Beuf,  lieut.  col.  31e  inf.  légère,  ex- 
ler  surv.\  ;  Olivet,  cap.  31e  inf.  légère,  adjoint  au  2e  surv.\  ;  Moyssent, 
ofïicier  de  santé  ;  Kimling,  s. -lieut.  31e  inf.  légère,  introducteur  ;  Lamour, 
sous-lieut.  3le  inf.  légère  ;  de  Dion,  ancien  capitaine  ;  Raulin,  ancien 
officier  de  cavalerie  ;  Bethune,  propriétaire.  —  Membres  correspondants  : 
Delecourt,  officier  de  santé  ;  Delecourt,  sous-inspecteur  aux  revues  ; 
Deusy,  avoué  ;  Gosse,  homme  de  loi  ;  Dupain,  quartier-maître  de  gen- 
darmerie ;  Payot,  mar.  des  logis  au  20e  rég.  chasseurs  à  cheval  ;  Saint- 
Aubin,  lieut.  au  20e  rég.  chasseurs  à  cheval  ;  Desroches,  s. -lieut.  au 
20e  rég.  chasseurs  à  cheval  ;  Barbier,  adjudant  au  20e  rég.  chasseurs  à 
cheval  ;  Mozer,  Desvignes,  Lucq  et  Poucet,  négociants  en  vins  ;  Becq, 
fabricant  de  mousselines  ;  Mercandin,  lieut.  au  31e  inf.  légère  ;  Desre- 
mond  ;  Lugan,  ancien  officier  de  Chartres  ;  Wantier,  cultivateur  ;  Bau- 
duin,  directeur  de  1  harmonie,  cultivateur  ;  Leroy,  notaire.  Les  frères  ser- 
vants étaient  :  Delecœuillerie,  chapelier,  etCourtiau,   écrivain. 

La  Loge  avait  pour  devise  :  Concordi  fratrum,  Constantia  floret.  Un 
brevet  attributif  d'ambassadeur  représentant,  donné  le  5  mars  1809  à 
Salomon  Polonus,  médecin,  grand  inspecteur,  31e,  porte  les  signatures 
de  Delecourt,  vén." .  m.\  ;  Raulin,  ancien  2e  surv.  .  ;  de  Dion,  ancien  Ie' 
surv.*.  ;  Gorlier,  1er  surv/.  ;  Het,  trésorier  ;  Le  Ducq,  orateur  ;  Liber- 
salle,  ambassadeur  ;  De  Hamel-Bellenglize,  aumônier  ;  Peugnet,  m.*,  des 
cérémonies;  Desgroisilliers,  tuileur  ;  Petit-Forgeois,  secrétaire  général  ; 
Perot  dit  Cornille,  2e  surv.*.  ;  Poitart,  1er  expert  ;  Zanoti  ;  Devillers, 
2e  expert,  et  Raulin  fils. 

AMITIÉ 

Cette  L.*.  s'était  détachée  le  7  juillet  1764  de  la  Constance  ;  c'est  à 
partir  de  cette  date  que  le  G.*.  0.\  en  la  reconstituant,  le  1er  juin  1780, 
l'autorisa  à  prendre  rang.  L'Amitié  fonctionna  peut-être  pendant  la 
Révolution  ;  en  1790  c'est  elle  qui  installa  l'Aurore  de  la  liberté  à  l'O.*. 
de  Béthune. 

En  1785,  son  vén.'.  était  Colin,  procureur  au  conseil  d'Artois;  en  1787 
et  1789,  il  était  remplacé  par  Havet,  fils  aîné,  négociant;  le  député  au 
G.'.  0.\  était  Carbonel  de  Canisy,  ancien  avocat  au  Parlement.  Parmi 
ses  membres  avant  la  Révolution  :  de  Villencourt,  Bequet  de  Cocove, 
Darthaud  de  Germinon,  de  Broccard,  duQuesnoy,  baron  de  Salis-Sévis, 
Fouchain  de  la  Lustière,  Waterlot  de  Fromentel,  vicomte  de  Durfort, 
Fruleux  de  Souche,  Spitallier  de  Seillans,  prêtre  de  l'Oratoire. 

En  1808,  son  vén.-.  était  Suin,  directeur  de  l'enregistrement  ;  son  secré- 
taire, Delleville,  notaire,  et  son  député,  Tribalet. 

En  1813  et  1814,  son  vén.*.  était  Courtalon,  ingénieur  des  ponts  et 
chaussées,  et  son  député,  Noirdemange. 

On  adressait  les  lettres  sous  le  couvert  de  l'anagramme  Estima. 


AUBIGNY 

Nous  avons  vu  (chap.  iv)  que  cette  L.*.  était  l'atelier  particulier  de  la 
duchesse  de  Portsmouth  et  du  duc  de  Richmond. 


LOGES    DE    PROVINCE  399 

Avant  17II"),  cette  L.*.  fonctionnait  à  Paris  ;  elle  ne  fut  officiellement 
installée  à  Aubigny  que  le  12  août  1735,  sous  le  n°  133,  par  Lord 
WeymoutO,  G.'.  M.',  en  charge.  En  1740,  elle  portait  le  n°  118  et  en  1770 
le  n  73,  bien  qu'elle  ait  été  rayée  le  27  janvier  1768  par  la  G.'.  L.\ 
d'Angleterre  pour  avoir  cessé  de  se  réunir  et  négligé  de  se  conformer  aux 
règlements  de  l'Association.  La  duchesse  de  Porlsmouth  était  morte 
dans  les  derniers  jours  de  1734. 

AUCH 

Cette  L.\  fut  constituée  le  15  juin  174G  par  la  L.\  de  Saint-Jean  la 
Française  de  l'O.'.  de  Toulouse.  Parmi  ses  fondateurs  figurent  de  Lar- 
bons,  de  Tourncmire,  de  Marigues,  de  Saint-Pastou  et  de  Gargas. 

Elle  fut  reconstituée  parla  G.\  L.\  le  12  juin  1766  en  faveur  du 
vén.\  m.*.  Projean,  et  par  le  G.\  0.\  le  17  décembre  1778  pour  prendre 
rang  du  17  juillet  1776  La  réinstallation  n'eut  lieu  que  le  10  février 
1779  ;  à  cette  époque,  son  orateur  était  Allemand  de  la  Grange.  En  1780, 
ses  travaux  furent  inspectés  par  quatre  membres  de  la  Parfaite  Union  de 
l'O.-.  du  régiment  de  Champagne;  marquis  d  Orbesson,  d'Arparens  et 
les   frères  d'Aignan. 

En  1785,  son  vén.-.  était  Sarrouy  cadet,  tapissier.  En  1788  c'était  Du- 
rand, directeur  des  travaux  des  ponts  et  chaussées,  et  en  1789,  Chaubard, 
professeur  d'architecture  à  l'école  royale  de  dessin. 

Son  député  était  le  chirurgien  Sue.  Parmi  ses  membres,  avant  la  Révo- 
lution; figurent  :  de  Castera,  de  Noël  de  Saint- Agnan,  de  la  Barthe, 
Lamargnère  de  Lasseube,  de  Laroche  de  Labarthe,  de  Daignan,  de 
Lassus,  comte  de  Tuniac,  de  Batz  de  Mirepoix,  de  Tapie,  baron  de 
Luppé,  de  Benoit  d'Erlincourt,  marquis  de  Pins  ;  Lacoste  et  Sentels  de 
Duran,  prêtres  prébendes  de  la  cathédrale  d'Auch. 

Lorsque  la  L.'.  reprit  ses  travaux  sous  l'empire,  son  vén . \  fut 
de  1808  à  1813  le  baron  Balguerie,  préfet.  En  1814,  il  fut  remplacé 
par  de  la  Martinière,  inspecteur  des  contributions.  Pendant  cette  même 
période,  le  secrétaire  était  Esperoie,  tourneur. 

AVIGNON 

SAINT-JEAN  D'ECOSSE  DE  LA  VERTU  PERSÉCUTÉE 

Nous  avons  vu  (chap.  vu,  p.  260)  que  cette  L.*.  prétendait  faire 
remonter  sa  constitution  à  1742.  Comme  nous  avons  longuement  parlé 
de  cette  L.'.  ainsi  que  de  Saint  Jean  des  Sectateurs  de  la  vertu,  en  de- 
hors de  renseignements  fournis,  voir  les  manuscrits  de  la  bibliothèque 
d'Avignon,  n"8  3072-3-5-6  et  3090-1  ;  CAame  d'Union,  IV,  419  ;  Barjavel, 
Dictionnaire,  II,  248. 

BAYEUX 

CŒURS  UNIS  PAR  EXCELLENCE 

Cette  L.'.  fut  fondée  par  la  G.\  L.\    le  20   décembre  1760  en    faveur 
du  vén.-.  m.-,  marquis  de  Briqueville. 
Elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 


400  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EX    FRANCE 

CONSTANCE 

Constituée  par  une  puissance  inconnue,  probablement  la  Constance 
d'Arras,le28  septembre  1763,  cette  L.*.  fut  reconstituée,  le  25  mai  1774,  par 
le  G.'.  0.\  C'était  une  L.\  essentiellement  aristocratique,  qui  s'opposa 
constamment  à  la  formation  de  nouvelles  L.\  dans  son  voisinage  ;  néan- 
moins elle  participa  en  1776  à  l'installation  de  l'Aménité  à  l'O.'.du  Havre, 
des  Amis  Réunis  à  l'O.'.  du  régiment  d'Armagnac  (1786)  en  garnison  à 
Saint-Lô.  et  l'année  suivante  elle  installa  l'Union  militaire  à  l'O.'.  de 
Valognes.  La  Constance,  qui  se  composait  de  23  membres,  de  1776  à  1790 
futprésidée  par  le  vén.'.  Léonard  de  Rampan,  ancienmajor  au  régiment 
de  Picardie,  chevau-léger    de  la  garde  du  roi. 

Son  député  fut  Trevilliez,  agent  de  change  de  1776  à  1786,  et  Pernot- 
Duplessis,  avocat  au  Parlement  de  1787  à  1790  ;  son  secrétaire  était  du 
Boscq  de  Beaumont,  président  au  conseil  supérieur.  Elle  se  faisait 
adresser  fes  lettres  sous  l'anagramme  de  Castenoc.  Avant  1789  figurent 
parmi  ses  membres  :  Le  Baudre  de  Saint-Remy  ;  comte  de  Toulouse- 
Lautrec  ;  Moisson  de  Vaux  ;  d'Agneaux  ;  Néel  de  Bonnetint  ;  de  Moore  ; 
Cyrème  de  Banville  ;  le  chev.  de  Rampan  ;  de  Buffon  ;  Lalonde  de 
Sainte-Croix  ;  de  Toustain  ;  de  Clcrbecque  ;  le  chev.  de  Lacour  ;  du 
Manoir  de  Juaye  ;  le  chev.  de  Bloville  ;  le  chev.  d'Osbert  ;  d'Hérond- 
ville  ;  l'abbé  Dufayel  ;  le  chev.  de  Marignj'  ;  Vouilly  de  Saint-Clément', 
chev.  de  Pestalozzi  ;  de  'Grainville  ;  de  Saint-Quentin  ;  chev.  de  Renne- 
pont  ;  de  Gibert  ;  de  Pradines  ,  d'Herculais  ;  de  Vaal  ;  de  Villoutreix  ; 
Gassout  de  Champigné  ;  de  Cerisi  ;  de  Préval  ;  de  Verton  ;  Guernon  de 
Rauville  ;  de  Renneville,  de  Vauquelin  et  Martinet. 

Le  Constance  disparut  pendant  la  Révolution  et  ne  reprit  jamais  ses 
travaux. 

BAYONNE 

LA  ZÉLÉE 

Constituée  par  la  G.'.  L.'.  le  10  février  1770,1a  Zélée  fit  i-enouveler  ses 
titres  par  la  même  puissance  le  10  février  1772  et  par  le  G.'.  O.'.  le 
25  août  1776. 

En  17761a  Zélée  se  composait  de  19  membres  et  de  22  en  1777.  Pendant 
ces  deux  années  son  vén.'.  fut  Commemable,  Me  es  arts  et  en  chirurgie. 

D'après  Thory  (Acta  Latom.  I,  140),  cette  L.'.  se  fit  reconstituer  le  16 
août  1779  par  le  Contrat  social.  Il  est  probable  qu'elle  s'adressa  à  cette 
puissance  après  un  incident  qui  avait  eu  lieu  l'année  précédente  :  des 
juifs  avaient  demandé  à  faire  partie  du  souverain  chapitre,  bien  qu'on 
leur  ait  représenté  que  le  grade  de  R-f  ne  pouvait  être  conféré  qu'à  des 
chrétiens.  Les  postulants  ayant  insisté,  on  en  référa  au  G.'.  O.'.  qui, 
éludant  une  réponse  nette,  déclara  que  n'admettant  que  les  trois  grades 
symboliques,  il  laissait  la  Zélée  complètement  libre  d'agir  à  sa  guise. 

En  1783,  un  juif  ayant  néanmoins  pénétré  dans  la  L.'.,  l'atelier  fut  dé- 
serté et  les  dissidents  fondèrent  l'Amitié. 

En  1785,  le  vén.'.  était  Besoux,  garde-magasin  des  vivres  de  la  marine, 
et  en  1788-90  Mauco,  trésorier  de  la  marine.  Le  député  était  Ceyrat. 
avocat  au  Parlement,  officier  du  G.'.  O.'. 


LOGÉS    DE    PROVINCE  401 

Parmi  ses  membres  avant  la  Révolution  :  Sallcncuvc,  capitaine 
d'infanlerie  ;  Desaa,  négociant  ;  de   la  Carte  ;  de  Berteauz  ;  Guéhénenc 

de  Lano  ;  Pougetde  Nanterre  ;  de  Mondoré;  de  Sainl-Cyr  ;  de  Bourciac  ; 
de  Sallemar;  de  Montfort  ;  Corne,  religieux  carme  ;  Gaillaido,  prêtre, 
docteur  en  théologie  de  l'Université  de  Salamanque  ;  Huganet,  cordelier 
de  la  Grande  Observance. 

La  Zélée  disparut  en  1790  et  reprit  ses  travaux  en  1802  avec  le  géné- 
ral de  division  Mauco    comme    vén.". 

Eli  1808,  il  fut  remplacé  par  Monclar,  négociant,  eten  1813-14  parLisca, 
également  négociant.  Pendant  l'empire,  le  secrétaire  fut  Dalbourg.  tré- 
sorier des  invalides  de  la  marine  ;  de  Fondeviolle  fut  député  du  chapitre. 

BEAUCAIRE 

SAINT-JEAN   DE    LA  CONCORDE 

En  1766  la  G. ' .  L.\  constitua  une  L.'.  sous  ce  titre  en  faveur  du 
vén.\  M.'.  Dulong.  Etait  encore  en  vigueur  en  1779. 

BEAUFORT 

Une  L.\  de  titre  inconnu  fut  fondée  en  1763  en  faveur  du  vén.\ 
M.'.  Beaucher,  sénéchal.  Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

SAINT-JEAN-DES-ARTS  ;    SAINT-JEAN-DU-SECRET 

Cette  L.1.  fut  fondée  parla  G.*.  L.\  le  12  août  1765  en  faveur  de 
Sanlin,  sous  le  titre  de  Saint-Jean-des-Arts. 

Les  titres  furent  renouvelés  parla  même  puissance,  le  20  juillet  1772, 
et  parle  G.'.  0.'.,  une  première  fois,  le  24  janvier  1774,  et  la  2e  fois,  le 
4  septembre  1777,  sous  le  titre  de  Saint-Jean-du-Secret. 

En  1776,  cette  L.*.,  qui  n'avait  que  7  membres,  en  avait  19  l'année 
suivante.  En  1776,  son  vén.".  était  Ancenay,  ancien  ingénieur  géographe 
du  roi,  arpenteur  juré  et  inspecteur  des  travaux  de  l'Authion  ;  son  secré- 
taire était  Marnin,  commissaire  aux  saisies  réelles. 

En  1777  le  vén.*.  fut  Jourllain,  ancien  ingénieur  géographe,  puis,  jus- 
qu'en 1787,  Roberdreau,  lieutenant  particulier  à  la  Sénéchaussée,  négo- 
ciant. Le  secrétaire  était  de  la  Motte,  négociant.  En  1788,  le  vén.*.  était 
le  marquis  de  Gizeux-Contades,  ofïicier  supérieur  de  gendarmerie,  et  en 
1789,  Destriché  de  la  Barre,  conseiller  à  la  cour  des  Monnaies.  Pendant 
ces  deux  dernières  années,  le  secrétaire  fut  Danquetil,  lieutenant  de  police. 

La  L.\  se  faisait  adresser  ses  lettres  sous  l'anagramme  de  du  Trescé. 

De  1778  à  1789,  le  député  était  Théaulon,  négociant,  rue  Coquillière. 
Cette  L.\  cessa  ses  travaux  vers  1790  et  ne  les  reprit  pas  sous  l'empire. 

BEAUVAIS 

LA   VRAIE    UNION 

Fondée  par  la  G.'.  L.'.  le  2  octobre  1763,  les  constitutions  de  cette 
L.\  furent  renouvelées  parle  G  \  O.'.  le  7  juin  1774. 

LA    I  RANOMAÇONNERIE.  —   T.  I.  26 


402  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1776  el  1777,1e  vén.'.  était  Doisnel,  prêtre,  grand  vicaire  de  l'église 
de  Beauvais,  et  de  1783  à  1790,  Cornu  de  Villiers,  écuyer,  trésorier  de 
France. 

La  Vraie  Union  installa  la  Parfaite  Amitié,  O.'.  de  Gournay,  le  24  avril 
1783. 

Parmi  les  membres  de  la  Vraie  Union  figuraient  :  Cabanel    (Antonin  - 
Simon),  chirurgien-dentiste,  né  à  Paris  le  18  août  1732  ;  Evrard  (Etienne- 
Charles),  av.  Pari.,  né  à  Beauvaisle  8mai  1751;  Renaut  de  Letlancourt 
(François), gendarme,  né  à  Beauvais  en  1752;  Feuillet(François ;,  horloger, 
né  à  Beauvais  ;  Lemercier  (Germes),  prés,  à  l'Elect.,  né  à  Beauvais  ;  Gode- 
froy  (Louis-Isaac),  proc.  Pari.,  né  à  Beauvais  ;  Evrard    de    Vadaucourt 
(Pierre-François),  gendarme,  né  à  Beauvais.  —  1778  :  de  Nully  de  Levin- 
court,  vén.".;  de  Goussainville,  1er  surv.'.;  Chev.  de  Conty  de  Fercourt, 
2e  surv.'.  ;  de  Vaubecourt,  orateur  ;  Stornat,  secrétaire.  —  1780  :  chev.-.  de 
Conty  de  Fercourt,  vén.*.  ;  Doisnel,  ex-maître  et  nec  plusultra; Danse  de 
Boisquennois,  m.*,  des  cérém. '. — 1781  :  de  Goussainville,  vén.*.  :  Nicolas 
Michel,  fils,  1er  surv.'.  ;   Legrand,    2e    surv.*.  ;    Aucousteaux,    orat.\  ; 
Stornat,  secr.'.  ;  Legrand-Descloiseaux,   g/,  des  sceaux;  Daveluy  (Ant.- 
Fr.-M.)   m",    cérém.  ;  Aucousteaux  de  Conty  Fercourt  (Brice),  gouv.de 
Grandvilliers,     gendarme  ;     Evrard    père      Ch.-Georg.),     seigneur    de 
Deluze,  anc.  secr.  roi  ;  Dangy,  nég.  ;  Nully  de  Levincourt,  nég.,    secré- 
taire ;  de    la    Croix,    nég.    et    rec.    gabelles    ;    Danse   de     Boiquennot, 
sec.  roi  ;  de  Bonne,  nég.;  Gourdin,  prêtre  bénéf.    égl.  Beauvais;  GrueU 
musicien  ;   Lemaire,   nég.  ;    Poulain,  nég.     1er    surv/.  ;  Sellier,  m.',  de 
pension;  Dupré,  nég.  ;  Dupaubourg,  nég.  ;  Michel  de  Goussainville,  nég.  ; 
Warnier,    fab.    vitriol  ;  Lecuyer-Mival,  lieut.   civil,   2e  surv.'.  ;  Stornat, 
proc.  prés.  ;  Blanchard  Danse,  nég.  ;  Salmon,    march.  ;  Cornu  de  Vil- 
lars,  très.  France  ;    Ruste,    lieut.    de  maréchaux  ;    Ducoudray,  épicier  ; 
Laborie,  chirurg.-maj.    g.    corps   roi  ;     Evrard    de    Heloy,    lieut.  inf. ; 
Doisnel  Nicolas,  prêtre,  gr.  vicaire  de  l'égl.  de  Beauvais,  vén. '.  ;  Michel, 
nég.  ;  Hersant-Ledoux,    teinturier  ;    Hersant,   march.  draps  ;  Fournier, 
nég.  ;  Brehier,    nég.  ;  Hisse,    nég.  ;  Daugy,  nég.  ;    Rousselle,   orfèvre  ; 
Aucousteaux  de  Terdonne,   rec.    imp  ,    fr. '.   terrib..  ;    Aucousteaux  de 
Wabecourt,    très.'.  F.*.  ;    Conty   de   Fercourt,  gouv.  de  Grandvilliers  ; 
Cornu  de  Villers,  très.-.  Fr.".,  2e  m.*,  cérém.'.  ;  Danse  de  Boisquennois, 
secr.  roi,  1er    surv.'.  ;    Daugy  l'aîné,    nég.,  2e  surv.'.  ;  Delacour,  tein- 
turier ;  Leclerc,  nég.  ;  Delacroix,  rec.  gabelles  ;  Despaubourg,  nég.,  tré- 
sorier ;  Debonne,  nég.,  secrétaire  annuel  ;  de  Nully  de  Levincourt.  nég.  ; 
de  Rivière,  rég.  manuf.  de  couperose  de  Becquet;  Doisnel,  prêtre  chape- 
lain ;  Ducauroy,  nég.  ;  Lescujer    du  Mirai,    av.  ;    Ducoudraj-,  mercier, 
surint.  perpét.  décoration  ;  Dupré  l'aîné,  nég.  ;  Legrand.,  av.  ;  Fournier- 
Michel,  très.'.  Fr.-.,  1er  m.',  cérém.'.  ;  Goujon,  av.,  orateur  ;  Lefebvre  du 
Rayel,  lieut.  élection,  aumônier  hôpital;  Legrand-Descloizeaux,  cons.  du 
roi,  rapporteur  du   point  d  honneur,  arch.*.  et  g.',   des    sceaux  ;  Laboin. 
chirurg.-maj.,    architecte;   Michel-Dumoulin,    nég.,    vén.'.;    Michel  de 
Mazière,  nég.  ;  Michel-Laversine,  nég.  ;  Buste,   lieut.  maréch.  ;  Stornat, 
procur.,  secrétaire  perpétuel. 

En  1783,  la  liste  des  membres  diffère  peu  de  celle  de  1781.11  y  a  en 
plus  une  liste  de  10  associés  libres  non  résidents  à  Beauvais  :  5  frères 
artistes,  2  frères  servants. 

Le  député  au  G.'.  0.\  était  toujours  :  Paquet,  empl.  au  très.  roy. 


LOGES    DE    PROVINCE  403 

Km  1785,  l'abbé  Dnbourg,  chanoine,  faisait  partie  de  la  L.  .  (1). 
Cette  L.'.  disparut  en  1790  et  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

SAINT-JEAN  DE  BEAUVAIS 

Cette  L.'.  fut  constituée  le  9  novembre  1703,  par  la  G  *.  L*.  A  cette 
époque,  Allou  de  Lisle  était  vén.'.  et  Roulin  et  Regnard  des  Fontaines, 
1er  et  2e  surv.*.  Cette  L.-.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

BERGERAC 

FIDÉLITÉ 

La  G.'.  L.".  fonda  cette  L.".  le  15  novembre  1766,  en  faveur  de  Sor- 
bier de  Jauve.  Cette  L.*.  était  en  vigueur  en  1779. 

BESANÇON 

PARFAITE  ÉGALITÉ 

Cette  L.  .  fut  fondée  par  la  G.*.  L.'.  le  21  mai  1766,  en  faveur  du 
yen.',  m".  Jolivet  de  Charmole.  En  1777  et  1708-3,  son  vén.\  était  Ber- 
geret,  avocat  général  au  Parlement,  et  son  secrétaire,  France,  médecin 
du  roi  de  Pologne. 

La  L.-.  se  fit  reconstituer  par  le  G.'.  O.-.  le  14  mai  1778.  Le  vén.\ 
était  Renard,  conseiller  d'honneur.  • 

En  1785,  cette  L.'.  avait  suspendu  ses  travaux.  Elle  les  reprit  en 
1788  1789  avec  Martin,  avocat  au  Parlement  comme  vén.'.  et  Humbert, 
substitut  du  procureur  général  comme  secrétaire. 

De  1779  à  1784,  figurent  parmi  ses  membres  :  marquis  de  Chaillot, 
prés.-,  à  mortier  ;  de  Maréchal,  comte  de  Vézet,  prés.',  à  mortier  ; 
d'Olivet,  baron  de  Choyé,  prés.*,  à  mortier  ;  Aloizet,  cons.\  ;  Damey 
de  Saint  Bresson,  cons.  ;  Guillemin  de  Vaivre,  int.  St-Dominguc, 
cous.  ;  Maréchal  de  Longeville,  G.  M.  des  Salines),  cons.  ;  de  Masson, 
marquis  d  Autume,  cons.  ;  Masson  de  la  Brétenière,  cons.  ;  Varin  de 
Fresne,  cons.  ;  Camus  marquis  de  Filain,  cons.  hon.  ;  Mongenet  de 
Jamais,  cons.  hon.  ;  Renard,  cons.  hon.  ;  Perroux,  substitut  du  pro- 
cureur général. 

Celte  L.*.  disparut  à  l'époque  de  la  Révolution  et  ne  reprit  pas  ses 
travaux  (2). 

SINCÉRITÉ 

Constituée  par  la  G.*.  L.*.  le  2  octobre  1766,  ses  litres  furent  renou- 
velés par  le  G.*.  O.'.  le  27  février  1777.  A  cette  époque,  elle  élait  com- 
posée de  22  membres  et  son  vén.'.  était  Tharin,  conseiller  au  Parlement, 
et  son  secrétaire  de  Romange,  grand  chantre  et  chanoine  de  Sainte- 
Magdeleine. 

(1)  Voy.  André  Rousselle,  la  F.'.  M.',  à  Beauvais. 

(2)  Voy.  Historique  de  la  F.\  M.',  à  FO.'.  de  Besançon,  depuis  YlQk. 
Paris,  Lebon,  1859. 


404  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

En  1785,  le  vén.-.  était  Maire  de  Soulignez,  conseiller  au  Parlement,  et 
en  1789.  Bouchey,  avocat,  1er  commis  des  domaines.  Le  secrétaire  était 
Rambour,  receveur  de  la  ville. 

Les  lettres  étaient  adressées  sous  l'anagramme  de  Sinicclcr. 

Parmi  les  membres  de  cette  L.\  avant  la  Révolution  figurent  :  Jouf- 
froy  d'Abbans,  initié  le  2  mai  1768  (1).  —  1775  :  de  Bouclans,  Oyselet  de 
Legnia.  Coquelin  de  Morez,  de  Saint-Vaudelin  et  Dunod  de  Chamaze, 
conseillers  au  Parlement;  de  Rozières,  prés.'.hon.*.  ;  Camus,  anc.  cons.'. 
clerc  ;  Monniotte,  cous,  présid.  ;  Bureau  du  Persil,  lieut.  crim.,  baill. 
Vesoul  ;  Marmet,  cons.  baill.  Salins.  —  1777  :  à  la  tenue  du  26  juin, 
Maire  de  Boulignez,  vén.  sortant,  installe  son  successeur  Tharin. 
Bouligney  dit:  «  La  M.',  franchit  les  espaces,  elle  rapproche  les  distances 
et,  d'un  bout  de  l'univers  à  l'autre,  elle  ne  forme  qu'un  peuple  de 
frères.  » 

Sur  cette  L.'.  se  greffa  en  1777  une  L.'.  d'adoption. 

1777  :  Courvoisier;  baron  d'Achie  ;  d'Auxiron  ;  de  Follenay  ;  Seguin  de 
Jallerange  ;  Maire  de  Boulignez  ;  de  Mailly  ;  d'Astorg  ;  d'Uziès  de 
Byans  ;  d'Arçon  ;  de  Rozières  ;  de  Lacoré,  int.\  de  Franche-Comté. 

Tableau  du    17  août  1778. 

Officiers  :  Tharin,  cons.  Pari.,  m.*,  né,  vén.'.  ;  Maire  de  Boulignez 
fils.  cons.  Pari.,  m.',  né,  1er  surv.\  ex-vén.'.  ;  Maire  de  Boulignez 
père,  cons.  Pari.,  m.',  né,  1er  surv.\  adj.*.  ;  Monniotte,  cons. 
Baill.  et  Présid.,  m.*,  né,  2e  surv.\  ;  Hugon,  chanoine  métropole,  m.', 
né,  2e  surv.'.  adj.1.  ;  Mougeot,  av.  Pari, m.",  né,  zélateur  ;  Martenne,  av. 
roi  baill-,  m",  né,  zélateur  adj  '.  ;  Matherot  de  Romange,  grand  chantre 
au  chap.  Sainte-Madeleine,  m.',  né,  secret.'.,  ex-vén. *.  ;  d'Auxiron,  av. 
Pari  ,  m.',  né,  secret.',  adj.'.  ;  Hugon,  cons.  Pari.,  m.',  né,  trésorier; 
de  Verchamp,  prestre,  m.-,  né,  trésorier  adj.'.  aumônier  ;  Bouchet, 
anc.  contrôl.  artill.,  agrégé  m.',  cérém.*.  ;  Pierre,  Dr  méd.,  m.\  né.  m.'. 
cérém.\  adj.'.  ;  Thiébaut,  secret,  roi,  m.',  né,  préparateur  ;  de  Char- 
moille,  chan.  à  la  Métrop.,  cons.  clerc  au  Pari.,  m.",  né,  préparateur 
adj.-.  ;  Courvoisier,  av.  Pari.,  m.*,  né,  orateur  ;  Lombard,  av.  Pari., 
m.',  né,  orateur  adj.'.  ;  Coquelin  de  Morey,  cons.  Pari.,  agrégé  g.\  des 
se.'.  ;  Oyselet  de  Legnia,  cons.  Pari.,  m.\  né,  g.\  des  se.  adj.-.  :  de 
Chaffoi,  off.  rég.  Lanans  dragons,  m.",  né,  g.',  des  portes  ;  Besuchet, 
cons.  baill.  et  présid.,  m.',  né,  g.',  des  portes  adj".  ;  Rambouri-;,  con- 
trôl. fermes  ville,  m.\  né,  surint.  bâtiments  ;  Fraichot,  prof.  acad. 
peint,  etsculpt.,  agrégé  décorateur  adj.'.  ;  Billon,  greff.  chef  Baill.,  m.', 
né  ;  Boutin  de  Dieucourt  fils,  dir.  gén.  fermes  roi,  m.',  né  ;  Daclin, 
cons.  au  magistral,  m.',  né  ;  Dannoires,  anc.  av.  gén.  Pari.,  agrégé; 
de  Castillon,  off.  reg.  Bassigny,  m.*,  né  ;  de  Plantières,  off.  rég.  Royal- 
Cravates  caval.,  agrégé  ;  de  Saint-Eron.  off.  rég.  Royal-Cravates  caval., 
agrégé  ;  de  Sainte-Croix,  off.  reg.  Lanans  dragons,  m  \  né  ;  de  Voisey, 
cons.  Pari.,  m.',  né  ;  Dumont  de  Veaux,  cons.  magistral,  m.',  né  ; 
d'Uziez  de    Byans,  écuyer,  m.',  né  ;    Goux  de    Willeguindry,  av.  Pari., 

(1)  Sur  Jouffroy  d'Abbans  et  ses  initiations,  voir  la  très  intéressante 
étude  de  M.  Prost. 


LOGES    DE    PROVINCE  405 

agrégé  :  Jeannol  de  Courchaton,  cous.  Pari.,  m.*,  né  ;  .Jobard  do  Boivant, 
av.  Pari.,  in.  .  aé  ;  Joli  de  Mailloche,  cons.  Pari.,  m.*,  né  {  Maire  de 
Soulignez,  ott\  génie,  agrégé  ;  Seguin,  cons.  Pari.,  m.\  né  ;  Sandret, 
cous.   Pari.,  m.-,  né  ;  Willoz,  ancien  échevin,  m.',  né. 

Servants  :  Gindre,  maître  ;  Dagonay,  apprenti  ;  Willautne,  apprenti  ; 
Jeuthier,  apprenti. 

Parmi  les  S.  S.-,  de  la  L.  .  d'adoption  figurèrent: 

Intendante  de  la  Corée,  G.*.  M.'.éeoss.  .  ;  marquise  de  Villervaudey , 
G.',  insp.'.  maîtresse  ;  de  Fedry,  oratrice  maîtresse  ;  comtesse  de  Dur- 
fort,  écossaise  ;  Willez,  écossaise  ;  Damoiseau,  m.',  parfaite  ex-maîtresse  ; 
Griois,  m.-,  parfaite  ex-maîtresse  ;  présidente  de  Rozières,  marquise  de 
Pelletan,  conseillère  Varin  de  Fresne,  marquise  de  Germigney,  Maire  de 
Bouliguez,  conseillère,  comtesse  de  Janey,  Courvoisier,  Philipon,  d'Arçon, 
de  Castillon,  Dumont  de  Veaux,  Blanchard,  maîtresses  ;  conseillère  Tha- 
rin,  marquise  de  Molan,  baronne  de  Glane,  de  Vregille,  de  Sauvagné  , 
de  Maijonade,  compagnonnes. 

En  1779  vint  s'ajouter  :  Arnoux  de  Pirey,  conseiller,  et  Bouhelier 
d'Andelange,  avocat  général  au  Parlement  en  1784. 

Cette  L.\  reprit  ses  travaux  sous  l'empire  sous  le  titre  de  Sincérité  et 
Parfaite  Union,  sous  l'inspection  particulière  de  la  régence  écossaise  du 
département.  En  1808  son  vén.*.  était  Raymond,  inspecteur  des  postes, 
en  1810  et  en  1814  le  préfet  baron  Jean  de  Bry  ;  en  1811,  Grand,  juge  à 
la  cour  d'appel.  Le  député  pour  la  L.*.  et  le  chapitre  était  Foraisse. 

En  1810-11  son  tableau  comprenait  les  175  noms  suivants  : 

Dignitaires  ;  Jean  de  Bry,  vén.\  m.\,  préfet  du  Doubs,  G.-.  M."., 
Prov.\  du  ressort,  prés,  né  et  perpét.  du  Directoire  général  dudit  ressort  ; 
de  Raimond,  anc.  insp.  des  postes,  off.*.  du  Direct.-.  gén.*.,  m."  de  la 
Régence,  écon.  du  département,  présid.  perpét.  du  Collège  écossais  de 
Besançon  ;  d'Aigrefeuille,  anc.  magist.,  anc.  chev.  de  Malte,  m.  du 
conseil  nat.,  député  m.',  et  vén.\  du  Centre  des  amis  O.*.  Paris,  repré- 
sentant près  le  conseil  nat.  et  le  G.*.  O.*.  ;  Grand,  juge  à  la  cour  d'appel, 
vén.-.  ;  de  Bouligney,  anc.  cons  au  Pari.,  1er  surv.\  ;  Rey-Morande, 
dir.  enreg.  etdom.,  2e  surv.*.  ;  Pourcelot,av.,  chefbur.  préfect.,  orat.*.  ; 
Chouffe,  av.,  receveur  timbre,  secret.*.,  chef  g.*,  des  se*.  ;  Ledoux,  g.- 
mag.  vivres,  très.'.  ord.\  ;  Detrej',  Just,  nég.  sup.  trib.  corn.,  élémosi- 
naire  ;  Vielle  Jean  Jacques,  propr.  m.',  cérém.  .  ;Detreypère.  bonnetier, 
économe  ;  Branche,  av.  avoué,  1er  surv.'.  adj.*.  ;  Bourqueney,  juge  à  la 
cour,  1er  surv.*.  adj.*.  ;  Thomassin,  méd.  m.  Lég.  dhon.,  2e  surv.*. 
adj.*.  ;  Grillet,  av.  avoué,  2e  surv.'.  adj.*.;  Debilly,  chanoine  hon.  et 
prof,  à  1  acad.  ;  Ordinaire  aîné,  recteur  de  l'acad.  ;  Monnot,  magist. 
sûreté  ;  Bertaut,  insp.  acad.  *,  Guillaume,  av.  sup.  trib.  ;  Rougeot,  rece- 
veur de  la  ville,  et  Castillon,  ing.  chef  du  cadastre,  orateurs  adjoints  ; 
Ordinaire,  méd.  ;  Caseau,  notaire,  et  Michaud,  méd.,  secret.*,  adj.".  ; 
Falconet,  chef.  bur.  préfect.  élém.*.  adj.*.  ;  Bernard,  nég.  ;  Bonnet 
François,  nég.,  et  Jacomin,  dir.  etrec.  gén.  droits  réunis,  m.*,  cérém.*. 
adj .  * . 

Membres  ordinaires  :  Badoulier,  com.  guerres  ;  Beaudot,  propr.  ; 
Besson,  g.  gén.  eaux  et  forêts  ;  Besson  Alexandre,  ex-législ.  ;  Bigot 
Brice,  col.  dir.  ;  Fortif,  off.  Lég.  d'hon.  :  Bretillot,  nég.  ;  Bogillot,  ex-com. 
des  guerres  ;  Bonnet  Gabriel,  nég  ;  Bouchard  père,  notaire  ;  Bouchard 
fils,  élève  en  méd.  ;  Briot,  chirurg.  ;  Bruîeport,  rec.  contrib    ;  Bonnefoi, 


406  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

av.  ;  Boichot,  contrôl.  contrib.  à  Brans  :  Cèdre,  rec.  contrib.  à  Cheri- 
gney  ;  Courvoisier,  auditeur  près  la  cour  d'appel  ;  Cuenot,  méd.  ; 
Dusier,  propr.  ;  Daclin,  baron  de  l'empire,  maire  ;  de  Raucourt, 
propr.  ;  Dagallier,  cons.  eaux  et  for.  ;  Delelée.  adj.  gén.  ;  Detrey,  Fran- 
cisque, nég.  ;  Estrayer,  nég.  ;  Ebelmenn,  nég.  ;  Ferriot  aîné,  propr.  ; 
Ferriot  cadet,  nég.  ;  Ferroux,  ex-législ.,  dir.  contrib.  dir.  ;  Flagey,  méd.; 
Fischer,  prof,  musique  ;  France,  rec.  ambul.  des  dr.  réunis  ;  Gaume, 
notaire,  secret,  mairie  ;  Gauthier,  contrôl.  princ.  dr.  réunis  ;  Grand  fils 
aîné,  insp.  dom.  ;  Gras,  chirurg.  a.  maj.  15e  dragons  ;  Humbert,  anc. 
magist.  ;  Hannier,  secret,  gén.  préfect.  ;  Jussy,  traiteur  ;  Lasalle,  rec. 
princip.  dr.  réunis  ;  Lagrenée,  secret,  part,  préfet  ;  Lapret,  contrôl. 
archit.  de  la  ville  ;  Ledoux,  cap.  gendarm.,  ch.  Lég.  d  hon.  ;  Laviron, 
av.  et  com.  police  ;  Lodibert,  insp.  forêts  ;  Lemaître,  quartier  maître 
gendarme  ;  Maillot,  maire  de  Villafaus  ;  Magnin,  chef  bur.  préf.  ; 
Marchant,  méd.  ;  Marquiset,  nég.  ;  Meuredefaim,  dir.  postes  à  Lisle  ; 
Monnot,  insp.  forêts  ;  Mathiot,  avoué  ;  Mercier,  propr.  à  Rougemont  ; 
Meilleur,  commis  greffier  au  trib.  Baume  ;  Noblot,  anc.  avoué  ;  Ovenn, 
lieut.  vaisseau  ;  Perrot,  notaire  ;  Pretet,  empl.  aux  vivres  ;  Racine  fils 
aîné,  nég.  ;  Raimond  fils,  insp.  postes  ;  Rousselot,  greffier  j.  de  paix  a 
Gy  ;  Sainte-Agathe  et  Seguin,  adjoints  au  maire  ;  Stoesser,  cons.  à  la 
cour  à  Fribourg-en-Brisgau  ;  Spicrenaël,  prés,  cour  criminelle,  chev. 
Lég.  d'honneur  ;  Valette,  général  brig.,  com.  Lég.  d'hon  ,  Vielle  cadet, 
av.  ;  Vincent,  traiteur  ;  Valinde,  nég. 

Amateurs  :  Berger,  Hérissé,  Kemerer,  Lapret,  Monasson,  professeurs 
de  musique  ;  Ferdinand,  décorateur. 

Associés  non  résidents  :  Amet  aîné,  banquier  à  Paris  ;  Amet  cadet, 
nég.  à  Paris  ;  Aubert,  g.-mag.  vivres  à  Gray  ;  Bailly,  off.  santé  ;  Bailly, 
sous-off.  6e  hussards  ;  Balleydier  aîné  et  cadet,  nég.  à  Lyon  ;  Barbay, 
adj.  maj.  bataillon,  prince  Neufchàtel,  ch.  lég.  d'hon.;  Baville,  gén. 
brig.,  chev.  Lég.  d'hon.;  Baulmont,  contrôl.  postes  à  Vesoul;  Bich,  insp. 
loteries  à  Alexandrie  ;  Besson,  garde  gén.  eaux  et  forêts  ;  Bisson,  gén. 
div.,  g.  off.  Lég.  d'hon.  ;  Bisson  cadet,  cap.  g.  imp.  ;  Biglione,  cap. 
tirailleurs  du  Pô  ;  Brenot,  sous-insp.  forêts  à  Saint-Hippoljte  ;  Bar- 
bier, rec.  contrib.  à  Baume  ;  Bizot,  off.  santé  à  Baume  ;  Chalmin, 
contrôl.  navig.  à  Gray  ;  Comolty,  cap  com.  tirailleurs  du  Pô,  chev. 
Lég.  d'hon.  ;  Courcelle,  g.-mag.  vivres  à  Gand  ;  Debrun,  lieut.  bataillon 
prince  de  Neufchàtel  ;  Ducoudray,  quart,  maître  d'artil.,  g.- côtes  à 
Gênes  :  Dandrier,  vicomte  de  Gorgier,  cap.  batail.  prince  Neufchàtel  ; 
Douhaint,  aide-maj.  15e  inf.  légère  ;  Didelot,  j.  de  paix  à  Baume  ;  Droz, 
insp.  gén.  dr.  réunis  ;  Dufay,  avoué  ;  Dangel,  empl.  douanes  ;  Faivre 
d'Esnans,  juge  trib.  lre  instance  ;  Guj'ot,  off.  bataill.  prince  Neufchàtel  : 
Geliot,  rec.  enreg.  à  Pesmes  ;  Gourdant,  propr.  à  Champlitte  ;  Groussol, 
sous-insp.  eaux  et  forêts  à  Saint- Jean-de-Losne  ;  Gruardet,  nég.  à  Lyon  . 
Grandjean,  gén.  brig.,  com.  Lég.  d'hon.  ;  Lodibert,  insp.  forêts  à  Ornans  ; 
Leisinring,  dit  Andrey,  prof,  musique  ;  Mathiot,  avoué  ;  Martelet, 
ex-chef  du  service  vivres  viande,  à  Paris  ;  Maret,  com.  ord.  à  Naples,  ch. 
Lég  d'hon.  ;  Mayor,  nég.  à  Neufchàtel  ;  Mourgeon,  nég.  à  Paris  : 
Malichard.  j.  de  paix  à  Nancray  ;  Monnier,  av.  m.  cons.  gén.  ;  Moreau. 
insp.  gén.  poudres  et  salpêtres  ;  Nebenius,  secret,  min.  finances  à 
Carlsrhue  ;  Oberty,  j .  de  paix  à  Dampierre  ;  Pillard,  nég.  à  Gray  ; 
Paturel,  quart,    maître   au    92e   ligne  ;    Perchet,    juge   trib.    de  Gray  ; 


LOGES    DE    PROVINCE  107 

Petitpierre,  lient,  batail.  Ncufchùtcl  ;  Picard,  chef  d'escad.,  a.  de  camp 
du  mar.  Oudinot,  chev.  Lég.  d'hon.  ;  Pamplona,  gén.  brig.  à  Gray  ; 
Pothé,  rec.  enreg.  à  Maiche  ;  Quevremont,  nég.  à  Lyon  ;  Ravier,  insp. 
gén.  des  e.  et  forêts  ;  Roger,  dir.  postes  si  Gray  ;  Roget,  nég.  à  Lyon  ; 
Souilhé,  sous-insp.  i-cvues,  ch.  Lég.  d'hon.  ;  Teste,  maire  d'Ornans  ; 
Thelmier,  anc.  employé  des  postes  ;  Tonnot,  notaire  à  Quingey  ;  Tour- 
telle,  prof,  de  chimie  à  Strasbourg;  Tharin,  contrôl.,  provis.  dr.  réunis  à 
Autun  ;  Uny,  a.  de  camp  du  gén.  Risson,  chev.  Lég.  d'hon. 

Gardes  du  Temple  :  Rauthias,  concierge  à  la  préfecture  ;  Daclin  et 
Guibard,  agents  de  police. 

BLAYÊ 
CŒURS    UNIS 

Cette  L.\  fut  constituée  le  15  novembre  1766  par  la  G.\  L.'.  au  pro- 
fit du  vén.v  m.'.  Denis,  qui  occupait  encore  ces  fonctions  en  1779.  En 
1788  le  vén.\  était  Favereau,  contrôleur  des  fermes  du  roi,  et  en  1789 
Constant,  prêtre.  Le  secrétaire  en  1788-9  était  Dusnetz,  commissaire  des 
classes.  Parmi  ses  membres  :  Jaquelin. 

Elle  disparut  en  1790  et  reprit  ses   travaux  sous  l'empire.  De  1808  à 
1814,  son  vén.\  était  Régnier  fils,  négociant,   président  du    tribunal   de 
commerce.  En  1813-4    son  vén.\  d'honneur    était    Aubert,  membre  du 
Corps  législatif.  De  1808  à  1814,  le  secrétaire  fut  Rabotte  aîné,  courtier, 
et  le  député,  Maugeret. 

BLOIS 

Constituée  le  5  décembre  1762  parla  G.'.  L.\  au  profit  de  Pierre  Paul 
Charles,  cette  L.'.,  encore  en  vigueur  en  1779,  ne  fonctionnait  plus  en 
1788.  Elle  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

BORDEAUX 

ANGLAISE 

Cette  loge  est  généralement  connue  sous  le  titre  de  l'Anglaise  n°  204.  En 
réalité,  elle  porta  le  n°  363  en  1766,  le  n°  298  en  1770,  le  n°  240  en  1781 
et  le  n°  204  en  1792  seulement. 

L'Anglaise  est  une  des  plus  anciennes  L.'.de  France  et  quoiquele  G.". 
O.-.  n'ait  pas  voulu  reconnaître  son  ancienneté,  à  cause  probablement  de 
ses  nombreuses  cessations  de  travaux,  il  est  certain  qu'elle  commença  ses 
travaux  avec  un  groupe  de  commerçants  anglais  le  27  avril  1732  ;  son 
vén.\  était  alors  Martin  Kelly.  Ses  débuts  furent  pénibles  ;  elle  dut, 
faute  d'adhérents,  entrer  en  sommeil  le  30  septembre  1733.  Elle  reprit 
ses  travaux  le  29  juin  1735,  pour  entrer  dans  un  nouveau  sommeil  le  27 
septembre  suivant,  et  rentrer  en  fonctions  le  26  février  1737;  le  29  août 
1740  elle  constitua  la  Française  à  1*0.'.  de  Rordeaux. 

Le  29  août  1742,  l'intendant  de  Guyenne,  Roucher,  lui  intima  Tordre 
de  se  dissoudre.  Elle  protesta  et  se  réunit  dans  un  autre  local.  Il  semble 
qu  elle  ne  fut  plus  inquiétée  par  les  autorités,  car  ce  fut  une  des  L.'. 
les  plus  prolifiques  de  France.  Elle  fonda  en  effet  :  le    6  novembre  1745, 


408  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

l'Heureuse  Rencontre  àl'O.'.  de  Brest  ;  le  30  juin  1746,  une  nouvelle  L.'. 
dans  la  même  ville.  Peut  être  Saint-Jean  des  Amis  intimes  ;  le  8  juin  1751, 
à  Limoges  ;  le  19  février  1754,  à  Pons,  l'Anglaise  fille  de  Bordeaux  ;  le 
4  février  1755,  une  L.'.  sous  le  même  titre  à  Cayenne  ;  le  29  juillet  1760, 
à  Cognac  ;  le  7  mai  1765,  l'Amitié  à  Périgueux  ;  le  16  juillet  1765,  la 
Consolante  des  maçons  à  la  Nouvelle-Orléans. 

Le  3  mai  1746,  le  vén.\  de  la  Parfaite  Amitié  de  Bordeaux,  Vigner, 
se  présenta  à  ses  travaux  pour  demander  s'il  pouvait  admettre  des 
juifs.  La  réponse  fut  négative. 

Le  30  novembre  de  l'année  suivante,  elle  refusa  d'admettre  le  juif 
Cappadoce, d'Amsterdam,  et  le  11  février  1749,  malgré  la  recommandation 
de  la  Paix,  O.*.  d'Amsterdam,  elle  maintint  son  refus.  Elle  persévéra 
dans  sa  doctrine  jusqu'au  8  juin  1810  en  proclamant  à  cette  date  qu  il 
n'y  avait  que  les  chrétiens  qui  pouvaient  être  initiés  aux  mystères 
maçonniques. 

Le  15  avril  1749  elle  avait  signifié  à  la  Française,  O.*.  de  Toulouse, 
que  si  elle  continuait  à  ne  point  faire  prêter  serment  sur  l'Evangile,  elle 
ne  recevrait  pas  ses  visiteurs. 

Le  2  août  1745,  elle  avait  exclu  ceux  qui  tenaient  de  près  ou  de  loin 
au  théâtre  et  avait  refusé  des  musiciens  de  l'orchestre  ;  le  17  septembre 
1748,  elle  proposa  aux  autres  L.'.  de  Bordeaux  de  ne  plus  admettre 
désormais  aucun  comédien,  danseur  de  corde  et  charlatan. 

Pour  des  causes  inconnues,  elle  fut  obligée  de  suspendre  ses  travaux  du 
13  janvier  1761  au  31  janvier  1764.  A  peine  réinstallée,  en  février  1764, 
elle  mit  à  l'index    la  loge  de  Martines  de  Pasqually. 

Après  s'être  rendue  indépendante  des  puissances  maçonniques  fran- 
çaises, elle  demanda  la  confirmation  de  sa  constitution  à  la  G.\  L.*. 
d'Angleterre,  qui  les  lui  accorda  le  8  mars  1766  en  faisant  remonter  ses 
travaux  à  1732.  Puis,  voulant  rentrer  sous  l'obédience  du  G.-  O".,  le 
6  septembre  1774  elle  suspendit  sa  correspondance  avec  la  G.\  L.-. 
d'Angleterre.  Le  G.'.  O.'.  ne  l'admit  que  le  27  novembre  1780,  pour 
prendre  rang  du  7  novembre  1778  seulement.  Elle  fut  installée  le 
25  mars  1781.  Son  député  était  Desveux,  négociant. 

Le  15  juillet  1785,  Chicou  Saint-Bris,  lieutenant  des  frégates  du  roi, 
étant  vén.'.,  elle  déclara  suspendre  sa  correspondance  avec  le  G.\  O.'.  et 
se  fit  rétablir  le  20  décembre  1783  par  la  G.*.  L.  .  d'Angleterre,  qui  ne 
lui  accorda  que  le  n°  240. 

Le  31  août  1790,  elle  forma  un  pacte  fédératif  avec  quatre  L.\  de  Bor- 
deaux :  la  Française,  élue  Ecossaise  ;  la  Française  d'Aquitaine  ;  l'Amitié 
et  l'Harmonie.  Ces  L*.  se  séparent  du  G.\  O.'. 

Pendant  la  Révolution,  cette  L.'.  s'occupa  beaucoup  de  politique.  Le 
13  novembre  1792,  elle  fit  brûler  les  attributs  du  f.'.  Mouchy,  «  proscrit 
par  les  lois  saintes  de  la  République  ». 

Le  28  novembre  1793,  elle  prend  le  titre  de  L.\  n°  204  dite  Egalitc. 
Elle  sollicita  la  visite  du  représentant  du  peuple  Ysabeau,  et  décida  que 
les  fif.\  se  tutoieraient.  Elle  suspendit  ses  travaux  du  9  thermidor 
an  II  à  brumaire  an  III,  et  en  nivôse  de  la  même  année  elle  informe  les 
autres  L.".  de  Bordeaux  qu'elle  a  repris  son  ancien  nom  C  qu'elle 
n'aurait  jamais  dû  quitter  P. 

Le  18  mai  1802  elle  s'affilie  à  la  L.\  mère  Ecossaise  de  Marseille  et 
se  replace  sous  la  dépendance  du  G.'.  O.'.  le  27    septembre  1803.    Son 


LOGES    DE    PROVINCE  409 

▼en.*,  en  1808  était  Bonan,  notaire,  et  en  1813  et  1814  BillaUe-Faugère, 
propriétaire. 

LOGE    D'HÉRODOM 

En  1744,  un  gentilhomme  écossais  de  nom  ineonnu  aurait  fonde  à 
Bordeaux  une  L.\  de  Perfection  du  rite  d'IIérodom  de  Kilwining,  s'il 
faut  ajouter  foi  à  un  inventaire  du  suprême  Conseil  des  Etats-Unis 
d'Amérique  du  4  décembre  1802.  Rien  n'est  moins  prouvé. 

AMITIÉ 

Le  18  mai  1746,  la  G.'.  L.\  constitua  cette  L.\  en  faveur  du  vén.-  . 
m.*.  le  comte  de  Pontac.  Ses  titres  furent  renouvelés  par  le  G.'.  0.\  le 
22  juillet  1774. 

En  1776,  elle  comprenait  26  membres  et  178  l'année  suivante.  En  1776, 
son  vén.*.  était  Borel,  négociant,  et  son  député  Bacon  de  la  Chevalerie, 
Elle  faisait  adresser  ses  lettres  à  Goel  de  Milatié  (L.\  de  l'Amitié). 

En  1777  son  vén.-.  était  Baux,  négociant,  et  son  député  de  Baslerot, 
conseiller  au  Parlement  de  Bordeaux. 

Ses  brevets  étaient  de  magnifiques  gravures  tirées  sur  parchemin  et 
signés  :  «  F.  Boucher  invenit  1765,  Chofîard  sculpsit  1766.  »  Les  vén.-. 
furent  :  en  1778,  Barretde  Rivezol,  conseiller  à  la  Cour  des  aides,  et  de 
Groc.  conseiller,  puis  président  à  la  Cour  des  aides  ;  en  1781  et  de  1787 
à  1789,  deBasterot  ;  en  1784  et  1785,  Dudon,  procureur  général  au  Par- 
lement. 

Le  12  décembre  1781,  elle  donna  une  fête  somptueuse  pour  célébrer  la 
naissance  du  Dauphin.  Elle  correspondait  avec  23  L.\  tant  en  France 
qu'aux  colonies,  dont  5  constituées  par  elle.  En  1784,  elle  avait  332  mem- 
bres presque  tous  négociants  :  le  nombre  diminua  dans  de  grandes  pro- 
portions les  années  suivantes. 

Elle  reprit  sous  l'Empire  ses  travaux  qu'elle  avait  cessés  en  1791.  De 
1808  à  1814,  son  vén.'.  était  Condole-Belle-Isle,  propriétaire,  son  secré- 
taire était  Beye,  négociant,  et  son  député  Rcettiers  de  Montaleau. 

FRANÇAISE  ÉLUE  ÉCOSSAISE 

Celte  L.-.,  qui  fonctionnait  depuis  1740,  fut  fondée  par  la  G.'.  L.-.  le 
1er  février  1765,  en  faveur  de  Martines  de  Pasqually,  qui  eut  jusqu'au 
moment  de  son  départ  pour  Saint  Domingue  de  grandes  difficultés  pour 
obtenir  le  maintien  de  ses  constitutions.  A  cette  L.'.  s'était  annexée  une 
L.-.  d'adoption  qui  le  5  mars  1775  donna  une  grande  fête  suivie  de  bal 
pour  célébrer  le  retour  des  membres  des  Parlements  exilés.  Le  11  mai 
suivant,  le  G.-.  O.-.  renouvela  ses  titres. 

En  1776,  lors  de  son  passage  à  Bordeaux,  le  duc  de  Chartres  posa  la 
première  pierre  de  l'édifice  destiné  aux  séances  de  cette  L.'.  Le  vén.'. 
était  Trigand,  avocat,  et  il  y  avait  136  membres,  parmi  lesquels  Marbotin 
de  Mirail,  de  Gobineau,   Lynch   et    Bouziers,    conseillers  au  Parlement. 

En  1777,  le  vén.-.  était  le  baron  de  Razac,  chevalier  d'honneur  au 
Parlement  de  Guyenne. 

En  1779,1a  L.'.  se  composait  des  membres  suivants  : 


410  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Comte  de  Béarn,  lieutenant  de  maire  ;  Brivezac,  cons.  au  Parlement  ; 
Bienassis,  présid.  aux  requêtes  ;  Bonnier,  nég.,  1er  surv.".  ;  Bujac  aîné, 
nég.  ;  Bujac  jeune,  nég.  ;  Brun  Bazille,  consul  de  la  bourse  ;  Bouquier, 
cons.  au  Parlement  ;  Beaulieu,  caissier  bureau  de  la  guerre  ;  chevalier 
Buisseron,  écuyer  ;  Boudet,  nég.,  trésorier  ;  Conteneuil,  cons.  au  Parle- 
ment ;  Conilhy,  cons.  au  Parlement;  Chagron,  nég.  ;  Cazeaux,  avocat; 
Courroy  de  Cartelache,  commis  m.*,  des  c.\  ;  Chaarel  de  la  Chenaj-, 
capitaine  de  navire  ;  Delancre  ;  Dupaty,  avocat  général  ;  Dumas  de  la 
Roque,  cons.  ;  Demour,  ci-devant  cons.  ;  Duras  fils,  duc  {sic)  ;  Duras, 
nég.  ;  Dubois,  nég.  ;  Despardins,  peintre  ;  Dufau,  capitaine  du 
port;  Desbiés,  abbé,  chanoine,  hospit.".;  Dardelle,  nég.;  de  Lancre, 
président  à  mortier  ;  de  Gourgues,  président  à  mortier  ;  Dechamps, 
américain  ;  Fadeville,  nég.  ;  Gobineau,  cons.  ;  Géran,  nég.,  tuileur  ; 
Gibeaudeau,  nég.  ;  Jurine,  nég.  ;  Jauge  Théodose,  nég.  ;  Leberlhon, 
1er  président,  vén.".  d'honneur  ;  Leberlhon  fils,  cons.  vén.*.  ;  Lavie, 
président  à  mortier  ;  Linch,  cons.  ;  Lamouroux,  cons.  ;  La  Court, 
imprimeur  ;  Lagarde,  contrôl.  poudres,  orat.\  ;  Loche  jeune,  courrier 
royal  ;  Lalanne,  nég.  ;  Louis,  architecte  ;  chevalier  Langalerie,  écuyer  ; 
Laporte,  courtier  de  change  ;  Libéral  Gouteyron,  capitaine  de  navire  ; 
Lanoix,  capitaine  de  navire  ;  chevalier  Monbrun,  com.  fort  Sainte- 
Croix;  Monteau  aîné,  nég.  ;  Maynas,  contrôl.  bureau  de  sortie;  Mercier, 
nég.  ;  Matthieu,  nég.  ;  Monteau  jeune,  nég.  ;  Perrens,  notaire  ; 
Poupard,  juge  ;  Pedesclaux,  consul  d'Espagne  ;  Pescheur  de  Crémont, 
contr.  secret.".  ;  Quinaud,  procureur  au  Parlement,  2e  surv.'.  ;  baron 
de  Razac,  chevalier  d'honneur,  ex-maître  ;  Reignac,  cons.  ;  Beaud, 
capitaine  de  navire  ;  abbé  Roboam,  prieur  ;  Lavi  de  Mondial,  nég.*.  ; 
Soulier,  nég.,  2e  adjoint  ;  Saint-Guirons,  avocat,  1er  surv.*.  ;  Salan 
jeune,  capitaine  de  navire  ;  Trigant  père,  avocat,  ancien  vén.'.  ;  Tayeau, 
nég.,  tuileur  ;  Taveau,  ancien  mousquetaire  gris  ;  Trigant  fils,  avocat; 
Verthamont,  président  à  mortier  ;  Vigneron,  trésorier  de  France. 

En  1780  les  officiers  étaient  :  Leberthon,  1er  président  du  Parlement, 
vén.'.  d'honneur  ;  Comte  de  Béarn,  capitaine  de  haut  bord,  vén.".  en 
exercice  ;  Leberthon,  comte  de  Virlade,  président  à  mortier,  ex-maître  ; 
Trigant,  avocat  en  la  cour,  député  maître  ;  Bienassis,  président  à  la 
chambre  des  enquêtes,  1er  surv.".  ;  Metyvier,  chirurgien  de  Mgr  le  Mal 
de  Mouchy,  2e  surv.'.  ;  Lagarde,  secrétaire  de  la  subdélégation,  ora- 
teur ;  Pescheur,  contrôleur  des  arrêts,  secrétaire  ;  L'Heureux,  Augustin, 
garde  des  sceaux  ;  Trigant,  avocat  en  la  cour,  secrétaire  de  la  corres- 
pondance ;  F.  Perrens,  conseiller  du  roi,  notaire,  économe  ;  Courroy, 
secrétaire  de  la  correspondance  des  fermes  du  roi,  Me  des  cérémo- 
nies ;  Libéral  et  Dessens,  capitaines  de  navire,  frères  terribles  ;  Saint- 
Guirons,  avocat  en  la  cour  ;  Quinaud,  procureur,  et  Poupard,  tui- 
leurs  ;  L  Heureux,  Augustin,  hospitalier;  Fadeville,  nég.,  adjoint  au 
secrétaire;  Monteau  aîné,  nég. ,  adjoint  au  trésorier  ;  Darrieux,  prati- 
cien, adjoint  au  garde  des  sceaux  ;  L'Heureux  et  Darrieux,  adjoints  au 
secrétaire  de  correspondance. 

En  1781  les  officiers  étaient  :  Leberthon,  1er  président  du  Parlement, 
vén.'.,  Me  perpétuel  d'honneur;  de  Bienassis,  président  de  la  chambre 
des  requêtes,  vén.  '  .  en  exercice  ;  Comte  de  Béarn,  capitaine  de  haut- 
bord,  ex-maître  ;  Poupard,  juge  de  Belfort,  député-maître  ;  Lagarde, 
avocat  secrétaire  de  la  subdélégation,  1er  surv.".  ;  Saleau  aîné,  capitaine 


LOGES    DE    PROVINCE  111 

de  navire,  2e  surv.-.  ;  Pescheur,  contrôleur  dos  arrêts,  orateur;  Saint- 
Guirons,  avocat  au  Parlement,  chef  tic  la  correspondance  ;  Mestivier, 
chirurgien  en  chef  de  l'Hôtel-Dicu  ;  L'Heureux,  Augustin,  adjoints; 
Darieux,  conseiller  du  roi,  notaire,  secrétaire;  Héraut,  Teysscrc,  nég., 
adjoints;  Monteau  aîné.  nég..  trésorier  ;  Lalannc,  nég.,  adjoint;  L'Heu- 
reux, Augustin,  garde  des  sceaux  et  archives;  Montau  jeune,  nég.,  éco- 
nome ;  Cauroy,  secrétaire  de  la  correspondance  des  fermes  du  roi, 
maître  des  cérémonies  ;  Jurine,  Laheus,  nég.,  terribles  ;  Quinaud, 
procureur  au  Parlement;  Perrens  et  Fadcville,  nég.,  tuileurs  ;  Roboam, 
écuyer,  prieur,  hospitalier. 

D'après  un  brevet  de  Rose-Croix  donné  à  Guillaume  Séraphin,  avocat 
au  Parlement,  âgé  de  34  ans  en  1782  et  signé  par  le  chap.  reg.  d'Hére- 
dom  à  Bordeaux,  les  membres  du  chapitre  étaient  :  Aumailley  père, 
Rose-Croix  ;  G  R.  Lasseine,  Rose-Croix  ;  Dabat  ;  Tumaille  fils,  major 
très.,  Rose- Croix  ;  D'Aure,  Rose-Croix  ;  Gme  d'Arblade,  Rose-Croix  ; 
Chabould,  Rose-Croix. 

En  1785,  le  vén.-.  était  de  Saint-Guirons,  avocat  au  Parlement,  le  se- 
crétaire, Monteau,  négociant,  et  le  député.  Tassin  de  l'Etang. 

En  1788,  Saint-Guirons  était  encore  vén.".  et  Gibaudeau,  négociant, 
secrétaire. 

En  1789,  le  vén.*.  d'honneur  était  Le  Berihon,  1er  président  au  Parle- 
ment, député  de  la  noblesse  aux  états  généraux;  le  vén.*.,  Quinaud, 
procureur  au  Parlement,  et  le  député  était  Jozeau,  avocat  au  Parlement. 

La  Française  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution.  Elle  les  reprit 
sous  l'empire.  En  1804,  G.  Cazeaux  était  orateur  ;  de  1808  à  1813,  le 
vén.'.  était  Michel,  greffier  en  chef  à  la  Cour  d'appel. 

En  1813  et  1814,1e  vén.-.  d'honneur  était  Lynch,  maire  de  Bordeaux. 
En  1814,1e  vén..  "en  activité  était  Ferrère,  avocat.  De  1808  à  1814,  le 
député  pour  la  L.-.  et  le  chapitre  était  Rœttiers  de  Montaleau. 

GRANDE  LOGE  ÉCOSSAISE 

En  1750,  une  L.\  faisant  fonction  de  Mère  Loge  aurait  existé  sous  ce 
titre  à  Bordeaux.  (Voy.  Rouen.) 

FRANCS  ÉLUS  ÉCOSSAIS  ET  AMIS  RÉUNIS 

Cette  L.\  aurait  été  fondée  le  1"  février  1765.  Elle  n'a  pas  laissé  de 
traces. 

FRANÇAISE  DANS   LA  VILLE 

Fondée  le  8  février  1765  par  la  G.'.  L.-.  en  faveur  de  Moreau,  cette 
L.-.  fonctionnait  encore  en  1779. 

RÉUNION  DES  ÉTATS 

Celte  L.'.  fut  fondée  le  4  février  1767  par  la  G.-.  L.\  en  faveur  de 
Raoux  et  fonctionnait  en  1779. 

VRAIE  LOGE  ANGLAISE 

Cette  L".,  fondée  à  une  date  inconnue,  avait  pour  vén.-.  Pelligneau, 
juge  de  la  monnaie  en  1788,  etDarche,  ancien  capitaine  d'infanterie,  che- 


412  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EX    FRANCE 

valier  de  Saint-Louis  en  1789.  Le  secrétaire  était  Pourcin,  commissaire 
principal  du  bureau  de  poste.  Entrée  en  sommeil  en  1791,  elle  ne  reprit 
pas  ses  travaux  sous  l'empire. 

SAINT-ÉTIENNE  DES  AMIS  JOYEUX 

SAINT-ESPRIT 

FAMILLE  UNIE  DU  BON  ACCORD 

Ces  3  L/.,  fondées  à  des  époques  inconnues,  n'ont  pas  laissé  de  traces. 


BOULOGNE-SUR-MER 

SAINT-FRÉDÉRIC  DES  AMIS  CHOISIS 

Constituée  le  4  février  1767  par  la  G.  .  L.\  en  faveur  du  vén.\  m.'. 
Calaine,  cette  L.\  a  laissé  peu  de  traces  jusqu'au  28  mai  1788,  date  de  sa 
reconstitution,  à  laquelle  présidaient  les  ff.\  Fontaine  Solare,  Dupuis  de 
Rame  et  le  chev.  de  Cossette  de  la  Parfaite  Union,  0.'.  de  Montreuil. 
L'orateur  de  Saint-Frédéric  était  le  f.\  Mariette,  grand-père  du  savant 
égyptologue.  Le  vén.\  était  Ducrocq  de  Buncres,  écuyer,  président  et  tré- 
sorier de  France.  Le  secrétaire  Hédouin,  contrôleur  de  la  poste  aux  lettres, 
et  le  député  Véron  de  Sérame,  régisseur  général  des  étapes.  Cette  L.-. 
cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution  ;  en  1808,  son  vén.'.  était  le 
général  de  brigade  Taviel,  et  en  1813-4  Yersial.  négociant.  Son  secrétaire 
était  Berquier-Neuville,  négociant,  et  son  député  Cuvelier  de  Trié,  capi- 
taine de  cavalerie . 


BOURG-EN-BRESSE 


LES  ELUS 


Cette  L.*.  fut  constituée  le  4  novembre  1768,  ses  titres  furent  renou- 
velés parla  G.*.  L.  .  le  18  mai  1772  et  par  le  G.  .  0.\  le  2  décembre 
1774. 

En  1776,  elle  se  composait  de  26  membres  ;  son  vén.*.  était  Olivier, 
médecin,  et  son  secrétaire  Geneva}*,  procureur.  En  1777,  le  vén.*.  était 
remplacé  par  Riboud,  avocat,  de  1785  à  1788  par  Ravet,  procureur,  et  en 
1789  par  Goisson,  imprimeur.  En  1788  et  1789,  le  secrétaire  était  Chambre, 
bourgeois  et  officier  municipal.  De  1775  à  1789,  le  député  fut  Lalande, 
de  l'Académie  royale  des  sciences. 

Disparue  en  1791,  cette  L.\  ne  reprit  pas  ses  travaux  sous  l'empire. 

BREST 
L'HEUREUSE  RENCONTRE 

Cetle  L.'.  fut  constituée  le  6  novembre  1745  par  la  L.'.  Anglaise  de  Bor- 
deaux ;  ses  titres  furent  renouvelés  par  la  G.\  L.'.  le  9  octobre  1772  et  par 
le  G.'.  O.*.  le  7  décembre  1773.  Ses  vén.'.  furent,  en  1745,  Zolicoffre  ;  en 
1764,  Février  ;  en  1776,  le  chev.  du  Deserseul,  officier  de  génie  ;  en 
1777,  le   chevalier  Le   Gonidec,  officier  de    la  marine    du  roi  ;  en  1785, 


LOGES   DE   PROVINCE  U3 

Rollia  de  la  Farge,  professeur  de  mathématiques  des  gardes  marines  ; 
en  1788,  Daniel  de  Colhoé,  ancien  capitaine  d'infanterie,  et  en  1789,  de 
Coatignan,  conseiller,  avocat  et  procureur  du  roi  à  l'Amirauté.  En  1770, 
elle  c'avait  pas  moins  de  G9  membres.  En  177(5-7,  Dencux,  chef  au  bureau 
des  vivres  militaires,  fut  son  secrétaire  ;  l'abbé  Pingre,  bibliothécaire  de 
l'abbaye  Sainte-Geneviève,  fut]  son  député  en  1770,  et  à  partir  de  1785 
il  fut  remplacé  par  Chuppin  de  Germigny  fils,  conseiller  au  Châtelet.  Le 
4  juillet  1788  avait  été  constitué  dans  cet  atelier  un  chapitre  d'Hérodom 
de  Kihvining.  Il  ne  paraît  pas  certain  que  celte  L.\  ait  complètement 
cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution. 

De  1802  à  1808,  son  vén.\  fut  Guilhem  aîné,  négociant,  et  Barchau, 
commissaire  inspecteur  des  guerres,  en  1813  et  1814. 

Son  secrétaire  fut  Le  GofF,  directeur  des  postes,  et  son  député,  Defon- 
deviolle. 

ÉCOSSAISE  DE  LA  VÉRITABLE   UNION 

Le  30  avril  1704,  cette  L.\  fut  constituée  par  la  G.'.  L.\  en  faveur  du 
vén.\  m.*,  de  la  Porte  ;  elle  existait  encore  en  1779. 

CONSTANCE 

Cette  L.\  fut  constituée  à  Recouvrance,  parla  G.'.  L.v,  le  8  mai  1708, 
en  faveur  de  Sauvai  ;  elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

SAINT-JEAN  DES  AMIS  INTIMES 

Fondée  à  une  date  inconnue,  peut-être  en  1740,  par  l'Anglaise  de 
Bordeaux,  cette  L.\  n'a  pas  laissé  de  traces. 


BRIOUDE 

SAINT-JULIEN 

Constituée  le  0  novembre  1744  par  la  G.\  L.\,  ses  titres  furent  renou- 
velés par  le  G.'.  O.'.  le  11  novembre  1779.  Cette  L.\,  essentiellement 
aristocratique,  fut  la  mère  de  nombreuses  L.'.  à  Saint-Flour,  Clermont, 
Riom,  Thiers,  Saint-Pourçain,  etc.  Elle  s'était  installée  dans  les  immeu- 
bles de  l'ordre  de  Malte.  Parmi  ses  membres  figuraient  :  de  Brusolles, 
de  Comilhac,  de  Planhol,  de  Montchal,  de  Bouille,  Chardon  des  Rois  et 
plusieurs  chanoines  du  chapitre  noble  de  Saint  Julien. 

En  1785,  son  vén.\  était  Belamy  du  Breuil,  otticier  au  régiment  de 
Beauvoisis.  En  1788-9,  il  était  remplacé  par  Dalbine  fils,  avocat  au  Parle- 
ment, qui  avait  été  secrétaire.  Le  député  était  Gueffier  de  la  Garde  de 
Longpré,  prêtre,  docteur  en  théologie. 

Après  avoir  interrompu  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  cette  L.'. 
les  reprit  sous  le  Consulat.  Sauf  une  interruption  en  1808,  son  vén.\  fut 
Dalbine,  juge  au  tribunal.  En  1803,  c'était  Ducros  de  Chabannes,  maire 
de  Laurlange.  Le  secrétaire  était  Ribaud.  Le  député  en  1802  était 
Merché-Marchant,  graveur,  et   à  partir  de   1808  Géneux,  officier  du  G.*. 


414  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

0.\  Cette  L.*.  se  faisait  adresser  sa  correspondance,  poste  restante,  sous 
le  pseudonyme  bizarre  de  Séphiramis  Platon  (1). 


BRUYÈRES  (Lorraine) 

SAINT-MARTIN  DITE  LA   PARFAITE  AMITIÉ 

Cette  L.\  fut  fondée  le  30  juin  1768  par  la  G.-.  L.*.  en  faveur  du  vén.". 
m.\  le    comte  de  Preg.  Elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

En  1768,  une  autre  L.\  dont  le  titre  est  inconnu  aurait  été  fondée  par 
la  G.*.  L.-.  en  faveur  de  Gérard,  avocat.  Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de 
traces. 

CAEN 

ARDENTE  MAÇONNE 

Contrairement  à  l'opinion  de  M.  de  Loucelles,  c'est  l'Ardente  Maçonne 
qui  est  la  plus  ancienne  L.-.  fondée  à  Caen.  C'est,  en  effet,  le  17  juin 
1760  que  la  G.*.  L.*.  constitua  cet  atelier  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Gahier 
d'Aingieville,  qui  dirigeait  encore  ses  travaux  le  9  mai  1765.  A  cette 
date  il  donnait  l'adresse  du  local  chez  le  f.  ".  Lasseray,  Grande-Rue  Saint- 
Jean,  vis-à-vis  la  rue  Bernières. 

En  1774,  il  demanda  en  vain  la  régularisation  de  ses  constitutions  au 
G.'.  0.-. 

En  janvier  1761,  la  G.'.  L.*.  installa  un  nouvel  atelier  sous  un  titre 
inconnu  en  faveur  de  Jean -Jacques  Georges.  Cette  L.\  fonctionnait 
peut  être  encore  en  1779. 

COEURS  SANS  FARD 

Cet  atelier  ne  fut  donc  pas  le  premier,  mais  le  troisième  installé  à 
Caen.  Sa  constitution  primitive  date  du  8  mars  1761,  et  fut  donnée  par 
une  puissance  maçonnique  inconnue  au  vén.".  m.".  André  Honoré.  Le 
16  septembre  1766,  elle  fit  renouveler  ses  titres  par  la  G.".  L.\  et  le 
15  novembre  1773,  par  le  G.\  O.*.  Ses  débuts  ne  semblent  pas  avoir  été 
très  prospères,  car  en  1777.  elle  ne  comptait  que  13  membres.  A  celte 
époque  son  vén.".  était  Revel,  procureur  du  roi. 

Malgré  l'opinion  contraire  de  M.  de  Loucelles,  nous  ne  croyons  pas  que 
celte  L.*.  se  réunit  purement  et  simplement  en  1780  à  la  Constante 
Amitié.  Tout  au  plus  peut-on  admettre  que  plusieurs  de  ses  membres 
abandonnèrent  ses  travaux  pour  suivre  ceux  de  cette  dernière  L.*. 

En  effet,  les  annuaires  du  G.*.  O.*.  dénomment  des  officiers  de  1785  à 
1789. 

En  1785,  le  vén.*.  était  Signard  d'Oussières,  banquier,  officier  de  la 
milice  bourgeoise,  et  en  1788-1789,  de  Cussy,  ancien  directeur  de  la  Mon- 

(1)  Voir  dans  la  Nouvelle  Revue  rétrospective,  XIII,  234,  le  curieux 
compte  rendu  d'une  de   ses  séances  en  1811. 


LOOKS    DE    PROVINCE  I  1  ."> 

iwiic  à  Caen.  Son  député  de  1785  à  1780  fui  Brown,  inspecteur  général  des 
manufactures   de  la  généralité  de   Paris 

Parmi  ses  membres  en  1773  :  Rolland  de  Sainte-Marie  ;  Guéron  de  la 
Rigne  :  Chevalier  de  la  Chambre  ;  Gaucher  du  Meslé  ;  Le  Coq  de  Rié- 
ville  ;  Collet  des  Cotils  ;  Lambert  de  Carmel  et  Lhonoré  du  Fresnc. 

lui  1788,  Alvorda,  d'Olbac  et  des  Francs. 

CONSTANTE  AMITIÉ 

Voici  d'après  M.  de  Loucelles  le  procès -verbal  de  son  installation  : 

«  L'an  de  la  lumière  5765,  le  13e  jour  du  7e  mois  (13  septembre  1765), 
nous  vén.\  m.*.  f.\  Le  Lorrain,  m.*,  de  la  L.'.  d'Aumont  ;  f.\  Pirlet, 
m.',  de  la  L.\  la  Trinité;  f.\  Le  Roy,  m.*,  de  la  L.\  les  Cœurs  simples; 
le  f.\  Le  Lorrain,  représentant  le  f.\  Moët,  vén.\  m.\  de  la  L.'.  du 
Secret,  commissaires  nommés  par  la  G.*.  L.*.  de  Fr.\  par  délibération 
du  10  du  présent  mois,  à  l'effet  d'installer  le  f.\  Paulmier  en  qualité  de 
vén.'.,  le  fr.  Dault  en  qualité  de  1er  surv.'.,  le  f.\  Saint-Martin  en  qua- 
lité de  2e  surv.\  d'une  L.\  établie  à  perpétuité  dans  la  ville  de  Caen, 
sous  le  titre  distinctif  de  la  Constante  Amitié,  nous  sommes,  sur  l'invita- 
tion du  r.\  f.\  Zambault,  secrétaire  général  de  la  G.*.  L.-.,  transportés 
dans  la  L.*.  Saint-Pierre  et  Saint-Paul  de  laquelle  est  vén.'.  ledit  f.  . 
Zambault,  où  étant,  et  après  les  formalités  en  pareil  cas  requises,  avons 
procédé  auxdites  installations,  dont  nous  avons  fait  et  rédigé  le  présent 
procès-verbal  fait  triple  en  ladite  L.*.  sur  les  registres  de  la  L.*.  Saint- 
Pierre  et  Saint-Paul,  sur  celui  destiné  à  la  L.*.  de  la  Constante  Amitié 
et  sur  le  présent,  destiné  aux  archives  de  la  G.".  L.'.  » 

D'après  M.  de  Loucelles,  cette  L.'.  aurait  à  peine  fonctionné  et 
aurait  remis  ses  constitutions  peu  après  à  l'Union  et  Fraternité  du  même 
Orient.  Cette  supposition  nous  paraît  toute  gratuite. 

Sous  le  même  titre,  le  13  juillet  1800,  il  se  forma  au  même  Orient  une 
L.\  qui  ne  semble  avoir  aucun  lien  avec  la  L.  de  1765. 

UNION  ET  FRATERNITÉ 

Lorsque  Lamy  des  Vallées,  secrétaire  de  l'Intendance,  demanda  des 
constitutions  à  la  G.*.  L.*.,  il  demanda  que  la  fonction  de  vén.".  «  fût 
rendue  amovible,  afin  d'en  écarter  tout  esprit  de  despotisme  qui  pourrait 
peut  être  par  la  suite  s'y  glisser  et  troubler  l'ordre,  l'union  et  la  con- 
corde qui  doivent  régner  parmi  les  bons  maçons  ». 

Les  constitutions  primitives  de  la  G.'.  L.\  datent  du  12  décembre  1765, 
mais  elle  ne  fut  installée  que  le  1er  février  1767,  par  les  soins  des  FF.'. 
Paulmier  et  le  Dault  de  la  Constante  Amitié,  et  l'Honoré  du  Fresne  des 
Cœurs  sans  fard.  Ses  titres  furent  renouvelés  par  la  G.'.  L.'.  le  9  août 
1773  et  par  le  G.*.  O.'.le  15  novembre  suivant. 

De  1776  à  1791,  elle  eut  de  11  à  26  membres  ;  en  1792,  elle  en  avait  35, 
bourgeois,  commerçants  et  officiers  ministériels. 

En  1776,  son  vén.'.  est  Durand,  négociant,  auquel,  en  1777,  succède 
Lelièvre  de  Rochefort,  propriétaire  à  Ranville,  Lamy  des  Vallées  de 
1779  à  1789,  et  Auvray  de  Coursonne,  apothicaire,  en  1789.  Ses  secré- 
taires furent  Cauclier,  négociant  (1776)  ;  Guiard,  1er  secrétaire  de  l'inten- 
dance (1777),  le  Cordier  de  Launay,  intendant  de  la  généralité  de  Caen 
(1788-1789). 


416  LA   FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Les  députés  furent,  en  1785,  Feydeau  de  Brou,  intendant,  et  en  1788- 
1789,  Turrcl,  avocat  au  Parlement. 

En  1781,  cette  L.\  s'était  fait  remarquer  par  l'enthousiasme  avec 
lequel  elle  avait  célébré  la  naissance  du  Dauphin. 

L'Union  et  la  Fraternité  disparutenl793,  et  ne  reprit  jamais  ses  travaux. 

UNITÉ 

Cette  L.'.  n'est  connue  que  par  une  planche  du  f.\  l'Honoré  du 
Fresne,  et  de  deux  autres  de  ses  membres,  datée  du  4  mars  1767,  pour 
obtenir  de  la  G.  .  L.*.  la  formation  d'une  L.\  mère   à  l'Orient  de   Caen. 

Il  est  possible  que  le  titre  de  l'Unité  fût  le  premier  titre  des  Cœurs 
sans  fard  qui  furent  fondés,  comme  nous  l'avons  vu,  en  1761,  en  faveur 
d'André  Honoré,  qui  n'est  peut-être  que  la  même  personne  que  l'Honoré 
du  Fresne. 

GAHORS 

PARFAITE    UNION 

Cette  L.*.  fut  constituée  par  une  puissance  inconnue  le  12  mai  1755.  et 
ses  titres  furent  renouvelés  par  le  G.'.  Gv.  le  29  août  1776,  mais  elle  ne 
fut  appelée  à  prendre  rang  qu'à  partir  du  28  juillet  précédent. 

En  1777,  elle  ne  comprenait  que  11  membres  et  avait  pour  vén.". 
Arbanère,  receveur  des  domaines  du  roi.  Elle  cessa  ses  travaux  en 
1785  et  les  avait  repris  en  1788  avec  Mostolac  comme  vén.\  et  Gombault. 
négociant,  comme  secrétaire.  En  1789,1e  vén.*.  était  Taillade,  négociant. 

Les  députés  furent,  en  1777,  l'abbé  Jardin,  et  en  1788-1789,  Baugin, 
avocat. 

Cette  L.'.  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution  et  les  reprit  sous 
l'empire.  De  1808  à  1813,  elle  eut  Ramel,  avocat,  comme  vén.*.,  et  Hen- 
riette, architecte,  comme  député. 

CALAIS 

SAINT-JEAN  DE  CALAIS 

Constituée  en  1764,  par  la  G.-.  L.*.,  en  faveur  du  vén.'.  m.-,  de 
Peroussy,  cette  L.\,  qui  fonctionnait  encore  en  1779,  n'a  pas  laissé  de 
traces. 

CARCASSONNE 

PARFAITE    AMITIÉ 

Les  constitutions  furent  accordées  par  une  puissance  inconnue  à  ccite 
L.-.  le  31  décembre  1744.  Elles  furent  renouvelées  par  la  G.'.  L.'.  en 
1764,  sous  le  titre  de  Saint-Jean  de  la  Parfaite  Amitié,  en  faveur  du  vén.  . 
m.',  de  Beviat. 

Le  8  novembre  1773,  le  G.'.  Gv.  renouvela  ses  titres. 

En  1776  et  1777,  cette  L.*.  comptait  25  membres,  son  vén.*.  était 
Dalzan,  son  secrétaire  de  Coëtlosquet  et  son  député  Thoron  de  Lamée, 
exempt  des  gardes  suisses  du  comte  d'Artois. 

En  1785,  son  vén.*.  était  Thoron  de    Lamée,  et  en  1788-1789,  Thoron 


LOGES   DE    PROVINCE  117 

d'Onfroy,  conseiller  rapporteur  du  prix  d'honneur.  Son  député  était  Reyd 
de  la  Grange,  administrateur  général  des  domaines  du  prince  de  Coudé. 

Cette  L. '.,  dont  les  papiers  se  trouvent  à  la  bibliothèque  de  Carcns- 
sonne  (fonds  Peyrusse,  242  et  243,  9.881  et  9.882),  reprit  sous  l'empire 
les  travaux  qu'elle  avaii  abandonnés  pendant  la  Révolution.  En  1808, 
son  vén.*.  est  Pinel  Truilhas,  ancien  officier  ;  son  secrétaire  est  Vidal  - 
Contant,  homme  de  loi,  et  son  député.  Dupont. 

En  1813,  elle  s'adjoignit  un  souverain  chapitre  sous  le  titre  de  Par- 
faite Amitié  et  les  Commandeurs  du  Temple  réunis. 

En  1813  1814,  son  vén.  '.  était  Viguicr,  avocat,  membre  du  Corps  légis- 
latif, et  son  député  pour  la  L.'.,  et  le  chap.\  était  Niel. 

COMMANDEURS  DU   TEMPLE 

Lorsque  le  G.\  O.'.  constitua  celteL.'.  le  17  juillet  1783,  pour  prendre 
rang  du  G  février  1774,  elle  rappela  ses  travaux  commencés  le  14  juin 
1758.  Ses  débuts  n'ont  pas  laissé  de  traces. 

En  1785,  elle  était  présidée  par  Sarraud,  receveur  et  directeur  du 
Canal  au  port  de  Foucault. 

En  1788,  le  vén.*.  était  Astoin,  avocat  au  Parlement,  et  le  secrétaire, 
David  de  la  Fajole,  avocat  au  Parlement. 

En  1789,1e  vén.*.  d'honneur  était  le  comte  d'Ossun,  colonel  au  régiment 
du  Royal-Vaisseau,  et  le  vén.  en  exercice,  Reboulh,  docteur  en  médecine. 

Cette  L.'.  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution  Elle  semble  s'être 
réunie  en  1813  à  la  Parfaite  Amitié 


CASTRES 
SAINT-JEAN 

Constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  30  décembre  1744,  cette  L.*.  fît  renouveler 
ses  titres  par  le  G.'.  O.'.  le  30  août  1773. 

En  1776,  elle  comprenait  49  membres  et  57  l'année  suivante. 

En  1776,  son  vén.".  était  de  la  Gascarie,  ancien  officier  de  dragons  ; 
son  secrétaire,  Guibal  aîné. 

En  1777,  le  vén.".  était  de  la  Jonnière,  inspecteur  des  manufactures,  et 
le  secrétaire,  Lucadou,  trésorier  des  troupes.  Son  député,  de  1775  à  1778, 
était  le  marquis  du  Buat,  capitaine  de  cuirassiers. 

De  1785  à  1789,  le  vén.*.  était  le  comte  Milhaut  de  Saint-Martin,  sieur 
de  la  Boulbenne. 

Pendant  cette  période,  ses  secrétaires  furent  Rousseau  de  la  Boisson- 
nière,  peintre  et  architecte,  et  de  Beaudecourt  fils  ;  le  député  était  de 
Cheyssac,  grand  maître  des  Eaux  et  Forêts  de  France  au  département 
de  Paris. 

La  L.'.  Saint-Jean  abandonna  ses  travaux  pendant  la  Révolution  pour 
ne  plus  les  reprendre. 

SAINT-PIERRE 

Cette  L.'.  fut  constituée  par  la  G.*.  L.'.  le  8  décembre  1770,  en  faveur 
du  vén.*.  m.'.  Auger,  receveur  de  la  Loterie,  qui  fut  de  nouveau  vén.*. 

LA    FRANC-MAÇONNERIE.    —    T.    I.  27 


418  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

en  1777  et  en  1788-89.  Les  tilres  de  cette  L.\  furent  renouvelés  par  le 
G.-.  O.  .  le  23  septembre  1774. 

En  1776,  elle  comprenait  35  membres  et  était  présidée  par  Desclassan, 
imprimeur;  son  secrétaire  était  Deltit  fils,  marchand,  et  jusqu'en  1778 
son  député  fut  Morin,  receveur  de  la  Loterie  royale  à  Paris 

Bataille,  négociant, |fut  son  vén  \  eu  1785,  et  Marture  jeune,  marchand, 
son  secrétaire  de  1^85  à  1789. 

En  1788  9,  son  député  fut  Picard,  procureur  au  Parlement,  officier  du 
G.-.  O.-. 

HARMONIE  UNIVERSELLE 

Il  semble  que  cette  L.\  fut  la  reconstitution  sous  l'Empire  de  la  L.\ 
Saint- Pierre  sous  un  titre  différent,  car  elle  fit  remonter  sa  constitution 
précisément  à  la  date  de  constitution  de  cette  L.'. 

En  1813-4,  elle  eut  pour  vén.'.  d'honneur  Lacépède  et  pour  vén.'.  en 
exercice,  en  1813,  Vassan,  maire  de  Castres,  et  en  1814,  Jaurès,  négo- 
ciant. 

GATEAU  (le) 
TROIS  FRÈRES 

D'après  Rebold,  cette  L.\  aurait  été  constituée  le  19  avril  1764.  Elle 
n'a  laissé  aucune  trace. 

CAYENNE 
SAINT-JEAN  DE  LA  GUYANE 

Constituée  par  la  G.*.  L.*.  le  7  juin  1763,  eu  faveur  du  vén.'.  m.*. 
Grouard,  cet  atelier  fonctionnait  en  1779. 

SAINT-JEAN  DE   LA   GLOIRE 

Fondée  par  la  G'.  L.*.  le  2  octobre  1766  en  faveur  de  Dubois  Berihe- 
lot,  cette  L.-.  en  1779  était  encore  en  vigueur. 

CETTE 

AMITIÉ   ET  HOSPITALITÉ 

Lorsque,  le  27  mars  1782,  le  G..*  O.*.  reconstitua  cette  L.'.  pour 
prendre  rang  du  30  décembre  1781,  elle  rappela  ses  travaux  commencés 
le  12  novembre  1750. 

Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces  avant  1785.  De  cette  date  à  1789. 
elle  fut  présidée  par  Councler  aîné,  négociant.  Son  député  était  Brullard. 

Ayant  cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  elle  les  reprit  sous 
l'Empire.  En  1808,  son  vén.-.  était  Mercier  et  son  député  Bonnarie,  l'un 
et  l'autre  négociants. 

En  1813-4,  son  vén.-.  était  Romeu,  principal  adjoint,  et  son  député, 
Chevalier,  ingénieur-opticien. 


LOGES    DE    PROVINCE  111) 

GHALON  SUR  SAONE 


VRAIS  AMIS 


Constituée  le  20  août  1747  par  une  puissance  inconnue,  elle  se  fit  régu- 
lariser par  la  G.'.  L'.  le  20  août  1767,  en  faveur  du  vén  \  m.\  de 
Seine  ;  fit  renouveler  ses  titres  par  la  G  \  L.\  le  29  août  1772  et  par  le 
G.\  Gv.  le  25  mars  1774. 

En  1776,  elle  comprenait  16  membres  et  19  l'année  suivante. 

De  1776  à  1785,  son  vén.'.  fut  Girault,  auditeur  à  la  Chambre  des 
Comptes.  En  1788-9,  il  fut  remplacé  par  Golion,  avocat.  De  1776  à 
1789,  le  secrétaire  fut  Butty,  pharmacien,  et  le  député,  Poncet,  entre- 
preneur des  bâtiments  du  roi,  officier  du  G.'.  OV.  Cette  L.*.  disparut 
définitivement  au  moment  de  la  Révolution, 

AMITIÉ 

Cette  L.'.  fut  constituée  le  30  décembre  1769  par  une  puissauce  in- 
connue. Elle  fit  renouveler  ses  titres  par  la  G.#.  L.'.  le  10  février  1772  et 
par  le  G.\  0.\  le  21  février  1774.  En  1776,  elle  comprenait  16  membres 
et  18  en  1777,  parmi  lesquels  Tyran  et  Guion. 

En  1776,  son  vén.-.  était  Salomon,  avocat  et  receveur  des  décimes  de 
la  province  de  Bourgogne.  Il  fut  remplacé  l'année  suivante  par  Simon- 
not  ;  en  1785  par  Guillaume  de  Saint,  curé  d'Ouroux,  et  en  1788-9,  par 
Antoine  Chazeau,  architecte. 

Le  secrétaire  était  Garnie,  avocat,  et  le  député,  Poncet. 

Ayant  cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  elle  les  reprit  sous 
l'Empire.  En  1813,  son  vén.".  était  Rubat,  conseiller  à  la  cour,  et  son 
secrétaire,  Menaud,  avocat. 


CHAMBERY 
TROIS  MORTIERS 

D'après  Descostes  [Joseph  de  Maistre  avant  la  Révolution,!,  216),  cette 
L.'.  aurait  été  constituée  en  1739  par  le  comte  de  Bellegarde,  muni  des 
pouvoirs  de  la  G.-.  L.*.  de  Londres.  Joseph  de  Maistre  y  aurait  été 
initié.  C'est  cette  L.'.  qui  en  1765  fonda  l'atelier  de    Turin. 

TRIPLE  UNION  ET  RÉUNION 

Sous  le  premier  titre,  la  G.'.  L.'.  constitua  cette  L.'.  le  29  août  1770, 
pour  prendre  rang  le  5  juillet  précédent  (Rebold  dit  1779).  Cette  L.-.  n'a 
pas  laissé  de  traces  avant  la  Révolution. 

En  1802,  elle  a  repris  ses  travaux  avec  Bataillard,  propriétaire,  comme 
vén.*  ,  et  Marie,  professeur  de  jurisprudence,  comme  secrétaire.  Ce 
dernier  devint  vén.*.  de  1808  à  1814.  Bordas,  ancien  député  au  corps 
législatif,  fut  son  député  pendant  tout  l'Empire.  En  1813,  cette  L.*.  prit 
le  titre  de  Réunion. 


420  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EX    FRANCE 

CHARLEVILLE 
LES  FRÈRES  DISCRETS 

Cet  atelierful  fondé  par  la  G.*.  L.\  le  10  mai  1762,  en  faveur  du  yen.*, 
m.'.  Morel  de  l'Escot.  En  1776,  il  n'avait  guère  que  14  membres  et  17 
l'année  suivante.  Le  vén.".  de  1776,  à  1789  était  Dauzas  de  la  Fue, 
chevalier  de  Saint -Louis,  major  des  villes  et  citadelles  de  Mezières  ;  de 
Chappes,  aide  major  du  régiment  provincial  de  Lille,  était  son  secré- 
taire, Trécourt,  son  trésorier,  et  Demachy,  apothicaire,  son  député. 

En  1781,  figuraient  parmi  ses  membres  :  comte  du  Monet  ;  de  Vaude- 
roy  ;  d'Hamelin  ;  de  Boulancourt  ;  Cazaux-Laran  ;  Gelez  ;  Montbeil- 
lard  ;  baron  Dubois  d'Hiordal  ;  Chabot  ;  Chabrol  :  Belsunce  ;  La  Roche- 
Aymon  ;  Montbeillard  ;  Guyonnet  ;  Pelitcolas-Monard  ;  de  Lorimieu  ; 
Chevalier  '  Jean-François,  comte  de  Cerisy,  capitaine  au  régiment  de 
Belzunce. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.\  eut  pour  vén.'.  sous 
lEmpire,  Toupet  des  Vignes,  directeur  des  vivres  de  terre  (1808)  ;  Che- 
valier, receveur  des  domaines  (1813)  ;  et  Trécourt,  négociant  (1314);  son 
secrétaire  fut  Destrées,  et  son  député  pour  la  L.\  et  le  chapitre,  Migon, 
employé  à  la  bibliothèque  impériale. 

BONNE  UNION 

Cette  L.\  u'a  laissé  de  traces  que  le  nom  d'un  de  ses  membres  :Plom- 
menfeldt. 

GHATEAUNEUF  (Charente). 

CONSTANTE   FRATERNITÉ 

Constituée  par  la  G.'.  L.\  le  14  octobre  1762,  en  faveur  du  vén.'.  m.'. 
de  Raffait,  cet  atelier  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

CLERMONT-FERRAND  (1). 
GRANDE  LOGE  ÉCOSSAISE 

En  1750,  une  Mère  Loge  aurait  existé  sous  ce  titre.  (Voy.  Rouen.) 

PARFAITE  UNION    DE    SAINT-HUBERT 

Cet  atelier  fut  fondé  le  7  mai  1752,  par  une  puissance  inconnue  ;  il 
lit  régulariser  ses  constitutions  par  la  G.-.  L.\  le  18  mai  1772  et  par  le 
G.\  O.-.  le  18  septembre  1777. 

On  ne  sait  rien  des  premières  années  de  cette  L.\,  qui  de  1776  à  1785 

(1)  Pour  les  L.*.  de  cet  O.*.  voir  Bull.  hist.  et  scientifique  de  l'Au- 
vergne, de  février  1905,  p.  74,  notes  et  documents  concernant  l'histoire 
d'Auvergne,  par  F.Mège.  De  nombreux  documents  sur  les  LL.\  du  Puy- 
de-Dôme  m'ont  été  aimablement  communiqués  par  MM.  de  Corail, 
Verny  et  l'abbé  Crégut. 


LOGES    DE    PROVINCE  !21 

ont  pour  vén.'.  Veillard-l'Epine,  juré  jnugcur  ;  Girard,  bourgeois,  en 
1788,  et  Verdier,  procureur  es  cours,  l'année  suivante. 

Ses  secrétaires  furent  :  Morangea  (177(>)  ;  Touchebceuf,  bourgeois 
(1777),  et  Duffayel  (1788^. 

Son  député  fut  de  Junquières,  procureur  au  Parlement,  officier  du 
G  \  (),•.  de  1770  à  178."),  et  Busche,  procureur  au  Parlement,  officier  du 
G.*.  O  ■.  de  1788-9. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.v  fut  reconstituée  le  18  août 
1805.  En  1813,  elle  avait  pour  vén.*.  Berthomieu  neveu. 

SAINT-MAURICE 

Les  constitutions  primitives  de  cette  L.\  datent  du  10  juillet  1753  ;  elles 
furent  renouvelées  par  la  G.-.  L.*.  le  13  mars  1773  et  par  le  G.*.  O.*.  le 
20  février  1777. 

On  ne  sait  rien  de  ses  premières  années.  En  1776,  elle  ne  comprenait 
pas  moins  de  46  membres. 

Ses  vén.*.  furent  :  David,  chev.  de  Saint-Louis  (1776  et  1785);  Albarède, 
secrétaire  de  l'intendance  (1784)  ;  de  Montorcier,  lieutenant  particulier, 
assesseur  civil  et  criminel  de  la  sénéchaussée  et  présidial  (1787-9). 

En  1777,  Gaultier  de  Biauzat  était  son  premier  surv.'. 

Son  secrétaire  fut  Moranges  fils,  avocat  au  Parlement,  et  son  député 
de  Junquières,  procureur  au  Parlement. 

A  la  fin  de  1784,  l'ancienne  société  de  Saint-Sébastien,  devenue  Cheva- 
liers de  la  Flèche,  qui  n'avait  pas  moins  de  48  membres  dont  10  officiers 
nobles,  fusionna  avec  cette  L.*.,  ayant  même  caisse,  même  budget  et 
même  trésorier. 

Parmi  ses  membres  avant  la  Révolution  figurent  :  le  comte  de  Clermont- 
Tonnerre,  maître  de  camp  au  régiment  de  Navarre-cavalerie,  guillotiné 
comme  contre-révolutionnaire  ;  Doulcet,  médecin,  roi  de  la  Flèche 
en  1789  ;  Coulhon,  avocat,  futur  conventionnel  ;  Chauvassaignes,  avocat  ; 
Chevalier,  notaire  ;  Burin-Desroziers,  avocat  ;  Pyrend,  receveur  des 
impositions  ;  Bancal,  entrepreneur  des  manufactures  royales  ;  Sablon, 
négociant,  et  Moneslier,  médecin,  qui  furent  maires  de  Clermont  ; 
Mazelhier,  négociant  ;  Bancal  des  Issarts,  ancien  notaire  ;  Dijon  de 
Saint  Mayard,  avocat  général,  guillotiné  comme  fédéraliste;  Teyras  de 
Grandval  ;  Champflour  d'Oradoux  et  Champflour  de  Montpédon  ;  Rebou 
du  Sauzet  ;  Rougier  fils  ;  Pouyet  ;  Domergue  ;  le  chev.  d'Hauterive  ; 
Dulamboy  et  Moreau. 

Cette  L.'.  ne  cessa  ses  travaux  qu'en  1793.  Son  sommeil  fut  de  courte 
durée. 

Ses  vén.-.  sous  l'Empire  furent  :  Doulcet,  médecin  (1804)  ;  Becker, 
général  de  brigade  (1808)  ;  Chabrol,  ancien  jurisconsulte  (1813-4). 

Ses  secrétaires  furent  :  Guillemot,  inspecteur  des  postes  (1804-8),  et 
Bouveret,  payeur  général  (1813-4).  Son  député  pour  la  L.'.  et  le  chapitre 
de  1808  à  1814  fut  Geneux,  officier  du  G.-.  O.'. 

Sous  l'Empire  elle  s'appela  :  Franche  Amitié,  ci-devant  Saint-Maurice. 

SAINT-MICHEL  DE  LA  PAIX 

Constituée  le  1er  octobre  1766,  elle  fit,  paraît-il,  renouveler  ses  consti- 
tutions  par  la  G.*.  L.-.  et  le  7  mai  1778  par  le  G.'.  O.*. 


422 


LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


Ses  vén.\  furent  :  Chappcl,  apothicaire  (1777  à  1785)  ;  Besson  (178*;  : 
Chassaigne,  notaire  (1788)  ;  et  Busche,  procureur  es  cours  (1789  . 

Ses  secrétaires  furent  :  de  Saint -Horent,  procureur  '\111)  ;  Le  Blanc, 
procureur  à  partir  de  1785. 

Son  député  de  1777  à  1789  fut  Busche. 

Parmi  ses  membres  figurent  :  Barre,  Barrière.  Bussière,  Noucry  et 
Trébuchet. 

Le  1er  mai  1792,  n'ayant  plus  que  12  membres,  elle  se  réunit  à  Saint- 
Maurice. 

Une  autre  L.  .,dont  le  titre  est  resté  inconnu,  fut  fondée  le  18  mai  1769 
en  faveur  du  vén.\  m.'.  Saincy  ;  elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 

COGNAC 

SAINT-JEAN  DE  JÉRUSALEM  ANGLAIS  dite  L  ANGLAISE  (1) 

Cette  L.\  aurait  été  constituée  le  19  juillet  1746  par  la  L.*.  Anglaise 
de  Bordeaux,  sans  que  cela  soit  bien  établi.  Le  G.'.  0.\  en  la  recons- 
tituant le  24  janvier  1775,  tout  en  reconnaissant  ses  travaux  de  1746.  ne 
l'autorisa  à  prendre  rang  que  du  25  juillet  1774. 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  :  Burquet,  Desgranges,  de 
Galeine,  Saulnier  de  Pierre-Levé  et  son  fils  Philippe,  de  Coursay,  de 
Crignelle,  Olivet  et  Hardy. 

En  1776,  elle  se  composait  de  45  membres. 

Sesvén.".  furent  :  Saulnier  de  Pierre-Levé  père,  chev.  de  Saint-Louis 
(1776-7)  ;  Hardy  père,  avocat  au  Parlement,  ancien  maire  (1885)  ;  Saule, 
négociant  (1789). 

Ses  secrétaires  furent  :  Pelluchon-Destouches  (1776-1784)  et  Saule  de 
1785  à  1788. 

Son  député  fut  Richard,  avocat  au  Parlement,  officier  du  G.*.  0.\ 

Si  cette  L.".  cessa  ses  travaux,  elle  les  reprit  avant  1798.  A  cette  date 
Saule,  son  vén.\  de  1789,  était  encore  en  fonctions.  Sous  lEmpire  nous 
voyons  lui  succéder  :  Turner,  négociant  [1808)  ;  Pinet  fils,  négociant 
(1813)  ;  O'Tard,  négociant  (1814).  En  1813-4  elle  eut  comme  vén.\  d'hon- 
neur Augier,  négociant.  Son  député  fut  Boyer. 

D'après  M.  Mamoz  (p.  39),  il  y  avait  également  à  Cognac  une  L.-. 
irréguliére  qui  fut  interdite  par  décret  de  la  G.'.  L  \  du  21  mars  1766. 
Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

COMPIÈGNE 

SAINT-GERMAIN 

La  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  le  4  février  1767  en  faveur  de  Louis-Marie 
Barbe,  curé  de  Saint-Germain-lez-Compiègne  ;  ses  constitutions  furent 
renouvelées  par  le  G.'.  O.'.  le  27  septembre  1774. 

Ses  vén.\  furent  :  Massié  de  Bourbe  (1775)  ;  Garanger,  négociant, 
ancien  échevin  (1776)  ;  Bourgeois,  curé  de  Condé-sur-Noireau  (1777)  ; 
Barbe,    procureur  au    bailliage    (1785-8)  ;    Mosnier,    maître   es  arts    de 

(1)  Voir  Pellisson,  les  L.\  m.',  de  VAiigoumois,  p.  6. 


LOGES    DE   PROVINCE  123 

pension  (1789).  De  1776  à  1783,  Rœttiers  de  Montaleau,  et  Perier,  avocat 
au  Parlement,  de  1 785  à  1 781),  furent  ses  députés. 

La  L.\  qui  en  177(5  avait  54    membres     se  faisait    adresser  ses   lettres 
sous  l'anagramme  de  Ringamen. 

Parmi  ses  membres  avant  la  Révolution  figurent  :  Alix,  président  nu 
grenier  à  sel  de    Compiègne  ;   Barbe,  curé  de    Saint- Germain-lez-Com- 

piègne  ;  Barbe,  procureur  au  bailliage  et  autres  juridictions  royales  ; 
Bertoliny,  toiseur  des  bâtiments  du  roi  ;  Bourgeois,  curé  de  Condé-sur- 
Noireau,  en  basse  Normandie  ;  Bcrguesse,  bénédictin  ;  Blanc  (Le),  maire 
et  subdélégué  de  Senlis  ;  Bourg,  dominicain  ;  Brisson,  supérieur  de  la 
Charité  de  Senlis  ;  Carbon,  négociant  ;  Cbarmolue  ;  Courbet  l'aîné,  domi- 
nicain ;  Courbet  le  jeune,  dominicain  ;  Courtois,  entrepreneur  des  bâti- 
ments du  roi  ;  d'Arras,  capucin  ;  Denis,  entrepreneur  des  bâtiments  du 
roi  ;  Debilly,  négociant  ;  Debilly  Dufeu,  négociant  ;  de  Laguette,  ingé- 
nieur des  ponts  et  chaussées  ;  de  Renty,  dominicain  ;  de  Maubeuge 
(Joseph),  capucin  ;  de  Maubeuge  François-Marie),  capucin  ;  de  Bossart, 
bénédictin  ;  Dousset,  cordelier  ;  Druon,  bénédictin  ;  Dumont,  curé  de  Sainl- 
Pierre-Pontpoint  ;  Duchesne.  négociant  ;  Fliche,  négociant  et  officier  des 
chasses  ;  Garanger,  négociant  ;  Gabriel,  notaire  royal  ;  Gambart  de 
Ligniere,  receveur  du  duché  d  Humières  ;  Gensse  l'aîné,  négociant  ; 
Gosset-Delatour,  président  au  grenier  à  sel  de  Crépy  ;  Guinebeaud, 
contrôleur  des  devoirs  de  Bretagne  ;  Langlois,  garde  des  magasins  du 
roi  à  Calais  ;  Lemer,  négociant  ;  Leroux  ;  Massicot  bénédictin  cluniste  ; 
Marquet.  bénédictin;  Matthieu,  négociant  ;  Muresne  l'aîné,  laboureur; 
Peissart,  dominicain  ;  Penon,  notaire  royal  à  Compiègne  ;  Pinçon,  négo- 
ciant ;  Poulain  de  la  Fontaine,  procureur  au  bailliage  ;  Poultier  d'El- 
motte  ;  Raux,  négociant  ;  Renard,  professeur  d'éloquence  ;  Ruste,  lieu- 
tenant des  maréchaussées  ;  Scellier  père,  négociant  ;  Scellier  fils, 
négociant  ;  Scellier  (Gabriel-Antoine',  négociant  ;  Scellier  Duménil, 
négociant  ;  Sommevert,  négociant  ;  Vandorp,  procureur  ;  Venaille, 
ingénieur  des  ponts  et  chaussées  ;  Watellet. 

Il  n'est  pas  certain  que  cette  L.'.  cessa  ses  travaux  avant  1793.  Elle 
les  reprit  sous  l'empire. 

En  1808  son  vén.'.  fut  Scellier,  juge  au  tribunal,  et  en  1813-4  Mar- 
cilly,  inspecteur  général  de  la  navigation.  Son  député  fut  Perint,  archi- 
tecte. 


CRESPY 

SAINT-LOUIS 

Cette  L.\  fut  fondée  le  2  septembre  1766  par  la  G.'.  L.*.  en  faveur  du 
vén.\  m.*.  Dambris  ;  ses  constitutions  furent  renouvelées  par  le  G.*.  0.\ 
le  21  mars  1778.  Ses  vén.'.  furent  :  Dieu,  procureur,  ancien  maire 
(1777-1785),  et  Coliette  de  Froqueville,  président  en  l'élection  (1788-9). 
Ses  secrétaires  :  Barré,  audiencier  (1777-1785),  et  de  Garges,  chev  de 
Saint-Louis   1788  9);  son  député  fut  de  Chamerois  à  partir  de  1785. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  sous 
l'Empire  ;  elle  eut  pour  vén.'.  :  Barré  l'aîné  (1808)  et  Lefebre,  juge  de 
paix  (1813-4)  ;  Cenac,  pharmacien,  était  son  vén.*.  d'honneur.  Son 
député  était   Perint,  architecte. 


424  LA    FRANC-MACONNERIE    EX    FRANCE 

DIEPPE 

SAINT-LOUIS  devenu  LES  CŒURS  UNIS 

La  G.'.  L.'.  constitua  cet  atelier  le  15  novembre  17GG,  sous  le  litre  de 
Saint-Louis,  en  faveur  du  vén.\  m.'.  Bouvet,  entreposeur  des  tabacs, 
et  de  Louis  Niel.  A  côté  d'elle  fonctionnait  une  L.'.  d'adoption  de 
l'ordre  de  la  Félicité  (1).  Ces  L.*.  rentrèrent  en  sommeil  pour  ne  repren- 
dre leurs  travaux  qu'en  1783,  sous  l'influence  du  colonel  de  Rohan- 
Soubise,  vén.*.  de  la  Parfaite  Union,  L".  du  régiment  qui  portait  le 
nom  de  son  colonel. 

Elle  fut  réinstallée  de  nouveau  au  nom  du  G.'.  O.'.  le  13  avril  1783, 
sous  le  titre  des  Trois  Cœurs  réunis,  puis  des  Cœurs  réunis  et  enfin  des 
Cœurs  unis,  par  les  loges  de  Rouen,  du  Havre,  de  Fécamp,  d'Eu  et 
d'Ault.  Bonnet  fut  vén.  '.  de  cette  L.".  depuis  sa  création  jusqu'en  1790. 
Vasse,  président  en  l'élection,  était  secrétaire,  et  Jarry,  banquier,  député. 

Parmi  ses  membres  avant  la  Révolution  figurent  :  Du  Kamel  ; 
Descarsins  ;  Erasme  Duchateau  ;  Charles  Delacroix,  curé  de  Roux- 
menil  ;  etJ.-B.  Maillard  de  la  Martinière,  capitaine  au  régiment  de 
Poitou. 

En  1786,  dans  la  L.*.  d'adoption  figuraient  les  sœurs  résidentes  :  Le 
Baron  ;  de  la  Houssaye  ;  Voisin  ;  Bourdon  ;  Lefevre  ;  Chaussée  de 
Raimbouville  ;  Des  Granges  ;  de  Portai  ;  Le  Prince-Beaupré  ;  Niel  ; 
de  Chabres  ;  Ubelesky  ;  marquise  de  Pardieu  ;  d'Ausseville  ;  de  Tou- 
vent  ;  comtesse  de  Caumont  ;  de  Bellengreville  ;  et  Leprince-Ducios. 

Parmi  les  associées  libres  :  la  duchesse  de  Cossé-Brissac  ;  la  comtesse 
de  Saint  Pierre  de  Pontcarré  ;  la  comtesse  Adélaïde  de  Caumont  ;  la 
baronne  de  Beaumont  ;  Bell  ;  Mouron  ;  de  Caux  ;  comtesse  de  Canou- 
ville  ;  comtesse  de  Pardieu  ;  comtesse  Félix  de  Pardieu  ;  Chaussée 
(aînée)  ;   Mallet  et  de  Saint- Quentin. 

A  la  reprise  des  travaux,  le  4  juin  1803,  Bonnet  fut  de  nouveau  nommé 
vén.'.,  et  la  L.'.  donna  à  cette  occasion  une  fête  aux  membres  de  la 
Bienfaisance  à  l'0.\  du  31e  d'infanterie  légère. 

Bonnet  fut  remplacé  en  1808  par  Flouert,  négociant,  et  en  1813-4  par 
Trouard-Riolle,  chirurgien.  La  correspondance  de  cet  atelier  était 
adressée  sous  l'anagramme  de  Recuso-Nius,  chez  le  secrétaire,  Leprince- 
Ducios. 

Le  député  de  la  L.'.  et  du  chapitre  était  Leiièvre-Villette. 

Cette  L.  • .  termina  ses  travaux  le  3  janvier  1815. 

DIJON 

PARFAITE  AMITIÉ 

La  G.  .  L.\  fonda  cet  atelier  le  2  juin  1767,  en  faveur  du  vén.*.  m.'. 
de  Tellier  ;  elle  renouvela  ses  titres  le  11  septembre  1772,  et  le  G.'.  O.'. 
le  8  mai  1774. 

De  1776  à  1777,  cette  L.*.  eut  26  membres,  puis  65.  Ses  vén.".  furent  : 

(1)  Dans  le  tome  II,  nous  nous  étendrons  longuement  sur  cet  ordre 
androgyne. 


LOGES    DE    PROVINCE  127) 

Guénol,  huissier  au  Parlement  (177(5),  et  Champagne,  marchand  1777,. 
En  sommeil  de  178")  à  178S,  cette  L  \  reprit  ses  travaux  avec  Burard, 
procureur  au  bailliage.  Ses  secrétaires  furent  :  Penatier,  orfèvre,  1776  ; 
Bardin,  commis  à  la  recelte  générale  (1777)  ;  Raudot,  substitut  du 
procureur  général  du  Parlement  (1779;  ;  et  Dorse  fils,  greffier  de  la 
Chambre  des  comptes  (1789).  Son  député  fut  Daubertin,  et  après  la 
reprise  Burard,  médecin. 

Celte  L.\  cessa  définitivement  ses  travaux  pendant  la  Révolution. 


DINAN 
TENDRE  FRATERNITÉ 

Constituée  par  la  G.'.  L.\,  le  4  juillet  1765,  ses  pouvoirs  furent  renou- 
velés par  celte  puissance  le  12  mars  1772  et  par  le  G.*.  0.*.  le  25  jan- 
vier 1773. 

Tes  vén.\  furent:  Poursin,  chirurgien  de  vaisseau  (1776);  Morault, 
apothicaire  (1777)  ;  Lohier,  maire  et  conseiller  des  Etats  de  Bretagne 
(1785),   et  Bordago  de  la  Chaussetière,  ancien  officier  canonnier  (1788-9;. 

Les  secrétaires  furent  :  Rétif,  notaire  (1776)  ;  Aubry  de  la  Lohonas, 
avocat  (1777)  ;  Lecoq,  négociant  (1785j.  Son  député  était  Joubert  de  la 
Bourdinière. 

Entrée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  dès 
1800.  Sesvén.'.  furent:  Bellay,  négociant  (1802);  Delaunay,  propriétaire 
(1808-1813),  et  Gaultier,  négociant  (1814).  Ses  secrétaires  :  Gesbert,  avoué 
(1802)  ;  Péan  (1808).  et  Chantrel.  receveur  des  contributions  (1814). 

Ses  députés  furent  Moquet  de  la  Motte  (1802)  et  Valleteau  de  Chabrefy 
(1813). 

Le  7  floréal  an  II,  le  représentant  du  peuple  Le  Carpentier,  en  mission 
à  Dinan,  supprima  la  Tendre  Fraternité,  comme  «  excitant  la  suspicion 
et  ne  pouvant  être  tolérée  sous  un  régime  républicain,  où  la  liberté  est 
devenue  un  bien  commun  dont  la  jouissance  n'a  pas  besoin  des  ombres 
du  mystère  ». 

DOLE 
LE  SECRET  INVIOLABLE 

Lorsque  la  G.-.  L  *.  fonda  cet  atelier,  le  7  janvier  1772,  elle  fît  dater 
ses  travaux  du  1er  octobre  1770.  Le  G.-.  Q.\  renouvela  ses  constitutions 
clans  les  mêmes  conditions  le  12  juin  1777. 

En  1776  et  1777,  elle  se  composait  de  20  membres  ;  son  vén.*.  était 
Agnus  de  Roufiange,  conseiller  à  la  Cour  des  comptes,  et  son  secrétaire, 
Fenier,  agent  des  affaires  du  baron  d'Escîancs. 

Cette  L.'.  disparut  définitivement  en  1785. 

DORAT  iLE) 
AMIS  RÉUNIS 

Cette  L.*.  aurait  été  créée  en  1744,  par  la  G.'.  L.".,  et  renouvelée  par 
le  G.".  O.'.  le  2  décembre  1774.  On  ne  connaît  rien  de  ses  premières 
années. 


42()  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1785,  elle  avait  pour  vén.\  Le  Bourgeois,  négociant,  et  Duclos, 
conseiller  du  roi,  en  1788-9.  Ses  secrétaires  furent  Guérard,  négociant,  et 
Habrioux,  chirurgien.  Ses  députés,  l'abbé  Pingre  et  de  Hillerin,  commis 
au  bureau  de  la  guerre  à  Versailles. 

En  1790,  cette  L.\  entra  en  sommeil  et  depuis  n'a  pas  repris  ses 
travaux . 

DOUÉ 
TRIOMHPE  D>:   HENRI  IV 

Il  y  eut  une  L.\  sous  ce  titre  qui  ne  laissa  aucune  trace. 


DREUX 


SAINT-AUGUSTIN 


En  1760,   la  G.*.   L.\    fonda,    en    faveur  du  vén.\  m.-.  Métairie,    un 
atelier  qui  existait  encore  en  1779. 

Une  autre  L.'.fut  également  fondée  par  cette  même  puissance  en  1761, 
en  faveur  du  vén.'.  m.'.  Amourant.  Cette  L.\  n'a  laissé  aucune  trace. 


DUNKERQUE 

AMITIÉ  ET  FRATERNITÉ 

Il  faut  mettre  au  rang  des  légendes  l'ancienneté  attribuée  à  cette  L."., 
qui  ne  repose  sur  aucun  document  sérieux.  La  prétention  de  ses  membres 
était  de  faire  remonter  sa  création  au  13  octobre  1721,  sous  les  auspices 
de  lord  Montaigu,  G*.  M.',  de  la  F.*.  M.\  anglaise.  Jamais  cette  L". 
n'a  produit  ses  titres  constitutifs  et  lorsqu'elle  demanda  à  la  G.\  L.".,  le 
10  juin  1766,  et  au  G/.  0.\,  le  26  avril  1781,  de  renouveler  ses  consti- 
tutions, ces  deux  puissances  ne  voulurent  jamais  faire  remonter  ses  tra- 
vaux à  une  époque  antérieure  au  1er  mars  1756. 

Ses  travaux  avant  la  Révolution  ont  laissé  du  reste  fort  peu  de  traces. 
Nous  savons  seulement  que,  de  1785  à  1788,  son  vén.*.  était  Bagge, 
courtier  interprète  de  l'Amirauté,  et  qu'eu  1789  ces  fonctions  étaient 
remplies  par  Emmery,  consul  de  Suède  Son  secrétaire  était  Jacques  Six, 
négociant.  Cette  L".  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution  et  les 
reprit  avant  la  fin  du  siècle.  Les  vén.* .  furent  Thibault,  médecin  en  chef 
des  hôpitaux  militaires  (1800)  ;  Leucon-Barème,  négociant  (1802)  ; 
Maurin,  négociant  (1808)  ;  Morlhon-Lavalette  (1812)  ;  Bretocq,  ingé- 
nieur maritime  (1813);  et  Einra  ery,  membre  du  Corps  législatif  ,1814  . 
Ses  secrétaires  furent  Thibault  et  Lami,  et  son  député  Defondeviolle  fut 
remplacé  par  Thory.  Le  choix  de  ce  dernier  député,  en  particulier, 
prouve  que  cette  L.'.  avait  des  traditions  écossaises  jacobites  plutôt 
qu'anglaises.  D'autre  part,  dans  son  sein  s'était  formé,  dès  1809,  un 
chapitre  d'Hérodom  de  Kilwining. 

Parmi  ses  membres  de  1800  à  1814  figurent  :  Vandercruce  ;  Des- 
champs ;  Guillebert  ;  Lorder  ;  Lefebvre  ;  Lanchantin  ;  Ripner  ;  Kail  ; 
Jussienne   ;    de    Serni  ;  Heudeline    ;    Masson  ;    Castrigné  ;     Gautreau  •. 


LOGES    DE    PROVINCE  Vil 

Pinède  ;  Papgay  ;  Guyot  ;  Fontanelle;  Naninck  ;  Benat  ;  Doriau  ; 
Letandaert  ;  Gobin  ;  de  Paeuw  :  Duchastelle  ;  deGuizclin  ;  Piédou  fils. 

Et  parmi  l»vs  membres  du  chapitre  :  Maurin,  président  ;  Munger  (?;  ; 
Van  Wormhondt  ;  Lefebvre  ;  Deschamps  ;  L.  Papgay  ;  Jacquet  ;  Jean- 
Baptiste  Lower. 

En  1813  son  vén.*.  était  dans  une  situation  précaire  et  demandail 
à  ses  frères  des  secours,  en  appuyant  sa  requête  d'un  certificat  signé  par 
le  commissaire  de  police,  le  capitaine  de  la  4°  compagnie  de  la 
lre  cohorte  delà  4e  légion  delà  garde  nationale  sédentaire  et  par  l'ancien 
maire  de  Dunkerque.  Ce  certificat  est  conçu  en  ces  termes  :  «  Michel- 
Auguste-Joscph-Antoine  Morlhon-Lavalette.  âgé  de  33  ans,  chargé  d'une 
famille  composée  de  sa  femme  et  de  trois  enfants,  a  tenu  en  cette  ville 
une  maison  d'éducation  ou  pensionnat  et,  malgré  ses  efforts,  il  a  fait 
des  pertes    et  n'a  pu  maintenir  son  établissement.  » 

SAINT-JEAN  DE  JÉRUSALEM 

La  G.-.  L.*.  fonda  cet  atelier  en  1760  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Sales. 
Il  fonctionnait  encore  en  1779. 

SAINT-JEAN  DE  LA  MODESTIE 

En  1762,  la  G.*.  L.\  fonda  cette  L.  \  en  faveur  du  vén.'.  m.'.Devinck. 
Elle  était  en  vigueur  en  1779. 

La  même  année,  une  autre  L*.  était  fondée  en  faveur  du  vén.".  m.', 
de  Fonlenay.  Elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 

En  1766,  d'après  un  brevet  de  Beauchaine,  Passerat  de  Montleduc, 
grand  inspecteur,  grand  élu,  vén.'.  constitué  de  la  L*.  de  Dunkerque. 
tenait  aussi  celle  de  la  Parfaite  Union  à  Giessen. 

SAINT-GEORGES 

Cette  L.*.,  fondée  à  une  époque  inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 

FALAISE 

SAINT-AUGUSTIN  DE  LA  PARFAITE  UNION 

La  G.*.  L  '.  fonda  cet  atelier  le  12  octobre  1764  en  faveur  du  vén*. 
m.*.  Rioult,  procureur  au  bailliage.  En  1766,  elle  se  composait  de 
20  membres  recrutés  dans  le  clergé,  la  noblesse  et  la  bourgeoisie.  Cette  L.'. 
était,  parait-il,  de  mœurs  sévères.  Le  30  décembre  1765,  elle  expulsait 
Solan,  cordelier,  pour  s'être  absenté  pendant  trois  tenues  consécutives  et 
dont  la  conduite  était  irrégulière.  Les  causes  qui  font  expulser,  le  29  octo- 
bre 1766,  le  vén.  .  Rioult  sont  moins  contradictoires  :  il  était  accusé  de 
mépriser  la f. *.  m.*,  et  de  ne  pas  avoir  des  mœurs  pures  et  irréprocha- 
bles Le  P.  Leclerc,  religieux  prémontré,  est  aussi  expulsé  pour  cause  de 
refus  malhonnête  de  payer  ses  contributions  et  amendes    maçonniques. 

En  1766.  à  la  mort  du  Dauphin,  la  L.*.  fit  célébrer  un  service  funèbre 
dans  l'église  des  Prémontrés. 


128  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Cette  L  '.  travaillait  encore  en  1779. 

Parmi  ses  membres  figuraient  :  Angot  de  Coysel,  procureur  au  bail- 
liage; Le  Febvre  du  Buisson  ;  de  Vertonville  ;  de  Sçay  ;  Filleul  de  la 
Moite  ;  Lessassier  de  Boisauné  ;  du  Rocher,  lieutenant  général  du  bail- 
liage et  les  ff.\  Prémontrés  :  Castel,  Chatel,  Boulanger  et  Mesnil. 

FIGEAC 

SAINT-PAUL  DES  VRAIS  AMIS 

Constituée  par  une  puissance  inconnue  le  20  février  1769,  cette  L.".  fit 
renouveler  ses  titres  parle  G.-.  0.\  le  19  juin  1777. 

En  1760,  elle  comptait  20  membres.  Ses  vén.'.  furent  :  Raymond  du 
Fau,  lieutenant  général  civil  d'épée  et  criminel  au  sénéchal  1776-1779 ), 
et  Delzhens,  médecin  (1785-1789). 

De  1776  à  1785.  son  secrétaire  fut  Vénisié  aîné  procureur  au  sénéchal 
et  au  bureau  de  l'élection  ;  en  1788-9,  il  était  remplacé  par  Pezet  de 
Marmon. 

Le  député  fut  le  baron  de  Roquefort. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  sous  l'Em- 
pire. En  1808,  son  vén.*.  était  Serres,  pharmacien,  et  son  député, 
David. 

FOIX 

JOSUÉ 

D'après  M.  Baader  (Martines  de  Pasqually ,  xx),  cette  L.'.,  qui  était 
celle  de  Pasqually,  aurait  pris  le  nom  de  Temple  des   Elus  écossais. 

GLANFEUIL 

TENDRE  ACCUEIL 

Lorsque  la  G.'.  L.  ".  reconstitua  cet  atelier  en  1772,  elle  l'autorisa  à 
prendre  rang  du  20  juin  1770.  Le  12  janvier  1775,  le  G.'.  0.\  ne  recon- 
nut ses  travaux  quà  partir  du  1er  décembre  1774.  Le  Contrat  social 
reconstitua  à  nouveau  cet  atelier  le  24  mars  1779. 

En  1776,  cette  L.*.  avait  19  membres. 

Ses  vén.-.  furent  :  Le  Grand,  bénédictin,  prieur  de  l'abba\Te  de  Saint- 
Maur-sur  Loire  (1775-1779,  ;  Boulnoy  (1781  ;  Auguste  Lary,  feudiste 
(1785)  ;  Saillant,  conseiller  au  grenier  à  sel  (1788)  ;  et  Daburon  de 
Mantelon,  doyen  de  Saint-Pierre  (1789). 

Ses  secrétaires  furent  :  Pailîart,  procureur  de  la  communauté  des  Au- 
guslins  d'Angers  ;  Blanchard  de  Pégon,  receveur  particulier  des  finances  ; 
Dupont,  provincial  des  Augustins  ;  Métairie  et  Saillant. 

De  1776  à  1788,  son  député  fut  Théaulou.  et  en  1789,  Gaume  Augustin, 
procureur  général  de  la  congrégation,  aumônier  du  roi. 

En  1773,  sur  son  tableau  figurent  :  vén,*.,  Legrand,  bénédictin,  proc. 
abbaye  Saint-Maur-sur-Loire  ;  lcl>  surv.'.,  Wiot,  chanoine  cathédrale 
Angers,  officiai  ;  2a    surv.*.,    Davy,    bénéd.,   proc.    abbaye  Saint-Maur  ; 


LOGES    DE    PROVINCE  12;) 

orateur,  Waillant  de  la  Motte,  chan.  cathéd.  Angers,  théologal  ;  secret.*., 
Paillarl,  atlgustin,  proc.  maison  Angers  ;1M  exp.*.,  Joulain, ing.  géog.  ; 
très  .,  Dupont,  augustin,  définiteur  ;  2«  exp.'.  Grappet,  augustin, 
prieur  à  Angers  ;  Bachelier,  chan.  collégiale  Saint  Pierre,  terrible  ; 
Labry,  bourgeois  ;  Roberdeau,  cons.  du  roi,  lient,  part,  civil  ;  Boulnoy, 
chan.  cathéd.  Angers,  promoteur  ;  Dupin,  bénéd.  abbaye  Saint  Maur  ; 
Giroust,  diacre  ;  Dureau,  bénédictin,  proc  abbaye  Saint-Florent- de- 
Saumur  ;  Terrien  de  l'Epinay,  chan.  collégiale  royale  Saint-Martin 
d'Angers  ;  de  Maury  d'Aynous,  oll'.'.  meslre  de  cp.  cav.,  chev.  Saint- 
Louis  ;  de  Perricart,  bénéd.,  sous-prieur  Saint-Maur  ;  Sauldubois  de  la 
Ghalinière,  anc.  oll".  marine. 

Avant  1789,  on  relève  les  noms  suivants  :  Daburon  de  Mantelon, 
chan.  Saint-Pierre  Angers  :  Verne,  sous-prieur  augustins  ;  Simonin  de 
Vcrmondan,  prieur  de  Balac  ;  Aubry,  chanoine  de  Saint-Martin  ;  Bros- 
sier,  archidiacre  ;  Lenoir,  chan.  Angers  ;  Le  Coursonnays,  bénédictin  ; 
Blisson,  bénédictin  ;  Blanchard  de  Pegon  ;  Trouillet  de  Bléré  ;  Lechat 
de  Tessecourl  ;  Lepagneuil  de  Rillé  ;  Lemarié  de  la  Crossonnière  ;  Auvé 
de  la  Noiraye  ;  Denis  de  Brillemont  ;  Lemarié,  baron  de  Chivré  ;  des 
Portes  de  Linières  ;  Pissonnet  de  Bellefonds  des  Touches  ;  de  la  Chaise 
de  Martigny;  Allait  du  Haut-Plessis  ;  Simonot  de  Vertenay  ;  Gaudin  de 
Bois-Robert  ;  Bossareil  de  Ribon  ;  Touzé  du  Bocage  ;  de  Bellefonds  ; 
de  Beautru  ;  Pays  de  Breil  ;  Foussier  de  la  Cassinière  ;  de  Lépinay  ;  de 
Launay  ;  Morin  ;  Boulnoy. 

Le  Tendre  Accueil  continua  ses  travaux  jusqu'en  1792. 

Le  22  octobre  1802,  cette  L.'.  demanda  à  reprendre  ses  travaux.  A 
cette  date  elle  ne  se  composait  que  de  8  membres  :  Desmazières  ;  de 
Launay  ;  Marne,  imprimeur  ;  Joubert-Bonnaire,  maire  ;  Touzé  du 
Bocage  ;  Brossier  et  Dupont,  prêtres  ;  Falloux,  propriétaire.  En  1805, 
son  tableau  portait  41  membres,  lorsque  le  24  mars  elle  inaugura  dans 
son  nouveau  temple  le  buste  de  Napoléon  Ier  ;  en  1806,  elle  se  composait 
de  59  membres,  parmi  lesquels  le  général  Lacour  ;  mais  sa  décadence 
fut  rapide  et  en  1812  elle  n'avait  plus  que  28  membres. 

Sous  l'Empire,  ses  vén.*.  furent,  en  1808,  Desmazières  père,  juge  à  la 
cour  d'appel,  et  en  1813-4,  Joubert-Bonnaire,  membre  du  Corps  législatif, 
ex-maire. 

Son  député  fut  le  fameux  révolutionnaire  Alexandre,  commissaire 
ordonnateur  des  guerres,  chef  de  la  5e  division  de  l'administration  des 
droits  réunis,  30,  boulevard  Montparnasse. 


GRENADE  (Fort-Royal,  île   de  la) 

TENDRE  FRATERNITÉ 

Lorsque  cette  L.*.  fut  constituée  le  29  août  1779,  on  rappela  ses  travaux 
commencés  le  23  décembre  1764.  Les  vingt  premières  années  de  l'exis- 
tence de  cette  L.- .   n'ont  pas  laissé  de  traces. 

De  1785  à  1790,  elle  eut  pour  vén.*.  Molenier,  ingénieur  en  chef, 
commandant  le  2e  quartier  du  bataillon  de  Fort-Rojal  et  pour  secrétaire 
Saulnier,  notaire. 

Disparu  pendant  la  Révolution,  cet  atelier  ne   reprit  pas  ses  travaux. 


430  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


GRENOBLE 

PARFAITE  UNION 

Cette  L.-.  fut  constituée  par  la  G".  L.'.  le  1er  mars  1766  et  en  1768  en 
faveur  du  vén .' .  m.\  Perier  fils.  Le  G*.  O.*.  renouvela  ses  titres  le 
21  septembre  1780. 

Ses  vén.'.  furent  :  Bilon,  maître  en  chirurgie  (1785):  Rosset, 
premier  secrétaire  des  ponls  et  chaussées  en  Dauphiné  (1788;,  et  Dumirail. 
receveur  principal  des  domaines  et  bois  (1789).  De  1785  à  1789,  son  secré- 
taire fut  Rey,  commis  à  la  recette  générale  des  finances,  et  son  député 
Jamart,  sous-chef  des  domaines. 

En  1779,  le  président  Barrai  de  Montferrat  était  son  orateur  et  en 
1781  on  initia  dans  cette  L.".  les  abbés  de  Barrai  et  de  Pina. 

Ensommeil  pendant  la  Révolution,  elle  repritses  travaux  sous  l'Empire. 
En  1807,  ses  officiers  étaient  :  Odouard,  juge  à  la  cour  d'appel,  vén".  ; 
Allemand-Dulaurou,  1er  surv.\  ;  Botut,  inspecteur,  2e  surv.\  ;  Dye- 
Dalissan,  juge,  orateur  ;  Mauclerc,  maître  des  cérémonies  ;  Bret,  tréso- 
rier ;  Graingeat  fils,  négociant,  élémosinaire  ;  Ro3r-Benoît,  garde  des 
sceaux,  timbres  et  archives. 

Odouard  fut  vén.  * .  jusqu'en  1815. 

Le  député  pour  la  L*.  et  le  chapitre  était  Prié,  13,  rue  Marivaux. 

GUADELOUPE  (LAj 

ANTIGUE    (à  la  Pointe  d'Antigue) 

Fondé  le  1er janvier  1766  par  la  G.'.  L.'.,  cet  atelier  fit  renouveler 
ses  titres  par  le  G.*.  O.  ' .  le  6  juillet  1775.  En  1776,  elle  était  composée 
de  20  membres. 

Ses  vén.".  furent  :  de  la  Montaigne,  capitaine  d'artillerie  (1776)  ; 
Bourdon,  capitaine  d'artillerie  (1777-1789).  Son  secrétaire  de  1776  à 
1789  fut  Bellanger,  négociant,  officier  de  la  milice,  et  son  député, 
Tassin,  banquier,  et  à  partir  de  1785  Desroches  l'aîné,  avocat  au 
Parlement. 

SAINT-JEAN  D'ECOSSE  (Rasse-Terre) 

Cette  L.*.  fut  constituée  le  12  février  1768  parla  G.'.  L.'.  et  renouvelée 
le  9  mai  1774  par  le  G.-.  O.*.  Son  tableau  contenait  22  membres  en  1776 
et  30  l'annnée  suivante. 

Ses  vén.*.  furent  :  le  comte  de  Prael-Surville,  chev.  de  Saint-Louis, 
commandant  le  quartier  du  Parc  (1776-1785),  et  Guillermin,  avocat  au 
Parlement  de  Dijon  (1788-9)  ;  ses  secrétaires  :  Deshaye  et  Rolland  ;  son 
député  :  Gorguereau,  puis  Masein  père,  négociant. 

Entrée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  sous 
l'Empire.  Roydot,  notaire  et  greffier  chef,  fut  sou  vén.'.  en  1808.  En  1813, 
il  était  remplacé  par  Gaudrie  fils,  négociant. 

RONNE  AMITIÉ  aux  Abîmes  (Grande-Terre) 

Lorsque  le  G.'.  O.*.  constitua  cette  L.'.,  le  18  mai  1775,  à  la  date  du 
21  janvier  précédent  il  rappela  ses  travaux  commencés  le  11  juillet  1770. 


I  OGES    DE    PROVINCE  431 

Dès  1776,  celte  L  '.  comprenait  36  membres.  De  cette  époque  à  1781), 
elle  eut  pour  vén.  ' .  Dupuy,  directeur  des  domaines;  pour  serre- la  ire, 
Balliaa  de  Galand,  et  pour  député,  Jouve,  ancien  officier  du  G.*.  O.'. 
Cette  L.*.  disparut  définitivement  au  début  de  la  Révolution. 

lit  MANITÉ  (au   Moulle) 

Le  31  août  1775.  le  G.*.  G\\  constitua  cette  L*.  jiour  prendre  rang  du 
120  août  1770.  En  1776,  elle  comprenait  12  membres  et  17  l'année  sui- 
vante. 

Ses  vén.*.  furent  :  Guillotin  de  la  Vigerie,  ancien  capitaine  d'infan- 
terie (1776)  ;  le  comte  de  Vipart  (1777-1788)  et  Dehaisvouet,  maître  en 
chirurgie  (1789).  Ses  secrétaires  étaient  :  Grosnier  de  Moterfil  (1776)  ; 
baron  de  Hault  (1777)  et  d'Andouin,  commandant  d'un  bataillon  de 
milices  (1785-9).  Son  député  de  1776  à  1789  fut  Guillon,  ancien  procu- 
reur du  roi  à  la  Guadeloupe. 

Un  chapitre  fut  annexé  à  cette  L.*.  Le  brevet  des  constitutions  capitu- 
laircs  est  daté  du  11  novembre  1790  pour  prendre  rang  du  30  août  1789. 
Il  fut  signé  le  21  février  1791  par  les  membres  des  trois  chambres  du 
G.-.  Gv. 

Cet  atelier  entra  probablement  en  sommeil  pendant  la  Révolution.  Il 
était  en  vigueur  sous  l'Empire  :  Labat,  officier  de  santé,  présida  ses 
travaux  de  1808  à  1814.  Pendant  cette  même  période,  son  député  était 
Fouquier,  receveur  de  l'enregistrement. 

HAVRE  (LE) 
SAINT  JEAN  DU  HAVRE 

Cette  L.'.  fut  constituée  en  1744,  par  la  G.\  L.*.,  en  faveur  du  vén.*. 
m.-.  Lenoble.  Elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 

La  même  année  une  autre  L.*.  était  également  fondée  par  la  même 
puissance  en  faveur  du  vén.*.  m.*.  Doyen.  On  ne  sait  rien  de  cet  atelier, 
pas  même  son  titre. 

FIDÉLITÉ 

D'après  M.  de  Loucelles,  cette  L.'.,  la  plus  ancienne  du  Havre,  aurait 
été  fondée  en  1744,  en  faveur  du  vén. ".m.*.  Ursin  Le  Doyen,  Ses  travaux 
remonteraient  à  1739  Comme  en  dehors  des  L.'.  que  nous  avons  citées 
précédemment,  il  y  en  eut  une  autre  fondée  pendant  cette  même  année 
1744  en  faveur  du  vén.'.  m.*.  Bachelier  ;  à  défaut  des  constitutions  pri- 
mitives, il  est  difficile  de  déterminer  positivement  lequel  de  ces  vén.*. 
fut  le  fondateur  de  la  Fidélité.  Il  serait  possible  et  probable  même  que, 
par  la  suite,  ces  divers  maîtres  de  L.".  aient  participé  à  cette  fondation, 
soit  par  fusion,  soit  par  élimination  à  la  suite  de  décès  successifs. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  Fidélité  comprenait  24  membres  en  1776  et  35, 
l'année  suivante.  Le  G  \  O.*.  avait  renouvelé  ses  constitutions  le  2  dé- 
cembre 1774  en  l'autorisant  à  prendre  rang  en  1744. 

Ses  vén .*.  furent  :  Lenoble  (1773-1775)  ;  Jorel  de  Parmentier,  con- 
trôleur de  la  manufacture  des  tabacs  (1776)  ;  Le  Bourgeois,  négociant 
1777-1785),  et  Allègre,   négociant    (1788-9).    Ses  secrétaires  étaient  :  Le 


432  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Bourgeois  (1776)  ;  Rajot,  entreposeur  des  tabacs  (1777),  et  Guérard,  négo- 
ciant (1785-1789). 

L'abbé  Pingre  fut  son  député,  de  1776  à  1785,  et  Delaville,  docteur  en 
droit,  chevalier  du  Christ,  officier  du  G.\  0.\  en  1788  9 

Parmi  ses  membres,  avant  la  Révolution,  figurent  :  Jorel  de  Parmen- 
tier  ;  Planchon  ;  Leriche  de  Langerie  ;  Le  Bourgeois  ;  Serry  de  la 
Fraye  ;  Rouhir  ;  d'Introuz  ;  Véron  ;  Berlhaut  ;  Rollin  de  la  Farge  ; 
Hérault  ;  Bachelet  ;  de  l'Aunay  ;  Perial  ;  Loisel  ;  Lemerle  ;  Potier  de 
Glatigny  ;  Hérault  fils  ;  Cirier  le  jeune  ;  baron  de  Fargan  ;  Drouet  ; 
Cirier  l'aîné  ;  du  Tertre  ;  Desfontaines  ;  la  Coudraye  ;  Dauphin  ;  Le 
Bourgeois  ;  marquis  de  Fayel  ;  comte  d'Atala3ra  ;  Le  Peletier  de  Feu- 
musson  ;  Lestorey  de  Boulogne  ;  de  Limoges  du  Tuy  ;  de  Mauclerc  ; 
Painpel  de  Hengueville  ;  Le  Prévost  de  Tournion  ;  de  Boulongne  ; 
Ignace,  curé  de  Grandchamp  en  Caux. 

La  Fidélité  conserva  son  activité  pendant  la  Révolution.  Elle  eut  pour 
vén.\  :  Allègre,  négociant  (1800-1808),  Lacorne,  avocat  1813-4).  Elle 
changea  fréquemment  ses  députés  :  Chereau  (1800)  ;  Oudet  (1802-1808J, 
et  Carbonnet,  vérificateur  et  inspecteur  des  lits  militaires  (1813  4). 

UNITÉ 

D'après  M.  de  Loucelles.  cette  L..,  qui  remontait  à  1766,  aurait  délivré 
un  diplôme  de  maître,  le  1er  novembre  1768,  à  Philippe-Etienne  Odièvre. 
Cet  atelier  n'a  pas  laissé  d'autres  traces. 

SAINT-JEAN  DE   LA  CONSTANCE 

Cet  atelier  fut  fondé  par  la  G.".  L.\  le  2  octobre  1768,  en  faveur  du 
vén.\  m.'.  Broutier.  Elle  existait  encore  en  1789  et  disparut  définitive- 
ment pendant  la  Révolution. 

HESDIN 

FIDÉLITÉ 

D'après  MM.  Savine  et  Bournand  (Thermidor,  p.  39),  Robespierre 
aurait  fait  partie  de  cette  L.\.  Elle  fut  constituée  probablement  par  une 
puissance  jacobite,  le  17  juillet  1749.  Ses  constitutions  furent  renouvelées 
le  10  décembre  1772  par  la  G.'.  L.\  et  le  11  août  1774  par  le  G.-.  O.*. 
En  1776,  elle  comprenait  28  membres  et  31  en  1777.  Ses  vén.*.  furent  : 
André,  rentier  (1776)  ;  de  Loches,  capitaine  au  régiment  de  Diesbach 
(1777)  ;  Jacquemont  du  Donjon,  avocat  (1785)  ;  de  Saint-Martin,  capi- 
taine au  régiment  de  chasseurs  (1788),  et  Bellevre,  avocat  (1789  .  Ses 
secrétaires  furent  :  Ledoux  (1776)  et  André  1777-1789  .  Ses  députés 
furent  nombreux  :  Carbonnel,  avocat  au  Parlement,  officier  honoraire 
du  G.-.  O.*.  (1776-7)  ;  Laffilard  (1785  8)  ;  Leroy  de  Frontigny,  ancien 
écuyer  du  roi  (1789). 

Cette  L.\  entra  probablement  en  sommeil  pendant  la  Révolution.  Un 
ancien  militaire,  de  Vadicourt,  fut  son  vén.".  en  1808  et  en  1813.  Claude 
Blin,  ancien  officier  d'infanterie,  le  remplaça  en  1811  et  1814.  Elle  eut 
successivement  pour  député  pour  la  L.\  et  le  chapitre,  Kienlin,  officier 
honoraire  du  G.\  Ov.  (1808-13),  et  Forcade  de  la  Roquette,  juge  de  paix 
du  12e  arrondissement  en  1814. 


LOGES    DE   PROVINCE  433 

La  correspondance   de  celte  L.\    était    adressée   sous   le    couvert    de 
l'anagramme  Efidelit. 

LANGRES 

SAINT-MICHEL  DU   BON-ACCORD 

Celte  L.\,  fondée  à  une  date  inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 


LAUTERBOURG 


CANDEUR 


Cette  L.'.  délivra  un  brevet  le  15  novembre  1770.  Ce  brevet  est  signé 
Savagner,  m.*,  en  chap.".  S.  P.  R.-j-  vén.*.  ;  Modérât,  secrétaire  élu  ; 
Gabel,  1er  surv.'.  élu  ;  Lievretle,  élu,  et  Eger.  Cette  pièce  est  sem- 
blable à  celles  de  cette  nature  délivrées  par  Beauchaine.  Nous  n'avons 
pas  trouvé  d'autres  traces  de  cette  L.\,qui  fut  peut-être  une  L.'.  militaire 
ambulante. 

LIBOURNE 

SAINT-JEAN 

La  G.'.  L.*.  fonda  un  atelier  sous  ce  titre  en  1762,  en  faveur  du  vén.*. 
m.*.  Tisame  père.  Cette  L.'.  existait  encore  en  1779. 

AMITIÉ 

A  une  date  inconnue,  la  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  en  faveur  du  vén.*. 
m.*.  Jean  Gris.  Cet  atelier  fonctionnait  encore  en  1779. 

Une  autre  L.\  fut  également  fondée  avant  1779  par  la  G.*.  L.*.,  en 
faveur  du  vén.'.  m.  .  Rupain.  Cette  L.*.  n'a  laissé  aucune  trace,  pas 
même  son  titre. 

LIGNY 

En  1779,  fonctionnait  un  atelier  fondé  par  la  G.-.  L.'.  le  19  août 
1752,  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Duprat.  Cet  atel.\  n'a  pas  laissé  de  traces. 

ERÈRES  ZÉLÉS 

Cette  L.-.  fut  fondée  le  4  février  1767  par  la  G.'.  L.'.,  en  faveur  du 
vén.*.  m.*.  Le  Semelier,  seigneur  du  Isard.  Le  G.'.  0.\  la  reconstitua 
le  17  septembre  1778.  En  1776  et  en  1785,  Le  Semelier  était  encore  son 
vén.*.  Elle  avait  pour  secrétaire  de  Nattes  de  la  Calmontié.  Cette  L.*. 
était  en  sommeil  en  1788.  Elle  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

LILLE 

SAINT-JEAN   ANCIENNE    ET     SAINT-JEAN   DE    LILLE  ,     réunies    A   LA 
VERTU    TRIOMPHANTE    formant  L'HEUREUSE  RÉUNION 

L'historique  de  ces  L.*.  est  d'une  grande  complication. 

La  G.'.  L.*.  formait  en  1744,  à  l'0\  de  Lille,  deux  L,'.  :  Saint  Jean 
de  Lille,  le  6  novembre,  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Friat,  et  le  26  suivant, 
Saint-Jean  Ancienne,  en    faveur   du  vén.-.  de  la  Porte.  Les  patentes  de 

LA   FRANC-MACONNERIE.    —   T.  I.  28 


434  LA    FRANC-MAÇONNERIE  EN    FRANCE 

celte  première  L.*.  furent  renouvelées  en  1753,  en  faveur  du  vén.'.  m.*. 
Zambault.  C'est  de  la  réunion  de  ces  deux  L.-.  que  sortit  l'Ancienne 
Saint-Jean,  que  le  G.'.  0.*.  reconnut  le  4  avril  1774  en  lui  accordant  de 
prendre  rang  du  6  novembre  1744.  Plus  tard,  la  G.'.  L.*.,  le  16  juin  1764, 
fonda  la  Vertu  Triomphante,  en  faveur  du  vén.*.  m.'.,  Panckouke  que  le 
G.-.  O.*.  reconnut  le  15  novembre  1773. 

Enfin  l'Ancienne  Saint-Jean  .et  la  Vertu  Triomphante  fusionnèrent  le 
14  juin  1775,  sous  le  titre  de  l'Heureuse  Réunion. 

Cependant,  29  dissidents  de  l'Ancienne  Saint  Jean  continuèrent  leurs 
travaux  jusqu'en  1776  sous  le  marteau  de  Poisson  des  Londes,  coloneL 
d'infanterie  et  ingénieur  en  chef.  11  avait  pour  secrétaire  Rivière,  em- 
ployé à  l'intendance,  et  le  baron  de  Toussainct  comme  député.  Il  est  pro- 
bable que  ces  dissidents  fusionnèrent  avec  l'Heureuse  Réunion  en  1777, 
car  on  retrouve  plusieurs  d  entre  eux  par  la  suite  parmi  les  membres 
de  cette  L.*. 

Parmi  les  membres  de  l'Heureuse  Réunion  figurent  en  1775  :  Fontaine 
de  Biré  ;  Alix  ;  Veyrard  de  Lorme  ;  Mesplet  ;  Lefebvre  de  la  Basse- 
Boulogne  ;  Diedeman  ;  Petitpas  ;  le  marquis  de  Guistelle  ;  Vauzeler  de 
Santés  et  Widhem,  notaire.  Les  vén.*.  de  cette  L.\  furent  : 
Capron,  négociant  et  échevin  (1776)  ;  Poisson  des  Londes  (en  1777  et 
1788-9)  et  Cot,  directeur  général  des  vivres  en  Flandre,  Artois  et 
Picardie.  Ses  secrétaires  furent  Widhem,  Rivière  et  Frey,  pension- 
naire du  roi.  Ses  députés  furent  Savalète  de  Lange   et  Rivière. 

Parmi  les  membres  de  la  Vertu  Triomphante  figurent,  de  1773  à  1775  : 
Simon  Brest  ;  Charles  Panckouke  ;  Philippe  Dehun  ;  J.-B.  Hallul  ; 
Beaussier  ;  de  Monthinot;  Samin  ;  Cannet  ;  de  la  Louvelaye  ;  le  Page  ; 
Le  Dieu  ;  Gosselin  aîné  et  jeune  ;  Rivière. 

Il  est  probable  que  pendant  quelques  mois  un  petit  nombre  de  mem- 
bres de  cette  L.#.  continuèrent  séparément  leurs  travaux  dans  une  loge 
qui  prenait  le  titre  de  Triomphante. 

L'Heureuse  Réunion  disparut  définitivement  pendant   la   Révolution. 

UNION  INDISSOLUBLE 

Cette  L.\  fut  constituée  probablement  par  une  puissance  jacobite  en 
1746,  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Mariage.  La  G.-.  L.-.  la  reconstitua  le 
19  octobre  1760,  et  le  G.*.  O.'.  le  15  novembre  1775.  Cet  atelier,  qui 
comprenait  18  membres  en  1776,  était  présidé  par  Capron,  Widhem  était 
son  secrétaire.  Elle  cessa  définitivement    ses  travaux  vers  1780. 

Vers  1764,  la  G.'.  L.'.  fonda  un  atelier  dont  on  ignore  le  titre,  en 
faveur  du  vén.*.  m.'.  Calvet  de  Rochemoulit.  Il  semblerait  que  cette 
L.-.  existât  encore  en  1779. 

GRANDE  LOGE  ÉCOSSAISE 
En  1750,  une  Mère  Loge  aurait  existé  sous  ce  titre.  (Voy.  Rouen.) 

AMIS  RÉUNIS 

Cette  L.-.  fut  constituée  le  15  juin  1766,  par  la  G.-.  L.*.,  en  faveur  du 
vén.-.  m.'.  Abrissi.  Elle  fut  reconnue  par  le  G.-.  O.'.,  le  20  février  1777. 
En  1785,  un  chapitre  fut  souche  à  cet  atelier. 


LOGES    DE    PROVINCE  135 

Les  Amis   Réunis   comptaient    19    membres  en   1777  :  le   vén.-.  était 
Dathisj  artiste  ;  le  secrétaire,  Cuvelier,  négociant,  et  le  député,  Jouve 
ancien  officier  de  frégate  du  roi. 

En  1785,  le  vén.\  était  Rousselle,  négociant,  et  en  1788-9,  Datbis  jeune, 

négociant.  Son  député  était  JeofTroy,  archiviste. 

lui  sommeil  pendant  la  Révolution,  les  Amis  Réunis  reprirent  leurs 
travaux  sous  l'Empire.  Cette  L.\  eut  pour  yen.*.  :  Fleury,  directeur  des 
postes  (1800-1802)  ;  Malo,  négociant  (1808);  et  Vanachère,  négociant 
(1813  4).  Elle  eut  successivement  pour  députés,  pour  la  L  '.  et  le  chap.-., 
pendant  cette  période,  Doisy,  David  et  Sallambier.  La  correspondance 
était  adressée  sous  le  couvert  de  l'anagramme  :  Asim  de  Surénis. 

P  A UFAITE  INTELLIGENCE 

Lorsque  cette  L.\,  qui  comprenait  16  membres,  fut  constituée  par  le 
G.*.  O.'.  le  29  février  1776,  pour  prendre  rang  du  12  octobre  1775,  et 
en  rappelant  ses  travaux  commencés  en  1770,  on  lui  réserva  la  faculté 
de  prendre  rang  à  la  date  de  son  ancien  titre  si  elle  parvenait  à  le 
retrouver.  Cette  L.*.  avait  alors  pour  vén.'.  le  baron  de  Goer  de  Hervé, 
seigneur  d'Haltinues,  Herck.  Marseroulles,  etc.,  chambellan  de  Bavière, 
conseiller  au  conseil  ordinaire  de  S.*.  A.',  le  prince  de  Liège  ;  son 
secrétaire  était  de  Soër,  imprimeur  et  gazetlier,  et  son  député,  Millon, 
officier  du  G.*.  O.-.,  conseiller  au  Châtelet. 

Cette  L.*.  cessa  définitivement  ses  travaux  avant  1780. 

LIMOGES 

GRANDE  LOGE  ÉCOSSAISE. 

En  1750,  une  Mère  Loge  aurait  existé  sous  ce  titre.  (Voy.  Rouen.) 

FRÈRES  UNIS 

La  G.'.  L.-.  constitua  cet  atelier  le  4  février  1767,  en  faveur  du  vén.*. 
m*.  David,  avocat  au  Parlement,  qui  fut  le  secrétaire  de  la  L.\  de  1776 
à  1790.  Ses  vén.-.  furent  Petit,  receveur  des  tabacs  (1777  et  1789)  ; 
Fournier,  avocat  (1785)  ;  Nouailhier,  négociant  (1788).  Son  député  fut,  au 
début.  Barbou-Descourières,  négociant,  frère  de  l'imprimeur,  puis  Tassin 
de  l'Etang. 

En  1791,  cette  L.-.  cessa  définitivement  ses  travaux. 

PARFAITE  HARMONIE 

La  G.-.  L.#.  constitua  cet  atelier  le  même  jour  que  les  Frères  Unis 
(4  février  1767),  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Massier.  En  1779,  elle  était 
encore  en  vigueur.  Depuis  elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 

LISIEUX 

SAINT-PHILIPPE  DE  LA   CONCORDE 

Constituée  le  9  juillet  1770,  par  une  puissance  inconnue,  probablement 
G.\  0.\  de  Bouillon,  cette  L.*.  fit  renouveler  ses  titres  parla  G.'.  L.'. 


436  LA    FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 

S 

le  10  décembre  1772,  et  par  le  G.*.  0.\  le  9  décembre  1774.  De  cette 
dernière  date  à  1778,  époque  de  la  disparition  de  cet  atelier,  elle  eut  pour 
vén.\  m.*,  le  chevalier  de  Beaumont,  pour  1er  surv.\  de  Nocey  et 
pour  2e  surv.\  de  Parfouru. 

LOCHES 

CŒURS  UNIS 

Cette  L.'.  fut  constituée  le  7  mai  1765,  par  la  G.*.  L.\,  en  faveur  du 
vén.\  m*.  Robillard  et  renouvelée  par  le  G.*.  0.\  le  30  octobre  1777. 
Elle  avait  alors  pour  vén.-.  le  comte  de  Marolles,  écuyer  de  la  main  de 
Monsieur,  pour  secrétaire  Paulquin,  feudiste,  et  pour  député  Gabon, 
avocat  au  Parlement. 

Bien  que  les  Annuaires  du  G.'.  0.\  indiquent  que  cette  L.'.  n'était 
pas  en  vigueur  de  1785  à  1789,  j'ai  eu  en  main  un  brevet  de  cette  L.-. 
du  29  avril  1790,  signé  :  Henry  ;  Denoisay  ;  Louis  de  Marolles  ;  Hanic- 
que  ;  Gabori  ;  Paulquin  ;  Jacquier  de  Soupart  :  Saint-Chéron  de 
Saint-Etienne  ;  comte  Jules  de  Marolles  ;  Nau  ;  Prévost-Desnoka  ;  de 
Pemyn  ;  de  la  Ferrière  ;  Gaulin  et  Auroux. 

Cette  L.'.,  disparue  peu  après,  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

LONS-LE-SAULNIER 

UNION   PARFAITE 

Cet  atelier  fut  constitué  en  1763,  par  la  G.*.  L.*.,  en  faveur  du  vén.'. 
m,*.  Gaudinot.  Il  était  encore  .en  vigueur  en  1779. 

ÉGALITÉ 

La  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  le  17  juillet  1766,  et  le  G.*.  0.\  renou- 
vela ses  constitutions  le  7  août  1777.  A  cette  date,  la  L.\  comprenait 
25  membres.  Son  vén*.  était  le  chev.\  de  Longeville,  chevalier  d'hon- 
neur de  la  chambre  des  comptes,  et  son  secrétaire  Jousrandot,  avocat. 
De  1785  à  1789,  ces  deux  officiers  furent  remplacés  par  Ferdinand,  avocat, 
et  Gorin. 

Cette  L.*.  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

LORIENT 

UNION 

Les  constitutions  primitives  de  cette  L.*.  datent  de  1744.  La  G.*.  L.-. 
les  renouvela  le  17  décembre,  1760  et  le  G.\  O  \  le  4  décembre  1777. 

Les  33  membres  qui  la  composaient  étaient  présidés,  en  1777,  par 
Cordé,  négociant,  et  en  1788 -9,  par  Chaumat,  commissaire  de  la  marine 
espagnole. 

Les  secrétaires  furent  :  Galabert,  négociant  (1777)  ;  Durnay,  commis 
de  la  marine  (1785-8)  ;  et  Bijotat,  négociant  (1789). 

De  1777  à  1785,  son  député  fut  Trudon  des  Ormes,  et  en  1788-9, 
Pescheloche. 


LOGES   DE   PROVINCE  137 

L'Union  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution  et  les  reprit  de 
bonne  heure. 

Ses  vén.*.  furent  :  Garnier,  négociant  (1800)  ;  Ducrano  (1802)  ;  Letour- 
ncur,  receveur  principal  des  douanes  (1808)  ;  et  Pierre,  avoué  (1813,. 
Son  secrétaire  était  Bardon  et  la  correspondance  était  adressée  sous  le 
couvert  de  l 'anagramme  Novin. 

Son  député  pour  la  L.\  et  le  chapitre  fut  Defondeviolle  (1800-2),  et 
Laugiers-Villars  (1808-1813). 

SAINT  JEAN   DE   LORIENT 

Constitué  le  5  décembre  1760,  par  la  G.*.  L.\,  en  faveur  du  vén.\  m.*. 
Poupart  de  Beaubourg,  cet  atelier  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

HEUREUSE  ALLIANCE 

Cette  L.'.,  dont  on  ignore  même  la  date  de  constitution,  n'a  pas  laissé 
de  traces. 

LUXEUIL 

RÉCONCILIATION 

C'est  en  faveur  du  vén'.  m.'.  Aubry  que  le  3  juin  1766  la  G.*.  L.* 
fonda  cet  atelier,  qui  en  1779  était  encore  en  vigueur. 

LYON 

GRANDE  LOGE  ÉCOSSAISE 

En  1750,  une  Mère  Loge  aurait  existé  sous  ce  titre.  (Voy.  Rouen.) 

PARFAITE  AMITI  , 

On  ne  peut  séparer  l'historique  de  cette  L.*.  de  celui  des  Vrais  Amis 
et  de  la  Parfaite  Réunion. 

La  Parfaite  Amitié,  constituée  par  la  G.*.  L.'.  le  21  novembre  1756,  en 
faveur  de  J.-B.  Willermoz,  fusionna  le  10  octobre  1766  avec  les  Vrais 
Amis  fondée  le  13  juillet  1761.  Ces  L.".  prirent  le  titre  de  les  Deux  L.'. 
réunies  et,  à  partir  du  4  juillet  1782,  celui  d'Amis  de  la  Vérité.  En  1784, 
la  Parfaite  Réunion  vint  à  son  tour  se  fondre  dans  les  Amis  de  la  Vérité. 

Lorsque  la  Parfaite  Amitié  fut  constituée  par  la  G.'.  L.'.  depuis  trois 
ans,  ses  travaux  étaient  présidés  par  Willermoz,  qui  conserva  le  maillet 
de  vén.  jusqu'en  1761  (1).  En  1761,  il  fut  remplacé  par  Rozier  ;  en  1762, 
par  Antoine  Bouchet  ;  en  1763-5,  par  H.  Belz,  et  en  1764-5,  par  Jacques 
Bridant,  bien  que  les  constitutions  aient  été  renouvelées  en  1765,  en 
faveur  de  Belz. 

Après  la  fusion  avec  les  Vrais  Amis,  les  vén.'.  furent  :  Antoine-Marie 
Burlat,  notaire  (1767)  ;  Jean  Nicolas  de  l'Horme,  négociant  (1768)  ; 
Pierre  Chaix  (1769)  ;  Louis-Antoine  Boyer  du  Bouquet,  médecin  (1773)  ; 
Faure,  négociant  (1776)  ;  Monges,  négociant  (1777). 

(1)  Il  est  probable  que,  dès  1744,  Rozier  précéda  Willermoz  comme 
vén.'.  m.*,  de  cette  L.'. 


438  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Le  G.-.  O.*.  avait  renouvelé  les  constitutions  des  deux  L.\  Réunies  le 
25  mars  1774  :  Monges  lut  de  nouveau  vén.\  en  1783  ;  de  Petilchet  en 
1784  ;  Lecamus,  receveur  des  gabelles  et  greniers  de  Lyon,  de  1785  à 
1789.  Son  député  était  Deveux,  négociant,  officier  du  G.'.  0.\ 

Cette  L.\  se  composait  de  23  membres  de  1760  à  1776,  et  48  en  1777; 
elle  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

En  1787,  le  tableau  de  la  L.\  se  composait  des  membres  suivants  : 

Vén.\  :  Jean-Baptiste-Louis  Janon  de  Souligné,  chev.v,  directeur  des 
fermes  du  roi  ;  1er  surv.\  :  Jean  Burtin  de  la  Rivière,  ancien  officier 
d'infanterie,  trésorier  de  France  ;  2e  surv.\  :  George-Zacharie  Dugueyt» 
conseiller  du  roi,  notaire  ;  orat.\  :  Jean-Charles  Terret,  négociant  ; 
secrétaire  :  Augustin-Noel  Vasse  de  Rocquemont,  entreposeur  général  du 
tabac  ;  trésorier  :  Jean- Louis  Audrade  Maljulien,  négociant  ;  passé  maî- 
tre, chancelier,  garde  des  sceau,  timbre  et  archives  :  Antoine-Marie 
Burlat,  négociant  ;  maîtres  des  cérémonies  :  Antoine  Dareste  de  la 
Chavane,  receveur  général  du  tabac  ;  François  de  Ruolz,  lieutenant  de 
vaisseau,  chev.  de  Saint-Louis  et  de  Saint-Lazare  ;  Joseph  Sepolina 
oncle,  négociant;  Jean -Théodore  Rilliet  négociant  ;  hospit.v  :  Louis  Mon- 
tagnat,  négociant  ;  Jean  François  Milliet,  négociant  ;  substitut  des surv.'.  : 
Christophe-Jean  Dumont,  procureur  es  cours  de  Lyon  ;  substitut  de 
l'orat".  :  Claude-François  Rousset,  écuyer,  négociant,  substitut  du  secré- 
taire :  Jean  Bouchardier,  négociant  ;  adjoint  du  chancelier,  garde  des 
sceau,  timbre  et  archives  :  Jean-François  Milliet,  négociant,  ex-vén.".  ; 
Etienne-Gabriel  le  Camus,  receveur  des  gabelles,  président  actuel  de  la 
G.'.  L.\  P.-.  ;  passés  maîtres,  anciens  présidents  à  la  R.\  G.-.  L.\  P.*.  : 
André  Mongez  oncle,  négociant  ;  Jacques  de  Petitchet,  écuyer;  décora- 
teur :  Jean-Baptiste  Lanlilly,  tapissier  ;  Aimé  de  la  Roche  ;  membres  : 
Matthieu  Arnaud-Tison,  négociant  ;  Jean  Bousquet,  négociant  ;  Philippe 
Journoud,  négociant  ;  Louis  Pettota  aîné,  négociant  ;  Etienne  Farge  fils 
aîné,  officier  du  point  d'honneur,  négociant  ;  Pierre  Farge  le  jeune, 
négociant;  Claude-Marie  Roze,  négociant;  Emmanuel  Desmarlin,  négo- 
ciant ;  François-Jacques  Lamarche,  négociant;  Louis  Dubost,  architecte  ; 
Antoine  Pons,  négociant  ;  Jean-François  Grand,  architecte  ;  Jean-Bap- 
tiste Bonneury,  chirurgien  ;  Jean-Antoine  Berger,  receveur  des  consigna- 
tions ;  affiliés  et  enfants  de  la  L  '.  :  Jean-Baptiste  Gayral,  négociant  ; 
Cyprien  Pettola  le  jeune,  négociant  ;  Joseph  Sepolina  neveu,  négociant; 
Jacques  Verissel,  négociant  ;  Jacques  Recamier,  négociant  :  Claude 
Baroud,  écuyer,  avocat  du  roi  au  bureau  des  finances  ;  Claude-Joseph 
Maradan,  négociant  ;  André  Blay,  peintre  ;  Pierre  Loir,  négociant  ; 
David,  contrôleur  des  gabelles  ;  affiliés  non  résidents  à  cet  Orient  : 
Schattheimer  Jacquet,  à  Chambéry  ;  Jean  Benoit  Velmaël,  négociant  à 
Bruxelles  ;  Louis-Barthelemi  comte  de  Bork,  staroste  de  Lutzen,  colo- 
nel des  hussards,  noble  Polonais  ;  Félix  Lioy,  avocat  à  Naples  ;  comte 
de  Lodron,  grand  maître  de  l'hôtel  du  Saint-Empire  ;  René-Marguerite 
Magol,  peintre,  à  Bordeaux  ;  Pierre  Danloux,  peintre,  à  Paris  ;  Jean- 
George  Vandermalhe  négociant,  à  Bàle  ;  Louis  Pessonneaux,  à  Paris  ; 
Maurice  Marquis  Guiraldy  de  Varene,  à  Vérone  ;  Paul  Chaix.  négociant, 
à  Cadix  ;  Pierre-Virgine  Roche,  négociant,  à  Paris  ;  Pierre  Valfary,  à 
Paris   ;    François    de    Paule    Latapie,   inspecteur  des    manufactures   de 


LOGES    DE    PROVINCE  439 

Bordeaux  ;  Jean-Baptiste  Vincent  d'Hautefage,  receveur  des  gabelles, 
fi  Saint- Symphorien-le-Château  ;  Antoine-Joseph  Mondon,  notaire,  à 
Saint-Symphorien-le-Ch&teau  ;  Abraham  Joyer,  négociant,  à  Amsterdam  ; 
Philippe  Jeanine,  négociant,  à  Livonrne  ;  Isidore  Creuse,  négociant,  à 
Barcelone  ;  Pierre  Arfilli.  gentilhomme  de  Bologne  ;  Jean-Baptiste- 
Anne  Lefebvre,  à  Paris  ;  Louis  Plumex,  négociant,  à  Lille  en  Flandre  ; 
Claude  Pezay  de  Corval,  négociant,  à  l'île  Bourbon  ;  Jean-Baptiste 
Mnlide  Willersin,  à  Birmingham  en  Angleterre  ;  Léonard  Strafforello, 
négociant,  à  Gênes  ;  Louis  Schiaffi,  docteur  en  médecine,  à  Bologne  ; 
Jean  Baptiste  Dareste  de  la  Plagnc,  contrôleur  général  des  fermes  du 
roi,  à  Vienne  :  Jean  Sciaccaluga,  négociant,  à  Gênes  ;  comte  Butilio 
Calini,  à  Brescia  ;  marquis  Ghérardini,  envoyé  extraordinaire  et  minis- 
tre plénipotentiaire  de  S.  M.  l'empereur  à  la  cour  de  Sardaigne  ;  comte 
Joseph  Trivulsi,  de  Milan  ;  comte  Caston  Bezzonico,  secrétaire  de  l'Aca- 
démie des  Beaux- Arts  de  Parme,  et  chambellan  de  S.  A.  R.  l'infant  duc 
de  Parme  ;  Barthélémy,  comte  F.'.Patellar  ;  de  Revigo,  négociant,  à 
Venise  ;  député  au  T.\  R.".  G.".  O.-.  de  France  :  Louis  Desveux,  négo- 
ciant, résidant  à  Paris,  maison  du  carrossier  du  roi  ;  députés  à  la 
T.*.  R.".  G.'.  L  '.  provinciale  :  Terrer  ;  Duguejr  ;  comité  établi  pour 
le  conseil  de  la  L.*.  :  Terrer  ;  Dareste  ;  Le  Camus  ;de  Petitchet  ;  Burlat  ; 
Audra  de  Maljulien  ;  de  Souligné. 

VRAIS  AMIS 

Cette  L.'.  fut  constituée  par  une  puissance  jacobite  le  10  mars  1760, 
en  faveur  de  Paganucci,  avant  d'être  reconnue  en  1761  par  la  G.  .  L.-. 
Elle  aurait  reçu  ses  titres  d'un  dentiste  nommé  Jean-Antoine  Hébert, 
arrivé  à  Lyon  en  1759,  se  disant  G.*.  M.',  des  L.'.  d'Angleterre,  d'Ecosse 
et  d'Irlande.  Cet  Hébert,  qui  recevait  des  aumônes  pour  les  FF.'.  Ecossais 
malheureux,  fut  peu  après  mis  à  l'index  par  les  autorités  maçonniques 
de  Paris  et  de  Lyon. 

Le  4  mai  1760,  les  Vrais  Amis  n'avaient  que  11  membres,  qui  le 
26  juillet  1761  furent  suspendus  par  le  vén.-.  Faure  et  le  1er  surv.'.  Scberer. 

Nous  avons  vu  qu'en  1766    cette  L.\  se  réunit  à  la  Parfaite  Amitié. 

VRAIS  AMIS  RECONSTITUÉS   SOUS  LE  DIRECTOIRE  ÉCOSSAIS 

Il  est  probable  que  cette  L.'.  fut  formée  avec  des  membres  dissidents 
des  Vrais  Amis.  Le  G.  .  0.\  les  agrégea  le  5  mars  1781,  pour  prendre 
rang  du  12  janvier  précédent. 

En  1785,  son  vén.*.  était  Gras,  avocat  ;  son  secrétaire,  Sandrin,  employé 
du  Consulat  ;  et  son  député,  Perrin,  avocat. 

Cette  L.-.  reprit  le  titre  de  Vrais  Amis,  et  en  1788-9  son  tableau  était 
composé  des  membres  suivants  : 

J.-B  Bouvard,  anc.  oflf.  au  service  d'Espagne,  vén.'.  ;  Jean-André 
Roux,  av.  au  Pari.,  notaire,  1er  surv.-.  ;  Georges  Pellichody,  nég., 
2e  surv.-.  ;  Jean- François  Sandrin,  commis  au  secret,  du  Consulat  et 
secrétaire  de  la  Grande  Fabrique.  1er  surv.'.  adj.\  ;  Jean-Pierre  Razuret, 
nég»  2e  surv*.  adj.\  ;  Jean-François  Perret,  nég.,  orat.\;  Claude 
Charbon,  receveur  à  la  régie  générale,  secret.-.  ;  Jean-Louis  Caprony, 
insp.  des  messag.,  secret.-,  adj.-.  ;  Claude  Brachet,  receveur  des  octrois, 


440  LA    FRANC-MAÇONNERIE  EN    FRANCE 

très.*.;  Philippe  Fiéron,  nég.,  très.*.  adj.'.  ;  hospit.'.  et  élémosinaire, 
J.-B.  Durieux  d'Esparros,  ancien  off.  inf.,  ex-vén.\  g.*,  des  se.",  timb.'. 
et  arch.'.  ;  Antoine  Thibière,  teneur  de  livres,  et  Anthelme  Besson,  rece- 
veur des  coches  de  Paris,  maîtres  des  cér.'.  ;  Jean-Pierre  Pérouse  et 
J.-B.  Odobé,  négociants,  m.-,  des  cér.*.  adjoints. 

Membres  dclaL.'.  :  Pierre-Antoine  Gourioud,  Dominique  Boucher  et 
Michel  Four,  négociants. 

Affiliés  libres  résidents  à  Lyon  :  J.-B.  Elisabeth  Borne,  chanoine, 
baron  de  Saint-Just  ;  Amable  Perret,  religieux,  et  Jacques-Philippe 
Répons,  nég. 

Affiliés  non  résidents  à  Lyon  :  Riffé  de  Caubray,  av.  aux  cons.  du 
roi,  à  Paris  ;  Alexandre  de  Lucenay,  lieut.  de  maréchaussée  à  Digoin,  et 
Louis-Philippe  Baillard,  insp.  des  octrois  de  la  Saône,  à  Chalon. 

Enfants  de  la  Loge  :  Jeau-Marie-Gabiiel  Thibière,  architecte;  Denis- 
Frédéric  Pillichody  cadet,  nég.  ;  J.-B.  Boissonnet,  nég.  à  Pétersbourg  ; 
Marc  Binet,  nég.  ;  Vincent  Clapisson,  nég.  Les  députés  étaient  :  au 
G.\  0.\  Riffé  de  Caubray,  et  à  la  G.\  L.\  Prov.'.  Jean-Antoine  Roux 
et  Antoine  Thibière.  dép.  subs. 

Le  concierge  de  la  L.\  était  Jacques,    maison  Flandin  à  Tout-Vent. 

L'adresse  permanente  de  la  L.\  était  :  à  M.  d'Esparros,  au  bureau 
général  des  octrois  de  la  ville,  à  Lyon. 

PARFAITE  RÉUNION 

La  G.*.  L.\  constitua  cet  atelier  le  26  novembre  1765  en  faveur  du 
vén.'.  m.-,  abbéde  Cully.  Ses  vén.\  furent  :  Jean-Baptiste  Mioche,  négo- 
ciant (1765)  ;  l'abbé  de  Cully  (1768)  ;  Bocary  aîné,  procureur  (1776)  ; 
Vuarchex,  négociant  (1778),  et  François  Barre,  pharmacien  (1784).  Le 
G.'.  0.\  ayant  refusé  de  reconnaître  ses  constitutions,  en  1783,  le  26  no 
venibre  1784,  les  membres  de  cette  L.-.  se  réunirent  aux  Amis  de  la  Vérité. 

SAINT-JEAN-DE-JÉRUSALEM 

Cette  L.-.,  qui  fonctionnait  en  1756,  fut  constituée  par  la  G  '.  L.'.  le 
15  juin  1758,  par  le  Contrat  social  le  15  octobre  1781,  et  parle  G.'.  0.\ 
le  31  janvier  1782,  pour  prendre  rang  du  3  octobre  précédent.  Les  tra- 
vaux de  cette  L.*.  n'ont  pas  laissé  de  traces  avant  1780. 

Ses  vén.'.  furent  :  Gaïet  de  Lancin  ;  l'abbé  Perrodon,  chanoine 
de  Fourvière  (1780)  ;  de  Tulle,  de  Villefranche,  chev.\  de  Malte 
(1781-1783  et  1786);  Gaïet  deLaurencin  (1784);  Baron,  greffier  général  du 
comté  et  cours  ecclésiastiques  (1785)  :  Courvoisier  (1787-1789)  ;  Michel, 
sous-directeur  de  la  Loterie  royale  (1788),  et  Morel,  professeur  de  musi- 
que  (1790). 

Son  député  était  Radel,  architecte.  Cette  L.-.  ne  comptait  pas  moins 
de  68  membres  et  5  frères  servants.  Sur  son  tableau,  avant  la  Révolution, 
figurent  :  Michel,  sous-directeur  de  la  Loterie  royale  à  Lyon,  vén.'.  ; 
Champeaux  jeune,  membre  du  collège  103-al  de  chirurgie,  chirurgien- 
major  du  rég.  provincial,  Ie1'  surv.\  ;  Boisset,  2e  surv.\  ;  Gaïet  de 
Lancin,  av.  au  Pari.,  ancien  vén.'.,  orateur  ;  Flize,  chef  des  bureaux  de 
la  Loterie  royale,  secret.'.;  Poncet,  nég.,  très.'.  ;  Courvoisier,  directeur 
des  affinages,    anc.  vén.'.,  g.  des  se*.  ;  Monnet,   nég.,  aumônier  infir- 


LOGES    DE    PROVINCE  1  !1 

mier  ;  Belouze,  nég.,  arch.  .  ;  Perrin,  bourgeois,  Dcschand,  nég.)  et  Alber- 
ton,  m/,  des  cérém.'.  ;  Bachelut,  nég.,  f.'.  terr.'.  ;  Malliot,  oid.\  des 
banquets  ;  Béton,  aég.,  et  La  manière,  prof,  de  musique,  arch  '.  de  la 
musique  ;  Duplessis,  teneur  de  livres  de  l'hôp.  gén.  de  la  Charité,  or.'. 
adj.'.  ;  Bertrand,  premier  commis  du  greffe  gén.  du  comté  et  des  cours 
ecclés.  de  Lyon,  adj.'.  au  secret.'. 

Parmi  les  membres  :  Baron,  greffier  gén.  du  comté  et  cours  ecch's. 
de  Lyon.,  anc.  vén.'.  ;  Bruno,  nég.  ;  Bégot,  greffier  à  la  Conservation  ; 
Morel  Carrier,  prof  de  musique;  Condamin  aine,  nég.  ;  Talhand,  nég.  ; 
Lalour,  prof  de  musique.  Guillot,  nég.  ;  Chenaud,  nég.  ;  Sallard,  prof, 
de  musique  ;  Chenavier,  commis  au  secrétariat  de  l'ass.  prov.  ;  Du 
Bouchet,  chev.  magistral  et  corn,  de  l'O.'.  de  Malte  ;  Brachct,  teneur  de 
livres  ;  Carrier  de  Préneuf,  contrôleur  gén.  des  fermes  à  Tournon  ;  de 
Perrua  de  Planligny,  anc.  off.  d'inf.  au  rég.  de  Guyenne  ;  Patricot. 
Hugenaud,  Lafabrègue,  Chazard,  Rozet,  Pourra,  Hervier,  Morel, 
Baloffey,  négociants  ;  Bollioud  de  Changieu,  off.  de  dragons  ;  Brondel, 
Bey,  Leroj',  professeurs  de  musique  ;  Du  Bouchet,  prêtre  conventuel  de 
l'O.  de  Malle,  chanoine  du  Temple  à  Paris  ;  Siéyès,  ehanoine  du  chap. 
roy.  de  Pignans  ;  Thévillon,  teneur  de  livres  ;  Pignon,  prof,  de  dessin  ; 
Pelissier,  anc.  lieut.-col.  au  service  des  Et. -Unis  d'Amérique. 

Vétérans  :  de  Tulle  de  Willefranche,  chev.'.  de  l'O.'.  de  Malte  ; 
de  Compezières,  col.  inf.  au  service  de  son  ordre,  ancien  vén.'.  ;  Potot, 
lieut.-col.  artil-,  chev.  Saint-Louis  ;  Ray,  nég.  ;  Chevrillon,  secret,  du 
roi  ;  Pernon,  prêtre  conventuel  de  l'O.  de  Malte  ;  Fontaine,  anc.  secret, 
du  coin,  des  prov.  de  la  général,  et  de  1  intend,  de  Lyon  ;  Radel,  archi- 
tecte, quai  des  Ecoles  à  Paris,  dép.  au  G.'.  O.'.  au  S.',  chap.'.  métr.'. 
du  rite  écoss.*.  et  à  la  T.  .  R.'.  M.'.  L.'.  E.\  de  France  ;  Champeaux 
jeune,  et  Boisset,  députés  à  la  T.'.  R.*.  G.'.  L.\  Prov.*. 

Servants  :  Polycarpe  Perrin,  concierge  ;  Antoine  Servonnet  et  Joseph 
Janney . 

Adresse  de  la  L.'.  :  à  M.  Flize,  chef  des  bureaux  de  la  Lot.  roy.,  à 
Lyon. 

Cette  L.'.  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

AMITIÉ 

Cet  atelier  aurait  été  constitué  en  1744,  par  une  puissance  inconnue, 
en  faveur  du  vén.'.  m.-.  Lorrain  ou  Lorin.  Il  fut  reconnu  par  la  G.'.  L.'. 
le  15  juin  1758,  avec  Jacques  Irénée  Grandon,  comme  vén.*.  ;  Gueidnn, 
1er  surv.*.  ;  Jean  Meillan,  2csurv.\  ;  Bonnichon,  orateur;  Legris,  tréso- 
rier ;  Barrai,  secrétaire  ;  et  Warnet,  maître  des  cérémonies. 

Ses  vén.'.  furent  :  J.  Legris  (1761)  ;  J.-G.  Lorin  (1762-1703)  ;  Antoine 
Salier  (1764  ,  et  G.  Bonnichon  (1765). 

En  1760,  figurent  parmi  ses  membres  :  Jacques  Symiaud,  2e  sui-y.\,  et 
Bazucco 

Cette  L.'.n'a  pas  laissé  de  traces  postérieures  à  1765. 

G.'.  L.  .  PROVINCIALE 

En  1760  et  1761,  les  vén.'.  M.',  des  L.*.  régulières  de  Lyon  formèrent 
le  projet  de  fonder  un  groupe  compact  dans  la  province  maçonnique 
d  Auvergne  dont  Lyon  était  la  capitale. 


442  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Bien  que  ces  espèces  de  M.*.  L.\  aient  enlevé  à  la  G.\  L.\  de 
Paris,  dite  G.*.  L.\  de  France,  une  partie  de  ses  pouvoirs,  celle-ci 
accorda  les  constitutions  de  la  G.*.  L.\  provinciale  de  Lyon,  le  18  juil- 
let 1761,  et  le  G.'.  O".  les  renouvela  le  4  avril  1774  Ne  pouvaient  faire 
partie  de  cette  L.\  que  les  m.*,  de  L.\  en  exercice  ou  les  passés-maîtres. 

Les  vén.\  de  cette  L.\  de  maîtres  furent  :  Jacques-Irénée  Grandon 
(1760)  ;  Jean-Baptiste  Willermoz  (1761-1762)  ;  André  Mongez  (1763,  1766- 
1767,  1775)  ;  Jean  Alquier  (1764-1765)  ;  Sellonf  (1768-1772,  ;  Prost  de 
Royer  (1773)  ;  Boscary  (1776)  ;  Saincostard  (1777-1780  ;  et  Suchet 
(1781-1789).  En  1790,  cette  L.\  se  composait  de  46  membres  présidés  par 
Ga'iet  de  Laurencin  ;  parmi  ses  membres  :  Baron,  1er  grand  surv.\  ; 
Gouvoisier  ;  de  Villefranche,  commandeur  de  Malte  ;    Michel  et  Morel. 

Les  députés  furent  successivement  :  l'abbé  Jardin,  Bacon  de  la  Cheva- 
lerie et  Salivet. 

En  1790,  la  G.'.  L.\  provinciale  représentait  11  L.\  de  Lyon  et 
3  des  environs: 

Amis    de   la    Vérité  :  Duguayt,  cons.    roi,    not.; 

Sagesse  :   Philippon,    nég.  ; 

Parfait  Silence  :  Maupetit,  nég.  ; 

Sincère  Union  :    Boisset,  prêtre  hab.  Saint-Jean  ; 

Vrais  Amis:  Thibière,  teneur  de  livres  ; 

Saint-Jean-dc- Jérusalem  :  Boisset,  nég.  ; 

Parfaite  Harmonie  :  Ponson,  prêtre  hab.  de  Saint-Jean  ; 

Sincère  Amitié  :    Micaleff,  orfèvre  ; 

Saint-Jean  du  Patriotisme  :  Richoud,  nég.  ; 

Régularité  :  Montellier,    nég.  ; 

Paix  :  Arnaud,  nég.  ; 

Frères  Elus,  O.'.  Montbrison  ; 

Parfait  Accord,  Gv.  Villefranche:  Desgranges  aîné,  av.  et  proc.  aux 
cours   de  Lyon  ; 

Sincérité  du  secret  O.*.  de  Trévoux,  Courvoisier,  dh\  affinages  de 
Lyon  et  Trévoux. 

PARFAIT  SILENCE 

Cet  atelier  fut  constitué  par  la  G.*.  L.\,  le  5  décembre  1762,  en  faveur 
du  vén.\  m.'.  Lenoir,  horloger,  et  à  son  défaut  en  faveur  de  Borde  et 
des  surveillants  Ravina  et  Duchesne. 

Les  vén.\  du  Parfait  Silence  furent  :  Lenoir  (1760-3)  ;  Borde  (1764)  ; 
Mathon  (1765)  ;  Faucheux,  imprimeur  libraire  (1775-8  et  1782-3)  ;  abbé 
Raux  (1779-81)  ;  Sébastien  Carret,  négociant  (1784-5)  ;  Burlat  (1786  ; 
Beauquis  (1787-8)  ;  et  Gagnieur,  négociant  (1789). 

Parmi  les  membres  de  cette  L.\  figurent  :  Villard,  surveillant  ; 
Naudeau,  secrétaire  ;  Lenoir,  garde  des  sceaux.  Son  député  était  Mail- 
lefer. 

Cette  L.\  cessa  de  fonctionner  pendant  la  Révolution;  neuf  de  ses 
membres  demandèrent  leur  reconstitution  au  G.\  0.\  dès  le  11  février 
1803  ;  c'étaient  les  frères  :  Philippe  Blanc,  négociant  ;  Daval  ;  Faivre  ; 
Mathieu  Barret  ;  Rayuard  aîné  et  cadet;  Changeux  ;  Massj'e  et  Rayuard 
père. 

Ses  vén.v    furent  :  Blanc    (1803-5  et  1808-11;  ;   Claude  Maillot,   limo- 


LOGES   DE   PROVINCE  I  13 

nadier  (1806)  ;  Nicolas  Barret,  instituteur  (1807),    et  le  frère  de  Philippe 

Blanc  (1812-3).  Celte  L.\  entra  en  sommeil  de  1814  à  1817.  Cependant 
pendant  l'Empire  elle  avait  été  très  prospère,  ayant  de  80  à  100 
membres. 

Le  5  avril  1800,  le  Parfait  Silence  demanda  et  obtint  de  soucher  un 
chapitre  h  son  atelier. 

Le  député  pour  la  L.\  et  le  chapitre  était  Polak  (P.  Manus),  négociant. 

Le  28  août  1805,  c'est  dans  son  nouveau  local,  inauguré  le  5  mai  1805 
que  les  L.\  donnaient  une  fête  à  l'astronome  Lalande. 

A.GESSE 

Celte  L.'.  fut  constituée  le  5  janvier  1763,  parla  G.*.  L.'.,  en  faveur  de 
Jean  Alquier,  négociant,  et  renouvelée  par  le  G.*.  0.\  le  25  mars  1774. 
Elle  était  cependant  en  vigueur  depuis  1756  et  tenait  ses  titres  d'un 
pouvoir  inconnu. 

Ses  vén.*.  furent  :  Willermoz  aîné  (1756-1760)  ;  Eynard  de  Cruzolle 
(1761);  Alquier  1763 et  1777)  ;  Jacques  Rigollet  1764j  ;  Durand  (1765,  ; 
Jean-Pierre  Suchet  (1768)  ;  Jean-Baptiste  Séranne  fils  (1769)  ;  Jean 
Desgranges  aîné  (1770  et  1776)  ;  Saincostard  aîné  (1771  et  1775)  ;  Auber- 
jounois  (1778)  ;  G.  Mayneval  (1780,  1782,  1785  et  1788)  ;  Decroix  (1781 
et  1783-4)  ;  Morin  fils  aîné  (1787  et  1789). 

La  Sagesse  disparut  définitivement  en  1792. 

AMIS  CHOISIS 

Cette  L.\  aurait  été  fondée  par  une  puissance  inconnue,  en  faveur  du 
vén.-.  m.*.  Alex.  G.  Gontard,  en  1744.  Ses  constitutions  furent  renouvelées 
en  1761  en  faveur  de  Jean  Pagannuci  par  la  G.*.  L.\  Gontard  lui  suc- 
céda en  1763,  le  marquis  de  Foudras  en  1764.  Pagannuci  reprit  la  pré- 
sidence en  1765.  Il  est  possible  que  cet  atelier  ait  continué  ses  travaux 
jusqu'en  1780. 

En  1765,  la  G.*.  L.  .  fonda  un  atelier  dont  on  n'a  pas  retrouvé  le  titre 
en  faveur  du  vén.'.  m.*.  Gérard.  Cette  L.'.,  qui  n'a  pas  laissé  de  trace, 
était  encore  en  vigueur  en  1779. 

unitp: 

La  G.'.  L.1.  fonda  cet  atelier  le  27  avril  1766,  en  faveur  du  vén.*.  m.*, 
le  comte  de  Bellemare.  Cette  L.'.  n'a  pas  laissé  d'autres  traces. 

CHOIX  DES  HOMMES  LIBRES 

Le  30  juin  1766,  la  G.'.  L.'.  fonda  cet  atelier,  en  faveur  du  vén.-.  m.*. 
Laurent  ;  il  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

CONSTANCE  DE  L'UNITÉ 

En  novembre  1766,  la  G.".  L.\  constitua  cette  L.-.  en  faveur  du  vén.'. 
m.'.  Raynard  ;  elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 

BONNE  AMITIÉ 

Un  atelier  fut  créé  sous  ce  titre,  à  une  date  inconnue,  par  une  puissance 
inconnue. 


444  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

MAÇON 
PARFAITE  UNION 

Cette  L.\  fut  constituée  le  28  décembre  1765  par  la  G.*.  L.".,  en  faveur 
<?u  vén.'.  m.*.  Ferrand  fils  ;  ses  titres  furent  renouvelés  par  le  G.*.  0.\ 
le  27  mai  1774.  Parmi  ses  membres  figurent  en  1775  :  de  Chabotc  ; 
Garnou  ;  Pavalier  ;  Séré  ;  Samion  ;  Martine  ;  Trécourt  cadet  ;  des 
Vignes  de  Davoyé  ;  Foylard  ;  Guillot  ;  Garnier  ;  de  la  Presle  ;  Poncet  ; 
Monteval  ;  Monthiermal  ;  Peltrat  et  Blondel. 

En  1776,  elle  comptait  28  membres  et  31  Tannée  suivante. 

Ses  vén.".  furent  :  Desbois,  grand  bailli  d'épée  (1776  ;  et  Sevré  de 
Saint-Romain,  trésorier  des  états  du  Maçonnais  (1777).  Son  secrétaire 
était  Rubat,  avocat  au  Parlement. 

Le  25  août  1778,  elle  s'était  fait  reconstituer  par  le  Contrat  social. 

En  1785,  elle  avait  cessé  ses  travaux.  En  1807,  elle  était  en  instance  de 
reconstitution,  et  le  4  mars  1808,  un  chapitre  fut  souche  à  cet  atelier. 

En  1809  ses  membres  étaient  :  Barthélémy-Claude  Delavaivre,  avoué  ; 
Henry-Louis  Laroux  fils,  greffier  du  tribunal  de  commerce  ;  Joseph 
Huguet,  professeur  de  dessin  ;  Gabriel-Alban  d'Hauteville,  docteur  eu 
médecine  ;  Clément  Rousseau,  marchand  ;  Claude  Dupont,  officier  pen- 
sionné, chevalier  ;  Julien  Roustau,  négociant  ;  Jean-Baptiste  Chamonard, 
négociant  ;  Jean-François-Laurent  Conste,  Dr  en  médecine  ;  Antoine 
Richard,  marchand  ;  Jean-Ange  Guillemin  aîné,  greffier  de  la  justice 
de  paix  ;  André  Guillemin  cadet,  commis  à  la  préfecture  ;  Philibert 
Lagrelet,  1er  commis  du  payeur  ;  Adrien  Sébastien  Nèple,  receveur  de 
l'enregistrement  à  Buxy  ;  Antoine  Dclorme,  restaurateur  ;  Antoine  Dus- 
seuil,  marchand  de  vins  ;  Charles-Louis-Victor  Turbet,  paj'eurdu  dépar- 
tement ;  François  Derthieux,  officier  pensionné  ;  Pierre  Vill  épique, 
capitaine  de  recrutement  ;  Laurent  Cortey,  receveur  de  l'enregistrement  à 
Geugnon  ;  Baptiste  Dure  puîné,  propriétaire  à  Màccn  ;  Jean-Baptiste 
Desroches,  commis  chez  le  receveur  général  ;  Léonard  Tussaud  aîné, 
négociant  ;  Claude  Tussaud  cadet,  négociant  ;  Etienne  Sancy,  receveur 
des  hospices  ;  François  Testenoire,  maire  de  Loche  ;  Antoine  Chassipollet, 
greffier  au  tribunal  de  simple  police  ;  Jean  Roberjot,  caissier  du  rece- 
veur général  ;  Julien  Dure  aîné,  propriétaire  à  Davayé  ;  Jean-Baptiste 
Rubat  fils,  propriétaire  à  Vinzelles  ;  Philippe  Lombard,  négociant  ; 
Jean-Baptiste  Conflans,  avocat  ;  Jean-Baptiste  Roy,  géomètre  ;  Charles 
Lorin,  avoué  ;  Jean-Claude  Perrier,  propriétaire  à  Hurigny  ;  Louis 
Dumont,  employé  au  bureau  des  hypothèques  ;  Jean-Baptiste  Talmeuf, 
maire  de  Sailly  :  François  Pennelle,  capitaine  de  recrutement  à  Bourg  ; 
Jean  -Baptiste  Farcy,  officier  de  recrutement  à  Bourg  ;  Bernard-Marie 
Bonnet,  négociant  ;  Jean-Baptiste  Bordereau,  professeur  de  musique  ; 
Antoine  Berthet,  professeur  de  musique  ;  Marie-Anne  Ignace  Monfra- 
beuf-Dubuc,  sergent-major  au  16e  régiment  d'infanterie  légère  ;  Joseph 
Defranc,  colonel  pensionné  ;  Joseph  Pascal,  sergent-major  de  la  compa- 
gnie départementale  ;  Claude  Vcsignet,  marchand  ;  Paul  Tondu, 
avocat  ;  François  Marchand,  propriétaire  à  Tournus  ;  Pierre -Etienne 
Michel,  propriétaire  ;  Jean-Baptiste  Her,  commis  à  la  préfecture  ;  Jean- 
Baptiste- Guillaume  Billioud,  propriétaire  à  Bourg  ;  Jérôme  Dimier. 
avocat  à  Bourg. 


LOGES   DE   PROVINCE  1  I") 

Affiliés  libres  :  François  Vaillant,  ingénieur  ;  François  Léger,  capi- 
taine pensionné  ;  Augustin-Marie]  Bazaine,  officier  de  recrutement  ; 

F.*,  servant     et  concierge    :    Chapon  ; 

Firent  encore  partie  de  cette  L.\  :  Jarrin,  Augros,  Franchizet,  Borde- 
reau, Chesnard,  Pionin,  Barjot,  Delaeombe,  Protat,  Hnguet,  Duffour, 
Alliot  Gratacap  fils  aîné.  Verset,  Joanin,  Delorme,'Aucaigne,  Rondet. 
Baudot,  Tondu,    Chamonard  cadet,  Bergier. 

Affiliés  :  Bordereau,  M.-.  ;  Hubsch,  R.\  -f-  î  Vésinié,  M.'.  ;  Bonnet, 
Rivet,  M.*.  ;  Cadot  ;    Cbesnard,    M.*.  ;    Affilié   libre  :  Masséna,    R.'.  -f-. 

Dignitaires:  vén.\,  Laroux  iils  ;  1er  surv.\,  Delavaivre  ;  2e  surv.\, 
Roustan  ;  orateur,  d'Hauteville  ;  orateur  adjoint,  Conflans  ;  secrétaire, 
Lagrelel  ;  secrétaire  adjoint,  Duniont  ;  garde  des  sceau  et  archives, 
Chassipollet  ;  trésorier,  Boberjot  ;  maître  des  cérémonies,  Turbet  ; 
adjoints  au  maître  des  cérémonies,  Guillemin  cadet,  Lombard  ;  Experts, 
Guillemin  aîné,  Dure  (Baptiste),  Dusseuil  ;  archiviste  préparateur,  Rous- 
seau ;  hospitalier,  Deslhieux  ;  économe,  Desroches  ;  inspecteur  des 
banquets,  Testenoire. 

Laroux  fut  vén.'.  jusqu'en  1815. 

MARENNES 
L'UNION  RÉTABLIE 

Constituée  le  23  août  1756  par  une  puissance  inconnue,  cette  L.\  fit 
renouveler  ses  titres  par  le  G.\  0.\  le  6  juin  1777,  pour  prendre  rang 
du  25  janvier  1776. 

A  cette  époque,  elle  n'avait  que  7  membres.  Son  vén.-.  était  Arnaud, 
procureur  du  roi  en  lélection  ;  son  secrétaire,  Durand,  notaire  ;  et  son 
député,  Parât  de  Montgeron,  ancien  commissaire  de  la  marine.  En  1785, 
son  vén.'.  était  Lortie  du  Maine,  avocat,  et  son  député  Potiquet. 

L'Union  Rétablie  cessa  ses  travaux  un  peu  avant  ou  au  début  de  la 
Révolution.  Elle  les  reprit  sous  l'Empire. 

En  1813-4,  son  vén.'.  était  Guérin,  avocat  ;  son  secrétaire,  Charron, 
jeune,  receveur  particulier,  et  son  député  Muraire,  grand  officier  d'hon- 
neur du  G.\  GV. 

MARIE-aALANDE 

LA    VRAIE   FRATERNITÉ 

Lorsque  le  G.'.  0.\  reconstitua  cette  L.'.  le  19  août  1781  pour 
prendre  rang  du  1er  août  1770,  il  rappela  ses  travaux  commencés  le 
7  février  1768. 

Ses  débuts  n'ont  pas  laissé  de  traces.  De  1785  à  1789,  elle  eut  pour 
vén.*.  Douard-Duvivier,  médecin  ;  pour  secrétaire,  Castayde,  officier  des 
volontaires  libres,  et  pour  député  Savin.  Elle  cessa  ses  travaux  pendant 
la  Révolution  et  en  18U8  était  en  instance  d'ouverture. 


MARSEILLE 
MÈRE  LOGE  ÉCOSSAISE 

Nous  avons  déjà  donné  en  partie  l'historique  de  cette  L.".  (chap.  vu), 
qui  fut    connue    d  abord     sous    le   titre   de    Saint-Jean    d'Ecosse,    elle 


446  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

prit  par  la  suite  le  titre  de  M.'.  L.\  de  Marseille,  puis  celui  de  M.'.  L.  . 
écossaise  de  France.  La  M.\  L.\  résista  à  toutes  les  tentatives  faites 
par  le  G.'.  O.".  pour  la  faire  rentrer  sous  son  obédience.  Elle  occupait 
un  local  superbe  à  Marseille.  Elle  constitua  les  L.*.  suivantes  :  Salon, 
Saint-Jean  d'Ecosse  de  la  Parfaite  Amitié  ;  Brignolles,  Saint-Jean 
d'Ecosse  des  Amis  Réunis  ;  Constantinople,  Saint-Jean  d'Ecosse  de  la 
Parfaite  Union  ;  Hyères,  Saint-Jean  d'Ecosse  de  la  Réunion  ;  Avignon, 
Saint-Jean  d'Ecosse  de  la  Vertu  Persécutée  ;  Martigues,  Saint- Jean 
d'Ecosse  de  la  Triple  Union  ;  Martinique  (Saint-Pierre,,  Saint- Jean 
d'Ecosse  ;  Paris,  Saint-Jean  d'Ecosse  du  Contrat  social  ;  Smyrne, 
Saint-Jean  d'Ecosse  des  Nations  Réunies  ;  Riez,  Saint-Jean  d'Ecosse 
des  Harmoniphiles  ;  Toulon,  Saint  Jean  d'Ecosse  de  l'Ecole  des  Mœurs 
et  Amis  Constants  Réunis;  Saint-Domingue  Jacmel,  Saint-Jean  d'Ecosse 
du  Choix  des  Hommes  M.-.  L.\  écoss.  de  Saint-Domingue  ;  Cadenet, 
Saint-Jean  d'Ecosse  des  Amis  de  la  Vertu  ;  Pignan,  Saint-Jean 
d'Ecosse  des  Parfaits  Amis  ;  Draguignan,  Saint-Jean  d'Ecosse  de 
la  Parfaite  Union  ;  Leu,  Saint-Jean  d'Ecosse  des  Vrais  Amis  ;  Saint- 
Chamas,  Saint-Jean  d'Ecosse  des  Vrais  Zéléu  ;  Salonique,  Saint-Jean 
d'Ecosse  de  l'Amitié  ;  Ile  de  FraRce,  Saint-Jean  d'Ecosse  ;  Cap,  Saint- 
Jean  d'Ecosse  des  Sept  Frères  Réunis  ;  Paris,  Saint-Jean  d'Ecosse 
des  Elèves  de  Minerve  ;  Libourne,  Saint-Jean  d'Ecosse  de  l'Ecole  des 
Mœurs  ;  Nevers,  Saint-Jean  d'Ecosse  de  Saint-Napoléon  ;  Cuers,  Saint- 
Jean  d'Ecosse  des  Amis  Constants  ;  Libourne,  Saint-Jean  d'Ecosse  de 
la  Sévérité  ;  Barcelonnette,  Saint-Jean  d'Ecosse  de  la  Fidélité;  Gênes, 
Saint-Jean  d'Ecosse  des  Vrais  Amis  Réunis  ;  Digne,  Saint-Jean 
d'Ecosse  des  Amis  de  l'Ordre  ;  Bastia,  Saint-Jean  d'Ecosse  des  Amis  de 
la  Paix  ;  Valensole,  Saint-Jean  d'Ecosse  de  l'Unité. 

Elle  était  également  affiliée  aux  L.*.  suivantes  :  Aix,  Amitié  :  Dra- 
guignan,  Triomphe  de  l'Amitié  ;  La  Ciotat,  Saint-Charles  de  la  Sainte 
Amitié  ;  Arles,  Triple  Alliance  ;  Manosque,  Ardents  des  Alpes  ;  Pertuis, 
Triomphe  de  l'Amitié  ;  Grasse,  Nouvelle  Amitié  ;  Toulon,  Paix  et  Par- 
faite Union  ;  Nice,  Vrais  Amis  Réunis  ;  Gap,  Amitié  ;  Manosque,  Cons- 
tance couronnée  ;  Sisteron,  Enfants  de  Thémis. 

En  1801,  ses  dignitaires  étaient  :  Demadon,  vén.\  ;  Gravine, 
1er  surv.\  ;  Tarteiron,  2e  surv.v  ;  Girard,  orateur  ;  Parac  aîné,  secré- 
taire ;  Crudère  père,  garde  des  sceaux. 

En  1810,  figuraient  parmi  ses  membres  :  Thibaudeau,  préfet,  vén.*.  ; 
Ricordi,  vice-président  du  tribunal,  av.,  1er  surw.  ;  Antoine,  baron 
de  Saint-Joseph,  officier  de  la  Légion  d'honneur,  maire  de  Marseille, 
2e  surv.*.  ;  Girard,  secrétaire  général  de  la  préfecture,  orateur  ; 
Dumay,  général  de  division,  commandant  la  8,!  division  militaire, 
maître  des  cérémonies  ;  de  Permon,  commissaire  général  de  police  ; 
Ricard,  président  du  tribunal  ;  et  Dejean,  général  de  brigade. 

Cette  L.-.  cessa  définitivement  ses  travaux  en  1814. 


UNION  PARFAITE 

Cette  L.*.  fut  constituée  en  1765,  par  la  G.'.  L.'.,  en  faveur  du  vén.' 
m.*,  de  Cessey,  et  fonctionnait  encore  en  1779. 


LOGES    DE    PROVINCE  117 

PARFAITE    HARMONIE 

Le  11  février  17(56,  cet  atelier  lut  fondé  par  la  G.*.  L..,  en  faveur  du 
vén.'.  m.*,  de  Ccssy  jeune  ;  en  1779,  elle  était  encore  en  vigueur. 

PARFAITE   SINCÉRITÉ 

Cette  L.\  fut  constituée  par  une  puissance  inconnue  le  20  juillet  1767, 
en  faveur  du  vén.-.  m.*.  Desbordes.  La  G.'.  L.'.  renouvela  ses  titres  le 
10  décembre  1772  et  le  G.'.  Gv.  le  15  novembre  1781. 

De  1785  à  1788,  elle  eut  pour  vén.*.  :  Paul,  tailleur,  et  en  1789,  Noël, 
juré-priscur.  En  1785,  son  secrétaire  était  Philippe  Paul,  et  en  1788-9, 
Dubois,  coutelier.  Son  député  fut  Hurel,  payeur  des  rentes. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution. 

En  1802,  elle  avait  pour  vén.'.  Joseph  Bastide,  rentier  ;  pour  secré- 
taire, Chauffard,  libraire,  et  pour  député,  Connord,  gantier. 

En  1808,  ces  dignitaires  étaient  remplacés  par  Dufay,  officier  de  santé, 
Serenus-Caj'ol,  architecte,  et  Foraisse. 

En  1813-4,  le  vén.*.  seul  était  remplacé  par  Vidal,  avoué. 

PRUDENCE 

Fondée  en  1765,  dès  1769,  cette  L.\  se  fondit  dans  la  M.'.L.*.  écoss." 

RÉUNION  DES  ÉLUS 

Cette  L.'.  commença  ses  travaux  en  1767,  fut  constituée  le  11  février 
1770,  par  une  puissance  inconnue,  et  fit  renouveler  ses  titres  par  la 
G.-.  L.-.  en  1772  et  par  le  G.-.  Gv.  le  22  août  1782. 

Ses  vén.*.  furent  :  Çyprien  Laurency  (1785)  ;  Barthélémy,  négociant 
(1788),  et  Deydier,  négociant  (1789).  Son  député  fut  Barbot  le  jeune, 
contrôleur  de  la  Bouche  de  la  duchesse  d'Orléans. 

MARTINIQUE  (la)  (Fort  Saint- Pierre) 
PARFAITE    UNION 

C'est  en  1738  que  cette  L.*.  fut  constituée  par  la  G.\  L.'.  ;  le  G.'.  Gv. 
renouvela  ses  titres  le  11  mai  1775. 

On  ne  sait  rien  de  ses  débuts. 

En  1776,  elle  était  composée  de  17  membres,  lorsque  la  Tendre  Fra- 
ternité se  joignit  à  elle  à  la  fin  de  l'année,  elle  en  eut  34.  En  1776  et 
1777,  elle  avait  pour  vén.-.  Brunet  ;  La  Faye,  capitaine  des  milices, 
occupait  ces  fonctions  en  1785,  et  Dubuc,  major-commandant  en  1788-9. 
Ses  secrétaires  furent  :  Fortin  (1776)  ;  Malespine  (1777),  et  Jean  Aude- 
bert  (1788-9). 

Son  député  Savalète  de  Lange  fut  remplacé  en  1788  par  Bacon  de  la 
Chevalerie. 

Cette  L.#.  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

TENDRE    FRATERNITÉ 

Constitué  par  la  G.-.  L.*.,  le  19  décembre  1765,  cet  atelier  fut  renou- 
velé par  le  G.\   0.\  le  11  juillet  1774.  Au  moment   de    sa    fusion  avec 


448  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

la  Parfaite  Union,  en  1776,  Schmidt,    commissaire   de   la  marine,  était 
son  vén.\,  Coutems,  commis  au  bureau  des  domaines,  son  secrétaire. 

MEAUX 

En  1779,  une  L.'.  était  en  vigueur  à  l'O.*.  de  Meaux,  elle  avait  été 
fondée  parla  G.*.  L.*.  à  une  date  inconnue  en  faveur  du  vén.'.  m.'. 
Félon  de  l'Arquebuse. 

METZ 
PARFAITS  UNIS 

La  G.\  L.-.  fonda  cet  atelier  le  27  décembre  1758,  en  faveur  du  vén.-. 
m.".  Précourt.  Cette  L.".  n'a  pas  laissé  d'autres  traces. 

SAINT-JEAN 

Celte  L.*.  fut  constituée  le  16  mai  1762  par  la  G.\  L.*.,  en  faveur  du 
vén.*.  m.*.  Tifaine,  directeur  des  vivres  ;  elle  fut  renouvelée  le  18  octo- 
bre 1773  par  le  G.-.  0.\ 

En  1776  et  1777,  elle  comprenait  25  membres,  toujours  présidés  par  le 
vén.*.  fondateur.  En  1785,  il  était  remplacé  par  de  Chapes,  ancien 
capitaine  aide-major  d'infanterie,  lieutenant  pour  le  roi  au  gouverne- 
ment d'Etain  ;  et  en  1788-9,  par  Bourgeois,  échevin,  conseiller  au  pré- 
sidial.  Parmi  ses  membres  figurent  :  Mehusier,  conseiller  correcteur  des 
comptes  ;  Lalance,  négociant  ;  Le  Payen,  secrétaire  de  l'intendance  ;  de 
la  Salle  d'Angerville,  président  à  mortier,  et  Georges,  deuxième  conseil- 
ler au  bailliage. 

Demachy,  maître  en  pharmacie,  fut  son  député,  et  Oudet  occupa  ces 
fonctions  en  1788-9. 

En  1776,  elle  était  sous  le  directoire  écossais.  Cette  L.-.  disparut 
définitivement  pendant  la  Révolution. 

SAINT-ÉTIENNE 

C'est  en  faveur  du  baron  de  Tschoudy  que  cette  L.'.  fut  constituée  le 
5  mars  1764  parla  G.\  L.*. 

CANDEUR 

Le  5  mars  1764,  la  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  en  faveur  de  Pince- 
maille,  qui  occupait  encore  ces  fonctions  en  1766.  La  Candeur  était  en 
vigueur  en  1779. 

SAINT-JEAN  DE  LA  CONSTANCE 

Cette  L.*.  fut  constituée  le  12  décembre  1765,  par  la  G.-.  L.*.,  en  faveur 
du  vén.".  m.",  de  Gramont.  Elle  n'a  pas  laissé  de  traces. 

MOISSAC 
SAINT-JEAN 

Lorsque  le  G.*.  0.\  constitua  cette  L.'.,  le  3  août  1780,  pour  prendre 
rang  du  26  janvier  1779,  il  rappela  ses   travaux  commencés  le  20  déc<  ni- 


LOGES   DE   PROVINCE  1  1(.) 

brc  17G2.  En  1783,  figurent  parmi  ses  membres  :  le  chev.-.  de  Mun, 
officier  au  régiment  de  l'Ile  de  France  infanterie,  grand  élu,  vén.\  ; 
Delpech,  conseiller  du  roi,  lieutenant  principal  au  siège  de  Moissac  ; 
Durfort,  1er  surv.\  ;  l'abbé  Ducros,  prêtre  bénéficiaire  du  chapitre 
tic  Moissac,  2°  surv.*.  ;  de  Cérat, président  des  requêtes  au  Parlement  de 
Toulouse,  orateur  ;  Cayron,  avocat  au  Parlement,  secrétaire  ;  de  Grand- 
Pré,  officier  d'infanterie,  trésorier  ;  de  Meynard,  avocat  au  Parlement, 
maître  des  cérémonies  ;  de  (iardeyre,  sr  de  Mallepe3Tre,  expert  ;  de 
Couché,  médecin,  et  l'abbé  de  Bidereau,  chanoine  de  Moissac,  hospi- 
taliers ;  Jacques  de  Mun,  capitaine  de  dragons,  chevalier  d'0.\,  prince 
de  Jérusalem. 

De  1785  à  1789,  le  vén.*.  était  Delpech,  et  le  secrétaire,  Plantade, 
avocat. 

Cette  L.'.  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

MONTAUBAN 

BIENFAISANCE 

Cet  atelier  commença  ses  travaux  en  1745  sous  une  puissance  incon- 
nue. Il  ne  fut  constitué  par  la  G.-.  L.-.  que  le  10  février  1772  et  par  le 
G.'.  Gv.  le  15  avril  1774. 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  :  delà  Combe  ;  Dralhe  ;  de 
Raismes  de  Donique  ;  Saint-Genier  ;  Pernon  ;  Coffinhal  ;  Ranly  de 
Bonnefon  ;  Portai  ;  Rigail  ;  Ranty  et  Bastard.  Ses  vén.*.  furent  : 
de  Raisme  de  Donique,  trésorier  des  troupes  en  1776-7  et  Ramond  de  la 
Bastide,  trésorier  des  ponts  et  chaussées  en  1785.  Le  député  en  1776 
était  Pyron  et  en  1777  de  la  Combe,  président  de  la  Cour  des  aydes  et 
finances  de  Montauban.  Dès  1788,  cette  L.*.  n'était  plus  en  vigueur  ; 
elle  ne  reprit  jamais  ses  travaux. 

CONCORDE 

Cette  L.*.  fut  constituée  par  une  puissance  inconnue  le  26  mai  1762. 
Le  2  octobre  1766,  la  G.*.  L.*.  constitua  cet  atelier  en  faveur  du  vén  \ 
m.'.  Greleau,  ingénieur.  Elle  fui  reconstituée  par  le  G.'.  O.'.  le  1er  février 
1775,  sous  le  titre  de 

CONSTANCE 

Parmi  les  membres  de  cette  L.  .  figuraient  en  1775,  d'après  les  certi- 
ficats réclamés  au  G.'.  Gv.  :  Poncet  d'Elpech  ;  Péguy  ;  Costis  ;  Puyol  ; 
Bouet  ;  Lafond  ;  Laçage  Rauly  ;  la  Levie  ;  Olivier  ;  Segnela  ;  Labro  ; 
Garrigues  ;  Pages  ;  Conté  ;  Cray  la  ;  Jullier  ;  Nègre  ;  Nimos  ;  Sacreste  ; 
Crosilliers  ;  Calvet  ;  Doumerc  ;  Doumerc  du  Moulin  ;  Garrigues  ;  de  la 
Porte  ;  de  la  Caussade  ;  Conte  ;  Savary  ;  Conte  l'aîné. 

Les  vén.*.  furent  :  Poncet  Delpech,  avocat  au  Parlement  (1776)  ; 
Lugan,  négociant  1785)  ;  Gatereau,  greffier  en  chef  de  l'élection 
(1788-9).  Les  secrétaires  :  Lafond,  procureur  au  présidial(1776)  ;  Gatereau 
(1785)  et  Morrisset,  négociant  (1788-9). 

En  1776,1e  député  était  Pingre  et,  de  1785  à  1789,  Meunier  de  l'Erable, 
auditeur  à  la  Cour  des  comptes. 

La  Constance  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

LA   FRANC-MACONNEIUE.  —  T.  I.  29 


450  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

MONTEREAU-FAULT-YONNE 
UNANIMITÉ 

Le  5  novembre  1769,  cette  L.\  fut  créée  par  une  puissance  inconnue, 
en  faveur  de  Lecoq,  maire  de  la  ville.  La  G.-.  L.\  renouvela  ses  titres 
en  1772,  et  le  G.'.  O.'.  le  6  juin  1777.  Elle  ne  comprenait  que  7  membres 
à  cette  époque. 

Ses  vén,'.  furent  :  Lecoq,  lieutenant  en  l'Election  (1776-7  et  1788-9  ; 
Levacher,  receveur  de  la  ville  et  des  impôts  royaux  (1785  .  Ses  secré- 
taires :  Thibaut,  notaire  (1777)  ;  Paillon,  régisseur  des  domaines  (1785-8); 
et  ses  députés  :  Morin,  receveur  de  La  loterie  royale  (1776-1785y,  et 
Delaville,  officier  du  G.\  O.-.  (1788-9). 

L'Unanimité  disparut  pendant  la  Révolution  et  ne  reprit  jamais  ses. 
travaux. 

MONTPELLIER 

ANCIENNE  ET  DE  LA  RÉUNION  DES  ÉLUS 

Cette  L.\  aurait  été  constituée  le  4  février  1745,  par  une  puissance 
inconnue,  sous  un  titre  également  inconnu.  A  une  date  qu'on  ne  peut 
préciser,  la  L.'.  de  Saint-Jean  de  la  Réunion  des  Llus,  fondée  par  la 
G.'.  L.'.  le  20  mai  1764,  en  faveur  du  vén.'.  m.".  Ducandac,  se  réunit  à 
elle  sous  le  titre  d'Ancienne  et  de  la  Réunion  des  Elus.  Il  est  possible 
que  cette  fusion  ait  eu  lieu  en  1777,  car  en  1776,  cette  L.*.  n'avait  que 
12  membres  et  qu'en  1777,  elle  en  avait  24. 

Ses  vén.'.  furent  :  Philippe  d'Hué,  chevalier  (1776)  ;  Sans,  bourgeois 
(1777-1785),  et  René,  médecin  (1788-9).  Ses  secrétaires  étaient  Vernier, 
avocat  et  receveur  général  de  la  loterie  de  l'Ecole  militaire  1776)  ;  et 
Richard,  avocat  et  directeur  de  la  poste  aux  lettres  (1777-1789). 

Elle  eut  successivement  pour  députés  :  Richard  (1776)  ;  Roudet,  avocat 
(1777)  ;  Roisneuf  de  Chennevières  (1785),    et  Dejoly  (1788-9). 

Entrée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  Clément,  juge  à  la  Cour 
criminelle,  fut  son  vén.'.  de  1808  à  1813,  et  Cavallier,  président  à  la  Cour 
impériale,  occupa  les  mêmes  fonctions  en  1814. 

Dejoty  fut  son  député  pour  la  L'.  en  1808,  et  pour  le  chapitre  en 
1813-4  ;  Roettiers  de  Montaleau  fils  fut  député  pour  la  L.\  (1813-4). 

BARNABAL 

Cette  L.'.,  dans  laquelle  on  ne  voulut  jamais  reconnaître  que  les 
trois  grades  symboliques,   n'a  pas  laissé  de  traces. 

BONNE  INTELLIGENCE  et  AMIS  FIDÈLES 

C'est  sous  ce  premier  titre  que  cette  L.'.  fut  constituée,  le  10  janvier 
1765,  par  la  G.*.  L.-.  Le  16  janvier  1777,  le  G.'.  O.'.  la  reconnut  sous  ce 
nom  et  le  29  avril  1779  renouvela  ses  constitutions  sous  le  titre  d'Amis 
Fidèles. 

En  1776,  elle  comprenait  21  membres.  Son  vén.'.  était  Guichard, 
maître  serrurier,  et  son  secrétaire,  Coste,  maître  plâtrier. 

De  1785  à  1789,  son  vén.'.  fut  Donnât,  tapissier,  et  son  député r 
Gastinel,  banquier. 


LOGES    DE    PROVINCE  451 

En  sommeil  pendant  la  Révolution.  En  1808,  son  vén.-.  était  Christ ol, 

ancien  capitaine  de  marine,  et  en  1813-4,  Mcstre,  fermier  du  poids 
public  ;  elle  eut  pour  député  pour  sa  L.  .  et  son  chapitre  :  Chahrillau 
en  1808  et  de  Joly-Fraissinet  en  1813-4. 

VRAIE  HUMANITÉ 

Le  21  mars  1765,  la  G.*.  L.".  constitua  cet  atelier  en  faveur  du  vcn". 
m.-.  Maulandry,  et  le  17  avril  1777,  le  G.'.  0.'.  renouvela  ses  titres. 

Gimel  aîné,  conseiller  auditeur  en  la  chambre  des  comptes,  fut  son 
vénérable  en  1770-7.  Duffour  lui  succéda  en  1785,  et  son  ancien  secré- 
taire, Fargeon,  avocat,  procureur  au  bureau  des  finances,  la  remplaça 
en  1788-9. 

Auguste  Albert  fut  secrétaire  de  1785  à  1789  ;  Dupont,  ingénieur  du 
roi,  professeur  de  mathématiques,  fut  son  député  de  1776  à  1785,  et 
Delaville,  officier  du  G.  .  0.\,  en  1788-9. 

TRIPLE  ALLIANCE 

Cette  L.*.  fut  constituée  le  8  avril  1765,  par  la  G.*.  L.*.,  en  faveur  du 
vén.'.  m  \  Caudre,  et  reconstituée  le  21  janvier  1779  par  le  G.'.  O  \ 

Ses  premières  années  n'ont  pas  laissé  de  traces.  Puech,  négociant,  fut 
vén.'.  en  1785,  et  Chastanier,  médecin,  en  1788-9.  David-Sire  fut  son 
secrétaire  de  1785  à  1789,  et  pendant  la  même  période  son  député  fut 
Dejoly. 

La  Triple  Alliance  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

PARFAITE   UNION 

Le  8  mai  1766,  la  G.'.  L.'.  constitua  cet  atelier  en  faveur  du  vén.*.  m.'. 
Vital  de  Pradaire  et  le  G'.  O.*.  le  reconnut  le  14  octobre  1782.  Il  n'a 
pas  laissé  de  traces  antérieures  à  1785. 

Vignier,  financier  du  greffe  des  états  de  Languedoc,  fut  son  vén.".  en 
1785,  et  son  secrétaire  en  1788-9.  Moulinier  fils,  pâtissier,  fut  vén.*.  en 
1788,  et  Baron,  orfèvre,  en  1789.  Son  député  de  1785  à  1789  fut  Taille- 
pied  de  Bondy,  receveur  général  des  finances. 

La  Parfaite  Union  interrompit  ses  travaux  pendant  la  Piévolulion. 

En  1808,  elle  était  présidée  par  Piron,  secrétaire  de  l'Ecole  de  médecine, 
et  en  1813-4,  par  Besset.  Son  député  pour  la  L.*.  était  Roettiers  de  Mon- 
taleau  fils,  et  son  député  pour  le  chap.\  était  Boys  de  Loury,  officier  du 
G   .  0.\ 

PERSÉVÉRANCE 

Cette  L.1.  fut  constituée  à  une  date  inconnue  par  la  G.".  L.'.,  en  faveur 
du  vén.'.  m.'.  Molinier.  Elle  existait  encore  en  1779. 


MONTREUIL  SUR  MER 

PARFAITE  UNION 

Le  18  juin  1761,  la  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  en  faveur  du  vicomte  du 
Tertre,  capitaine  au  régiment   de  Languedoc,  et  le  G.'.  O.'.  la  reconnut 


452  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

le  25  novembre  1779.  Ses  membres  fondateurs  furent  les  ff.\  Ch.'. 
d'Hodicq,  cap.  rég.  recrues  à  Abbcville  ;  Bucquet,  contrôl.  des  aydes  à 
Montreuil  ;  de  la  Chaussée,  major  ;  Jassaud  de  la  Lande,  Dr  des  aides  ; 
de  Bergemont,  cap.  inf.  ;  Robert,  bourgeois  ;  Regnart,  bourgeois  ;  de 
Rougeat,  cap.  inf.  ;  de  Lacombe,  lieut.  d  invalides  ;  de  la  Haj'e,  cap. 
rég.  Flandre  ;  de  Bergues,  g.  du  roi  ;  de  Mammonier  ;  de  Torcy,  capi- 
taine ;  Jean  Damascène  et  Fidèle,  capucins  à  Montreuil. 

En  1780.  parmi  ses  membres  figuraient  à  l'inauguration  de  son  nou- 
veau temple  :  Playoult,  curé  d'Ecuires,  secrétaire  ;  le  Prieur  de  Saint- 
Jean  du  Vivier  d  Abbeville  et  Douville-Maillefeu. 

Les  vén.\  furent  :  de  la  Pasture  de  Verhocq,  ancien  mousquetaire 
(1785)  ;  le  vicomte  du  Tertre  (1788),  et  le  comte  de  la  Fontaine-Solare, 
capitaine  canonnier  (1789).  Son  député  fut  Canonge,  et  à  partir  de  1788, 
Rœttiers  de   Montaleau. 

A  l'époque  de  la  Révolution,  les  ff.\  associés  étaient  :  Delaporte  de 
Vaux,  anc.  cap.  rég.  Viennois  ;  le  vicomte  du  Tertre,  maj.  adj.  ;  de 
Rougeat,  anc.  cap.  ;  de  la  Chaussée,  anc.  page  du  roi  ;  Dupuis  de  Rame, 
lieut.  rég.  Angoulême  ;  Du  Fiel  de  la  Combe,  anc.  g.  du  roi  ;  Jouve, 
av.  ;  Playoult,  curé  d'Ecuires  ;  chev.  de  Cossette,  off.  rég.  en  garnison  ; 
du  Blaisel  de  Belle-Isle,  anc.  off.  rég.  Picardie  ;  J.  de  Warnier,  anc. 
off.  rég.  Brest  ;  A.  de  Warnier,  anc.  off.  rég.  Dauphin  ;  François  Havet, 
nég.  Montreuil. 

Les  associés  libres  étaient  :  de  Bergemont  ;  La  Pasture  de  Verhocq, 
hab.  Paris  ;  Jassaud  de  la  Lande  ;  Bosquillon  de  Frescheville,  d' Abbe- 
ville ;  le  chev.  de  la  Haye  à  Arras  ;  baron  de  Torcjr  à  Hesdin  ;  Pilain, 
sous-prieur,  bénédictin  ;  Gay,  bénédictin  à  Boulogne-sur-Mer. 

La  Parfaite  Union  entra  en  sommeil  pendant  la  Révolution  et  se 
reconstitua  en  1806  avec  les  ff.\  François  de  la  Pasture  de  Verhocq, 
vén.\  ;  Oudart  Dixmude  de  Montbrun  ;  Benoist  du  Blaisel  et  de  Ber- 
gemont. De  Verhocq  fut  remplacé  comme  vénérable,  en  1809,  par  Tellier, 
avocat  et  greffier  du  tribunal  civil.  Son  tableau  de  1809  portait  les  noms 
suivants  :  Jouve,  avocat;  Gobert,  rentier  ;  Woillez,  contrôl.  droits  réunis  ; 
F.  Havet,  nég.  ;  Poultier,  com.  de  la  ville  ;  Thorand,  employés  droits 
réunis  ;  Rousselle,  pharmacien  ;  Spilleux,  recev.  droits  réunis  ;  Jérôme 
de  Lhomel,  clerc  de  notaire  :  Théry,  comptable  des  vivres  ;  Fougeroux 
de  Campigneulles,  rentier  ;  de  la  Tour,  anc.  officier  ;  Griffon,  avocat  ; 
Deroussent-Lambert,  chirurgien  ;  Allègre,  économe  de  l'hôpital  milit.  ; 
Meunier,  peintre  ;  Carré,  employé  droits  réunis  ;  Fillion,  employé  droits 
réunis  ;  Dauvin,  maire  de  Gouy  ;  Chocquart,  lieut.  garde-côtes. 

Les  membres  honoraires  étaient  :  de  la  Pasture  de  Verhocq,  maire  de 
Montreuil  ;  de  la  Porte  de  Vaux,  propr.  ;  Lefèvre  de  Tigny,  lieut. 

Tellier  fut  vén.\  jusqu'en  1815.  Le  député  au  G.*.  0.\  était  Davril, 
22,  rue  Saint- Sauveur,  puis  rue  Quincampoix. 


MORLAIX 

NOBLE  AMITIÉ 

Lorsque  le  G.*.  0.\  accorda  à  cette  L.\,  le  8  juin  1775,  des  constitu- 
tions pour  prendre  rang  du  25  mai  précédent,  il  rappela  ses  travaux 
commencés  en  1746. 


LOGES    DE    PROVINCE  153 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  :  de  Tromelin  ;  de'Geurnisac  ; 

Duplcssis-Pcgnsse  ;  Boistard  de  la  Touche  ;  de  Vieux  Chatcl,  procureur 
du  roi  de  l'amirauté  ;  de  Kerbellee  ;  Jaunies  ;  Waleker  et  Michon.  La 
L.'    comprenait  18  membres. 

En  1776  et  1777.  sou  vén.'.  fut  de  Tromelin,  ancien  officier  au  régiment 
de  Dauphin-cavalerie  ;  il  l'ut  remplacé  en  1785  par  Jollivet  fils,  contrô- 
leur  de  la  manufacture  des  tabacs,  et  en  1788-9,  par  de  Saint-Maurice, 
receveur  des  fermes  de  Bretagne  De  1785  à  1789,  Villiers  de  la  Berge 
conseiller  au  Parlement,  fut  son  député. 


NANCY 


VRAIE    LUMIERE 


Le  16  mai  1762,  la  G.'.  L.'.  constitua  cet  atelier  en  faveur  du  vén.'. 
m.',  baron  de  Toussainct  ;  il  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

SAINT  MICHEL  DES  CŒURS  UNIS 

Cette  L.-.,  qui  fonctionnait  en  1779,  fut  constituée  le  5  avril  1766,  par 
la  G.'.  L.*.,  en  faveur  du  vén.'.  m.*.  Morain. 

UNION  PARFAITE 

En  1779,  cette  L.*.  était  encore  en  vigueur  ;  elle  avait  été  constituée  le 
3  juin  1768  en  faveur  du  vén.'.  m.",  baron  de  Surveille. 

NANTES 

SAINT-JEAN  DE  JÉRUSALEM 

Cette  L.-.  fut  constituée  en  1744,  en  faveur  du  vén.*.  m.",  le  président 
de  Peillac.  Il  est  possible  que  cette  constitution  ait  été  accordée  par  la 
L.'.   Anglaise    de    Bordeaux.    Il   semble  qu'elle    fonctionnait  encore  en 

1779. 

GRANDE  LOGE  ÉCOSSAISE 

En  1730,  une  Mère  Loge  aurait  existé  sous  ce  titre.  (Voy.  Rouen.) 

LA   PARFAITE 

Le  6  mars  1757,  la  G.  .  L.*.  constitua  cet  atelier  en  faveur  du  vén.*. 
m.'.  Thibault.  Le  G.'.  0.\  renouvela  ses  titres  le  2  juillet  1774  et  le 
Contrat  social  le  20  mai  1780. 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  :  Thibault  ;  Salomon  et  Pierre 
Fabry  de  Montpolly  ;  Candeau  ;  Dastarils  ;  Guilley  ;  Branger  ;  Allary  ; 
Hoft'man  ;  Corneille  ;  Mac-Curtain  ;  Maguero  ;  Le  Pelé}'  aîné  et  jeune. 

La  L.\  faisait  adresser  sa  correspondance  sous  le  couvert  de  l'ana- 
gramme Tapefair. 

En  1776,  son  vén.*.  était  Murphy  l'aîné,  négociant,  et  l'année  suivante 
Garnier  du  Puy  Loup,  négociant  en  1777-8. 

En  1778,  le  tableau  de  la  L.'.  portait  les  noms  suivants  : 


454  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Couillaud  de  la  Rive,  off.  de  la  Monnaie,  1er  surv.\  ;  Bodichon.  dir. 
manuf  cordages,  2e  surv.\  ;  Thébaud.  nég.,  ex-maître  ;  Brun  l'aîné, 
imp.  libr.,  or.-.  ;  Du  Dezert,  écuyer,  avocat,  secret.*.  ;  Branger,  nég., 
très.'.  ;  Brun  le  jeune,  bourgeois,  g.\  des  se.'.;  Suin  delà  Fossonnière, 
nég.,  1er  m.',  cérém.'.  ;  Aerts,  nég.,  2°  m.  .  cérém.-.  ;  Cornet,  nég., 
terrible  ;  Brée,  dir.  manuf.  cordages  ;  Candeau,  cap.  nav.  ;  Guilley, 
cap.  nav.  ;  Murphy,  nég.  ;  Hoffmann,  nég.  ;  Dastaritz,  cap.  nav.  ; 
Fabry  de  Monpoly,  cap.  nav.  ;  Chorel  de  Claye,  anc.  off.  caval.  ; 
Desrud,  cap.  nav.  ;  Galland,  cap.  nav.  ;  Van  Doorne,  nég.  ;  Langevin, 
nég.  ;  Thébaud,  nég.,  h  l'Amérique  ;  Dode,  nég.  ;  Le  Ray,  cap.  nav.  ; 
Rousseau,  cap.  nav.  ;  Rolland  de  la  Plousière..  bourgeois  ;  Maurel,  nég. 
à  la  Guadeloupe  ;  Séjournée,  nég. 

En  1785,  le  vén.  .  était  Pierre  Jean  Brun,  imprimeur,  qui  fut  rem- 
placé en  1788  par  Suin  de  la  Fossonnière,  négociant,  et  en  1789  par 
Marsac,  prêtre,  sous-scholastique  de  l'Eglise  de  Nantes. 

Les  députés  de  la  Parfaite  furent  :  Daubertin  (1776)  ;  Mercier,  négo- 
ciant, officier  du  G.'.  Gv.  (1777)  ;  Gautier  (1785),  et  Pescheloche  (1788- 
1789). 

La  Parfaite  interrompit  ses  travaux  pendant  la  Révolution. 

Ses  vén.'.  furent  sous  l'Empire  :  Goyau,  homme  de  loi  (1802)  ;  Faute- 
rat,  négociant  (1808),   et  Chevalier  (1813-1814). 

Jusqu'en  1808,  son  député  pour  la  L.'.  et  le  chapitre  fut  Thibault, 
conseiller  référendaire  à  la  Cour  des  comptes,  et  en  1813-1814,  Foraisse, 
officier  du  G.-.  O.'. 

LA   CONCORDE 

En  1758,1a  G.'.  L*.  constitua  cette  L.-.  en  faveur  du  vén.*.  m  .*.  Gareau. 
En  1779,  cet  atelier  fonctionnait  encore. 

PARFAITE  AMITIÉ 

Cette  L.*.  fut  constituée  en  1760,  par  la  G.*.  L.'.,  en  faveur  du  vén.'. 
ni.'.  Chauvel.  Elle  n'a  pas  laissé  de  traces, 

SAINT- GERMAIN 

La  G.*.  L  '.  constitua  cet  atelier  le  3  juin  1766  ;  il  fut  renouvelé  par  le 
G.'.  O.'.  le  2  mars  1775  ;  à  cette  époque  figuraient  parmi  ses  membres  : 
Guillard-Dumenil  ;  Thomas  ;  de  la  Maillardière  ;  Ogier  ;  Prévôt  ;  de  la 
Touche  ;  Drouin  ;  Fortier  ;  Gatechair  ;  Bordage  ;  de  Loynes  ;  Dewa- 
reux  ;  Willems  ;  du  Jillou  ;  Socin  ;  Duperoux  ;  du  Trajet  ;  Seigne  ; 
de  Humelli  ;  Lenoir  de  Guébriac  ;  du  Rondier  ;  Tardiveau  ;  Cottineau  ; 
Devaucé  ;  Charet  ;  Comadzolicoffet  ;  Baur  ;  Boulet. 

Guillard-Duménil,  directeur  des  poudres,  fut  son  vén.'.  en  1776-1777.  Il 
eut  comme  successeurs  :  Ogier,  ancienofficier  d'administration,  en  1785  ; 
et  Cadou  de  la  Desnerie,  officier  des  canonniers,  en  1788-1789. 

Ses  secrétaires  furent  :  Drouin,  officier  garde-côtes  (1776-1777)  ;  Lenoir 
de  Guébriac,  négociant  (1785)  ;  Ogier  (1788;  ;  et  Albain  (1789). 

De  1776  à  1788,  son  député  fut  Boudeau,  ancien  procureur  du  roi  en 
la  maîtrise  des  eaux  et  forêts,  et  en  1789,  deJaucourt,  officier  duG.'.  O.*.. 
directeur  des  fermes  du  roi.  Cette  L.'. disparut  pendant  la  Révolution. 


LOGES    DE    PROVINCE  155 


CŒURS  UNIS 


Cette  L  '.  fut  constituée  le  15  novembre  176G,  par  une  puissance  incon- 
nue, et  renouvelée  par  la  G.-.  L.'.  le  18  mai  1772,  et  par  le  G.".  O.'.  le 
11  août  1774. 

Parmi  ses  membres  figuraient,  en  1775  :  le  chevalier  de  Kérusée  ; 
Féron  ;  Audouin  ;  Melin  ;  Foucault  ;  Le  Sénéchal  de  Richemont  ;  Rur- 
gevin  ;  de  Bourgncs  ;  Le  Lièvre  ;  Thabard  ;  Grasset  ;  Patonnier  ;  Che- 
villard  ;  Thévenard  ;  Harang  et  Fischer. 

En  1776-1777,  son  vén.'.  était  Çrasset,  procureur  ;  en  1785,  Bourcard, 
négociant  ;  en  1788,  de  Bruc  de  Beauvais,  capitaine  de  cavalerie,  et  en 
1789,  Dobrée,  négociant. 

Ses  députés  furent  :  Guillotin  (1776);  La  Voyepierre,  négociant,  garde 
du  corps  de  l'épicerie  (1777)  ;  le  comte  de  Bruc  (1785),  et  Pescheloche 
(1788-1789). 

Cette  L.".  disparut  pendant  la  Révolution. 

Trois  L.'.  furent  en  plus  constituées  à  l'Orient  de  Nantes,  à  des  dates 
inconnues,  deux  sans  titres  connus  en  faveur  des  vén.'.  m.*.  Girault  et 
Ducros.  La  troisième,  les  Vrais  Amis,  n'a  laissé  aucune  trace. 

NARBONNE 

LA   PARFAITE  UNION 

C'est  par  une  puissance  inconnue  que  cette  L.*.  fut  constituée,  le  20  sep- 
tembre 1768,  en  faveur  du  vén.*.  m.'.  Favelle  père.  Ses  titres  furent 
confirmés  par  la  G.".  L.\  le  10  décembre  1772,  et  par  le  G.'.  O.".  le 
20  juin  1776. 

En  1776,  elle  se  composait  de  17  membres  :  le  vén.-.  était  Broquise, 
minime  ;  le  secrétaire,  Guilhemou,  maître  d'hôtel,  et  le  député,  l'abbé  de 
Montmorency-Bouteville. 

Les  vén.*.  furent  par  la  suite  :  Falc  (1777)  ;  Samaruc,  fabricant 
d'étoffes  de  soie  (1785)  ;  Rainaud,  avocat  au  Parlement  (1788),  et  Saba- 
tier,  vitrier  (1789) .  Les  secrétaires  furent  Rampin,  employé  à  la  manufac- 
ture royale  (1777 j,  et  Sabatier  en  1788. 

Ses  députés  furent  :  Boudeau  (1777)  et  Gibergnes,  procureur  au  Par- 
lement (1788-1789). 

Cette  L.\  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

NESLE 
GLAIVE   D'OR 

Cette  L.\,  qui  n'a  laissé  aucune  trace,  est  signalée  par  Rebold  comme 
ayant  été  constituée  le  15  janvier  1761. 

NISMES 

SAINT-JEAN  DE  L'HUMANITÉ 

En  1779,  existait  encore  une  L.*.  fondée  le  24  juin  1753,  par  la  G.*.  L."., 
en  faveur  du  vén.*.  m.*.  Fléchier. 


456  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


SAINT-JEAN   DE    L'ÉMULATION 

Fondée  le  16  novembre  1763,  parla  G.".  L.*.,  en  faveur  du  vén.-.  m.'. 
Ponsac  de  Gérard,  existait  encore  en  1779 

SAINT-JEAN   DE  LA  SINCÉRITÉ 

Celte  L.'.  fut  constituée  par  la  G.'.  L.'.  le  17  novembre  1763,  en  faveur 
du  vén.'.  m.",  de  Scaero. 
Elle  n'a  laissé  aucune  trace. 


OLERON  (île    d) 
VRAIS   FRÈRES 

Une  puissance  inconnue  installa  cet  atelier  le  15  mai  1764,  en  faveur 
du  vén.-.  m.\  Milleret,  chirurgien-major  des  hôpitaux  militaires. 

La  G.'.  L.'.  confirma  les  titres,  le  18  mai  1772,  et  le  G.\  O.'.  le  23  avril 
1774,  pour  prendre  rang  du  29  avril  1764. 

En  1776,  il  comprenait  14  membres  et  22  en  1777. 

Ses  vén.'.  furent  :  Milleret  (1776  et  1778)  ;  Barbier  (1777),  et  le  marquis 
de  Vallée,  colonel  commandant  la  légion  de  Nassau  (1785  et  1789). 

Ses  secrétaires  furent  :  Hervin,  inspecteur  des  fermes  1 776 1  ;  Marti- 
neau,  receveur  des  fermes  (1777)  ;  Milleret  (1785  et  1789).  Son  député  de 
1776  à  1789  fut  Guillotin,  docteur  régent  de  la  Faculté  de  médecine. 

Les  Vrais  Frères  entrèrent  en  sommeil  pendant  la  Révolution. 

En  1808,  le  vén.-.  de  cette  L..  était  Boudin,  maire,  auquel  succéda,  en 
1813-1814,  Jullien,  notaire.  Son  député  de  1804  à  1814  fut  Fox,  comman- 
dant des  vétérans. 

ORLÉANS 

Dès  1744,  et  probablement  avant  cette  époque,  les  f.'.-m.'.  étaient  nom- 
breux à  Orléans,  ainsi  que  nous  l'avons  vu  (chap.  vu).  Ils  étaient  par- 
ticulièrement protégés  par  le  duc  d'Antin,  gouverneur  de  la  province 
et  G.'.  M.',  de  la  F.-.  M.'.,  et  par  de  Beauclas,  substitut  de  Joly  de 
Fleury. 

SAINT-JEAN  DES  ENFANTS  DE  LA  SAGESSE  ET  DE  LA  CONCORDE 

Cette  L.'.  est  probablement  la  plus  ancienne  d'Orléans.  Elle  était  d'ori- 
gine jacobite. 

Le  24  juin  1758,  son  vén.'.  m.*,  était  Mathurin  Itéguicmme,  maître 
élu  écoss.'.  Français,  Trinitaire  et  Anglais  ;  Pierre  Dupuy,  1er  surv.'.  ; 
Marc  Amy  Guiquero,  2e  surv.'.  ;  Sébastien  Ytasse,  or.*.  ;  Joseph  Cartier, 
très.'.  ;  Adrien  Leroux,  secret.'.  ;  Jean-Louis  Guiquero,  tuileur  ;  J.-B. 
Targe  ;  Gesnieu  de  Vilmarceaux,  ex-ler  surv.'.,  et  Grossard,  chev.\ 
dO'. 

Il  est  probable  que  cette  L.*.  fut  installée  avant  1750,  par  Raparlier  de 
Rouen  ;  elle  s'intitulait  alors  G.'.  L.'.  Ecossaise  et  faisait  fonction  de 
Mère  L.'.  (Voir  Rouen.) 


LOGES    DE    PROVINCE  457 

Cette  L.-.  n'a  pas  laissé  de  traces  ;  il  est  possible  qu'elle  se  soit  trans- 
formée et  ait  contribué  à  la  formation  de 

L'UNION  ;  JEANNE   D'ARC  et  LA   PARFAITE    UNION 

La  L.\  la  plus  fréquentée  parles  FF.-,  maçons  d'Orléans  avait  pour 
litre  l'Union,  qui  devint  par  la  suite  la  Parfaite  Union.  On  sait  peu  de 
chose  des  premiers  travaux  de  cette  L.-.  qui,  en  1772,  était  présidée  par  le 
vén.\  m.-.  Ballay,  chirurgien,  et  qui  avait  parmi  ses  officiers  l'abbé 
Lucas  de  Boulainvilliers  et  le  baron  de  Toussaincl.  En  1774,  la  Parfaite 
Union  fusionna  avec  Jeanne  d'Arc.  (Voj-.  aux  appendices.) 

Cette  L.\,  qui  fonctionnait  avant  1758,  obtint  des  constitutions  d'un 
pouvoir  inconnu,  le  17  décembre  1760  seulement. 

Elle  ne  fut  reconnue  par  la  G.*.  L.".  que  le  10  avril  1772,  et  par  le 
G.'.  0.\  le  4  avril  1774. 

De  1760  a  1765,  elle  eut  pour  vén.\  J.  Isnard  ;  Guiquero  ;  Mathurin 
Iteguiemme  ;  Ytasse,  et  Ballay,  chirurgien  du  roi.  Les  orateurs  furent  ; 
Couret  de  Villeneuve  ;  Elie  Aubereau  ;  le  P.  Vallée,  minime,  et  J.-B. 
Targe. 

Parmi  ses  membres  figuraient  en  1772  :  le  1er  vén.\  J.  Isnard-Laurent, 
directeur  du  Vingtième  ;  Forel  de  la  Croix,  chirurgien  (celui  qui  soigna 
Léonard  Bourdon)  ;  Beaubled,  négociant  ;  Couret  de  Villeneuve,  impri- 
meur ;  Ravot  de  la  Herpinière,  écuyer  ;  Moireau  ;  Porcher  ;  Fauvin, 
bourgeois  ;  Martin  ;  Gaburet.  peintre  décorateur  ;  Aubry  d'Assas,  négo- 
ciant ;  Roussel,  contr.  fermes  ;  Percheron,  écuyer,  greff.  chef  bureau 
fin.  ;  Legrand  de  Melleray,  chev.  de  Saint-Jacques,  lieutenant  colonel 
de  cavalerie  ;  Croisy  ;  Curnest  frères,  négociants  ;  Descourtils,  intéressé 
dans  les  affaires  du  roi  ;  Renard,  officier  dragons  ;  de  Boislandry-Nar- 
gel,  négociant  ;  Adam,  entreposeur  poudres  ;  Perrin  de  Cypierre  de 
Chavilly,  int.  d  Orléans. 

En  1773,  les  officiers  de  cette  L.'.  étaient  :  Ballay,  vén*.  ;  Aubereau, 
1er  surv.-.  ;  de  Bonnaire,  2e  surv.-.  ;  Iteguiemme,  Guiquero,  Fermé, 
J.  Berenther,  Verger,  Thirouin,  Brunet  aine,  Lévêque  ;  Le  Bay,  secret.-. 

Lorsque  la  Parfaite  Union  se  réunit  à  Jeanne  d'Arc  en  1774,  son  vén.'. 
était  l'abbé  Jossot.  Parmi  ses  membres  figurent  :Marcuays;  Benoît  Hery  ; 
Dubas  ;  Adam  Charles-René,  receveur  des  poudres  ;  Aubereau  Elie, 
dir.  du  terrier  du  duché  d'Orléans,  1er  surv.*.  ;  Ballay  Jean,  chirurgien, 
professeur,  ex-m.\  ;  Beaubles  Claude-Benoît,  march.  de  draps  ; 
Beauzéc  J.-B. -Nicolas,  bourgeois  affilié  ;  de  Bonnaire  Nicolas,  sculpteur 
de  l'Aead.  ;  Brunet  Joachim,  nég.;  Bronse  fils  Jean,  nég.  affilié  ;  Couret 
de  Villeneuve  Louis-Pierre,  imprimeur,  or.'.;  Duchézeau  Antoine,  bour- 
geois; Forel  de  la  Croix  Alexandre,  chirurgien,  subst.'.  du  vén.-.;  Fau- 
vin Simon-Louis,  bourgeois  ;  Gaboret,  étud.  endroit;  Gareau  Paul,  nég. 
affilié  ;  Guettard  Gabriel-Paul,  nég.  ;  Hachin  Jean-Charles,  nég.-.  ; 
Huquier  Augustin,  nég  ;  Leroy,  imprimeur,  affilié  ;  Marquesse  Antoine, 
nég.  ;  Mesnier  Joseph,  nég.,  affilié  ;  Peteau  François-Xavier,  secret  de 
l'intendance  ;  Planche  Pierre,  nég.  ;  Proust  René,  contrôleur  du  guet  ; 
Ravot  de  la  Herpinière  Etienne,  bourgeois,  vén.-.  g*,  m.-.  ;  Ravot,  dit 
Godeau  Jean-Pierre,  nég.,  2e  surv.-.  ;  Ravot,  dit  Rocher,  Etienne,  nég., 
m.-,  très.-.  ;  Renouard,  dit  Petit-Bois,  Denis,  nég.-.,  m.-,  de  cérém.-.  ; 
Renouard,  dit  Vesque,  Aignau,  nég.  ;  de   Saint-Charles    Denis,    carme 


458  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

déchaussé,  secret.-.  ;  Sevin  Jean-Philippe,  nég.  ;  Targe  J.-B.,  prof,  de 
l'Ecole  royale,  affilié  ;  Verger  Antoine,  nég.  ;  Vieusse  J.-B.,  dro- 
guiste. 

En  1775,  plusieurs  de  ses  membres  demandèrent  des  certificats  au 
G.\  O.-.  :  Renouard  dit  Petit-Bois;  Aubereau  ;  Forci  de  la  Croix  ;  Du 
Chezeau  ;  Brunet  ;  Serin  ;  Proust  ;  Renouard  ;  Planche  ;  Vieusse  et 
Fauvin. 

En  1776,  la  L.\   ne  comprenait  que  20  membres  et  32  en  1777. 

Ses  vén.\  furent  :  Ravot  de  la  Herpinière  (1776-1777)  et  des  Francs 
(1785j.  Les  secrétaires  furent  :  Saint-Charles,  carme  déchaussé  (1776)  ; 
Planche  (1777)  et  Benoît  Héry  en  1785.  Le  député  était  Salivet. 

Cette  L.\  entra  en  sommeil  dès  1788. 

Avant  89,  ses  m.',  se  recrutaient  dans  la  lre  classe  du  tiers  Etat,  celle 
qui  fit  la  Révolution  ;  ils  accueillirent  donc  le  mouvement  de  89  avec  joie 
et,  pour  être  entrés  en  sommeil  en  1788,  ils  ne  s'en  affilièrent  pas  moins 
en  1789  aux  amis  de  la  Constitution.  Us  traversèrent  la  Terreur  sans 
encombre,  sauf  leur  orateur  de  1779,  Elie  Aubereau,  qui  fut  guillotiné 
en  1794. 

La  L.'.  se  reforma  en  179^5,  et  sur  un  brevet  de  Chevalier  d'Epée 
donné  à  Carpentier,  aubergiste,  on  relève  les  noms  suivants  :  Mesland, 
vén  '.  ;  Lesourd,  secrétaire  ;  Morand  Noire,  garde  du  sceau  ;  Morand- 
Jousse  ;  Lucas-Duneau  ;  Campanel  ;  Lucas,  chev.*.  d'O.*. 

Carpentier  fut  admis  R.\  -f-  en  1800,  par  Hérault,  m.',  de  L.".  et  m.*, 
du  G.'.  0.\ 

Cette  L.-.  ne  recevait  pas  d'artisans. 

D'après  un  brevet  du  7  ventôse  an  VII,  donné  à  Urbain  Fidèle,  figu- 
raient parmi  ses  membres  :  Bailly-Drouin  ;  Merland,  vén.'.  S.*.  P.*. 
ch.\  R.\  +  ;  Rougemont,  bottier  ;  A. -F.  Merland,  m  \  P.".  ;  Jouet 
Borget  (?)  ;  Vockers  (?)  ;  Compère  ;  Lemard,  1er  surv.\  ch.\  d'O.'.  ; 
Moure  ;  Luca  ;  Poupard  ;  Dupuy  ;  Neveu. 

En  1802,  Merland  père,  officier  de  santé,  était  encore  vén.-.  Le  député 
était  Colin,  papetier. 

En  1803,1a  L.-.  comptait  58  membres  :  Colliex,  négociant,  était  vén.'.  ; 
Fouré,  médecin,  1er  surv.'.  ;  Boulet,  négociant,  23  surv.-.  ;  et  Piedor- 
Dumuy,  négociant,  orateur  ;  Bouron,  j.  trib.  civ.,  secret.-.  ;  Jullien, 
orfèvre,  trésor.-.  ;  Fontaine,  négociant  ;  Delpech,  commis  négociant  ; 
Decker,  capitaine  1er  régiment  hussards,  experts  ;  Darnault-Maurant, 
imprimeur,  garde  des  sceaux  ;  Dubois  (Ernest',  entrepr.  bâtiments,  ar- 
chitecte et  maître  des  banquets  ;  Missilleur,  négociant,  m.-,  des  cérém'., 
etc. 

Le  nombre  varie  peu  de  1809  à  1810  ;  à  cette  dernière  date  il  s  éleva 
à  64. 

Cette  L.'.  possédait  un  souv.\  chap  \  constitué  le  5  novembre  1801. 

D'après  un  diplôme  de  R.-.  -f-  du  5  novembre  1803,  le  souv.\  chap.". 
se  composait  de  :  Mesland  fils,  officier  de  santé.  Les  grands  surv.-.  et 
offic.'.  sont  :  Fouré,  médecin  ;  Darnault-Morand  ;  Juillien,  orat.*.  ; 
Boulé,  trésorier  ;  Bouron,  G  '.  secret  \  ;  Jullien,  garde  des  sceaux  ; 
Demadières  ;  Morand-Noire  ;  J.-B.  Missilieur  ;  Bourgeois. 

Elle  avait  environ  55  membres  qui  se  décomposaient  en  20  à  25  négo- 
ciants, manufacturiers,  15  officiers  d'armée,  6  officiers  ministériels, 
3  médecins,  3  ou  4  propriétaires. 


LOCHS    DH    PROVINCE  159 

Au  commencement  tic  1803.  la  L.\  invita  à  la  séance  solennelle  le 
préfet  Maret,  frère  du  duc  de  Bassano,  et  C.rignon-Desormeaux,  maire, 
qui  étaient  ff.\-mm.\ 

Le  5  mars  1807,  en  se  rendant  à  Bordeaux,  Cambacérès  visita 
la  L.\ 

Ses  vén. '.  furent  Piedor-Dumuy  (1805  1807)  ;  Mareau  jeune,  négo- 
ciant (1808-1809  et  1811-1814),  et  B.  Ouvrard,  négociant  en  1810.  Son 
député  était  Fustier. 

En  1810,  son  tableau  se  composait  des  membres  suivants  :  Négociants 
et  commerçants  :  Mareau  jeune  ;  Mareau  aîné  ;  Piedor-Dumuys  ;  Piedor 
le  jeune  ;  Hubert  Piedor  fils;  Rime-Beaulieu  ;  Jouvcllier  ;  Pryvé-Detté  ; 
Sevin  jeune  ;  Dcquoy  ;  Ducbalais  jeune,  commis  ;  Papin  ;  Lanrcnceau  ; 
Juillien  ;  Lhuillier-Bidaut  ;  Gombault  ;  Sagot  ;  Doisy  ;  Chollet  ;  Bons- 
sion  ;  Duchalais  jeune  ;  Delpecb  ;  Ladureau- Lebrun  ;  Meunier-Mathieu 
fils  ;  Lemaigrc  fils  ;  Ladureau-Chevessier  ;  Demadières  ;  Seurrat-Miron  ; 
Hue-Sallé  ;  Jansc,   banquier  ;   A.   Escot  ;  H.    Bavot. 

Parmi  les  fonctionnaires  :  Fouqueau-Puss}',  Paul  et  Roger  aîné, 
avoués  ;  Grison  et  Boger  jeune,  huissiers  ;  Bouron,  juge  ;  Delpech, 
garde-magas.  ;  Delacorde  et  Fontaine,  contr.  dr.  réunis  ;  Bercieux,  contr. 
marque;  Thurbat  et  Dhyonnet,  contremaître,  marine  forestière;  Pichaud, 
corn,  poudres  et  salpêtres  ;  Lasseux,  maire  de  Beaugruy  ;  Macarel,rec.  dr. 
réunis  ;  Devade,  rec.  arrond  ;  Lhuillier-Sangeville,  inspecteur  douanes. 
Parmi  les  militaires  :  Bongini,  cap.  113e  ;  Decker,  cap.  1er  hussards  ; 
Qucnol,  cap.  64e  ;  Pichard,  coin.  ;  Bellancourt,  com.  Carrières  libérales  : 
Féréol,  dir.  privil.  spect.  ;  Mat.  Philis,  artiste  lyrique  ;  Duplan,  artiste 
drainât.  ;  Fouqueau-Pussy  fils,  étud.  droit  ;  Gaudichau-Delaitre  ;  Fouré  ; 
Mesland  et  Lambron,  méd.  ;  Boger-Oakden,  maître  d  anglais  ;  Noël, 
archit.  ;  L.  C.  Lacave,  soc.  Com. -Franc.  ;  Paillet,  av.  ;  Courtois,  notaire. 
Bourgeois  :  Ouvrard  ;  Bagneau  ;  Rabourdin,  et  Grenouilhet-Pilté. 

En  1811,  ses  dignitaires  étaient:  Delpech,  1er  surv.\  ;  Aug.  Hubert, 
2e  survw  ;  Bouron,  secrétaire  ;  Darnault-Morand,  garde  des  sceaux, 
et  Boulé,  orateur. 

SAINT-JEAN  D'ORLÉANS 

Fondée  par  la  G.'.  L.*.,  le  5  décembre  1760,  en  faveur  duvén.*.  m.'. 
Pisquier,  il  est  probable  que  cette  L.-.  fonctionna  jusqu'en  1780. 

UNION  ROYALE 

En  1763  aurait  fonctionné  sous  ce  titre  une  L.*.  qui  avait  pour  vén.*. 
Moutandré,  tailleur.  Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  d'autres  traces. 

PÉRIGUEUX 

L'ANGLAISE   DE    L'AMITIÉ 

Lorsque  le  G.*.  GV.  constitua  cette  L.*.,  le  16  février  1775,  pour  pren- 
dre rang  du  8  août  1774,  elle  rappela  ses  travaux  commencés  le  7  mai 
1765.  Cet  atelier  avait  à  cette  époque  été  installé  par  une  puissance 
inconnue,  en  faveur  de  Bonneau  de  la  Jarthe,  conseiller  au  Parlement, 
qui  fut  son  vén.'.    maître  jusqu'en  1770.  Les  vén.*.  qui   lui    succédèrent 


4G0  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

fuient  :  Antoine  Gernulhac,  médecin  (1770)  ;  Eydely,  ancien  cousu!. 
délégué  du  commerce  de  Périgueux  (1773)  ;  Couilhe,  ancien  président 
de  l'élection  (1775)  ;  Dubois,  notaire,  greffier  en  chef  de  la  maréchaussée 
(1776-1777)  ;  Neulet,  négociant  (1785)  ;  Dauriac  (1788-1789;.  Les 
secrétaires  furent  :  Dauriac  (1776)  et  Desfieux,  directeur  de  la  posU: 
(1777-1789.) 

Son  député  de  1776  à  1789  fut  Joubert  de  la  Bourdinière. 

En  1776,  elle  avait  45  membres  à  son  tableau. 

Ayant  cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  en  novembre  1802,  elle 
était  en  instance  de  reprise. 

Ses  vén.\  furent:  Antoine  Audebert  père,  procureur  impérial  (en  1805 
et  1813-1814)  ;  Pierre  Olivier,  lieutenant  général  commandant  la  20e  di- 
vision militaire.  Son  secrétaire  fut  Lamy  jeune,  notaire,  de  1805  à  1815, 
et  son  député  Gandillaud.  En  1807,  Godefroy  Sauxade  était  son  orateur. 

L'Anglaise  de  l'Amitié  disparut  définitivement  en  1816. 

PERPIGNAN 

SAINT-PAUL 

Le  6  novembre  1744,  cette  L.\  fut  constituée  par  une  puissance  in- 
connue. La  G.*.  L.*.  reconnut  ses  titres  le  18  mai  1772  et  le  G.'.  0.\ 
le  1er  mai  1783,  sous  le  titre  de  : 

SOCIABILITÉ 

De  1785  à  1789,  cette  L.'.  eut  pour  vén.*.  le  vicomte  de  Gondrecourt, 
capitaine  au  régiment  de  Schomberg  ;  pour  secrétaire  de  Llucia  et 
pour  député  Guyot  de  Laval,  avocat  au  Parlement. 

Après  avoir  cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  cet  atelier  eut 
pour  vén.-.  Gaubert  en  1808  et  Cairot,  graveur,  en  1813-1814.  Son 
vén.'.  d'honneur  était  Bonnaud,  agent  en  chef  des  vivres-viande  à 
Toulouse.  Basson  jeune  fut  son  secrétaire. 

Millet-Stillière  était  son  député  en  1808,.  et  Dupont,  référendaire  à  la 
Cour  des  comptes,  en  18]  3-1814. 

UNION 

Fondée  le  27  mars  1758  par  une  puissance  inconnue,  cette  L.\  fut 
reconnue  par  le  G.\  0.\  le  23  mai  1782  pour  prendre  rang  du  14  avril 
précédent.  Elle  n'a  laissé  aucune  trace  de  ses  travaux  avant  la  Révolu- 
tion. 

En  1802,  elle  avait  pour  vén.-.  Grosset,  conservateur  des  mon- 
naies ;  en  1808,  Jaunie,  négociant,  et  en  1813-1814  Pierre  Saisset,  avoué. 
Ses  secrétaires  furent  Picar,  avoué,  en  1802,  et  Gaguon,  directeur  de  la 
poste  aux  lettres,  en  1808. 

Elle  eut  pour  députés  :  Fox  (1802}  ;  Daniel  Polak,  négociant  (1808  ; 
et  Mangeret,  officier  du  G.'.  OV.  (1813-1814). 

BEAUTÉ 

Fondé  le  4  novembre  1761  par  la  G.\  L.-.  en  faveur  du  vén.-.  m.\ 
de  Villefaix,  cet  atelier  fonctionnait  encore  en  1779. 


LOGES    DE    PROVINCE  !()! 


SAINT-JEAN    DES    ARTS    DE    LA   RÉGULARITÉ 

Cotte  L.\  fut  constituée  par  une  puissance  inconnue  le  20  avril  1706. 
La  G.'.L.'.  la  reconnut  en  1772  et  le  G.'.  0.".  le  27  novembre  1783,  pour 
prendre  rang  du  20  août  précédent.  Elle  eut  pour  vén.\  :  Flamand 
aîné,  tailleur,  en  1785,  et  Méric,  menuisier,  en  1788.  Son  député  était 
Martineau  Une  circulaire  du  G.'.  O  \  du  14  juillet  1788  portait  la  démo- 
lition de  cette  L."M  qui  ne  reprit  ses  travaux  que  sous  le  Consulat. 

Elle  eut  pour  vén.\  :  Toreille,  entrepreneur  en  bâtiments  (1802)  ; 
Palmarole,  général  de  brigade  (1808),  et  Tastu,  avocat  (1813-4). 

Son  secrétaire  fut  Mailhat,  commissaire  impérial  près  l'Hôtel  des 
Monnaies,  Milly,  homme  de  loi,  fut  son  député  en  1802  ;  et  Bacon  de  la 
Chevalerie  son  député  pour  la  L.\  et  le  chapitre  de  1808  à  1814. 

ÉGALITÉ 

Une  puissance  inconnue  fonda  cette  L.\  le  1er  mai  1767  en  faveur  du 
vén.'.  m.  •  Lefebvre.  Ses  titres  furent  reconnus  par  la  G.'.  L.\  le 
29  août  1772  et  par  le  G.'.  O.-  le  3  octobre  1782. 

Florent,  chargé  de  la  recette  des  finances,  fut  son  vén.'.  en  1785,  et 
François  Siau,  négociant,  en  1788-9.  Son  député  était  Baugin,  ofïicier  du 
G.\  O.'. 

FRÈRES  RÉUNIS 

Le  16  décembre  1767,  une  puissance  inconnue  constitua  cet  atelier  en 
faveur  du  vén.'.  m.*.  Doligny.  La  G.*.  L.*.  reconnut  ses  titres  le 
29  août  1772  et  le  G.-.  O..  le  23  mai  1782. 

Elle  eut  pour  vén.-.  :  le  chev.  de  Selva,  bailli  (1785)  ;  Lacroix,  avocat, 
assesseur  de  la  ville  (1788),  et  Jaunie,  notaire  (1789).  Son  député  fut 
Carbonel  (1785-9) 

Après  avoir  cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  en  1808  elle 
avait  pour  vén.'.  Marquier,  juge  au  tribunal  civil,  et  en  1813-4  Mouchour, 
pharmacien. 

Son  député  était  Brunet,  officier  du  G.'.  O.*. 

PARFAITE   UNION 

A  une  date  inconnue,  la  G.'.  L.'.  fonda  cette  L.'.,  en  faveur  du  vén.*. 
m  '.  Basset  ;  elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 


PEZENAS 

AMIS   RÉUNIS    DANS    LA   BONNE  FOI 

Cette  L.'.  fut  constituée  le  4  février  1767  par  la  G.'.  L.'.,  enfaveur  du 
vén.'.  m.'.  Pierre  Brunet.  En  1779,  elle  fonctionnait  encore. 

La  même  année  une  autre  L.  ' .  dont  le  titre  est  inconnu  en   faveur  du 
vén.'.  m.'.  d'Arbonne. 


462  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

POITIERS 
SAINT-PROSPER 

En  1752,  cette  L.\  fut  fondée  par  la  G.-.  L.\,  en  faveur  du  vén.\  m.'. 
Héraut.  En  1775,  Sebilleau,  un  de  ses  membres,  ayant  demandé  un  certi- 
ficat au  G.-.  O.'.,  cette  puissance  le  lui  refusa  parce  que  le  renouvellement 
demandé  par  cette  L.\  n'avait  pas  été  accordé. 

SAINT-BENOIT 

Cette  L.\  fut  constituée  en  1754  par  la  G.*.  L.\,  en  faveur  du  vén.-. 
m.*,  l'abbé  Basset  de  Saint-Benoît. 

Elle  était  encore   en    vigueur    en  1779. 

VRAIE   AMITIÉ 

En  1767,  cet  atelier  fut  fondé  par  la  G.\  L.'.,  en  faveur  du  vén.\  m.*. 
Lagrange.  Cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

POLIGNY 

AMITIÉ 

Le  16  novembre  1766,  la  G.1.  L.\  fonda  cet  atelier  en  faveur  du  vén.\ 
m.\  Desforges,  et  le  G.*.  O.*.  le  reconnut  le  17  août  1780. 

De  1785  à  1789,  il  eut  pour  vén.\  d'Astorg,  gouverneur  de  Poligny  ; 
pour  secrétaire  Deslandes,  conseiller  du  roi,  receveur  des  impositions  ; 
et  pour  député,  Tassin  de  l'Etang. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  c'est  en  1814  que  l'Amitié  fit  des 
démarches  pour  reprendre  ses  travaux. 

PONT-AUDEMER 

LA  PERSÉVÉRANCE 

Cette  L.*.  fut  fondée  le  28  décembre  1765  par  une  puissance  inconnue. 
La  G.'.  L.-.  renouvela  ses  constitutions  le  10  janvier  1773  et  le  G.*.  O.*. 
le  1er  juin  1775. 

En  1776,  cette  L.\  avait  16  membres  et  20  en  1777. 

Pouillat,  procureur  au  bailliage,  fut  s«n  vén.'.  en  1776-7  et  1788-9  ; 
Talion,  bachelier  en  droit,  le  remplaça  en  1785.  Elle  eut  pour  secrétaire 
Lecouturier,  contrôleur  des  aides,  et  Leroy  d'Arnou ville. 

Dejunquières,  procureur  au  Parlement,  officier  du  G.'.  0.'.,fut  son 
député  de  1776  à  1789. 

Parmi  ses  membres  avant  la  Révolution  figurèrent  :  Hellot  de  Bonne- 
mare  ;  Legras  de  Bordecote  ;  Cabot  d'Epreville  ;  de  Poisson  de  Fran- 
queville  ;  Dupuy  de  Grandpray  ;  Legras  de  Longval  ;  Pellegars  de  la 
Rivière  ;  Trébouta  de  Kerven  ;  Tirel  de  Boschanel  ;  Chaufer  de  Bar- 
neville  ;  de  la  Londe  de  Medine  ;  Cabot  de  Cailletot  ;  Duplessis  ; 
Rivière,  aumônier,  et  de  Roiffe,  chanoine. 

Ses  travaux,  interrompus  par  la  Révolution,  ne  furent  repris  quassez 
tard.  Ses  vén.'.  furent  Le  Roy  de    Rivet,    propriétaire  ;    Crochou  de   la 


LOGES   DE    PROVINCE  463 

Prairie,  avocat,  et  Fourgnemin,  juge  de  paix.  David,  officier  du.G.\  ().., 
fut  son  député. 

PONT  DE-VAUX 

SAINT-JEAN  DU  CROISSANT 

La  G.'.  L.\  constitua  cet  atelier  le  27  mai  1707,  en  faveur  du  vén.'. 
m.*.  Leroux,  et  il  fut  reconnu  parle    Ci.'.  O  '.  en  1775. 

En  1776,  il  so  composait  de  20  membres  présidés  par  Berthet,  rece- 
veur des  gabelles,  qui  fut  son  vén.".  jusqu'à  la  dispersion  de  ses  mem- 
bres pendant  la  Révolution.  Deydier,  notaire,  fut  son  secrétaire,  et 
Jérôme  de  la  Lande,  son  député  pendant  la  même  période. 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  Deydier  jeune  et  Trembly 
de  Belleverne. 

Cette  L.\  fut  reconstituée  le  8  février  1808  et  jusqu'en  1815  eut  pour 
vén.-.  Berthet  et  pour  député  Poulet. 

Le  tableau  de  cette  L.'.  était  en  1810  composé  des  membres  suivants  : 
Membres  honoraires  :  Claude-Marie  Joubert,  juge  à  la  cour  d'appel  de 
Lyon  ;  Etienne  Deydier,  juge  à  la  cour  d'appel  de  Lyon  ;  Philibert  Du- 
moulin, ex-officier  d'infanterie  ;  Philibert  Trambli  de  Belle -Verne, 
prêtre-curé  de  Port-Marly  ;  Emmanuel-François  Trambli,  greffier  du 
juge  de  paix  du  canton  de  Pont-de-Veyle  ;  Antoine  Drevet,  ancien  avo- 
cat, domicilié  à  Replonge  ;  François  Guichellet,  ancien  avocat,  avoué 
près  la  cour  d'appel  de  Lyon  ;  Claude-Joseph  Pannetier,  général  de 
brigade,  comte  de  l'Empire,  commandant  de  la  Légion  d'honneur,  che- 
valier de  la  Couronne  de  fer  et  de  l'ordre  de  Saint-Henri  de  Saxe  ; 
député  de  la  L.'.  au  G.'.  O.'.  ;  Poulet,  contrôleur  des  postes,  rue  Jean- 
Jacques   Rousseau,   à  Paris. 

Membres  dignitaires  :  vén.'.  en  exercice  :  Denis-Joseph  Berthet,  ancien 
avocat,  maire  de  la  ville  de  Pont-de-Vaux  ;  1er  surv.\  :  Claude  Poizat, 
ancien  avocat,  notaire  impérial,  maire  de  Chavannes-sur-Reyssous  : 
2e  surv.".  :  Gaston  de  Gripière-Demontcroc,  propriétaire  ;  orateur  : 
Charles-Joseph  André,  ancien  avocat,  juge  de  paix  du  canton  de  Pont- 
de-Vaux  ;  secrétaire  :  François  Rougier-Renard,  propriétaire  ;  trésorier  : 
Grégoire  Poizat-Saulnier,  propriétaire  ;  maître  des  cérém.'.  :  Pierre 
Crestin,  notaire  ;  couvreurs  experts  :  Dominique  André,  docteur  en  méde- 
cine, adjoint  à  la  mairie  de  Pont-de-Vaux  ;  Jean-Baptiste  Goyon,  rece- 
veur des  contributions  ;  archiviste  et  garde  des  sceaux  :  Claude -Joseph 
Gauthier,  avocat;  archiviste  du  Temple:  Claude-Marie  Humbert,  archi- 
tecte ;  économe  et  hospitalier  :  François  Garaud,  chirurgien. 

Antoine  Deschamp  de  Brèche,  ex-officier  d'infanterie;  Claude  Drevet, 
propriétaire;  Hippolyte  Bouthillon  de  Lasservette,  avocat;  Louis  Renaud, 
propriétaire  ;  Claude  Berthet,  receveur  des  contributions  ;  Pierre  Sordet, 
négociant  ;  Joseph  Laurencin,  propriétaire  ;  AntoinePoizat,  propriétaire  ; 
Jean-Baptiste  Mathieu,  propriétaire  ;  Claude-Marie  Deschamp  de  Brèche 
fils  ;  Jean-Baptiste  Duchesneau,  avoué  ;  Stanislas  Bochard,  avoué  ; 
Claude -Joseph  Pannetier,  général  ;  Chapuis-Laforet,  propriétaire  ;  Michel 
Monin,  restaurateur;  Sébastien  André,  chef  d'escadron  de  gendarmerie, 
membre  de  la  Légion  d'honneur  ;  Claude  Boitard  père,  avocat  ;  Pierre 
Boitard  fils,  propriétaire  ;  Denis-Georges-Catherine  Grognet,  adjoint  de 


464  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

la  mairie  de  Pont-de-Vaux  ;  Aimé  Gentil,  propriétaire  ;  Claude-Marie 
Bonnet,  propriétaire;  Pierre-Benoit  Gauthier,  négociant;  Pierre-Camille 
Baudin,  chirurgien;  Etienne  Gauthier,  membre  de  la  Légion  d'honneur; 
Michel-Nicolas  Bergier,  avocat  ;  Pierre-Joseph  Vernay,  receveur  de  l'en- 
registrement à  Bagé  ;  Germain  Dupré,  avocat,  maire,  à  Saint-Trivier  : 
Ambroise  Gonet-Puthod,  avocat  ;  Alexandre-Clément  Graisse,  employé 
aux  droits  réunis,  à  Tournus  ;  Ferdinand  Carré,  propriétaire;  Jean- 
Louis-Eléonor  Colette,  contrôleur  des  contributions  ;  Jean-Baptiste 
Melouza,  professeur  de  mathématicjues  ;  Claude  Girod,  propriétaire  ; 
Dupuis,  propriétaire  ; 

FF.",  servants  de  la  L.\  :  François  Textor,  concierge  ;  Henri  Miard, 
mesureur  ;  François  Mauchamp. 

Adresse  permanente  de  la  L.\  :  Berthet,  maire  de  la  ville  de  Pont-de- 


LE   PUY-EN-VELAY 

LA  PARFAITE  UNION 

La  G.*.  L.\  constitua,  le  10  mars  1770,  cet  atelier  epae  le  G.'.  0.\ 
reconnut  le  4  août  1774. 

De  1773  à  1775  figurèrent  parmi  ses  membres  :  Laurenson  ;  Parel  ; 
Sollier  ;  Retout  ;  Leblanc  ;  Filhiot  ;  chevalier  Razoud  ;  Rome  ;  Por- 
tai ;  Asserat  ;  Robert  ;  Claude-Jean  Robert  ;  Lafont  ;  Duroure  ; 
Benoist  ;  André  ;  Vacheron  ;  de  la  Devèze  ;  Videl  et  Bellangreville. 

En  1776,  cette  L.\  n'avait  pas  moins  de  32  membres  et  41  l'année 
suivante.  Ses  vén.\  fureni  :  Sollier,  négociant  (1776)  ;  Robert,  négo- 
ciant (1777-1785),  et  Treveys,  bourgeois    1788-9,. 

Ses  secrétaires  furent  :  Vallat,  notaire,  et  Panel  l'aîné,  orfèvre.  Son 
député  de  1776  à  1789  fut  Théaulon. 

La  Parfaite  Union  cessa  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  et  en 
1813-4  son  vén.\  était  Dagot,  capitaine  de  gendarmerie. 


QUIMPER 


HEUREUSE  MAÇONNERIE 


Constituée  par  la  G.'.  L  '.  le  27  août  17G3,  en  faveur  du  vén.\  m.', 
de  La  Reynière,  cette  L.*.  fonctionnait  encore  en  1780.  Elle  n'a  laissé 
aucune  trace  de  ses  travaux. 

PARFAITE  UNION 

Cette  L.\  fut  créée  par  une  puissance  maçonnique  jacobite,  le 
1er  mai  1769,  en  faveur  du  vén.*.  m.*.  Duchesnay.  Le  25  mars,  elle  fit 
renouveler  ses  pouvoirs  par  la  G.'.  L/.  et  le  10  février  1774  par  le 
G.  .  O.v 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  :  de  Rejmond  ;  Brehier  ; 
Perices  de  Salvert  ;  le  Hericej'  et  Le  Breton. 

En  1776,  elle  était  composée  de  33  membres  ;  son  vén.*.  était  l'abbé 
de    Reymond,  chanoine,    conseiller    au    présidial;    son  secrétaire  était 


LOGES    DE    PROVINCE  1(1.") 

Le  Breton,  médecin,  Bobet  de  Lanhuron,  lieutenant  civil  et  criminel  au 
présidial, et  de  la  Hubaudiêre,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées,  ils  furent 
vén.\  et  secrétaires  de  1777  à  178."). 

En  1778,  ses  dignitaires  étaient,  en  dehors  de  ces  deux  membres  :  Le 
Breton,  1er  surv.\  ;  Le  Goazre,  2e  surv.*.  ;  Hernu,  garde  des  sceaux  ; 
Philippe,  trésorier  ;  l'abbé  L.  de  Bcymond  ;  Brehier  ;  de  Kervelegan  ; 
Bateau  ;  Dubois-Hardy  et  de  Taurines,  lieutenant  au  régiment  de 
Bress-ien  fa  nterie. 

En  1788-9,  le  vén.*.    était  de   Launeyrie,   démonstrateur  en  chirurgie. 

Ses  députés  furent  Fournel,  avocat  au  Parlement,  et  de  Bermont,  pre- 
mier commis  du  contrôle  de  la  Loterie  royale. 

Cette  L.-.  cessa  ses  travaux  pendant  la  Bévolution. 

Sous  l'Empire,  ses  vén  \  furent  :  Vinoc,  médecin  en  1808,  et  Mabit, 
également  médecin  en  1813-4.  Son  député  de  1808  à  1814  fut  Vautey, 
rentier,   159,    faubourg  Saint-Martin. 


REDON 

SAINT-JEAN  DES  ÉLUS  DE  REDON 

Cet  atelier,  constitué  le  2  août  1762,  par  la  G.'.  L.'.,  en  faveur  du 
vén.'.  m.*.  Loberty,  n'a  laissé  aucune  trace. 

REIMS 

GRANDE    LOGE    ÉCOSSAISE 

Vers  1750  Baparlier  de  Rouen  aurait  installé  à  Reims  une  G.  .  L.\ 
Ecoss.-.  faisant  fonction  de  Mère  Loge.  (Voir  Rouen.) 

TRIPLE  UNION 

Le  8  juin  1762,  la  G.*.  L.".  constitua  cet  atelier  en  faveur  de 
Prudhomme  de  Rutard  ;  le  G.-.  0.*.  renouvela  ses  titres  le  27  juillet  1774 
et  le  Contrat  social,  le  2  avril  1783. 

Ses  vén.*.  furent  :  Verneau  (1773-4)  ;  Vanderveken,  négociant  (1776)  ; 
de  Savigny,  ancien  capitaine  de  cavalerie,  lieutenant  des  maréchaux  de 
France  (1777)  ;  Hurteault,  receveur  des  consignations  (1785)  ;  Fillion, 
médecin,  (1788)  et  Polonceau,  subdélégué  et  receveur  général  des  tabacs 
(1789). 

En  1776,  cette  L.'.  comprenait  18  membres  et  31  l'année  suivante. 

Ses  secrétaires  furent  :  Bertrand,  négociant  (1776)  ;  Le  Grand  (1777) 
et  Polonceau  (1785-8).  Boudeau,  avocat  au  Parlement,  fut  son  député  de 
1776  à  1789. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.\  reprit  ses  travaux  sous 
le  consulat. 

Ses  vén.  furent  :  Fourneaux,  négociant  (1800-1808),  et  Mitteau-Fillicn, 
négociant  (1813-4).  Son  secrétaire  fut  Lemaire-Bardou,  directeur  de  la 
poste  aux  lettres,  et  ses  députés  :  Defondeviolle  (1800)  et  de  Balincourt 
',1808-1814). 

LA   FRANG-MACONNERIE.  —   T.    I.  30 


466  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

PARFAITE  AMITIÉ 

Lorsque  le  G.".  OV.  reconnut  cette  L.\  le  19  novembre  1778,  pour 
prendre  rang  du  4  juillet  précédent,  il  rappela  ses  travaux  commencés 
le  5  novembre  1765.  La  Parfaite  Amitié  se  fit  reconstituer  par  le  Contrat 
social  le  2  avril  1783. 

En  1785.  cette  L.\  avait  pour  vén.'.Jeunhomme-Boisseau,  négociant; 
pour  secrétaire,  Peneau,  pharmacien,  et  pour  député,  Pernot  du  Plessis. 

En  1788-9,  ces  dignitaires  étaient  remplacés  par  Le  Lorrain,  négociant  ; 
Pouilly  de  la  Tour  fils,  avocat,  et  Bourgeois,   orfèvre. 

La  Parfaite  Amitié  cessa  définitivement  ses  travaux  pendant  la  Révo- 
lution. 

RENNES 

PARFAITE  UNION 

Cette  L.\,  une  des  plus  importantes  de  France,  fut  constituée  par  une 
puissance  inconnue  le  24  juin  1758.  Ses  titres  furent  renouvelés  le 
9  octobre  1772  par  la  G.".  L.'.  et  le  21  octobre  1774  par  le  G.\  O.'. 

Ses  vén.\  furent  :  Hervagault.  conseiller  au  présidial  et  commissaire 
des  Etats  (1776)  ;  de  Kergrois-Leroy  (1777),  et  de  Malezieux,  avocat  au 
Parlement  (1785-9)  ;  ses  secrétaires  :  Lemière.  négociant  (1777),  et 
Troyhard,  négociant  (1785-9).  Elle  eut  successivement  pour  député  : 
Savalète  de  Lange  (1777)  et  Beschais  (1785-9).  Il  n'est  pas  prouvé  que 
la  Parfaite  Union  ait  interrompu  ses  travaux   pendant  la  Révolution. 

Ses  vén.'.  furent  :  Tiengou-Tréferiou,  commissaire  du  gouvernement 
(1800-1811)  ;  Mainguy,  président  de  l'Institut  départemental  (1802,  et  Le 
Graverend,  avocat  général  à  la  cour  (1813-4).  Ses  secrétaires  :  Bonami, 
officier  de  santé  (1800)  ;  Mienne,  commandant  d'armes  ,1802)  et  Bon- 
nal,  conseiller  municipal  (1805  18141.  Le  tribun  Challan  fut  son  député 
de  1800  à  1814. 

Cette  L.*.,  qui  joua  un  grand  rôle  dans  les  événements  qui  pré- 
cédèrent la  Révolution  en  Bretagne,  compta  parmi  ses  membres  le 
général  Moreau.  En  1774,  elle  avait  souche  à  son  atelier  une  L.\  d'a- 
doption  et,  en  1775,  un  chapitre  qui  englobait  les  membres  de  la  Par- 
faite Amitié. 

En  1776,  Mangourit  fonda  dans  son  sein  le  rite  des  Sublimes  Elus 
de  la  Vérité,  dont  il  voulait  faire  remonter  l'origine  à  1745.  Les  membres 
de  ce  rite  délivraient  des  constitutions  à  Paris  et  en  province.  Ce  régime 
était  alors  exclusivement  jacobite. 

Il  comprenait  14    degrés   divisés  en  3  classes  : 

lve  classe,  grades  inférieurs  :  apprenti,  compagnon,  maître,  maître 
parfait  ; 

2e  classe,  grades  supérieurs  :  élu  des  neuf,  élu  des  quinze,  maître  élu, 
petit  architecte,  2e  architecte,  grand  architecte,  chevalier  d'Orient,  rose- 
croix  ; 

3e  classe,  grade  des  élus  :  chevalier  adepte,  élu  de  la  vérité. 

En  1778,  la  Parfaite  Union  se  sépara  de  la  Stricte  Observance  pour 
entrer  en  correspondance  avec  les  martinistes  purs. 

En  présence  de  ses  agissements  pendant  les  émeutes  de  1788,  tous  les 
eccésiastiques   se  retirèrent  de  la    Parfaite  Union. 


LOGES   DE   PROVINCE  107 

Parmi  les  membres  de  cette  L.\,  qui  dès  1776  avait  près  de  GO  adhé- 
rents, figurent  [es  frères  du  Cattay,  médecins  ;  Coste,  dominicain  ;  dom 
Lemur,  prieur  des  bénédictins  ;  Gilles,  prieur  des  minimes  ;  Martin 
Bertrand  de  Toron,  bénédictin,  Pierre  Chevalier,  minime  ;  Pierre 
Erpelding,  et  Pierre  Saillard,  dominicains  ;  Jean  Verne,  prieur  des 
augustins  ;  Louis  Réveillon,  ancien  prieur  et  procureur  des  augustins  ■ 
Béchen,  av.  Pari.  ;  Pelletier  de  l'Etang,  av.  Pari.  ;  de  la  Borde,  av' 
Pari.  ;  Duhil  de  Martigné,  av.  Pari.  ;  Pinault  du  Pavillon,  av.  Pari  ; 
Rabuau  de  la  Croix-Rabuau,  av.  Pari.  ;  Roullemer,  proc.  Pari.  ;  Gril- 
lard,  proc.  Pari.  ;  du  Porson,  sénéchal  de  Portrieux  ;  Juguet,  sénéchal 
deMontfort;  Dufeis,  av.  ;  Le  Minihy,  av.  ;  Robinet,  av.  ;  Duclos,  notaire  ; 
Le  Graverend,  h.  de  loi,  puis  pr.  de  la  cour  de  Rennes,  dép.  d'Ille-et- 
Vilaine  de  1817  à  1822  ;  Malherbe,  maire  et  député  aux  Etats  pour 
Concarneau  ;  Le  Briquirdu  Meshir.  maire  de  Lannion  ;  de  Keraudron 
ofF.  rég.  Berry  ;  de  Kerdroniou,  off.  rég.  Vexin  ;  de  Quelen,  cap.  Royal- 
Lorraine  caval.  ;  Emmanuel  de  la  Celle  de  Chateaubourg,  1"  lieut. 
rég  Condé  ;  Le  Gonidec  de  Tressan,  off.  rég.  Auvergne,  puis  au  rég! 
Reine  ;  Rouessart,  très,  guerres  ;  Chauvin,  cap.  navires;  de  Laquinière. 
off.  mar.  ;  Le  Minihy,  off.  mar.  ;  Varin  du  Colombier,  off.  mar.  ;  For- 
tin le  Bel,  ing.  ;  Thuillier,  ing.  ;  Legrand,  dir.  comédie  ;  Le  Bernèur  de 
Lourme,  contr.  des  dom.  et  contrôles  ;  Camus,  ambulant  des  contrôles  ; 
Perrot-Kervisio,  commis  aux  devoirs  ;  Danguy,  commis  aux  postes  ;  Le 
Camus,  d.  des  forêts  de  Relecq  ;  Le  Loutre  du  Bois-Leger,  entreposeur  ■ 
Aubert,  neg.  ;  frères  Da  Costa,  nég.  ;  de  la  Croix  Thébaudais,  nég.  : 
ce  la  Perière,  nég.  ;  Mazois,  nég.  ;  Quatrefages,  nég.  ;  René  (de  Tours)! 
neg.  ;  du  Quercrou  ;  Couppé  de  la  Fougerais  ;  Dacosta  de  la  Fleuriais  • 
Danel  de  la  Prunelais  ;  de  Beaumanoir  ;  de  Bellechère  ;  de  Beschais  ■ 
de  Boisnoux  ;  de  Bonvalet  p.  et  fils  ;  de  Coësic;  de  Coëtivy  ;  de  Grand- 
maison  ;  de  Guerry  ;  de  Kercaradec  ;  de  Kervivien  ;  de  la  Croix  ■  de  la 
Croix-Herpin  frères  ;  de  la  Motte-Bertin  ;  de  Lauzanne  ;  de  Veaùrous- 
sel  ;  de  Miniac  ;  de  Brûlais  ;  de  Saint-Preux  ;  Dessausais  ;  Dufaure  de 
Rochefort  ;  du  Guezennec  ;  Ellias  ;  Esnou  de  la  Jonnière  ;  Guezennec  de 
Kervivien;  Le  Livec  de  Lauzay  ;  Lemerer  frères  ;  Lemière  ;  Le  Rallier 
de  Montfeux  ;  Pollet  ;  Charles  de  la  Celle  de  Chateaubourg  ;  Hay  de 
Keranray  ;  Le  Tissier  ;  Louvel  de  la  Maisonneuve  ;  Mehée  de  la  Touche  ■ 
Pesterbe  des  Villes  ;  Petaut  ;  Potier  de  la  Touche  ;  François  de 
Lesquen  ;  Huguet  de  l'Aumône. 

Parmi  les  visiteurs  :  marquis  de  Virieu,  off.  Royal-Roussillon-cava- 
lerie  ;  Pontalhé,  proc.  corn.  Rennes,  dép.  500  ;  le  Baron,  prés,  dist 
Rennes  ;  Elleviou,  chirurgien  ;  Le  Rousseau,  cons.  pari.  ;  de  Kermoi- 
san,  cons.  pari.  ;  Bidon,  proc  pari.  ;  Maréchal,  proc.  pari.  ;  Bouvier, 
proc.  presid.  ;  Duchatellier,  proc.  à  la  cour  ;  Logée,  proc.  à  la  cour; 
Chrétien,  sénéchal  d'Hennebont  ;  Poussin,  Descourbe  frères,  Bonaissier 
de  Bernerais,  Jarnier,  Turin,  Martin,  Lucas,  Bossis,  Gaultier,  Viallet, 
avocat  h  de  loi  et  j.  de  paix  ;  Gérard,  rec.  timb.  et  dom.  ;  de  Léon 
doct.  med.  ;  Jolivet  fils,  chirurgien;  Claye,  commis  droits  réunis; 
Cohax  vérificateur  des  domaines  ;  de  la  Villegontier  ;  comte  de  Mo- 
rant  ;  de  Pontavice  ;  de  Bouteiller  ;  de  Pinczon  de  Pontbriand  ;  de  la 
Richardiere  ;  de  la  Prévalaye  ;  de  Laboulaye  ;  de  Luynes  ;  de  Budan  ; 
'de  liourgblanc  ;  Mestral  de  Kervenagoel.  Un  grand  nombre  de  ces 
membres  étaient  delà  Parfaite  Amitié,  Gv.  de  Rennes 


468  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1811,  parmi  ses  principaux  membres  figuraient  :  Tiengou-Trefé- 
riou,  vén.\  ;  Costard,  1er  surv.\  ;  Bonnal  ;  Arot  fils  ;  Lehenaff,  secret.-.  ; 
de  Malezieux  ;  Le  Graverend,  sec.'.  gén.\  ;  Le  Minitry  ;  Carré  ; 
Lemerer,  orateur  ;  Luizot  ;  Touzard,  2e  surv.'.  ;  Delaunay,  g.',  des  se.-. 

RIOM 

SAINT-AMABLE    dite  AMIS   DE  LA  VERTU 

Le  2  septembre  1774,  le  G.*.  O.*.  reconnut  cette  L.".,  pour  prendre 
rang  du  21  mars  précédent,  mais  en  rappelant  ses  travaux  commencés 
le  22  mai  1764.  C'est  probablement  en  faveur  de  Panay  du  Deffand. 
chevalier  de  Saint-Louis,  lieutenant-colonel  de  dragons,  prévôt  général  de 
la  maréchaussée  d'Auvergne,  maire  de  Riom,  que  cet  atelier  fut  créé. 

En  1775,  cette  L.\  comprenait  31  membres,  parmi  lesquels  :  Gran- 
chier  ;  Duclos  ;  Chauchard  l'aîné  ;  Barthélémy  ;  Daumas  ;  Barthélémy 
le  jeune  ;  Panay  du  Deffand  ;  Carraud  ;  Védières  ;  de  Vissac  ;  Sauvageon  ; 
Vachier  ;  Laurent  ;  Gaillard  ;  Charrier  ;  Beraud  ;  Bordes  ;  Charles  ; 
Jusserand  ;  Simond  ;  Jarin  ;  de  Frétât;  du  Chambon  ;  Solagnier  ;  Des- 
michel  ;  de  Combes  ;  Verny. 

Ses  vén.'.  furent  :  Granchier,  avocat  au  Parlement  (1776)  ;  et  Panay  du 
Deffand  (1777-1785).  Son  député  était  Joubert  de  la  Bourdinière. 

En  1777,  cette  L.*.  se  composait  des  34  membres  suivants  :  Granchier, 
vén.*.  ;  Croizier-Duclos;  Chauchard  l'aîné  ;  Barthélémy  aîné  ;  Dosmas  ; 
Barthélémy  jeune  ;  Salagnier  ;  Bordes  fils  ;  Panay  du  Deffand  ;  Car- 
raud ;  Vissac  ;  Andraud  ;  Colin  ;  de  Védières  ;  Dufour  ;  Double  ; 
Sauvageon  ;  Antoine  Charles  ;  Dufour  François  ;  Moranges,  éx-vén.'.  ; 
Bordes  père  ;  Cartier  ;  Leroy  ;  Charles  ;  Simond  ;  Jusserand  ;  Jarrin  ; 
Desmichels  ;  Vachier  ;  Laurent  ;  Morin  ;  Desmarands  ;  Vial  ;  Chas- 
saing. 

Bien  que  les  almanachs  du  G.'.  O.'.  indiquent  que  cette  L.'.  était  en 
sommeil  en  1788  et  1789,  nous  avons  tout  lieu  de  croire  qu'il  n'en  était 
rien  et  que  Lafayette  y  fut  admis  au  moment  des  élections  aux  Etats 
généraux . 

Saint-Amable  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

ROCHEFORT 

AIMABLE    CONCORDE 

L'Aimable  Concorde  aurait  été  fondée,  sans  que  cela  soit  prouvé,  par 
un  pouvoir  inconnu  le  26  août  1744,  par  des  constitutions  en  faveur  du 
vén.*.  m.*.  Forest.  La  G.*.  L.*.  la  renouvela  le  17  mai  1755  et  le  G.*.  O  '. 
le  12  avril  1774.  Il  n'est  pas  bien  certain  cependant  que  le  renouvel- 
lement delà  G.*.  L.*  ait  été  fait  en  faveur  de  l'Aimable  Concorde.  Par 
la  suite,  on  aprétendu  que  cette  L.'.  n'ayant  pu  faire  la  preuve  d'aucun 
document  authentique,  s'était  emparée  des  constitutions  de  la  Sage  Liberté. 
Quoi  qu'il  en  soit,  les  travaux  de  ses  premières  années  n'ont  pas  laissé 
de  traces.  En  1775  figuraient  parmi  ses  membres  :  Dupont  ;  Fournier  ; 
Parât  de  Mongeron  ;  Charier  ;  Henry  ;  Faurès  ;  Lusseau  ;  Mottes  ; 
Ponet  ;  Dusseu  ;  Clouet  ;  Thibaut  ;  Brouillard  ;  Montaut  et  Arondel. 


LOGES    DE    PROVINCE  M')1.) 

En  1776  elle  complaît  37  membres  et  51  l'année  suivante. 

Ses  vén.\  furent  :  Che\  allée  (1773  .')  ;  (iachinard,  chevalier  de  Saint- 
Louis,  ancien  capitaine  aide-major  au  régiment  de  Royal-Dragons 
(17/6-7)  ;  Chcricr  (1785);  Faurès,  armateur  et  échevin  (1788)  ;  et  Dupont, 
commissaire  des  fontes  (1789). 

Son  député  fut  Du  Laurent,  médecin  de  la  marine  du  roi,  ancien 
maire  de  Rochefort  (1776-7),  puis  l'abbé  du  Rousseau. 

Parmi  ses  membres  figuraient,  en  1777,  Martin,  commis  de  l'intendance, 
secrétaire  ;  Homme,  secrétaire  par  intérim  ;  Dupont,  garde  des  sceaux, 
timbres  et  archives  ;  Chevallée,  ex-vén.\  ;  Du  Laurent  et  Parât  de 
Montgeron. 

L'Aimable  Concorde  eut  avec  le  G.-.  O.'.  des  discussions  retentis- 
santes, ayant  décidé  que  lors  des  réceptions  même  des  hommes,  ceux-ci 
devaient  être  reçus  par  les  sœurs  avant  de  passer  au  scrutin  des    frères. 

Cassée  par  le  G.'.  O.-.,  elle  se  soumit  et  reprit  ses  travaux  qui  furent 
définitivement  interrompus  par  la  Révolution. 

SAGE  LIBERTÉ 

Cette  L.\  aurait  été  fondée  par  la  G.*.  L.\,  et  l'Aimable  Concorde 
lui  aurait  soustrait  ses  titres  constitutifs,  donnés  le  8  juin  1756  au  vén.\ 
m.'.  Aubain  de  la  Forest. 

En  1767,  elle  cessa  ses  travaux  par  suite  de  la  mort  de  Fouraignan,  son 
vén.\  A  cette  époque,  Lebrun  fils,  Maison  et  Servant  étaient  inscrits  sûr 
son  tableau. 

En  1774,  elle  reprit  ses  travaux  sous  le  titre  de  Constante  Société  avec 
les  11'.-.  Lucadou  (médecin  de  la  marine  du  roi,  officier  honoraire  du 
G.-.  O.*.)  ;  Boiscourteau-Jariet  ;  Fouraignan  fils  ;  Mottet  ;  Besoux  ;  de 
la  Germonière  et  de  la  Garosse. 

Le  G.*.  O.'.  reconstitua  cette  L.'.  le  22  février  1776  pour  prendre  rang 
du  13  avril  1775. 

Lucadou  fut  son  vén.\  en  1777  et  Billotte,  chef  des  bureaux  de  l'inten- 
dance, en  1788-9. 

Regnac,  chef  des  bureaux  de  la  marine,  fut  son  secrétaire.  Mottet,  aide 
commissaire  delà  marine,  était  son  député  en  1777,  et  Trevilliez,  agent 
de  change,  en  1788-9 

La  Constante  Société  termina  définitivement  ses  travaux  pendant  la 
Révolution. 


ROCHELLE  (la) 
UNION  PARFAITE 

Cette  L.*.  aurait  été  constituée  le  9  mars  1752  par  une  puissance 
inconnue,  renouvelée  par  la  G.*.  L.-.  le  9  août  1773  et  par  le  G.'.  O.*.  le 
12  avril  1774 

De  1773  à  1775  figurent  parmi  ses  membres  :  Carrel  ;  Marsilly  ;  Dau- 
bertes  ;  Laissaine  ;  Pavie  etCasson.  En  1776,  elle  ne  comptait  pas  moins 
de  50  membres. 

Ses  vén.*.  furent  :  Gabaude,  maître  en  chirurgie  (1776  et  1785-8); 
Boischot,  receveur  des  fermes  (1777)  et  E.  J.    Martin,    négociant    (1789). 


470  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Son  secrétaire  de  1776  à  1789  fut  Goullon,  directeur  de  la  régie  des  biens 
des  religionnaires  fugitifs. 

Son  député  fut  Richard,  négociant,  puis  (1785-9;  Mareschal,  inspecteur 
des  fermes  du  roi. 

Lorsque  l'Union  Parfaite  reprit  ses  travaux  après  la  Révolution  el!e 
eut  pour  vén.'.  :  Martin,  négociant  (1802}  ;  Avrard,  greffier  du  tribunal 
de  commerce  (1808)  ;  Brunet,  juge  au  tribunal  civil  (1813)  et  Lemanis- 
sier,  avocat  (1814)  ;  ses  secrétaires  furent  :  Brunet  et  Dumarest 

Ses  députés  furent  pour  la  L.\  :  Petitclair,  négociant,  et  pour  le 
chapitre,  Lebaillif-Mesnager. 

ROUEN 

GRANDE    LOGE    ÉCOSSAISE 

La  fondation  de  cette  G.'.  L.  .  n'est  établie  par  aucun  document,  et  on 
ne  trouve  aucune  trace  assurée  des  L.-.  de  cette  ville  antérieurement  à 
1750.  Il  est  avéré  cependant  qu'à  cette  époque  il  y  en  avait  un  certain 
nombre  en  activité  Bottarelli  dans  «  Les  secrets  de  l'ordre  des  francs- 
maçons  dévoilés  et  mis  au  jour»  (Amsterdam,  1745),  page  112.  raconte  que 
les  maçons  normands  avaient  «  ordonné  une  pompe  funèbre  dans 
l'église  des  jacobins  de  Rouen  ;  ils  m'ont  fait  les  honneurs,  l'invitation 
a  été  solennelle  et  les  frères  de  sept  L'.  de  Rouen  s'y  sont  transportés 
vêtus  de  deuil  ;  ils  ont  observé,  autant  que  la  circonstance  le  leur  a 
permis,  les  cérémonies  de  leur  ordre,  en  ordonnant  qu'on  marcherait 
trois  à  trois  à  la  pompe  funèbre.  Cela  a  été  ponctuellement  exécuté  à 
l'honneur  de  la  maçonnerie  et  à  l'édification  de  tous  les  fidèles  Nor- 
mands ». 

Ces  sept  L.'.  n'ontlaissé  aucune  trace.  Quant  à  la  G.'.  L.*.  écossaise, 
son  existence  est  constatée  par  la  correspondance  de  son  G.'.  M.". 
Raparlier  avec  d'autres  GG.'.  LL.'.  Il  prenait  le  titre  de  grand  visiteur 
et  réformateur  des  L.'.  émanées  de  celle  de  Rouen 

D'après  une  lettre  de  Raparlier  à  Van  Hove  du  20  décembre  1750,  elle 
aurait  fondé  entre  autres  une  G.*.  L.*.  écossaise  à  l'O.'.  de  Lille.  Toutes 
les  L.'.  ainsi  fondées  par  elle  lui  pa3-aient  une  contribution,  sans 
compter  le  bénéfice  de  100  %  que  le  grand  visiteur  faisait,  paraît-il,  sur  la 
vente  des  bijoux  et  accessoires. 

Le  18  juin  1754,  une  discussion  aigre-douce  s'engagea  entre  le  grand 
visiteur  et  les  ff.\  de  Lille.  Sous  la  menace  de  l'anathème  des  LL.-.  de 
Marseille,  Strasbourg,  Lyon,  Bordeaux,  Nantes,  Orléans,  Reims,  Limoges 
et  Clermont,  la  G.'.  L.*  de  Lille  restitua  à  Raparlier  ses  lettres  de  cons- 
titution après  les  avoir  lacérées.  Après  1754,  on  ne  trouve  plus  de  traces, 
de  la  G.'.  L.-.  écossaise  de  Rouen. 

FIDÉLITÉ 

Cette  L.*-  est  la  plus  ancienne  de  Rouen  qui  ait  laissé  des  traces  posi- 
tives. Elle  aurait  été  constituée  par  la  G.'.  L.*.  le  5  décembre  1762,  en 
faveur  du  vén.".  m.-.  Le  Carpentier.  La  plupart  de  ses  membres  étaient 
des  négociants.  Lorsqu'elle  demanda  ses  constitutions  à  la  G.*.  L.'.,  elle 
déclara  exister  depuis  1759.  En  1763,  elle  fit  part  de  son  installation,  et  à 
partir  de  cette  époque  il  n'en  est  plus  fait  mention. 


LOGES    DE    PROVINCE  171 


FÉLICITÉ 

Cette  L.\  aurait  été  l'ondée  par  une  puissance  inconnue  le  12  juin  1762, 
en  faveur  du  vén.\  m.-.  Bacon  de  la  Chevalerie.  La  G.'.  L.'.  la  recons- 
titua le  '25  mars  1764,  en  faveur  du  vén .-.  m.-.  Huré  et  l'installa  le 
21  mai  1765.  Par  l'intermédiaire  du  f.\  de  Puisicux,  elle  réclama  le  titre 
de  M.".  L.-.  qui  lui  fut  constamment  refusé.  Elle  disparut  vers  1767. 

UNITÉ 

L'existence  de  cette  L.".  est  incertaine.  On  sait  seulement  que  vers 
1764  ou  1765  la  Félicité  dut  lui  remettre  des  lettres  de  constitution. 

SAINT- JEAN  DE  L'AMITIÉ 

Le  3  mai  1765,  la  G.*.  L.'.  aurait  constitué  cet  atelier  en  faveur  du 
vén.'.  m.*.  Chobart.  Celte  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

ARDENTE   AMITIÉ 

Cet  atelier  fut  fondé  parla  G.*.  L.-.  le  4  juin  1765  en  faveur  du  vén.'. 
m.".  Guérard,  avocat  au  Parlement.  Ses  titres  ayant  été  égarés,  ses 
membres  demandèrent  de  nouvelles  constitutions  qui  leur  furent  accor- 
dées le  4  février  1767,  en  faveur  des  ff.\  Guérard,  vén.-.,  Ruel  et  Gaillard, 
1er  et  2e  surveillant.  Le  1er  juillet  1778  une  nouvelle  demande  de  recons- 
titution fut  adressée  au  G.".  0.\  qui  la  lui  accorda  le  31  décembre  sui- 
vant. L'installation  eut  lieu  le  30  janvier  1779. 

Cette  L.'.  compta  parmi  ses  membres  :  Guérard  de  Houppeville  ; 
Anquetin  de  Beaulieu  ;  Tirebare  d'Aubermesnil  ;  marquis  de  la  Porte  ; 
Fleury  de  Boscroger  ;  de  la  Ville  ;  Grandouet  de  la  Fieffé  ;  Planel  de 
Plantas  ;  Chabouillé  du  Petit-Mont  et  René  Dom  Coquille,  religieux  de 
l'abbaye  de  Saint-Vandrille. 

En  1785,  Guérard  était  encore  son  vén.-.  En  1788-9,  il  était  remplacé 
par  Petitgrand,  négociant.  Son  député  fut  Chabouillé  de  Petit-Mont, 
ancien  officier  vendeur  de  marée. 

En  1786,1e  f.  .  Mathéus,  R  -j-,  membre  de  l'Ardente  Amitié,  s'adressa  à 
la  G*.  L.-.  d'Edimbourg,  afin  d'obtenir  des  constitutions  pour  ériger  un 
chapitre  et  une  G.'.  L.'.  dans  le  sein  de  sa  L.*.  Il  fut  fait  droit  à  sa 
demande  le  1er  mai  1786,  et  l'Ardente  Amitié  résolut  de  se  faire  recon- 
naître comme  centre  unique  des  hauts  grades  en  France,  abandonnant 
au  G.*.  0.\  la  suprématie  pour  les  grades  s3rmboliques. 

Comme  à  une  époque  antérieure  le  G.'.  O.'.  avait  érigé  un  chapitre 
général  de  France  dans  le  même  but,  en  vertu  de  la  fausse  patente  de 
Gerbier  datée  de  1721,  il  opposa  ses  prétentions  à  celles  de  la  L.'.  de 
Rouen.  Invoquant  la  fausseté  des  titres  du  G.-.  O.'.,  il  lui  adressa  une 
opposition  le  22  juillet  1786.  Ne  pouvant  obtenir  gain  de  cause,  elle  fit 
désavouer  les  titres  de  Gerbier  par  une  déclaration  de  la  G.'.  L-. 
d'Ecosse.  En  somme,  Mathéus  reprenait  au  profit  de  sa  L.\  les  projets 
formés  en  1779  par  le  Contrat  social  après  une  série  de  débats  auxquels 
donnèrent  lieu  le  mémoire  de  Baugni,  rapporteur  au  nom  du  G.' .  O.'. 
Ce  dernier  donna  un  délai  de  21  jours  au  chapitre  de  Rouen  pour  lui 
remettre  ses  titres  afin  de  les  annuler. 


472  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

L'Ardente  Amitié  protesta,  faisant  remarquer  qu'elle  avait  obtenu 
régulièrement  de  la  G.'.  L.'.  d'HRDM  de  Kilwining  des  constitutions 
établissant  dans  son  sein  un  grand  chap.  métropolitain  et  une  G.*.  L.'. 
provinciale,  représentant  en  France  celle  de  Kilwining  ;  un  grand  nombre 
de  L.-.  et  de  «hapitres  donnèrent  raison  à  l'Ardente  Amitié  et  entrèrent 
eu  correspondance  avec  elle  et  avec  son  chapitre.  La  lutte  durait  encore 
au  moment  de  la  Révolution  ;  à  Baugni  avaient  succédé,  comme  rap- 
porteurs du  G.'  O.*.,  Rœttiers  de  Montaleau  et  Riffé  de  Caubray  ; 
dans  un  rapport  de  ce  dernier  du  8  mai  1789,  le  G.\  O.' .  maintenait  ses 
prétentions  et  ses  jugements  antérieurs.  Nous  aurons  à  revenir  longue- 
ment, dans  notre  2e  volume,  sur  les  conséquences  de  ce  schisme,  qui 
furent  considérables. 

Avant  la  Révolution,  figurent  parmi  ses  membres  : 

Petitgrand,  nég.,  vén.*.  (1786-7)  ;  JeanMathéus,  nég.,vén.  .,  portait  le 
nom  de  R-lf  (Relief),  gr.\  m.*.  prov.\  d'HRDM  de  Kilwining  ;  Levas- 
seur,  Ferrand,  Le  Tellier,  Planel  de  Plantas,  Devaux,  Duquesnay., 
Maimbourg,  Heudebert,  Guinoiseau,  Malétra,  Amiot-Guénet,  Blondel, 
Clavel,  Reverdun,  Schedel,  Petitgrand  fils,  Bertin  et  Fontaine,  négo 
ciants  ;  Hourdou,  Guérard,  Geoffroy  et  Poirel,  avocats  au  Parlement  ; 
Lcgrand,  receveur  des  octrois  ;  Pikman,  consul  de  Danemark  ;  Bichot, 
horloger  ;  Lemercier,  agent  de  change. 

Parmi  les  affiliés  :  Crevel,  Jourdain  et  Clerget,  avocats  ;  Coquille, 
ecclésiastique  ;  Mathieu,  horloger  ;  Morisse  aîné  et  cadet,  Ficquet,  négo- 
ciants ;  Hocquet,  notaire. 

Les  f.* .  servants  étaient  :  Chauvin,  concierge,  et  Vasseux. 

Le  député  était  Chabouillé  de  Petit-Mont. 

L'adresse  directe  de  la  L. '.  était  chez  Petitgrand,  rue  du  Fardeau.  Les 
tenues  avaient  lieu  le  premier  dimanche  de  chaque  mois  à  midi  pour  une 
heure. 

L'Ardente  Amitié,  qui  avait  cessé  ses  travaux  pendant  la  Révolution, 
Jes  reprit  au  16  septembre  1802  sous  la  direction  du  G.*.  O".  Ses  vén.  \ 
furent  :  Brière  de  Lesmont  ;  Héron  d'Agirone,  avocat  (1808-181 3\  et 
Baudry,  imprimeur  (1814).  Son  député  était  Chéréau  Cette  L  *.  termina 
définitivement  ses  travaux  en  1820,  pendant  que  de  Caumont  était  vén  '. 

PARFAITE   HARMONIE 

Le  21  mars  1761  cette  L.*.  fut  créée  en  faveur  du  vén.-.  m.*.  Barthé- 
lémy par  la  G.*.  L.*.  Le  G.*.  O.'.  la  renouvela  le  24  février  1780. 

En  1771,  une  décision  ayant  été  prise  par  cette  L.*.  contre  son  tréso- 
rier qui  avait  refusé  de  rendre  certains  comptes,  l'ancien  vén.*.  Barthé- 
lémy forma  un  groupe  qui  entra  en  lutte  avec  les  autres  membres  de 
la  L.*.  et  se  séparèrent  emportant  les  titres,  malgré  la  protestation  de 
Savouray,    vén.'.  en  exercice. 

En  1773,  Labady,  qui  était  à  la  tête  des  dissidents  de  la  G.\  L.\  de 
France,  reconstitua  la  L.*.  en  faveur  de  Barthélémy.  En  1778,  les  com- 
missaires nommés  pour  étudier  le  différend  donnèrent  raison  à  Savou- 
ray, et  le  G.*.  O.'.  lui  donna  de  nouvelles  constitutions  le  24  février  1780. 
A  cette  époque,  la  L.*.  comptait  17  membres  ;  en  1786,  elle  en  comptait 
34,  parmi  lesquels  figuraient  ;  Rouland  de  Fresne,  de  Meaux  ;  Lcvail- 
lant  de  Frangicourt  ;  Delacroix,  Renaud  et  du  Haussa}-,  prêtres. 


LOGES    DE    PROVINCE  173 

Barthélémy  avait  néanmoins  continue  ses  travaux  avec  une  L.-.  qui 
portait  le  litre  de   Parfaite  Harmonie  de  l'Union. 

En  17S"),  elle  riait  présidée  par  Tesson,  marchand,  et  en  1788-1789  par 
Fabulet,  juré  priseur.  Son  député  était  Heurtault,  maître  es  arts  et  de 
pension. 

Ln  Révolution  termina  le  différend  ;  les  deux  L.\  disparurent  pour 
lie  plus  reprendre  leurs  travaux. 

SAINT  BRIEUC 

LA  VERTU  TRIOMPHANTE 

Le  10  septembre  1765,  une  puissance  inconnue  fonda  cet  atelier  en 
faveur  du  vén.'.  m.*,  le  chevalier  de  Champeaux-Palasne,  sénéchal 
royal.  La  G.\  L.\  renouvela  ses  titres  le  20  septembre  1772,  et  le  G.'.  0.\ 
le  23  septembre  1774. 

Le  chevalier  de  Champeaux  fut  vén.-.  de  celte  L.\  jusqu'en  1779, 
date  à  laquelle  elle  semble  avoir  cessé   ses  travaux. 

En  1776  et  1777,  elle  avait  cependant  37  membres.  Son  secrétaire  était 
Le  Saulnier  jeune,  négociant,  et  son  député  le  chev.  de  Froger 
d'Igneaucourt. 

En  1800,  la  Vertu  Triomphante  avait  repris  ses  travaux  avec  Piou, 
architecte  du  département,  comme  vén.*.  Saint-Conan,  officier  de  santé, 
secrétaire.  Piou  occupa  les  mêmes  fonctions  jusqu'en  1815.  Le  député  fut 
Angebault  jusqu'en  1807,  et  Dénouai  de  la  Houssaye,  employé  auprès 
du  grand  juge,  jusqu'en  1814. 

En  1801,  la  L.\  se  composait  des  membres  suivants  :  J.  Piou  père, 
vén.-.  en  exercice  ;  Gonan,  ex-vén.*.  ;  Damar  et  Belletranche,  1er  et 
2e  surv.-.  ;  G.  Couppé,  orateur;  Jacques  Curo,  professeur  de  mathéma- 
tiques et  d'hydrographie,  maître  des  cérémonies  ;  Berteau  et  Conan  fils, 
1er  et  2e  hospitalier  ;  Chamerel,  garde  des  sceaux  ;  Le  Gorrec,  secré- 
taire ;  Le  Véchon  et  Ropartz. 

SAINT-DOMINGUE 

SAINT-JEAN    DE   JÉRUSALEM    ÉCOSSAISE 

Cette  L.\  fut  fondée  par  une  puissance  inconnue,  le  1er  mars  1749, 
confirmée  par  la  G.*.  L.*.  le  1er  mars  1769,  et  par  le  G.-.  O.-.  le  20  avril 
1776,  pour  prendre  rang  de  la    date  de  sa  constitution   par  la    G.*.  L.*. 

En  1776,  cette  L.*.  comptait  35  membres.  Son  vén.'.,  de  1776  à  1787, 
fut  Manesca,  négociant  ;  Dallert,  négociant,  occupâmes  fonctions  de 
secrétaire,  et  Mazère,  capitaine  de  dragons,  commandant  au  quartier 
Morier,  celle  de  député  pendant  la  môme  période. 

En  1788  et  1789,  le  tableau  de  la  L.'.  se  composait  des  membres  sui- 
vants :  Pescay  père,  habitant,  fondateur;  Casamajour,  notaire,  vén.*.; 
Hérault,  procureur,  1er  surv.-.  ;  Coupigny,  notaire,  2e  surv  .*.,  garde  des 
sceaux  et  timbres  ;  Méridien  Aimé,  négociant,  orateur  ;  Labat,  négociant, 
secrétaire  ;  de  Saint-Amand,  commis,  secrétaire  adjoint  ;  Chauvran, 
négociant,  trésorier  ;  Charrier  de  Kervan,  capitaine  dragons,  trésorier 
adjoint  ;   Fauconnier,  confiseur,  1er  expert  ;  Ducatel,  apothicaire,  maître 


474        LA  FRANC- MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

des  cérémonies  ;  Dourdat,  chirurgien,  hospitalier  ;  Motaz,  bourg . 
2e  expert  ;  Bertin,  négociant,  économe  ;  Gur.  grand  voyer,  terrible  ; 
Pasquot,  receveur  des  droits  [domaniaux  ;  Moreau  de  Saint-Méry,  con- 
seiller ;  Suarez  d'Almeyda,  procureur  du  roi  ;  Fayoux,  étalonnier  juré  ; 
Cagnon,  négociant  ;  Labat,  chef  du  bureau  ;  Dorson,  chirurgien  ;  Tar- 
dieu,  négociant  ;  Bider  de  Benonceau,  négociant  ;  Bonna,  horloger  ; 
Barillon,  négociant  ;  Auriot,  habitant  ;  Dupé,  négociant  ;  Beaucourt, 
peintre  ;  Lory  Duvivier,  négociant  ;  .Rolland,  capitaine  de  navire  ; 
Amiet,  bourgeois  ;  Daubry,  chirurgien  ;  Veyrier,  négociant  ;  Beybaud, 
interprète  anglais  ;  Gerlin,  vétérinaire  ;  Jonas  de  Br.scureil,  officier  au 
régiment  du  Cap,  et  Grugé,  tailleur. 

Cette  L.\  termina  ses  travaux  pendant  la  Révolution. 

CONCORDE 

Cette  L.\  aurait  été  fondée  par  une  puissance  inconnue  en  1749, 
reconstituée  en  1765 par  la  G.".  L.  ..  en  faveurdu  vén.\  m.-.  Prégotte,  et 
le  17  octobre  1776  par  le  G.'.  0.\ 

En  1777,  ses  45  membres  étaient  présidés  par  de  Trembly,  conseiller 
au  conseil  des  200  de  la  République  de  Genève,  et  habitant  de  l'Arti- 
bonette. 

De  1785  à  1789,  il  fut  remplacé  par  Bodrigue,  avocat.  Son  secrétaire 
était  La  Gourgue  aîné,  négociant,  et  son  député,  Bouyer,  avocat. 

Cette  L.*.  disparut  définitivement  pendant  la  Bévolution. 

HARMONIE 

La  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  en  1762,  en  faveur  du  vén.\  m.'.  Mau- 
rice. 

Cette  L.".  n'a  pas  laissé  de  traces. 

FRÈRES  UNIS 

Cette  L.-.  fut  fondée  en  1763  par  une  puissance  inconnue;  le  26  février 
1765,  la  G.*-  L.'.  renouvela  ses  titres  en  faveur  du  vén.\  m.'.  Simon. 
Le  G.'.  O.'.  la  reconnut  le  17  août  1780. 

En  1777,  elle  n'avait  que  8  membres. 

Son  vén.\  en  1785  était  Jogues  ;  il  fut  remplacé  en  1788-1789  par 
Gelée,  capitaine  de  dragons. 

Son  député  fut  Desroches  le  jeune  (1785),  puis  Billard,  avocat  au 
Parlement  (1788-1789).  Cette  L.'.  disparut  définitivement  pendant  la 
Bévolution. 

AMITIÉ  INDISSOLUBLE 

Cet  atelier,  qui  existait  encore  en  1779,  fut  fondé  par  la  G.-.  L.*.  le 
26  novembre  1765,  en  faveur  du  vén.\  m.*.  Bernard  de  Pérault. 

LA  VÉRITÉ 

Les  constitutions  primitives  de  cette  L.*.  datent  du  1er  mars  1767. 
La  G.  .  L.*.  les  renouvela  le  10  décembre  1771,  et  le  G.-.  0.\  le  2  mars 
1775. 


LOGES    DE   PROVINCE  17.") 

Eo  177<i,  elle  avait  35  membres,  et  56  en  1777. 

Ses  vén.*.  furent  :  Pesay  père  (  17 7<>)  :  l'abbé  Droguet,  aumônier  de 
L'hôpital  de  la  Charité  ■;  1777 ;  ;  Casamajour,  notaire  1785  et  1789),  et 
Pacot,  receveur  des  droits  domaniaux  (1788). 

dette  L  •.  était  en  correspondance  toute  spéciale  avec  l'Amitié  de  Bor- 
deaux, qui  était  son  intermédiaire  tant  pour  ses  affaires  maçonniques 
que  pour  ses  affaires  particulières.  Les  lettres  étaient  adressées  sous  le 
couvert  de  l'anagramme  Goel  de  Milalié. 

Les  secrétaires  furent  :  Becbec  (1776)  ;  Viel,  chimiste  (1777)  ;  Pacot, 
premier  commis  des  domaines  (1785-1789). 

Son  député  fut  Daubertin,  puis  de  la  Motte. 

La  Vérité  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

SAINT-GAUDENS 
LA  CANDEUR 

Lorsque  le  G.\  0.\  reconstitua  cette  lu.',  le  12  février  1784,  pour  pren- 
dre rang  du  17  juin  1781,  il  rappela  ses  travaux  commencés  le  1er  mars 
1748. 

Cette  L.-.  n'a  laissé  aucune  trace  de  ses  travaux  avant  1785. 

A  cette  époque,  son  vén.".  était  La  Pêne  de  Saint-Martin.  En  1788-1789, 
il  fut  remplacé  par  l'abbé  de  Moncaupt,  chanoine. 

Pendant  la  période  1785-1789,  elle  eut  pour  secrétaire  Pigot,  négociant, 
et  pour  député  Vénier,  commis  aux  fermes. 

Après  avoir  interrompu  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  elle  fut 
reconstituée  le  4  mai  1810,  par  la  L.\  Saint- Alexandre.  En  1813-1814, 
elle  avait  pour  vén.".  Anouilh,  avocat;  pour  secrétaire,  Pascal  Pelleport, 
avocat,  et  pour  député.  Pannetier,  officier  du  G.'.  O.'. 

SAINT-JEAN-D'ANGÉLY 

L'ÉGALITÉ  et  MADELEINE  DE  L'ÉGALITÉ 

Sous  le  titre  de  Madeleine  de  l'Egalité,  la  G.*.  L.*.  fonda  une  L.'.  le 
2  juillet  1764,  en  faveur  du  vén.*.  m.*.  Guérin. 

Il  semble  qu'une  autre  L.\  ait  été  fondée  le  18  mai  1764,  sous  le  titre 
Egalité.  Il  est  probable  que  ces  deux  L.-.  n'en  font  qu'une. 

La  G.'.  L.-.  renouvela  ses  titres  le  10  décembre  1772,  et  le  G.*.  O.'.  le 
11  juin  1774. 

De  1773  à  1775  figurent  parmi  ses  membres  :  Ozanne  ;  Chardé  ;  Mes- 
tadier  père  et  fils  ;  Dubourg  ;  Lefebvre  ;  Perreau  et  Damuret. 

En  1776,  la  L.*.  comptait  15  membres. 

Ses  vén.-.  furent  :  Guérin  de  la  Madelaine  (1776-1777)  ;  Roy,  entre- 
preneur des  hôpitaux  militaires  (1785)  ;  Ouzoneau,  avocat  au  Parlement 
(1788)  ;  Favre,  négociant  (1789). 

Ses  secrétaires  furent  :  Toussaint  de  la  Marre,  garde-magasin  des 
vivres  de  la  marine  (1776-1785),  et  Paul  Roy,  ancien  officier  et  adminis- 
trateur de  l'hôpital  militaire  (1788-1789). 

Ses  députés  furent  :  Rousseau  (1776)  ;  vicomte  de  Sainte-Hermine, 
capitaine  de  dragons  d'Artois  (1777),  et  Castet,  ancien  officier  de  la 
maison  du  roi  (1785-1789;. 


476  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  sommeil,  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  sous  l'Em- 
pire. 

Ses  vén*.  furent  :  Rolland,  négociant  (1808)  ;  Limoges,  commissaire 
des  poudres  (1813),  et  Ouzoneau,  notaire  (1814). 

La  L*.  faisait  adresser  ses  lettres  sous  le  couvert  de  l'anagramme 
de  Geliate.  Elle  eut  pour  député,  de  1808  à  1814,  le  comte  Regnauld  de 
Saint-  Jean-  d'Angély. 

SAINT-QUENTIN 

SAINT-JEAN 

Le  6  novembre  1744,  cette  L.\  fut  constituée  par  une  puissance  incon- 
nue en  faveur  du  vén.\  m.'.  Poupardin.  Elle  n'a  laissé  aucune  trace 
jusqu'à  sa  reconstitution  par  le  G  ".  Gv.  le  6  décembre  1774. 

En  1776.  elle  se  composait  de  52  membres. 

Ses  vén.'.  furent  :  Dumoustier,  négociant  (1776  1777)  ;  de  Brissac, 
seigneur  de  Soxejr,  Montplaisir,  etc.,  négociant  (1785  et  1789)  ;  Dunez 
l'aîné,  négociant,  ancien  consul  (1776-1788;.  Ses  secrétaires  étaient  : 
Dunez  jeune  et  Duplessis  Bernoville,  négociant  (1789).  Ses  députés 
furent  :  de  Saint,  négociant  (1776-1777)  ;  Bacon  de  la  Chevalerie  (1785), 
et  de  Brissac  (1788-1789). 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.'.  ne  reprit  pas  ses  travaux. 

SAINT-VINCENT 

ÉCOSSAISE  DE   LA   RÉUNION   DES    VERTUS 

Cette  L.v  fut  constituée  en  1762  par  la  G.*.  L.'.,  en  faveur  du  vén.'. 
m  •.  Clauzelle  ;  elle  fonctionnait  encore  en  1779. 


SAINTES 


LA   SINCERITE 


Cet  atelier,  qui  existait  déjà  le  20  novembre  1760,  fut  constitué  le 
28  mars  1762  par  la  G.-.  L.-.,  et  renouvelé  le  2  juillet  1774  par  le 
G.\  O.  . 

En  1775,  il  comptait  parmi  ses  membres  :  Pintaut  ;  de  Varennes  ; 
de  Lisleferme  ;  Prieur-Granville  ;  Viger  ;  Robert  ;  Frauchay  ;  Bour- 
leau  ;  Arnauld  ;  Laurent  ;  de  Lys  et  Mercier. 

En  1776,  elle  comptait  21  membres    et  23  l'année  suivante. 

En  1776,  Vieuille,  conseiller  au  présidial,  était  son  vén.-.  ;  de  1777  à 
1789,  il  fut  remplacé  par  Le  Breton,  président  et  lieutenant  général. 
Toussaint,  imprimeur,  fut  son  secrétaire  de  1776  à  1789  ;  de  Lisleferme 
fut  son  député  en  1776,  et  le  Dc  Guillotin,  de  1777  à  1789. 

La  Sincérité  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

SARRELOUIS 

SAINT-JEAN  DE  LA   BONNE  HARMONIE 

Le  20  mai  1765,  cette  L.*.  fut  constituée  par  la  G.*.  L.*.  en  faveur  du 
vén.\  m.*.  Bazin.  Elle  était  encore  en  vigueur  en  1779. 


LOGES    DE    PROVINCE  177 


SAUMUR 

SAINT-LOUIS  DE  LA   GLOIRE 

Celle  L.\,  établie  par  une  puissance  inconnue  le  12  avril  1745,  fut 
reconstituée  par  la  G.'.  L.\  le  12  janvier  1746,  et  par  le  G.*.  O.'.  le 
1er  mars  1781.  Elle  n'a  laissé  aucune  trace  jusqu'à    cette  dernière    date. 

En  1785,  elle  fut  présidée  par  Tremblier  de  Varenncs,  gardien  des 
religieux  ;  en  1788,  par  Alauzet,  receveur  principal  des  fermes  du  roi, 
cl  on  1789  par  Hiffaut  de  Sautrel,  médecin.  En  1788-1789,  son  secrétaire 
était  Yillier,  président  du  grenier  à  sel. 

Restée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  sous 
l'Empire,  sous  le  titre  de  Saint-Napoléon  de  la  Gloire.  En  1810  (?),  d'a- 
près un  brevet  de  R.\  -f-  donné  à  Marie-Charles-Antoine  de  Reiset,  colo- 
nel du  1er  régiment  des  dragons,  les  dignitaires  de  son  chapitre  étaient  : 
Riffault,  vén.\  ;  Roilève  le  jeune  et  Reaumonl,  1er  et  2e  surv.'.  ;  Oudry, 
maître  des  cérémonies  ;  Defos,  secrétaire  général  ;  Cahouet,  garde  des 
sceaux  ;  Esnault,  grand  orat.-.,  et  L.  Croubrain,  secrétaire. 

En  1813-1814,  son  vén.\  était  Esnault,  président  du  tribunal  civil  ; 
son  secrétaire,  Chalopin,  notaire,  et  son  député,  Jacquelin,  chef  de 
bureau  au  ministère  de  la  guerre. 

SAINT-PIERRE   DE  LA  PARFAITE    UNION 

Fondée  à  une  date  inconnue,  cette  L.*.  n'a  laissé  de  traces  qu'en  1788- 
1789.  Elle  avait  alors  pour  vén.'.  Berthelot,  marchand  (1788)  ;  Lemoine, 
vitrier  1,1789),  et  pour  secrétaire  ^  1788  1789),  Brosseau  fils,  greffier  de 
l'Etat-major. 

SEDAN 

PARFAITE  AMITIÉ 

Cet  atelier,  fondé  par  la  G.'.  L.'.  en  1760,  en  faveur  du  vén.\  m.*. 
Beniger,  fonctionnait  encore  en  1779. 

SAINT-JEAN   DES    FRÈRES   ZÉLÉS 

Fondé  par  la  G.'.  L.*.  le  7  mai  1762,  en  faveur  du  vén.'.  m.*.  Dujet 
du  Rozoir,  cet  atelier  était  encore  en  vigueur  en  1779. 

LA  FAMILLE  UNIE 

La  G.'.  L.'.  reconstitua  cet  atelier  le  9  octobre  1772.  Il  aurait  été  cons- 
titué par  une  puissance  inconnue  le  24 juin  1762.  Le  G.'.  GV.  le  reconnut 
le  7  mars  1776. 

En  1775,  figuraient  parmi  ses  membres  :  Duchesne  de  Ruville  ;  La 
Bauche  de  Bazeille,  et  Louis  et  Cœsar  la  Bauche.  Composé  de  17  mem- 
bres en  1776,  il  en  comptait  25  l'année  suivante. 

De  1776  à  1789,  son  vén.'.  fut  Duchesne  de  Ruville,  commissaire  pro- 
vincial des  guerres.  Pendant  la  même  période,  Poupart  jeune,  négo- 
ciant, fut  son  secrétaire,  et  Trudon  des  Ormes  son  député. 


478  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EX    FRANCE 

Disparue  pendant  la  Révolution,  cette  L  '.  reprit  ses  travaux  sous 
l'Empire,  dirigée  en  1808  par  Labauche-Hazeille,  manufacturier,  et  en 
1813-1814,  par  Jobert,  négociant.  Son  secrétaire  était  Devillars,  manu- 
facturier, et  son  député  pour  la  L*.  et  le  chapitre,  Delaunaj',  officier  du 
G.  .  O.-. 

SAINT-JEAN   DES  FRÈRES   ÉLUS 

Cette  L.*.  fut  fondée  le  12  juillet  1762,  par  la  G.*.  L..,  en  faveur  du 
vén.*.  m.\  Laubert}'.  Ses  travaux  n'ont  pas  laissé  de  traces. 

SOISSONS 

CŒURS  UNIS 

A  une  date  inconnue,  une  L.*.  fut  fondée  sous  ce  titre.  Elle  n'a  laissé 
aucune  trace. 

STRASBOURG 

GRANDE  LOGE  ECOSSAISE 

Vers  1750,  Reparlierde  Rouen  aurait  installé  à  Strasbourg  une  G.'.L.\ 
Ecoss.-.  faisant  fonction  de  Mère  Loge.  (Voy.  Rouen).  Elle  fait  peut-être 
double  emploi  avec 

SAINT-JEAN  D'HÉRODOM  dite  SAINTE-GENEVIÈVE 

Constituée  par  une  puissance  inconnue  le  17  janvier  1757,  cette  L.*. 
fut  reconstituée  à  deux  reprises  par  la  G.".  L.\  La  première  fois  le 
26  août  1764,  en  faveur  du  vén.\  m.*.  Mainglet,  et  la  seconde  le  12  mars 
1772.  Le  G.-.  O.'.  la  reconnut  le  6  avril  1780. 

En  1785,  elle  était  présidée  par  Marchand,  négociant,  et  en  1788-9,  par 
Weyher,  négociant.  Le  secrétaire  était  Ch.  L.  Weyher  fils,  et  le  député, 
Salivet,  avocat  au  parlement. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  ne  reprit  pas  ses  travaux  sous 
son  ancien  nom. 

C'est  sous  le  titre  de  la  Concorde  qu'elle  se  réinstalla  sous  l'Empire. 
Le  18  mai  1805,  Kellermann  G.,  adm.  de  Tordre,  et  de  Grasse-Tilly, 
représentant  immédiat  du  Ser.\  G.'.  M.',  au  G.\  chap.  de  France, 
présidaient  à  ses  travaux. 

Son  vén.'.  en  1808  était  Popp,  procureur  impérial  ;  Pané,  vén.". 
d'honneur;  en  1813-4,  il  était  remplacé  par  Paul,  pa}reur  divisionnaire. 
Elle  eut  pour  secrétaire  Jean  Daniel  Saùm  fils,  négociant,  et  pour 
député  pour  la  L.\  et  le  chapitre,  Lahausse,  médecin  (1808),  et  Serson 
de  Moitiers,  officier  honoraire  du  G.\  O.'.  (1813-4). 

SAINT-LOUIS    DALSACE 

Le  15  janvier  1763,  la  G.\  L.*.  /onda  cet  atelier  en  faveur  du  vén.  . 
m.*.  Litz-Ellmann  ;  il  fonctionnait  encore  en  1779. 


LOGES    DE    PROVINCE  179 


LA  CANDEUR 


Cette  L.'.  fut  fondée  le  17  novembre  17(53,  par  la  G.'.  L.\,en  faveur  du 
vén.*.  m.",  le  baron  de  Landsperg  qui  dirigeait  encore  ses  travaux  en 
1777.  Son  secrétaire  était  alors  le  comte  de  Lutzelbourg,  maréchal  de 
camp,  et  son  député,  Bacon  de  la  Chevalerie.  Ce  fut  une  des  L.*.  les 
plus  importantes  du  régime  de  la  Stricte  Observance.  En  1785,  elle  était 
présidée  par  le  baron  de  Klinglin.  colonel  de  dragons  ;  Eglise  de 
Saint-Martin,  était  son  secrétaire.  En  1788-9,  elle  eut  pour  vén.*.  Metzler, 
archiviste  de  la  ville,  pour  secrétaire  Ehrmann,  et  pour  député  Savalète 
de  Lange. 

Elle  se  faisait  adresser  ses  lettres  sous  le  pseudonyme  de  Ferdinand  de 
Runac.  A  partir  de  1788,  elle  avait  pris  le  titre  de  La  Candeur  et  Ferdi- 
nand aux  neuf  étoiles,  en  l'honneur  du  duc  Ferdinand  de  Brunswick. 

Lors  de  la  formation  des  directoires  écossais,  elle  fut  comprise  dans 
celui  de  Besançon. 

Elle  disparut  pendant  la  Révolution,  et  on  ne  la  retrouve  qu'en  1814, 
présidée  par  Maris,  colonel  de  la  garde  d'honneur,  et  a}^ant  pour  secré- 
taire Ubersaal,  médecin. 

Nous  reviendrons  longuement  sur  cette  L.*.  dans  le  tome  IL 

En  1785,  l'Amitié  avait  fusionné  avec  la  Candeur. 

MODESTIE 

Le  4  janvier  1764,  la  G.*.  L.'.  fonda  cet  atelier  en  faveur  du  vén.'. 
m.".  Saldoul  Cette  L.-.  n'a  pas  laissé  de  traces  de  ses  travaux. 

L'AMITIÉ 

La  G.\  L.\  fonda  cette  L.-.  le  17  octobre  1764,  en  faveur  du  vén.'.  m.'. 
Bertrand,  et  renouvela  ses  titres  le  9  octobre  1774.  Le  G.'.  O.  .  la  recon- 
nut le  25  janvier  1774.  En  1775,  elle  se  composait  des  membres  suivants 
Chaumont,  capitaine  au  régiment  de    Royal-Nassau,  qui  fut  son  vén.'. 
Stierling,  ancien  secrétaire  de  légation  ;  Moneder  ;  de   Voisins  ;  Maller 
Desvieux  ;  d'Argœuvre  ;  Kern  ;  Welhem  ;  de  Capel  ;  Greuner  ;  Piquet 
Kael  ;  le  marquis  de  Belissen  ;  le  chevalier    de  Montaigle  et  le  chevalier 
de  Cybenis. 

Son  député  était  Savalète  de  Lange. 

L'Amitié  se  réunit  à  la  Candeur  en  1785. 

PARFAIT  SILENCE 

Cette  L  '.  fut  constituée  le  4  février  1767,  par  la  G.'.  L.'.,  en  faveur  du 
vén.-.  m.'.  Isnard.  En  1775,  elle  comptait  le  baron  de  Weiller,  major 
au  service  de  l'empereur.  Celui-ci  étant  mort  à  Turin,  le  9  novembre 
1775,  sa  colonne  funèbre  fut  prononcée  dans  la  L.-.  du  Parfait  Silence 
le  9  février  1776,  par  Claude-Hilaire  Laurent,  médecin. 

En  1785,  cette  L.'.  fut  présidée  par  de  Clermont,  contrôleur  de  la 
poste  aux  lettres,  et  en  1788-9,  par  Weille,  inspecteur  des  vivres. 

Son  député  était  Badenier,  intendant  de  la  maison  d'Uzès. 

Elle  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 


480  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

TARASGON 

LA  FIDELITE 

Cette  L.\,  dont  on  ne  trouve  de  traces  que  sous  1  Empire,  aurait  été 
fondée  le  24  mars  1765,  par  une  puissance  inconnue. 

En  1808,  elle  était  présidée  par  Martin  fils,  praticien,  et  en  1813-4,  par 
Raget,  chirurgien.  Son  secrétaire  était  Martin,  avoué,  et  son  député  de 
Foissy. 

Elle  faisait  adresser  sa  correspondance  sous  le  couvert  de  l'anagramme 
Delifîte. 

TARBES 

LA  PAIX 

Les  constitutions  de  cette  L.*.  dataient  du  10  novembre  1764  ;  elles 
émanaient  d'une  puissance  inconnue.  Elles  furent  renouvelées  par  la 
G.'.  L.-.  le  9  octobre  1772,  et  par  le  G.'.  O.  .  le  29  février  1776. 

Elle  comprenait  37  membres  en  1776  et  46  en  1777. 

Ses  vén.'.  furent  :  De  Péen,  procureur  du  sénéchal  de  Bigorre  (1776-7;  ; 
le  prince  de  Rohan-Rochefort,  lieutenant  général  des  armées  du  roi, 
premier  baron  des  Etats  de  Bigorre  (vén.*.  en  exercice  1785  8;  et  vén.'. 
d'honneur  1789),  et  de  Coture,  écuyer,  conseiller  du  roi  et  maître  parti- 
culier des  eaux  et  forêts  (1789).  Son  secrétaire  était  Décamp,  avocat  au 
Parlement,  et  son  député  l'abbé  de  Montmorency-Boutteville. 

Cette  L.-.,  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  reprit  ses  travaux  sous 
l'Empire. 

Mérens,  juge  au  tribunal  civil,  fut  son  vén.'.  (1808-14),  et  Laporte, 
procureur  impérial,  son  secrétaire. 

THIERS 

SAINT-ÉTIENNE 

Cette  L.'.  fut  constituée  par  une  puissance  inconnue  le  5  août  1754. 
Ses  pouvoirs  furent  renouvelés  par  la  G.*.  L.-.  le  27  décembre  1772,  et 
par  le  G.'.  O.'.  le  10  janvier  1777. 

En  1776,  elle  comprenait  19  membres. 

Ses  vén.'.  furent  :  Rachias,  négociant  (1777)  ;  Chantemerle,  contrô- 
leur des  actes  (1785-8),  et  Darrot  de  Frédefont,  bourgeois  (1789).  Son 
secrétaire  fut  Cagnard,  notaire,  puis  Darrot.  Son  député  était  Joubert 
de  la  Bourdenière. 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  elle  reprit  ses  travaux  sous  le 
titre  de  Frais  Amis. 

En  1808,  elle  était  présidée  par  son  ancien  vén.-.  Darrot  de  Frédefont, 
et  en  1813,  par  Brunel,  chirurgien.  Son  secrétaire  était  de  Lachenal, 
propriétaire;  son  député  pour  la  L.\  était  Geneux,  officier  du  G.\ 
O.".,  et  son  député  pour  le  chapitre  Fasolle,  négociant. 

TOULON 

SAINT-JEAN  DE  JÉRUSALEM 

Cet  atelier  fut  fondé  par  une  puissance  inconnue  le  12  mars  1750,  puis 
reconstitué  par  la  G.".  L.\  le  29  août  1772.  Tout  ce  qu'on  sait  de  cette 
L.*.,  c'est  qu'en  1788-9  elle  était  présidée  par  La  Voûte,  négociant. 

Elle  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 


LOGES    DE    PROVINCE  181 

DOUBLE  UNION 

Le  1er  août  1761.  cette  L.*.  fut  constituée  par  une  puissance  inconnue. 
Ses  titres  furent  renouvelés  par  la  G.\  L.*.  le  10  février  1772,  et  par 
le  Ci.*.  O.".  le  3  décembre  1778.  On  ne  sait  rien  de  ses  premiers  travaux. 

Ses  vén.*.  furent  :  Baraillier,  tailleur  (1785)  ;  Marquisan,  secrétaire  du 
bureau  major  de  la  marine  (1788),  et  Milain  fils  (1789).  Son  député  était 
Duluc,  horloger. 

Après  avoir  cessé  ses  travaux  pendant  le  Révolution,  elle  les  reprit 
sous  le  Consulat.  En  1802,  elle  avait  pour  vén.*.  Aube,  notaire  ;  pour 
secrétaire,  Messonnier,   et  pour  député,  Turel,  notaire. 

Le  4  mars  1803,  elle  se  réunit  à  la  Paix  pour  former  le  chapitre  du 
Parfait  Silence. 

Son  vén.*.  de  1808  à  1822,  fut  Leclerc,  officier  de  santé.  Celui-ci  étant 
passé  vén.*.  d'honneur  en  1813,  fut  remplacé  par  Grand-Jean,  garde- 
magasin  (1813),  et  par  Gosse  (1814). 

En  1808,  le  député  était  pour  la  L.*.  et  le  chapitre,  Grenier,  avocat, 
et  en  1814,  Goetz. 

TOULOUSE 

CLERMONT 

Cette  L.*.,  une  des  plus  importantes  de  Toulouse,  fut  fondée,  le  14  avril 
1745,  par  Samuel  Lockhardt,  membre  de  la  famille  Sainclair,  et  par 
Nicolas  Barnewall,  comte  de  Trimlestown,  vicomte  de  Kingsland  (1726- 
1813),  Le  G.'.  O.'.  la  reconnut  le  20  juillet  1780. 

En  1783-4,  le  comte  de  Barnewall  était  son  vén.*.  et  d'Amade  était 
son  secrétaire.  En  1785,  il  était  remplacé  par  Dupin,  conseiller,  et  en 
1786-9,  par  le  marquis  des  Portes,  sénéchal  de  Toulouse.  Ses  secrétaires 
furent  :  Villar,  professeur  en  chirurgie  (1785),  et  le  baron  de  Commère, 
conseiller  honoraire  au  Parlement  (1788-9). 

Le  député  était  le  marquis  d'Alciati. 

SAINT-JEAN  DES  ARTS  et  SAINT-JEAN   D'ECOSSE 

C'est  sous  le  premier  titre  que  cette  L.\  fut  fondée  par  une  puissance 
inconnue  le  8  juillet  1775,  et  ses  titres  furent  renouvelés  par  la  G.*.  L.\ 
le  10  décembre  1772.  C'est  sous  le  second  titre  que  le  G.\  O.*.  la  recon- 
nut le  25  juin  1774. 

En  1776,  elle  n'avait  que  35  membres  ;  l'année  suivante  elle  en  eut  56. 

Parmi  ses  membres  en  1775,  on  trouve  Arbanère  et  Desmoulin. 

De  1776  à  1790,  Gaubert,  procureur  au  Parlement,  fut  son  vén.'.  ; 
De  Bru  aîné,  négociant,  son  secrétaire  ;  et  l'abbé  Jardin,  son  député. 
Elle  disparut  définitivement  en  1792. 

VIEILLE  RRU  ou  ÉCOSSAIS  FIDÈLES    et  NAPOLÉONMAGNE 

Cette  L.*.  aurait  été,  dit-on,  fondée  directement  par  Charles  Edouard, 
mais  aucun  document  n'a  été  fourni  à  l'appui  de  cette  affirmation.  On 
a  beaucoup  discuté  sur  l'origine  singulière  de  son  nom  de  Vieille  Bru. 
On  a  cherché  les  étymologies  les  plus   savantes  et  les  plus  compliquées, 

LA.  FRANC- MAÇONNERIE.   —  T.    I.  31 


482  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

sans  donner  aucune  preuve  sérieuse.  On  peut  admettre  avec  une  certaine 
vraisemblance  que,  créée  en  faveur  du  vén.-.  m.',  de  Bru  aîné,  on  l'ait 
appelée  la  Vieille  L.\  de  Bru,  puis  la  Vieille  Bru. 

Cette  L.\  reprit  ses  travaux  sous  l'Empire,  sous  le  titre  de  Napoléon  - 
magne.  Le  8  février  1812,  le  directoire  des  rites  du  G.*.  0.\  refusa  de 
la  reconnaître  sous  le  titre  d'Ecossais  Fidèles  ou  de  Vieille  Bru,  ses 
patentes  n'ayant  aucun  caractère  d'authenticité. 

En  1808,  son  vén.*.  était  du  Puget.  propriétaire.  En  1813,  il  était 
remplacé  par  Montané  de  la  Roque,  président  à  la  cour,  et  en  1814,  par 
Cardes,  négociant 

Son  secrétaire  était  Clausolles,  et  son  député  Laflotte,  avocat  (1808j, 
puis  Delaroche  (1813-4). 

Pour  cette  L.'.,  voir  Lecouteulx,  p.  112  ;  Ragon,  Orthodoxie,  p.  122  ; 
Daruty,  p.  174  ;  Thory,  Acta  Latomorum,  I,  251  ;  Gros,  Les  L.'.  maçon- 
niques de  Toulouse  ;  et  chap.  vu. 

LA   SAGESSE 

Une  puissance  inconnue  fonda  cette  L.\  le  10  juillet  1757.  La  G.*.  L.\ 
renouvela  ses  titres  le  31  décembre  1772,  et  le  G.*.  O.-.  le  27  septembre 
1774.  On  a  prétendu  même,  mais  sans  preuves,  qu'en  1749  on  avait 
constitué  dans  son  sein  un  souverain  chapitre  au  rit  écossais  d'Edimbourg. 

En  1775,  cette  L.*.  comprenait  64  membres.  Elle  eut  pour  vén.'.  De 
Marrort  (1776)  ;  d'Espigal,  conseiller  doyen  au  sénéchal  et  présidial 
(1777)  ;  Pinaud,  négociant  (1785)  ;  Lanneluc,  négociant  (1788),  et 
Decamps,  négociant  (1789). 

Son  secrétaire  fut  J.  Pinaud,  et  ses  députés  Froger  d'Igneaucourt 
(1776-7),  de  Chamerois  (1785),  et  Armet,  garde  des  archives  du  roi  et 
de  Monsieur  (1789). 

Ayant  interrompu  ses  travaux  pendant  la  Révolution,  elle  les  reprit 
sous  l'Empire.  Elle  fut  constituée  par  la  L.'.  Saint-Alexandre  le  17  octo- 
bre 1806,  et  en  1809  elle  possédait  un  chapitre  d'Hérodom  de  Kilwining. 

Ses  vén.-.  furent  :  Sénègre,  négociant  (1808),  et  Raymond  fils,  juge 
suppléant  au  tribunal  de  commerce  (1813-4). 

Son  député  secrétaire  était  Roumagniac,  négociant,  et  de  1808  à  1814 
ses  députés  :  pour  la  L.'.  Michelot  ;  pour  le  chapitre,  Brunet  ;  l'un  et 
l'autre  officiers  du  G.'.  O.". 

PARFAITE  AMITIÉ 

Constituée  par  la  G.*.  L.*.  de  France  le  30  mai  1763,  cette  L.'.  fut 
reconnue  par  le  G  '.  O.'.  le  9  août  1781. 

Parmi  ses  membres  en  1766  figurent  :  Tavernol  ;  Laforest  ;  Genton  ; 
Bastide.  En  1774,  son  tableau  contenait  douze  avocats  et  pas  de  magis- 
trats. En  1782,  huit  magistrats  du  Parlement  s'y  étaient  introduits  En 
1783,  il  y  en  avait  vingt-trois  et  en  1786  il  y  avait  deux  présidents  à 
mortier,  quinze  conseillers  en  fonction,  trois  conseillers  honoraires,  un 
avocat  général  et  deux  substituts  du  procureur  général.  Contrairement  à 
ce  qui  se  passait  dans  les  autres  L.-.,  dans  la  Parfaite  Amitié  le  magis- 
trat se  substituait  à  l'avocat.  Cette  L.-.  était  particulièrement  élégante  et 
aristocratique.  A  ses  côtés  fonctionnait  une  L.'.  d'adoption  nombreuse 
et  choisie. 


LOGES    DE   PROVINCE  183 

Ses   vén.\    furent   :   Juin    de    Sir  an,    conseiller  ;    Daspe,     président 

(1782-3)  ;  de  Laroquan.  conseiller  1784  ;  Helmon  de  Malcor  (1785)  ;  de 
Resseguier,  avocat  général  (1780-9);  Malpel,  avocat  au  Parlement,  est 
son  secrétaire,  et  son  député,  Théaulon  (1785),  puis  Descadillac, 
avocat  au  Parlement  (1788-9;. 

Par  le  tableau  de  cette  L.-.  en  1786,  on  se  rendra  compte  de  la  com- 
position de  ses  membres;  elle  resta  la  même,  à  peu  de  noms  près,  jus- 
qu'à la  Révolution,  qui  la  plongea  dans  un  sommeil  éternel  : 

De  Resseguier,  cons.  gén.  Pari.,  vén.\  ;  de  Sapte,  prés,  mortier, 
l,r  surv.\  ;  de  Rigaud,  cons.  Pari.,  2e  surv.-.  ;  de  Malcor,  cons.  Pari., 
ex-maitre  ;  de  Siran,  cons.  Pari.,  orateur  ;  Cassaigne,  av.,  secret.'.  ; 
Lamarque,  av.,  trésorier  ;  marquis  de  Pordéac,  maître  d  hôtel  ;  de 
Fajole  Giscaro,  écuyer,  terrible  ;  de  Labroue,  cons.  Pari.,  m.\cérém.\  ; 
de  Laroquan,  cons.  Pari.,  g.',  des  se.  ;  Dubaur,  prof  médecine,  et 
Frizac,  prof,  chirurgie,  visiteurs  malades  ;  abbé  Sempé,  chanoine  Saint- 
Jean,  infirmier  ;  abbé  de  Saint-Romain,  chanoine  Montauban,  maître  ; 
Sicard,  av.  Pari.,  maître  ;  de  Fajac,  prés.  Pari.,  maître  ;  Malpel,  av. 
Pari.,  maître  ;  Ferrey,  subst.  proc.  gén.,  maître  ;  Delong  père,  cons. 
hon.  Pari.,  maître  ;  Dérat,  av.  Pari.,  maître  ;  d'Azas,  cons.  hon.  Pari., 
maître  ;  Demouche,  secret,  palais,  maître  ;  Désirât,  av  Pari., 
maître  ;  marquis  du  Faget,  lieut  maréch  France,  maître  ;  de  Segla, 
cons.  Pari.,  maître  ;  de  Brive,m.\  Pari.,  eaux  et  forêts  ;  Foix,  maître  ; 
de  Salase,  subst.  proc.  gén.,  maître  ;  de  Fajole,  cons.  hon.  Pari., 
maître  ;  Viguier,  av.  Pari.,  maître  ;  abbé  de  Pouget,  curé  de  Saint- 
Thibery,  maître  ;  de  Rouillan,  écujrer,  maître  ;  marquis  de  Montbartier, 
maître  ;  d'Azemar  de  Fabrègues,  écuyer,  maître  ;  de  Rochefort,  cons. 
Pari.,  maître  ;  Lamic,  av.  Pari.,  maître  ;  marquis  de  Puilaroque,  maître  ; 
de  Rouville,  cons.  Pari.,  maître  ;  Mical,  dir.  gén.  fermes,  maître  ; 
Duroc  de  Mauron,  cons.  Pari.,  maître  ;  de  Laplonière,  dir.  postes, 
maître  ;  de  Lespinasse,  cons.  Pari.,  maître  ;  de  Trinqualie,  cons.  Pari., 
maître;  Tardy,  écuyer,  maître;  chev.  d'Albaret,  off.  rég.  Maine,  maître; 
de  Rigaud-Corneille,  off  inf.,  maître  ;  de  Saint-Victor,  lieut. -col.  inf., 
maître  ;  Delong  fils,  cons.  Pari.,  maître  ;  de  Gilède-Pressac,  écuyer, 
maître  ;  de  Pavie-Fourquevaux,  off.  dragons,  maître  ;  Delibe,  prof, 
collège  royal,  maître  ;  d'Héliot,  cons.  Pari.,  maître  ;  de  Reynal,  cons. 
Pari.,  maître  ;  de  Fabrot,  écuyer,  maître;  Abrial  d  Issas,  cons.  sénéch.  ; 
de  Villeneuve  de  Berg,  maître  ;  baron  de  Panetier,  off.  caval.,  maître  ; 
marquis  d'Eure,  maître  ;  Sambucy,  baron  de  Miers,  écuyer,  maître  ;  de 
Marcilhac,  écuyer,  maître  ;  vicomte  d  Alzon,  maître  ;  baron  de  Pertuis, 
maître  ;  marquis  d'Escouloubre,  col.  inf.,  maître  ;  Dunoyer  de  Segon- 
zac,  écuyer,  maître  ;  de  Saint-Rémy,  écuyer,  maître  ;  Rivais  de  La- 
combe,  cons.  sénéch.  Montauban  ;  du  Fayet,  g.  du  corps  du  roi,  maître; 
Saint-Arnoux,  écuyer,  maître  ;  marquis  de  Villelongue,  maître  ;  abbé  de 
Solages,  vie  gén.,  Nantes,  maître  ;  de  Labourrelie,  cons.  Pari.,  appr.  ; 
Ch.  de  Labourrelie,  off.  inf.,  appr.  ;  Duperier,  cap.  caval.,  maître  ;  de 
Senovert,  off.  génie,  maître  ;  de  Marin,  écuyer,  appr.  ;  Ch.  de  Marin,  off. 
carabiniers,  maître  ;  Bastoulh,  av.  Pari.,  appr.;  de  Marmiesse,  off  inf., 
maître  ;  de  Palarin,  off.  caval.,  appr.  ;  marquis  de  Monlaur,  maître  ; 
comte  de  Ligonès,  maître  ;  de  Nougairol,  av.  Pari.,  appr.  —  Servants 
de  la  L.*.  :  Boussavié  ;  Massonier.  —  Adresse  :  Malpel,  av.  Pari.,  rue 
des  Regaus. 


484  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

La  L.'.  d'adoption  était  composée  des  sœurs:  Présidente  de  Sapte,gr.\ 
maîtresse;  de  Labroue,  lIe  inspect.%;  de  Siran,  2e  inspect.'.  ;  de  Rigaud, 
ex-maîtresse  ;  de  Laroquan,  oratrice  ;  de  Cazes,  secrétaire  ;  marquise  de 
Portes,  trésorière  ;  de  Combettes-Caumont,  maîtresse  cérém.\  ;  de  Taillas- 
son  ;  de  Duprat  ;  de  Gaja  ;  de  Saint- Victor  ;  de  Mahieu  ,  baronne  de 
Panetier  ;  de  Redon  ;  marquise  du  Crouzet  ;  de  Millau  ;  vicomtesse  de 
Rochemaure  ;  marquise  de  Resseguier  ;  de  Rochefort  ;  de  Lacroix  ; 
d'Omeron  ;  de  Réad  aînée  ;  de  Réad  cadette  ;  marquise  de  Monlaur. 

TOURNUS 

PARFAITE  UNION 

Les  constitutions  primitives  de  cette  L.\  lui  furent  délivrées  le  4  août 
1766,  par  une  puissance  inconnue.  Elles  furent  renouvelées  par  la  G'. 
L.-.  le  29  août  1772  et  par  le  G.'.  0.\  le  27  mai  1774. 

En  1776,  cette  L.'.  comptait  15  membres  et  20  Tannée  suivante. 

Ses  vén."  furent  :  Du  Lac,  notaire  (1776)  ;  de  Laval  de  Lostange, 
avocat  au  Parlement,  bailli  (1111)  ;  Niepce,  changeur  pour  le  roi 
(1785-8),  et  Jacquet,  curé  (1789).  Ses  secrétaires  étaient  :  Lornat,  notaire 
(1776)  ;  Dunand,  médecin  (1777),  et  Niepce  (1789).  Son  député  fut 
Poncet  (1776),  puis  Armet,  garde  des  archives  du  roi  et  de  Monsieur 
(1788-9).  Cette  L.'.  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

TOURS 

CONCORDE  ÉCOSSAISE 

Fondée  par  une  puissance  inconnue,  le  27  septembre  1745,  cette  L.*. 
fut  reconstituée  le  6  mars  1765  par  la  G.'.  L.'.  et  par  le  G.'.  CV.  vers 
1780  ;  a  laissé  peu  de  traces  avant  de  disparaître  pendant  la  Révolution. 

En  1788-9,  elle  avait  [pour  vén.\  Cartier  Douineau,  négociant; 
Delavau- Simon,  négociant,  était  son  secrétaire,  et  Valète,  ancien  ban- 
quier, officier  du  G.'.  O.'.,  son  député. 

TRIPLE  NŒUD 

Cette  L.*.,  dont  on  ne  trouve  trace  que  dans  un  diplôme  de  Beau- 
chaine  (chap.  v,  p.  183),  n'a  laissé  aucune  trace  avant  la  Révolution. 
C'est  probablement  la  même  qui  fut   reconstituée  le  24  septembre  1809. 

En  1813,  elle  avait  pour  vén.\  Bailly-Drouin,  marchand,  et  en  1814, 
Delisle,  négociant.  Son  député  en  1813-4  était  Serré,  batteur  d'or. 

TROYES 

UNION  DE  LA  SINCÉRITÉ 

Constituée  par  une  puissance  inconnue  le  21  mars  1751,  cette  L  '.  fut 
renouvelée  par  la  G'.  L.'.  le  17  septembre  1773  et  par  le  G.\  O.'.  le 
17  septembre  1776.  En  1776,  cette  L.*.  comptait  20  membres.  Ses  vén.\ 
furent  :  d'Huyelle,  horloger  (1777)  ;  Chaperon,  conseiller  du  roi,  com- 
missaire de  police,  procureur  au  bailliage  (1785),  et  Bouquet,  procureur 
au  bailliage  (1788-9).  Ses  secrétaires  étaient  :  Chaperon,  commissaire 
de  police  (1777-1785),  et  Odin,  notaire  (1788-9). 


LOGES    DE    PROVINCE  1«S") 

Ses  députél  furent  :  Anthoine.  directeur  des  hypothèques- (1777)  ;  de 
Coudé,  avocat  au  Parlement  (1785),    et  Peuvret,  huissier  (1788-9). 

En  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.\  reprit  ses  travaux  sous 
l'Empire.  En  1808,  son  vén.\  était  Sirugue,  colonel  de  gendarmerie,  et 
en  1813-4,  Payn,  premier  adjoint.  Ses  secrétaires  étaient  Odin  (1808)  et 
Cogit,  banquier  (1813-4).  Son  député  était  Bertrand,  notaire. 

UNION  DE  LA  PALESTINE 
Fondée  à  une  époque  inconnue,  cette  L.\  n'a  pas  laissé  de  traces. 

VALENCE 

LA  SAGESSE 

Constituée  par  une  puissance  inconnue,  le  27  décembre  1765,  cette 
L.\  fut  renouvelée  par  la  G.'.  L.\,  puis  par  le  G.'.  O.'.  le  12  janvier 
1775   En  1776,  elle  comptait  23  membres  et  25  l'année  suivante. 

Ses  vén  .  furent  :  de  Planta,  ancien  officier  de  cavalerie  (1776-7  et 
1788)  ;  de  Rozières,  officier  du  génie  (1785),  et  Dupont,  directeur  de  la 
manufacture  de  coton  (1789).  Ses  secrétaires  étaient  :  Bancel,  chanoine 
de  la  cathédrale  (1776),  et  de  Planta  fils,  garde  du  corps  du  roi  (1777  et 
1785-9).  Le  député  fut  l'abbé  Raymond  (1776),  auquel  succédèrent  : 
l'abbé  Jardin    1777)  et  le  Dr  Jeanroi,  médecin  (1785-9). 

Entrée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  de  1808  à  1814,  elle  fut 
présidée  par  Renaud  fils,  avocat.  Son  député  pendant  la  même  période 
était  Picolet,  officier  du  génie. 

VALENGIENNES 
PARFAITE  UNION 

Cette  L.\  est  un  des  rares  anciens  ateliers  dont  les  titres  de  constitu- 
tion soient  authentiques.  Elle  fut  fondée  le  lor  juillet  1733  parla  G.\L.*. 
d'Angleterre,  sous  le  n°  127.  En  1740,  elle  portait  le  n°  111  (Pine),  en 
1770,  le  n°  55  (Cole),  et  en  1793,  le  n°  40  Elle  fut  renouvelée  par  la  G.'. 
L.\  le  15  juin  1772  et  par  le  G.\  O.  .  le  11  août  1774. 

En  1776,  elle  comptait  25  membres,  et  26  l'année  suivante. 

Ses  vén.*.  furent  :  Hayot  de  Ternicourt.  lieutenant  général  du  bailliage 
(1776-7)  ;  Renversé,  notaire  (1785);  et  de  Chermont,  maréchal  des  camps 
et  armées  du  roi,  chef  de  brigade  au  corps  royal  du  génie  (1788-9).  Son 
secrétaire  était  Glairo,  contrôleur  des  fermes,  et  son  député,  Wibaut 
(1776),  puis  Mangin,  entrepreneur  des  bâtiments  du  roi,  officier  adjoint 
du  G.*.  O.*.  (1777)  et  Biston,  secrétaire  de  l'intendance  et  directeur  du 
Mont  de  Piété  du  Hainaut    1788-9). 

Entrée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.\  reprit  ses  travaux 
sous  le  Consulat. 

Son  chapitre  d'Hérodom  de  Kilwining  ne  fut  pas  souche  en  1809, 
comme  le  dit  Thory  (Acta  Latomorum,  I,  242),  mais  avant  cette  époque, 
car  à  la  date  du  2  septembre  1804,  ce  chapitre  délivrait  à  Joseph-Xavier 
Reybaud,  sous -inspecteur  aux  revues,  un  brevet  de  R-+. 

Le  bref  est  signé  :  Cadet  de  Beaupré  ;  Gauthier;  Bombain  ;  Somand  ; 
Ablette,    et  Cagnon,  trésorier. 


486        LA  FRANC -MAÇONNERIE  EN  FRANCE 

En  1808,  son  vén.  .  était  Cagnon,  receveur  de  l'enregistrement,  et  son 
député  Laflotte,  avocat. 

VERDUN 

FRÈRES  AMIS 
AMITIÉ  ÉTERNELLE 

Ces  deux  L.\,  fondées  à  une  époque  inconnue,  n'ont  pas  laissé  de  traces. 

VERNON 

SAINT-JEAN  DE  DIEU 

Constituée  parla  G.".  L..,  le  30  juillet  1768,  cette  L.\  fut  reconnne 
par  le  G.".  O.'.  le  18  avril  1782  ;  elle  était  entrée  en  sommeil  vers  1773  et 
avait  repris  ses  travaux  le  21  mai  1782.  Elle  comptait  alors  25  membres, 
parmi  lesquels  :  Le  Tellier  d'Orvilliers  ;  le  comte  de  Vaugourdon  ;  de 
Caillé  ;  Ratel,  chanoine,  et  cinq  cordeliers. 

Cette  L.*.  eut  pour  vén.".,  de  1785  à  1788,  Villetard,  avocat  au  Par- 
lement, conseiller  en  l'élection  et  bailli  de  Beaudemont.  Son  député 
pendant  la  même  période  fut  Chambon,  huissier  au  Parlement. 

Entrée  en  sommeil  pendant  la  Révolution,  cette  L.*.  ne  reprit  pas  ses 
travaux. 

VERSAILLES 

L.  .  DE    LA  CHAMBRE  DU    ROI 

Il  paraît  que  le  20  octobre  1745,  la  G.'.  L.*.  institua  un  atelier  sous  ce 
titre.  Elle  était  exclusivement  composée  des  officiers  attachés  au  person- 
nel de  Sa  Majesté.  Parmi  ses  membres,  il  y  avait  plusieurs  capucins  et 
un  aumônier  du  roi.  Je  n'ai  pu  déterminer  l'Orient  de  cette  L.-.,  qui  est 
indiqué  par  plusieurs  auteurs  comme  étant  Paris.  Par  son  recrutement,  il 
y  a  tout  lieu  de  supposer  que  c'était  plutôt  Versailles. 

SAINT-JEAN  DE  LA  RÉUNION 
SAINT-JEAN  DE  LA  CONCORDE 
SAINT-JEAN  DE  MARS  ET  BELLONE 
SAINT-JOSEPH  DU  PARFAIT  ACCORD 

Ces  quatre  L.*.,  fondées  à  une  époque  inconnue,  n'ont  laissé  aucune 
trace. 

VILLEFRANCHE  (Lyonnais) 
LA  SAGESSE 

Fondée  à  une  époque  inconnue,  cette  L.*.  n'a  pas  laissé  de  traces. 

VINÇA  (Roussillon) 
JÉRUSALEM 

Cette  L.'.,  fondée  le  29  octobre  1769,  figure  pour  la  première  fois  sur 
les  annuaires  du  G.\  0.\  en  1788.  Il  n'y  est  pas  fait  mention  delà  date 
do  ses  constitutions. 


LOGES    DE    PROVINCE  187 

En  1788  0,  son  vén.\  était  Pontich  cadet,  citoyen  noble  ;  son  secrétaire, 
Salvo,  médecin  ;  et  son  député,  Desaudrays,  lieutenant-colonel,  ancien 
résidant  du  roi  dans  les  cours  étrangères. 

Jérusalem  disparut  définitivement  pendant  la  Révolution. 

VIRE 

SAINT-GUILLAUME  devenue  LA  VICTOIRE 

La  G.\  L.\  constitua  cet  atelier  le  4  mai  1764  ;  il  fut  renouvelé  par  le 
G.'.  0.\  le  21  février  1774.  C'est  à  cette  époque  que  le  vén.v  étant  mort  et 
les  titres  delà  L.'.  étant  tombés  dans  des  mains  que  M.  de  Loucelles 
déclare  indignes,  les  membres  décidèrent  de  prendre  un  autre  nom. 
Après  avoir  choisi  celui  de  Saint-Etienne  de  la  Victoire,  ils  adoptèrent,  le 
21  mars  1774,  le  titre  de  la  Victoire.  A  cette  époque  figuraient  parmi  ses 
membres  :  Dupont  ;  du  Bocq  ;  Marie  ;  de  Freville  ;  Lecocq  ;  Bouchard  ; 
Genuit  ;  Rolodange  ;  Heurtault  ;  Malfilâtre  ;  Costard  ;  de  Gathemot  ; 
Bazin-Arvrat,  et  Bazin  de  la  Blanquière. 

En  1776,  la  L.'.  n'avait  que  18  membres  présidés  par  le  chevalier 
Dupont,  sieur  de  Logerie.  Genuit,  négociant,  était  secrétaire,  et  Pyron, 
député. 

En  1777,  le  vén.-.  était  Costard  du  Haut-Grais,  notaire  ;  le  secrétaire, 
Laîné  de  la  Vitelière,  et  le  député,  Dupont  de  Lorgerie. 

En  1780,  le  tableau  comprenait  les  22  membres  suivants  :  Chemin  de 
la  Guaineterie  ;  Bazin  de  la  Blanquière  ;  Achard  de  Saint-Mauvieux  ; 
Le  Monier  de  la  Guévilonière  ;  Le  Monier  de  la  Loissonnière  ;  Costard 
de  Haut-Grais  ;  Lecoq  de  la  Martinière  ;  Leroy  de  la  Vallée  ;  Heurtault 
de  la  Saisonnière  ;  l'abbé  Tary  de  Monthieu  ;  Le  Brun  de  Blai  ;  Quentin 
de  Coupigny  ;  de  Blaisot  ;  de  Lunois  ;  de  Sainson,  gouverneur  de  Vire  ; 
Dupont  de  Logerie  ;  Delarue  de  Tréville  ;  le  marquis  de  Rabodange  ; 
Malherbe  de  Gathemo  ;  dom  Damard,  bénédictin,  et  Louvart  de  Pon- 
levoye. 

Chemin  de  la  Guaineterie,  négociant,  fut  son  vén.\  de  1785  à  1789. 
Pendant  la  même  période,  Le  Monier  de  la  Loissonnière  fut  son  secrétaire 
et  Pantonnier  son  député. 

La  Victoire  s'éteignit  définitivement  pendant  la  Révolution. 


VITRY-SUR-MARNE 

SAINT-CHARLES  DE  LA   CONSTANCE 

Cette  L.'.,  fondée  à  une  époque  inconnue,  n'a  pas  laissé  de  traces. 

VOIRON 

LA  TRIPLE  UNION  ET  L'AMITIÉ 

Cette  L.\,  fondée  le  14  juin  1745,  n'a  laissé  aucune  trace  de  ses 
travaux.  Elle  n'aurait  été  reconnue  par  le  G.  .  O.*.  que  le  10  août  1789. 
Elle  entra  en  sommeil  peu  après.  En  1808,  on  la  retrouve  en  instance  de 


488 


LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


chapitre.  Son  vén.*.  était  Tivallier,  négociant  et  maire.  Son  député    était 
Harger  fils. 

VOULTE  (la) 
SAINT-VINCENT  DE  LA  PERSÉVÉRANCE 

Constituée  par  la  G.\  L.'.  le  23  novembre  1769,  cette  L.\  fut  renou- 
velée par  le  G.  .  0.\  le  30  avril  1774. 

En  1776,  elle  comptait  19  membres  et  35  l'année  suivante. 

De  1776  à  1789,  son  vén.*.  fut  Tardy  de  Montreval,  capitaine  au  corps 
royal  d'artillerie. 

Ses  secrétaires  furent  Robert,  avocat,  et  Fonneure,  avocat  au  Parle- 
ment. Son  député  fut  Jarry,  sous-chef  au  bureau  des  hypothèques,  puis 
Turret,  docteur  en  droit. 

Cette  L. \  termina  définitivement  ses  travaux   pendant  la  Révolution. 


III 

LOGES  MILITAIRES 


Les  L.*.  militaires  ne  semblent  pas  avoir  été  installées  dans  les  régi- 
ments français  avant  1759.  Il  est  probable  qu'elles  ne  se  sont  pas  for- 
mées spontanément  et  qu'avant  leur  organisation  officielle  à  l'O,'.  des 
régiments,  de  nombreux  officiers  fréquentaient  les  L.-.  civiles.  Les  régi- 
ments, en  se  déplaçant,  étaient  de  merveilleux  agents  de  propagande 
que  la  f.'.-m.'.  n'eut  garde  de  négliger.  On  créa  même,  après  1760,  des 
L.\  militaires  qui  n'étaient  à  l'O/.  d'aucun  régiment.  Ces  L.*.  eurent 
un  rôle  important  dans  le  développement  de  l'ordre  ;  le  nom  de  la  plu- 
part d'entre  elles  n'est  pas  parvenu  jusqu'à  nous.  Avant  1771,  je  n'ai 
relevé  que  Saint-Jean  de  la  Gloire  et  Saint-Alexandre,  et  cependant  il  me 
paraît  certain  qu  il  en  exista  un  nombre  relativement  considérable 
Entre  1760  et  1769,  je  trouve  leurs  traces  en  Normandie,  en  Touraine.à 
Moulins,  à  Libourne,  à  Toulouse,  en  Provence  et  en  Lorraine. 

Il  est  curieux  de  constater  qu'aucune  de  ces  LL.\  ne  figure  sur  les 
annuaires.  De  qui  tenaient-elles  leurs  pouvoirs  ? 

D'après  les  L.*.  qu'elles  ont  contribué  à  installer,  il  n'est  pas  douteux 
qu'elles  étaient  d'origine  ou  tout  au  moins  de  tendances  jacobites  ;  l'O.'. 
de  Bouillon  a  peut-être  aussi  joué  un  rôle  plus  considérable  qu'on  ne 
l'a  indiqué  jusqu'ici  dans  le  développement  de  la  f.'.-m.*.  française. 

DILLON 

D'après  la  capitulation  de  Limerick,  les  officiers  et  soldats  de  l'armée 
jacobite  avaient  la  faculté  de  suivre  Jacques  II  ;  il  leur  fut  donc  permis 
de  rentrer  en  France.  Les  Gardes  Irlandais,  à  l'exception  de  leur  colonel, 
suivirent  la  destinée  des  Stuarts,  et  formèrent  le  régiment  de  Dorrington; 
un  grand  nombre  d'officiers  des  autres  corps  les  imitèrent.  Réfugiés  à 
Saint-Germain-en-Laye  auprès  de  leur  souverain  auquel  Louis  XIV 
avait  donné  un  somptueux  asile,  ils  ne  tardèrent  pas  à  former  un  second 
régiment  composé  des  membres  les  plus  distingués  de  l'émigration 
jacobite.  On  retrouve  les  premières  traces  de  la  formation  de  ce  régiment 
par  la  nomination  de  Charles  Mac  Carthy,  comte  de  Mountcashel,  au 
grade  de  colonel,  le  18  juin  1690.  André  de  Lee  lui  succéda,  le  28  juil- 
let 1694.  Quatre  ans  plus  tard,  le  régiment  passa  au  service  de  la  France. 
Un  autre  membre  de  la  famille  Lee  fut  appelé  à  le  commander,  le 
26  octobre  1704.  Il  ne  fut  remplacé  que  le  16  septembre  1733  par  François, 
comte  de  Bulkeley,  auquel  succéda  son  fils  Henri,  le  7  mars  1754.  C'est 
sous  le  nom  de  Bulkeley  que  le  régiment  figura  brillamment  à  Fontenoy 
à  côté  de  la  Maison  du  roi. 


490  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Le  26  avril  1775,  le  régiment  passa  à  Arthur,  comte  Dillon  ;  le  1er  juin 
1784,  à  Charles-Joseph  Augustin,  vicomte  de  Walsh-Serrant,  et  le 
10  mars  1788,  au  chevalier  Théobald  Dillon.  C'est  sous  le  nom  de  Dillon 
que  ce  régiment  est  plus  connu  dans  l'histoire,  en  raison  du  rôle  brillant 
joué  par  son  1er  bataillon  dans  les  Antilles  pendant  la  guerre  de  l'Indé- 
pendance américaine  (1779-1783).  Son  passé  n'avait  pas  été  moins 
glorieux.  A  Malplaqust,  à  Denain  comme  à  Dettingen,  Fontenoy  et 
Laufeldt,  il  avait  été  «  mordant  sur  l'anglais  »  Devenus  sujets  du  roi  de 
France,  leur  dévouement  à  leur  nouvelle  patrie  fut  à  toute  épreuve. 

En  1791,  le  régiment  de  Dillon  devint  le  87e  d  infanterie  et,  le  5  février 
1792,  son  colonel  fut  Thomas  Keating.  En  1794,  le  1er  bataillon  fut  le 
noyau  de  la  157»  demi-brigade,  et  le  2e  bataillon  celui  de  la  158a. 

Est-ce  que  le  régiment  de  Dillon  eut  une  L.'.  ?  Je  n'ai  pu  en  trouver 
une  preuve  positive.  Etant  donnée  la  composition  de  la  Bonne  Foi  cons- 
tituée à  l'O.v  de  Saint-Germain  en  1778,  on  peut  douter  que  cette  L.*. 
soit  sortie  du  régiment  de  Dillon,  qui  n'avait  du  reste  à  cette  époque 
aucune  attache  particulière  avec  Saint-Germain.  Cependant  je  relève 
parmi  les  officiers  de  ce  régiment  un  grand  nombre  de  F.".-M.\  : 

Lally,  lieut. -col.  du  25  juillet  1708  ;  Linche,  cap.  des  grenadiers 
(1705),  retiré  en  1734  ;  Macdonald,  cap.  en  pied  du  3  déc.  1701, 
retiré  en  1734  ;  Gaydon,  aide-major  1701,  major  1er  janvier  1709  ; 
Glasco,  cap.  en  pied  1709,  retiré  en  1734  ;  Jean  Bourke,  cap.  en  pied 
1712,  retiré  en  1734  ;  Mac  Carthy,  cap.  1703,  retiré  1734  ;  Lally, 
aide-major  1728  ;  OToolle,  lieut.  grenadiers,  1709  ;  Henry  Dillon, 
fils  du  lieut. général,  cap.  1730  ;  Arthur  et  Charles  Maunery  ;  Jean 
Bourke  de  Glinke  ;  Patrice  Heguerty  ;  O'Neil  ;  Edouard  et  Bichard 
Butler;  Fitz  Gérald  ;  Arthur  Dillon  ;  Talbot  de  Tyrconnel,  etc. 

De  1760  à  1780  figurent  ;  Bartholomew  Badclyffe,  lord  Derwenwater, 
fils  de  Charles  Badclyffe,  le  1er  grand  maître. 

De  1780  à  1790,  le  comte  Dillon,  mestre  de  camp  et  colonel  du  régi- 
ment ;  le  chevalier  Théobald  Dillon,  colonel  en  second  ;  Barthélémy 
Dillon,  lieutenant-colonel  ;  le  capitaine  Thomas  Dillon  ;  les  lieutenants 
James  et  Denis  O'Farell  ;  le  capitaine  Charles  Nugent  ;  le  capi- 
taine baron  O'Neill  et  les  sous-lieutenants  Heniy,  Joseph  et  John 
O'Neill  ;  le  capitaine  et  le  lieutenant  Shée  et  des  Barry  ;  Blake  ; 
Coghlan  ;  Darcy  ;  Fitz  Gérald  ;  Fitz  Maurice  ;  Hussejr  ;  Mahony  ; 
O'Beilly  ;  Plunkelt  ;  Sheldon  ;  Thompson  ;  Warren  et  Worth. 

On  peut  admettre  avec  M.  de  Loucelles  qu'à  Saint-Germain  était 
installée  la  L  \  Mère  du  rite  jacobite,  qui  eut  successivement  pour  grand 
maître  :  Jacques  II,  Jacques  III  et  Charles-Edouard,  et  parmi  ses 
membres  les  plus  distingués,  le  duc  de  Berwick,  fils  naturel  de 
Jacques  II  ;  Jean  Drummond,  duc  de  Melfort  ;  André-Louis  Hector  et 
Louis  Drummond,  ses  descendants;  Jacques  Drummond,  duc  de  Perth, 
son  fils  et  son  petit  fils  ;  la  comte  de  Hamillon  ;  les  Dillon;  Ramsay  ; 
les  Radclyffe  ;  Alexandre  deMontgommery,  comte  d'Eglington  ;  Alexandre, 
comte  de  Home  ;  Georges  de  Leslie  ;  Richard  Talbot,  duc  de  Tyrcon- 
nell  ;  Jean,  baron  de  Dartfort  et  comte  de  Caryl  ;  Gérard,  comte  de 
Lally-Tollendal  et  son  fils  Thomas-Arthur  ;  les  lords  Bolingbroke, 
Clancart}'-,  Clare,  Greffin,  Mac  Cartlrv,  Middleton,  d'Ormond,  etc. 

Je  ne  puis  cependant  admettre  avec  M.  de  Loucelles  que  le  rite 
d'Hérodom    de  Kilwining    avait    son    centre  à    Saint-Germain    dont  le 


LOGES    MILITAIRES  1(J1 

château  aurait  clé  le  véritable'  château  de  Kilwining,  ce  dernier  n'étant 
pns  hypothétique.  Dans  le  second  volume,  nous  nous  expliquerons 
longuement  sur  ce  rite.  Le  château  de  Kilwining  existait  bien  réellement 
et  fut  pendant  longtemps  un  centre  maçonnique  très  remuant.  Tout  au 
plus  peut-on  admettre,  sans  preuves  positives,  mois  avec  quelque  vrai- 
semblance, que  la  L.'.  Mère  de  Saint-Germain  usurpa  les  pouvoirs  de 
celle  de  Kilwining,  en  datant  de  ce  dernier  Orient  des  pièces  en  réalité 
écrites  à  Saint-Germain. 

Ce  qui  est  bien  certain,  c'est  qu'en  1771  il  n'y  avait  pas  en  France 
dix  L.".  tenant  régulièrement  leurs  pouvoirs  de  la  G.".  L.'.  d'Angleterre 
et  qu'il  n'.v  avait  de  rite  écossais  qu'en  France  et  en  Allemagne. 

WALSH 

LA  PARFAITE  ÉGALITÉ 

En  1661,  Charles  II,  à  la  veille  de  monter  sur  le  trône  d'Angleterre, 
forma  à  Saint-Germain  en  Laye  un  régiment  sous  le  titre  de  Royal  Irlan- 
dais. Ce  régiment  suivit  la  fortune  des  Stuarts  sous  le  nom  de  Gardes 
Irlandaises.  Compris  dans  la  capitulation  de  Limerick,  il  débarqua  à 
Brest  le  9  octobre  1689,  sous  les  ordres  du  colonnel  lord  William  Dor- 
rington,  appelé  à  remplacer  son  ancien  colonel  le  duc  d'Ormond,  qui 
avait  embrassé  le  parti  de  Guillaume  III.  Jusqu'en  1698,  il  tint  garnison 
à  Saint-Germain,  sous  le  nom  de  Garde  Irlandaise,  en  dehors  des  cadres 
français,  bien  qu'entretenu  par  Louis  XIV.  Le  27  février  1698,  il  fut  incor- 
poré dans  l'armée  française  sous  le  nom  de  son  colonel,  qui  était 
toujours  lord  Dorrington.  Jusqu'à  la  formation  des  demi-brigades,  ce 
régiment  prit  tour  à  tour  le  nom  de  ses  divers  colonels  :  Rooth  (Michel 
Lesley,  comte  de),  le  12  décembre  1718  ;  Rooth  (Charles-Edouard 
Lesley,  comte  de),  le  28  mai  1733  ;  Roscommon  (Robert  Dillon,  comte 
de),  le  19  août  1766  ;  Walsh-Serrant  (Antoine-Joseph-Philippe,  comte 
de),  le  11  avril  1770  :  Walsh  •  Charles-Joseph-Augustin,  vicomte  de), 
le  10  mars  1788  ;  et  O'Neill  (Jean),  le  8  janvier  1792.  En  1791,  il  avait 
formé  le  92e  régiment  d'infanterie. 

Ce  régiment  semble  avoir  eu  la  plus  ancienne  L.\  reconnue  par  le 
G.'.  0.\  de  France.  En  effet,  le  13  mars  1777,  le  G.'.  O.  .  admit  que 
sa  constitution  primitive  datait  du  25  mars  1688,  et  que  cette  constitution 
avait  été  renouvelée  le  9  octobre  1772  par  la  G.'.  L.'.  de  France. 

Comment  fut-elle  installée  à  l'origine  et  de  quelle  puissance  maçonni- 
que tenait-elle  ses  pouvoirs?  Elle  ne  figure  sur  aucune  des  listes  de  L.'. 
reconnues  par  les  Grandes  L.".  anglaises,  et  tout  porte  à  croire  qu'elle 
fut  formée  par  la  réunion  de  plusieurs  frères,  initiés  antérieurement,  qui 
constituèrent  la  L.  .  de  leur  propre  autorité.  C'est  du  reste  de  cette 
façon  que  se  formèrent  la  plupart  des  L.'.  françaises  antérieures  à  1743. 
Quel  était  son  titre  distinctif  ?  Il  est  probable  qu'elle  n'en  ait  pas  eu  au 
début.  Je  ne  relève  le  titre  de  Parfaite  Egalité  qu'à  partir  de  1752,  mais 
il  est  possible  qu'elle  l'ait  porté  antérieurement.  Avant  cette  date,  je 
relève  parmi  ses  membres  : 

Michel  Lesley,  comte  de  Rooth  (1718)  ;  Charles-Edouard  Lesley, 
comte  de  Rooth  (1727-1733)  ;  Arthur  Dorrington,  lieut.-col.  1710,  chev. 
Saint-Louis  ;  Dassigny,  Français  né  en  Bourgogne,  cap.  1698  ;  Nagle, 
cap.  1698  ;    Butler,  cap.  et  chev.  Saint-Louis,  1702  ;  O'  Calaghane,  cap., 


i 


492  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

blessé  en  1701  ;  Clayton  (cap.  en  1707)  ;  Heasse  (cap.  1707  :  O'Dono- 
ghane  (cap.  1707  ;  Mac  Carthy.  cap.  1701,  en  pied  1709  ;  Wyndham, 
cap.  1703,  en  pied  1710  ;  Cusarque,  cap.  réformé  1709,  aide-ninjor 
et  cap.  1710;  Dorrington;  (1714);  Weyer  (1708)  ;  Dunne  (1708  ;  Geoghe- 
ghane  (1709)  ;  Reyly  ;  Keating  ;  Cohelane,  Fitz  Patrice  ;  Calaghane  ; 
Purcell  ;  Cusaque  ;  Hobbes  ;  Martin  ;  O'Ogheren  ;  Tilline  ;  Florence  et 
Guillaume  Hurly  ou  Hurty  (?). 

De  1752  à  1777,  je  n'ai  pu  relever  le  nom  d'aucun  membre. 

En  1777,  son  vén.\  est  le  capitaine  d'Arcy  ;  le  chev.  Walsb,  capitaine, 
est  secrétaire,  et  son  député  au  G.'.  0.\  est  Woulf,  officier  d'infanterie, 
rue  Neuve-des-Bons-Enfants.  Elle  se  composait  de  17  membres.  Un 
brevet  du  7  septembre  1777,  daté  de  Bapaume,  contient  les  signatures 
de  Jean  O'Brien,  chev.  O'Connor,  Shield,  Narey,  Swietmamn,  Mac 
Carty,  Roche,  chev.de  Keating,  Nagle,  Ch.  Walsh,  Plunkett,  Nugent. 

En  1785,  son  vén.\  est  le  sous-lieutenant  Hennery,  son  secrétaire  le 
1er  lieutenant  Begg. 

En  1788  et  1789,  son  vén.\  est  Walsh,  capitaine  commandant,  et  son 
secrétaire  Barbior.  sergent-major. 

Sur  un  brevet  donné  à  l'île  d'Oléron  le  1er  juin  1787,  je  relève  les 
noms  de  F.  Walsh,  vén.\,  Mac  Carthy,  Bulkeley,  O'Brien,  Kavanagh. 
O'Flyn,  Ch.  de  Keating,  Keating,  Tobin,  ORurday,  Gallwe}'  et  Barey. 

Entra-t-elle  en  sommeil  pendant  la  tourmente  révolutionnaire  ?  Cela 
est  possible,  bien  que  j'aie  tout  lieu  de  croire  que  les  L.*  persistèrent 
dans  la  plupart  des  régiments,  continuant  une  vie  indépendante,  sans 
rapport  avec  aucun  pouvoir  central. 

Les  régiments  furent  disloqués  par  les  organisations  de  1791  et  de 
1794.  En  1791,  les  régiments  remplacèrent  leurs  noms  séculaires  par  de 
simples  numéros  d'ordre  et,  en  1794,  par  l'amalgame  avec  les  bataillons 
départementaux,  la  plupart  des  régiments  contribuèrent  à  la  formation 
de  deux  demi-brigades. 

Le  23  mars  1801,  il  se  forma  au  92e  d'infanterie  une  L.'.  sous  le  titre 
de  la  Parfaite  Union,  qui  ne  semble  avoir  aucun  rapport  avec  l'ancienne 
Parfaite  Egalité  à  l'0\  du  régiment  de  Walsh.  A  cette  époque  du  reste, 
le  92e  n'avait  plus  aucun  lien  de  sang  avec  le  92e  de  1791. 

Avant  et  après  Fontenoy,  des  ordonnances  royales  pourvurent  à  la 
formation  de  quatre  régiments  écossais  ou  irlandais.  Il  est  plus  que  pro- 
bable que  ces  régiments  eurent  leurs  L.-.  Celles-ci  néanmoins  n'ont  pas 
laissé  de  traces.  Parmi  les  officiers  de  ces  corps,  depuis  leur  formation 
jusqu'à  1771,  je  relève  les  noms  d'un  certain  nombre  d'initiés. 

ROYAL  ECOSSAIS,    formé  par  ordonnance  du  3  décembre  1743 

Le  colonel  comte  de  Drummond,  duc  de  Perth  ;  Louis  Drummond  de 
Melfort  ;  Colbert  Castlehiel  ;  Stuart  ;  David  Nairne  ;  Haie  ;  Macdonald 
de  Glengary  ;  Mac  Grégor  de  Glengile  ;  Macdonald  de  Clauvonald  ; 
Cameron  de  Locheil  ;  Mac  Pherson  ;  Guillaume  Douglas  ;  Moore  ; 
Perkins  et  d'Ostove. 

LALLY,  créé  par  ordonnance  du  1"  octobre  1741 

Lally,  colonel  ;  Dillon  ;  Glascoe  ;  Bourke  ;  R}-an  ;  Fitz  Gerald  ; 
Butler  ;  Michel  Lally  ;  Lee  ;  Brown  ;  Fcrmor  ;  Hughes  Heguerty  ;  Wogan 
et  Macnemara. 


LOGES    MILITAIRES  493 


O'GILWY,  crée  le  28  janvier  1747 

Mylord  O'Gilwy,  colonel  ;  Jean  Macdonald  ;  David  Carnegie;  Brown  ; 
Muchanan  ;  Thomas  de  Sotheringham  ;  Duncan  Mackintosch  ;  Jean 
Menziès  de  Pitfodels  ;  Thomas,  Guillaume  et  David  O'Gilwy. 

ALBANY,  créé  le  20  octobre  1747 

Le  colonel  baron  de  Locheil  ;  le  lieutenant-colonel  Cluny  de  Mac 
Phcrson  ;  Archibald  O'Gilwy  ;  Cameron  de  Glenkengy  ;  Frager  de  Fair- 
field  ;  Petergraham  ;  John  Alexandre  de  Cameron  ;  Blairfetty  ;  James 
Cameron  ;  Thomas  Nayrne  ;  Robert  Graham  Garrig  ;  James  Sterbury  ; 
John  Drummond  ;  James  Macdonald  ;  Jacques  Graham  Arth. 

Il  est  possible  que  ces  divers  initiés  aient  fait  partie  de  L.\  civiles, 
ou  du  grand  groupement  de  Saint-Germain,  en  admettant  que  ce  dernier 
ait  réellement  existé  (1). 

VIVARAIS 

PARFAITE  UNION 

Le  premier  régiment  français  qui  eut  une  L.*.,  reconnue  par  la  suite 
officiellement  par  le  G.*.  0.\,  fut  le  régiment  de  Vivarais.  Cette  L.\ 
avait  pour  titre  distinctif  :  la  Parfaite  Union  ;  elle  fut  constituée  le 
15  avril  1759.  Elle  avait  alors  pour  maître  son  colonel,  le  chevalier  de 
Lanps,  et  on  voit  figurer  parmi  ses  membres  : 

Maucler,  lieutenant-colonel  ;  Maumusson,  major  ;  Beaudiau  ;  Dutilly  ; 
Gualy;  Pagny  et  Vauconcourt. 

En  1775,  elle  se  composait  de  quinze  membres,  parmi  lesquels  : 
Dupred,  vén.\  ;  Roux,  Lamarque  et  Seguin.  Lamarque  était  son  député 
au  G.\  0.\ 

De  1777  à  1789,  Dupred,  sous-lieutenant  de  grenadiers,  fut  son  vén.\, 
et  Charles  de  Roux,  chev.  de  Saint-Louis,  capitaine  commandant,  fut 
son  secrétaire. 

De  1779  à  1790,  nous  voyons  figurer  parmi  ses  membres  : 

Les  capitaines  :  d'Auffrery  ;  de  Borda  ;  chev.  de  Borda  ;  de  Laroque  ; 
de  Montels  et  de  Saint-Just  ; 

Les  lieutenants  :  de  Castanet  ;  Deshous  ;  d'Hardivilliers  ;  Laffitte  de 
Pelleport  et  Vandœuvre; 

Les  sous- lieutenants  :  Bonnefoux  ;  Cyvoct  ;  Duboys  de  la  Motte  ;  de 
Gevaudan  ;  Lahaye  ;  La  Pujade  ;  Montrond  ;  Perdigau  et  Solage. 

Le  régiment  de  Vivarais  devint,  en  1791,  le  71e  régiment  d'infanterie, 
et  en  1794,  ses  deux  bataillons  servirent  de  noyau  aux  131°  et  132e  demi- 
brigades. 

(1)  Tout  en  remerciant  ici  la  haute  personnalité  écossaise  qui  a  bien 
voulu  me  signaler  une  partie  de  ces  noms,  je  regrette  que  des  raisons 
de  famille  ou  des  raisons  de  parti  l'aient  empêché  de  me  fournir  la  liste 
entière.  Il  faut  espérer  que,  par  la  suite,  mon  travail  sera  complété  et 
que  l'on  publiera  l'intégralité  des  documents  sur  le  rôle  de  Charles- 
Edouard  en  Ecosse  en  1745  et  1746,  et  en  France  en  1748. 


494  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Il  ne  me  paraît  pas  que  la  L.\  du  régiment  de  Vivarais  se  soit 
reformée  en  1801. 

DAUPHIN-DRAGON 

PARFAITE  UNION 

C'est  également  sous  le  titre  distinctif  de  Parfaite  Union  que,  le  5  mai 
1760,  fut  constituée  la  L.\  de  Dauphin-Dragon.  La  grande  L.\  renouvela 
ses  constitutions,  le  29  août  1772,  et  le  G.-.  O.-.  le  29  février  1776. 

Avant  1771,  figurent  parmi  ses  membres  :  le  colonel  comte  de  Canisy- 
d'Hervilly  ;  le  lieutenant-colonel  du  Bâtiment  ;  le  major  Buzelet  et  les 
capitaines  Marion    et  chev.  de  Tudert. 

En  1776,  cette  L.\  ne  comprenait  pas  moins  de  30  membres.  A  cette 
époque,  son  vén.-.  était  le  capitaine  chevalier  de  Champeaux,  chevalier 
de  Saint-Louis.  Son  secrétaire  était  Kalekgraler,  quartier-maître  tréso- 
rier. Ces  officiers  occupaient  encore  ces  fonctions  en  1785. 

En  1788,  le  vén.*.  était  le  lieutenant-colonel  comte  de  Rocheret,  bri- 
gadier des  armées  du  roi,  et  le  secrétaire  Wirion,  quartier-maître 
trésorier. 

En  1789,  le  vén.*.  était  le  lieutenant  Desvieux,  et  le  secrétaire  de  la 
Hais,  quartier-maître  trésorier. 

Depuis  1788,  le  député  au  G.*.  O .*.  était  le  capitaine  de  dragons 
Lambert,  demeurant  au  Vieux  Louvre. 

Parmi  ses  membres  de  1779  à  1790  :  le  capitaine  de  Beaupuy  ;  les 
lieutenants  de  Bermont  et  de  Rigault  ;  les  sous  lieutenants  Abzac, 
Baillas,  Devieux  et  Lucet. 

En  1791,  Dauphin-Dragon  fut  dénommé  7e  régiment  de  dragons.  Lors 
du  réveil  des  L.\,  en  1801,  il  ne  me  paraît  pas  que  celle  de  ce  régiment 
ait  été  tirée  de  son  sommeil. 


HAINAULT 

MONTMORENCY-LUXEMBOURG 
SIGISMOND-LUXEMBOURG 

La  L.-.  du  régiment  de  Hainaut  fut,  avant  1771,  laplus  importante  L.\ 
mil.*,  de  France.  C'est  avec  des  éléments  sortis  de  son  sein,  et  avecle  con- 
cours de  laL.-.  des  Mousquetaires  et  de  celle  des  Amis  Réunis,  que  fut 
formé  le  G.".  O.'.  Son  vén.-.,  le  duc  de  Luxembourg,  fut  le  véritable 
artisan  de  cette  organisation. 

Cette  L.\  fut  constituée  par  la  G.-.  L.\  de  France  le  1er  juin  1762, 
sous  le  titre  de  Montmorency-Luxembourg.  Ses  pouvoirs  furent  renou- 
velés le  13  décembre  1773,  par  le  G.-.  O.'.  Au  moment  de  sa  création, 
son  colonel,  le  marquis  de  Montmorency-Royan,  en  était  le  vén.-.,  et 
parmi  ses  membres  figuraient  le  lieutenant-colonel  de  Saint-Eloy  ;  le 
major  de  Saporta  ;  le  commandant  de  Gand  et  les  capitaines  chevalier 
de  Chollet  et  de  Saulnier. 

En  1772,  elle  se  composait,  d'après  son  tableau,  de  :  vén.'.,  Anne- 
Charles  Sigismond  de  Montmorency-Luxembourg  et  Châtillon-sur-Loing, 
adm.gén.  de  l'ordre  ;  lor  surv.'.,  Anne  Paul-Emmanuel  de  Montmorency, 


LOGES    MILITAIRES  Ie.).") 

chev.  de  Luxembourg,  (ils  du  précédent,  cap.  g.  des  corps,  m,  de  cunip 
de  cavalerie  ;  2*  surv.v,  le  Prince  de  Boh  m-Guémcné,  cap.  coin.  comp. 
gens  d'armes  du  roi,  m.  de  camp  caval.  ;  orateur,  Paul-Etienne-Auguste  de 
Beauvilliers,  comte  de  Buzançois,  G.  d'Espagne  de  lrc  cl.,  col.inf.;  secret.-., 
duc  de  Lauzun,  cap  inf.  corp.  g.  fr.,  puis  duc  de  Biron  ;  trésorier, 
Pierre- Catherine  Giraud-Dèstour,  chev.  Saint-Louis,  lieut.-col.  inf.  ; 
maître  d'hôtel,  Adrien-Jean-Charles,  chev.  de  Launey,  col.  inf.,  off. 
maj.  garde  française,  frère  du  gouverneur  de  la  Bastille,  m.*,  cérém."., 
Louis  J.-B.  de  Seignelay,  brig.  armées  du  roi,  col.  rég.  Champagne  ; 
G.  expert,  marquis  de  Fitz-James,  brig.  arm.  du  roi,  col.  inf.  ; 
membres  :  vicomte  d'Adhemar  ;  marquis  de  Barbantane  ;  S.  A.  R.  de 
Bourbon,  prince  de  Coudé;  comte  de  Chabot  ;  duc  de  Coigny  ;  de  la 
Faye  ;  chev.  de  Durfort  ;  duc  de  Fronsac  ;  marquis  de  Gamaches  ; 
marquis  de  Laval  ;  prince  de  Ligne  ;  duc  de  la  Trémouille  ;  prince 
de  Montbazon  ;  prince  de  Nassau  ;  comte  d'Osmont  ;  comte  d  Ouessant  ; 
comte  de  Périgny  ;  prince  Pignatelli  ;  comte  de  Bouault  ;  vicomte  de 
Rouault  ;  Varenne  de  Béost. 

En  1773,  son  cadre  d'officiers  était  modifié  de  la  façon  suivante  :  vén. , 
Anne-Ch.  Sigis.  de  Montmorency,  duc  de  Luxembourg  ;  oral.*.,,  comte 
de  Buzançois  ;  2e  surv.'.,  prince  de  Rohan-Guémené  ;  1er  surv. ".,  Anne- 
Paul  Emmanuel  de  Montmorency,  chev.  de  Luxembourg;  secret.,  duc 
de  Lauzun  ;  m.',  cérém.'.,  marquis  de  Seignelay;  m.-,  d'hôtel,  chev.  de 
Launej-  ;  trésorier,  Giraud-Destours  ;  grand  expert,  marquis  de  Fitz- 
James  ;  membres  :  duc  de  la  Trémouille  ;  vicomte  de  Rouault  ;  comte 
de  Périgny  ;  Varenne  de  Béost. 

En  1775,  nous  voyons  figurer  une  nouvelle  recrue,  le  chev.  de  Jer- 
ningham. 

En  1776,  elle  comprenait  36  membres.  Son  vén.*.,  jusqu'en  1789,  fut 
le  capitaine  des  grenadiers  de  la  Faye  ;  son  secrétaire,  le  lieutenant 
Barbier  ;  son  député  au  G.-.  Gv.  le  comte  de  Buzançois,  colonel  d'in- 
fanterie, demeurant  rue  Saint-Dominique. 

De  1779  à  1790,  figurent  parmi  ses  nouveaux  membres  : 

Les  capitaines  de  Barre,  de  Borassol,  Deschamps,  de  Saviny  et  de 
Valleron  ; 

Les  lieutenants  de  Clery,  Donnadieu,  du  Coudray,  Icard  et  deValorjr; 
les  sous-lieutenants  André,  Bouché,  chev.  d'Icard,  Lafon,  Perier  et 
Vittaret. 

Depuis  le  1er  juin  1763,  à  la  L.\  des  officiers  la  G.'.  L.*.  avait  adjoint 
une  L.'.  de  bas-officiers,  sous  le  titre  de  Sigismond-Luxembourg.  Les 
constitutions  de  cette  L.*.  furent  renouvelées  par  le  G.'.  Ov.  le  13  dé- 
cembre 1773.  Moins  prospère  que  la  L.*.  des  officiers,  cette  L.*.  en  1776 
ne  comprenait  que  11  membres.  Son  vén.*.  jusqu'en  1785  fut  le  sergent 
de  la  Faille  et  son  député  le  comte  de  Buzançois. 

En  1788  et  1789,  elle  eut  pour  vén.  .  le  capitaine  chev.  de  Goussen- 
court,  pour  secrétaire  le  sergent  Auguste  Baude,  et  pour  député  au  G.*. 
O.*.  Mercier,  négociant. 

En  1791,  le  régiment  de  Hainaut  devint  le  50e  d'infanterie,  et  en  1794 
il  contribua  à  la  formation  des  99="  et  100e  demi-brigades. 

Le  17  juillet  1804,  le  50e  d'infanterie,  qui  n'avait  du  reste  aucun  lien  de 
sang  avec  la  régiment  de  Hainaut,  fit  constituer  sa  L.'.  sous  le  litre  de  ; 
les  Enfants  de  Bellone. 


49G  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

LOGE  MILITAIRE,  SANS  ORIENT  FIXE 
SAINT-JEAN  DE  LA  GLOIRE 

Cette  L.\  fut  constituée  le  15  août  1762  eu  faveur  du  chev.  de  Thélins, 
par  une  puissance  inconnue.  Elle  figure  à  tort  parmi  les  L.\  lyonnaises 
parce  qu'elle  fonctionna  longtemps  à  Lyon,  où  elle  vint  s'établir  en  1765. 
En  fait  celte  loge  ambulante  était  à  l'Orient  géométrique  terrestre  (longi- 
tude et  latitude)  de  l'endroit  où  avait  lieu  la  tenue.  Ses  vén.\  furent  : 
le  chev.  de  Thélins  (1762);  de  Mont-Verdun  (1763);  de  Magny    (1765-7  . 

Le  29  juin  1785,  l'abbé  Comte  d'Apremont,  chanoine  et  comte  de  Lyon, 
fut  exclu  de  cette  loge  à  la  suite  de  propos  irrévérencieux  tenus  par  lui 
contre  la  f.'.-m.\ 

Le  17  janvier  1766,  Bacon  de  la  Chevalerie,  orateur  de  la  L.\,  pro- 
nonça l'oraison  funèbre  d'un  membre  de  cette  L.*.,  Bayde  Thélins,  cap. 
de  dragons  au  rég.  d'Autichamp. 

Le  17  juin  1767,  le  vén.*.  Magny  prêta  son  obligation  entre  les  mains 
du  Président  de  la  M.'.  L.\  de  Lyon. 

On  ne  trouve  pas  traces  de  cette  L.\  après  cette  époque. 

SAINTONGE 

SAINT-CHARLES    DES   AMIS    RÉUNIS 

La  L.\  du  régiment  de  Saintonge  fut  constituée  par  la  G.".  L.*.  le 
2  juin  1763,  sous  le  titre  de   Saint-Charles  des  Amis  Réunis. 

Ses  pouvoirs  furent  renouvelés  le  10  décembre  1772  par  le  même 
pouvoir,  et  le 4  avril  1774'par  le  G.*.  O.'. 

De  l'époque  de  sa  fondation,  nous  ne  connaissons  qu'un  de  ses  membres, 
son  colonel,  le  chevalier  de  Bérenger,  qui  en  était  probablement  le  vén.1. 

En  1776,  elle  se  composait  de  25  membres.  Son  vén.-.  était  le  capitaine 
de  Berlaymont,  son  secrétaire  était  le  sergent-major  Dupont,  et  son 
député  (jusqu'en  1789)  l'abbé  Pingre,  de  l'abbaye  de  Sainte-Geneviève. 
Parmi  ses  membres  :  Labouisse,    Gardel  et  Weide. 

De  1777  à  1785,  son  vén. '.  est  le  sergent-major  Gardel.  En  1788,  il  est  rem- 
placé par  le  lieutenant  de  Reste,  et  en  1789,  par  le  porte  drapeau  Duperrier. 

De  1779  à  1790,  figurent  parmi  ses  membres  : 

Les  capitaines  Desbières  ;  de  Courvol  ;  Dejames  ;  Dolomieu  ;  de 
Marguerit  ;  du  Rozel  et  Villefranche  ; 

Les  lieutenants  Champtiers  ;  Denis  ;  Desprès  ;  Dejames  et  Tassin  ; 

Les  sous-lieutenants  Cabassolles  ;  Ducluzeau  ;  Duponceau  ;  Dupont  ; 
Lafferre  et  Lecomte. 

En  1791,  le  régiment  de  Saintonge  devint  le  82e  régiment  d'infanterie 
et  en  1794  participa  à  la  formation  des  151*  et  152e  demi-brigades. 

Par  la  suite,  le  82e  ne  semble  pas  avoir  eu  de  L.*. 

MARINE 

LA  MARINE 

LaL.'.  du  régiment  de  la  Marine  fut  constituée  par  la  G.'.  L.".  le 
20  avril  1764  et  reconstituée  par  le  G.'.  O.'.  le  8  juillet  1784. 


LOGES    MILITAIRES  497 

Elle  avait  pour  titre  :  la  Marine 

Le»  renseignements  sont  peu  nombreux  sur  son  compte.  Les  procès- 
verbaux  du  G.\  0.\  ne  sont  pas  suffisamment  clairs  pour  que  je  puisse 
affirmer  que  les  ff.\  (iucheneu,  Bolle,  d'Orvillier,  de  Souville  et  de 
Martinet,  qui  demandèrent  des  certificats  en  1775,  appartenaient  à  cette 
L.\ 

J'ai  constaté  seulement  qu'en  1785,  cette  L.\  avait  pour  vén.\  le  capi- 
taine de  vaisseau  Dorsin,  pour  secrétaire  le  commissaire  des  ports  Bru- 
jas,  et  pour  député  au  G*.  O.-.  Claude-François  de  Paule  Boucault, 
grand  maître  des  eaux  et  forêts. 

ROYAL-ROUSSILLON 

UNION  FRATERNELLE 

C  est  le  21  mai  1765  que  l'Union  fraternelle  fut  constituée  par  la 
G.'.  L.\  à  10.  .  du  Royal-Roussillon.  Ses  titres,  renouvelés  parle  même 
pouvoir  le  28  février  1773,  furent  reconnus  par  le  G.".  O.'.  le  16  novem- 
bre 1775. 

Nous  ne  savons  rien  de  sa  composition  avant  1775.  A  cette  date,  deux 
de  ses  membres  demandent  des  certificats  au  G.'.  O.*.,  les  ff.\  Bonne- 
ville  et  Perylhe. 

En  1776,  elle  se  compose  de  20  membres  ;  Soulier,  un  de  ses  officiers, 
est  vén...  le  sergent  Launay  est  secrétaire,  et  Leblanc,  député  au  G.'.  O.'. 

L'année  suivante,  le  lieutenant  Damey  de  Saint-Bresson  est  vén.'. 
et  le  chirurgien  major  Imbert,  secrétaire. 

En  1785,  le  vén*.  est  le  capitaine  Despret,  le  secrétaire,  le  chirurgien- 
major  Gaujeart,  et  le  député,  Hurel,  ancien  payeur  des  renies.  Ce  dernier 
reste  en  fonction  jusqu'en  1790. 

En  1788  et  1789,  le  maréchal  de  camp,  comte  de  Ligniville,  est  vén.*. 
et  le  capitaine  trésorier  Vuillemin,  secrétaire. 

De  1779  à  1790,  nous  relevons  parmi  ses  membres  : 

Les  capitaines  Denneillet,  Rigault  et  Partyet  ; 

Les  lieutenants  Bernier  ;  Herbert  ;  Muzard  et  Polieu  ; 

Les  sous-lieutenants  Bezanne  ;  Daspe  ;  Fayolle  ;  Larivière  et  Livet. 

Royal-Roussillon  devint,  en  1791,  le  54e  régiment  d'infanterie,  et 
forma  en  partie,  en  1794,  les  107e  et  108e  demi-brigades. 

Le  4  juillet  1802,  sous  le  titre  de  Guerriers  généraux,  le  G.'.  O.'. 
constitue  une  L  *.  à  10. *.  du  54e  d'infanterie,  qui  n'avait  pas  de  liens  de 
sang  avec  Royal-Roussillon. 

GÉNIE 

UNION  PARFAITE  DU  CORPS  DU  GÉNIE 

D'après  le  tableau  de  la  G.'.  L.-.  de  France  de  1779,  l'Union  parfaite 
du  corps  du  génie,  à  l'Orient  de  ce  régiment  à  Mézières,  aurait  été  cons- 
tituée le  3  juin  1764,  avec  Bezier  de  Buis  comme  vén.-.  Les  almanachs 
du  G.'.  O*.  ne  font  remonter  sa  constitution  primitive  qu'au  3  juin  1765, 
avec  renouvellement  par  la  G.'.  L.*.  le  29  août  1772,  et  par  le  G.*.  O.*. 
le  11  août  1774. 

LA    FRANC-MACONNERIE.     —   T.    I.  32 


498  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

D'après  un  brevet  de  Rose-Croix  (nom  du  titulaire  effacé)  daté  de 
Mézières,  3  octobre  1775,  à  cette  époque  figuraient  parmi  ses  membres  : 
de  Gangolff  ;  Diebold  ;  baron  de  Reinach  ;  Firman  ;  Pieresne  ;  de 
Grandvilliers  ;  Decou  ;  Devergnes  C.\  S.'.  P.-.  et  R.\  +  ;  Portemps, 
S.  .  D.  .  R.-.+ 

En  1775,  Muraire  de  Favas,  Sol  de  Beauclair  et  de  Neurisse  deman- 
dent des  certificats  au  G.  .  0.\ 

En  1776,  elle  se  compose  de  28  membres  ;  son  vén.\  est  Grandvillers, 
capitaine  au  régiment  suisse  d'Eptingen  et  un  de  ses  officiers,  de  Ver- 
gennes,  est  secrétaire.  Le  député  est  Bazin,  médecin   du   duc  d'Orléans. 

En  1777,  le  vén.\  est  Muraire  de  Favas,  et  le  secrétaire  Bressaut,  l'un 
et  l'autre  officiers  au  corps  du  génie. 

De  1785  àl790,  le  vén.  est  Perdigan,  cbev.\  de  Saint-Louis,  chef  de 
brigade  au  corps  d'artillerie. 

On  peut  constater  que,  tout  au  moins  dans  cette  L.\,  des  officiers  étran- 
gers au  régiment  qui  orientait  la  L.\  pouvaient  non  seulement  en  faire 
partie,  mais  encore  présider  à  ses  travaux. 


MOUSQUETAIRES 

SAINT-ALEXANDRE 

L'historique  de  la  L.\  de  la  lre  compagnie  des  mousquetaires  est  com- 
pliqué et  obscur,  et  cela  est  d'autant  plus  regrettable,  que  le  rôle  de 
cette  L.  .  a  été  très  important. 

Elle  avait  pour  titre  Saint-Alexandre,  et  aurait  été  constituée  par  un 
pouvoir  que  j'ignore  le  14  juin  1766,  puis  suspendue  la  môme  année.  La 
G.".  L.*.  la  reconstitua  le  18  mai  1772,  ainsi  qu'il  résulte  de  la  patente 
suivante. 

A    LA    GLOIRE    DU    GRAND    ARCHITECTE    DE    L'UNIVERS 
ET   A    LA   PROPAGATION    DE    l'aRT    ROYAL 

D'un  lieu  très  régulier,  très  fort  et  très  éclairé 
Où  régnent  le  Silence,  la  Paix  et  l'Egalité 
A  tous  les  chers  frères,   maîtres  des  L.'.  régulières 
Répandues  sur  la  surface  de  la  terre. 

Salut,  Force,  Union. 

Sous  le  bon  plaisir  du  Très  Respectable  Grand  Maître  de  toutes  les 
L.*.  régulières  de  France, 

Notre  très  cher  et  très  illustre  Frère 
S.  A.  S.  Louis-Philippe-Joseph  d'Orléans,    duc  de  Chartres,  prince    du 
sang. 

Nous  son  substitut  général,  vén.-.  maîtres  et  officiers  dignitaires  de  la 
G.'.  L.*.  de  France,  séante  à  l'Orient  de  Paris,  régulièrement  assemblés 
entre  l'équerre  et  le  compas,  déclarons  à  tous  les  maçons  éclairés  que, 
sur  la  requête  à  nous  présentée  par  les  frères  y  dénommés,  résidens  en 
la  ville  de  Paris  tendant  à  ce  qu'il  nous  plut  leur  accorder  des  constitu- 
tions pour    la  fondation  à   perpétuité  d'une  L.\  régulière,   sous  le  titre 


LOGES    MILITAIRES  499 

distinctif  de  Saint-Alexandre  L.\  militaire,  à  la  charge  par  eux  d'obser- 
ver et  faire  observer  tous  les  règlements  généraux  et  particuliers  faits  et 
a  faire  par  notre  Respectable  G.*.  L.*.  Vu  ladite  requête,  nous  avons 
par  ces  présentes,  érigé  et  constitué,  érigeons  et  constituons  dans  la 
dite  ville  de  Paris  une  L.\  régulière  sous  le  titre  distinctif  de  L.".  mili- 
taire de  Saint-Alexandre,  pour  y  exécuter  les  travaux  de  l'Art  Royal, 
conformément  aux  statuts  et  réglemens  de  notre  dite  G.*.  L.'.,  ratiffiant 
et  approuvant  autant  que  besoin  seroit  les  travaux  précédemment  par 
elle  faits  de  bonne  foy,  établissons  au  gouvernement  de  la  dite  L.\  le 
cher  frère  baron  Desclauzel,  pour  vén.\  maître,  le  cher  frère  Paul  Dou- 
tions pour  premier  surveillant  et  le  cher  frère  Jos.  Jac.  Dalesme  pour 
second  surveillant,  lesquels  trois  officiers  avec  les  autres  membres, 
feront  ensemble  et  par  voie  de  scrutin,  la  nomination  des  autres 
officiers,  et  de  suivre  et  exécuter,  faire  suivre  et  exécuter  les  statuts  et 
réglemens  de  notre  dite  G.'.  L.\  dont  nous  leur  avons  fait  remettre  un 
exemplaire  par  notre  secrétaire  général.  Si  mandons  à  tous  nos  chers 
frères,  maîtres  de  L.*.  et  autres  de  reconnaître  la  susd.  L.*.  de 
Saint-Alexandre  L.'.  militaire  pour  régulière,  de  recevoir  et  accueillir 
comme  bon  frère  tout  porteur  d'un  certificat  d'icelle.  En  foy  de  quoi 
nous  lui  avons  fait  expédier  les  présentes  constitutions  faites  et  données 
au  Grand  Orient  de  Paris,  l'an  de  la  grande  lumière  cinq  mil  sept  cent 
soixante-douze,  le  dix-huitième  jour  du  mois  de  May,  de  nous  signées, 
contresignées  par  notre  Secrétaire  général  et  scellées  et  timbrées  des 
sceaux  et  timbres  de  notre  dite  G.*.  L.-.  par  notre  Grand  Garde  des 
Sceaux  et  Archives  et  contrescellées  des  armes  du  Sérénissime  Grand 
Maître  et  du  V.  F.  Substitut  général  pour  lad.  L.'.  prendre  rang  du 
quatorze  juin  mil  sept  cent  soixante-six,  date  de  ses  constitutions  pri- 
mitives. 

Vu  par  nous  Pair  de  France,  brigadier  des  armées  du  Roy,  Mont- 
morency-Luxembourg adm  gén.  des  LL.*.  rég.  de  France.  Lafin, 
Puisieux,  Baudson,  J.  P.  Le  Lorrain,  Huit,  Bruneteau,  Or.\  ;  Lexcom- 
bart;  Guillot,  Très.*.  ;  Labady  ;  Duret,  G.\  des  Sc.\  Timb.*.  et  Archives  ; 
Daubertin,  secret,  gén. 

(En  bas  du  brevet  un  pont  avec  les  trois  lettres  L.  D.  P.  (Lilia  destrue 
pedibus).  Flottant   au  fil  de  l'eau,  une  tête,  un  sceptre  et  une  couronne.) 

Bien  que  les  compagnies  de  mousquetaires  existassent  encore  en  1772, 
la  L.*.  Saint-Alexandre  ne  fut  pas  constituée  à  l'Orient  d'une  des  deux 
compagnies,  la  patente  ne  stipulant  aucun  Orient. 

Lorsque  le  G  *.  O.*.  renouvela  ses  titres,  le  2  juillet  1774,  en  l'auto- 
risant à  prendre  rang  du  14  juin  1766,  il  est  probable  qu'il  ne  désigna 
pas  d'Orient  fixe. 

M.  Magon,  dans  un  intéressant  travail  sur  la  franc-maçonnerie  dans 
l'Ardèche  (p.  44),  nous  donne  d'après  un  brevet  un  tableau  probablement 
complet  de  la  L.*.  en  1766.  Elle  procédait  alors  à  ses  travaux  à  Ville- 
neuve-de-Berg. 

C'est  ce  tableau  que  nous  reproduisons. 

Vén.\  ad  uitam  :  Desclauzel,  Alexandre-Henri,  mousquetaire,  G.  Ecos, 
chev.\  d'O.*.  élu  sup.  R.\  +  ;  1er  surv.*.  :  de  Tavernol,  Simon-Pierre, 
baron  de  Barry,  G.*.  M.*.  Ecossais,  m.',  de  la  L.*.  Saint-Jean  des  Amis 
Réunis  de  Toulouse  ;  2e  surv.*.  :  de  Laforest,  François-Guillaume-Bar- 
thelémy,  prince  chev.\  d'O.-.  de  lad.  L.\  de  Toulouse  ;  orat.\  :  Guiton, 


500  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Charles-François,  maître  particulier  des  eaux  et  forêts,  m.*,  de  la  L.\ 
Amitié  de  Toulouse,  affilié  le  9  sept.  1766,  reçu  parfait  le  2  oct.  ;  secré- 
taire :  Delière,  Joachim,  avocat,  m  \  de  la  L  '.  Saint- Jean  d'Ecosse  de 
Nîmes,  affilié  le  9  septembre  1766  ;  trésorier  :  de  Malmazet,  Jean-André, 
srde  Saint-Andéol,  viguier  royal,  réhab  le  9  sept.  1766,  reçu  m.',  le  16, 
parfait  le 2  oct.  ;  1er  cons.  expert  :  Dubois  de  Saint-Jean,  Marc,  M.',  de 
la  L.'.  Saint-Jean  d'Avignon,  affilié  le  16  sept.  1766,  reçu  parfait  ledit 
jour,  élu  le  2  octobre  ;  2°  expert  :  de  Gruber,  Georges,  allemand,  off. 
leg.  Soubise,  comp.  de  milit.  cid.  à  Givet,  affilié  le  31  décembre  1766, 
reçu  m.*,  le  13  janvier  1767,  parfait  le  28  mars  1767  ;  subst. 
secret  :  de  Bastide,  Louis-Joseph,  avocat  parlem.,  m.\  de  la  L.*. 
de  l'Amitié  de  Toulouse,  affilié  le  2  octobre  1766,  reçu  parfait  ledit 
jour  ;  Fr.\  Terrible  :  Perrotin  de  Marcillac,  Joseph- Jacques,  off. 
milit.  reçu  le  16  sept.  1766,  maître  le  31  décembre  1766  ;  maîtres  comp. 
appr.  :  Poullain  de  Roissy,  Louis-René,  chev.Jieut.  Conty  infant.,  reçu  le 
2  oct.  1766,  m.',  le  19  ;  Peuchenier,  François  Simon,  Dr  en  médecine  ; 
de  Larrivière,  Joseph,  chev.,  off.  de  la  légion  de  Soubise  ;  Soleau,  Jean- 
Jullien,  off.  lég.  Soubise  ;  de  Malmazet  de  Saint  Andéol,  Joseph-Guil- 
laume, off.  rég.  Soissonnais  ;  le  Tourneur,  Jean- Jacques,  cap.  aidemaj., 
lég-  Soubise  ;  Dubois  Maurin,  Pierre,  avoc.  au  Parlem.  ;  f.\  servant  : 
Louis  Tortillac,  perruquier. 

D'autre  part,  lorsque  le  duc  de  Luxembourg,  Savalète  de  Lange  et 
Bacon  de  la  Chevalerie  parviennent  à  réconcilier  la  L.'.  Saint- Alexandre 
avec  celle  des  Amis  Réunis,  les  frères  des  deux  L.*.  se  réunirent  le 
21  juin  1773,  dans  le  local  des  Amis  Réunis,  et  nous  voyons  signer  au 
procès-verbal  le  vén.\  Desclauzel  et  les  frères  Waldahong,  Flaxenville, 
de  Barres,  Moncrif,  Monceaux,  D'ounous,  Detaffin,  de  la  Fontenelle, 
Balinghen,  de  Lorière,  chevalier  de  Lorière,  Rossanne,  Dyel  de  Tinqui- 
ville,  de  Madiane,  de  Stone,  des  Isnards,  Lanery,  Beauval,  Darquiau  (?), 
de  Gonard,  de  Chaulnes,  Dugon,  Le  Langrenière,  chevalier  de  Rossane, 
Dulau,  de  Pelissier,  de  Lalour,  Autour,  Radet,  Cahouët  et  P.  R.  Gaudrez. 

Cette  loge  disparut  probablement  vers  1780. 


TOUL 
HENRI  IV 
UNION  puis  SULLY 

Le  3  août  1766,  deux  L.'.  furent  constituées  à  l'Orient  du  régiment  de 
Toul-artillerie  ;  la  première, sous  le  titre  de  Henri  IV,  était  destinée  aux 
officiers;  la  seconde,  l'Union,  était  réservée  aux  bas-officiers. 

Lorsque  le  G.'.  O.'.  reconstitua  la  première  de  ces  L.*.  le  13  décembre 
1776,  il  l'autorisa  à  prendre  rang  du  25  novembre  précédent,  tout  en  rap- 
pelant ses  travaux  de  1766.  En  1777,  elle  comptait  46  membres.  Je  n'ai  pu 
relever  que  quelques  noms  des  membres  de  cette    importante  L.'. 

De  1777  à  1790,  elle  eut  pour  vén.\  le  chef  de  brigade  de  Tournay, 
pour  secrétaire  le  lieutenant  de  Saussin  et  pour  député  au  G".  O.'.  le 
Dr  Tissot. 

La  L.v  l'Union  subit  à  peu  près  les  mêmes  vicissitudes  que  Henri  IV. 
Le  G.'.  O.'.  en  la  reconstituant,  le  15  mai  1777,  ne  lui  donna  rang  qu'à 
partir  du  7  avril  précédent  et  sous    le  titre    de  Sully.  Pendant  toute    la 


LOGES    MILITAIRES  501 

durée  de  ses  travaux,  cette  L  \  eut  pour  député  au  G*.  OV;  le  marquis 
d'Havrincourt,  maréchal  de  camp  et  commandant  de  Royal  Etranger 
Cavalerie  ;  et  pour  secrétaire  le  sergent-major  Jean.  Son  vén.\  en  1777 
était  le  sergent  Compagnon,  et  de  1785  à  1789  le  chevalier  de  Malavillcr, 
officier  au  régiment.  En  1777,  cette  L.'.  avait  23  membres.  En  1785,  elle 
n'en  avait  que  17,  sans  compter  son  vén.*.  et  son  secrétaire  :  Descours, 
Cauterac,  Carbonnel,  Dupuy,  Poissonnier  des  Perrières,  Montlezun, 
Masson,  Rousseau,  Mathieu,  Montnu/.on,  Fontcrouget,  Ruffy,  Cabas, 
Pelletier.  Lallcmand,  Salvat  et  Labadie. 

En  1791,  le  régiment  devint  le  7*  d'artillerie.  Ces  L.'.  ne  semblent  pas 
avoir  été  reconstituées  après  la  Révolution. 

FLANDRE 

PARFAITE  UNION 

Cette  L.'.fut  constituée  par  la  G.\L.\le  l*r  octobre  1766  et  renouvelée 
parle  G.\0.\le2  mai  1776.  Avant  1771,  elle  compta  parmi  ses  membres  : 
le  colonel  comte  de  Rougé  (1761-1767,  ;  le  colonel  de  Croy,  duc  d'Havre 
(1767-1784)  ;  le  lieutenant-colonel  de  la  Blachette  ;  les  aides-majors  de 
Ravel,  de  Mayeur,  de  Loras  et  de  Montpellier  ;  les  sous-aides-majors  de 
Capdeville,  Chevalier  de  Sagarigue,  de  Berrey,  de  Montplaisir,  le 
quartier-maître  Thollon  et  les  capitaines  de  la  Roche,  Mazade,  Durbau, 
de  Veaux  et  du  Sauzet. 

En  1775,  elle  comptait  en  plus  :  Damoiseau  de  Paysac,  d'Haindel, 
Massé,  de  la  Fite  de  Courteil,  de  Villiers  d'Autertre,  de  Serein,  Duménil, 
Turfa,  Desmartin,  Descorbillac,  de  Belliers,  de  Signerand  d'Ercé,  che- 
valier de  Vienne,  de  Fournas,  de  Cingal,  de  Caudaux,  Duvallon  de 
Beaumont,  Dosteing,  du  Quemmelet,  de  Christonde  Muissement  et  Loquet. 

En  1776,  elle  n'a  plus  que  26  membres,  et  de  cette  époque  à  1790 
elle  a  pour  vén.*.  le  capitaine  Massé,  le  lieutenant  de  Brem  (capitaine 
en  1784)  pour  secrétaire  et  pour  député  au  G.*.   O.'.  le  savant  Lalande. 

De  1779  à  1790,  on  voit  figurer  comme  nouveaux  membres  : 

Les  capitaines  Bonneval,  Habas,  Formigier  et  Ramé  ; 

Les  lieutenants  Gérard,  Joucla-Lenoir  et  Lenoir. 

Les  sous-lieutenants  Joubert,  Charmoille,  Cantineau,  Quincarnon, 
Moucheron,  Laurent  et  Desbancs. 

De  1784  à  1790,  le  régiment  de  Flandre  eut  pour  colonel  Thibault, 
comte  de  Lusignan,  qui  joua  un  rôle  important  dans  la  F.'.  M.'. 

Nous  retrouverons  le  régiment  de  Flandre  à  Versailles  pendant  les 
journées  des  5  et  6  octobre,  où  son  rôle  fut  plus  que  singulier.  Accusé 
faussement  d'avoir,  lors  du  banquet  du  1er  octobre,  foulé  aux  pieds  la 
cocarde  tricolore,  le  régiment  ne  fit  rien  pour  protéger  le  château,  et 
son  attitude  fut  plutôt  favorable  aux  émeutiers. 

En  1791,  le  régiment  de  Flandre  devint  le  19e  d'infanterie  et  en  1794 
son  second  bataillon  contribua  à  la  formation  de  la  38e  demi-brigade. 

LA  SARRE 
LA  PURETÉ 

Le  régiment  de  la  Sarre  fit  constituer  sa  L.*.  sous  le  titre  de  Pureté 
par  la  G*.  L.'.,  le  15  novembre  1767.  Le  G.*.  O.*.  renouvela  ses  consti- 
tutions le  6  avril  1775. 


502  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

En  1775,  figurent  parmi  ses  membres  :  Merleval,  le  comte  de  Bry, 
Monteissier,  Courton  de  Cissey  et  Magne. 

En  1776,  elle  a  49  membres  :  son  vén.*.  est  le  lieutenant  Vernhes  et 
son  secrétaire  le  porte-drapeau  de  Solme. 

L'année  suivante,  le  lieutenant  de  Bertrin  est  vén.'.  et  Vernhes, 
secrétaire. 

De  1785  à  1789,  le  capitaine  en  second  de  Merleval  est  vén..  et  le  capi- 
taine de  Solme,  secrétaire. 

De  1776  à  1790,  cette  L.\  avait  eu  pour  député  au  G.*.  0.\  le  comte 
de  Saisseval,  capitaine  d'Orléans-infanterie ,  officier  d'honneur  du 
G.  .  0.\ 

De  1779  à  1790,  figurent  parmi  ses  membres  : 

Les  capitaines  Dulac,  Duplessis  et  Mehée  : 

Le  quartier-maître  André  ; 

Les  lieutenants  Baillet,  Calonne,  Dalidou,  d'Aubarède,  Lamothe  et 
Lessart  ; 

Les  sous-lieutenants  Baillet,  Descafres,  Jaquemart  et  Le  Brun. 

En  1791,  la  Sarre  devint  le  51e  d'infanterie  et  en  1794  il  contribua  à 
former  les  101e  et  102"  demi-brigades. 

Bien  que  les  listes  du  G.'.  O.'.  ne  mentionnent  pas  de  L.'.  au  51e,  j'ai 
trouvé  un  cachet  de  l'époque  impériale  avec  la  mention  suivante  :  L.'. 
des  Amis  Réunis  à  l'O.'.  du  51e  régiment. 

AUVERGNE 

CONCORDE 

La  L.\  du  régiment  d'Auvergne  fut  constituée  le  1er  juin  1769.  Ses 
titres  furent  renouvelés  par  la  G.\  L.*.  le  12  mars  1772,  et  par  le 
G.".  O.*.  le  20  juillet  1775.  Nous  n'avons  trouvé  aucune  trace  du  tableau 
de  ses  fondateurs. 

En  1775,  deux  de  ses  membres,  Chaumont  et  Rault  de  Ramsault, 
demandent  des  certificats  au  G.*.  O.'.  L'année  suivante,  la  L  .  ne  com- 
prenait pas  moins  de  27  membres.  Le  chevalier  de  Blaire,  capitaine  au 
régiment,  en  était  le  vén.'.  ;  son  secrétaire  était  le  lieutenant  chevalier 
de  Bordenave. 

En  1788  et  1789,  le  capitaine  de  Tressan  était  vén.*.,  Chardor  secré- 
taire, et  Sedillot  de  Persieux,  chirurgien  de  la  duchesse  de  Bourbon, 
député  au  G.*.  O.". 

De  1779  à  1792,  figurent  parmi  ses  membres  :  le  vicomte  de  Laval> 
colonel  ;  le  marquis  de  Lameth,  colonel  en  second  ;  le  major  Menou  ; 
les  capitaines  Chaffroy,  Chambarlhac,  Desforets,  Lajante  et  Vanembras  ; 
les  lieutenants  Barville,  Beaumont,  Gohin  et  Richard  ;  les  sous-lieu- 
tenants Léonard  Bord,  Darçon,  Dubouquet,  Chamouroux,  Bickler, 
Magny,  Prustet  et  Saint-Vincent  ;  les  sous-officiers  Chapotot,  Déjardin, 
Desplanches,  Maréchal,  Masson,  Miné,  Simon,  Sollier,  Vellon. 

En  1791,  le  régiment  d'Auvergne  devint  le  17e  d'infanterie,  et  en  1794 
son  second  bataillon  servit  de  noj'au  à  la  34e  demi-brigade. 

Le  5  décembre  1802,  la  Concorde  sortit  de  son  sommeil.  La  L.*.  fut 
reconstituée  à  l'O.".  du  17e  d'infanterie,  sous  le  titre  d  Emules  d'Assas. 
Son  vén.'.  fut  un  ancien  sergent  du  régiment  d'Auvergne,  le  quartier- 
maître  Sollier. 


LOGES   MILITAIRES  503 

Le  17e  avait  du  reste  des  liens  de  sang  avec  le  régiment  du  chevalier 
d'Assas  par  le  lrr  bataillon  de  ce  régiment  qui  avait  servi  à  sa  forma- 
tion. 


LYONNAIS 


AMIS  RÉUNIS 
l'A IX  ET  UNION 


Il  y  avait  deux  L.\  au  régiment  de  Lyonnais  : 

Les  Amis  Réunis,  constitués  le  14  juin  1769,  renouvelés  par  la  G.".  L.\ 
en  1772  et  par  le  G-.  O.'.  le  9  décembre  1774,  pour  les  officiers  ; 

La  Paix  et  l'Union,  constituée  le  4  février  1767,  renouvelée  par  la 
G.*.  L.\  en  1772  et  par  le  G.'.  0.\  le  9  décembre  1774  pour  les  sous- 
officiers. 

En  1776,  les  Amis  Réunis  se  composaient  de  41  membres.  Le  vén.*. 
était  le  capitaine  de  Durbois  qui  dirigea  les  travaux  jusqu'en  1790,  le 
secrétaire  était  le  lieutenant  de  la  Leu-Dernal.  De  1777  à  1789,  le  lieu- 
tenant de  Venault  lui  succéda. 

De  1779  à  1790,  figurent  dans  la  L.\  de  ce  régiment  :  le  vicomte 
Le  Veneur,  maréchal  de  camp,  colonel  ;  le  lieutenant-colonel  Du 
Bourg  ;  les  capitaines  Bruslart  et  chevalier  de  Bruslart  ;  le  lieutenant  de 
Clinchamp  et  le  sous-lieutenant  Escoffier. 

En  1776,1a  Paix  et  l'Union  ne  comprenait  que  7  membres.  En  1776  et 
1777,  le  vén.*.  fut  le  sergent  Bonnellet,  et  le  secrétaire  Tafflet,  fourrier. 
Le  député  fut  Delacroix  en  1776  et  de  la  Leu-Dernal  en  1777. 

De  1785  à  1790,  le  vén..  était  le  sergent-major  Epailly,  le  secrétaire 
le  sergent-major  Mallet,  et  le  député  au  G.".  O.'.  le  maître  de  pension 
Heurtant. 

En  1791,  le  régiment  de  Lyonnais  devint  le  27e  d  infanterie  et  en  1794 
collabora  à  la  formation  des  53e  et  54e  demi-brigades.  Le  15  juin  1803, 
le  G.'.O.*.  constitua  les  Amis  à  l'Epreuve  à  l'Orient  du  27e  d'infanterie, 
qui  n'avait  aucun  lien  de  sang  avec  le  régiment  du  Lyonnais. 

GUYENNE 

SAINT-LOUIS 

La  L.*.  Saint-Louis  à  l'O.*.  du  régiment  de  Guyenne  fut  constituée  le 
23  mars  1771.  Ses  titres  furent  renouvelés  par  la  G.'.  L.".  le  12  mai 
1772  et  par  le  G.-.  O.'.  le  31  janvier  1774. 

En  1773  et  1774,  un  de  ses  membres  nommé  Moreau  demande  un  cer- 
tificat au  G.'.  0.\ 

En  1775,  cette  L.'.  ne  comptait  que  15  membres.  Son  vén.".  était  le 
fourrier  Moreau  et  son  secrétaire  le  fourrier  Benard. 

En  1777,  son  vén.'.  était  le  quartier-maître  Jaunet  et  son  secrétaire  le 
chirurgien  Savarin.  De  1785  à  1790,  son  vén.*.  est  le  capitaine  de  Gre- 
nadiers de  la  Prade,  chevalier  de  Saint-Louis,  et  son  secrétaire  le 
quartier-maître  Jaunet.  Elle  eut  comme  député  au  G.*.  O*.  l'abbé 
Pingre  de  1776  àl  785,  et  Delaville,  officier  duG.\  O.'.,  en  1788  et  1789. 

Le  marquis  de  Pardieu,  qui  fut  son  colonel  en  1781,  était  f.\ -m.'., mais 
il  n'est  pas    probable    qu'il    ait    figuré  sur  le  tableau  de  la  L.'.  Saint- 


504  LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN   FRANCE 

Louis,  qui  était  un  atelier  de  bas-ofïiciers.  Parmi  les  officiers  du  régiment, 
je  relève  comme  f. '.  m.\  le  major  Malabiou  de  la  Fargue,  les  capitaines 
Malabiou  et  Dumeny,  les  lieutenants  Dumas  et  Jalabert  et  les  sous-lieu- 
tenants Châtelain,  Darsonval,  Dauzy  et  Vercly. 

Le  régiment  de  Guyenne  devint  en  1791  le  21*  régiment  d'infanterie, 
et  en  1794  son  second  bataillon  contribua  à  la  formation  de  la  42e  demi- 
brigade. 

Le  16  juillet  1804,  le  G.'.O.-.  constitua  la  L.\  l'Espérance  à  l'O.".  du 
21e  d'infanterie.  J'ignore  si  cette  L.".  fut  la  reconstitution  de  l'ancienne 
L.\  de  Saint-Louis  à  l'O.*.  du  régiment  de  Guyenne. 

CHASSEURS    DES  GÉVENNES 

SAINT-LOUIS  DE  L'UNION 

La  L.\  Saint-Louis  de  l'Union  fut  constituée  par  la  G.'.  L.\  de 
France  le  15  juin  1771  à  l'O.*.  de  la  Légion  de  Condé  (anciens  volon- 
taires de  Clermont-Prince,  puis  Légion  de  Clermont-Prince  et  reconsti- 
tuée par  le  G.'.  0.\  le  19  août  1784  à  l'O.".  des  Chasseurs  des  Cévennes. 
(Quatrième  nom  du  régiment.) 

J'ignore  les  noms  de  ses  membres  à  la  fondation  En  1785,  le  vén.". 
était  le  capitaine  Boulanger  Du  Hamel,  chevalier  de  Saint-Louis,  et  le 
député  au  G.*.  O.'.  le  capitaine  d'infanterie  Thoron  de  l'Amée. 

En  1788  et  1789,  le  vén.-.  était  le  colonel  en  second,  comte  d'Evry,  le 
secrétaire  le  lieutenant  Zeller  et,  en  son  absence,  le  quartier-maître 
d'Angelin    Le  député  était  Véron  de  Sérame. 

De  1785  à  1790,  figurent  parmi  ses  membres  :  les  capitaines  chevalier 
de  Comeiras,  d'Elbée  et  Marchais  ;  le  lieutenant  Dostein  et  les  sous- 
lieutenants  Peronnin,  vicomte  de  Cominges.  Martin  et  le  Normand. 

Ce  régiment,  devenu  en  1788  chasseurs  de  Bretagne,  devint  en  1791  le 
10e  chasseurs  à  cheval. 


APPENDICES 


MANUSCRIT     MAÇONNIQHE    ANGLAIS     DE    1693    EN    LA   POSSESSION 
DE    LA    YORK    LODGE    N°   236 

C'est  au  journal  Hiram  (mai  et  juillet  1908)  que  nous  avons 
emprunté  ce  très  curieux  document  maçonnique,  dont  la  traduc- 
tion a  été  faite  par  M.  Teder,  un  des  maçons  les  plus  instruits  sur 
l'histoire  de  l'Ordre  auquel  il  appartient  : 

Parmi  tous  les  manuscrits  anglais,  dit  M.  Teder,  nous  avons  choisi  de 
préférence,  pour  être  traduit  et  publié,  celui  de  1693,  parce  qu'il  prouve 
d'une  manière  incontestable  que,  sous  la  dynastie  protestante  de  Guillaume 
d'Orange,  l'ancienne  maçonnerie  britannique  continua  d'être  parfaitement 
catholique  romaine. 

Il  est  vrai  qu'en  1690  Guillaume  d'Orange,  initié  par  quelques  maçons 
dissidents  et  rebelles,  avait  créé  avec  eux  une  maçonnerie  spéciale  à  son 
usage  particulier,  dont  les  statuts,  publiés  en  1694,  portèrent  ce  qui 
suit  : 

Votre  premier  devoir  est  d'être  fidèles  à  Dieu... 

De  plus,  vous  devez  être  fidèles  sujets  de  votre  Roi  ... 

La  maçonnerie  spéciale  inféodée  au  protestantisme  de  Guillaume 
d'Orange  biffait  simplement  la  sainte  Eglise,  à  laquelle  les  maçons  avaient 
toujours  été  tenus  de  jurer   fidélité. 

Mais  nous  possédons  aussi  la  copie  d'un  manuscrit  de  1704,  établis- 
sant, sans  réplique  possible,  que  la  maçonnerie  ancienne,  sous  le  régime 
protestant  de  la  reine  Anne,  était  toujours  catholique  romaine. 

D'autre  part,  si  nous  nous  reportons  à  la  fondation  de  la  maçonnerie 
moderne  de  1717,  —  laquelle  fut  une  simple  reprise  de  la  maçonnerie 
spéciale  de  Guillaume  d'Orange,  —  nous  voyons  que  les  constitutions 
qu'elle  fit  en  1723  prétendirent,  sous  la  plume  du  clergyman  Anderson, 
que  les  constitutions  d'Edwin,  en  926,  commençaient  par  ces  mots  : 

«  Votre  premier  devoir  est  d'honorer  Dieu  sincèrement  et  d  observer  les 
lois  des  Noachites...  Vous  devez  être  fidèles  à  votre  roi  sans  trahison...  » 

En  retranchant  des  constitutions  d'Edwin  la  question  de  la  sainte 
Eglise,  Anderson  voulait  laisser  croire  aux  naïfs  que  la  maçonnerie  de 
1717  reprenait  la  tradition  de  926. 


506  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Or,  dans  le  manuscrit  de  1693.  dont  nous  donnons  ci-après  la  copie 
traduite,  on  peut  voir,  au  contraire,  que  les  constitutions  d'Edwin  furent 
absolument  catholiques  romaines. 

D'où  il  faut  conclure  que  la  maçonnerie  ancienne  était  toujours,  en 
1717,  catholique  romaine  ;  tandis  que  la  maçonnerie  moderne  de  1717, 
création  aussi  irrégulière  que  celle  de  la  confrérie  à  laquelle  avait  été 
initié  Guillaume  d'Orange,  ne  justifia  sa  venue  qu'en  donnant  un  coup 
de  ciseau  dans  les  constitutions  de  926  et  ne  fut.  en  définitive,  qu'une 
maçonnerie  d'Etat  inféodée  à  la  dynastie  usurpatrice  et  protestante  de 
Georges  Ier. 

Après  ce  préambule,  M.  Teder  passe  au  manuscrit  de  1693  dont  nous 
reproduisons  les  parties  essentielles  : 

Que  la  Puissance  du  Père  Céleste  et  la  Sagesse  de  son  Bienheureux  Fils, 
par  la  bonté  du  Saint-Esprit,  soient  avec  nous  à  notre  commencement  et 
nous  donnent  aussi  la  grâce  de  gouverner  notre  existence  de  manière  que 
nous  puissions  atteindre  les  joies  éternelles. 

Bons  Frères  et  Comjmgnons. 

Notre  intention  est  de  vous  dire  comment  et  de  quelle  façon  le  corps  de  la 
Maçonnerie  a  commencé,  et  ensuite  comment  il  advint  qu'il  fut  connu  de 
puissants  Rois  et  dignes  Princes  et  de  beaucoup  d'autres  hommes  respectables. 
Et  à  ceux  qui  savent  entendre,  nous  proclamons  le  Mandement  qu'il 
appartient  à  tout  vrai  Maçon  de  tenir  en  bonne  foi,  et,  si  vous  y  faites 
attention,  vous  reconnaîtrez  qu'il  est  très  honorable  qu'il  soit  gardé  par  un 
corps  respectable  et  par  une  science  curieuse. 

Il  y  a  sept  sciences  qui  n'en  forment  qu'une  et  qui  sont  comme  il  suit  : 

La  première  est  la  Grammaire,  gui  enseigne  à  prononcer  et  parler  cor- 
rectement ;  la  seconde  est  la  Logique,  qui  enseigne  à  discerner  entre  le  vrai 
et  le  faux  ;  la  troisième  est  la  Rhétorique,  gui  apprend  à  parler  en  termes 
subtils  ;  la  quatrième  est  la  Musique,  gui  enseigne  l'art  du  chant  et  la  voix 
de  la  harpe  et  de  l'orgue  ;  la  cinquième  est  /Arithmétique,  gui  enseigne  à 
calculer  ;  la  sixième  est  la  Géométrie,  gui  enseigne  à  mesurer  la  terre  et 
autres  choses  parmi  lesquelles  se  trouve  la  Maçonnerie  ;  la  septième  est 
/'Astronomie,  gui  enseigne  le  cours  du  soleil,  de  la  lune  et  autres  ornements 
des  deux. 

Ces  sept  sciences  reposent  sur  une  seule  :  la  Géométrie,  gui  enseigne  le 
partage,  la  mesure,  la  pondération  et  le  poids  de  toutes  sortes  de  choses  sur 
la  terre.  Il  n'y  a  pas  un  homme  qui,  attaché  à  telle  ou  telle  sciencet  ne 
travaille  pas  au  moyen  de  quelque  mesure,  et  ceci  est  Géométrie.  Artisans 
et  marchands  dépendent  de  cette  science,  et  spécialement  les  laboureurs  el 
les  cultivateurs,  en  ce  qui  regarde  le  fc/é,  les  semences,  les  vignobles,  les 
plantations,  etc.  Ni  en  Grammaire,  ni  en  Astronomie,  ni  en  aucune  autre 
science,  un  homme  ne  peut  trouver  une  seule  mesure  sans  la  Géométrie,  et 
c'est  pourquoi  cette  science  est  plus  noble  que  toutes  les  autres... 

...Et  après  la  mort  du  roi  David,  le  Temple  qu'il  avait  commencé  fut 
terminé  par  son  fils  Salomon  qui,  pour  cette  fin,  demanda  des  Maçons  dans 
diverses  contrées,  ce  qui  fit  qu'il  eut  80.000  ouvriers  travaillant  la  pierre  : 
ils  furent  nommés  Maçons  et  3.300  d'entre  eux  furent  choisis  et  élus  Maîtres 
et  gouverneurs  des  travaux.  Et  il  y  avait  un  roi  appelé  Hiram  qui.  affec- 
tionnant Salomon,  lui  donna  des  bois  de  charpente  pour  le  travail  :  il  avait 


APPENDICES  .r>()7 

un  fils  appelé  Ay mon,  et  il  était  Matin  en  Géométrie  et  chef-Mattre  de  tous 
les  ouvriers,  ainsi  que  Maître  du  travail  de  sculpture  et  de  toute  autre 
maçonnerie  appartenant  au  Temple  —  comme  cela  est  écrit  dans  le  ve  cha- 
pitre des  Rois,  livre  I. 

Et  ledit  Salomon  confirma  les  Instructions  et  Coutumes  que  son  père 
avait  données  aux  Maçons. 

Et  ceci  fut  l'illustre  Corporation  de  la  maçonnerie  dans  la  terre  d'Israël 
et  la  cité  de  Jérusalem,  et  dans  beaucoup  d'autres  royaumes. 

D'admirables  ouvriers  allèrent  à  l'étranger,  quelques  uns  pour  apprendre 
davantage  le  métier,  d'autres  pour  l'enseigner.  Et  il  arriva  qu'il  y  eut  un 
Maçon  curieux  appelé  Minus  Greneusis,  qui  avait  été  à  la  construction  du 
Temple  de  Salomon  ;  il  se  rendit  en  France,  où  il  enseigna  le  métier  de  la 
Maçonnerie  aux  hommes  de  France.  Et  là,  il  y  en  avait  un  de  lignée  royale 
de  France,  appelé  Charles  Martel,  qui  aimait  beaucoup  ce  Minus  Greneusis 
à  cause  de  son  métier  ;  il  en  adopta  les  Instructions  et  Coutumes,  et,  après, 
il  fut,  par  la  grâce  de  Dieu,  élu  roi  de  France. 

Quand  il  fut  dans  son  Royaume,  il  y  installa  beaucoup  de  Maçons  qu'il 
mit  au  travail,  et,  comme  il  les  chérissait,  il  leur  donna,  avec  une  bonne 
paye,  les  Instructions  et  Coutumes  qu'il  avait  apprises  lui-même  d'autres 
Maçons  ;  en  outre,  il  leur  octroya  une  Charte,  les  autorisant  à  tenir  une 
Assemblée  tous  les  ans. 

Et  ainsi  vint  le  métier  en  France. 

L'Angleterre,  durant  ce  temps,  était  sans  Maçons  —  et  ce  fut  ainsi  jus- 
qu'à l'époque  de  Saint- Albans. 

Juste  après  la  mort  de  Saint-Albans  vinrent  de  grandes  guerres  en  An- 
gleterre entreprises  par  diverses  nations,  de  sorte  que  la  bonne  règle  de  la 
Maçonnerie  fut  détruite  jusqu'au  temps  d'Athelstan,  lequel  fut  un  illustre 
roi  d'Angleterre.  Ce  roi  établit  la  paix  dans  la  contrée,  construisit  plusieurs 
fameux  édifices,  tels  qu'abbayes,  châteaux,  etc.,  et  manifesta  une  grande 
affection  pour  les  Maçons.  Et  il  eut  un  fils  appelé  Edwin,  lequel  tint  les 
maçons  en  plus  haute  estime  encore  que  ne  l'avait  fait  son  père  :  il  était 
versé  dans  la  science  de  la  géométrie  et  il  fut  ainsi  conduit  à  communier 
avec  eux  pour  apprendre  leur  métier.  Il  fut  donc  fait  maçon  et  reçut  de 
Son  père  une  Charte  et  une  Commission  autorisant  la  Corporation  à  tenir 
une  fois  par  an  une  assemblée  dans  n'importe  quelle  partie  du  Royaume, 
afin  que  les  Maçons  pussent  corriger  entre  eux  les  fautes  et  délits  commis 
dans  le  métier.  Et  il  organisa  lui-même  une  assemblée  à  York,  où  il  créa 
des  Maçons,  prescrivit  des  Instructions  et  enseigna  la  morale  maçonnique, 
en  ordonnant  que  cette  règle  serait  toujours  observée  ;  il  donna  ensuite  à 
la  corporation  une  Charte  et  une  Commission,  en  décidant  qu'elles  con- 
tinueraient de  roi  en  roi. 

Lors  de  cette  assemblée,  il  proclama  que  tout  Maçon  pouvait  apporter  les 
écrits  en  sa  possession  relatifs  aux  connaissances  du  métier,  soit  en  Angle- 
terre, soit  dans  toute  autre  contrée.  Ces  écrits  furent  réunis.  Il  y  en  avait 
en  français,  quelques-uns  en  grec,  en  latin,  en  anglais  et  autres  langages. 
Le  sens  en  fut  trouvé,  et  Edwin  ordonna  qu'un  livre  serait  fait  pour  établir 
comment  le  métier  avait  été  découvert  ;  il  prescrivit  que  ce  livre  serait  lu 
et  expliqué  à  tout  Maçon  nouveau,  ensuite  qu'on  ferait  connaître  à  celui-ci 
les  Instructions. 

Depuis  ce  temps,  les  coutumes    des  Maçons  ont  été    tenues    et   observées 


508  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

dans  cette  forme,  du  moins  autant  qu'elles  pouvaient  lêtre  par  des  hommes. 
En  outre,  dans  plusieurs  assemblées,  et  suivant  les  conseils  des  meilleurs 
maîtres  et  compagnons,  diverses  instructions  furent  ajoutées  petit  à  petit 
aux  précédentes. 

A  présent,  vous  savez  en  détail  comment  cette  noble  et  fameuse  corpora- 
tion de  la  Maçonnerie  a  été  inventée,  et  comment,  miraculeusement,  elle  a 
été  conservée  ;  vous  savez  aussi  combien  elle  a  été  affectionnée  par  les  rois 
et  les  potentats  depuis  son  commencement  jusqu'à  ce  jour,  et  combien  elle  est 
encore  aimée  et  tenue  en  haute  estime  par  toutes  sortes  de  personnes. 

L'un  des  anciens  prend  le  Livre  ;  celui  ou  celle  qui  doit  être  fait 
Maçon  pose  les  mains  sur  le  Livre,  et  alors  les  Instructions  sont  don- 
nées. 

Tout  Maçon  doit  prendre  attention  à  cela.  Si  vous  vous  sentez  coupables 
d'aucune  des  fautes  énumérées  dans  ces  Instructions,  efforcez-vous  de  vous 
amender  ;  et  spécialement  vous  qui  pouvez  être  accusés,  prenez  bien  soin 
d  observer  les  Instructions,  car  c'est  un  grand  péril  pour  l'âme  d  un  homme 
que  de  se  parjurer  sur  le  Livne. 

«  Le  premier  article  de  vos  Instructions  est  que  vous  serez  fidèles  à  Dieu 
et  à  la  Sainte  Église,  et  que  vous  n'emploierez  ni  hérésie  ni  erreur  dans 
votre  entendement. 

«  Secondement,  que  vous  serez  hommes  liges  fidèles  au  Roi  sans  aucune 
trahison,  mais  que  vous  la  réparerez,  si  vous  le  pouvez,  et  que  vous  en  aver- 
tirez le  Roi  ou  son  Conseil. 

«  Troisièmement,  que  vous  serez  sincères  les  uns  envers  les  autres,  c'est-à- 
dire  envers  les  Maîtres  et  les  Compagnons  du  corps  de  la  Maçonnerie  qui 
sont  reconnus  pour  tels,  et  que  vous  serez  pour  eux  ce  que  vous  voudriez 
qu'ils  fussent  pour  vous  ;  •  et  aussi  que  chaque  maçon  fréquentera  les 
Chambres  et  les  Loges  ou  tous  autres  Conseils  tenus  maçonniquement. 

«  Quatrièmement,  que  vous  serez  fidèles  au  maître  ou  propriétaire  que 
vous  servirez,  en  faisant  votre  possible  pour  son  avantage. 

«  Cinquièmement,  que  vous  appellerez  tous  les  Maçons  camarades  ou 
frères,  que  vous  ne  leur  donnerez  pas  un  autre  nom,  et  que  vous  ne  séduirez 
pas  la  femme  de  votre  camarade  ni  ne  désirerez  illégalement  sa  fille  ou 
même  sa  servante. 

«  Sixièmement,  que  vous  paierez  exactement  pour  la  table,  la  nourriture 
et  la  boisson,  partout  où  vous  prendrez  pension.  » 

Telles  sont  les  Instructions  générales  auxquelles  sont  assujettis  les 
Maçons,  aussi  bien  les  Maîtres  que  les  Compagnons. 

A  présent,  je  rappellerai  les  Instructions  générales  relatives  à  tout  vrai 
Maître  ou  Compagnon  : 

«  Premièrement,  aucun  Maître  ou  Compagnon  ne  doit  accepter  aucune 
tâche  s'il  ne  se  sent  pas  la  capacité  m  l'adresse  de  l'exécuter,  afin  que  la 
Corporation  ne  soit  pas  sujette  à  la  calomnie  et  que  le  propriétaire  puisse 
être  bien  et  fidèlement  servi  ;  de  plus,  aucun  Maître  ne  doit  accepter  aucun 
travail  sans  un  salaire  raisonnable,  de  manière  que  le  propriétaire  soit 
fidèlement  servi  pour  son  propre  avantage  et  que  les  Maîtres  et  Compagnons 
aient  une  paye  exacte  et  honnête,  telle  que  l'exige  la  Corporation. 

«  De  plus,  aucun  Maître  ou  Compagnon  ne  doit  supplanter  un  camarade, 
c'est-à-dire  que  si  celui-ci  a  du  travail,  il  ne  peut  en  être  privé  s'il  est 
capable  de  l'achever. 

«  De  plus,  aucun  Maître   ou  Compagnon   ne  peut   prendre    un   apprenti 


APPENDICES  509 

que  pour  sept  ans,  excepté  si  cet  apprenti  est  de  bonne  naissance,  capable 
et  sain. 

«  De  plus,  aucun  Maître  et  Compagnon  ne  peut  être  autorisé  à  faire 
un  Maçon  sans  le  consentement  d'au  moins  cinq  ou  six  de  ses  camarades  ;  et 
celui  qui  doit  être,  fait  Maçon  doit  être  né  libre,  de  bonne  parenté,  et  non 
pas  un  serf,  et  être  sain  de  corps,    comme  un    homme  doit  l'être. 

n  De  plus,  aucun  Maître  ou  Compagnon  ne  doit  donner  à  exécuter  le 
travail  des  propriétaires  à  ceux  qui  ont  l'habitude  de  voyager  ;  et  aucun 
Maître  ne  doit  accorder  à  aucun  Compagnon  plus  de  salaire  que  celui-ci 
n'en  mérite,  afin  de  ne  pas  être  trompé  par  les  faux  ouvriers. 

«  De  plus,  aucun  Maçon  ne  doit  se  livrer  aux  jeux  de  hasard  ou  autres 
jeux,  afin  que  la  Corporation  ne  soit  pas  calomniée. 

«  De  plus,  chaque  Maître  ou  Compagnon  doit  se  rendre  à  l'Assemblée, 
si  elle  n'a  pas  lieu  dans  un  rayon  au  delà  de  50  milles,  et  s'il  a  reçu  avis 
d'assister  à  la  récompense  des  Maîtres  et  Compagnons  :  s'il  manque  à  ce 
devoir  et  si  un  rapport  est  fait  A  ce  sujet,  il  doit  se  soumettre  à  l  arbitrage 
des  Maîtres  et  Compagnons,  et,  si  l'entente  ne  peut  avoir  lieu,  il  est  tenu  de 
se  présenter  devant  l'Assemblée  commune. 

«  De  plus,  aucun  Maçon  ne  peut  montrer  aucune  forme,  équerre  ou  règle 
à  aucun  Maçon  grossier  (rough  Mason),  et  ne  doit,  soit  dans  la  Loge,  soit 
au  dehors,  fixer  ou  poser  aucune  moulure  qui  ne  soit  de  sa  fabrication. 

«  De  plus,  chaque  Maçon  doit  bien  accueillir  les  camarades  étrangers 
qui  se  présentent  dans  la  contrée  et  les  assister  dans  le  travail,  s'il  le  peut, 
c'est-à-dire  que,  s'il  a  des  moulures  à  placer,  il  doit  leur  procurer  du  travail 
au  moins  pendant  deux  semaines  et  leur  payer  le  salaire.  S'il  n'y  a  rien 
pour  eux,  alors  il  doit  leur  fournir  de  l'argent  pour  leur  permettre  de  se 
rendre  à  la  Loge  voisine. 

«  Enfin,  tous  les  Maçons  doivent  être  exacts  à  leur  travail,  qu'il  soit  à  la 
tâche  ou  à  la  journée,  et  le  mener  fidèlement  à  bonne  fin,  s'ils  reçoivent 
leur  salaire  comme  ils  doivent  le  recevoir.  » 

Ici,  suit  /'Instruction  de  l'Apprenti  :  «  Qu'il  sera  fidèle  à  Dieu  et  à  la 
Sainte  Eglise,  au  Prince,  à  son  Maître  et  à  Dame  qu'il  servira  ;  et  qu'il 
ne  volera  ni  ne  dérobera  les  biens  de  son  Maître  ou  de  sa  Dame,  ni  ne 
s'absentera  de  leur  service,  ni  ne  les  quittera  pour  son  plaisir  de  jour  ou 
de  nuit  sans  leur  permission  ;  et  qu'il  ne  commettra  ni  adultère  ni  forni- 
cation dans  la  maison  de  son  Maître  avec  la  femme  de  celui-ci,  ou  avec  sa 
fille,  sa  servante  ou  toute  autre  femme  ;  et  qu'il  tiendra  secrètes  toutes 
choses  dites  en  Loge  ou  Chambre  par  tous  Maçons,  Compagnons  ou  Francs- 
Maçons  ,*  et  qu'il  n'emploiera  aucun  argument  de  désobéissance  contre  aucun 
Franc-Maçon,  ni  ne  révélera  aucun  secret  au  sujet  duquel  un  différend 
aurait  pu  surgir  entre  Maçons,  Compagnons  ou  Apprentis,  mais  qu'il  se 
comportera  toujours  d'une  manière  respectueuse  vis-à-vis  de  tous  les 
Francs-Maçons  qui  sont  des  frères  assermentés  devant  son  Maître  ;  et  qu'il 
ne  se  livrera  pas  aux  cartes  ou  autres  jeux  trompeurs  et  illégaux,  ni  ne 
fréquentera  les  tavernes  ou  brasseries  où  se  font  les  dépenses  inutiles,  sans 
la  permission  de  son  Maître  ou  de  quelque  autre  Franc-Maçon  ;  et  qu'il  ne 
commettra  pas  d'adultère  dans  la  maison  d'aucun  homme  où  il  travaille  ou 
reçoit  nourriture  ;  et  quil  ne  dérobera  ni  ne  volera  aucuns  biens  d'aucune 
personne,  ni  ne  causera  volontairement  aucun  préjudice  ou  scandale  durant 
son  apprentissage,  soit  chez  son  Maître  ou  sa  Dame,  soit  chez  aucun  autre 
Franc-Maçon  ,•  et  qu'il  doit   résister  de    toutes   ses   forces    aux  mauvaises 


510  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

impulsions  et  en  informer,  le  plus  tôt  possible,  son  dit  Maître  ou  quelque 
autre  Franc-Maçon.  » 

Telles  sont  les  Constitutions  de  la  noble  et  fameuse  corporation  appelée 
Maçonnerie,  établies  et  à  présent  pratiquées  par  les  meilleurs  Maîtres  et 
Compagnons,  pour  diriger  et  guider  tous  ceux  qui  emploient  la  dite  Cor- 
poration. 

Scripted  p.  me  vicesimo  tertio  die  Octobris,  anno  regni  Régis  et  Reginœ 
Gulielmy  et  Mary  quinto  annoque  Domini  1693. 

Mark  Kypling. 

Les  noms  de  la  Loge  : 

William  Simpson  Christophe  Thompson 

Anthony  Horsman  Christopher  Gill 

M0  Isaac  Brent,  surveillant  de  la  Loge  : 

«  Nous,  soussignés,  avons  comparé  la  copie  qui  précède  avec  le  Document 
original  en  la  possession  de  la  York  Lodge  n°  236,  document  ayant  appar- 
tenu autrefois  à  l'ancienne  Grande  Loge  de  toute  V Angleterre  siégeant  dans 
la  cité  d'York,  et,  par  le  présent  acte,  nous  certifions  que  cette  copie  est 
exacte  et  fidèle. 

«  Villiam  Cowling,  P.  M.  et  Trésorier,  236 
«  Ralph  L.  Davison,  P.  M.,  236.  » 

«  York,  13  mai  1870.  » 

Le  Document  original  est  un  rouleau  de  parchemin  légèrement  mutilé, 
portant  la  mention  suivante  : 

«  N°  b-1693.  Le  F.'.  Geo.  Walker  de  Wetherby,  à  la  Grande  Loge 
d'York.  » 

II 

LOGES    FRANÇAISES    A    LONDRES 

«à 

Il  y  avait  en  Angleterre,  sous  le  maillet  de  la  G.'.  L.'.  orangiste, 
deux  L.-.  françaises  à  i'O.*.  de  Londres  :  «  French  Lodge  »,  à 
l'enseigne  du  Cygne,  et  la  L.*.  «  au  duc  de  Lorraine  »,  dans  SufYolk 
Street. 

Dans  le  tableau  de  Richard  Steele,  la  première  porte  le  n°  20  et 
la  seconde  le  n°  98. 

D'après  l'approbation  de  l'Histoire  des  Francs-Maçons  de  la 
Tierce,  on  voit  que  cet  écrivain  faisait  partie  de  cette  dernière  Loge 
en  1733  (la  Tierce,  p.  ix)  :  «  Le  3e  mardi  du  mois  d'août  1733,  le 
comte  de  Strathmore  étant  le  T.'.  Vén.'.  G.'.  M*,  de  toutes  les  L.'. 
du  royaume  d'Angleterre,  le  Vén.*.  M.'.,  les  surveillants,  compa- 
gnons et  apprentis  de  la  L.*.  française  des  f.\  m-,  sise  à  Londres, 
dans  la  rue  de  Suffolk,  à  l'enseigne  du  duc  de   Lorraine,  déclarent 


APPENDICES  511 

unanimement  que  l'Histoire  des  F.'.-M--.  du  f .  * .  la  -Tierce  ne 
contenait  rien  qui  ne  fût  conforme  aux  lois,  aux  statuts,  aux 
règlements  et  aux  usages  de  la  très  ancienne  et  très  vénérable 
confraternité  :  Friard,  secrétaire.   » 

III 
l'état-major  de  la  f. -.-m*,  jacobite  en  1760 

D'après  une  série  de  rituels  manuscrits,  ayant  appartenu  à 
Duchesnay,  vénérable  de  la  Parfaite  Union  à  10.  .  de  Quimper, 
en  1769,  les  hauts  officiers  de  la  F.'.-M.'.  Jacobite  étaient  les 
personnages  suivants  : 

Grand  officier  G.  V.  Le  f.  is  C.  G.  HD.  St  F.  (sic  ?). 

Illustre  député  G.  V.  Le  f.   C'e  de  la   Tour  du   Pin. 

G.  1er  assistant,  de  la  Baguerie. 

G.  2e         —         de  Lauret,  président. 

G.  Secrétaire,  Le  Gondat. 

G.  Econome,  Gouvion. 

G.  Orateur,  comte  de  Melit. 

D'après  le  même  manuscrit,  les  provinces  maçonniques  avaient 
à  leur  tête  : 

Paris  :  le  comte  de  la  Tour  du  Pin,  brig.  des  armées  du  roi. 

Auvergne  :  le  chevalier  de  la  Gondole,  cap.  com.  du  rég.  de 
Condé  InfJe. 

Rouergue  :  le  chev.  de  Pomerol,  cap.  com.  de  Condé  Infi". 

Haut  Languedoc  :  chev.  de  la  Baguerie. 

Narbonne  et  Béziers  :  le  ch.  de  Maxinchina  ;  —  Suisse  supé- 
rieure :  Le  Blaize  ;  —  et  Suisse  inférieure  :  Zalleroffre. 

Francfort  :  le  chev.  de  Horsech. 

Iles  Antiques  de  l'Amérique  :  le  chev.  Veyère  et  La  Salle. 

Prusse  :  le  chev.  d'Ascim. 

Italie  :  le  marquis  de  Cumes. 

Angleterre  :  les  Stuarts. 

Piémont  :  l'abbé  de  Gonasque. 

Navarre,  Bigorre,  Béarn  :  de  Belgarde. 

Hambourg  :  le  baron  de  Voylosk. 

Anjou  et  Poitou  :  le  Defigue,  cap.  réformé  de  dragons  ;  —  Du 
Beloy,  officier  au  rég.  de  Planta-Suisse  ;  Servady. 


512 


LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


IV 


LES  ROSES-CROIX  JACOBITES 


Instructions  générales  sur  le  sublime  grade  de  ch.\  de  l'Aig.\ 


ou  du  Pel.\  S.   P.  R.  C.  d'Her.1.  Par*.   Mac. 

ORDRE  PAR   LETR.\    R.*.  et  P.\   F.\  CHEV. 


LIB. 


MISES     EN 


*-->t*ir 


(Devaux)  S.-.  P.*.  R.'.  C.\  a  l'or.',   de  Paris.  —  MDCCLXXIX. 
—  D.\  L.\  M.-,  d.\  n.\  R.-.  1746. 


SZ^TM^q- 


Tel  est  le  titre  du  manuscrit  du  xvme  siècle  dont  nous  reprodui- 
sons les  parties  essentielles.  Son  auteur,  Devaux  d'Hugueville,  fut, 
en  1780,  le  vénérable  fondateur  de  l'Aménité  à  l'0.\  de  Paris. 


INSTRUCTIONS    GENERALES    SUR   LE    SUB\     GRADE    DE    CH.\    DE    R.*.    C*. 

Avertissement. 

Avant  d'entrer  dans  le  détail  de  tout  ce  qui  concerne  ce  grade, 
il  est  bon  de  savoir  auparavant  quel  est  son  objet  et  quels  en  sont 
les  titres.  C'est  ce  qui  se  trouve  expliqué  dans  l'introduction 
suivante. 

INTRODUCTION 

OBJET  ET   TITRÉ   DU  GRADE   DE   CHEV.'.    R.\   C.\ 

Ce  grade  est  le  vrai  but  de  la  maç.\,  qui  toute  se  rapporte  à  la 
même  fin. 

Celui  qui  est  revêtu  de  ce  grade  se  nomme  : 

1°  Ch.\  R.*.  C.'.,  et  c'est  le  titre  qui  lui  convient  le  mieux  ; 

2°  Chev.  de  l'Aig(le)  parce  qu'il  y  a  un  Aig(le)  sur  le  bijou  ; 

3°  Chev.*.  du  Pél(ican)  par  comparaison  du  Fils  de  Dieu  qui 
versa  son  sang  pour  nous  ; 

4°  Mac.*.  d'Hér(odom)  parce  que  le  premier  Chap.\  de  ce  grade 
s'est  tenu  sur  la  montagne  de  ce  nom,  située  entre  l'Or.*,  et  le  N.\ 
de  l'Ecos.*.  et  c'est  encore   l'endroit  où  est  la  maîtresse  dignité  et 


APPENDICES  513 

le  siège  du  S.'.  G.*.  M.-,  dans  un  château  antique  appartenant  aux 
Chev.  de  R.\  C.'-  C'est  ce  qui  a  déterminé  les  trois  quarts  des 
chap.\  d'Ang(leterre)  à  prendre  ce  nom,  pendant  que  l'autre  quart 
prend  celui  de  R.'.  C*. 

Le  Grand  M.',  réside  à  Ed(imbourg),  à  60  milles  du  château,  et 
y  tient  souvent  le  siège. 

5°  Chev.*.  de  Saint-An(dré)  parce  que  les  premiers  Chev.'. 
d'Eco.',  faisaient  chaque  année  une  procession  le  jour  de  la  fête 
de  ce  saint  et  parce  que  c'est  le  jour  de  leur  cons.'.  reg.'.  C'est  ce 
qui  a  engagé  le  peuple  à  les  nommer  Chev.  de  Saint-An(dré),  ce  qui 
a  fait  qu'en  Ecosse,  après  la  persécution  et  le  trouble  du  pays,  la 
forme  des  vrais  bijoux  s'étant  perdue  on  y  avait  substitué  un 
Saint-An(dré)  attaché  à  une  C(roix). 

Quoique  les  cérémonies  de  ce  grade  n'aient  aucun  rapport  avec 
ce  bijou,  on  le  porte  encore  aujourd'hui  par  suite  des  anciens 
usages,  à  Col(ogne)  attaché  à  un  collier  ponceau,  et  à  Ber(lin) 
attaché  à  un  collier  vert.  Dans  quelques  autres  endroits,  à  la 
boutonnière.  D'autres  y  portent  une  médaille  de  la  Rés(urrection), 
mais  tous  ces  usages  sont  locaux  et  particuliers. 

On  remarquera  que,  de  tous  les  titres,  le  premier  et  véritable 
est  celui  de  Chev.'.  de  l'Aig.  .  S.'.  P.*.  R.'.  S.'.  d'Hér.'. 

Les  Ch.'.  du  premier  Chap.'.  avaient  fait  frapper  des  médailles 
sur  lesquelles  était  une  R(ose)  sur  une  C(roix),  emblème  du  fils 
de  D(ieu)  qui  est  comparé  à  une  R(ose)  dans  l'Ev(angile). 

On  trouve  quelques-unes  de  ces  médailles  dans  les  cabinets  des 
antiquaires  et  des  curieux. 

CHAPITRE  1er 

ORDONNANCES  GENERALES. 
ARTICLE      PREMIER. 

Devoirs  d'un  R.'.  C.'.  envers  son  Dieu  et  son  Prince. 

Un  Chev.'.  de  l'Ai.'.  S.'.  P.'.  R.\  C.\  doit  adorer  son  Dieu,  défendre 
son  Prince  jusqu'à  la  dernière  goutte  de  son  sang  et  ne  peut  sous  aucun 
prétexte  passer  au  service  d'un  Prince  étranger  sans  une  permission  du 
sien  et  de  ses  supérieurs. 

ART.   II. 

Ses  devoirs  envers  les  pauvres,  les  prisonniers  et  les  morts. 

Il  est  obligé  à  la  charité  envers  les  pauvres,  et  surtout  envers  les 
Chev.*.  et  les  Mac.*,  dans  l'adversité  et  le  besoin,  ainsi  quede  visiter  les 
prisonniers.  Jadis  il  était  aussi  obligé  d'enterrer  les  morts,  mais  cela  n'a 
plus  lieu  qu'envers  les  Chev.'. 

LA   FRANC-MACONNERIE.  —  T.  I.  33 


514  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

AHT.   III. 

Ses  devoirs  envers  ses  frères. 

Il  lui  est  interdit  de  se  battre,  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit,  contre 
un  autre  Chev.'. 

ART.   IV. 

Fête  de  l'Ordre  ;  banquet  ;  obligation  de  le  faire. 

La  Fête  de  l'Ordre  est  le  Jeudi  Saint  On  ne  peut  jamais  s'exempter 
du  banquet  ce  jour-là.  S'il  n'y  a  qu'un  seul  Chev.-.  dans  un  endroit,  il 
doit  absolument  faire  le  banquet  seul  et  se  réunir  en  esprit  avec  ses 
frères  qui  font  commémoration  de  lui  en  ce  jour.  Cet  article  a  lieu  quand 
même  on  serait  en  route. 

art.  v. 

Obligation  respective  de  deux  Chev.'.  pour  le  banquet  dans  les    lieux  où  il 

n'y  a  pas  de  Chap.'. 

Si  deux  Chev.*.  sont  à  portée  l'un  de  l'autre  et  qu'il  n'y  ait  point  de 
Chap.'.  ils  doivent  s'inviter  au  banquet  et  au  besoin  ils  font  chacun  la 
moitié  du  chemin. 

ART.  VI. 

Chev.'.  visit.'.  en  un  Chap.'. 

Lorsqu'un  Chev.".  va  visiter  au  Chap.*  il  salue  le  M.".,  le  1er  et  le 
2e  Surv.\  et  les  FF.',  et  par  humilité  il  se  met  le  dernier  du  Chap.'. 

art.    vu. 
Discrétion  d'un  Chevr. 

Un  Chev.*.  R.*.  C.\  ne  doit  jamais  faire  connaître,  même  à  des  R.-. 
C  '.,  ni  le  M.',  d'un  Chap.-.  ni  celui  qui  Ta  reçu,  non  plus  que  les  céré- 
monies delà  réception,  ni  les  lieux,  jours  ou  heures  où  se  tient  le  Chap.'. 

ART.  VIII. 

Privilèges  d'un  Chev.'. 

Il  a  le  privilège  de  faire  seul  des  maçons,  s'il  ne  se  trouve  point  de 
L.'.  R.-.  dans  une  ville,  ou  à  10  lieues  à  la  ronde,  ou  pour  cause  extraor- 
dinaire, et  il  peut  leur  donner  les  six  grades  jusqu'à  celui  de  Chev.'.  de 
l'upée  dit  d'Or.'.  Celui  de  R.'.  C.\  est  réservé  par  son  bref. 

ART.  IX. 

Usage  quil  doit  faire  de  ce  privilège. 

Il  doit  être  très  circonspect  sur  l'objet  du  8"  article,  qui  exige  beaucoup 
de  prudence,  pour  n'user  de  ce  droit  que  dans  de  graves  circonstances, 
ce  qui  est  remis  à  sa  conscience. 

art.  x. 
Réserve  faite  à    ce  privilège. 

Il  ne  doit  user  en  aucun  cas  du  droit  de  conférer  des  grades,  suivant 
l'article  8  ci-dessus,  qu'autant  qu'il  ne  pourrait  se  procurer  des  M.".  R'. 
en  nombre  suffisant,  au  moins  deux  contre  lui. 


APPENDICES  515 

■MIT.    XI. 

Droits  d'un  Chev.'.  et  l'usage  qu'il  doit  en  faire. 

Il  a  droit  de  constituer  une  L.\  par  sa  présence,  où  il  n'y  a  point  de 
L.\  R.\  à  dix  lieues  à  la  ronde,  ce  qui  régularise  les  travaux  auxquels 
il  assiste  ;  sur  quoi  il  doit  être  de  la  plus  grande  réserve. 

art.  xn. 
Devoirs  d'un  Chev.  sur  l'assistance  au   Chap.'. 

Il  ne  peut  se  dispenser  de  venir  au  Chap.*.  étant  convoqué,  mais 
ayant  exposé  ses  besoins,  il  pourra  demander  à  se  retirer. 

ART.    XIII. 

Signature  d'un  Chev.'.  ;  obligation  de  porter  le  bijou  en  L.\ 

Il  ne  doit  jamais  rien  signer  des  affaires  de  la  maç.  .  sans  y  ajouter 
ses  qualités  par  ces  lettres  initiales  S.-.  P.".  R.\  C.-. 

Quelques-uns  usent  pour  cela  du  triangle  lumineux,  ce  qui  est  moins 
rég.\ 

Allant  en  quelque  L.\  que  ce  soit,  il  doit  porter  le  bijou  de  l'ordre. 

ART.  xiv. 
Prérogatives  d'un  Chev.'.  en  L.'.  ;  honneurs  qui  lui  sont  dus. 

Les  Chev.'.  R.\  C".  ont  la  prérogative  de  tenir  le  maillet  du  M.-,  dans 
les  LL.'.  et  s'ils  refusent  de  le  prendre  ils  se  mettent  à  la  droite  du  M.', 
et  avant  aucun  off.*. 

Ils  sont  introduits  dans  les  LL.-.  qu'ils  vont  visiter,  en  passant  sous 
la  voûte  d'acier,  précédés  de  deux  étoiles  et  au  bruit  des  applaudisse- 
ments continuels. 

Arrivé  à  l'Or.".,  il  se  meta  genoux  sur  les  marches  du  trône  ;  le  M.*, 
en  descend,  s'agenouille  et  lui  présente  le  Livre  Resp.-.  et  le  maillet  ;  s'il 
l'accepte,  le  M.*,  lui  donne  la  main  et  le  mène  au  faut  ■  ,  puis  il  le  place 
immédiatement  à  sa  droite,  fait  remettre  les  glaives  et  faire  les  applaud.-. 
ordinaires. 

Alors  le  visiteur  fait  les  travaux  qu'il  juge  à  propos,  puis,  lorsqu'il  veut 
remettre  le  maillet  au  M.',  il  descend,  s'agenouille  et  lui  présente  le  Liv.*. 
Resp.\  et  le  Mail.',  que  le  M.',  reçoit  aussi  à  genoux.  Le  visiteur  donne 
la  main  au  M.*.,  le  mène  au  faut.,  et  se  place  immédiatement  à  sa  droite. 
Alors  il  fait  des  appl.\  et  remercie  la  L.\  des  honneurs  qu'il    a  reçus. 

Si  le  M.',  ne  rend  point  d'honneurs,  le  R.\  C*.  peut  se  placer  après  le 
dernier  f.\  de  la  col.*.  J  et  s'y  asseoir  par  terre,  après  le  dernier  app.'. 
par  humilité,  et  cela  pour  forcer  la  L.\  à  lui  rendre  les  honneurs. 

Il  y  a  des  LL.".  qui  rendent  plus  ou  moins  d'honneurs  et  ne  présentent 
pas  le  maillet.  Un  R.\  C*.  ne  doit  pas  l'exiger,  pour  ne  pas  troubler 
l'harmonie,  d'autant  que  plusieurs  LL.*.  ignorent  ces  droits,  ou  les  trou- 
vent trop  étendus  et  que  les  règlements  des  LL.-.  sont  peu  d'accord  sur 
cet  article. 

ART  xv. 
Nombre  qui  doit  composer  un  Chap.'. 

Un  Chap.-.  rég.-.  sera  au  moins  de  3  Chev.'.  savoir,  le  M.-,  et  les 
2  Surv.'.,  dont  le  second  fera  les  fonctions  de  Secret.-,  jusqu'à  ce  que  le 


516  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Chap.*.  soit  plus  nombreux.  Pour  lors,  il  aura  ses  Off.  \  comme  dans  les 
LL.\  ordinaires. 

Les  élections  des  off.'.  se  feront  le  J(eudi)  S(aint)  et  ils  entreront  de 
suite  en  fonctions.  Les  anciens  doivent  être  prêts  à  rendre  leurs  comptes 
ce  jour-là. 

ART.    XVI. 

Reddition  des  comptes. 

Le  M.*.,  les  Surv.".  et  les  autres  Off.'.  seront  électifs  par  scrutin.  Les 
comptes  se  rendent  particulièrement,  ne  pouvant  pas  soupçonner  un 
Chev.'.  de  manquer  de  foi.  Cependant  les  registres  doivent  être  en  règle. 

ART.    XVII. 

Jours  d'assemblée  dun  Chap.'. 

Un  Chap.-.  rég.\  existant  dans  une  ville  s'assemblera  au  moins  5  fois 
par  année,  savoir  :  le  Jeudi  Saint,  à  Pâques,  à  la  Pentecôte,  à  la  Tous- 
saint et  à  Noël,  sans  que  les  membres  du  Chap.".  puissent  se  dispenser 
des  ass.\  gén.'.  des  LL.'.  bleues  aux  deux  fêtes  de  Saint- Jean. 

Quelques  chapitres  ont  aussi  maintenu  l'usage  de  s'assembler  le  jour 
de  Saint-An.*.,  jour  de  la  procession  des  R.\  C.\  d'Ecosse. 

ART.  XVIII. 

Nomination   du    Chap.'. 
Le  Chap.'.  sera  toujours  éclairé  en  bougies  jaunes  ou  huile  d'olive. 

ART.     XIX. 

Quête  des  pauvres. 

On  ne  tiendra  point  de  Chap.-.  sans  quêtes  pour  les  pauvres.  Le  M.', 
emploiera  ces  aumônes  qui,  dans  un  instant  de  nécessité,  pourront  être 
appliquées  au  Chap.'. 

ART.  XX. 

Discours  d'obligation. 

Il  se  fera  un  discours  pour  l'édification  du  Chap.'.  à  chaque  fête  solen- 
nelle. 

ART.    xxi. 
Affaires  quon  doit  et  quon  ne  doit  point  traiter  en  Chap.'. 

Il  ne  sera  jamais  question  d'affaires  étrangères,  mais  seulement  de 
celles  qui  ont  rapport  à  Tordre.  Les  matières  d'Etat  ou  de  prochain  n'y 
seront  jamais  discutées  et  la  médisance  sera  punie  avec  rigueur  comme 
le  vice  le  plus  bas  et  le  plus  lâche.  Il  en  sera  de  même  de  la  flatterie. 

ART.  XXII. 

Convocation  du  Chap.'. 

Avant  de  former  le  Chap.*.  le  M.',  convoquera  pour  le  suivant  et  le 
reg.\  sera  signé  de  3  Chev.'.  au  moins. 


APPENDICES  517 

AliT.    XXIII. 

Exclusion    des   servants. 

Il  ne  sera  jamais  admis  de  servants.  Les  deux  derniers  Chev.-.  en 
l'ont  les  fonctions.  Nul  n'en  est  exempt. 

ART.  XXIV. 

Devoirs  envers  les  Chev.-.   malades  et  ceux  qui  meurent. 

Si  un  Chev.  tombe  malade,  on  sera  obligé  de  le  visiter  et  d'avoir  atten- 
tion qu'il  ne  lui  manque  rien.  S'il  meurt,  on  l'enterrera  avec  un  bijou  au 
col  ;  tous  les  Chev.*.  iront  à  l'enterrement  ayant  leur  collier  sous  l'habit. 
Ils  lui  feront  ensuite  un  service  après  lequel  on  tiendra  Chap.-.  Les 
bijoux  seront  couverts  de  crêpe,  au  convoi,  au  service  et  auChap.*.  On 
fera  un  discours  funèbre  sur  la  mort  du  F.'. 

art.  xxv. 
Obligation  du  successeur  du  dignitaire  défunt. 

Si  c'est  un  dignitaire,  celui  qui  le  remplacera  portera  pendant  3 Chap  * 
un  crêpe  à  son  bijou.  Il  sera  nommé  dans  le  Chap.\    qui  suivra  le  ser- 
vice. 

art.  xxvi. 

Indélébilité  du   nom  du  défunt. 

Le  nom  du  Chev.-.  défunt  ne  sera  jamais  effacé  duLiv.-.  ni  du  tableau 
du  Chap.-.,  mais  on  y  placera  une  tête  de  mort  et  2  os  en  sautoir. 

ART.     XXVII. 

Cérémonies  et  emblèmes  du  banquet. 

Les  R.\  G.',  entre  eux  n'ont  d'autres  cérémonies  de  table  que  celle  qui 
se  trouve  dans  les  instructions  et  qui  est  en  commémoration  du  repas 
que  J.\  C.  .  fit  à  Emmaûs  lorsqu'il  se  fit  reconnaître  à  ses  disciples 
après  sa  résurrection.  Elle  est  indispensable  à  l'égard  de  chaque  Chev.*. 
au  jour  du  J.-.  S.',  et  dans  tous  les  Ghap  ".  aux  ass.\  des  fêtes  d'obliga- 
tion et  aux  réceptions. 

ART.   XXVIII. 

Des  Chap.'.  où  Von  mange  un  agneau. 

Il  y  a  des  Chap.'.  où  Ion  peut  manger  un  agneau  à  certaines  fêtes, 
mais  il  faut  que  la  tête  et  les  pieds  y  soient.  Le  M.*,  les  coupe  avant  que 
personne  y  touche  et  les  jette  au  feu  comme  victimes  et  offrandes.  Il 
ne  peut  y  avoir  qu'un  seul  couteau,  une  seule  coupe  et  jamais  de  bou- 
teille. 

ART.  XXIX. 

Formalités  pour  V admission  à  ce  grade. 

Personne  ne  sera  admis  à  ce  grade  qu'après  un  long  examen  et 
3  scrutins  distants  l'un  de  l'autre  et  absolument  favorables.  Aucun 
Chev.-.  n'a  droit  à  2  voix  ;  tout  est  égal. 


518  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

ART.     XXX. 

Précautions  pour  l'admission. 

On  sera  très  scrupuleux  à  accorder  ce  grade,  pour  ne  pas  le  multiplier 
sans  de  puissants  motifs. 

ART.   XXXI. 

Qualités  et  devoirs  du  candidat. 

Lorsqu'il  se  présente  un  cand.\  il  faut  qu'il  soit  Chev.\  de  l'Ep.V  dit 
d'Or.*,  et  qu'il  se  conforme  aux  articles  qui  le  concernent. 

art.    xxxn. 
Requête  du  candidat. 

Il  présentera  une  req.-.  conçue  en  ces  termes  : 

Aux  Chev.\  de  l'Aig.\  S.*.  P.'.  R.\  C.\  tenant  leur  S.'.  Chap.\  à 
l'Or.*,  de/,  (il  faut  désigner  le  nom  de  l'Or..)  S.*.  T.  .  H.*,  ses  noms  de 
baptême  et  de  famille,  surnom,  s'il  en  a,  le  lieu  de  sa  naissance  et  ses 
qualités  civiles,  Chev.\  de  lÉp.\  dit  d'Or.*.,  membre  de  la  R.\  L.\  de 
Saint-Jean  régulièrement  constituée  à  l'Or.-,  de...  et  demande  au  S.*. 
Chap.*.  que,  vu  le  désir  ardent  qu'il  a  de  parvenir  au  Sub.-.  grade, 
point  parfait  de  la  maç.*  ,  il  lui  plaise,  étant  maintenant  assemblé, 
l'admettre  au  nombre  des  Chev.-.  s'il  en  est  jugé  digne 

Le  Sup.\  ne  cessera  de  faire  des  vœux  au  ciel  pour  la  prospérité  de 
l'Ordre  et  de  tous  ses  Chev.\  11  régnera,  s'habillera  en  chev.'.  d'Or.-.,  se 
présentera  à  genoux  et  tête  nue,  à  la  porte  du  Chap.-.  où  il  frappera  en 
Chev.-.  d'Or.'. 

ART.     XXXIII. 

Comment  elle  doit  lui  être  rendue. 

Il  attendra  que  sa  requête  soit  décrétée,  et  la  recevra  à  genoux  et  tête 
nue,  un  Chev.-.  la  lui  jettera  à  terre,  en  lui  disant  :  Lisez  et  retirez-vous. 
Puis  il  rentrera  au  Chap  \  Le  Cand.-.  trouvera  sur  un  Reg.\  le  jour 
indiqué  ainsi  que  le  nom  du  Chev.-.  qui  devra  l'instruire  de  ce  qu'il 
doit  savoir. 

ART.  xxxiv. 
Comment  on  doit  l'instruire  et  ce  quil  doit  donner. 

Ce  F.',  fera  venir  chez  lui  le  Cand.'.  et  lui  donnera  lecture  des  art.*. 
1,  2,  3,  7,  34,  35,  36,  37  et  38  des  présentes  ord.-.,  prendra  son  engage- 
ment de  s'y  conformer  ;  lui  fera  donner  3  paires  de  gants  dont  une  de 
femme,  2  bâtons  de  cire  d'Espagne  pour  les  sceaux,  5  bougies  jaunes 
pour  le  Chap.-.,  3  bougies  blanches  pour  le  M.-.,  une  paire  de  gants 
d'homme  et  une  de  femme,  2  bâtons  de  cire  d'Espagne  et  2  bougies 
blanches  pour  chaque  Chev.'.  Il  lui  fera  donner  aussi  la  somme  suffi- 
sante pour  l'empiète  des  habits  de  l'Ordre  qui  devront  lui  être  fournis  à 
la  réception. 

ARTICLE    XXXV. 

Offrande  qu'il  doit  donner. 

Il  lui  fera  donner  ainsi  une  offrande  au  moins  de  12  livres  pour  la 
Maîtresse)   Dem(eure)  d'Hér(odom)  dont   le    M.',    pourra    disposer    en 


APPENDICES 


510 


faveur  (1rs  pauvres  s'il  n'est  pas  en  relation  avec   le  G.'.  Chap.\  ou  en 
frais  du  Chap.  .  s'il  est  nécessaire. 

ARTICLE  xxxvi. 
Dispense  qui  peut  être  accordée  à  cet  égard  et  comment. 
Au  lieu    de    l'aumône    arbitraire    au  moins  de  12   livres   les  Chap.*. 
peuvent    régler    le    prix   déterminé  de  cette  offrande  et  aussi  dispenser 
des  gants,    cire  d'Espagne    et    bougies  portés    à   l'art.    34,  en  conver- 
tissant ces  droits  en  une  somme  applicable  aux  besoins  du  Chap.-. 

AHTICLE    XXXVII. 

Promesses  que  doit  faire  le  Candidat. 
Le  Cand.\  promettra  de  se  conformer  aux  Ord.\  et  Statuts  du  Chap/. 
et  de  s'entretenir  honnêtement  vêtu,  autant  que  faire  se  pourra  ;  de  re- 
connaître son  M.*,  en  tous  temps  et  en  tous  lieux,  de  ne  jamais  conférer 
ce  grade,  sans  sa  permission  ou  celle  d'un  Chap.'.  rég.*.  en  cas  d'éloi- 
gnement,    et  de  répondre  de  la  probité  de  ceux  qu'il  proposera. 

ARTICLE    XXXVIII. 

Obligations  qu'il  doit  contracter. 

Il  engagera  sa  parole  d  honneur  de  ne  jamais  révéler  le  lieu  où  il  aura 
été  reçu  ;  encore  moins  ceux  qui  l'auront  reçu,  ni  les  cérém.".  qui  auront 
été  observées,  pas  même  à  un  R.\  C.\ 

(Na.  C'est  cet  avis.',  qui  a  rendu  jusqu'à  ce  jour  et  rend  encore  ce 
grade  si  rare  parmi  les  Mac.  ' .  en  France,  puisqu'il  est  si  strictement  et 
si  bien  observé  parmi  les  Chev.\  qu'on  a  beaucoup  de  peine  à  y  par- 
venir. Les  Chev.'.  R.\  C*.  sont  même  inconnus  à  la  plupart  des  LL.\ 
qui  ignorent  les  honneurs  qui  leur  sont  dus.) 

Ce  grade  n'a  été  communiqué  aux  Français  qu'en  reconnaissance  des 
services  rendus  par  les  Mac.'.  Français  aux  Chev.'.  prisonniers  pendant 
la  guerre  de  1747  (après  la  bataille  de  Culloden). 

ARTICLE   XXXIX. 

Déclaration  que  doit  faire  sur  la  requête  du  Candidat  le  F.',  chargé  de  son 
instruction;   à    qui  il  doit  la  remettre,  ainsi  que  les  fonds.  —  Appel  du 
candidat  pour  la  réception. 

Après  que  les  Art.',  des  Ord.\  qui  concernent  le  Cand.'.  auront  été 
remplis,  le  F.*,  chargé  de  son  instruction  mettra  sur  sa  Req.'.  sa  décla- 
ration qu'il  a  suffisamment  instruit  le  Cand.  '.,  lequel  a  satisfait  à  tout  ce 
qui  est  prescrit;  il  remettra  cette  Req.'.  au  Chap.'.  et  les  fonds  au  Tré- 
sorier. Alors  le  Cand.'.  sera  appelé  par  ordre  du  M.',  aux  lieux  et  heures 
indiqués  pour  sa  réception. 

Quand  il  s'y  rend,  on  le  met  dans  une  chambre  des  réflex.'.  tendue 
en  noir,  si  faire  se  peut,  et  éloignée  du  Chap.'.  On  lui  donna  un  livre 
de  morale  et  on  le  laisse  à  ses  réflex.'.  jusqu'à  ce  que  le  M.',  envoie  vers 
lui  le  M.',  des  Cérém.'.  suivant  les  instructions. 

ARTICLE    XL. 

Statuts  particuliers  de  chaque  Chapitre. 

Chaque  Chap.'.  aura  ses    statuts    particuliers  qu'il  fera  approuver  et 
qui  seront  exécutés  comme  les  présentes  ordonnances. 


520  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


V 

PROTOCOLE 
AVERTISSEMENT    (1) 

On  appelle  Protocole  le  modèle  oula  forme  des  actes  relatifs  au  Chap.\ 
deR.\  C-. 

Ces  actes  sont  de  deux  sortes  :  ceux  qui  restent  secrets  dans  le  Chap.-. 
et  ceux  qui  vont  au  dehors. 

Les  délib.'.  que  l'on  prend  au  Chap.*.  sont  de  la  première  espèce  ; 
elles  doivent  être  écrites  tout  de  suite,  sans  caractères  ni  hiéroglyphes 
particuliers. 

Quant  à  ceux  qui  vont  au  dehors  du  Chap.'..  tels  que  les  extraits  de 
délib  •'.  et  les  brefs  de  toutes  espèces,  ils  doivent  être  écrits  en  caractères 
particuliers. 

A  l'égard  de  ceux-ci  il  y  a  trois  choses  essentielles  à  remarquer  :  le 
timbre,  la  date  hébraïque  et  la  signature  caractéristique. 

Le  timbre  des  brefs  est  un  triangle  lumineux  au-dessous  duquel  se 
trouvent  en  hébreu  le  mot  incommunicable,  lapar(ole)  sacrée  desChev.  . 
et  le  nom  de  la  M(aître)sse  demeure. 

La  date  hébraïque  sera  expliquée  plus  loin. 

La  signature  caractéristique  est  celle  du  maître  et  n'est  autre  chose 
que  le  mot  de  passe  en  hébreu. 

ARTICLE    PREMIER. 

Planche. 

L'an  mil  sept  cent  quatre  vingt...  et  D.\  L.\  M.*.  D.-.  N.\  R.\  (de 
la  mort  de  notre  Rédempteur)  —  cette  date  change  tous  les  ans  le  jeudi 
saint  —  la...  année  de  la  Gr.\  Maîts.'.  du  S.'.  G.'.  M.*.  d'Hér.\  notre 
Maît3Se  Dem.\  le.',  jour  du.',  mois  maç.'.  578.'.  Les  TT.\  RR.\  et 
PP.*.  FF.',  membres  du  Sou.".  Chap.'.  étant  régulièrement  assemblés, 
le  Tr.'.  S.',  et  P.*.  S.'.  M.',  a  ouvert  les  Trav.*.  à  l'assistance  des  RR.\ 
et  PP.*.  FF.',  (on  les  nomme  tous  et  on  fait  mention  des  absents  :  les 
TT.\  RR.*.  et  PP.'.  FF.',  étant  absents). 

On  inscrit  tout  le  travail  par  ordre  et  par  art.',  et  avant  de  se  séparer 
on  fait  signer  tous  les  FF.',  présents. 

ARTICLE    II. 

Extrait  de  la  Planche. 

Les  copies  délivrées  pour  extraits  sont  dressées  de  même,  avec  cette 
différence  qu'on  met  en  entier  et  en  hiéroglyphes  les  six  mots  dont  les 
initiales  sont  en  tête  de  la  planche(D.'.L.'.M.'.  D.'.  N.\).  On  supprime 
ce  qui  suit,  ces  mots  :  a  ouvert  les  trav.'.  et  on  inscrit  tout  de  suite  l'art.  . 
demandé,  puis  on  met  au  bas  :  Pour  extrait  conforme  au  registre  et  plus 
bas  :  Par  commandement  du  S  \  M.*.  d'Hér.'.  et  au-dessous  de  ces  mots 
le  secrétaire  met  sa  signature. 

(1)  Ce  document  est  également  extrait  du  manuscrit  de  Devaux  d'Huguevi     . 


APPENDICES  ."Vil 

Hiéroglyphes. 

Il  y  a  deux  sortes  d'hiéroglyphes  :  ceux  des  lettres  et  ceux  des  chiffres. 
Pour  les  uns  comme  pour  les  autres,  voir  appendice  IX. 

article  m. 
Brefs. 

Les  brefs  sont  des  actes  qui  vont  au  dehors  du  Chap.\  et  qui  doivent 
être  revêtus  de  la  signature  caractéristique. 

Dans  tous  les  actes  qui  vont  au  dehors  des  Chap.*.  avecSign.v  Caract.*. 
on  met  une  date  en  hébreu,  outre  celle  qui  est  dans  la  teneur  de  l'acte.*. 
Elle  se  pose  où  l'on  veut. 

Cette  date  comprend  le  nom  de  la  Mc,se.\  Dem.*.,  le  jour  du  mois,  le 
nom  de  ce  mois,  l'année  du  G.'.  M.*.,  quel  quantième  est  ce  G.'.  M.",  et 
le  mot  Père,  puis  l'an  vulgaire.  Tous  les  noms  sont  en  hébreu  et  les 
chiffres  tels  qu'on  les  voit  dans  les  exemples  ci-dessous. 

La  signature  caractéristique  est  : 


&*)W 


C'est  la  signature  du  M.\  et  le  mot  de  passe  en  hébreu  qui  doit  être 
mis  sous  le  cordon  du  sceau. 

En  tête  des  brefs  il  doit  y  avoir  pour  timbre  après  le  triangle  lumi- 
neux et  au-dessous  ; 


1°  Le  mot  incommunicable 


2°  La  Par(ole)  sacrée  des  Chev. 


3°  La  M;aîtr)esse  Dem(eure)  : 


TJJ* 


T€ 


Les  mois    hébraïques  se  comptent,   se    nomment   et    s'écrivent    ainsi 
qu'il  suit  : 


1°  mars         Nisan 


2°  avril  Jiar 


7m 


522  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


3°  mai  Sivam 


4°  juin  Th 


aummus 


h 


5°  juillet  Ab 


6°  août  El 


us 


7°  septembre     Tieri 


8°  octobre  Marchasvan  J  /     \  jy    £     2   2     Z 


9°  novembre       Caslen 


10°  décembre         Thebet 


11°   janvier  Schebat  § 


12°  février  Adar 


/fui 


Tous  les  mots  et  les  époques  de  cette  date  s'écrivent  avec  ces  carac- 
tères et  les  chiffres  ci-dessus,  en  commençant  par  le  dernier,  et  ainsi  à 
rebours  jusqu'au  premier. 


APPENDICES  523 

Par  exemple  pour  dire   : 

lier.  [•«■  Nisan  29.  :>1  Pore  1779,  il  faut  écrire  cette  date  :  1779. 
Ab  (père)  54.  29  Nisan  1.  Hér. 

Pour  l'intelligence  de  cette  date,  il  est  à  propos  d'observer  ce  qu'on 
entend  par  le  nombre  des  années  du  G.*.  M.*,  et  par  la  computation  que 
l'on  en  fait. 

Le  1er  G.\  M.-,  a  été  N(otre')  Rfédempteur) .  Il  a  vécu  33  ans.  Après 
lui  la  G.-.  Mse.\  est  restée  indivise  entre  tous  les  membres  du  Chap.*. 
dllér  \  et  ceux  de  tous  les  autres  Chap.*.  rég  '.  et  tous  ces  Chap.'. 
font  exercer  une  année  quelconque  de  la  G.'.  M.",  suivant  l'époque  de 
l'année  courante  à  leurs  MM.",  annuellement  électifs,  celui  d'Hér*.  tenant 
le  siège  effectif,  en  sorte  que  le  corps  entier  est  G-.  M.*.,  les  MM.',  en 
charge  forment  en  corps  son  représentant  en  exercice  et  celui  d'Hér.'. 
le  représentant  en  tenant  le  siège  effectif 

Après  N.*.  R.-.  comptons  du  2d  G.*.  M.-.  33  ans,  du  3e  pendant  le 
même  temps  et  ainsi  de  suite  jusqu'à  présent.  Ces  années  commencent 
au  mois  de  mars  appelé  Nisan,  le  jour  du  jeudi  saint;  ainsi  le  54e 
G.".  M.\  a  commencé  au  mois  de  mars  1750  les  33  années  finissant  le 
jeudi  saint  du  mois  de  mars  1783.  On  datera  alors  du  mois  de  Nisan 
de  la  lw  année  du  55e  G.'.  M.',  et  ainsi  de  suite  à  perpétuité. 

Outre  le  triangle  lumineux,  les  3  mots  en  hébreu  écrits  au-dessous 
qui  servent  de  timbre,  la  date  en  caractères  hébraïques  et  en  hiéro- 
glyphes et  la  signature  caractéristique,  on  met  encore  au-dessous  du 
timbre  en  lettres  ordinaires  l'Or.*,  du  Chap.'.  Ensuite  l'intitulé  ordi- 
naire à  tous  les  brefs,  la  date  de  l'année  en  caractères  connus,  celle 
D.'.  L.\  M.'.  D.\  N.-.  R.*.  en  hiéroglyphes.  Tous  les  Chev.\  signent 
indistinctement  avec  ces  quatre  lettres  initiales  :  S-'.  P.*.  R.*.  C.  .  Après 
le  nom  de  chacun  et  au  bas  après  toutes  les  signatures,  le  secrétaire  met 
ces  mots  : 

Par  commandement  du  S.-.  Ch.\  d'Hér.*.,  et  il  met  sa  signature  au- 
dessous  avec  sa  qualité  de  S.'.  P.'.  R.'.  C.'.  et  de  Secrétaire. 

Au  bas  du  bref  et  à  l'une  des  extrémités  doit  être  le  sceau  de  Tordre 
qui  est  le  seul  et  qui  doit  pendre  à  un  cordon  enlacé  de  ruban  rouge  et 
noir,  et  c'est  sous  ce  cordon  que  doit  se  trouver  la  signature  caractéris- 
tique. 

Le  sceau  doit  porter  dans  un  manteau  ducal  un  aigle  sur  l'estomac 
duquel  sera  une  croix  chargée  d'une  rose  ;  cette  croix  est  sur  sept  degrés. 
A  l'entour  le  collier  de  l'ordre,  de  gueules  avec  un  pélican  pendant  au 
bas,  le  tout  surmonté  d'une  couronne  antique.  Le  manteau  parsemé 
d'hermines  et  de  sable  semé  de  croix  potencées  d'or.  Aux  coins  la  croix 
à  8  pointes  de  gueules.  La  croix  qui  est  au  cœur  est  d'or  ainsi  que  les 
degrés  sur  un  fond  de  gueules,  1  écusson  carré  long. 

L'empreinte  de  ce  sceau  doit  être  en  cire  rouge  appliquée  sur  une 
plaque  de  fer-blanc  de  la  même  largeur. 

La  légende  porte  en  hiéroglyphes  de  Chev.*.  le  nom  du  royaume  ou 
état,  la  province  et  l'Or.-,  où  le  Chap.'.  est  établi.    Au  reste,  le   dessein 


524 


LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


du  sceau  est  varié.  Il  ne  doit  pas  y  avoir  d'autre  légende  que  les  3  mots 
séparés  par  des  points. 

Le  petit  cachet  est  partout  de  sable,  une  têle  de  mort  et  deux  os  en 
sautoir  d'argent,  entouré  pour  légende  du  seul  nom  en  hiéroglyphes  . 

.-.LE  CHAP.\  DE  PARIS.-. 

A.-.    L.\   O.  .     D.-.    L  .'.    V.\ 

.'.Au   lieu  très  saint   de  la   montagne   d'Ecosse.-. 

.'.Par  les  nombres  sacrés.'. 

.".Salut.-. 

L'an  mil  sept  cent et 

ttJ  J-t-D  CTTT  —  J  BC  ttt 

mil  sept  cent...  le...  jour  du...  mois  maçonnique  cinq  mille  sept  cent... 
midi  plein,  le  souv.'.  Chap.\  deR.'.C.  .,  assemblé  en  notre  nom  sous 
notre  autorité  et  pleine  puissance, 

Ayant  vu  le  zèle  et  l'empressement . .. 

Nous,  d'un  commun  accord... 

Si  mandons  à  tous  les  maç.'. 

A  ces  causes... 

Donné  à  l'Or.',  de... 

Par  commandement  du  S.  Ch.  d'Hér.'. 

ART.    IV. 

Bref  d'un  récipiendaire. 

L'an  17...  et  D.\  L.\  M.'.  D.\  N.  .  R.'.  17...  le.  .  jour  du.,  mois 
m<iue  57...  M.\  P.*. 

Le  S.*.  Ch.'.  de  R.'.  C.\  assemblé  en  notre  nom  sous  notre  autorité 
et  pleine  puissance. 

Ayant  vu  le  zèle  et  l'empressement  pour  parvenir  au  dernier  grade  et 
point  parfait  de  la  maç.*.  du  T.'.  R.*.  et  P.'.  F.'....  né  à...  province 
de...  au  royaume  de...,  le...,  du  mois  de...  17...  professant  la  reli- 
gion ..,  chev.'.  de  l'Ep.'.  dit  d'Or.'.  m.\  de  la  L.'.  St  J.\  reconnue 
rég.v  et  duement  constituée  à  10.'.  de...  sous  le  titre  distinclif  de... 
Après  avoir  jugé  de  la  capacité  et  une  scrupuleuse  information  de  sa 
conduite,  vie  et  mœurs  tant  en  L.'.  que  dehors,  desquels  bon  rapport 
nous  a  été  fait  et  qu'il  a  satisfait  à  tous  les  devoirs  du  vrai  maç.'.  qui 
sont  exigibles  en  pareil  cas. 

Nous,  dua  commun  accord  avec  nos  TT.'.  RR.'.  et  PP.'.  FF',  sous- 
signés, lui  avons  fait  prêter  son  obligation,  l'avons  reçu  et  admis,  créé 
et  constitué  à  présent  et  pour  toujours  chev.'.  de  l'Ai.',  parf '.  et  souv.-. 
Pr.\  maç.'.lib.  .  d'Hér.'.  sous  le  titre  de  R.'.  C.'.  pour  par  lui  jouir 
des  prérogatives  attachées  à  ce  grade  par  toute  la  surface  de  la  terre  et 
sur  sa  demande  lui  donnons  plein  pouvoir  de,  partout  où  il  n'y  aura 
point  de  L.*.  régulièrement  constituée,  faire  et  parfaire  des  maç.*. 
jusqu'au  6e  grade  dit  Chev.*.   de  l'Ep.'.   ou  d'Or.',    inclusivement,  sans 


APPENDICES  525 

avoir  besoin  de  requérir  noire  autorité,  nous  réservant  le  seul  grade  de 
R.*.  C*.  qu'il  ne  pourra  conférer  sans  notre  consentement  autant  que 
l'aire  se  pourra,  OU  sans  celui  d'un  Chap.'.  régulièrement  assemblé,  lui 
communiquant  par  ces  présentes  et  par  l'autorité  qui  nous  a  été  donnée 
par  la  métrop.*.  L.'.  d'Angl.*.  d'Ec.  et  d'Irl.*.  une  partie  de  nos  pou- 
voirs pour  constituer  une  L.'.  par  sa  présence  avec  le  droit  de  tenir  le 
siège  dans  toutes  les  LL.\  régulières  répandues  sur  la  surface  de  la 
terre,  de  réformer  les  abus  qui  pourraient  s'être  glissés  dans  les  LL.\ 
soit  par  innovation  ou  ignorance  et  de  faire  généralement  tout  ce  qui 
tendra  au  bien  et  à  la  propagation  du  T.".  R.*.  ordre  de  la  maç.'.  ; 
promettant  d'observer  et  faire  observer  partout  où  il  se  trouvera  les 
statuts  de  l'ordre,  ainsi  quedenous  reconnaître  pour  S.-.  G.'.  M.'. 

Si  mandons  à  tous  les  maç.*.  et  prions  tous  nos  RR.-.  et  PP.*.  FF.  . 
qui  habitent  la  surface  de  la  terre,  de  le  reconnaître,  honorer  et  soulager 
dans  ses  besoins,  promettons  d'en  faire  autant  à  tous  ceux  qui  viendront 
de  leur  part  munis  de  certificats  et  qui  se  feront  reconnaître. 

A  ces  causes  nous  lui  avons  délivré  le  présent  bref  auquel  foi  doit  être 
ajoutée  pour  lui  servir  et  valoir  en  tant  que  besoin  sera.  Lequel  nous 
avons  fait  signer  par  NN.\  TT.\  RR.*.  et  PP.*.  FF.-,  et  contresigner 
par  N.\  T.\  Puis.',  et  Parf.\  F.-,  notre  secrétaire,  y  avons  apposé  notre 
sceau  puis  l'avons  fait  accepter  en  notre  présence  par  le  TV.  R.*.  et 
P.".  F......  en  apposant  sa  signature  à  la  marge  pour  éviter  toute  super- 
cherie. 

Réni  soit  celui  qui  lui  fera  bon  accueil  et  lui  sera  utile  ;  que  son  nom 
soit  à  jamais  honoré  et  chéri  de  tous  les  maç.*.,  qu'il  reçoive  par  nous 
et  en  notre  nom  tous  les  honneurs  dus  par  les  membres  à   nous  connus. 

Donné  à  1  Or.-,  de  l'Un.-,  le  siège  effectif  se  tenant  à  Hér.'.  la.  . 
année  de  notre  avènement  à  la  Gr.\  M.',  de  l'ordre  comme  54e  G.-.  M.'. 


Bref  pour  un  Chapitre   suffragant. 

(Il  faut  qu'il  y  ait  3  FF.-,  de  l'Or.-,  où  le  Chap.-.  veut  s'établir  qui 
soient  régularisés  avant  d'expédier  ce  bref.) 

L'an  17...  et  D.*.  L.-.  M.-.  D.-.  N.\  R.\  17...  le...  jour  du...  mois 
maç.-.  57 M.'.  P.  . 

Le  S.*.  Ch.\  de  R.-.  G.*,  assemblé  en  notre  nom  sous  notre  autorité 
et  pleine  puissance. 

Les  TT.\  RR.\   et    PP.-.  FF......  habitant  à  l'Or.-,   de...    tous  trois 

Chev.'.  de  l'Ai.*,  parf.-.  et  Souv.\  Pr.*.  maç.  .  lib.*.  d'Hér.*.  sous  le 
titre  de  R.'.  C.\  et  membres  de  notre  Souv.*.  Chap.*.  nous  ayant 
exposé  le  désir  sincère  qu'ils  avaient  de  se  réunir  pour  travailler  régu- 
lièrement audit  Or.-,  et  nous  ayant  demandé  qu'il  nous  plaise  leur 
accorder  le  droit  d'y  conférer  le  sub.\  grade  de  Chev.-.  de  l'Ai.-.  S  -. 
P.'.  R.'.  C".  d'Hér.*.  que  nous  nous  sommes  réservé  en  les  constituant 
Chev.*.  dudit  ordre  et  ayant  rédigé  des  statuts  particuliers  qu'ils  se 
proposent  d'exécuter  en  outre  des  ordonnances  générales,  lesquels  statuts 
nous  ont  été  présentés,  après  avoir  jugé  de  la  capacité  et  du  zèle  des- 
dits TT.*.  RR.*.  et  PP.*.  FF.*,  et  qu'ils  ont  satisfait  à  tous  les  devoirs 
qui  sont  exigibles  en  pareil  cas. 

Nous,  d'un  commun  accord,   avec  NN.*.    TT.*.   RR.*.    et    PP.*.   FF.'. 


526  LA    FRANC-xMACONNERIE    EN    FRANCE 

s 

soussignés,  en  vertu  des  pouvoirs  émanés  du  S.'.  Chap.'.    d'Hér.'.    notre 

M.".  Dem.'.  avons  accordé  et  accordons  aux   dits   RR.\    PP.".  FF.' 

pouvoir  de  s'assembler  audit  Or.",  de...  et  d'y  former  et  établir  un 
Souv.'.  Chap  '.  dépendant  de  notre  M.  .  Dem.-.  et  suffragant  libre  de 
celui  régulièrement  établi  à  notre  Or.*,  et  sur  leur  demande,  donnons 
plein  pouvoir  audit  Chap.'.  régulièrement  assemblé  audit  titre,  de 
conférer  le  grade  Subi.-.  Chev.'.  de  l'Ai.'.  S.*.  P.'.  R  '  C.'.  à  ceux  qui 
étant  régulièrement  élevés  au  G1'  grade  delà  mac',  dits  Chev.'.  de  l'Ep.'. 
ou  d'Or.',  auront  mérité  cette  récompense  par  leur  zèle,  leur  capacité  et 
leur  conduite  tant  en  L. '.  qu'au  dehors. 

Pourquoi  ledit  Chap.-.  pourra  recourir  à  notre  autorité,  créer  et  cons- 
tituer des  Chev.'.  de  l'Ai.'.  Parf.  .  et  Souv.'.  Pr.'.  mac.".  Lib.'.  d'Hér.'. 
sous  le  titre  de  R.".  C.'.  pour,  parles  FF.*,  ainsi  constitués  par  ledit 
Chap.'.  séant  à  l'Or.',  de...,  jouir  à  toujours  et  sur  toute  la  surface  de  la 
terre,  des  privilèges  attachés  à  ce  subi.',  grade,  à  charge  par  ledit 
Chap.'.  de  se  conformer  exactement  aux  instructions  renfermées  dans  le 
cahier  du  grade,  aux  ord.'.  gén.-.  et  aux  stat.'.  part.",  rédigés  par  les 
TT.'.  RR.'.  et  PP.'.  FF.' lesquels  ont  été  approuvés  à  toujours. 

A  ces  causes,  nous  leur  avons  délivré  ce  présent  bref,  auquel  foi  doit 
être  ajoutée,  pour  leur  servir  et  valoir  en  tant  que  besoin  sera,  lequel 
nous  avons  fait  signer  par  NN.'.  TT.'.  RR.'.  et  PP.'.  FF.',  et  contre- 
signer par  notre  Tr.'  Puis.",  et  Parf.'.  F.',  notre  secrétaire,  y  avons 
apposé  notre  sceau  sous  lequel  nous  avons  annexé  un  exemplaire  des 
instructions  reg.  .  des  ord.'.  gén.*.  et  des  stat.'.  part.",   avant  dits. 

Puisse  le  G.'.  A.',  de  l'U.'.  bénir  les  travaux  du  Chap.'.  établi  par  le 
présent  bref  et  combler  de  ses  grâces  tous  les  TT.'.  RR.".  et  PP.".  FF.', 
qui  y  participeront 

Donné  àl'Or.'.  de  l'Un.',  le  siège  effectif  se  tenant  à  Hér.'.  la...  année 
de  notre  avènement  à  la  G.'.  M.',  de  l'ordre  comme  54e  G.".  M.*. 

Lorsqu'un  Chap.'.  en  établit  un  suffragant  du  sien,  il  faut  qu'il  n'y  en 
ait  pas  de  rég.'.  plus  presque  lui,  sans  quoi  c'est  à  celui-là  qu'appar- 
tiendrait ce  droit.  Il  doit  ensuite  en  donner  avis  à  celui  dont  il  est 
suffragant.  Celui-là  en  fait  autant  au  sien  et  ainsi  de  suite,  en  sorte 
que  la  chaîne  des  suffragants  réciproques  soit  connue.  Les  Chap.*.  en 
tiennent  tableau.  Les  3  FF.',  qui  obtiennent  le  bref  sont  membres  de 
celui  qui  le  donne  et  par  réciprocité  les  3  Lum.'.  actuelles  de  ce  dernier 
deviennent  membres  honoraires  et  perpétuel  de  celui  qui  s'établit,  ils 
sont  mis  sur  les  tableaux  respectifs. 

Ceux  qui  ont  obtenu  le  titre  ont  pour  preuve  de  cette  qualité  le  certi- 
ficat de  leur  réception  ou  affiliation  au  Chap.'.  qui  établit  l'autre,  ne 
pouvant  en  former  la  demande  que  d'après  1  un  ou  l'autre  de  ces  actes. 
Les  3  Lum.'.  du  Chap.".  qui  établit  l'autre  reçoivent  au  jour  de  la 
première  assemblée  le  certificat  de  leur  qualité  dans  icelui,  d'après  la 
délibération  qu'en  prend  le  nouveu  Chap.  ' .  après  son  élection  d'officiers. 

ART.   VI. 

Bref  pour  un  membre  honoraire. 

L'an,  etc.,  sur  la  demande  qui  nous  a  été  faite  parle  T.*.  R.'.et  P.'. 
F.\.  Chev.\  del'Ai.*.  Parf.'.  et  Souv.'.  Pr.\  maç.\  lib.'.  d'Hér.'.  sous 
le  titre  de  R.'.  C.'.,  membre  du  Souv.'.  Chap.'.  régulièrement  établi  à 


APPENDICES  527 

l'Or.',  (le...  à  ce  qu'il  noua  plaise  lui  accorder  le  titre  de  membre  hono- 
raire et  perpétuel  de  notre  Gr.-.  Chap.'. 

Nous,  d'un  commun  accord  avec  NN.'.  TT.\  RR.\  et  PP.-.  FF.". 
soussi^iu'.s,  avons  accueilli  favorablement  la  demande  et  en  conséquence 
avons  accordé  et  accordons  au  TV.  R.\  et  P.*.  F.-,  le  titre  d«  membre 
hou.",  de  notre  Souv.-.  Chap.'.  pour  par  lui  jouir  des  droits  attachés  à 
ladite  qualité. 

A  ces  causes,  nous  lui  avons  délivré  le  présent  bref  auquel  foi  doit 
être  ajoutée  pour  lui  servir  et  valoir  en  tant  que  besoin  sera,  lequel  nous 
avons  fait  signer  par  NN.'.  TTV.RR.'.  et  PP.*.  FF.',  et  contresigner 
par  N.-.  T.'.  Puis.-,  et  P.\  Fr.\  notre  secrétaire,  et  y  avons  apposé 
notre  sceau. 

Donné   à   l'O.  • .  de  l'Un.'.,  etc. 

ART.    VII. 

Bref  pour  affilier  unChev.'.  Régulier. 

(On  ne  peut  affilier  que  des  FF.  .  qui  sont  munis  d'un  certif.'.  de 
réception  d'un  Chap.'.  Rég.\,  car  si  son  Chap.'.  n'était  pas  établi  régu- 
lièrement, ce  qui  se  voit  par  les  caractères  de  son  bref,  il  serait  obligé  de 
prêter  une  obligation  nouvelle  après  laquelle  il  serait  recréé  et  constitué 
Chev.*.  R.\  C.'.  en  lui  donnant  le  Col.*,  comme  il  est  dit  dans  le  cahier 
des  réceptions,  et  alors  il  recevrait  un  bref  de  récipiendaire.)  Si  son 
Chap.'.  est  rég.\  alors  il  est  affilié  et  reçoit  le  bref  suivant  :) 

L'an,  etc..  Le  Souv.-.  Chap.-.  de  R.\  C*.,  etc..  ayant   vu  le  zèle  que 

nous  a  témoigné  le  T.*.  R.\  et    P.*.    F.* Chev.*.    de   l'Ai..  Parf. '.  et 

Souv.-.  Pr.\  maç.\  lib.-.  d'Hér.-  sous  le  titre  de  R.-.  C.*.,  membre  du 
Souv.-.  Chap.'.  régulièrement  établi  à  l'Or.  .  de...  dont  il  nous  a  pré- 
senté le  bref  de  sa  réception  en  bonne  forme  et  ledit  T.*.  R.'.  et  P.*.  F.*. 
nous  ayant  exposé  qu'il  est  dans  l'impossibilité  de  suivre  les  trav.'.  de 
son  Souv.'.  Chap.'.  à  cause  de  son  éloignement  et  ayant  témoigné  un 
désir  sincère  de  participer  à  nos  mystères  pourquoi  il  nous  a  demandé 
de  l'agréger  au  nombre  des  membres  qui  composent  notre  Souv.*.  Chap.'. 

Nous,  d'un  commun  accord,  avec  NN.-.  TT.'.  RR.\  et  PP.*.  FF.', 
soussignés  avons  accueilli  favorablement  la  demande  et  en  conséquence 
avons  accordé  et  accordons  audit  T.'.  R.'.  et  P.".  F.  .  le  titre  de  memb.'. 
agrégé  à  notre  Souv.'.  Chap.'.,  aux  trav.-.  duquel  nous  l'avons  affilié  et 
affilions  pour  par  lui  jouir  des  droits  et  prérogatives  attachés  à  ladite 
qualité. 

A  ces  causes  nous  lui  avons  délivré,  etc. 

Donné  à  l'Or.',  de  l'Un.'.,  etc 

VI 

GRADE    DE   L'INITIÉ    DANS   LES    PROFONDS    MYSTERES 

Objet  de  ce  grade  (1). 

Le  Grade  de  l'Initié  dans  les  profonds  mystères  a  pour  objet  de  faire 
connaître,  aux  vrais  maç.\  parfaitement  affermis    dans  les  principes   de 

(1)  Suite  du  manuscrit  de  Devaux  d'Hugueville. 


528  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

la  maç.'.  ce  qu'il  y  a  de  bon  ou  de  vicieux  dans  tous  les  autres  grades 
dont  on  y  fait  la  critique  ;  c'est  pourquoi,  pour  pouvoir  juger  sainement 
si  les  grades  qu'on  y  approuve  ou  désapprouve  donnent  réellement  lieu 
au  jugement  que  l'on  en  porte,  il  est  essentiel  d'avoir  reçu  tous  ces  grades, 
ou  du  moins  de  les  connaître. 

Ces  grades  sont  principalement  les  trois  de  la  maç.*.  Bleue,  celui  de 
M.'.  Parf.\  ;  celui  d'Elu  ;  l'Elu  de  l'Inconnu;  celui  des  Quinze  ;  celui 
d'Ecossais  ;  celui  de  Souv.#.  Cons.'.  du  Temple  ;  celui  d'Élu  suprême, 
celui  de  Chev.\  d'Or.".  :  celui  de  Chev.\  dOcc.\  ;  celui  de  Sublime 
Philosophe  ;  celui  de  Chev.\  du  Soleil  ;  celui  de  Chev.\  du  Phénix  ; 
celui  de  Chev.\  de  l'Aigle  Noir,  ou  R.'.  C.\  de  Marseille. 

Pour  mettre  plus  d'ordre  dans  ce  traité  nous  le  diviserons  en  2  cha- 
pitres dont  le  premier  aura  pour  objet  une  instruction  générale  relati- 
vement à  ce  grade  et  sera  composé  de  10  sections  et  le  2«  aura  pour 
objet  tous  les  trav.'.  qui  se  font  dans  la  L.*.  de  l'Initié  dans  les  profonds 
mystères  et  sera  divisé  en  5  sections. 

CHAPITRE  PREMIER. 

Instructions  générales  sur  ce  grade. 

Ce  premier  Chap.-.  sera  divisé  en  10  sections  qui  auront  pour  objet, 
savoir  : 

La  lre,  le  lieu  où  l'on  peut  tenir  la  L.'.; 

La  2e,  les  ornements  des  FF.-,  en  L.\  ; 

La  3e,  les  noms  des  Offi.v  en  L.*.  ; 

La  4e,  la  batterie  pour  s'annoncer  à  la  porte  de  la  L.*.  ; 

La  5e,  la  proposition  d'un  récipiendaire  ; 

La  6e,  les  signes  du  grade  et  10rd.\: 

La  7e,  les  mots  du  grade  ; 

La  8e,  l'attouch.-.  du  grade  ; 

La  9",  le  baiser  du  grade  ; 

Le  10e,  le  changement  de  M.\ 

SECTION  PREMIÈRE. 

Du   lieu   où  Ion  peut   tenir  L.'. 

Dans  tous  les  autres  grades  il  faut  avoir  un  local  particulier,  pour 
tenir  L.-.,  et  ce  local  doit  être  décoré  suivant  le  grade  dont  on  tient  L.". 

Dans  celui-ci,  la  L.*.  se  tiendra  où  Ion  voudra  ;  il  n'y  aura  aucune 
nécessité  d'avoir  une  tenture  particulière  parce  que  le  fond  de  ce  grade 
ne  consiste  que  dans  le  discours  que  le  F.\  Orat.\  prononce  au  Récip.*. 
après  son  admission  en  L.'. 

SECTION  II. 

Ornements  des  FF.'. 

Les  ornements  que  les  FF.*,  doivent  porter  en  L.'.  sont  le  tablier,  les 
gants,  le  collier  et  le  bijou. 

Le  tablier  est  blanc,  brodé  d'un  ruban  couleur  de  rose  pâle  sans  autre 
ornement. 

Les  gants  sont  blancs. 

Le  collier  est  de  ruban  moiré  blanc,  liséré  comme  le  tablier  et  au  bas 
du  collier  pend  le  bijou. 


APPENDICES  529 

Le  bijou  est  OU  soleil  sortant  d'un  nuage  avec  celte  devise  :  Posl  lene- 
bras  h;.v. 

section   m. 

Nom  des  officiers  en  L.'. 

Dans  tous  les  hauts  grades  en  donne  des  noms  pompeux  aux  ofl.  . 
Dans  celui-ci  on  ne  leur  donne  d'autres  noms  que  ceux  qu'ils  ont  dans 
la  Maçonnerie  simple. 

Le  maître  s'appelle  simplement  Yen.*. 

Les  2  autres  lumières  de  la  L.*.  s'appellent  surveillants  et  ainsi  de 
tous  les  autres  off..*. 

SECTION     IV. 

Manière  de  frapper  pour  entrer  en  L. 

Lorsque  la  L.'.  est  ouverte,  les  FF."  qui  se  présentent  pour  y  entrer 
doivent  s'annoncer  à  la  porte  par  2  coups,  séparés  au  moins  d'une 
minute.  On  leur  répond  du  dedans  et  ils  répètent,  après  quoi  on  leur 
ouvre. 

section  v. 

Proposition  d'un  récipiendaire. 

L'on  ne  proposera  un  récip.\  qu'avec  toutes  les  précautions  et  après 
l'assurance  de  ses  qualités  strictes  tant  civ.\  que  maç.*. 

Comme  dans  ce  grade,  l'amitié  et  l'union  doivent  être  plus  intimes  que 
dans  tous  les  autres,  un  seul  opposant  suffira  pour  faire  rejeter  un  can- 
didat, fut-il  doué  de  toutes  les  qualités,  élevé  à  tous  les  grades  maç.#. 
possibles  :  parce  qu'il  est  à  remarquer  qu'il  y  a  beaucoup  de  maç.-.  qui 
quoique  étant  darvenus  à  la  connaissance  des  grades  sup.\  n'ont  pas 
acquis  les  vertus  qu'ils  enseignent  et  n'ont  pas  même  le  caractère  formé 
de  façon  à  vivre  avec  tout  le  monde. 

Voici  d'où  naissent  les  intrigues  qui  divisent  les  LL.".  et  qui  font  d'un 
lieu  de  paix  et  de  tranquillité,  le  séjour  de  la  discorde  et  quelquefois  de 
la  haine  la  plus  envenimée. 

SECTION     VI. 

Des  signes  et  ordres. 

Il  y  a  deux  signes  :  celui  d'opposition  et  celui  d'admiration. 

Le  signe  d'opposition  consiste  à  faire  tomber  la  main  droite  sur  la 
cuisse. 

Le  signe  d'admiration  est  le  même  que  celui  de  comp.\  dans  la 
Maçonnerie  Bleue.  Il  se  fait  en  portant  la  main  droite  sur  le  cœur.  C'est 
ce  même  signe  qui  sert  d'ordre. 

SECTION   VII. 

Des  mots. 

Il  y  a  aussi  deux  mots  : 
Le  1er  est  Amitié  ; 
Le2«  Union. 

LA   FRANC-MACONNERîE. —  T.    I.  31 


530  LA   FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

SECTION  VIII. 

Des  attouchements. 

L'attouch.*.  consiste  à  se  prendre  et  à  se  serrer  réciproquement  avec 
le  pouce  la  2e  phalange  du  doigt  auriculaire  ou  petit  doigt. 

SECTION     IX. 

Du  baiser. 
Le  baiser  des  Initiés  est   le  même  que  celui    de  la  Maçonnerie  Bleue. 

section   x. 
Changement    de    maître. 

Chaque  memb.'.  deviendra  maît.'.  à  son  tour,  à  moins  que  tous  les 
memb*.  d'uu  commun  accord  ne  veuillent  la  continuation  de  l'exerçant. 
Par  ce  moyen,  l'égalité  subsistera,  n'y  ayant  aucune  place  distinguée 
parmi  les  FF.*. 

CHAPITRE    II 
Des    travaux. 

Ce  Chap.".  sera  divisé  en  5  sections  qui  ont  pour  objet,  savoir  : 
La  lrc,  lOuverture  de  la  L.\  et  la  prière  qu'on  y  fait  ; 
La  ie,  la  Réception  ; 
La  3",  l'Instruction  gén.  de  laL.'.  ; 

La  4e,  le  Discours  de  l'Orat.*.  relativement  à  ce  grade,    et  ceux  dont 
nous  avons  parlé  dans  l'objet  de  ce  grade  ; 
La  5e,  la  Clôture  de  la  L.\ 

SECTION     PREMIÈRE. 

Ouverture  de  la  L.'. 

Dès  que  tous  les  FF.*,  sont  entrés,  décorés  et  assis,  le  Vén.*.  fait  les 
questions  suivantes  : 

D.  —  F.  .  1er  Surv.*.,  quel  sujet  nous  rassemble  ? 

R.  —  Celui  de  nous  dépouiller  de  nos  préjugés,  de  devenir  hommes 
et  d'être  vertueux  et  honnêtes 

D.  —  Sommes  nous  à  couvert  de  toute  surprise  ? 

R.  —  Oui,  Tr.\  Vén.'.,  aucun  mortel  ne  peut  pénétrer  en  ce  lieu. 

Et  après  cette  réponse  le  M.*,   dit  : 

Mes  FF.*.,  puisque  nous  sommes  sûrs  d'être  à  couvert,  que  notre  but 
est  la  vertu  et  que  l'amitié  la  plus  intime  nous  unit,  cherchons  tous  les 
moyens  de  nous  rendre  meilleurs. 

La    Prière. 

O  toi,  Souv  '.  de  ce  vaste  Univ.*.  que  nos  cœurs  cherchent  et  qu  ils 
aperçoivent  dans  la  sublimité  de  tes  œuvres,  daigne  être  propice  à  nos 
vœux  ;  seconde  la  pureté  de  nos  intentions  et  fais  que,  dégagés  des  liens 
qui  nous  attachent  aux  choses  terrestres,  nous  trouvions  le  bonheur  véri- 
table des  Elus  dans  la  pratique  des  vertus. 

Amen* 


APPENDICES  531 

SECTION     II. 

Réception. 

Lorsque  la  L.'.  est  ouverte,  le  F.*,  expert  conduit  le  récip.'.  auprès 
de  la  porte,  où  il  s'annonce  par  la  batterie  du  grade.  Alors  le  M.*,  dit  : 

Fr.  ".  1("  Surv.\,  faites  voir  qui  frappe  à  la  porte  de  la   L.\ 

Le  1er  Surv.\  rend  l'ordre  au  F.'.  M.",  des  Cérém.*.  qui  lui  dit  qui 
c'est,  et  il  le  dit  lui-même  au  M.*. 

T.*.  Vén.\,  c'est  un  maç.'.  qui.  connaissant  tous  les  Gr.\  de  la 
Maçonnerie,  en  secoue  les  préjugés  et  cherche  un  asile  où  habite  la  vraie 
vertu. 

Après  cette  réponse,  le  M.*,  dit  : 

Mes  FF.'.,  donnez-lui  l'entrée  de  notre  Temple  et  qu'il  trouve  parmi 
nous  le  bien  inestimable  que  son  cœur  désire. 

Lorsque  le  candidat  est  entré,  le  M.'.  lui  dit  : 

Mon  G.'.  F.'.,  étant  parfaitement  assuré  de  la  docilité  de  votre  carac- 
tère, de  la  droiture  de  votre  âme,  de  votre  zèle  à  secourir  les  malheureux, 
nous  nous  félicitons  de  vous  voir  admis  dans  le  choix  que  nous  faisons 
des  maç.\  vertueux. 

Je  vous  engage  de  vous  unir  à  nous  par  l'amitié  la  plus  étroite. 
Prenez  place,  mon  T.-.  C.'.  F.*.,  et  profitez  des  instructions  que  l'on  va 
faire. 

section    m. 

Instruction. 

D.  —  Êtes- vous  initié  ? 

R.  —  J'adore  le  divin  créateur  de  la  nature.  Je  reconnais  sa  puissance 
sans  borne.  Je  conçois  sa  bonté.  J'espère  en  sa  miséricorde.  Enfin,  je 
suis  persuadé  qu'il  n'a  pu  nous  créer  que  pour  nous  rendre  heureux. 

D.  —  Qu'avez-vous  fait  pour  être  admis  dans  nos  mystères  ? 

R.  —  J'ai  cherché  la  vertu.  J'ai  tâché  d'imiter  celui  qui  nous  a  créés 
en  devenant  doux  et  compatissant  pour  les  malheureux,  et  je  fais  mes 
efforts  pour  être  l'ami  de  tous  les  hommes  vertueux. 

D.  —  Par  quel   degré  êtes-vous  donc  parvenu  jusqu'à  nous  ? 

R.  —  En  secouant  le  joug  des  préjugés  que  j'avais  reçus  dans  le? 
différents  grades  de  la  Mac.',  que  je  méprise  en  partie  et  que  je  déleste 
dans  l'autre. 

D.  —  Quelles  sont  donc  vos  idées  ? 

R.  —  Je  pense  que  l'apprentissage  et  le  compagnonnage,  où  l'on  nous 
donne  des  préceptes  de  vertus  sont  bons  et  honnêtes.  Que  dans  la  Mse  le 
crime  a  quelque  accès,  mais  qu'il  est  puni  dans  1  Elu.  Que  le  Parf.\  M.'. 
Angl.'.  est  de  tous  les  autres  grades  le  plus  raisonnable  et  le  seul  qui  soit 
parfaitement  bon.  Que  les  différents  Ecos  '.sont  inutiles,  que  l'El  '.  Sup.\ 
est  ampoulé  et  que  le  Chev.'  d'Or.*,  est  futile  ;  que  celui  d'Occ.  est 
dépourvu  de  sens  commun;  que  le  Souv.  .  Comm.'.  est  indécent  ;  que  le 
Gr.\  Elu  est  détestable  ainsi  que  le  R.'.  C.*.  de  Marseille  dit  le  Ghev.\  de 
l'Aigle  Noir  qui  est  digne  d  horreur.  Que  le  Chev.*.  du  Soleil  est  mépri- 
sable ;  le  Subi.'.  Philos.',  digne  de  pitié  ;  le  Chev.'.  du  Phénix  absolu- 
ment déraisonnable 

D.  —  Pourquoi  continuez  vous  la  Maçonnerie,  puisque     vos    idées    lui 
sont  aussi  désavantageuses  ? 


532  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

R.  —  Je  ne  méprise  que  les  abus,  j'aime  à  entendre  les  bons  principes 
qu'elle  nous  donne.  Je  tâche  de  les  mettre  en  pratique  et  notre  travail 
ne  tend  qu'à  les  faire  révérer  et  les  faire  paraître  parmi  nous  avec  plus 
d'éclat. 

D.  —  Comment  y  parviendrez-vous  ? 

R.  —  En  n'admettant  dans  notre  Soc*,  que  des  gens  choisis  et  qui 
conviennent  à  tous  égards  au  titre,  de  Vrais  Initiés. 

D.  —  Quelles  sont  les  qualités  que  nous  exigeons? 

R.  —  La  droiture  du  cœur  et  de  l'âme,  un  caractère  docile  qui  est 
toujours  de  l'avis  de  ses  frères  et  qui  ne  1  emportera  jamais  lorsque  les 
défauts  dont  aucun  homme  n'est  exempt,  lui  seront  représentés  avec  la 
douceur  que  les  parfaits  maçons  doivent  mettre  dans  leurs  remon- 
trances. 

SECTION     IV. 

Discours  de    l  Orateur. 

Après  que  l'instruction  est  finie,  le  F*.  Orat.\  lit  le  discours  suivant, 
dans  lequel  se  trouve  expliqué  parfaitement  tout  l'objet  de  ce  grade  : 

Vous  avez  passé  par  tous  les  grades,  on  vous  a  fait  parcourir  jusqu'à 
aujourd'hui,  les  uns  après  les  autres,  tous  les  mystères  redoutables  au 
vulgaire,  parce  qu'il  ne  les  connaît  pas  et  que  le  sage  voit  pour  la  plu- 
part d  un  œil  méprisant  et  dédaigneux. 

Nous  savons  rendre  justice  à  la  vertu  et  à  la  vérité,  elles  nous  sont 
chères.  Ce  que  vous  allez  entendre  vous  en  convaincra  de  plus  en  plus. 

L'analyse  de  ces  grades  va  vous  être  dévoilée,  vous  allez  en  pénétrer 
les  replis  les  plus  cachés. 

En  vous  découvrant  les  moindres  circonstances,  vous  en  reconnaîtrez 
les  explications  et  vous  sentirez  enfin  ce  qu'ils  méritaient  de  votre  appro- 
bation et  de  votre  mépris. 

Les  connaissances  que  vous  avez  dû  acquérir  après  avoir  été  reçu 
Apprenti.  Comp.'.et  M.',  dans  les  grades  de  l'Elu  Ecossais,  Parfait  M.*. 
Anglais,  Elu  suprême,  Souv.'.  Com.  .,  Chev  '.  d'Or  \  et  d'Occ.-.,  Prince 
de  R  '.  C.*.,  Grand  Elu,  Chev.-.  de  l'Aigle  Noir,  Chev.-.  du  Soleil  et  des 
adept..,  Subi.*.  Philosophe  et  Chev.*.  du  Phénix  sont  les  seuls  sur 
lesquels  nous  nous  étendrons.  Les  autres,  qui  sont  en  quantité  et  qui  ne 
sont  que  des  répétitions  sèches  et  stériles  de  ceux  dont  il  vient  d'être 
fait  mention,  resteront  dans  l'oubli  et  ne  nous  laisseront  d'autres 
impressions  que  le  dédain  le  plus  parfait  pour  ceux  qui  ont  pu  employer 
leur  temps  à  des  ouvrages  aussi  futiles,  de  peur  d'être  obligé  de  les  haïr 
comme  des  gens  infâmes,  que  la  cupidité  seule  a  conduits  dans  un  travail 
aussi  pitoyable. 

Apprenti  et  compagnon.  —  Les  deux  premiers  grades  nous  appren- 
nent l'entreprise  que  fit  Salomon  de  bâtir  un  Temple  à  l'Eternel  ;  les  pré 
cautions  qu'il  prit  pour  le  rendre  magnifique  ;  la  demande  qu'il  fit 
d'Hiram  Abif  à  Hiram,  roi  de  Tyr,  pour  lui  confier  en  chef  la  conduite 
de  cette  sainte  entreprise  ;  le  partage  que  fit  Hir.\  Ab.'.  des  ouvriers  en 
trois  classes  ;  les  signes,  mots  et  attouch.'.  dont  il  convint  avec  eux  pour 
les  reconnaître  les  uns  d'avec  les  autres  ;  les  proportions  du  Temple 
et  des  deux  fameuses  colonnes. 

Jusqu'ici  il  n'y   a  rien  de  mystérieux  ;  ouvrez   la  Bible,  vous  y  trou- 


APPENDICES  533 

verez   les    mêmes    choses    expliquées    peut-être    plus    clairement.   Maifl 
n'importe,  reconnaissons  la  prévoyance  de  notre  instituteur. 

Pour  parvenir  à  son  but,  qui  était  de  rendre  les  hommes  égaux  et  «le  les 
Paire  vivre  ensemble  dans  l'union  la  plus  étroite  et  la  plus  intime,  il 
sut  s'accommodera  leurs  mœurs  et  de  plus  à  la  faiblesse  de  leur  âme.  11 
reconnaissait  combien  le  merveilleux  a  de  pouvoir  sur  le  cœur  humain. 
Il  descendit  à  des  considérations,  rendit  1  entrée  de  Tordre  difficile, 
imagina  de  rendre  les  réceptions  terribles  et  formidables  et  sut  les 
rendre  respectables  par  l'appareil  mystérieux  qu'il  répandit  sur  tout 
ce  qui  nous  environnait. 

Il  sentit  d'ailleurs  la  dure  nécessité  de  ces  formalités  ;  il  vit  qu'en 
trompant  le  vulgaire,  il  éprouverait  l'âme  de  ceux  qu'il  voulait  admettre, 
qu'il  sondait  par  là  leur  cœur  et  leur  façon  de  penser,  et  qu'il  pourrait 
par  ce  moyen  distinguer  la  bonté  du  caractère  et  de  l'esprit  de  candeur. 
D'ailleurs  l'établissement  de  notre  M.*,  est  louable;  il  tendait  par  son 
application  à  faire  vivre  les  hommes  dans  légalité  et  à  n'admettre  entre 
eux  de  prééminence  que  celle  que  donne  la  vertu. 

Maîtrise.  —  Si  nous  avançons,  la  M.*,  nous  offre  le  massacre  d'Hir.*. 
par  3  malheureux  consp.*.  jaloux  de  la  gloire  et  de  la  faveur  qu'il  rece- 
vait en  vivant  familièrement  avec  le  roi  Salomon,  l'assemblée  que  tinrent 
les  maîtres  pour  délibérer  sur  ce  qu  ils  avaient  à  faire,  afin  de  prouver 
leur  innocence  à  Salomon,  la  recherche  du  corps  du  R.\  M.'.  Hir.\ 
qu'ils  retrouvèrent  et  l'exhumation  qu'ils  en  firent. 

Déjà  dans  ce  grade  le  crime  se  glisse  parmi  les  constructeurs  du 
Temp.\,  mais  on  sut  le  tourner  à  profit  pour  en  montrer  l'horreur  et  le 
faire  di'tester  de  ceux  qui  étaient  membres  de  l'ordre  naissant. 

Elu.  —  Dans  l'élu,  la  vengeance  tirée  des  meurtriers  est  une  leçon  qu 
nous  prouve  que  le  crime  ne  reste  jamais  impuni,  que  l'auteur  de  la 
nature  est  infiniment  bon,  juste  et  implacable  pour  les  méchants. 

On  découvre  dans  ce  grade  Abir.*.,un  des  auteurs  de  ce  meurtre  ;  mais 
d'où  vient  qu'on  fit  des  recherches  contre  Cebal  et  Méphiboseth  ?  pour- 
quoi multiplier  les  êtres  ?  Ne  pouvons-nous  pas  dire  que  déjà  le  vice  se 
glissait  dans  la  Mac.*,  et  que  cette  multiplication  était  un  présage  des 
désordres  qui  allaient  s'ensuivre  ?  Le  crime  puni  et  le  corps  retrouvé,  il 
fallut  inhumer  notre  R.\  M.*,  avec  la  pompe  qu'exigeait  le  service  qu'il 
avait  rendu,  et  il  aurait  sans  doute  mérité  une  autre  récompense. 

C'est  le  sujet  de  l'Ecossisme,  où  l'on  glisse  des  cérémonies  judaïques 
qui  ne  peuvent  faire  qu'un  très  mauvais  effet,  surtout  dans  un  temps  où 
les  personnes  qui  sont  à  la  tête  des  LL.\  sont  souvent  peu  instruites  et 
ont  d'ailleurs  des  dépenses  à  faire,  pour  les  rendre  avec  dignité,  motifs 
qui  peuvent  les  faire  regarder  comme  contraires  aux  règles  de  l'ordre, 
par  celui  qui  possède  au  fond  du  cœur  les  vrais  principes  de  la  nature 
qui  est  de  saisir  les  occasions  de  se  rendre  utile  à  l'humanité  souffrante. 
Parf.-.  M.'.  Angl.-  —  De  là  on  passe  à  la  M.',  du  Parf.\  M.'.  Angl.\ 
qui  est  une  répétition  générale  de  ce  qu'on  a  vu  et  qui  aurait  dû  être  le 
seul  grade,  si  notre  législateur  n'eût  eu  crainte  de  communiquer  trop 
vile  l'intelligence  de  notre  ordre,  et  de  donner  lieu  à  l'indiscrétion  en 
communiquant  tout  d'un  coup  ce  qu'il  y  avait  de  mystérieux  à  uu 
homme  nouvellement  reçu. 

Voilà  ce  qui  a  fait  longtemps  le  secret  de  notre  ordre  respectable. 
Elu  de  l'inconnu    et   des  quinze.  —   Tout  était  bon   jusqu'alors.  Rien, 


531  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

excepté  les  élus  de  l'inconnu  et  des  quinze,  n'était  de  trop.  Tout  tendait 
au  bien  et  au  maintien  de  l'ordre  ;  mais  il  n'est  rien  de  stable.  Les 
hommes  aussi  changeants  que  l'ombre  et  aussi  légers  que  le  vent  pou- 
vaient-ils rester  longtemps  dans  l'état  heureux  où  notre  législateur  s'était 
efforcé  de  les  mettre  ?  Pleurons  leurs  faiblesses  et  leur  aveuglement, 
mais  sachons  réparer  leurs  torts  et  donner  un  nouveau  centre  à  l'Art 
Royal  en  rétablissant  les  premières  LL.\,  en  rendant  un  culte  pur  à 
l'Etre  suprême,  en  déchirant  impitoyablement  le  bandeau  qui  nous  a 
privés  jusqu'à  ce  jour  de  la  vraie  lumière. 

Ecossais.  —  On  fît  ensuite  du  Parf  .  M.*.  Angl.\,  le  grade  d'Ecoss.'., 
qui  renferme  la  cérémonie  de  la  dédicace  du  Temple.  Il  était,  suivant 
les  apparences,  naturel  de  terminer  1  histoire. 

Souv.'.  Commandeur  du  Temple.  —  Mais  où  cela  nous  conduit-il  ?  Au 
Souv.'.  Com. '.  du  Temp.'.,  grade  où  l'indécence  la  plus  outrée  et  linso- 
lence  la  plus  criante  sont  permises  à  celui  qui  en  est  décoré,  par  la  seule 
raison  qu'il  sait  que  c'était  au  com.  qui  en  gardait  la  clef  et  qui  avait 
l'honneur  d'être  admis    à  la  cour  du  roi  Salomon 

Elu  suprême.  —  On  sentit  ensuite  qu'on  pourrait  ajouter  à  celui 
qui  vient  d'être  dit  la  chute  du  roi  Salomon,  son  impiété  et  les  sacri- 
fices abominables  qu'il  faisait  aux  faux  dieux,  dans  ce  même  temps 
qu'il  avait  fait  construire  pour  le  seul  et  véritable  Maître  de  la  nature 
et  le  comble  de  la  folie  en  faisant  substituer  à  l'arche  d'alliance  les 
simulacres  des  divinités  que  lui  apportaient  ses  femmes  et  ses  concu- 
bines. On  imagina  donc  l'EL*.  Sup.-.  où  l'on  jure  une  haine  implacable 
à  cet  ennemi  déclaxé  de  celui  qui  l'avait  comblé  de  ses  bienfaits. 

Chevalier  d'Orient  —  Il  fallut  aller  plus  loin  ;  le  rétablissement  du 
Temple  de  Dieu  sous  Cyrus  fut  le  sujet  du  Chev.\  d'Or.1.  Vous  y 
apprenez  la  manière  dont  Zorobabel  va  se  présenter  devant  Cyrus.  Il 
pousse  dans  son  antichambre  des  soupirs  qui  sont  entendus  des  gardes. 
On  va  voir  quel  est  1  homme  revêtu  d'un  voile,  couvert  de  cendres, 
qui  pousse  ces  gémissements.  On  le  fait  prosterner  aux  pieds  du  roi  qui 
gracieusement  lui  laisse  voir  son  visage  et  qui  ordonne  à  son  ministre 
de  lui  donner  des  instructions  qui  consistent  à  lui  dire  qu'il  faut  avoir 
un  mot  de  passe  pour  se  reconnaître  dans  un  besoin  et  qu'il  faut  être 
bien  unis.  On  l'arme  ensuile  en  Chev.-.  d'Or.-,  en  lui  mettant  une 
écharpe  sur  laquelle  est  représentée  un  pont  traversant  une  rivière, 
parsemée  de  têtes  de  mort  et  d'ossements.  On  y  apprend  le  fameux 
combat  du  fleuve  Starburzanaï  ;  la  victoire  que  remporte  Zorobabel  sur 
les  sujets  du  roi  Cyrus  qui  l'avaient  attaqué  malgré  le  passeport  qu'ils 
voulurent  lui  faire  avoir,  signé  de  leur  roi. 

Les  noms  des  ouvriers  du  nouveau  Temp.'.,  le  nombre  des  hommes 
qui  y  furent  emplo}rés,  la  résolution  qu'ils  prirent  de  travailler,  mais 
avec  l'épée  au  côté,  le  nombre  d'années  qu'ils  furent  à  le  construire  qui 
fut  de  40  ans  :  toute  cette  histoire  se  trouve  encore  dans  la  Bible,  sauf 
la  réception  du  Chev.'.  par  Cyrus  dont  il  n'est  fait  aucune  mention  et 
qui  d'ailleurs  est  par  elle  même  fort  peu  nécessaire. 

Chevalier  d'Occident.  —  On  trouve  dans  l'Apocalypse  le  sujet  du 
Chev.*.  d'Occ".  où  vous  êtes  ensuite  transporté.  La  L.-.  représente  le 
ciel  tel  qu'il  est  décrit  par  saint  Jean.  Le  M.',  de  la  L.'.  représente 
l'Alpha  et  l'Oméga  ;    il   tient  un    livre  fermé,  sept  sceaux  qui  s'ouvrent 


APPENDICES  535 

cl  dont     il    sort    des  traita  ;    une  balance,  une  épéc,    emblèmes    que  l'on 

explique  et  qu'on  fait  rapportera  la  M.*. 

Comme  l'Apocalypse  est  indéchiffrable,  ce  grade  l'est  tout  autant  et 
n  ■  peut  être  regardé  comme  admirable  que  par  ceux  auxquels  les  eboses 
auxquelles  ils  ne  comprennent  rien  paraissent  des  mystères  et  des  mer- 
veilles ;  absurdité  moins  criminelle  que  celles  dont  on  vient  de  parler, 
mais  encore  plus  folle. 

Sublime  Philosophe.  —  L'or,  ce  métal  source  de  tant  de  crimes  et 
d'horreurs  et  dont  nous  devrions  pouvoir  nous  passer,  est  l'idole  que  nous 
cherchons  avec  le  plus  grand  empressement. 

Le  Subi  '.  Philos  ".,  tilre  sublime  et  qui  ne  convient  qu'à  celui  qui 
l'est  et  non  point  à  un  homme  dont  l'occupation  est  absolument  con- 
traire ;  titre  qui  ne  doit  être  accordé  tout  au  plus  qu'à  celui  qui  a  la 
vertu  pour  principe,  qui  la  pratique  et  qui  par  son  moyen  sait  se  rendre 
heureux,  le  Subi.-.  Phil.*.,  disons-nous,  fait  son  unique  étude  de  la 
richesse  de  ce  fantôme,  et  prétend  par  ses  découvertes  égaler  la  science 
du  créateur  et  de  l'auteur  de  tout  être. 

Chevaliers  du  Soleil  et  du  Phénix  —  Ces  grades  sont  un  mélange  de 
religion,  de  mercure,  de  soufre  et  d  autres  ingrédients  qui  entrent  dans  la 
composition  de  ce  précieux  métal  qu'Hir.-.  ainsi  que  Sal.\  possédaient, 
mais  qui  a  été  perdu  et  qui  ne  se  trouve  plus  que  chez  quelques-uns  des 
descendants  de  ces  fameux  alchimistes  ou  de  leurs  élèves.  L'on  cher- 
chera dans  ce  grade  la  vertu  et  le  repos  après  le  travail  immense 
qu'exige  ce  grand  œuvre  dont  le  secret  n'est  pas  encore  trouvé  et  ne  se 
trouvera  pas  de  sitôt.  Ce  grade  donne  des  relâchements  [sic)  au  moyen 
desquels  on  se  flatte  de  pouvoir   le  trouver. 

On  pardonnerait  à  des  hommes  fous  ou  insensés  de  s'y  appliquer. 
Mais  que,  sans  la  moindre  notion  de  chimie  et  sans  la  moindre  teinture 
physique  des  autres  sciences  nécessaires  à  un  travail  de  cette  espèce,  on 
s'y  adonne  et  Ion  s'y  livre  dans  ces  grades  où  il  en  est  question,  il  faut 
être  absolument  dépourvu  de  bon  sens,  et  c'est  se  mettre  dans  le  cas 
d'être  enfermé  aux  petites  maisons. 

Souverain  Prince  Rose-Croix.  —  Comme  l'Ancien  Testament  a  fait  place 
au  Nouveau  dont  il  n  était  que  la  figure,  et  que  la  loi  de  grâce  a  fait 
disparaître  la  loi  judaïque,  on  a  cru  devoir  consacrer  cette  heureuse 
révolution  dans  la  M.*,  par  un  grade  particulier.  Ce  grade  est  celui  de 
S.*.  P.\R.\  C  '.Autrement  dit  le  Chev  \  de  l'Aigle  ou  du  Pélican  quia 
pris  sa  naissance  à  Hérodom  II  a  pour  objet  les  mystères  de  la  mort  et 
de  la  résurrection  du  Sauveur  du   monde. 

L'objet  de  ce  grade  est  sublime,  puisqu'il  nous  rappelle  le  mystère  de 
notre  rédemption  opéré  par  l'incarnation  du  Souv.  M.-,  de  la  nature  qui 
pour  l'amour  de  nous  a  fait  le  sacrifice  volontaire  de  sa  vie,  sacrifice 
dont  la  mort  d'Hir.-..  qui  fait  l'objet  des  premiers  grades,  n'est  qu'une 
bien  faible  image,  et  le  triomphe  de  la  religion  chrétienne  par  la  résur- 
rection du  Verbe.  Mais  les  honneurs  et  les  privilèges  extraordinaires 
qu'on  attribue  à  ceux  qui  sont  revêtus  de  ce  grade  sont  entièrement 
contraires  à  l'esprit  d'humilité  qu'on  enseigne  et  aux  maximes  de 
l'Evangile. 

On  y  a  aussi  introduit  une  cérémonie  de  la  religion  protestante  qu'on 
devrait  supprimer.  Test  la  Cène  qu'on  y  fait  A  cela  près,  ce  grade  est 
réellement  respecfab 


536  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

Chev.'.  de  V Aigle  Noir. —  Le  désir  de  se  singulariser  a  fait  imaginer  à 
Marseille  un  grade  qui  n'a  de  commun  avec  celui-ci  que  le  nom  de 
R.\  C.'.  qu'on  lui  a  donné  fort  mal  à  propos.  Ce  grade,  appelé  autre- 
ment Chev.*.  de  l'Aig.\  Noir,  n'a  pour  objet  essentiel  que  le  Grand 
Œuvre,  comme  tous  les  autres  grades  prétendus  philosophiques  dont  il 
a  été  parlé  ci-dessus,  par  conséquent  il  n'est  ni  moins  extravagant  ni 
moins  ridicule  que  ces  autres  grades.  La  réception  est  contraire  aux 
lois  de  la  nature  et  fait  horreur  à  toute  âme  délicate  ;  elle  est  plus 
propre  à  former  un  fanatique  qu'un  parf. \  mac.". 

Grand  Elu.  —  Le  grade  de  Gr.  ' .  Elu  * .  est  un  mélange  de  l'Elu  du  Chev. 
Kad.\  et  des  grades  philos.*.  On  ne  voit  pas  qu'il  ait  d'autre  objet  que 
l'orgueil  et  l'esprit  de  domination  dans  les  LL.\,  vices  qui  sont  égale- 
ment proscrits  par  les  lois  de  la  Mac.'.  ;  ce  qui  seul  suffit  pour  prouver 
l'inutilité  et  l'indécence  de  ce  grade  qu'on  devrait  totalement  anéantir. 

Voilà  les  principaux  grades  analysés.  Réfléchissons  sur  les  derniers, 
qui  ont  pour  objet  le  Grand  Œuvre,  et  voyons  quel  bien  il  pourrait  eu 
résulter  quand  même  le  moj'en  de  faire  de  l'or  serait  découvert. 

L'homme  qui  le  posséderait  en  serait  il  plus  sage  et  plus  vertueux  ? 
Pourrait-il  faire  le  bonheur  de  l'humanité  et  de  ses  semblables  ?  Point 
du  tout. 

Au  contraire  avec  la  facilité  de  satisfaire  tous  ses  désirs,  il  s'aban- 
donnerait beaucoup  plus  librement  aux  grands  excès,  et  l'or  devenant 
plus  commun  rendrait  la  subsistance  et  tous  les  besoins  de  la  vie  beau- 
coup plus  chers  et  ferait  périr  de  misère  ceux  qui  n'auraient  pas  le 
bonheur  d'en  posséder. 

Dégageons  nous  tous,  mes  ff.  \,  de  la  tyrannie  de  ces  prétendus  con- 
naisseurs, et  entrons  pour  n'en  sortir  jamais  dans  le  vrai  sentier  du  bon- 
heur. Plus  de  préjugés  ;  ne  soyons  plus  les  enfants  d'Hir.\  construc 
teurs  du  Temp.'.  ni  du  prince  de  Juda  qui  reconstruisit  le  Temple  de 
l'Eternel,  ni  de  saint  Jean  l'Apocalyste  transporté  dans  l'île  de  Pathmos, 
ni  enfin  les  descendants  de  personne. 

Soyons  vertueux,  adorons  l'Etre  suprême  parce  qu'il  est  notre  bienfai- 
teur. Chérissons  les  mortels  aveugles  parce  qu'ils  sont  nosff.\  ;  aidons- 
les  dans  leurs  besoins,  parce  que  c'est  soulager  l'humanité.  Donnons  des 
conseils  parce  que  par  là  nous  pourrons  tirer  du  joug  de  1  erreur. 

Aimons  nous  parce  que  l'Eternel  nous  fit  pour   nous   rendre  heureux 
Rendons-nous    la   vie    douce  par    une    conduite   agréable    et    honnête. 
Sachons  enfin  passer  dans  le  bonheur  le  peu  de  temps  que  nous  avons  à 
demeurer  sur  terre  et  restons  vertueux  au  milieu  des  crimes  et  des  désor- 
dres où  l'univers  est  plongé.  Amen. 

section  v. 
Clôture  de  la  Loge. 

Après  que  le  discours  est  fini,  le  vén.*.  demande  si  les  ff.*.  ont  quel- 
ques propositions  à  faire  et,  après  que  les  propositions  ont  été  faites  et 
discutées,  il  fait  la  clôture  de  la  L.\  par  la  demande  suivante  qu  il 
adresse  au  f.\  1er  surv.\ 

D.  —  Quel  est  le  terme  de  nos  travaux  ? 

R.  —  Le  moment  où  la  nécessité  nous  oblige  de  nous  rendre  où  nos 
affaires  nous  appellent  ayant  toujours  la  vertu  pour  guide. 


APPENDICES 


537 


Après  cette  réponse,  le  vén.*.  dit  : 

Que  ne  pouvons-nous,  o  mes  chers  ft\\,  rester  perpétuellement  ensem- 
ble et  jouir  des  douceurs  attachées  à  une  amitié  pure  cl  désintéressée. 

Mais  nos  besoins,  notre  travail  particulier,  les  devoirs  de  nos  états, 
nous  forcent  à  nous  séparer.  .Jurons  nous  tous,  de  nouveau,  les  mêmes 
sentiments  ;  promettons  nous  de  nous  rester  inviolablemcnt  attachés,  et 
que  le  baiser  fraternel  que  je  vous  invite  à  me  faire  parvenir  soit  le 
gagé  et  la  marque  assurée  de  la  fidélité  de  nos  engagements.  Amen. 
Amen.  Amen. 

VII 

PATENTES    DE    CONSTITUTION    D'UNE   LOGE   PAR    LA    G.'.  L.\ 

A  la  gloire  du  grand  architecte  de  l'Univers,  et  sous  le  bon  plaisir  de 
S.  A.  S.  Monseigneur  le  comte  de  Clermont,  prince  du  sang,  très  illustre 
et  très  respectable  grand  maître  des  L.\  régulières  de   France  et  autres. 

Ce  jourd'hui  21  novembre  175G,  heures  de  midi  plein. 

Nous  maîtres  des  L.\  régulières  soussignés  de  l'ordre  respectable  de 
la  Franche-Maçonnerie.  Au  réquisitoire  du  vén  '.  frère  Baillot,  aussi 
maître  de  L.'.  Nous  nous  serions  transportés  et  assemblés  à  la  L.\ 
Saint-Jean,  situé  à  l'Orient  de  Paris,  où  étant,  il  nous  aurait  commu- 
niqué que  plusieurs  frères,  tous  bons  maçons  de  la  ville  de  Lyon, 
s'étant  unis  en  nombre  compétent,  désireraient  pour  s'unir  à  nous  plus 
étroitement,  par  les  liens  précieux  de  la  fraternité,  d'être  formés  et  cons- 
titués enL.'.  régulière  et  suffragante  de  la  grande  L.'.  de  Paris,  dite  de 
France  ;  desquels  frères  à  nous  proposés  avons  été  assurés  et  certifiés 
par  ledit  frère  Baillot  qu'ils  étaient  dignes  et  capables  d'exercer  les  lois 
et  règlements  tant  généraux  que  particuliers  de  la  Franche  Maçonnerie, 
et  en  outre  que  laditte  L.\  sera  soumise  et  se  soumettra  à  l'avenir  et 
généralement  aux  règlements  faits  et  à  faire  par  la  grande  L.'.  de  Paris, 
dite  de  France,  comme  en  faisant  corps,  à  quoi  nous  maîtres  de  L.".  régu- 
lières, ouï  le  bon  rapport  à  nous  fait  par  ledit  frère  Baillot,  avons  par 
ces  présentes,  constitué  et  constituons  une  L.  .  régulière  pour  et  dans 
la  ville  de  Lyon  être  établie  à  perpétuité,  laquelle  aura  pour  titre  et 
nom  la  Parfaite  Amitié  et  pour  maître  de  ladite  L.".  avons  pareillement 
constitué  et  constituons  le  frère  Jean-Baptiste  Willermoz  ;  pour  pre- 
mier surveillant,  le  frère  Claude  Veulty  ;  et  pour  second  surveillant,  le 
frère  François  Claudy,  et  enjoignons  à  tous  les  susdits  frères,  tant 
maître  qu'officiers  de  laditte  L.-.,  de  se  conformer  à  tout  ce  qui  tendra 
au  bien  de  notre  ordre  ;  d'jr  garder  et  faire  garder  et  observer  très 
exactement  la  décence,  la  sagesse,  la  concorde  et  l'union  qui  doit  régner 
dans  les  nobles  cœurs  des  maçons  et  tout  ce  que  dessus  étant  exacte- 
ment  suivi  et   exécuté  conformément  à  notre  zèle. 

Si  mandons  et  enjoignons  à  tous  bons  maçons  tant  de  laditte  ville  de 
Lyon  que  tout  autre,  de  reconnaître  la  présente  L.-.  pour  régulière  et 
suffragante  de  la  G.\  L.'.  de  France  comme  en  faisant  corps,  en  foy  de 
quoy  nous  lui  avons  délivré  ces  présentes  pour  luy  servir  de  titre, 
valoir  et  demeurer  laditte  L.  .  perpétuellement  établie  et  installée  en 
laditte  ville  de  Lyon  et  icelles  signées  et  délivrées  par  nous  maîtres  de 
L.'.  à  l'Orient  de  Paris  ledit  jour  et  an  que  dessus. 


538  LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 

VIII 

VÎHTUS    DEDIT    ARDENS.    DIPLOME    DE    MAITRE    .IACOBITK 

Les  ténèbres  ne   lont    point  comprise. 
Pro  amore  Populi         A..L.  0.         Chariias  nos  docet. 

D'un  lieu  éclairé  où  règne  le  silence,  la  paix  et  la  concorde,  l'an 
de  la  lumière  5757,  de  notre  calcul  ordinaire  le  9  avril  1757,  joie, 
salut  et  prospérité  aux  très  vénérables  frères  qui  liront  ces  pré- 
sentes. 

Nous  les  maîtres,  inspecteurs  et  ouvriers  de  la  Respectable  L.'. 
de  Saint- Jean,  écossaise  anglaise,  sous  le  titre  des  Enfants  de  la 
Sagesse  et  Concorde  revêtue)  de  tous  les  honneurs  et  authorités 
par  notre  cher  frère  le  grand  maître,  le  prince  Charles  Edouard 
Stuard,  régulièrement  assemblée  par  le  nombre  mystérieux, 

Attestons  et  affirmons  à  toutes  les  personnes  éclairées  répandues 
sur  la  surface  de  la  terre  qu'en  conséquence  du  zèle  et  équité  et 
droiture  que  nous  a  montré  notre  cher  frère  le  sieur  Targe  natif  de 
Paris,  âgé  de  18  ans,  dont  la  'signature  est  ci-jointe  ne  varietur  et 
l'ayant  reconnu  pour  apprenti,  compagnon  et  maître,  l'avons 
décoré  des  grades  éminans  d'Elu,  Ecossais  Trinitaire  François  et  la 
maîtrise  du  Parfait  Ecossais  Anglais,  lui  ayant  sacré  l'œil  à  la 
manière  accoutumée  et  ce,  comme  une  récompense  de  notre  ordre 
royal  due  à  son  mérite  particulier  exactitude  et  équité  pour  ce, 
prions  les  très  respectables  L.\  qui  verronts  ces  présentes  de  le 
reconnaître  pour  bon  maçon  et  de  lui  décerner  les  honneurs  que 
ses  pénibles  travaux  lui  onts  acquis.  A  ces  causes,  la  Très  Respecta- 
ble L.*.  assemblée  lui  a  fait  dresser  le  présent  certificat  pour 
être  une  marque  vivante  durable  et  éternelle  de  notre  inaltérable 
amitié  et  pour  qu'il  soit  aidé,  consolé  et  assisté  s'il  tombait  dans 
quelques  périls,  dangers  ou  indigence  conformément  à  nos  sacrés 
engagements,  statuts  et  obligations  indispensables  et  lavons  fait 
signer  de  nos  principaux  officiers  et  scellé  de  notre  grand  sceau  et 
petit  sceau  de  notre  Ordre  Royal. 

Fait  passé  et  délivré  en  notre  très  respectable  L.". 

D'IIumainbourg,  vén.-.  de  la  présente  L.'.  Ecossaise  et  Anglaise. 
—  Itéguiemme,  ex-maître  substitut  A.  S.  P.  Chev.  de  l'Orient  et  de 
Rose-Croix.  —  Genieusse-Vilmarceaux,  1er  surv.  —  Grossard, 
Chev.'.  d'orient.  —  Targe. 


APPENDICES  539 


IX 

HIÉROGLYPHES  MAÇONNIQUES. 

Hiéroglyphes  en  usage  en  Angleterre. 


A 

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Anciens  hiéroglyphes 

en  usage 

en  Hollande 

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540  LA    FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 

Nombres.  Se  forment  par  additions. 
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APPENDICES  541 

Hiéroglyphes  en  usage  dans  la  Stricte  Observance. 
l«r  Degré. 


A 

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Ces  hiéroglyphes,  peu  différents  de  ceux  adoptés  en   1804  par  le  G.  0., 

étaient  en  usage  dans  les  loges  jacobites  dès  1765.  C'est  le 

type  anglais  moins  le  W. 

Hiéroglyphes  en  usage  dans  la  Stricte  Observance. 
2e  Degré. 


A 

B 

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Variante  des 

chevaliers 

de    l'aigle    souverain  de 

Rose  Croix. 

542 


LA   FRANC-MAÇONNERIE   EN    FRANCE 


Hiéroglyphes  en  usage  dans  la  Stricte  Observance. 


A 

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Anciens  hiéroglyphes  en  usage  en  France  avant  1804. 
A  B  C  D  E  F 


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APPENDICES  543 


Hiéroglyphes  en  ussge  dans  la  Maçonnerie  symbolique. 

G.  0.  1804. 


A 

B 

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D 

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Hiéroglyphes  en  usage  aux  chapitres  G.  0.  1804. 


A 

B 

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D 

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544 


LA    FRANC-MAÇONNERIE    EN    FRANCE 


Hiéroglyphes  en  usage  par  les  chevaliers  Kadosch. 

A  B  C  D  E  F 

70  2  3  12  15  20 


G 

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33 

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85 

86 

90 

91 

94 

95 

Hiéroglyphes  en  usage  par  les  chefs  du  Tabernacle. 


A 

A 

B 

A 

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D 

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APPENDICES 


545 


Hiéroglyphes  en  usage  par  les  Roses-Croix  de  Hérodom 
de  Kilwining. 


A 

0 


B 

1 


C 
2 


D 
3 


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LA    FRANC-MAÇONNERIE. —    ].    I. 


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24 

35 


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BIBLIOTHECA 


546 


LA   FRANC-MACONNERIE    EN    FRANCE 


Hiéroglyphes  en  usage  par  les  Roses-Croix  ou  Chevaliers   de 
l'Aigle  blanc  et  noir. 


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Hiéroglyphes  en  usage  par  les  Grands  Inspecteurs  Inquisiteurs 


Commandeurs. 

A 

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C 

D 

E 

F 

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0 

Anciens  hiéroglyphes  des  chevaliers  Ecossais 


APPENDICES  547 


Hiéroglyphes  en  usage  dans  le  rite  Ecossais 
philosophique  1783. 


A 

B 

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C 

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Hiéroglyphes  en  usage  à  la  réception  d'un  33e  Ecossais 
et  par  les  Sublimes  Princes  du  Royal  Secret. 

A  B  C  D  E 

j/       m       =n       yi       P 

F  G  H  I  I 

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TABLE  DES  MATIERES 


Préface vu 

Avertissement xxvn 

CHAPITRE  PREMIER 

LES    PRÉCURSEURS 

Le  problème.  —  Les  sources  des  doctrines  maçonniques.  —  Les 
penseurs:  les  alchimistes  —  La  pierre  philosophale.  —  L'Al- 
caest,  la  Palingénésie  et  l'Homunculus.  —  Les  principaux 
alchimistes  ;  leurs  protecteurs  et  leurs  adversaires.  —  Les 
kabbalistes  :  Raymond  Lulle  ;  Thomas  Morus  ;  Paracelse  ;  les 
Socins  ;  Andréa  ;  Robert  Fludd  ;  le  chancelier  Bacon  ;  Pierre 
Bayle  ;  Swedenborg  ;  Willermoz 1 

CHAPITRE  II 

LA    PÉRIODE    DE    TRANSITION 

La  f.*.-m.\  corporative.  —   Les  m: çons  anglais.  —  Lee  statuts. 

—  Les  landmarks  —  La  f.*.-m'.'  jacobite.  —  Les  Roses  Croix. 

—  Ahsmole.    —    Wren.    —   Desaguliers.  —  Ramsay.    —    Les 
hauts  dignitaires  de  la  f.*.-m.\  jacobite 44 

CHAPITRE  III 
l'organisation  primitive  :  SON  évolution 

Les  obligations  d'un  f.\-m.\  —  Les  ordonnances  de  1720.  — 
L'égalité  dans    les  loges.  —  L'égalité  philosophique  et  sociale. 

—  Le  vote.  —  La  définition  de  la  f.  '.-m.\  d'après  les  initiés  : 
Findel,  Ragon,  Jouaust,  Daruty,  Oswald  Wirth 69 

CHAPITRE  IV 

chari.es  radclyffe,  comte  de  derwentvvater,  le  prétendant 
charles-édouard 

Les  ancêtres.  —  Les  deux  frères.  —  Les  premières  loges  en 
France.  —  Le  Grand  Maître.  —  Charles- Edouard  Stuart.  — 
Culloden.  —  Le  chapitre  d'Arras.  —  Vincennes.  —  La  fin 
d'une  race. —  Les  persécuteurs  et  les  martyrs.  —  L'échafaud  de 
Tower- Hill.   —   Les  descendants 109 

33" 


550  TABLE  DES  MATIÈRES 

CHAPITRE  V 

LES  DÉBUTS  DE  LA  F.'. -M.'.  EN  FRANCE 

Les  maîtres  de  loges.  —  Le  recrutement.  —  Les  loges  de  Paris 
de  1726  à  1771.  —  Statuts  particuliers.  —  Les  grands  maîtres 
français  ;  le  duc  d  Antin,  le  comte  de  Clermont.  —  La  G.*.  L.'. 
anglaise  de  France.  —  La  G.-.  L.\  de  France.  —  Les  sub- 
stituts :  Baur,  Lacorne  et  Chaillon  de  Jorville.  —  Beauchaine. 

—  La   patente  d'Etienne   Morin.   —    Les    frères   ennemis.  — 

La  papauté  et  la   f.'.-m." 152 

CHAPITRE  VI 
l'idée  maçonnique  et  les  grades 

Le  travail  de  loge.  —  L'habileté  de  la  nature.  —  Les  dupes.  — 
Les  jésuites.  —  Les  chefs  secrets.  —  Le  symbolisme.  —  Les 
cérémonies  initiatiques.  —  Retour  à  l'alchimie  et  à  la  kabbale 

—  Les  grades    —  Les  Roses-Croix   —  Les  Réaux-Croix. —  Le 
chevalier  Kadoch 197 

CHAPITRE  VII 

LE   POUVOIR  ROYAL  ET  LA  F. -M.    —   LES    SCHISMES. 

L'attitude  du  pouvoir.  —  Louis  XV  était-il  f.-m  ?  —  Le  G.\0.\ 
de  Bouillon  —  La  vieille. Bru  —  La  M.  .  L.\  Ecossaise  de 
Marseille.  —  Le  chapitre  de  Clermont.  —  Martines  de  Pas- 
qually  et  les  Elus  Cohens.  —  Saint  Jean  de  Jérusalem  et  les 
Empereurs  d  Orient  et  d  Occident.  —  La  maçonnerie  de  perfec- 
tion. —  Les  Chevaliers  d'Orient.  —  Le  baron  de  Tschoudy.  — 
Perneti  et  les  Illuminés  d'Avignon.  —  Chatanier  et  la  Nou- 
velle Jérusalem  des  illuminés  théosophes.  —  La  décadence  de 
la  maçonnerie 232 

CHAPITRE  VIII 

LES    PETITS    SECRETS    DE    LA   F.'.-M.*. 

Leurs  causes  et  leur  but.  —  Les  locaux  :  les  tenues  privées. 
La  Grande  Loge.  —  Le  Grand  Orient  ;  ses  pérégrinations.  —  Les 
locaux  parisiens.  —  Les  faux  noms  des  loges.  —  Les  hiéro- 
gh'phes.  —  Les  ères  maçonniques.  —  Les  mots  secrets.  —  Les 
signatures.  —  Le  langage  conventionnel 261 

CHAPITRE  IX 

PROFILS    MAÇONNIQUES 

La  manie  égalitaire  ;  ses  conséquences.  —  Le  cabaretier  maître 
de  loge.  —  Le  robin.  —  Le  bourgeois.    ---    L'homme  à  talent. 

—  L'officier.  —  Le    parlementaire.    —  Le  noble.    —  Puisieux. 

—  Procope.  —  St-Germain.  —  Le  Breton.  —  Bacon  de  la  Che- 
valerie   —  Stroganoff.  —  Savalète  de  Lange 2P1 


TABLE    DES    MATIÈRES  551 


ÉTAT  DES  LOGES  EXISTANT  EN  FRANCE  EN  1771. 

I.  —  Loges  de  Paris 357 

II.  —  Loges  de  province 389 

III    —  Loges  militaires 489 

APPENDICES 

I.  —  Manuscrit  maçonnique  anglais  de  1693  en  la  possession 

de  la  York  Logde  n°  236 505 

II.  —  Loges  françaises  à  Londres 510 

III    —  L'état-major  de  la  f.\-m.\  jacobite  en  1760 511 

IV.  —  Les  Roses-Croix  jacohites 512 

V.  —  Protocole 520 

VI.  —  Grade  de  l'initié  dans  les  profonds  m3rstères 527 

VII.  —  Patentes  de  constitution  d'une  loge  par    la  G.'.  L.'.     .  537 

VIII.  —  Virtus  dédit  ardais,  diplôme  de  maître  jacobite.  .     .     .  538 

IX.  —  Hiéroglyphes  maçonniques 539 


La  Bibliothèque 

Université  d'Ottawa 

Échéance 


The  Library 

University  of  Ottawa 

Dote  due 


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